Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Je me réjouis que nous soyons réunis aujourd'hui ici, au Ministère du Travail.
Depuis plus d'une décennie nous sommes entrés dans un monde nouveau. Les changements ont été brutaux, ils placent chacun d'entre nous face à un double défi :
* Un défi économique d'abord : dans une compétition internationale de plus en plus vive, nous devons donner les moyens à nos entreprises d'investir dans de bonnes conditions, de se positionner sur les marchés les plus porteurs, d'être à la pointe de l'innovation.
* Un défi social ensuite : les Français ont compris qu'ils devraient changer plus fréquemment de travail ou d'activité et que les entreprises avaient besoin de davantage de souplesse dans leur recrutement et dans leur organisation. Mais ils réclament deux contreparties légitimes :
La première contrepartie, c'est un parcours professionnel dynamisé et sécurisé. Nous ne devons pas attendre que le salarié rencontre des difficultés avant d'intervenir :
* Tout au long de la vie, chacun aura accès à un certain nombre de droits en matière d'orientation, de formation, de conseil.
* Ces droits ne seront plus fonction de l'ancienneté, mais de la réalité de la situation professionnelle de chacun.
* Ils seront équilibrés par des devoirs : la recherche active d'un emploi, l'obligation d'accepter l'emploi convenable qui aurait été proposé.
La deuxième contrepartie, c'est une meilleure récompense de l'effort :
* L'économie de marché, ce sont les résultats des entreprises, mais ce sont aussi les fruits du travail des salariés.
* Pour que les Français restent fiers de leurs entreprises, pour qu'ils leur apportent leurs compétences et leur motivation, ils doivent être associés plus directement aux résultats.
En nous engageant dans cette voie, nous serons le premier grand pays européen à tirer toutes les leçons des changements du marché du travail en offrant une prise en charge personnalisée des situations de chacun. C'est un défi majeur. Nous devons le relever ensemble, en nous soumettant à une exigence de résultat.
La réunion d'aujourd'hui représente une étape importante :
Je m'étais engagé le 6 octobre dernier à recevoir l'ensemble des partenaires sociaux, après la journée de manifestations du 4 octobre dernier.
Les entretiens que j'ai eus avec vous ont été riches d'enseignements :
* Vous m'avez fait part de vos réflexions et de vos suggestions sur les sujets que je vous avais proposés : la sécurisation des parcours professionnels, l'amélioration du pouvoir d'achat, les inégalités sur le marché du travail.
* Vous avez également abordé d'autres sujets qui vous préoccupent : les problèmes spécifiques posés aux artisans et aux PME, la situation particulière de la fonction publique ou encore la sécurité sociale, alors que nous venons d'adopter le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Je vous ai écouté avec beaucoup d'attention : je veux tirer aujourd'hui avec vous les leçons de nos concertations et vous faire un certain nombre de propositions concrètes.
1. Ma première proposition est de construire avec vous un véritable parcours professionnel sécurisé pour chacun de nos concitoyens
Partons d'un constat : le marché de l'emploi a profondément évolué, en France comme à l'étranger.
Le modèle des années 1960 ou 1970 était marqué par une entrée rapide dans la vie active, des emplois à temps plein, et des carrières qui se déroulaient souvent sur le même poste et dans la même entreprise tout au long de la vie professionnelle.
Aujourd'hui, les trajectoires professionnelles sont de plus en plus discontinues : chaque année, près d'un tiers des salariés français change de situation professionnelle.
De plus en plus de personnes sont confrontées au chômage au moins une fois au cours de leur carrière professionnelle.
La multiplication des contrats courts et de certains stages accentue le sentiment d'insécurité.
Tous les salariés ne sont pas touchés de la même façon : les jeunes et les salariés les moins qualifiés sont les plus exposés. Au bout de vingt ans, les salariés les plus qualifiés sont quatre fois plus nombreux à travailler dans la même entreprise que celle où ils ont débuté leur carrière.
Nous devons trouver une réponse à cette évolution du marché du travail, dans la fidélité aux principes fondateurs de notre modèle social : cette réponse, c'est le parcours professionnel sécurisé. Pour cela, je veux avancer dans trois directions :
D'abord, et c'est ma première direction, nous devons offrir à tous les jeunes un accompagnement personnalisé vers l'emploi :
Nous sommes l'un des pays d'Europe où la transition entre la sortie du système éducatif et l'entrée sur le marché de l'emploi est la plus longue et la plus difficile : la France est a le taux d'activité le plus bas pour les moins de 25 ans.
Nous avons déjà commencé à remédier à ce défaut grâce au développement de l'alternance :
* Nous avons mis sur pied ensemble le contrat de professionnalisation, qui sera renforcé dans le projet de loi pour l'égalité des chances qui vient de vous être présenté.
* J'ai décidé de créer l'apprentissage junior dès 14 ans, qui attirera de nouvelles catégories de jeunes vers cette voie d'excellence. L'apprentissage junior sera un choix volontaire. Les jeunes qui s'engageront dans cette voie pourront acquérir le socle de connaissances nécessaires. Dans tous les cas, leur choix sera réversible puisqu'ils pourront à tout moment réintégrer un établissement scolaire. Nous organiserons les passerelles nécessaires.
Il nous reste maintenant trois défis majeurs à relever :
D'abord l'orientation : j'ai décidé la mise en place d'un service public de l'orientation, qui permettra à chacun de mieux connaître les filières dans lesquelles il s'engage.
Tous les jeunes auront accès à un portail de l'orientation pour choisir les formations qui leur conviennent le mieux et qui leur offrent les meilleurs débouchés professionnels.
Ils pourront également bénéficier dans chaque université d'un service des stages et de l'emploi, qui sera ouvert aux élèves de l'enseignement secondaire comme aux étudiants.
Un délégué interministériel sera nommé dans les prochains jours afin de coordonner ce grand chantier, auquel vous serez bien sûr associés : le service public de l'orientation devra être opérationnel au 1er septembre 2006.
Deuxième défi : la garantie des droits des jeunes dans l'entreprise.
Nous devons lutter contre les discriminations à l'embauche.
Nous allons également développer et mieux encadrer la pratique des stages : ils sont un moyen utile de prendre un premier contact avec les réalités de l'entreprise, mais ils ne doivent pas servir de substitut à l'emploi d'appoint. La rédaction d'une charte des stages a été lancée à ma demande par Gilles de ROBIEN : je souhaite qu'elle soit approuvée après concertation et en tout état de cause avant la fin des cours de l'année universitaire. Etablie sur une base de bonnes pratiques, son application sera évaluée après une année.
Troisième défi : l'accompagnement des jeunes vers l'emploi.
Chaque jeune doit savoir à quel organisme s'adresser en fonction de son niveau de qualification et de formation : missions locales, point d'accueil et d'information pour l'orientation ou ANPE.
Les dispositifs existants doivent être mieux coordonnés et plus faciles d'accès : je pense en particulier au CIVIS, au contrat de professionnalisation ou encore au contrat jeune en entreprise. Ce sont des outils efficaces, mais que les jeunes ne connaissent pas suffisamment ou qu'ils ont du mal à obtenir.
Pour nous assurer de l'état d'avancement de nos travaux, je vous propose d'élaborer ensemble un plan d'action concerté pour les jeunes avant le 1er juin.
Je demande à Jean-Louis BORLOO et à Gérard LARCHER d'ouvrir dans les toutes prochaines semaines une concertation avec vous pour construire ce plan.
Notre responsabilité, c'est de mieux orienter les jeunes vers les métiers d'avenir et vers les métiers en tension qui demandent de la main d'?uvre.
Deuxième direction pour bâtir un parcours professionnel sécurisé : offrir à tous les salariés qui connaissent le chômage les moyens de retrouver un emploi dans les meilleures conditions
Cela suppose d'abord de garantir une bonne assurance chômage :
L'Etat suit avec attention les négociations en cours sur la nouvelle convention, qu'il s'agisse du régime général ou des annexes relatives aux artistes et techniciens du spectacle. Demain se tient une importante négociation entre partenaires sociaux. Je souhaite qu'elle débouche sur un accord responsable et favorable à l'emploi.
Cet accord doit répondre aux problèmes posés, mais il ne peut pas se traduire par un transfert de dépenses vers l'Etat.
S'agissant de la question particulière des artistes et des techniciens, le Gouvernement mène une politique active pour la professionnalisation du secteur et l'adaptation des conventions collectives. Je souhaite que la renégociation des annexes 8 et 10 aboutisse favorablement. Dans ce cadre, l'Etat continuera à prendre sa part avec la mise en place d'un dispositif social et professionnel de solidarité prenant le relais du fonds transitoire. Gérard LARCHER et Renaud DONNEDIEU de VABRES sont à la disposition des partenaires sociaux pour leur apporter leur soutien, dans le strict respect du paritarisme.
Les rapprochements opérationnels entre les ASSEDIC et les agences locales pour l'emploi devront être mis en ?uvre dès que l'accord sur le régime d'assurance chômage aura été conclu et agréé. Ils devront permettre la mise en place à la fin de l'année 2006 au plus tard de guichets, de dossiers et d'un système d'information uniques.
Tous ces efforts nous permettront de parvenir à un accompagnement personnalisé des chômeurs par le service public de l'emploi. En matière de chômage, il faut une action rapide et ciblée :
Au 1er janvier 2006, tous les nouveaux demandeurs d'emploi pourront bénéficier d'entretiens mensuels à partir du quatrième mois de chômage.
Nous allons également refonder l'accompagnement personnalisé des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion et des autres minima sociaux en liaison avec les conseils généraux.
Nous pouvons aussi nous appuyer sur la convention de reclassement personnalisé, qui est appelée à court terme à devenir un élément essentiel de la sécurisation des parcours.
A titre d'exemple, je donne mon accord à des expérimentations dans 6 bassins d'emploi en difficulté d'un contrat de transition professionnelle pour les licenciés économiques d'entreprises de moins de 300 salariés, en accord avec les partenaires sociaux.
Vous connaissez ma conviction : sur l'emploi, tout n'a pas été tenté. Nous devons sans cesse prendre des initiatives nouvelles, en prenant le soin de les expérimenter et de les évaluer avec votre concours. Au premier trimestre 2007, nous aurons tiré un premier bilan des contrats de transition professionnelle et nous verrons avec vous s'il faut ou non étendre ce dispositif.
Enfin je soutiens la création d'un observatoire des métiers, qui aura pour mission d'identifier les métiers et les branches dans lesquelles les entreprises manquent de main-d'?uvre ou pourraient en manquer demain.
Dans ce cadre, nous pourrons aborder la question de l'attractivité des branches et des métiers.
Je vous propose que nous nous donnions trois mois pour mettre en place ce nouvel instrument.
La troisième direction dans laquelle nous devons travailler, c'est la formation tout au long de la vie
Elle constitue la meilleure réponse aux changements du marché de l'emploi et aux besoins de développement professionnel des salariés.
Nous avons une base solide, l'accord national interprofessionnel sur la formation tout au long de la vie que vous avez négocié en 2003 et dont les conclusions ont été reprises dans la loi de 2004.
Pour aller plus loin, j'ai demandé à Jean-Louis BORLOO et Gérard LARCHER de dresser avec vous, au cours du premier trimestre 2006, un bilan partagé de l'application des différents dispositifs légaux et conventionnels.
Au vu de ce bilan, nous tirerons les conclusions qui s'imposent pour améliorer la législation et la rendre plus effective.
Notre objectif commun devrait être de passer d'un droit individuel à la formation à un droit universel pour tous les actifs et tout au long de la vie. La vraie égalité des chances, c'est d'être formé pour affronter les évolutions du marché du travail tout au long de sa vie professionnelle. L'Etat prendra toute sa place dans ce projet qui relève de la solidarité nationale :
Je souhaite mettre en oeuvre un droit universel à la formation d'une durée d'un an, pour tous ceux qui n'auraient pas eu la possibilité de poursuivre leurs études au-delà de 16 ans et qui auraient déjà eu une expérience professionnelle d'au moins deux ans.
Nous pourrions ouvrir ce droit dès la rentrée 2006 à tous les jeunes qui auraient choisi de s'engager dans la voie de l'apprentissage junior puis dans la vie professionnelle. Il s'agira d'une première expérimentation. Nous verrons ensuite comment étendre progressivement le dispositif aux autres publics.
Nous devons ensuite nous appuyer sur la validation des acquis de l'expérience (VAE) pour les salariés et pour les demandeurs d'emploi.
Je vous propose trois choses : D'abord tripler le nombre de bénéficiaires : ils seront 60.000 à la rentrée 2006 contre 20.000 à la rentrée 2005. Ensuite mieux coordonner le dispositif en confiant le pilotage de la VAE à la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle du ministère du travail. Enfin simplifier et raccourcir les processus d'obtention des diplômes.
Je souhaite que l'ensemble des salariés ait accès à la VAE : nous allons travailler en particulier avec l'ANPE et l'AFPA sur certains publics cibles, comme les seniors chômeurs de longue durée.
2. La deuxième attente des Français à laquelle nous devons répondre, c'est l'amélioration du pouvoir d'achat. Il faut que les Français puissent toucher les dividendes de leur travail.
Mon gouvernement a déjà pris un certain nombre de mesures pour y répondre.
D'abord la bataille pour l'emploi, qui est aussi une bataille pour le pouvoir d'achat des Français : 130 000 personnes qui ont retrouvé un travail depuis le mois de juin, ce sont autant de Français qui ont retrouvé un salaire et qui soutiennent donc la consommation et la croissance. Nous avons aussi fait un effort pour aider les Français les plus modestes à faire face à l'augmentation de leurs dépenses quotidiennes.
J'ai annoncé que la prime de Noël serait versée cette année encore aux titulaires du RMI et de l'allocation de solidarité spécifique. J'ai également décidé d'instaurer une aide à la cuve pour faire face à la croissance du coût du pétrole
J'ai élargi l'accès aux prêts à taux zéro et établi pour le début de l'année prochaine un indice plus favorable aux locataires. La revalorisation de 1,8 % de l'aide personnalisée au logement, l'APL, à compter du 1er septembre dernier a été publiée jeudi dernier au Journal Officiel.
Le gouvernement a décidé la création d'une série de primes de retour vers l'emploi pour les titulaires de minima sociaux, pour les jeunes qui reprennent un emploi dans les secteurs en tension. Cela représente plusieurs dizaines de millions d'euros.
La loi de financement de la sécurité sociale va permettre aux entreprises d'accorder, sans charges sociales ni fiscalité, un bonus à chaque salarié, dans la limite de 1000 euros, pourvu qu'un accord salarial ait été conclu dans la branche ou dans l'entreprise.
Enfin l'Etat va poursuivre ses efforts en direction des fonctionnaires, dans le cadre notamment des discussions ouvertes par Christian JACOB :
Il n'y a pas eu d'accord salarial dans la fonction publique depuis 1998. Je souhaite que nous sortions de cette situation qui n'est satisfaisante ni pour le Gouvernement ni pour les organisations syndicales ni pour les fonctionnaires eux-mêmes.
La réunion que Christian JACOB a tenue la semaine dernière est une étape dans une concertation de longue durée, compte tenu de la complexité des systèmes salariaux dans la fonction publique. Il reverra les organisations syndicales de la fonction publique en janvier et me rendra compte très précisément des progrès de la négociation, qui inclut trois volets : le social, les carrières et les rémunérations. J'ai bon espoir que des terrains d'entente seront trouvés au début de 2006.
Mais rien ne pourra se faire sans le dynamisme et l'engagement des entreprises. Elles doivent leur réussite aux hommes et aux femmes qui donnent le meilleur d'eux-mêmes.
J'ai donc demandé à Gérard LARCHER d'intensifier son action dans le cadre de votre commission afin de relancer et d'approfondir les négociations de branches en matière salariale :
De nombreux progrès ont été réalisés depuis plusieurs mois. Sur les 84 branches suivies, 28 ont déjà signé un accord, parfois dans des branches où les blocages étaient importants.
Ce n'est pas suffisant : je souhaite que les branches qui n'ont pas conclu d'accords le fassent avant le 15 mars, en s'interrogeant sur le lien entre le niveau des rémunérations et l'attractivité du métier. J'y serai particulièrement attentif.
Pour aller plus loin, j'ai demandé au Conseil d'Orientation pour l'Emploi présidé par Raymond SOUBIE de me remettre en février 2006 un rapport portant sur deux sujets :
- La juste utilisation et l'efficacité des aides publiques accordées aux entreprises.
- Les conditions à poser pour de nouveaux allègements de charges.
Sur la base de ce rapport, je m'engage à ouvrir une concertation avec les partenaires sociaux avec un objectif commun : défendre et promouvoir l'emploi et les salaires.
Nous devons avoir une approche globale des revenus du travail : il faut aussi s'intéresser aux compléments du salaire. Vous savez que dès le 1er janvier 2006, les entreprises pourront mettre à disposition de leurs salariés le chèque emploi service universel. Avec cet instrument, les comités d'entreprise disposent d'un outil d'amélioration du pouvoir d'achat et des conditions de vie des salariés qui est créateur d'emplois en France.
Nous devons avancer sur trois autres sujets :
Une meilleure prise en charge des coûts du transport des salariés par l'entreprise, d'abord. En mobilisant les outils fiscaux et sociaux, je souhaite que nous parvenions à concevoir une formule équilibrée prenant en compte prioritairement une participation au financement des abonnements de transport collectif, mais aussi des indemnités kilométriques. Cette « prime transport » va être inscrite à l'agenda de la négociation annuelle de 2006 dans les entreprises. Les modifications législatives nécessaires seront proposées par le gouvernement.
Deuxième sujet : la couverture complémentaire santé, afin que les salariés, notamment ceux des PME, ne soient pas pénalisés lorsqu'ils quittent leur entreprise. Sur ce sujet, je vous invite à ouvrir des discussions et à les conclure avant la fin du premier semestre 2006. Ici encore, l'Etat prendra sa part.
Enfin troisième sujet : le logement. Dans ce domaine, j'ai chargé Jean-Louis BORLOO de réunir dans les toutes prochaines semaines, dans le cadre du pacte national pour le logement, une table ronde afin de déterminer avec vous comment il est possible de mobiliser davantage encore les outils existants, au-delà des 80 000 logements sociaux supplémentaires financés en 2005.
Je veux développer l'intéressement, la participation, l'épargne salariale et l'actionnariat salarié dans notre pays.
Car la participation est une idée moderne, parfaitement adaptée à notre économie mondialisée :
- Elle facilite la redistribution des profits de la mondialisation vers la consommation des Français.
- Elle favorise l'implication des salariés dans la vie de l'entreprise.
- Enfin elle renforce le capital des entreprises françaises et représente donc un atout du patriotisme économique.
J'ai donc demandé à Thierry BRETON et Gérard LARCHER de préparer sous mon autorité un projet de loi qui sera concerté puis discuté au cours du premier semestre de l'année prochaine. Il permettra de refonder de manière globale la participation en France et de la stabiliser.
Il prévoira une incitation à la distribution d'actions gratuites pour tous les salariés par l'élargissement du régime de distribution gratuite et par l'extension de la déductibilité de l'impôt sur les sociétés pour l'ensemble des émissions au profit des salariés. Par ailleurs, la valeur des comptes épargne temps pourra être convertie pour alimenter l'actionnariat salarié. Sera ainsi institué un dividende du travail.
Pour les entreprises non cotées, l'incitation à la distribution d'actions s'accompagnera de mesures pour assurer la liquidité et l'échange des titres entre les salariés. Pour les entreprises publiques, une forme de participation des salariés pourra être imaginée telle que la distribution de titres participatifs ou de certificats d'investissement.
L'intéressement doit être la règle dans ces entreprises : il sera donc assoupli afin de pouvoir être négocié localement au niveau d'un établissement ou d'un projet précis de l'entreprise.
L'objectif, c'est que la participation et l'actionnariat salarié puissent se développer dans le plus grand nombre d'entreprises, notamment les PME. Je fonde de grands espoirs sur le dialogue avec les représentants des entreprises. Ensemble, nous déciderons des modalités de cette généralisation.
La participation financière et l'épargne salariale ne doivent pas être des substituts aux augmentations de salaires, mais doivent créer des rapports nouveaux dans la durée entre les salariés et l'entreprise. C'est pourquoi nous serons attentifs aux règles de déblocage, qui devront être fixées au sein même de l'entreprise par voie de négociation.
3. Enfin, comme l'a démontré la crise des banlieues, nous devons lutter davantage encore contre toutes les formes de discrimination et d'inégalité sur le marché du travail et dans les entreprises
C'est un combat que nous menons depuis plus de trois ans :
Je pense en particulier à la loi sur le handicap, dont d'importants aspects entreront en vigueur au 1er janvier prochain. Je pense au projet de loi sur l'égalité salariale entre les femmes et les hommes qui est discuté en ce moment même à l'Assemblée nationale.
Je pense à la création et au renforcement de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, et à la promotion de la charte de la diversité.
Sur la suggestion d'Azouz BEGAG, j'ai décidé que la grande cause de l'année 2006 serait l'égalité des chances.
Mais pour changer véritablement le regard et les mentalités nous avons besoin de la mobilisation de tous. Je me félicite donc des initiatives importantes que vous avez prises :
Tout d'abord l'ouverture, au cours du mois de décembre, de négociations sur la diversité dans l'entreprise. Il est important qu'elle débouche rapidement afin que les choses changent réellement dans l'entreprise pour les salariés qui souffrent aujourd'hui de discriminations. L'expérimentation du CV anonyme me paraît une piste intéressante. J'ai demandé aux chefs d'entreprises du secteur public et aux dirigeants d'établissements publics de négocier sans délai sur ce sujet avec leurs organisations syndicales.
Je me félicite également des conclusions intéressantes de la négociation sur l'emploi des seniors. Sur ce point, je voudrais vous confirmer que je m'engage à ce que votre accord, notamment le CDD seniors, soit retranscrit dans le droit du travail, sans en changer les modalités.
J'ai demandé à Gérard LARCHER de lancer dès vendredi prochain la concertation pour l'élaboration du plan national d'action pour l'emploi des seniors. Nous organiserons une conférence nationale pour l'emploi des seniors au début du mois de février qui permettra de tirer toutes les conclusions de cette concertation.
Le dialogue social et la négociation collective sont au c?ur de notre modèle républicain. C'est grâce à eux que de grandes réformes sociales ont été faites depuis plusieurs dizaines d'années. Je pense aux retraites, à l'assurance chômage, à la formation professionnelle. La loi de 2004 a permis d'en moderniser des aspects importants.
Pourtant certaines règles font aujourd'hui l'objet de critiques. Notre modèle social doit progresser sur plusieurs aspects.
Je pense notamment aux modalités de concertation entre les pouvoirs publics et les partenaires sociaux, voire avec la société civile, par exemple sur les enjeux économiques, industriels et de société
Je pense également à la représentativité syndicale, qui est un enjeu démocratique essentiel.
Je pense enfin aux instances de représentation dans les petites entreprises.
Je souhaite que nous modernisions notre modèle social. J'ai donc pris plusieurs décisions pour mener à bien ce chantier en 2006 :
J'ai demandé à Dominique CHERTIER de me faire d'ici la fin du mois de mars des propositions afin d'améliorer les modalités d'information et de concertation avec vous en amont de la décision publique.
J'ai confié à Raphaël HADAS-LEBEL, Président de la section sociale du Conseil d'Etat, le soin de définir les insuffisances des règles de représentativité et de financement actuelles et de proposer des scénarios d'évolution.
Il vous présentera ses conclusions avant le 15 mars.
Sur la base de ses conclusions et de l'analyse de votre commission, je saisirai le Conseil économique et social de cette question.
En accord avec M. Jacques DERMAGNE, président du Conseil économique et social, celui-ci conduira lui-même, dans une commission ad hoc, le projet d'avis. J'attache en effet la plus grande importance à m'appuyer sur le Conseil économique et social pour fixer le cadre d'une nouvelle démocratie sociale.
Mesdames, Messieurs,
Nous aspirons tous à construire des relations sociales modernes : notre pays en a besoin, les Français les réclament. C'est bien parce que j'estime qu'il y a une urgence sociale dans notre pays que nous devons ouvrir un certain nombre de chantiers en même temps, avec une exigence de résultat. N'attendons pas demain de nouvelles crises, attachons nous au contraire à moderniser aujourd'hui notre pacte social.
Nous avons besoin de davantage de dialogue et de concertation, plutôt que de conflits qui épuisent notre pays et nos concitoyens.
Nous devons passer d'un traitement global et indifférencié du chômage et de la formation à un traitement individualisé, qui prenne en compte la réalité des situations de chacun.
Nous avons tous ici de lourdes responsabilités : n'hésitons pas à les exercer. Etat, syndicats, entreprises, nous avons une exigence d'action pour répondre aux grands enjeux de notre pays. Ensemble, nous pouvons changer la donne au profit de tous les Français.
Je vous remercie.Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 14 décembre 2005
Je me réjouis que nous soyons réunis aujourd'hui ici, au Ministère du Travail.
Depuis plus d'une décennie nous sommes entrés dans un monde nouveau. Les changements ont été brutaux, ils placent chacun d'entre nous face à un double défi :
* Un défi économique d'abord : dans une compétition internationale de plus en plus vive, nous devons donner les moyens à nos entreprises d'investir dans de bonnes conditions, de se positionner sur les marchés les plus porteurs, d'être à la pointe de l'innovation.
* Un défi social ensuite : les Français ont compris qu'ils devraient changer plus fréquemment de travail ou d'activité et que les entreprises avaient besoin de davantage de souplesse dans leur recrutement et dans leur organisation. Mais ils réclament deux contreparties légitimes :
La première contrepartie, c'est un parcours professionnel dynamisé et sécurisé. Nous ne devons pas attendre que le salarié rencontre des difficultés avant d'intervenir :
* Tout au long de la vie, chacun aura accès à un certain nombre de droits en matière d'orientation, de formation, de conseil.
* Ces droits ne seront plus fonction de l'ancienneté, mais de la réalité de la situation professionnelle de chacun.
* Ils seront équilibrés par des devoirs : la recherche active d'un emploi, l'obligation d'accepter l'emploi convenable qui aurait été proposé.
La deuxième contrepartie, c'est une meilleure récompense de l'effort :
* L'économie de marché, ce sont les résultats des entreprises, mais ce sont aussi les fruits du travail des salariés.
* Pour que les Français restent fiers de leurs entreprises, pour qu'ils leur apportent leurs compétences et leur motivation, ils doivent être associés plus directement aux résultats.
En nous engageant dans cette voie, nous serons le premier grand pays européen à tirer toutes les leçons des changements du marché du travail en offrant une prise en charge personnalisée des situations de chacun. C'est un défi majeur. Nous devons le relever ensemble, en nous soumettant à une exigence de résultat.
La réunion d'aujourd'hui représente une étape importante :
Je m'étais engagé le 6 octobre dernier à recevoir l'ensemble des partenaires sociaux, après la journée de manifestations du 4 octobre dernier.
Les entretiens que j'ai eus avec vous ont été riches d'enseignements :
* Vous m'avez fait part de vos réflexions et de vos suggestions sur les sujets que je vous avais proposés : la sécurisation des parcours professionnels, l'amélioration du pouvoir d'achat, les inégalités sur le marché du travail.
* Vous avez également abordé d'autres sujets qui vous préoccupent : les problèmes spécifiques posés aux artisans et aux PME, la situation particulière de la fonction publique ou encore la sécurité sociale, alors que nous venons d'adopter le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Je vous ai écouté avec beaucoup d'attention : je veux tirer aujourd'hui avec vous les leçons de nos concertations et vous faire un certain nombre de propositions concrètes.
1. Ma première proposition est de construire avec vous un véritable parcours professionnel sécurisé pour chacun de nos concitoyens
Partons d'un constat : le marché de l'emploi a profondément évolué, en France comme à l'étranger.
Le modèle des années 1960 ou 1970 était marqué par une entrée rapide dans la vie active, des emplois à temps plein, et des carrières qui se déroulaient souvent sur le même poste et dans la même entreprise tout au long de la vie professionnelle.
Aujourd'hui, les trajectoires professionnelles sont de plus en plus discontinues : chaque année, près d'un tiers des salariés français change de situation professionnelle.
De plus en plus de personnes sont confrontées au chômage au moins une fois au cours de leur carrière professionnelle.
La multiplication des contrats courts et de certains stages accentue le sentiment d'insécurité.
Tous les salariés ne sont pas touchés de la même façon : les jeunes et les salariés les moins qualifiés sont les plus exposés. Au bout de vingt ans, les salariés les plus qualifiés sont quatre fois plus nombreux à travailler dans la même entreprise que celle où ils ont débuté leur carrière.
Nous devons trouver une réponse à cette évolution du marché du travail, dans la fidélité aux principes fondateurs de notre modèle social : cette réponse, c'est le parcours professionnel sécurisé. Pour cela, je veux avancer dans trois directions :
D'abord, et c'est ma première direction, nous devons offrir à tous les jeunes un accompagnement personnalisé vers l'emploi :
Nous sommes l'un des pays d'Europe où la transition entre la sortie du système éducatif et l'entrée sur le marché de l'emploi est la plus longue et la plus difficile : la France est a le taux d'activité le plus bas pour les moins de 25 ans.
Nous avons déjà commencé à remédier à ce défaut grâce au développement de l'alternance :
* Nous avons mis sur pied ensemble le contrat de professionnalisation, qui sera renforcé dans le projet de loi pour l'égalité des chances qui vient de vous être présenté.
* J'ai décidé de créer l'apprentissage junior dès 14 ans, qui attirera de nouvelles catégories de jeunes vers cette voie d'excellence. L'apprentissage junior sera un choix volontaire. Les jeunes qui s'engageront dans cette voie pourront acquérir le socle de connaissances nécessaires. Dans tous les cas, leur choix sera réversible puisqu'ils pourront à tout moment réintégrer un établissement scolaire. Nous organiserons les passerelles nécessaires.
Il nous reste maintenant trois défis majeurs à relever :
D'abord l'orientation : j'ai décidé la mise en place d'un service public de l'orientation, qui permettra à chacun de mieux connaître les filières dans lesquelles il s'engage.
Tous les jeunes auront accès à un portail de l'orientation pour choisir les formations qui leur conviennent le mieux et qui leur offrent les meilleurs débouchés professionnels.
Ils pourront également bénéficier dans chaque université d'un service des stages et de l'emploi, qui sera ouvert aux élèves de l'enseignement secondaire comme aux étudiants.
Un délégué interministériel sera nommé dans les prochains jours afin de coordonner ce grand chantier, auquel vous serez bien sûr associés : le service public de l'orientation devra être opérationnel au 1er septembre 2006.
Deuxième défi : la garantie des droits des jeunes dans l'entreprise.
Nous devons lutter contre les discriminations à l'embauche.
Nous allons également développer et mieux encadrer la pratique des stages : ils sont un moyen utile de prendre un premier contact avec les réalités de l'entreprise, mais ils ne doivent pas servir de substitut à l'emploi d'appoint. La rédaction d'une charte des stages a été lancée à ma demande par Gilles de ROBIEN : je souhaite qu'elle soit approuvée après concertation et en tout état de cause avant la fin des cours de l'année universitaire. Etablie sur une base de bonnes pratiques, son application sera évaluée après une année.
Troisième défi : l'accompagnement des jeunes vers l'emploi.
Chaque jeune doit savoir à quel organisme s'adresser en fonction de son niveau de qualification et de formation : missions locales, point d'accueil et d'information pour l'orientation ou ANPE.
Les dispositifs existants doivent être mieux coordonnés et plus faciles d'accès : je pense en particulier au CIVIS, au contrat de professionnalisation ou encore au contrat jeune en entreprise. Ce sont des outils efficaces, mais que les jeunes ne connaissent pas suffisamment ou qu'ils ont du mal à obtenir.
Pour nous assurer de l'état d'avancement de nos travaux, je vous propose d'élaborer ensemble un plan d'action concerté pour les jeunes avant le 1er juin.
Je demande à Jean-Louis BORLOO et à Gérard LARCHER d'ouvrir dans les toutes prochaines semaines une concertation avec vous pour construire ce plan.
Notre responsabilité, c'est de mieux orienter les jeunes vers les métiers d'avenir et vers les métiers en tension qui demandent de la main d'?uvre.
Deuxième direction pour bâtir un parcours professionnel sécurisé : offrir à tous les salariés qui connaissent le chômage les moyens de retrouver un emploi dans les meilleures conditions
Cela suppose d'abord de garantir une bonne assurance chômage :
L'Etat suit avec attention les négociations en cours sur la nouvelle convention, qu'il s'agisse du régime général ou des annexes relatives aux artistes et techniciens du spectacle. Demain se tient une importante négociation entre partenaires sociaux. Je souhaite qu'elle débouche sur un accord responsable et favorable à l'emploi.
Cet accord doit répondre aux problèmes posés, mais il ne peut pas se traduire par un transfert de dépenses vers l'Etat.
S'agissant de la question particulière des artistes et des techniciens, le Gouvernement mène une politique active pour la professionnalisation du secteur et l'adaptation des conventions collectives. Je souhaite que la renégociation des annexes 8 et 10 aboutisse favorablement. Dans ce cadre, l'Etat continuera à prendre sa part avec la mise en place d'un dispositif social et professionnel de solidarité prenant le relais du fonds transitoire. Gérard LARCHER et Renaud DONNEDIEU de VABRES sont à la disposition des partenaires sociaux pour leur apporter leur soutien, dans le strict respect du paritarisme.
Les rapprochements opérationnels entre les ASSEDIC et les agences locales pour l'emploi devront être mis en ?uvre dès que l'accord sur le régime d'assurance chômage aura été conclu et agréé. Ils devront permettre la mise en place à la fin de l'année 2006 au plus tard de guichets, de dossiers et d'un système d'information uniques.
Tous ces efforts nous permettront de parvenir à un accompagnement personnalisé des chômeurs par le service public de l'emploi. En matière de chômage, il faut une action rapide et ciblée :
Au 1er janvier 2006, tous les nouveaux demandeurs d'emploi pourront bénéficier d'entretiens mensuels à partir du quatrième mois de chômage.
Nous allons également refonder l'accompagnement personnalisé des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion et des autres minima sociaux en liaison avec les conseils généraux.
Nous pouvons aussi nous appuyer sur la convention de reclassement personnalisé, qui est appelée à court terme à devenir un élément essentiel de la sécurisation des parcours.
A titre d'exemple, je donne mon accord à des expérimentations dans 6 bassins d'emploi en difficulté d'un contrat de transition professionnelle pour les licenciés économiques d'entreprises de moins de 300 salariés, en accord avec les partenaires sociaux.
Vous connaissez ma conviction : sur l'emploi, tout n'a pas été tenté. Nous devons sans cesse prendre des initiatives nouvelles, en prenant le soin de les expérimenter et de les évaluer avec votre concours. Au premier trimestre 2007, nous aurons tiré un premier bilan des contrats de transition professionnelle et nous verrons avec vous s'il faut ou non étendre ce dispositif.
Enfin je soutiens la création d'un observatoire des métiers, qui aura pour mission d'identifier les métiers et les branches dans lesquelles les entreprises manquent de main-d'?uvre ou pourraient en manquer demain.
Dans ce cadre, nous pourrons aborder la question de l'attractivité des branches et des métiers.
Je vous propose que nous nous donnions trois mois pour mettre en place ce nouvel instrument.
La troisième direction dans laquelle nous devons travailler, c'est la formation tout au long de la vie
Elle constitue la meilleure réponse aux changements du marché de l'emploi et aux besoins de développement professionnel des salariés.
Nous avons une base solide, l'accord national interprofessionnel sur la formation tout au long de la vie que vous avez négocié en 2003 et dont les conclusions ont été reprises dans la loi de 2004.
Pour aller plus loin, j'ai demandé à Jean-Louis BORLOO et Gérard LARCHER de dresser avec vous, au cours du premier trimestre 2006, un bilan partagé de l'application des différents dispositifs légaux et conventionnels.
Au vu de ce bilan, nous tirerons les conclusions qui s'imposent pour améliorer la législation et la rendre plus effective.
Notre objectif commun devrait être de passer d'un droit individuel à la formation à un droit universel pour tous les actifs et tout au long de la vie. La vraie égalité des chances, c'est d'être formé pour affronter les évolutions du marché du travail tout au long de sa vie professionnelle. L'Etat prendra toute sa place dans ce projet qui relève de la solidarité nationale :
Je souhaite mettre en oeuvre un droit universel à la formation d'une durée d'un an, pour tous ceux qui n'auraient pas eu la possibilité de poursuivre leurs études au-delà de 16 ans et qui auraient déjà eu une expérience professionnelle d'au moins deux ans.
Nous pourrions ouvrir ce droit dès la rentrée 2006 à tous les jeunes qui auraient choisi de s'engager dans la voie de l'apprentissage junior puis dans la vie professionnelle. Il s'agira d'une première expérimentation. Nous verrons ensuite comment étendre progressivement le dispositif aux autres publics.
Nous devons ensuite nous appuyer sur la validation des acquis de l'expérience (VAE) pour les salariés et pour les demandeurs d'emploi.
Je vous propose trois choses : D'abord tripler le nombre de bénéficiaires : ils seront 60.000 à la rentrée 2006 contre 20.000 à la rentrée 2005. Ensuite mieux coordonner le dispositif en confiant le pilotage de la VAE à la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle du ministère du travail. Enfin simplifier et raccourcir les processus d'obtention des diplômes.
Je souhaite que l'ensemble des salariés ait accès à la VAE : nous allons travailler en particulier avec l'ANPE et l'AFPA sur certains publics cibles, comme les seniors chômeurs de longue durée.
2. La deuxième attente des Français à laquelle nous devons répondre, c'est l'amélioration du pouvoir d'achat. Il faut que les Français puissent toucher les dividendes de leur travail.
Mon gouvernement a déjà pris un certain nombre de mesures pour y répondre.
D'abord la bataille pour l'emploi, qui est aussi une bataille pour le pouvoir d'achat des Français : 130 000 personnes qui ont retrouvé un travail depuis le mois de juin, ce sont autant de Français qui ont retrouvé un salaire et qui soutiennent donc la consommation et la croissance. Nous avons aussi fait un effort pour aider les Français les plus modestes à faire face à l'augmentation de leurs dépenses quotidiennes.
J'ai annoncé que la prime de Noël serait versée cette année encore aux titulaires du RMI et de l'allocation de solidarité spécifique. J'ai également décidé d'instaurer une aide à la cuve pour faire face à la croissance du coût du pétrole
J'ai élargi l'accès aux prêts à taux zéro et établi pour le début de l'année prochaine un indice plus favorable aux locataires. La revalorisation de 1,8 % de l'aide personnalisée au logement, l'APL, à compter du 1er septembre dernier a été publiée jeudi dernier au Journal Officiel.
Le gouvernement a décidé la création d'une série de primes de retour vers l'emploi pour les titulaires de minima sociaux, pour les jeunes qui reprennent un emploi dans les secteurs en tension. Cela représente plusieurs dizaines de millions d'euros.
La loi de financement de la sécurité sociale va permettre aux entreprises d'accorder, sans charges sociales ni fiscalité, un bonus à chaque salarié, dans la limite de 1000 euros, pourvu qu'un accord salarial ait été conclu dans la branche ou dans l'entreprise.
Enfin l'Etat va poursuivre ses efforts en direction des fonctionnaires, dans le cadre notamment des discussions ouvertes par Christian JACOB :
Il n'y a pas eu d'accord salarial dans la fonction publique depuis 1998. Je souhaite que nous sortions de cette situation qui n'est satisfaisante ni pour le Gouvernement ni pour les organisations syndicales ni pour les fonctionnaires eux-mêmes.
La réunion que Christian JACOB a tenue la semaine dernière est une étape dans une concertation de longue durée, compte tenu de la complexité des systèmes salariaux dans la fonction publique. Il reverra les organisations syndicales de la fonction publique en janvier et me rendra compte très précisément des progrès de la négociation, qui inclut trois volets : le social, les carrières et les rémunérations. J'ai bon espoir que des terrains d'entente seront trouvés au début de 2006.
Mais rien ne pourra se faire sans le dynamisme et l'engagement des entreprises. Elles doivent leur réussite aux hommes et aux femmes qui donnent le meilleur d'eux-mêmes.
J'ai donc demandé à Gérard LARCHER d'intensifier son action dans le cadre de votre commission afin de relancer et d'approfondir les négociations de branches en matière salariale :
De nombreux progrès ont été réalisés depuis plusieurs mois. Sur les 84 branches suivies, 28 ont déjà signé un accord, parfois dans des branches où les blocages étaient importants.
Ce n'est pas suffisant : je souhaite que les branches qui n'ont pas conclu d'accords le fassent avant le 15 mars, en s'interrogeant sur le lien entre le niveau des rémunérations et l'attractivité du métier. J'y serai particulièrement attentif.
Pour aller plus loin, j'ai demandé au Conseil d'Orientation pour l'Emploi présidé par Raymond SOUBIE de me remettre en février 2006 un rapport portant sur deux sujets :
- La juste utilisation et l'efficacité des aides publiques accordées aux entreprises.
- Les conditions à poser pour de nouveaux allègements de charges.
Sur la base de ce rapport, je m'engage à ouvrir une concertation avec les partenaires sociaux avec un objectif commun : défendre et promouvoir l'emploi et les salaires.
Nous devons avoir une approche globale des revenus du travail : il faut aussi s'intéresser aux compléments du salaire. Vous savez que dès le 1er janvier 2006, les entreprises pourront mettre à disposition de leurs salariés le chèque emploi service universel. Avec cet instrument, les comités d'entreprise disposent d'un outil d'amélioration du pouvoir d'achat et des conditions de vie des salariés qui est créateur d'emplois en France.
Nous devons avancer sur trois autres sujets :
Une meilleure prise en charge des coûts du transport des salariés par l'entreprise, d'abord. En mobilisant les outils fiscaux et sociaux, je souhaite que nous parvenions à concevoir une formule équilibrée prenant en compte prioritairement une participation au financement des abonnements de transport collectif, mais aussi des indemnités kilométriques. Cette « prime transport » va être inscrite à l'agenda de la négociation annuelle de 2006 dans les entreprises. Les modifications législatives nécessaires seront proposées par le gouvernement.
Deuxième sujet : la couverture complémentaire santé, afin que les salariés, notamment ceux des PME, ne soient pas pénalisés lorsqu'ils quittent leur entreprise. Sur ce sujet, je vous invite à ouvrir des discussions et à les conclure avant la fin du premier semestre 2006. Ici encore, l'Etat prendra sa part.
Enfin troisième sujet : le logement. Dans ce domaine, j'ai chargé Jean-Louis BORLOO de réunir dans les toutes prochaines semaines, dans le cadre du pacte national pour le logement, une table ronde afin de déterminer avec vous comment il est possible de mobiliser davantage encore les outils existants, au-delà des 80 000 logements sociaux supplémentaires financés en 2005.
Je veux développer l'intéressement, la participation, l'épargne salariale et l'actionnariat salarié dans notre pays.
Car la participation est une idée moderne, parfaitement adaptée à notre économie mondialisée :
- Elle facilite la redistribution des profits de la mondialisation vers la consommation des Français.
- Elle favorise l'implication des salariés dans la vie de l'entreprise.
- Enfin elle renforce le capital des entreprises françaises et représente donc un atout du patriotisme économique.
J'ai donc demandé à Thierry BRETON et Gérard LARCHER de préparer sous mon autorité un projet de loi qui sera concerté puis discuté au cours du premier semestre de l'année prochaine. Il permettra de refonder de manière globale la participation en France et de la stabiliser.
Il prévoira une incitation à la distribution d'actions gratuites pour tous les salariés par l'élargissement du régime de distribution gratuite et par l'extension de la déductibilité de l'impôt sur les sociétés pour l'ensemble des émissions au profit des salariés. Par ailleurs, la valeur des comptes épargne temps pourra être convertie pour alimenter l'actionnariat salarié. Sera ainsi institué un dividende du travail.
Pour les entreprises non cotées, l'incitation à la distribution d'actions s'accompagnera de mesures pour assurer la liquidité et l'échange des titres entre les salariés. Pour les entreprises publiques, une forme de participation des salariés pourra être imaginée telle que la distribution de titres participatifs ou de certificats d'investissement.
L'intéressement doit être la règle dans ces entreprises : il sera donc assoupli afin de pouvoir être négocié localement au niveau d'un établissement ou d'un projet précis de l'entreprise.
L'objectif, c'est que la participation et l'actionnariat salarié puissent se développer dans le plus grand nombre d'entreprises, notamment les PME. Je fonde de grands espoirs sur le dialogue avec les représentants des entreprises. Ensemble, nous déciderons des modalités de cette généralisation.
La participation financière et l'épargne salariale ne doivent pas être des substituts aux augmentations de salaires, mais doivent créer des rapports nouveaux dans la durée entre les salariés et l'entreprise. C'est pourquoi nous serons attentifs aux règles de déblocage, qui devront être fixées au sein même de l'entreprise par voie de négociation.
3. Enfin, comme l'a démontré la crise des banlieues, nous devons lutter davantage encore contre toutes les formes de discrimination et d'inégalité sur le marché du travail et dans les entreprises
C'est un combat que nous menons depuis plus de trois ans :
Je pense en particulier à la loi sur le handicap, dont d'importants aspects entreront en vigueur au 1er janvier prochain. Je pense au projet de loi sur l'égalité salariale entre les femmes et les hommes qui est discuté en ce moment même à l'Assemblée nationale.
Je pense à la création et au renforcement de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, et à la promotion de la charte de la diversité.
Sur la suggestion d'Azouz BEGAG, j'ai décidé que la grande cause de l'année 2006 serait l'égalité des chances.
Mais pour changer véritablement le regard et les mentalités nous avons besoin de la mobilisation de tous. Je me félicite donc des initiatives importantes que vous avez prises :
Tout d'abord l'ouverture, au cours du mois de décembre, de négociations sur la diversité dans l'entreprise. Il est important qu'elle débouche rapidement afin que les choses changent réellement dans l'entreprise pour les salariés qui souffrent aujourd'hui de discriminations. L'expérimentation du CV anonyme me paraît une piste intéressante. J'ai demandé aux chefs d'entreprises du secteur public et aux dirigeants d'établissements publics de négocier sans délai sur ce sujet avec leurs organisations syndicales.
Je me félicite également des conclusions intéressantes de la négociation sur l'emploi des seniors. Sur ce point, je voudrais vous confirmer que je m'engage à ce que votre accord, notamment le CDD seniors, soit retranscrit dans le droit du travail, sans en changer les modalités.
J'ai demandé à Gérard LARCHER de lancer dès vendredi prochain la concertation pour l'élaboration du plan national d'action pour l'emploi des seniors. Nous organiserons une conférence nationale pour l'emploi des seniors au début du mois de février qui permettra de tirer toutes les conclusions de cette concertation.
Le dialogue social et la négociation collective sont au c?ur de notre modèle républicain. C'est grâce à eux que de grandes réformes sociales ont été faites depuis plusieurs dizaines d'années. Je pense aux retraites, à l'assurance chômage, à la formation professionnelle. La loi de 2004 a permis d'en moderniser des aspects importants.
Pourtant certaines règles font aujourd'hui l'objet de critiques. Notre modèle social doit progresser sur plusieurs aspects.
Je pense notamment aux modalités de concertation entre les pouvoirs publics et les partenaires sociaux, voire avec la société civile, par exemple sur les enjeux économiques, industriels et de société
Je pense également à la représentativité syndicale, qui est un enjeu démocratique essentiel.
Je pense enfin aux instances de représentation dans les petites entreprises.
Je souhaite que nous modernisions notre modèle social. J'ai donc pris plusieurs décisions pour mener à bien ce chantier en 2006 :
J'ai demandé à Dominique CHERTIER de me faire d'ici la fin du mois de mars des propositions afin d'améliorer les modalités d'information et de concertation avec vous en amont de la décision publique.
J'ai confié à Raphaël HADAS-LEBEL, Président de la section sociale du Conseil d'Etat, le soin de définir les insuffisances des règles de représentativité et de financement actuelles et de proposer des scénarios d'évolution.
Il vous présentera ses conclusions avant le 15 mars.
Sur la base de ses conclusions et de l'analyse de votre commission, je saisirai le Conseil économique et social de cette question.
En accord avec M. Jacques DERMAGNE, président du Conseil économique et social, celui-ci conduira lui-même, dans une commission ad hoc, le projet d'avis. J'attache en effet la plus grande importance à m'appuyer sur le Conseil économique et social pour fixer le cadre d'une nouvelle démocratie sociale.
Mesdames, Messieurs,
Nous aspirons tous à construire des relations sociales modernes : notre pays en a besoin, les Français les réclament. C'est bien parce que j'estime qu'il y a une urgence sociale dans notre pays que nous devons ouvrir un certain nombre de chantiers en même temps, avec une exigence de résultat. N'attendons pas demain de nouvelles crises, attachons nous au contraire à moderniser aujourd'hui notre pacte social.
Nous avons besoin de davantage de dialogue et de concertation, plutôt que de conflits qui épuisent notre pays et nos concitoyens.
Nous devons passer d'un traitement global et indifférencié du chômage et de la formation à un traitement individualisé, qui prenne en compte la réalité des situations de chacun.
Nous avons tous ici de lourdes responsabilités : n'hésitons pas à les exercer. Etat, syndicats, entreprises, nous avons une exigence d'action pour répondre aux grands enjeux de notre pays. Ensemble, nous pouvons changer la donne au profit de tous les Français.
Je vous remercie.Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 14 décembre 2005