Texte intégral
Mesdames et Messieurs les préfets,
Merci tout d'abord au ministre de l'Intérieur, mon collègue Manuel Valls, et au secrétaire général du ministère de me donner l'occasion de m'exprimer devant vous, qui plus est dans le prolongement du comité interministériel des villes du 19 février dernier.
Pour le ministre chargé de la Ville, le dialogue avec les préfets est particulièrement important :
D'abord parce que la politique de la ville est une politique de solidarité nationale, qui relève donc de la responsabilité de l'État, pas de l'État seul bien sûr, mais de l'État avant tout ; c'est donc naturellement aux représentants de l'État qu'il revient de porter l'action du ministère de la ville dans les régions et départements ;
Ensuite, parce que la politique de la ville est interministérielle et doit de plus impliquer toutes les collectivités publiques : intercommunalités, communes, Régions, Départements, chambres consulaires, Pôle Emploi, CAF, ARS et autres. Il faut donc un chef d'orchestre ou un chef de file, qui mobilise les différents acteurs et coordonne les politiques publiques. Je confirme, pour ce qui me concerne, que ce sont les préfets qui doivent jouer ce rôle et le jouer complètement. Vous disposez pour cela de proches collaborateurs, dédiés à l'animation de la politique de la ville - les préfets délégués pour l'égalité des chances, les sous-préfets ville, les sous-préfets d'arrondissement, les délégués du préfet - , mais j'attends que le préfet lui-même s'investisse sur le terrain, au contact et en prise avec les acteurs locaux.
Alors oui, je compte sur vous, et je remercie tous ceux qui m'ont déjà accueilli en déplacement, dans les 32 départements dans lesquels je me suis rendu depuis ma prise de fonction. J'ai d'ailleurs pour habitude de revenir dans les mêmes lieux lorsque la situation l'exige (comme à Amiens, Marseille, Toulouse et en Seine Saint Denis).
Je mesure dans mes déplacements les efforts que vous déployez chacun pour faire progresser la cohésion urbaine et la solidarité nationale dans les quartiers.
Une nouvelle étape est engagée pour la politique de la ville :
- le 22 août 2012, je présentais en conseil des ministres la « feuille de route du Gouvernement pour les habitants des quartiers » ;
- dans la foulée et à la demande du Premier ministre j'organisais une concertation opérationnelle « Quartiers engageons le changement », entre octobre 2012 et janvier 2013 sur les orientations de cette feuille de route. Je dis bien « concertation opérationnelle », car si les modalités de la réforme étaient mises en discussion, les objectifs eux étaient fixés par le Gouvernement. Trois groupes, opérationnels donc, coprésidés d'ailleurs pour deux d'entre vous - Nicole Klein et Claude Morel - que je salue, ont travaillé sur la géographie prioritaire de la politique de la ville, la contractualisation et les priorités thématiques. Cette concertation était complétée par 700 cahiers d'acteurs et une « concertation avis citoyens » avec 4 forums décentralisés en janvier qui ont rassemblé chacun 400 personnes à Bobigny, Rennes, Strasbourg et la Seyne sur Mer ; 3ème acte de la réforme : le comité interministériel des villes du 19 février dernier et les 27 décisions adoptées. Il ne s'agit pas de lancer un « plan Marshall » de plus pour les banlieues, mais de remettre concrètement l'action publique en mouvement dans les quartiers, et de façon structurelle.
Je ne vais pas vous détailler chacune des 27 décisions du comité interministériel, mais je concentrerai mon propos sur les cinq dimensions de la réforme qui appellent un engagement de votre part
- la territorialisation des politiques de droit commun,
- la réforme de la géographie prioritaire,
- la préparation des contrats de ville 2014-2020,
- la poursuite de la rénovation urbaine,
- la reconnaissance due aux habitants des quartiers.
I. - La première orientation du Gouvernement c'est de territorialiser les politiques sectorielle pour concentrer les moyens de droit commun dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Le ministère de la ville ne peut à lui seul corriger les inégalités de toute nature qui accablent les quartiers, avec les moyens qui sont les siens. Certes nous avons marqué en 2013 un coup d'arrêt à la baisse des crédits du programme 147 « Politique de la ville », qui finance principalement l'ACSé et qui accusait une baisse de 31 % entre 2009 et 2012. Mais cela demeure nettement insuffisant car, avant de distribuer les crédits de la politique de la ville, il faut d'abord s'assurer que les crédits de droit commun ont été mobilisés à leur juste niveau.
La mobilisation du droit commun est une exigence fondamentale, et constante depuis la création du ministère de la ville il y a 25 ans.
Pour obtenir des résultats, on change de méthode, « par le bas » avec les nouveaux signataires des contrats de ville, et « par le haut » avec des engagements contractualisés entre les « ministères de droit commun » et le ministère de la ville :
- c'est le sens des conventions d'objectifs, de méthode et de moyens prescrites par le Premier ministre dans sa circulaire du 30 novembre 2012 ;
- l'ensemble des membres du Gouvernement prennent des engagements pour décliner spécifiquement leur action dans les quartiers prioritaires ;
- les premières conventions ont été passées avec Valérie Fourneyron et Marisol Touraine ; 11 autres seront signées d'ici la fin mai.
D'ores et déjà, plusieurs résultats ont été atteints :
- avec la création des zones de sécurité prioritaire qui recouvrent, pour 63 des 64 premières, un quartier de la politique de la ville,
- avec les emplois d'avenir qui sont fléchés à hauteur de 30 % vers les jeunes des zones urbaines sensibles,
- avec l'effort sans précédent porté sur la péréquation financière en faveur des collectivités défavorisées en 2013 : + 120 M sur la DSU ; + 25 M sur la DDU avec une circulaire de la DGCL pour 2013 qui replafonne la dotation à 2 M par commune et assouplit les critères d'attribution : + 210 M sur le FPIC et + 20 M sur le FSRIF,
- avec la convergence des géographies de la politique de la ville et de la politique d'éducation prioritaire, qui fera que tous les EPLE (établissements publics locaux d'enseignement) des quartiers seront dans l'éducation prioritaire avec les moyens correspondants,
- avec 25 % des services civiques réservés aux jeunes issus des quartiers,
- avec l'objectif, endossé par les Régions, de flécher sur les quartiers 10 % des fonds européens, FEDER et FSE qui leur seront confiés.
Dans le même esprit, nous expérimenterons les emplois francs, sur 10 agglomérations pour commencer : Marseille, Amiens, Grenoble, Clichy-Montfermeil, Toulouse, Lille, Perpignan, Saint-Quentin, Sarcelles et, pour les outre-mer, Fort de France. Les emplois francs fonctionnent à l'inverse des zones franches urbaines, en attachant l'aide de l'État non pas à l'adresse de l'entreprise mais à celle des jeunes des quartiers. Ils se veulent complémentaires aux emplois d'avenir en visant les jeunes plutôt qualifiés pour l'accès à l'emploi en entreprise. Il s'agit de valoriser des parcours de réussite par le diplôme et par l'effort. En ce sens, les emplois francs seront autant un outil anti-discrimination qu'une mesure pour l'emploi. 2000 emplois francs sont mis en place pour 2013 et 10 000 sur le triennal 2013-2015. En fonction des résultats de cette expérimentation, nous étendrons progressivement le dispositif et le généraliserons, éventuellement en remplacement des ZFU à terme. Une mission a été confiée au conseil économique, social et environnemental pour évaluer les ZFU en vue de leur évolution au-delà de 2014. Je compte sur les 10 préfets concernés par la première vague, en mobilisant le service public de l'emploi et les délégués du préfet, pour organiser la mise en relation entre les jeunes potentiellement concernés et les entreprises du bassin d'emploi en besoin de recrutement.
La priorité absolue que doit être l'emploi nécessite que l'on s'investisse pleinement dans le développement économique, qu'il s'agisse du commerce, de la création d'entreprise ou de l'implication des partenaires économiques : chambres consulaires, organisations professionnelles, grandes entreprises et leurs réseaux, tels la Fondation Agir Contre l'Exclusion (FACE), avec lesquelles j'ai engagé des discussions au plan national. De même, la BPI développera une stratégie spécifique pour la création d'entreprise dans les quartiers et mettra en place un fonds d'amorçage pour le soutien aux PME.
Au fur et à mesure de leur conclusion, les conventions d'objectifs vous seront communiquées et donneront lieu pour certaines d'entre elles à des instructions cosignées avec les ministres concernés. Il ne s'agit pas d'ajouter au flot des circulaires ministérielles que vous recevez quotidiennement, mais bien d'impliquer les ministres et leurs relais territoriaux dans l'application effective des conventions.
Je demande aux préfets de région d'assurer la déclinaison territoriale de ces conventions, en y associant les préfets de département et les chefs de service régionaux, dans le cadre collégial du comité régional d'administration (CAR) donc. La politique de la ville est en effet un enjeu qui intéresse tous les membres du CAR. Je suis d'ailleurs tout à fait disponible pour participer à un CAR, afin de mesurer la bonne application des décisions prises lors du CIV et les difficultés éventuelles. Je remercie à cet égard le préfet de la région Ile de France, Jean Daubigny, de m'avoir invité à un prochain CAR francilien dédié à la politique de la ville.
Au-delà du droit commun de l'État, c'est également celui des collectivités territoriales qu'il convient d'interpeller. Pour cela, une convention a été signée avec l'association des régions de France et une autre est en cours de négociation avec l'assemblée des départements de France afin de faciliter la prise en compte, par chaque niveau de collectivité territoriale, des enjeux de la politique de la ville.
II. - Le deuxième objectif de la réforme est intimement lié au premier : c'est de réformer la géographie prioritaire pour simplifier et concentrer les interventions dans les quartiers qui en ont le plus besoin.
La géographie actuelle superpose les zonages :
- 751 zones urbaines sensibles,
- 416 zones de redynamisation urbaine,
- 100 zones franches urbaines,
- 595 quartiers en rénovation urbaine,
- 2492 quartiers en contrats urbains de cohésion sociale.
Ce faisant, on a rendu la politique de la ville illisible et saupoudré les crédits.
Il faut donc revoir tous ces zonages. Cela fait 10 ans que cette réforme est repoussée. En 2009, elle était même prête, mais il a été décidé de la reporter au-delà des municipales de 2014.
Cette réforme, je suis résolu pour ma part à la mener à bien avant les municipales, et je commencerai par Palaiseau, ville dont j'ai été le maire pendant onze années, et dont je n'ai pas peur de dire que sa situation ne justifie plus aujourd'hui qu'elle bénéficie des moyens spécifiques de la politique de la ville. La mobilisation d'un droit commun renforcé doit suffire.
Il s'agit donc de simplifier et de resserrer. Je sais que vous êtes interpellé par les élus, comme je le suis quotidiennement au ministère. Alors comment les choses se présentent-elles ?
On va d'abord tout remettre à plat, avec une nouvelle méthode développée par l'INSEE, le « carroyage » :
- cela consiste à découper le territoire métropolitain en carreau de 200 mètres de côté ;
- on y introduit ensuite des données statistiques. En la matière et comme les acteurs de la concertation l'ont proposé, je suis partisan de prendre un critère simple et objectif : le niveau de revenu des habitants. On constate en effet que tous les indicateurs sont étroitement corrélés avec le niveau de revenu, qu'il s'agisse du taux de chômage, de la proportion de familles monoparentales ou de la proportion de jeunes ;
- cela permet de faire apparaître les concentrations de pauvreté sur le territoire, pas seulement dans les métropoles mais aussi dans nombre de villes moyennes qui n'étaient pas jusqu'à présent dans le giron de la politique de la ville ; je pense à des villes comme Auch ou Guéret qui comportent des zones de pauvreté marquées.
Dans les outre-mer, le carroyage n'est pas une technique employable. D'autres méthodes seront donc utilisés, mais toujours dans l'objectif de resserrer la géographie prioritaire, tout en prenant en compte les particularités de ces territoires, en particulier à Mayotte et en Guyane. Un groupe de travail, piloté par le SG CIV en liaison étroite avec la DGEOM et associant tous les préfets concernés. rendra ses conclusions à la fin du premier semestre 2013 ; il se réunira pour la première fois le 29 avril prochain.
Le travail de définition est en cours, notamment sur la région Ile de France. Il supposera une accroche législative. Un projet de loi sera adopté avant la fin de cette année pour supprimer les ZUS et les remplacer par la notion de « quartiers prioritaires ». Des textes d'application réglementaires fixeront ensuite les mécanismes de calcul et la liste des quartiers prioritaires, le tout avant la fin de l'année, pour éviter le télescopage avec les élections municipales de 2014.
Vous serez mandatés pour déterminer, en relation avec les élus concernés, les périmètres fins autour des concentrations de pauvreté repérées. Ce travail d'aller-retour entre le SG-CIV et vous débutera à l'été, dès que le projet de loi aura été déposé sur le bureau des assemblées.
Cette méthode, homogène au plan national, permettra de définir une nouvelle géographie, autour de 1000 à 1200 quartiers prioritaires, contre près de 2500 aujourd'hui. Les efforts seront concentrés sur ces quartiers :
- avec les crédits de droit commun des ministères et des collectivités locales ;
- avec les crédits de la politique de la ville ;
- avec les nouvelles opérations de renouvellement urbain, j'y reviendrai ;
- avec les exonérations fiscales aujourd'hui associées aux ZUS ;
- avec les outils de péréquation : DSU - cible et DDU, que je souhaite voir évoluer en dotation spécifique politique de la ville.
Dans les quartiers qui ne seront pas retenus quartiers prioritaires, on organisera une sortie en transition et on proposera toujours un contrat de ville pour mobiliser le droit commun et l'ingénierie de la politique de la ville.
III. - C'est justement la troisième dimension essentielle de la réforme : la mise en place d'un contrat de ville de nouvelle génération.
Le CIV de février a décidé de mettre en place pour 2014-2020, c'est-à-dire la durée du prochain mandat municipal, un nouveau contrat de ville, un contrat urbain global, qui intègre les actions de cohésion sociale, les opérations de renouvellement urbain et les politiques de droit commun.
Ce contrat sera resitué au niveau intercommunal pour faire jouer la solidarité locale et valoir projet de territoire. Les maires demeureront les opérateurs de proximité.
Le contrat de ville devra mobiliser tous les acteurs, dans l'objectif encore une fois de mobiliser le droit commun :
- le préfet, le maire et le président de l'intercommunalité en seront les chevilles ouvrières et les coordonnateurs ;
- sont appelés à en être également signataire, c'est le « droit commun levé par le bas » : la Région, le Département, le Recteur, le Procureur de la République, l'ARS, la CAF, Pole Emploi, les bailleurs et les chambres consulaires ;
- les associations et les habitants devront être associés à la préparation et au suivi du contrat.
L'approche est partag??e par les grandes associations d'élus, avec lesquelles des conventions-cadre sont signées, c'est le cas avec l'ARF, ou seront signées, avec l'ADF, l'ADCF, l'AMGVF et je l'espère l'AMF.
Avec autant de parties prenantes, l'exercice est naturellement complexe. Une préfiguration sera lancée avant l'été sur une dizaine de sites, afin de consolider les éléments de doctrine et de définir plus précisément les outils d'accompagnement et de formation nécessaires à mettre en place avant la fin de l'année. Les dix sites retenus, avec l'aval des maires et des préfets concernés, sont les intercommunalités d'Amiens, d'Evry, de Plaine Commune en Seine-Saint-Denis, de Rennes, de Lille, de Nîmes, d'Auch, de Dijon, de Mulhouse, d'Arras et de Fort de France pour les outre-mer.
Pour l'ensemble des sites, les travaux pourront formellement débuter dès que la nouvelle géographie prioritaire sera connue. Je vous adresserai prochainement une instruction pour vous préciser le calendrier et les différentes étapes, notamment pour ce qui doit être engagé dans l'attente de la nouvelle géographie prioritaire. Dans cette phase intermédiaire, il s'agit à la fois :
- d'identifier les enjeux auxquels sont confrontés les quartiers en terme d'intégration urbaine et de cohésion sociale, sur la base du projet de territoire et des diagnostics existants ; ce travail pourra prendre appui sur les programmes stratégiques locaux ou les conventions de sortie de rénovation urbaine ;
- il s'agit également de préparer l'administration territoriale de l'Etat à la négociation des contrats. Pour cela, je vous invite à désigner un membre du corps préfectoral référent pour chacun des contrats de ville et à mettre en place une équipe interministérielle composée de représentant de chacun des services. L'instruction interministérielle que j'évoquais précédemment précisera ces points et vous aidera à mettre sous tension les structures de l'Etat qui ne sont pas sous votre autorité directe ; Procureurs, Recteurs, ARS et Pole Emploi notamment J'aurais prochainement l'occasion d'intervenir devant les Recteurs et devant les directeurs généraux des ARS pour leur relayer ce message.
IV. - Quatrième dimension de la réforme: la rénovation urbaine.
Le programme national de rénovation urbaine engagé représente 12 milliards d'engagement financier de l'ANRU sur 45 milliards d'enveloppe globale. A fin 2012, huit ans après le lancement du PNRU, nous sommes à 78 % d'engagements et 47 % de paiements. Il reste donc plus de la moitié du programme à financer pour mener à bien la rénovation des 300 000 logements prévue par le PNRU.
Les discussions budgétaires de fin d'année ont permis de sécuriser le financement du Programme, tout en restaurant des relations de confiance avec les principaux acteurs. Avec la contribution d'Action Logement et les nouvelles recettes fiscales mises en place dans la loi de finances pour 2013, nous mobilisons les ressources nécessaires pour prendre en charge des dépenses supérieures à 1 milliard d'euros chaque année et garantir la poursuite du PNRU sur le triennal 2013-2015.
D'autre part, le CIV a décidé de reporter de fin 2013 à fin 2015 la clôture des engagements sur le PNRU.
Le Gouvernement a ainsi réuni les conditions nécessaires à la menée à bien et à terme le PNRU.
Un autre chantier majeur du CIV réside dans le lancement d'opérations de renouvellement urbain de nouvelle génération, conformément aux engagements du président de la République. La future loi sur la politique de la ville comprendra un volet dédié à cette nouvelle génération d'opérations, fixant notamment ses grands principes et ses modalités d'inscription dans le cadre des nouveaux contrats de ville.
La liste des quartiers éligibles sera resserrée : il n'y aura plus d'appel à projet afin d'éviter la dilution des crédits dans un contexte budgétaire contraint et les errements du PNRU1 qui ont conduit à affecter près de 25 % des moyens du PNRU en dehors des ZUS.
Cette liste sera arrêtée au niveau national au mois de septembre prochain. Les quartiers éligibles, environ 200 en métropole et 30 en outre-mer, seront choisis parmi les quartiers prioritaires de la nouvelle géographie présentant les dysfonctionnements urbains les plus importants.
Le directeur général de l'ANRU et ses collaborateurs prendront contact avec vous dans les prochaines semaines pour recueillir votre analyse sur les besoins dans vos départements.
Quant aux outre-mer, il y a urgence à intervenir sur les secteurs d'habitat informel et insalubre. Je l'ai vu encore récemment lors de mes déplacements en Martinique et Guyane. L'intervention de l'ANRU dans les territoires d'outre-mer va donc s'adapter aux spécificités de chaque département et combiner les moyens de la rénovation urbaine et ceux de la RHI.
Le nouveau PNRU traitera par ailleurs des politiques de peuplement. Il faut en effet s'intéresser de près aux attributions de logements sociaux dans les quartiers de la politique de la ville. Si la situation ne paraît pas s'améliorer dans ces quartiers sur le long terme, c'est avant tout parce que la population change et que les nouveaux arrivants sont presque toujours des ménages en grande précarité. On peut donc se demander s'il faut continuer à loger les ménages DALO et les étrangers primo-arrivants dans le parc social des quartiers prioritaires ?
V. - Dernier chantier et non des moindres la reconnaissance des habitants des quartiers.
Les enquêtes d'opinion réalisées dans les ZUS confirment que leurs habitants se sentent stigmatisées et discriminées, dans le discours politique et dans la réalité de leur vie sociale. De plus, alors que les médias ne traitent des quartiers que sous l'angle des violences urbaines, de la place de l'Islam ou des faits divers, ces enquêtes d'opinion montrent que les habitants sont majoritairement fiers de leur quartier, apprécient positivement les opérations de rénovation urbaine et sont nettement plus optimistes quant à leur devenir personnel que la moyenne des Français.
Au-delà des chantiers de fond engagés et que je vous ai présentés, il faut témoigner à nos concitoyens qui vivent dans les quartiers populaires la reconnaissance qu'ils méritent dans la société française. Cela passe par plusieurs leviers.
Tout d'abord, il faut faire venir la République dans les quartiers, et le visage de la République dans les territoires, c'est vous. Vous devez donc faire acte de présence, personnellement, et via vos collaborateurs sous-préfets, dans les quartiers. Vous devez également mettre en valeur les initiatives positives, les engagements citoyens et les parcours de réussite exemplaire à l'occasion des réceptions de la société civile en préfecture, lors des cérémonies patriotiques et dans vos propositions de distinctions honorifiques.
Ensuite, il faut rendre les habitants partie prenante, co-constructeurs des contrats de ville. Ce n'est pas une figure de style, mais une nécessité pour faire adhérer. J'ai confié une mission sur la participation citoyenne à Mohammed MECHMACHE, président d'AC Le Feu, et MarieHélène BACQUE, sociologue experte des mécanismes participatifs. Le rapport de cette mission et les conclusions que j'en tirerai pour la mise en oeuvre de la nouvelle étape de la politique de la ville vous seront communiqués d'ici l'automne.
En troisième lieu, la reconnaissance des habitants des quartiers passe par la lutte contre les discriminations liées à l'adresse ou à l'origine réelle ou supposée. Un plan d'action est en préparation et je vous invite à prioriser l'allocation des crédits de l'ACSé qui vous sont délégués sur les initiatives et les projets participant de la lutte contre les discriminations.
Enfin, un travail de mémoire reste à généraliser pour faire vivre la mémoire des quartiers, assumer la construction des grands ensembles et les politiques de peuplement, et permettre à leurs habitants de se projeter dans l'avenir Je vous demanderai de porter dans chaque quartier en rénovation urbaine une initiative sur la mémoire du quartier. L'ANRU et l'ACSé vous apporteront un soutien financier dans des conditions qui vous seront prochainement précisées.
Voilà ; vous connaissez le plan de charge qui vous attend pour les temps à venir. Je compte sur vous, votre engagement, votre savoir-faire, votre impartialité dans l'action.
Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
Source http://www.ville.gouv.fr, le 7 mai 2013
Merci tout d'abord au ministre de l'Intérieur, mon collègue Manuel Valls, et au secrétaire général du ministère de me donner l'occasion de m'exprimer devant vous, qui plus est dans le prolongement du comité interministériel des villes du 19 février dernier.
Pour le ministre chargé de la Ville, le dialogue avec les préfets est particulièrement important :
D'abord parce que la politique de la ville est une politique de solidarité nationale, qui relève donc de la responsabilité de l'État, pas de l'État seul bien sûr, mais de l'État avant tout ; c'est donc naturellement aux représentants de l'État qu'il revient de porter l'action du ministère de la ville dans les régions et départements ;
Ensuite, parce que la politique de la ville est interministérielle et doit de plus impliquer toutes les collectivités publiques : intercommunalités, communes, Régions, Départements, chambres consulaires, Pôle Emploi, CAF, ARS et autres. Il faut donc un chef d'orchestre ou un chef de file, qui mobilise les différents acteurs et coordonne les politiques publiques. Je confirme, pour ce qui me concerne, que ce sont les préfets qui doivent jouer ce rôle et le jouer complètement. Vous disposez pour cela de proches collaborateurs, dédiés à l'animation de la politique de la ville - les préfets délégués pour l'égalité des chances, les sous-préfets ville, les sous-préfets d'arrondissement, les délégués du préfet - , mais j'attends que le préfet lui-même s'investisse sur le terrain, au contact et en prise avec les acteurs locaux.
Alors oui, je compte sur vous, et je remercie tous ceux qui m'ont déjà accueilli en déplacement, dans les 32 départements dans lesquels je me suis rendu depuis ma prise de fonction. J'ai d'ailleurs pour habitude de revenir dans les mêmes lieux lorsque la situation l'exige (comme à Amiens, Marseille, Toulouse et en Seine Saint Denis).
Je mesure dans mes déplacements les efforts que vous déployez chacun pour faire progresser la cohésion urbaine et la solidarité nationale dans les quartiers.
Une nouvelle étape est engagée pour la politique de la ville :
- le 22 août 2012, je présentais en conseil des ministres la « feuille de route du Gouvernement pour les habitants des quartiers » ;
- dans la foulée et à la demande du Premier ministre j'organisais une concertation opérationnelle « Quartiers engageons le changement », entre octobre 2012 et janvier 2013 sur les orientations de cette feuille de route. Je dis bien « concertation opérationnelle », car si les modalités de la réforme étaient mises en discussion, les objectifs eux étaient fixés par le Gouvernement. Trois groupes, opérationnels donc, coprésidés d'ailleurs pour deux d'entre vous - Nicole Klein et Claude Morel - que je salue, ont travaillé sur la géographie prioritaire de la politique de la ville, la contractualisation et les priorités thématiques. Cette concertation était complétée par 700 cahiers d'acteurs et une « concertation avis citoyens » avec 4 forums décentralisés en janvier qui ont rassemblé chacun 400 personnes à Bobigny, Rennes, Strasbourg et la Seyne sur Mer ; 3ème acte de la réforme : le comité interministériel des villes du 19 février dernier et les 27 décisions adoptées. Il ne s'agit pas de lancer un « plan Marshall » de plus pour les banlieues, mais de remettre concrètement l'action publique en mouvement dans les quartiers, et de façon structurelle.
Je ne vais pas vous détailler chacune des 27 décisions du comité interministériel, mais je concentrerai mon propos sur les cinq dimensions de la réforme qui appellent un engagement de votre part
- la territorialisation des politiques de droit commun,
- la réforme de la géographie prioritaire,
- la préparation des contrats de ville 2014-2020,
- la poursuite de la rénovation urbaine,
- la reconnaissance due aux habitants des quartiers.
I. - La première orientation du Gouvernement c'est de territorialiser les politiques sectorielle pour concentrer les moyens de droit commun dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Le ministère de la ville ne peut à lui seul corriger les inégalités de toute nature qui accablent les quartiers, avec les moyens qui sont les siens. Certes nous avons marqué en 2013 un coup d'arrêt à la baisse des crédits du programme 147 « Politique de la ville », qui finance principalement l'ACSé et qui accusait une baisse de 31 % entre 2009 et 2012. Mais cela demeure nettement insuffisant car, avant de distribuer les crédits de la politique de la ville, il faut d'abord s'assurer que les crédits de droit commun ont été mobilisés à leur juste niveau.
La mobilisation du droit commun est une exigence fondamentale, et constante depuis la création du ministère de la ville il y a 25 ans.
Pour obtenir des résultats, on change de méthode, « par le bas » avec les nouveaux signataires des contrats de ville, et « par le haut » avec des engagements contractualisés entre les « ministères de droit commun » et le ministère de la ville :
- c'est le sens des conventions d'objectifs, de méthode et de moyens prescrites par le Premier ministre dans sa circulaire du 30 novembre 2012 ;
- l'ensemble des membres du Gouvernement prennent des engagements pour décliner spécifiquement leur action dans les quartiers prioritaires ;
- les premières conventions ont été passées avec Valérie Fourneyron et Marisol Touraine ; 11 autres seront signées d'ici la fin mai.
D'ores et déjà, plusieurs résultats ont été atteints :
- avec la création des zones de sécurité prioritaire qui recouvrent, pour 63 des 64 premières, un quartier de la politique de la ville,
- avec les emplois d'avenir qui sont fléchés à hauteur de 30 % vers les jeunes des zones urbaines sensibles,
- avec l'effort sans précédent porté sur la péréquation financière en faveur des collectivités défavorisées en 2013 : + 120 M sur la DSU ; + 25 M sur la DDU avec une circulaire de la DGCL pour 2013 qui replafonne la dotation à 2 M par commune et assouplit les critères d'attribution : + 210 M sur le FPIC et + 20 M sur le FSRIF,
- avec la convergence des géographies de la politique de la ville et de la politique d'éducation prioritaire, qui fera que tous les EPLE (établissements publics locaux d'enseignement) des quartiers seront dans l'éducation prioritaire avec les moyens correspondants,
- avec 25 % des services civiques réservés aux jeunes issus des quartiers,
- avec l'objectif, endossé par les Régions, de flécher sur les quartiers 10 % des fonds européens, FEDER et FSE qui leur seront confiés.
Dans le même esprit, nous expérimenterons les emplois francs, sur 10 agglomérations pour commencer : Marseille, Amiens, Grenoble, Clichy-Montfermeil, Toulouse, Lille, Perpignan, Saint-Quentin, Sarcelles et, pour les outre-mer, Fort de France. Les emplois francs fonctionnent à l'inverse des zones franches urbaines, en attachant l'aide de l'État non pas à l'adresse de l'entreprise mais à celle des jeunes des quartiers. Ils se veulent complémentaires aux emplois d'avenir en visant les jeunes plutôt qualifiés pour l'accès à l'emploi en entreprise. Il s'agit de valoriser des parcours de réussite par le diplôme et par l'effort. En ce sens, les emplois francs seront autant un outil anti-discrimination qu'une mesure pour l'emploi. 2000 emplois francs sont mis en place pour 2013 et 10 000 sur le triennal 2013-2015. En fonction des résultats de cette expérimentation, nous étendrons progressivement le dispositif et le généraliserons, éventuellement en remplacement des ZFU à terme. Une mission a été confiée au conseil économique, social et environnemental pour évaluer les ZFU en vue de leur évolution au-delà de 2014. Je compte sur les 10 préfets concernés par la première vague, en mobilisant le service public de l'emploi et les délégués du préfet, pour organiser la mise en relation entre les jeunes potentiellement concernés et les entreprises du bassin d'emploi en besoin de recrutement.
La priorité absolue que doit être l'emploi nécessite que l'on s'investisse pleinement dans le développement économique, qu'il s'agisse du commerce, de la création d'entreprise ou de l'implication des partenaires économiques : chambres consulaires, organisations professionnelles, grandes entreprises et leurs réseaux, tels la Fondation Agir Contre l'Exclusion (FACE), avec lesquelles j'ai engagé des discussions au plan national. De même, la BPI développera une stratégie spécifique pour la création d'entreprise dans les quartiers et mettra en place un fonds d'amorçage pour le soutien aux PME.
Au fur et à mesure de leur conclusion, les conventions d'objectifs vous seront communiquées et donneront lieu pour certaines d'entre elles à des instructions cosignées avec les ministres concernés. Il ne s'agit pas d'ajouter au flot des circulaires ministérielles que vous recevez quotidiennement, mais bien d'impliquer les ministres et leurs relais territoriaux dans l'application effective des conventions.
Je demande aux préfets de région d'assurer la déclinaison territoriale de ces conventions, en y associant les préfets de département et les chefs de service régionaux, dans le cadre collégial du comité régional d'administration (CAR) donc. La politique de la ville est en effet un enjeu qui intéresse tous les membres du CAR. Je suis d'ailleurs tout à fait disponible pour participer à un CAR, afin de mesurer la bonne application des décisions prises lors du CIV et les difficultés éventuelles. Je remercie à cet égard le préfet de la région Ile de France, Jean Daubigny, de m'avoir invité à un prochain CAR francilien dédié à la politique de la ville.
Au-delà du droit commun de l'État, c'est également celui des collectivités territoriales qu'il convient d'interpeller. Pour cela, une convention a été signée avec l'association des régions de France et une autre est en cours de négociation avec l'assemblée des départements de France afin de faciliter la prise en compte, par chaque niveau de collectivité territoriale, des enjeux de la politique de la ville.
II. - Le deuxième objectif de la réforme est intimement lié au premier : c'est de réformer la géographie prioritaire pour simplifier et concentrer les interventions dans les quartiers qui en ont le plus besoin.
La géographie actuelle superpose les zonages :
- 751 zones urbaines sensibles,
- 416 zones de redynamisation urbaine,
- 100 zones franches urbaines,
- 595 quartiers en rénovation urbaine,
- 2492 quartiers en contrats urbains de cohésion sociale.
Ce faisant, on a rendu la politique de la ville illisible et saupoudré les crédits.
Il faut donc revoir tous ces zonages. Cela fait 10 ans que cette réforme est repoussée. En 2009, elle était même prête, mais il a été décidé de la reporter au-delà des municipales de 2014.
Cette réforme, je suis résolu pour ma part à la mener à bien avant les municipales, et je commencerai par Palaiseau, ville dont j'ai été le maire pendant onze années, et dont je n'ai pas peur de dire que sa situation ne justifie plus aujourd'hui qu'elle bénéficie des moyens spécifiques de la politique de la ville. La mobilisation d'un droit commun renforcé doit suffire.
Il s'agit donc de simplifier et de resserrer. Je sais que vous êtes interpellé par les élus, comme je le suis quotidiennement au ministère. Alors comment les choses se présentent-elles ?
On va d'abord tout remettre à plat, avec une nouvelle méthode développée par l'INSEE, le « carroyage » :
- cela consiste à découper le territoire métropolitain en carreau de 200 mètres de côté ;
- on y introduit ensuite des données statistiques. En la matière et comme les acteurs de la concertation l'ont proposé, je suis partisan de prendre un critère simple et objectif : le niveau de revenu des habitants. On constate en effet que tous les indicateurs sont étroitement corrélés avec le niveau de revenu, qu'il s'agisse du taux de chômage, de la proportion de familles monoparentales ou de la proportion de jeunes ;
- cela permet de faire apparaître les concentrations de pauvreté sur le territoire, pas seulement dans les métropoles mais aussi dans nombre de villes moyennes qui n'étaient pas jusqu'à présent dans le giron de la politique de la ville ; je pense à des villes comme Auch ou Guéret qui comportent des zones de pauvreté marquées.
Dans les outre-mer, le carroyage n'est pas une technique employable. D'autres méthodes seront donc utilisés, mais toujours dans l'objectif de resserrer la géographie prioritaire, tout en prenant en compte les particularités de ces territoires, en particulier à Mayotte et en Guyane. Un groupe de travail, piloté par le SG CIV en liaison étroite avec la DGEOM et associant tous les préfets concernés. rendra ses conclusions à la fin du premier semestre 2013 ; il se réunira pour la première fois le 29 avril prochain.
Le travail de définition est en cours, notamment sur la région Ile de France. Il supposera une accroche législative. Un projet de loi sera adopté avant la fin de cette année pour supprimer les ZUS et les remplacer par la notion de « quartiers prioritaires ». Des textes d'application réglementaires fixeront ensuite les mécanismes de calcul et la liste des quartiers prioritaires, le tout avant la fin de l'année, pour éviter le télescopage avec les élections municipales de 2014.
Vous serez mandatés pour déterminer, en relation avec les élus concernés, les périmètres fins autour des concentrations de pauvreté repérées. Ce travail d'aller-retour entre le SG-CIV et vous débutera à l'été, dès que le projet de loi aura été déposé sur le bureau des assemblées.
Cette méthode, homogène au plan national, permettra de définir une nouvelle géographie, autour de 1000 à 1200 quartiers prioritaires, contre près de 2500 aujourd'hui. Les efforts seront concentrés sur ces quartiers :
- avec les crédits de droit commun des ministères et des collectivités locales ;
- avec les crédits de la politique de la ville ;
- avec les nouvelles opérations de renouvellement urbain, j'y reviendrai ;
- avec les exonérations fiscales aujourd'hui associées aux ZUS ;
- avec les outils de péréquation : DSU - cible et DDU, que je souhaite voir évoluer en dotation spécifique politique de la ville.
Dans les quartiers qui ne seront pas retenus quartiers prioritaires, on organisera une sortie en transition et on proposera toujours un contrat de ville pour mobiliser le droit commun et l'ingénierie de la politique de la ville.
III. - C'est justement la troisième dimension essentielle de la réforme : la mise en place d'un contrat de ville de nouvelle génération.
Le CIV de février a décidé de mettre en place pour 2014-2020, c'est-à-dire la durée du prochain mandat municipal, un nouveau contrat de ville, un contrat urbain global, qui intègre les actions de cohésion sociale, les opérations de renouvellement urbain et les politiques de droit commun.
Ce contrat sera resitué au niveau intercommunal pour faire jouer la solidarité locale et valoir projet de territoire. Les maires demeureront les opérateurs de proximité.
Le contrat de ville devra mobiliser tous les acteurs, dans l'objectif encore une fois de mobiliser le droit commun :
- le préfet, le maire et le président de l'intercommunalité en seront les chevilles ouvrières et les coordonnateurs ;
- sont appelés à en être également signataire, c'est le « droit commun levé par le bas » : la Région, le Département, le Recteur, le Procureur de la République, l'ARS, la CAF, Pole Emploi, les bailleurs et les chambres consulaires ;
- les associations et les habitants devront être associés à la préparation et au suivi du contrat.
L'approche est partag??e par les grandes associations d'élus, avec lesquelles des conventions-cadre sont signées, c'est le cas avec l'ARF, ou seront signées, avec l'ADF, l'ADCF, l'AMGVF et je l'espère l'AMF.
Avec autant de parties prenantes, l'exercice est naturellement complexe. Une préfiguration sera lancée avant l'été sur une dizaine de sites, afin de consolider les éléments de doctrine et de définir plus précisément les outils d'accompagnement et de formation nécessaires à mettre en place avant la fin de l'année. Les dix sites retenus, avec l'aval des maires et des préfets concernés, sont les intercommunalités d'Amiens, d'Evry, de Plaine Commune en Seine-Saint-Denis, de Rennes, de Lille, de Nîmes, d'Auch, de Dijon, de Mulhouse, d'Arras et de Fort de France pour les outre-mer.
Pour l'ensemble des sites, les travaux pourront formellement débuter dès que la nouvelle géographie prioritaire sera connue. Je vous adresserai prochainement une instruction pour vous préciser le calendrier et les différentes étapes, notamment pour ce qui doit être engagé dans l'attente de la nouvelle géographie prioritaire. Dans cette phase intermédiaire, il s'agit à la fois :
- d'identifier les enjeux auxquels sont confrontés les quartiers en terme d'intégration urbaine et de cohésion sociale, sur la base du projet de territoire et des diagnostics existants ; ce travail pourra prendre appui sur les programmes stratégiques locaux ou les conventions de sortie de rénovation urbaine ;
- il s'agit également de préparer l'administration territoriale de l'Etat à la négociation des contrats. Pour cela, je vous invite à désigner un membre du corps préfectoral référent pour chacun des contrats de ville et à mettre en place une équipe interministérielle composée de représentant de chacun des services. L'instruction interministérielle que j'évoquais précédemment précisera ces points et vous aidera à mettre sous tension les structures de l'Etat qui ne sont pas sous votre autorité directe ; Procureurs, Recteurs, ARS et Pole Emploi notamment J'aurais prochainement l'occasion d'intervenir devant les Recteurs et devant les directeurs généraux des ARS pour leur relayer ce message.
IV. - Quatrième dimension de la réforme: la rénovation urbaine.
Le programme national de rénovation urbaine engagé représente 12 milliards d'engagement financier de l'ANRU sur 45 milliards d'enveloppe globale. A fin 2012, huit ans après le lancement du PNRU, nous sommes à 78 % d'engagements et 47 % de paiements. Il reste donc plus de la moitié du programme à financer pour mener à bien la rénovation des 300 000 logements prévue par le PNRU.
Les discussions budgétaires de fin d'année ont permis de sécuriser le financement du Programme, tout en restaurant des relations de confiance avec les principaux acteurs. Avec la contribution d'Action Logement et les nouvelles recettes fiscales mises en place dans la loi de finances pour 2013, nous mobilisons les ressources nécessaires pour prendre en charge des dépenses supérieures à 1 milliard d'euros chaque année et garantir la poursuite du PNRU sur le triennal 2013-2015.
D'autre part, le CIV a décidé de reporter de fin 2013 à fin 2015 la clôture des engagements sur le PNRU.
Le Gouvernement a ainsi réuni les conditions nécessaires à la menée à bien et à terme le PNRU.
Un autre chantier majeur du CIV réside dans le lancement d'opérations de renouvellement urbain de nouvelle génération, conformément aux engagements du président de la République. La future loi sur la politique de la ville comprendra un volet dédié à cette nouvelle génération d'opérations, fixant notamment ses grands principes et ses modalités d'inscription dans le cadre des nouveaux contrats de ville.
La liste des quartiers éligibles sera resserrée : il n'y aura plus d'appel à projet afin d'éviter la dilution des crédits dans un contexte budgétaire contraint et les errements du PNRU1 qui ont conduit à affecter près de 25 % des moyens du PNRU en dehors des ZUS.
Cette liste sera arrêtée au niveau national au mois de septembre prochain. Les quartiers éligibles, environ 200 en métropole et 30 en outre-mer, seront choisis parmi les quartiers prioritaires de la nouvelle géographie présentant les dysfonctionnements urbains les plus importants.
Le directeur général de l'ANRU et ses collaborateurs prendront contact avec vous dans les prochaines semaines pour recueillir votre analyse sur les besoins dans vos départements.
Quant aux outre-mer, il y a urgence à intervenir sur les secteurs d'habitat informel et insalubre. Je l'ai vu encore récemment lors de mes déplacements en Martinique et Guyane. L'intervention de l'ANRU dans les territoires d'outre-mer va donc s'adapter aux spécificités de chaque département et combiner les moyens de la rénovation urbaine et ceux de la RHI.
Le nouveau PNRU traitera par ailleurs des politiques de peuplement. Il faut en effet s'intéresser de près aux attributions de logements sociaux dans les quartiers de la politique de la ville. Si la situation ne paraît pas s'améliorer dans ces quartiers sur le long terme, c'est avant tout parce que la population change et que les nouveaux arrivants sont presque toujours des ménages en grande précarité. On peut donc se demander s'il faut continuer à loger les ménages DALO et les étrangers primo-arrivants dans le parc social des quartiers prioritaires ?
V. - Dernier chantier et non des moindres la reconnaissance des habitants des quartiers.
Les enquêtes d'opinion réalisées dans les ZUS confirment que leurs habitants se sentent stigmatisées et discriminées, dans le discours politique et dans la réalité de leur vie sociale. De plus, alors que les médias ne traitent des quartiers que sous l'angle des violences urbaines, de la place de l'Islam ou des faits divers, ces enquêtes d'opinion montrent que les habitants sont majoritairement fiers de leur quartier, apprécient positivement les opérations de rénovation urbaine et sont nettement plus optimistes quant à leur devenir personnel que la moyenne des Français.
Au-delà des chantiers de fond engagés et que je vous ai présentés, il faut témoigner à nos concitoyens qui vivent dans les quartiers populaires la reconnaissance qu'ils méritent dans la société française. Cela passe par plusieurs leviers.
Tout d'abord, il faut faire venir la République dans les quartiers, et le visage de la République dans les territoires, c'est vous. Vous devez donc faire acte de présence, personnellement, et via vos collaborateurs sous-préfets, dans les quartiers. Vous devez également mettre en valeur les initiatives positives, les engagements citoyens et les parcours de réussite exemplaire à l'occasion des réceptions de la société civile en préfecture, lors des cérémonies patriotiques et dans vos propositions de distinctions honorifiques.
Ensuite, il faut rendre les habitants partie prenante, co-constructeurs des contrats de ville. Ce n'est pas une figure de style, mais une nécessité pour faire adhérer. J'ai confié une mission sur la participation citoyenne à Mohammed MECHMACHE, président d'AC Le Feu, et MarieHélène BACQUE, sociologue experte des mécanismes participatifs. Le rapport de cette mission et les conclusions que j'en tirerai pour la mise en oeuvre de la nouvelle étape de la politique de la ville vous seront communiqués d'ici l'automne.
En troisième lieu, la reconnaissance des habitants des quartiers passe par la lutte contre les discriminations liées à l'adresse ou à l'origine réelle ou supposée. Un plan d'action est en préparation et je vous invite à prioriser l'allocation des crédits de l'ACSé qui vous sont délégués sur les initiatives et les projets participant de la lutte contre les discriminations.
Enfin, un travail de mémoire reste à généraliser pour faire vivre la mémoire des quartiers, assumer la construction des grands ensembles et les politiques de peuplement, et permettre à leurs habitants de se projeter dans l'avenir Je vous demanderai de porter dans chaque quartier en rénovation urbaine une initiative sur la mémoire du quartier. L'ANRU et l'ACSé vous apporteront un soutien financier dans des conditions qui vous seront prochainement précisées.
Voilà ; vous connaissez le plan de charge qui vous attend pour les temps à venir. Je compte sur vous, votre engagement, votre savoir-faire, votre impartialité dans l'action.
Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
Source http://www.ville.gouv.fr, le 7 mai 2013