Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je suis particulièrement heureuse de me trouver à nouveau parmi vous.
Permettez moi avant tout de vous fêter collectivement un joyeux anniversaire puisque dans trois semaines, le 8 juin prochain, le Conseil national de l'Habitat aura un quart de siècle !
J'ai eu l'occasion, en septembre dernier, de m'exprimer sur la qualité et la richesse de vos rapports.
Je le redis aujourd'hui à la lecture des rapports remis en janvier dernier. Il s'agit des rapports « territorialisation des politiques du logement » ; « accession à la propriété » ; « mobilisation des terrains pour la construction » ; « Europe : enjeux pour le logement en 2008 ».
En septembre dernier, j'ai également eu l'occasion de vous faire part des ambitions du président de la République et du gouvernement, ambitions qui ont été rappelées lors du discours de Vandoeuvre-lès-Nancy en décembre dernier et lors du Conseil de modernisation des politiques publiques du 4 avril.
Il s'agit de :
- Développer l'offre de logement ;
- Garantir à tous l'accès à un logement décent ;
- Favoriser l'accession à la propriété.
Pour y parvenir, il faut remettre en mouvement l'ensemble de la chaîne du logement, de l'hébergement jusqu'à l'accession, et mobiliser tous les acteurs du logement.
De nombreuses mesures ont été prises et elles commencent à porter leurs fruits. Sans vouloir être exhaustive, je tiens à rappeler les actions suivantes :
En ce qui concerne le Droit au logement opposable, l'installation des commissions de médiation DALO s'est déroulée sans difficulté. Il ressort des premiers mois d'exercice que 75 % des demandes sont franciliennes et que parmi elles, une bonne moitié émanent de la seule ville de Paris.
Il faut aussi intervenir en amont de la procédure de recours du DALO, d'abord grâce à une lutte renforcée contre l'habitat indigne.
Les outils ont été créés par les deux ordonnances majeures du 15 décembre 2005 et du 11 janvier 2007 : ils doivent être mis en oeuvre.
J'ai en particulier demandé à tous les préfets, par voie de circulaire, le 14 novembre dernier, la mise en oeuvre d'un plan d'urgence contre les marchands de sommeil, axé sur les travaux d'office. Nous commençons à voir les effets de notre action avec la multiplication des condamnations de marchands de sommeil.
Il faut aussi intervenir en amont d'une manière plus globale, dans le cadre du « chantier national prioritaire 2008-2012 en faveur de l'offre d'hébergement et de l'accès au logement des sans-abris et des mal-logés », lancé en février par le Premier ministre sur la base des recommandations du députe PINTE.
En ce qui concerne l'accession à la propriété, je vous rappelle d'abord la déduction des intérêts d'emprunt pour l'habitation principale adoptée l'été dernier.
Au mois de décembre, conformément aux objectifs du Président de la République, j'ai signé avec l'Union sociale pour l'habitat, un accord permettant la mise en vente de 40 000 logements HLM à leurs occupants, chaque année. J'ai même dépassé cet objectif en signant un accord analogue avec les sociétés d'économie mixte concernant la mise en vente annuelle de 3 000 autres logements.
Avec le projet de primo-accession de « Ma maison pour 15 euros par jour », il est maintenant possible, pour une famille, comprenant un couple avec deux enfants ou plus, qui gagne de 1 500 à 2 000 Euros par mois, de construire la maison de ses rêves et se constituer un patrimoine à transmettre à ses enfants. Les premières ventes ont déjà eu lieu.
Enfin, en ce qui concerne le pouvoir d'achat, qui est au coeur du programme présidentiel, des réponses claires ont été apportées.
Les aides personnelles au logement ont été indexées sur l'indice de révision des loyers (IRL). Cette mesure a été adoptée avec la loi DALO en mars 2007. Elle a permis une revalorisation des barèmes des aides au logement de 2,76% au 1er janvier 2008.
Par ailleurs, avec la loi sur le pouvoir d'achat de février 2008, une mesure de modération des loyers a été mise en oeuvre en liant l'IRL à l'indice des prix à la consommation. Au 1er trimestre 2008, grâce à cette mesure, les loyers ont progressé de 1,8% sur un an, au lieu de 2,5% selon l'ancien mode de calcul.
En même temps, le dépôt de garantie a été réduit à un mois de loyer maximum.
Il s'agit aujourd'hui de ne pas relâcher l'effort et d'agir encore plus fortement pour améliorer les conditions de logement de l'ensemble des Français.
J'ai pensé, dans un premier temps, y parvenir sans avoir recours à un texte de loi.
Mais la France est un pays de droit écrit. C'est pourquoi j'ai décidé de préparer un projet de loi de mobilisation pour le logement.
Ce projet fait l'objet d'un travail interministériel et doit être prochainement soumis au Conseil d'Etat.
Mon objectif est de le transmettre au Parlement au début de l'été. En effet, la crise du logement reste forte malgré les efforts de tous les professionnels et des élus avec l'Etat pour développer l'offre de logements. Nous devons agir vite pour redonner à notre pays une capacité à loger tous les habitants dans bonnes conditions.
Le projet de loi n'est pas encore arbitré au niveau interministériel. Mais j'ai voulu, sans attendre, pour permettre le débat entre nous, vous faire part le plus précisément possible de mes orientations.
Le projet de loi s'organise autour de cinq axes principaux :
- * Relancer la construction de logements dans les territoires les plus déficitaires, et notamment en Ile-de-France
Le problème du déficit de production de logements, longtemps sous-estimé, a été pris à bras-le-corps depuis 6 ans.
L'année 2007 a été, à ce titre, significative :
435 000 logements ont été commencés contre 310 000 en 2000 ;
108 000 logements sociaux ont été financés contre 42 000 en 2000 ;
et parmi eux 14 000 PLAI , contre 5 000 en 2000.
Cet effort, notamment sur les territoires où les besoins se font le plus sentir, doit être soutenu et consolidé, alors que des signes de ralentissement de l'activité de construction apparaissent.
Un renforcement des outils d'urbanisme et de planification au service de la construction de logements sera intégré dans le cadre de cette loi.
Ainsi, il est envisagé de rendre les programmes locaux de l'habitat encore plus opérationnels. Ils pourraient ainsi comprendre un programme d'actions détaillé par commune ou par secteur géographique à l'intérieur même d'une commune.
Des mesures facilitant la densification en logement sont prévues : des dépassements des règles relatives à l'emprise au sol ou au coefficient d'occupation des sols seront rendus possibles.
D'autres dispositions prévoient de donner la possibilité au préfet d'exercer le droit de préemption urbain des communes en cas de constat de carence au titre de l'article 55 de la loi dite SRU.
Des actions visant à lutter contre la rétention foncière en zone dense sont également proposées.
Enfin, la loi ne supprimera pas les dispositifs d'aides à l'investissement locatif Robien et Borloo, car ils contribuent dans la chaîne du logement à détendre les marchés locatifs. Mais ces dispositifs seront recentrés, dans des conditions non encore définitivement fixées, sur les zones pour lesquelles ils ne conduisent pas à une surproduction par rapport au marché local.
- * Améliorer l'efficacité du logement social
Différentes mesures seront mises en oeuvre dans le cadre de la loi de mobilisation.
Elles se structurent autour de deux ambitions : réformer le secteur HLM et restaurer une mobilité dans le parc HLM qui, aujourd'hui, est fortement réduite.
La réforme du secteur HLM, à laquelle je souhaite faire adhérer l'ensemble des bailleurs sociaux , passera par l'élaboration de conventions d'utilité sociale qui seront dorénavant obligatoires. Elles se substitueront aux conventions globales de patrimoine. Des engagements relatifs à la politique patrimoniale, à la qualité du service rendu aux locataires, aux conditions d'occupation et de peuplement des logements et à la détermination des loyers y figureront.
Autre mesure essentielle, une péréquation entre organismes HLM sera instaurée. Un prélèvement sur les moyens financiers devenu surabondants de certains bailleurs largement inactifs sera créé au profit des bailleurs qui participent activement à l'effort de production et de rénovation de logements sociaux.
La loi fixera également les conditions nécessaires à l'amélioration de la mobilité dans le parc HLM.
Ainsi, une baisse de 10 % des plafonds de ressources est prévue afin de compenser leur hausse mécanique due au passage aux 35 heures.
Diverses mesures destinées à favoriser la mobilité au sein du parc HLM, notamment en oeuvrant pour réduire la sous-occupation, devraient figurer dans ce projet de loi.
- * Relancer l'accession populaire à la propriété
Je souhaite que l'accession populaire à la propriété soit également abordée dans le projet de loi grâce notamment à une extension des avantages fiscaux du PASS-foncier (à la base de la maison pour 15euros par jour), limités aujourd'hui à la maison individuelle, au logement collectif.
- * Renforcer la confiance entre bailleurs privés et locataires
La mise en oeuvre d'une assurance généralisée contre les risques d'impayés de loyers y participera. Une concertation, à la suite de la mission Baïetto-Besson - Beguin, est menée actuellement avec l'ensemble des acteurs concernés. Elle devrait aboutir à des propositions qui seront intégrées dans le projet de loi.
- * Assurer la cohésion sociale de nos villes
Le projet de loi prévoit également un programme pluriannuel de rénovation des quartiers anciens dégradés, complément indispensable de la nouvelle politique des banlieues, qui permettrait notamment de résorber efficacement l'habitat indigne, de remettre sur le marché des logements vacants, de faciliter l'application des mesures du Grenelle de l'environnement en matière de réglementation thermique dans le parc existant de logements. Cette rénovation à grande échelle ne doit pas conduire à ce qu'on appelle aujourd'hui « la gentryfication », mais, bien au contraire, à maintenir la mixité sociale dans ces quartiers en remplaçant les « logements sociaux de fait » par des logements sociaux de droit, publics ou privés.
Par ailleurs, conformément aux conclusions du Conseil de modernisation des politiques publiques, le 1 % Logement sera profondément réformé.
Il s'agira :
- de rénover le dispositif du 1% Logement et sa gouvernance afin de réorienter l'utilisation des crédits vers les priorités de la politique du logement et de limiter les coûts de gestion ;
- de déterminer un objectif d'économies et de dégager des marges de manoeuvre sur le budget de l'Etat pour financer les priorités de la politique gouvernementale en matière de logement.
Certaines dispositions seront reprises dans la loi de mobilisation pour le logement.
Tels sont les principaux éléments que je souhaitais porter à votre connaissance.
Vous aurez compris que l'ambition de ce projet est de rénover le cadre de notre politique du logement pour que chaque habitant de ce pays ait une réponse à son attente et d'améliorer concrètement la qualité de vie dans la ville.
Comme je vous l'ai dit tout d'abord, le projet de loi n'est pas définitivement arrêté. Je ne doute pas d'ailleurs que ce projet sera enrichi au cours des débats parlementaires.
Mais j'ai voulu aujourd'hui poursuivre ce que j'ai commencé avec vous à Lyon, il y a maintenant près de huit mois. La solution à notre crise du logement passe par notre mobilisation à tous. C'est donc ensemble que je souhaite que nous portions nos ambitions en faveur du logement.
C'est un vaste chantier qui est devant nous. Mais je sais pouvoir compter sur le Conseil National de l'Habitat pour m'aider à le conduire. Pour ma part, soyez certains qu'une année après ma prise de fonction, j'aborde ce défi avec un enthousiasme renouvelé.
Je vous remercie de votre attention et je suis prête à répondre à vos questions.
Source http://www.logement.gouv.fr, le 19 mai 2008