Déclaration de M. Christian Poncelet, président du Sénat, sur la mission du Sénat pour représenter les collectivités locales et sur l'avenir de l'intercommunalité, Besançon le 27 janvier 2006.

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Circonstance : Ouverture des Etats généraux des élus locaux de Franche-Comté à Besançon (Doubs), le 27 janvier 2006

Texte intégral

Monsieur le président du conseil régional, cher Raymond FORNI,
Monsieur le maire de Besançon, cher Jean-Louis FOUSSERET,
Messieurs les présidents des conseils généraux, chers Gérard BAILLY, Yves KRATTINGER, Yves ACKERMANN et Claude JEANNEROT,
Monsieur le président de l'Association des maires de France, cher Jacques PÉLISSARD,
Monsieur le ministre, cher Jean-Pierre CHEVÈNEMENT,
Mesdames et Messieurs les parlementaires, chers collègues sénateurs et députés,
Monsieur le Préfet de région,
Mesdames et Messieurs les élus locaux,
Chers amis,
Permettez-moi de vous dire le plaisir qui est le mien de vous retrouver, aujourd'hui, dans cette belle ville de Besançon.
Permettez-moi aussi de vous remercier, vous, les élus locaux de Franche-Comté, d'avoir répondu à notre invitation.
Merci, pour votre participation active à la préparation de ces États généraux ! Près d'un tiers d'entre vous a, en effet, bien voulu répondre à la consultation que nous avons engagée auprès de vous. Pourtant, répondre à ce questionnaire n'était pas une sinécure ! Je vous prie de bien vouloir m'en excuser. Mais peut-on résumer les enjeux de l'intercommunalité à deux ou trois questions ? À l'évidence NON !
Merci, aussi, pour votre présence massive ! Car, beaucoup d'entre vous, élus du Territoire de Belfort, de la Haute-Saône, du Jura et même du Doubs, ont dû se lever tôt pour nous rejoindre ce matin, à Besançon. Soyez-en chaleureusement remerciés.
Merci à vous Raymond FORNI, merci à vous Jean-Louis FOUSSERET : vos propos m'ont fait chaud au coeur !
Un grand merci enfin à tous mes collègues sénateurs qui me font l'honneur de leur présence à mes côtés. Je veux témoigner à Michel DREYFUS-SCHMIDT toute mon amitié, lui adresser mes voeux de prompt rétablissement et lui dire combien nous sommes de tout coeur avec lui.
Mesdames et messieurs les élus locaux, ces dix-neuvièmes États généraux illustrent, une fois encore, l'ambition et la volonté du Sénat d'aller sur le terrain, à la rencontre et au contact de ceux qui font vivre leur territoire. Oui, le Sénat se décentralise pour mieux dialoguer avec vous, les élus locaux.
C'est tout le sens des États généraux des élus locaux que j'ai décidé d'organiser, en métropole et en outre-mer, dès mon élection à la Présidence du Sénat, en octobre 1998.
Ce véritable « tour de France » constitue une démarche institutionnelle qui s'inscrit pleinement dans la vocation constitutionnelle du Sénat, assemblée parlementaire à part entière, titulaire d'une mission supplémentaire et exigeante de représentation des collectivités territoriales.
Loin d'être des « grands messes » sans lendemain, ces États généraux constituent de véritables ateliers de réflexion au service de l'action publique. Ces rencontres oecuméniques ont, en effet, pour but de prendre « le pouls » des élus locaux, de recueillir leurs doléances et de formuler des propositions afin d'améliorer la gestion de proximité.
Je ne citerai que deux exemples de l'utilité de ces États généraux :
- Première illustration : la délimitation de la responsabilité pénale des élus locaux en matière de délits non intentionnels afin de juguler l'engagement de leur responsabilité.
Ce sont, en effet, les États généraux de Nord-Pas-de-Calais, tenus à Lille, en septembre 1999, en présence de Pierre MAUROY, qui ont largement inspiré la proposition de loi devenue la loi dite Fauchon du 10 juillet 2000.
- Seconde illustration : l'inscription dans le marbre de la Constitution de principes forts et protecteurs de l'autonomie locale.
Lors des États généraux des élus locaux de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, en juin 2001, nous avons dessiné, ensemble, les contours d'une véritable « République des territoires ».
Telle fut la raison d'être de la proposition de loi constitutionnelle que j'ai déposée, avec plusieurs de mes collègues, en juillet 2002 afin de « muscler » le principe de l'autonomie locale dans toutes ses dimensions.
Cette proposition, nourrie des réflexions issues du terrain, a largement inspiré et influencé la révision constitutionnelle de mars 2003.
Aujourd'hui, en accord avec vos sénateurs, ces États généraux des élus locaux de Franche-Comté seront consacrés au devenir de l'intercommunalité.
Mesdames, messieurs les élus locaux, mes chers amis, votre mobilisation exceptionnelle illustre, à l'évidence, l'intérêt que vous portez à l'intercommunalité. Une intercommunalité qui se trouve, aujourd'hui, à la croisée des chemins.
C'est avec la loi relative à l'administration territoriale de la République du 6 février 1992 puis celle relative à la simplification et au renforcement de l'intercommunalité du 12 juillet 1999, (-votre loi, cher Jean-Pierre CHEVÈNEMENT-), que l'intercommunalité a véritablement pris son envol.
Partisan avisé de l'intercommunalité, le Sénat a voté ce texte, non sans l'avoir auparavant rééquilibré. Pour le Sénat, le projet initial faisait, en effet, la part trop belle à « l'urbain » au détriment du monde rural. Ne l'oublions pas, le Sénat s'est battu en 1999 pour que notre pays, dans sa diversité, puisse prendre le train de la « révolution intercommunale ».
Aujourd'hui, l'intercommunalité est une réalité de notre paysage institutionnel. Un seul chiffre : 88% des communes sont d'ores et déjà regroupées au sein d'Établissements publics de coopération intercommunale. Je m'en réjouis !
Cet essor de l'intercommunalité n'est pas le fruit du hasard ! Il résulte d'une volonté politique forte et partagée de répondre à un double défi : d'une part, la nécessaire rationalisation de notre carte administrative et d'autre part, la mutualisation des moyens et des charges.
Au total, j'ai l'intime conviction que la dynamique intercommunale constitue un outil à la hauteur des enjeux et des espérances.
Cet avis, je le sais, c'est aussi un peu le vôtre. Ce consensus témoigne d'une évidence : l'intercommunalité est en train d'atteindre l'âge de raison.
C'est donc à l'aune de cette maturité que doivent être entendues, comprises et analysées les interrogations ou critiques parfois formulées à l'égard de l'intercommunalité.
A mon sens, toutes ces préoccupations méritent d'être mises à jour et soumises à l'épreuve du débat.
- Ainsi, à l'heure des premiers bilans, certains stigmatisent une forme de « dérive » de l'intercommunalité, notamment la hausse de la fiscalité ou l'existence de trop nombreux doublons.
- D'autres encore, considèrent que la réforme de la taxe professionnelle, adoptée en loi de finances pour 2006, pourrait constituer, à terme, une menace pour l'intercommunalité.
- D'autres enfin, estiment qu'il est temps de franchir un nouveau pallier, de passer un cap supplémentaire vers davantage de démocratie : il serait donc temps, pour eux, de procéder à l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires !
Mes chers amis, que l'on soit pour ou que l'on soit contre cette élection ; que l'on considère la somme de ces propos comme excessive et infondée ou juste et avérée, il est de notre devoir de responsable politique d'engager, sans délai et sans tabous, une réflexion sur l'intercommunalité de demain.
Telle est la raison d'être, ni plus, ni moins, de nos débats républicains aujourd'hui. Telle est notre feuille de route !
Mesdames et messieurs les élus locaux de Franche-Comté, je forme le voeu que ces États généraux permettent, une fois encore, d'engager le dialogue républicain et constructif que mérite cette problématique exaltante.
Je formule le souhait qu'ils contribuent à alimenter la réflexion du Sénat, la maison des collectivités locales, votre Maison.
Je souhaite, à toutes et à tous, une excellente matinée de travail.Source http://www.senat.fr, le 1 février 2006