Déclaration de M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat à l'aménagement du territoire, sur les priorités de la présidence française de l'Union européenne, notamment en matière de développement régional, Bruxelles le 19 juin 2008

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Circonstance : Réunion de la 75ème session plénière du Comité des régions, à Bruxelles le 19 juin 2008

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je suis particulièrement heureux de me retrouver parmi vous à l'occasion de la 75ème session plénière du Comité des Régions.
Dès ma nomination par le Président de la République, j'ai inscrit au rang de mes priorités une visite auprès votre institution. Je me félicite qu'elle intervienne à la veille de la Présidence Française du Conseil de l'Union européenne et qu'elle soit pour moi l'occasion d'échanger avec vous, sur nos priorités dans le domaine de l'aménagement du territoire.
Je suis avant tout un élu local, je dirai même un élu du territoire. Ces territoires qu'il nous faut tout à la fois développer car il leur faut un avenir, préserver parce qu'ils sont le cadre de vie quotidien de nos populations et territoires dont il nous faut assurer la cohésion, car ils sont l'échelle de base de la solidarité et de la démocratie. Mon parcours m'a permis successivement d'être maire d'une petite commune du Sud de la France, Président d'une collectivité intermédiaire, le Conseil général du Var avant de devenir Maire de Toulon, ville de près de 170.000 Habitants.
Comme tout élu local, je suis d'une nature pragmatique. Mais j'ai quelques convictions qui fondent la ligne de mon action. La subsidiarité, tout d'abord, elle est à mon sens le principe fondateur de toute action publique. De fait, je ne suis pas un Ministre jacobin, et je ne souhaite pas que l'Union européenne s'empare de tous les sujets. En revanche, je sais que sa valeur ajoutée est indispensable sur certains sujets qui nous préoccupent. Je pense et j'aurais l'occasion d'y revenir, à la politique de cohésion mais aussi par exemple, à son action dans le domaine de l'environnement.
Je sais aussi que l'aménagement du territoire ne saurait être fondé uniquement sur des concepts aussi intelligents soient-ils. Aménager le territoire, pour moi cela signifie avant tout permettre à chacun de vivre dans des conditions satisfaisantes là où il le souhaite. C'est donc la question du bien vivre en Europe qui est au coeur de l'aménagement du territoire. Cela revient à permettre à chacun d'avoir accès à une formation, un emploi, à des hôpitaux, à des réseaux de transports performants et de télécommunications compétitifs.
Et c'est seulement si nous parvenons à cet équilibre à cette cohésion territoriale, sur l'ensemble du territoire européen que nous ferons de l'Union européenne la zone la plus compétitive du monde tout en ayant contribué dans le même temps à un mieux vivre ensemble des européens.
Monsieur Le Président,
Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi de vous dire un mot à propos des priorités stratégiques de notre Présidence qui débute le 1er juillet.
Le Président de la République et le Premier ministre ont fixé quatre grandes priorités.
La première concerne le changement climatique et la politique énergétique européenne. L'ambition de la Présidence française, conformément au mandat du Conseil européen de mars, est de parvenir à un accord avant la fin de l'année sur l'ensemble des textes du paquet énergie-climat.
A cet égard, je me réjouis, Monsieur le Président, que vous ayez vous-même considéré le changement climatique comme l'une de vos priorités pour votre mandat. Cette question est l'exemple même d'une problématique qui doit être traitée avec attention au niveau international mais dont les solutions concrètes de mise en oeuvre dépendent intimement des autorités locales.
La deuxième priorité concerne les migrations. L'Europe est soumise à des tensions démographiques et économiques importantes. Il est donc nécessaire de doter l'Union européenne des instruments nécessaires à une coopération plus étroite entre les Etats membres. C'est la raison pour laquelle la future Présidence française souhaite que des engagements politiques soient souscrits sous la forme, d'un Pacte européen pour l'immigration et l'asile qui sera adopté par le Conseil européen, en intégrant pleinement l'agenda législatif et les communications de la Commission.
Une fois encore, je me félicite de la similitude avec vos priorités. Dans toutes nos collectivités locales nous nous efforçons de mettre en oeuvre des politiques actives et innovantes permettant à chacun des citoyens qui y vivent de se sentir pleinement partie prenante d'une même communauté. C'est pour cela que je suivrai avec une attention toute particulière les échanges d'expériences que vous allez promouvoir sur ce sujet.
La troisième priorité concerne la sécurité et la défense européennes. L'Europe, puissance industrielle, agricole, économique et financière majeure, n'est pas aujourd'hui l'acteur global qu'elle devrait être dans le monde.
Ce renforcement de la Politique Européenne de Sécurité et de Défense sera mené en coopération avec l'OTAN. Il s'agit d'un engagement politique très fort du Président de la République
Enfin, la quatrième priorité portera sur la politique agricole commune. Il y a d'abord l'actualité particulière liée au bilan de santé de la PAC. Il y a ensuite le lancement d'une réflexion sur l'avenir de la PAC : il s'agit, dans le contexte mondial actuel marqué par l'aggravation des déséquilibres alimentaires et la flambée des prix de certains produits, de dégager des principes communs pour la PAC du futur : correction des déséquilibres alimentaires mondiaux, environnement, équilibre des territoires, qualité alimentaire
A ce propos, et comme nous partageons là aussi cette priorité, je voudrai vous dire que j'accorde une importance tout particulière, à ce sujet. En effet, nos territoires ruraux doivent bien entendu, entretenir une relation privilégiée avec l'activité agricole. Cependant, nous devons veiller à ce que le développement rural et tout particulièrement, les instruments financiers dont il dispose soient pleinement utilisés. Ainsi, l'innovation et le « développement polyactivités » des territoires ruraux sont au coeur de l'action de mon ministère.
Pour achever cette entrée en matière, je ne veux pas manquer d'évoquer l'Union pour la Méditerranée. Cette volonté du Président Sarkozy de nous rassembler autour de notre mer commune. Cette Union doit bien entendu, avant tout réunir des Etats. Mais, elle se construit sur la volonté de mener à bien des projets concrets dans des domaines différents. Pour ma part, je souhaite pleinement m'engager dans le développement urbain et l'aménagement du territoire. Je souhaite vivement qu'avec vous, nous puissions, ensemble, travailler sur cette problématique qui impliquera le développement de réseaux d'expertise et le renforcement des coopérations décentralisées entre collectivités des deux rives de la Méditerranée.
J'en viens maintenant, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs aux priorités en matière d'aménagement du territoire
Comme vous le savez, la France possède une longue expérience des politiques d'aménagement du territoire et de développement régional. Au plan communautaire, nous avons toujours soutenu une politique de cohésion économique et sociale ambitieuse orientée fortement et simultanément vers la convergence et la compétitivité des territoires. Nous ne souhaitons ni opposer, ni choisir entre des notions qui sont complémentaires.
La présidence française de l'Union européenne propose de faire porter la réflexion sur trois sujets majeurs.
* Le premier d'entre eux est le débat sur l'avenir de la politique de cohésion économique et sociale, facteur de compétitivité pour l'Europe
Partant du constat des progrès accomplis en termes de convergence économique et sociale des régions européennes, mais aussi de la persistance d'inégalités entre certains territoires et en leur sein, nous envisageons de poursuivre le débat sur l'avenir de la politique de cohésion économique et sociale.
Nous voulons le débat le plus large et le plus ouvert possible. Il nous conduira à réaliser un argumentaire objectif. Ce travail sera fondé sur une vision prospective. Cela devrait permettre aux décisions d'être prises en toute connaissance de cause, quand le temps de la négociation s'ouvrira. En un mot nous devons écarter la question budgétaire à ce stade de la réflexion.
Je suis persuadé que la politique de cohésion économique et sociale est un pilier de la politique de compétitivité. En d'autres termes, à un moment où la compétition entre les territoires est devenue mondiale, nous devons nous demander comment la politique régionale européenne peut contribuer à dynamiser chacun de nos territoires, chacun à sa manière et selon ses possibilités.
La politique régionale européenne est également un des éléments clés de la mise en oeuvre de la stratégie dite de Göteborg. Il est donc parfaitement naturel que nous ouvrions les pistes d'une meilleure synergie entre la politique de cohésion et la lutte contre le changement climatique.
Mesdames et messieurs permettez moi maintenant d'évoquer notre deuxième axe de réflexion.
* la cohésion territoriale
Le résultat du référendum Irlandais, dont il ne m'appartient pas de commenter les résultats, est de nature à retarder l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne et par là-même, la mise en oeuvre des principes qu'il porte. Mettons à profit ce temps ainsi donné, pour approfondir notre réflexion sur ce sujet.
La cohésion territoriale devrait devenir un élément important, voire structurant, de la politique de cohésion et plus largement, de l'action de l'Union européenne dans nos territoires.
Ceci suppose une vision rigoureuse et claire de ce qu'est la cohésion territoriale.
Le travail que vous menez actuellement sur ce sujet et qui débouchera sur un avis, nous sera particulièrement utile. De même que le Livre vert que la Commission européenne a prévu d'adopter dans les prochains mois.
Il me semble qu'il en va pour les territoires comme pour beaucoup d'autres sujets. On ne peut traiter de manière égale que des situations identiques. Les situations différentes doivent être traitées de manières différentes. Chacun d'entre nous sait bien qu'il n'y a pas grand-chose en commun entre une région ultrapériphérique, une zone périurbaine ou un territoire urbain. Nous devons tenir compte de ces différences dans les politiques européennes. En clair, la cohésion territoriale devrait signifier une meilleure prise en compte de la spécificité des territoires au niveau européen.
J'en viens maintenant au troisième et dernier axe de travail de notre Présidence
* l'Agenda territorial et la Charte du développement urbain
Conformément aux engagements pris aux Açores par la France, nous ferons le point sur la mise en oeuvre du premier programme d'action de l'Agenda territorial.
Nous débuterons aussi les travaux qui devront nous conduire à élaborer un référentiel commun pour la ville durable dans le cadre de la mise en oeuvre de la Charte.
Nous développerons les actions présentées précédemment dont l'objectif est de préparer les contributions qui seront présentées lors de la réunion informelle des ministres des 24, 25 et 26 novembre.
Comme je l'ai évoqué précédemment, nous proposons à nos partenaires de travailler notamment, sur les effets territoriaux de la PAC et en particulier, sur la stratégie de développement rural.
* Les réunions et les événements concernant ces sujets
Pour mener à bien ces divers travaux, nous avons prévu un ensemble de réunions et d'évènements :
- Les directeurs généraux en charge du développement urbain se réuniront le 28 octobre à Paris
- Les directeurs généraux de l'aménagement du territoire se retrouveront à Paris le 28 octobre prochain.
- Le Forum sur « la cohésion territoriale et l'avenir de cohésion » se tiendra les 30 et 31 octobre à Paris. Je profite de cette occasion pour vous remercier d'avoir bien voulu accepter d'être partenaire officiel de cette manifestation. Cet évènement sera incontestablement, la plus grande manifestation de l'année 2008 consacrée à une politique dont nous pensons tous qu'elle est la manifestation la plus concrète et la plus visible de la solidarité de l'Union européenne.
- Le forum des villes se tiendra les 2 et 3 décembre à Montpellier pour permettre aux acteurs de la ville européenne de débattre de la mise en oeuvre de la Charte de Leipzig
- Enfin, nous avons prévu, du 24 au 26 novembre, une réunion informelle des ministres qui concernera, dans des séquences distinctes, les ministres du logement et les ministres en charge des politiques urbaines et, réunis ensemble, les ministres, en charge de la politique régionale et de l'aménagement du territoire. Cette réunion se tiendra à Marseille.
Bien entendu, votre institution sera pleinement associée à cette réunion informelle.
Je n'ai mentionné que les seules manifestations organisées à l'initiative de mon ministère. Mais je ne veux pas manquer de vous féliciter par avance pour les « open days » qui sont maintenant devenus une manifestation traditionnelle et de grande ampleur. A cet égard, je me réjouis de la présence du Premier ministre qui sera présent à cette occasion le 6 octobre prochain.
Avant de conclure, je souhaite vous confirmer aujourd'hui que la présidence française saisira votre institution de deux demandes d'avis :
- la première sur les modalités de mise en oeuvre d'un possible « volet territorial » au projet d'Union pour la Méditerranée. J'ai évoqué l'importance que le Président de la République attache à ce projet ;
- et la seconde sur le rôle des collectivités territoriales en matière de politique d'intégration et de dialogue interculturel.
A travers ces deux saisines, la présidence française souhaite illustrer l'importance qu'elle attache à sa coopération avec votre institution, et l'intérêt qu'elle porte aux travaux de votre assemblée. Plus que jamais, l'Europe a besoin de s'attacher à répondre aux attentes concrètes de nos concitoyens, et c'est votre légitimité d'élus locaux que d'y veiller, en relayant ces attentes par vos avis.
En conclusion
Les territoires sont au coeur de notre mission. Ils donnent à l'Homme son identité, ses racines. Pendant longtemps, les territoires ont été sources de division, de conflits qui ont meurtri l'Europe.
Aujourd'hui, nos territoires sont des ferments de cohésion et des atouts pour le dynamisme européen, car ils contribuent à forger une identité européenne, et sont les racines profondes de chaque européen.
Vous êtes les représentants légitimes des territoires européens, rassemblé vous formez le territoire de l'Europe dans sa diversité.
Vos avis, votre travail me seront indispensables pour accomplir ma mission.
Je forme le voeu que le débat qui s'ouvrira pendant notre Présidence s'inspire de la passion, de l'amitié et de la volonté qui ont animé ceux qui ont permis à l'Europe d'être un territoire de Paix.
Ce voeu, c'est aussi celui du Président de la République.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 20 juin 2008