Texte intégral
Le Conseil des ministres a adopté, il y a trois semaines, un programme d'action pour la prévention et la lutte contre les exclusions qui illustre la volonté de rupture du Gouvernement dans la réponse que nous souhaitons apporter aux situations de détresse que connaissent nos concitoyens les plus démunis et les plus vulnérables.
Ce programme a été bien reçu, les Français étant sensibles aux changements dans l'approche de ces questions et dans le niveau des moyens engagés : je vous rappelle que le Gouvernement a décidé de mobiliser, sur trois ans 51,4 milliards de francs, dont 38,3 milliards à la charge de l'État. Ceci est réellement sans précédent.
Cet engagement est absolument nécessaire : sans ces moyens, notamment financiers, de nombreuses personnes resteraient sur le bord de la route alors que la croissance repart, que la confiance revient et que le chômage a commencé à baisser.
Ce projet de loi n'est, je le rappelle, qu'un des éléments du programme d'action. Il sera d'ailleurs complété par d'autres textes très importants, sur l'accès au droit, sur l'amélioration des relations entre l'administration et le public ou sur l'accès à la prévention et aux soins, avec l'instauration d'une couverture maladie universelle et une protection complémentaire pour tous.
Le projet que nous examinons aujourd'hui a été élaboré à la suite d'une intense concertation, avec nos partenaires associatifs, avec les grands réseaux, les organisations syndicales et les partenaires institutionnels. Il s'appuie également sur les travaux qui ont été menés par le Conseil économique et social. Celui-ci a d'ailleurs réservé un accueil très favorable aux orientations que j'ai présentées devant la section sociale jeudi dernier.
Le projet reprend également certaines dispositions techniques élaborées par les gouvernements précédents, même si les orientations fondamentales qui ont été retenues et les moyens mis en oeuvre sont sans rapport avec ce qui a été préparé dans le passé, notamment dans le projet de loi de cohésion sociale.
Enfin, c'est un intense travail interministériel qui a permis d'aboutir aussi un projet de loi et je voudrais saluer ici la qualité du travail réalisé par les différents ministères.
Je souhaite vous présenter l'architecture générale et les principales dispositions du projet. Il traduit dans le droit la rupture que nous voulons engager par rapport à ce qui a été fait dans le passé, dans quatre directions :
- sortir le plus rapidement possible nos concitoyens qui traversent des moments difficiles d'une simple logique d'assistance ;
- garantir l'accès aux droits fondamentaux, par la mise en oeuvre de moyens adaptés, plus que par la création de nouveaux droits artificiels ;
- prévenir les exclusions et traiter les problèmes le plus en amont possible ;
- réagir avec efficacité, lorsque les autres réponses ont échoué, aux situations d'urgence.
Le projet de loi comprend trois titres et 82 articles.
L'article premier affirme de manière solennelle l'engagement de la nation et de toutes les politiques publiques dans la lutte contre les exclusions. L'objectif est de donner un réel accès aux droits qui existent déjà dans notre corpus juridique.
1. De l'accès aux droits
Le titre I du projet a pour objet d'améliorer les modalités d'accès aux droits fondamentaux.
I. en premier lieu, 14 articles sont consacrés à l'accès à l'emploi, pour donner une réalité à l'idée de parcours d'insertion.
Il est proposé d'offrir à chaque jeune éloigné de l'emploi un véritable parcours. Le programme TRACE (trajets d'accès à l'emploi) permettra de proposer à terme à 60 000 jeunes en difficulté un parcours d'insertion pouvant aller jusqu'à 18 mois, articulant, selon leur situation et les difficultés qu'ils rencontrent, des actions de bilan, de remobilisation, de mise en situation professionnelle et des situations de formation visant à l'acquisition des connaissances de base et d'une qualification professionnelle. Ce parcours donnera droit aux rémunérations prévues par les différents dispositifs. Il se conçoit donc dans un fort partenariat entre l'État et les Conseils régionaux.
Pour les adultes, le projet de loi met en oeuvre une logique donnant une réelle chance d'insertion sur la durée. Une réponse adaptée à la situation de chacun doit être construite. Le modèle du contrat de qualification ouverte aujourd'hui aux jeunes de moins de 26 ans mérite d'être étendu aux adultes demandeurs d'emplois faiblement qualifiés. Mis en oeuvre par une expérimentation en concertation étroite avec les partenaires sociaux, il fera l'objet d'un suivi et d'une évaluation susceptible d'ouvrir une négociation interprofessionnelle en vue de sa généralisation.
Les CES et les CEC sont également réformés : le dispositif est recentré sur les publics les plus en difficulté. Parallèlement, le CEC, qui offre une perspective d'insertion plus longue à ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi doit changer d'échelle. Les modalités de prise en charge par l'État de ces contrats seront modulés en fonction de la situation des personnes concernées.
Le secteur de l'insertion par l'économique sera conforté et dynamiser. Le cadre d'action des structures d'IE est clarifié : elles bénéficieront d'un véritable statut au sens du code du travail, ce qui manifeste la reconnaissance de l'importance de leur action pour les publics les plus difficiles. La mise en cohérence de l'ensemble des acteurs dans ce domaine sera assurée par les PLIE (plans locaux pour l'insertion et l'emploi).
Enfin, d'autres dispositions visent à élargir l'accès aux SIFE (stage d'insertion et de formation à l'emploi) ou à donner une ampleur particulière à la lutte contre l'illettrisme.
II. Le renforcement du droit au logement est le second axe du titre I. Il est complété par le volet préventif au sein du titre II.
Les 19 articles du projet de loi développent trois axes :
1. Le renforcement du droit au logement et la réforme de la loi Besson est le premier axe.
Plusieurs dispositions visent à rendre plus efficaces les plans départementaux pour le logement des personnes défavorisées. De même, les règles de l'intervention du fonds de solidarité logement sont harmonisées.
Enfin, le rôle des partenaires associatifs dans le domaine de la médiation dans la gestion locative est reconnu et encouragé, par l'exonération de la taxe d'habitation et du droit de bail ou par une aide forfaitaire aux associations pour chaque logement pris en charge.
2. Le développement d'une offre nouvelle de logements adaptés et le deuxième axe. Plusieurs mesures initiatives, notamment fiscales, sont proposés pour encourager la réalisation de logements destinés aux personnes défavorisées.
Une taxe sur les logements vacants depuis deux ans est créée dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants où le déséquilibre entre l'offre et la demande est particulièrement important. Le produit de cette taxe sera versé à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.
Enfin, la procédure permettant à l'Etat de réquisitionner certains logements appartenant à des personnes morales est modernisée.
3. L'amélioration des conditions d'accès au logement est le troisième axe : le dispositif vise notamment à renforcer la transparence et l'égalité des chances dans l'accès au logement social par un numéro d'enregistrement départemental unique et par la saisine d'une instance de médiation.
III. Le chapitre trois du projet aborde la prévention et l'accès aux soins.
L'essentiel en la matière passera par une réforme de la protection sociale afin d'assurer la continuité du droit à l'assurance-maladie tout au long de la vie et de garantir l'accès aux soins et à la prévention des personnes les plus modestes. Un projet de loi instituant une couverture maladie universelle, pour tous, à partir de l'âge de 16 ans et assurant une protection complémentaire sera présenté en même temps que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.
Le projet de loi d'orientation prévoit que des programmes régionaux d'accès à la prévention et aux droits seront élaborés. Ils comprendront des volets départementaux qui permettront une meilleure coordination des acteurs, le développement de réseaux de santé de proximité, l'amélioration de la lutte contre certaines pathologies et ayant un lien avec la précarité et un renforcement de la prévention auprès des plus jeunes, en maternelle notamment.
De plus, la mission sociale de l'hôpital est inscrite dans le code de la santé publique et des structures d'accueil adaptées pour les personnes en situation de précarité seront mises en place. L'État prendra en charge, en cas de nécessité, les consultations et les traitements qui leur seront offerts.
IV. Enfin, le chapitre 4 améliore les conditions d'exercice de la citoyenneté par le droit de vote et l'accès à l'aide juridictionnelle, grâce à la domiciliation des personnes sans domicile fixe auprès d'associations agréées.
2. De la prévention des exclusions
Le titre II marque la volonté du gouvernement d'engager une véritable politique préventive et de traiter les situations d'exclusion en amont, dans toutes leurs dimensions.
I. la loi sur le surendettement des particuliers sera renforcée potin tenir compte des phénomènes d'endettements passifs qui se sont développés depuis quelques années, sur plusieurs points :
- les garanties des débiteurs seront renforcées ;
- les procédures sont accélérées et rendues plus efficaces ;
- le minimum vital est préservé avec la définition d'un reste à vivre harmonisé sur l'ensemble du territoire ;
- les dettes peuvent être étalées sur huit ans au lieu de cinq ;
- un moratoire de trois ans pourra être déclaré avant une éventuelle réduction des dettes.
II. Le chapitre 2 du titre II a pour objet de réformer la procédure des saisies immobilières.
Les conditions de vente judiciaire des logements saisis sera modifiée pour éviter leur attribution à un prix bradé.
III. Le chapitre 3 présente un important volet préventif de la politique du logement.
Le premier aspect concerne la prévention des expulsions. La loi a pour objectif de mettre en oeuvre une logique préventive pour assurer, dans le respect des droits du propriétaire, une efficace protection des locataires de bonne foi. En particulier, le concours de la force publique ne sera accordé que si une note de relogement a été formulée. Plusieurs autres mesures préventives sont également proposées comme le versement de l'allocation de logement en tiers payant dans le parc social non conventionné.
Le second volet de ces dispositions est destiné à améliorer les conditions de vie de chacun pour donner une réalité au droit à l'habitat. Elles concernent notamment la lutte contre le saturnisme (article 64). Pour les bâtiments touchés par la plombémie, le préfet pourra provoquer la réalisation de travaux de rénovation et reloger les habitants jusqu'à la disparition de tout risque d'intoxication. De même, les mesures susceptibles d'être prises contre les marchands de sommeil sont renforcées et le statut du sous-locataire et des habitants d'hôtels meublés est consolidé.
IV. Le chapitre 4 du titre II comprend plusieurs dispositions en faveur des foyers les plus modestes.
Il est d'abord proposé d'indexer les minima sociaux (ASS et allocation d'insertion) sur les prix. De plus, un mécanisme d'intéressement à la reprise d'emploi analogue à celui qui existe pour le AMI est créé pour les bénéficiaires de l'allocation de parent isolé.
Le droit à une vie familiale normale pour les personnes les plus vulnérables et notamment pour les personnes accueillies dans les établissements spécialisés est protégé. La limitation des saisies pour les prestations familiales participe de la même logique.
Enfin, le principe du droit de chacun à obtenir une aide de la collectivité pour conserver un accès à l'eau, à l'électricité, au gaz et au téléphone est affirmé. Le droit à un compte bancaire est également assuré par une modification de la loi bancaire de 1984.
V. le projet de loi aborde avec le chapitre 5 un aspect important de la lutte contre les exclusions : le droit à l'égalité des chances par l'éducation et la culture.
La loi affirme que l'accès de tous à la culture, à la pratique sportive, aux vacances et aux loisirs constitue un objectif national.
De même la loi d'orientation sur l'éducation de 1989 est modifiée pour améliorer la garantie du droit à l'éducation, par la prise en compte des situations locales pour la répartition des moyens et par le rétablissement des bourses de collège.
Enfin, pour faciliter l'accès de tous aux pratiques culturelles, sportives et de loisirs, la loi autorise la modulation des tarifs des services publics facultatifs en fonction des ressources et de la composition du foyer.
3. Des institutions sociales.
Le titre III doit permettre de rendre plus efficaces les acteurs de cette politique.
En premier lieu, le statut de plusieurs types de structures est rénové. La formation des professions sociales est réformée, avec l'inscription dans un schéma national de l'intervention des établissements de formation. Leurs rapports avec l'État sont également clarifiés par la voix de la contractualisation.
De même, la réforme des institutions sociales et médico-sociales est engagée, par la consolidation des structures d'urgence et d'insertion sociale. Le champ d'application de la loi du 30 juin 1975 relatif aux institutions sociales et médico-sociales est notamment étendu à tout le secteur de l'urgence sociale et de l'insertion. Le statut des CFIRS est conforté et leurs missions élargies. Enfin, un dispositif de veille sociale chargé d'informer et d'orienter les personnes en difficulté est institué dans chaque département.
Un Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale est institué, pour éclairer les choix du Gouvernement et d'évaluer les politiques menées.
Ce projet de loi d'orientation n'est qu'un des éléments de l'action du gouvernement contre l'exclusion. Un texte de 82 articles ne peut résoudre toutes les difficultés et apporter des réponses à toutes les situations de détresse que connaissent beaucoup de nos concitoyens.
Mais il est de notre responsabilité de montrer que l'État et ses partenaires ont pris la mesure de cette situation intolérable dans un pays comme le nôtre. Avec le programme d'action qui représente un engagement de la collectivité à hauteur de 51,4 milliards de francs sur trois ans, dont 38,3 milliards pour l'État, la France se sera dotée, enfin, d'un dispositif à la hauteur du défi lancé à toutes les politiques publiques.
L'action du Gouvernement est tournée vers des objectifs clairs : rendre effectifs les droits fondamentaux et tout faire pour que la dignité des plus démunis ne soient pas bafouée. En un mot, au-delà de toute logique d'assistance, il s'agit de permettre à chacun de prendre sa vie en main.
Aussi, je terminerai par une citation, en forme d'hommage, du père Joseph Wrésinski, si dans l'avis du conseil économique et social du 28 février 1996, écrivait « le partenariat est une condition nécessaire au développement de toute population mais les plus démunies n'en ont pas la pratique ; il dépend de la volonté des élus et des principaux acteurs de la vie sociale de créer les conditions de leur participation. C'est dans la mesure où ceux-ci prendront les moyens de les informer, de recueillir leur avis et d'en tenir compte que les plus démunis pourront exercer leur citoyenneté, c'est-à-dire assumer leurs obligations et être reconnus comme sujets de droit, ce qui les amènerait à exercer par eux-mêmes les responsabilités qui leur incombent ».
Ce programme a été bien reçu, les Français étant sensibles aux changements dans l'approche de ces questions et dans le niveau des moyens engagés : je vous rappelle que le Gouvernement a décidé de mobiliser, sur trois ans 51,4 milliards de francs, dont 38,3 milliards à la charge de l'État. Ceci est réellement sans précédent.
Cet engagement est absolument nécessaire : sans ces moyens, notamment financiers, de nombreuses personnes resteraient sur le bord de la route alors que la croissance repart, que la confiance revient et que le chômage a commencé à baisser.
Ce projet de loi n'est, je le rappelle, qu'un des éléments du programme d'action. Il sera d'ailleurs complété par d'autres textes très importants, sur l'accès au droit, sur l'amélioration des relations entre l'administration et le public ou sur l'accès à la prévention et aux soins, avec l'instauration d'une couverture maladie universelle et une protection complémentaire pour tous.
Le projet que nous examinons aujourd'hui a été élaboré à la suite d'une intense concertation, avec nos partenaires associatifs, avec les grands réseaux, les organisations syndicales et les partenaires institutionnels. Il s'appuie également sur les travaux qui ont été menés par le Conseil économique et social. Celui-ci a d'ailleurs réservé un accueil très favorable aux orientations que j'ai présentées devant la section sociale jeudi dernier.
Le projet reprend également certaines dispositions techniques élaborées par les gouvernements précédents, même si les orientations fondamentales qui ont été retenues et les moyens mis en oeuvre sont sans rapport avec ce qui a été préparé dans le passé, notamment dans le projet de loi de cohésion sociale.
Enfin, c'est un intense travail interministériel qui a permis d'aboutir aussi un projet de loi et je voudrais saluer ici la qualité du travail réalisé par les différents ministères.
Je souhaite vous présenter l'architecture générale et les principales dispositions du projet. Il traduit dans le droit la rupture que nous voulons engager par rapport à ce qui a été fait dans le passé, dans quatre directions :
- sortir le plus rapidement possible nos concitoyens qui traversent des moments difficiles d'une simple logique d'assistance ;
- garantir l'accès aux droits fondamentaux, par la mise en oeuvre de moyens adaptés, plus que par la création de nouveaux droits artificiels ;
- prévenir les exclusions et traiter les problèmes le plus en amont possible ;
- réagir avec efficacité, lorsque les autres réponses ont échoué, aux situations d'urgence.
Le projet de loi comprend trois titres et 82 articles.
L'article premier affirme de manière solennelle l'engagement de la nation et de toutes les politiques publiques dans la lutte contre les exclusions. L'objectif est de donner un réel accès aux droits qui existent déjà dans notre corpus juridique.
1. De l'accès aux droits
Le titre I du projet a pour objet d'améliorer les modalités d'accès aux droits fondamentaux.
I. en premier lieu, 14 articles sont consacrés à l'accès à l'emploi, pour donner une réalité à l'idée de parcours d'insertion.
Il est proposé d'offrir à chaque jeune éloigné de l'emploi un véritable parcours. Le programme TRACE (trajets d'accès à l'emploi) permettra de proposer à terme à 60 000 jeunes en difficulté un parcours d'insertion pouvant aller jusqu'à 18 mois, articulant, selon leur situation et les difficultés qu'ils rencontrent, des actions de bilan, de remobilisation, de mise en situation professionnelle et des situations de formation visant à l'acquisition des connaissances de base et d'une qualification professionnelle. Ce parcours donnera droit aux rémunérations prévues par les différents dispositifs. Il se conçoit donc dans un fort partenariat entre l'État et les Conseils régionaux.
Pour les adultes, le projet de loi met en oeuvre une logique donnant une réelle chance d'insertion sur la durée. Une réponse adaptée à la situation de chacun doit être construite. Le modèle du contrat de qualification ouverte aujourd'hui aux jeunes de moins de 26 ans mérite d'être étendu aux adultes demandeurs d'emplois faiblement qualifiés. Mis en oeuvre par une expérimentation en concertation étroite avec les partenaires sociaux, il fera l'objet d'un suivi et d'une évaluation susceptible d'ouvrir une négociation interprofessionnelle en vue de sa généralisation.
Les CES et les CEC sont également réformés : le dispositif est recentré sur les publics les plus en difficulté. Parallèlement, le CEC, qui offre une perspective d'insertion plus longue à ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi doit changer d'échelle. Les modalités de prise en charge par l'État de ces contrats seront modulés en fonction de la situation des personnes concernées.
Le secteur de l'insertion par l'économique sera conforté et dynamiser. Le cadre d'action des structures d'IE est clarifié : elles bénéficieront d'un véritable statut au sens du code du travail, ce qui manifeste la reconnaissance de l'importance de leur action pour les publics les plus difficiles. La mise en cohérence de l'ensemble des acteurs dans ce domaine sera assurée par les PLIE (plans locaux pour l'insertion et l'emploi).
Enfin, d'autres dispositions visent à élargir l'accès aux SIFE (stage d'insertion et de formation à l'emploi) ou à donner une ampleur particulière à la lutte contre l'illettrisme.
II. Le renforcement du droit au logement est le second axe du titre I. Il est complété par le volet préventif au sein du titre II.
Les 19 articles du projet de loi développent trois axes :
1. Le renforcement du droit au logement et la réforme de la loi Besson est le premier axe.
Plusieurs dispositions visent à rendre plus efficaces les plans départementaux pour le logement des personnes défavorisées. De même, les règles de l'intervention du fonds de solidarité logement sont harmonisées.
Enfin, le rôle des partenaires associatifs dans le domaine de la médiation dans la gestion locative est reconnu et encouragé, par l'exonération de la taxe d'habitation et du droit de bail ou par une aide forfaitaire aux associations pour chaque logement pris en charge.
2. Le développement d'une offre nouvelle de logements adaptés et le deuxième axe. Plusieurs mesures initiatives, notamment fiscales, sont proposés pour encourager la réalisation de logements destinés aux personnes défavorisées.
Une taxe sur les logements vacants depuis deux ans est créée dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants où le déséquilibre entre l'offre et la demande est particulièrement important. Le produit de cette taxe sera versé à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.
Enfin, la procédure permettant à l'Etat de réquisitionner certains logements appartenant à des personnes morales est modernisée.
3. L'amélioration des conditions d'accès au logement est le troisième axe : le dispositif vise notamment à renforcer la transparence et l'égalité des chances dans l'accès au logement social par un numéro d'enregistrement départemental unique et par la saisine d'une instance de médiation.
III. Le chapitre trois du projet aborde la prévention et l'accès aux soins.
L'essentiel en la matière passera par une réforme de la protection sociale afin d'assurer la continuité du droit à l'assurance-maladie tout au long de la vie et de garantir l'accès aux soins et à la prévention des personnes les plus modestes. Un projet de loi instituant une couverture maladie universelle, pour tous, à partir de l'âge de 16 ans et assurant une protection complémentaire sera présenté en même temps que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.
Le projet de loi d'orientation prévoit que des programmes régionaux d'accès à la prévention et aux droits seront élaborés. Ils comprendront des volets départementaux qui permettront une meilleure coordination des acteurs, le développement de réseaux de santé de proximité, l'amélioration de la lutte contre certaines pathologies et ayant un lien avec la précarité et un renforcement de la prévention auprès des plus jeunes, en maternelle notamment.
De plus, la mission sociale de l'hôpital est inscrite dans le code de la santé publique et des structures d'accueil adaptées pour les personnes en situation de précarité seront mises en place. L'État prendra en charge, en cas de nécessité, les consultations et les traitements qui leur seront offerts.
IV. Enfin, le chapitre 4 améliore les conditions d'exercice de la citoyenneté par le droit de vote et l'accès à l'aide juridictionnelle, grâce à la domiciliation des personnes sans domicile fixe auprès d'associations agréées.
2. De la prévention des exclusions
Le titre II marque la volonté du gouvernement d'engager une véritable politique préventive et de traiter les situations d'exclusion en amont, dans toutes leurs dimensions.
I. la loi sur le surendettement des particuliers sera renforcée potin tenir compte des phénomènes d'endettements passifs qui se sont développés depuis quelques années, sur plusieurs points :
- les garanties des débiteurs seront renforcées ;
- les procédures sont accélérées et rendues plus efficaces ;
- le minimum vital est préservé avec la définition d'un reste à vivre harmonisé sur l'ensemble du territoire ;
- les dettes peuvent être étalées sur huit ans au lieu de cinq ;
- un moratoire de trois ans pourra être déclaré avant une éventuelle réduction des dettes.
II. Le chapitre 2 du titre II a pour objet de réformer la procédure des saisies immobilières.
Les conditions de vente judiciaire des logements saisis sera modifiée pour éviter leur attribution à un prix bradé.
III. Le chapitre 3 présente un important volet préventif de la politique du logement.
Le premier aspect concerne la prévention des expulsions. La loi a pour objectif de mettre en oeuvre une logique préventive pour assurer, dans le respect des droits du propriétaire, une efficace protection des locataires de bonne foi. En particulier, le concours de la force publique ne sera accordé que si une note de relogement a été formulée. Plusieurs autres mesures préventives sont également proposées comme le versement de l'allocation de logement en tiers payant dans le parc social non conventionné.
Le second volet de ces dispositions est destiné à améliorer les conditions de vie de chacun pour donner une réalité au droit à l'habitat. Elles concernent notamment la lutte contre le saturnisme (article 64). Pour les bâtiments touchés par la plombémie, le préfet pourra provoquer la réalisation de travaux de rénovation et reloger les habitants jusqu'à la disparition de tout risque d'intoxication. De même, les mesures susceptibles d'être prises contre les marchands de sommeil sont renforcées et le statut du sous-locataire et des habitants d'hôtels meublés est consolidé.
IV. Le chapitre 4 du titre II comprend plusieurs dispositions en faveur des foyers les plus modestes.
Il est d'abord proposé d'indexer les minima sociaux (ASS et allocation d'insertion) sur les prix. De plus, un mécanisme d'intéressement à la reprise d'emploi analogue à celui qui existe pour le AMI est créé pour les bénéficiaires de l'allocation de parent isolé.
Le droit à une vie familiale normale pour les personnes les plus vulnérables et notamment pour les personnes accueillies dans les établissements spécialisés est protégé. La limitation des saisies pour les prestations familiales participe de la même logique.
Enfin, le principe du droit de chacun à obtenir une aide de la collectivité pour conserver un accès à l'eau, à l'électricité, au gaz et au téléphone est affirmé. Le droit à un compte bancaire est également assuré par une modification de la loi bancaire de 1984.
V. le projet de loi aborde avec le chapitre 5 un aspect important de la lutte contre les exclusions : le droit à l'égalité des chances par l'éducation et la culture.
La loi affirme que l'accès de tous à la culture, à la pratique sportive, aux vacances et aux loisirs constitue un objectif national.
De même la loi d'orientation sur l'éducation de 1989 est modifiée pour améliorer la garantie du droit à l'éducation, par la prise en compte des situations locales pour la répartition des moyens et par le rétablissement des bourses de collège.
Enfin, pour faciliter l'accès de tous aux pratiques culturelles, sportives et de loisirs, la loi autorise la modulation des tarifs des services publics facultatifs en fonction des ressources et de la composition du foyer.
3. Des institutions sociales.
Le titre III doit permettre de rendre plus efficaces les acteurs de cette politique.
En premier lieu, le statut de plusieurs types de structures est rénové. La formation des professions sociales est réformée, avec l'inscription dans un schéma national de l'intervention des établissements de formation. Leurs rapports avec l'État sont également clarifiés par la voix de la contractualisation.
De même, la réforme des institutions sociales et médico-sociales est engagée, par la consolidation des structures d'urgence et d'insertion sociale. Le champ d'application de la loi du 30 juin 1975 relatif aux institutions sociales et médico-sociales est notamment étendu à tout le secteur de l'urgence sociale et de l'insertion. Le statut des CFIRS est conforté et leurs missions élargies. Enfin, un dispositif de veille sociale chargé d'informer et d'orienter les personnes en difficulté est institué dans chaque département.
Un Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale est institué, pour éclairer les choix du Gouvernement et d'évaluer les politiques menées.
Ce projet de loi d'orientation n'est qu'un des éléments de l'action du gouvernement contre l'exclusion. Un texte de 82 articles ne peut résoudre toutes les difficultés et apporter des réponses à toutes les situations de détresse que connaissent beaucoup de nos concitoyens.
Mais il est de notre responsabilité de montrer que l'État et ses partenaires ont pris la mesure de cette situation intolérable dans un pays comme le nôtre. Avec le programme d'action qui représente un engagement de la collectivité à hauteur de 51,4 milliards de francs sur trois ans, dont 38,3 milliards pour l'État, la France se sera dotée, enfin, d'un dispositif à la hauteur du défi lancé à toutes les politiques publiques.
L'action du Gouvernement est tournée vers des objectifs clairs : rendre effectifs les droits fondamentaux et tout faire pour que la dignité des plus démunis ne soient pas bafouée. En un mot, au-delà de toute logique d'assistance, il s'agit de permettre à chacun de prendre sa vie en main.
Aussi, je terminerai par une citation, en forme d'hommage, du père Joseph Wrésinski, si dans l'avis du conseil économique et social du 28 février 1996, écrivait « le partenariat est une condition nécessaire au développement de toute population mais les plus démunies n'en ont pas la pratique ; il dépend de la volonté des élus et des principaux acteurs de la vie sociale de créer les conditions de leur participation. C'est dans la mesure où ceux-ci prendront les moyens de les informer, de recueillir leur avis et d'en tenir compte que les plus démunis pourront exercer leur citoyenneté, c'est-à-dire assumer leurs obligations et être reconnus comme sujets de droit, ce qui les amènerait à exercer par eux-mêmes les responsabilités qui leur incombent ».