Texte intégral
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Christian PONCELET bonsoir.
CHRISTIAN PONCELET
Bonsoir.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Vous êtes à nouveau président du Sénat puisque vous avez été réélu hier soir pour un deuxième mandat de trois ans, avec un beau score, je crois qu'il est quasiment exceptionnel dans l'histoire du Sénat puisque, dès le premier tour, vous avez été réélu par 201 voix contre 105, une véritable élection de Maréchal...
CHRISTIAN PONCELET
Merci du compliment.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Alors, vous voilà reparti pour un deuxième mandat de trois ans, après donc le renouvellement triennal du Sénat qui a eu lieu il y a une semaine. Oh, une question au passage : vous avez 73 ans, c'est votre dernier mandat de président ou est-ce que vous pensez que vous en ferez encore un certain nombre, je veux dire, est-ce que vous allez faire comme les évêques et annoncer que, passés 71 ans...
CHRISTIAN PONCELET
Ecoutez, vous venez de l'indiquer, je commence un second mandat, laissez-moi l'accomplir, et puis au terme de celui-ci nous aviserons, n'est-ce pas.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Bon, alors, vous avez dit hier que vous alliez prendre un certain nombre d'initiatives pour... de réformes du Sénat, pour aller à l'encontre d'un procès qui serait fait au Sénat de manque de représentativité et de manque de légitimité. D'abord, qui est-ce qui fait ce procès, c'est.... ?
CHRISTIAN PONCELET
Oh, ce sont les hommes politiques, et cela est repris par les médias. Vous savez, on nous a adressé des propos bien souvent très inélégants. On a reproché au Sénat d'être une maison de retraite, et quand je regarde de plus près cette accusation, je constate que la différence de moyenne d'âge entre la moyenne d'âge de l'Assemblée, où on entre à 23 ans, et la moyenne d'âge du Sénat, où on entre à 35 ans, était de 6 ans. Après le renouvellement, il y a un fort rajeunissement, et cette différence de moyenne d'âge tombe à 4 ans. Quatre ans et quelques mois. Donc, il ne faut pas accuser le Sénat d'être le refuge de personnes âgées, c'est le contraire. Deuxièmement, on nous a dit : " Oh, ils sont vraiment anti-féministes ", rappelez-vous la loi sur la parité, il m'est agréable de vous dire au passage que cette loi sur la parité a été améliorée au Sénat.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Vous n'en étiez pas un très chaud partisan.
CHRISTIAN PONCELET
Ah non, ce que nous avons dit au départ et c'est ce qui a été mal interprété, c'était que la loi qui nous était présentée et qui était quelque peu modifiée par l'Assemblée nationale, même déformée sur certains points, cette loi ne correspondait pas à ce qui est souhaité. Par conséquent nous l'avons modifiée. Nous avons ajouté, ce qui est assez rare dans un projet de loi constitutionnel, un article supplémentaire pour responsabiliser les partis politiques. C'est ce projet de loi modifié au Sénat, et voté sans modification en seconde lecture par l'Assemblée nationale, qui a été soumis à l'appréciation du Parlement réuni en congrès à Versailles, Je me suis réjoui que, lors du renouvellement, il y ait plusieurs femmes qui soient entrées au Sénat.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
35 femmes maintenant, c'est à peu près le même pourcentage et même un peu plus que l'Assemblée...
CHRISTIAN PONCELET
Un peu plus que l'Assemblée nationale. Voilà, jeunesse et féminisation, deux arguments qui tombent lorsqu'on accuse le Sénat. Je ferai remarquer que le fait que l'on ait couplé à la fois la proportionnelle et la parité, a privé beaucoup de femmes d'entrer au Sénat. Comme vous l'avez remarqué, il y a une seule liste parmi les grandes formations politiques, et c'est là qu'intervient la règle de trois, une seule liste conduite par une femme.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Précisément, le couplage avec la proportionnelle, pour les départements où on élit plus de trois sénateurs, si je ne me trompe...
CHRISTIAN PONCELET
Non, trois sénateurs ou plus.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Trois sénateurs, c'est ça, a permis aussi peut-être un rééquilibrage droite/gauche, donc un Sénat plus représentatif ?
CHRISTIAN PONCELET
Oh, les rapports de force ne sont pas...
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Ils ont été modifiés, il y a 13 sièges de plus pour la gauche.
CHRISTIAN PONCELET
Très légèrement, étalés sur plusieurs formations. Si je me réfère à la formation à laquelle j'appartiens, nous avons un déficit de deux sièges, mais il est vrai que nous étions représentés dans de très nombreux départements. Il y a eu un léger rééquilibrage mais les rapports de force ne sont pas changés.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Alors, quelles propositions très concrètes est-ce que vous allez faire pour modifier le Sénat ?
CHRISTIAN PONCELET
Eh bien, écoutez, j'aurai l'occasion de m'en expliquer avec le Sénat. Il y a un point sur lequel j'insisterai tout particulièrement, c'est la modification de la durée du mandat. Cette question a déjà été soulevée dans le passé, elle a été soulevée aussi par certains hommes politiques.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Rappelons pour ceux qui nous écoutent que c'est un mandat de neuf ans.
CHRISTIAN PONCELET
Permettez-moi de vous faire observer que de nombreux ministres, de nombreux députés qui avaient critiqué le Sénat, n'avaient pas de termes assez forts pour le condamner, je les vois aujourd'hui arriver au Sénat, même des ministres en exercice. Ce qui veut dire que, contrairement à ce qu'ils disaient hier, ils portent une considération forte à la Haute Assemblée, et je m'en félicite.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Et vous allez dire qu'une fois qu'on est au Sénat, on n'a pas tellement envie de voir le mandat écourté.
CHRISTIAN PONCELET
Oui, mais il y a une consultation qui a été réalisée auprès de tous les sénateurs. A 70 % ils ont considéré, compte tenu de la réduction du mandat présidentiel qui passe donc de 7 ans à 5 ans, qu'il convenait peut-être de réduire notre mandat. L'idée que j'ai lancée serait de réduire le mandat à 6 ans. Je leur ai dit cela en ajoutant : " attention, attention, il s'agit pour nous de prendre cette initiative pour ne pas qu'on nous impose demain, mais d'autre part il s'agit au travers de cette réforme, de demander un renforcement des pouvoirs du Sénat, car le Sénat aujourd'hui a en compétence la défense des collectivités territoriales, c'est en toutes lettres dans la Constitution. Il faut donc que l'on donne le dernier mot au Sénat quand il s'agit de légiférer pour les collectivités territoriales ".
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Mais alors deux choses. La première : donc vous allez, durant votre mandat, tout faire pour que cette mandature soit réduite à 6 ans.
CHRISTIAN PONCELET
C'est une proposition que je ferai.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Deuxièmement, quand vous dites, en ce qui concerne la représentation des collectivités territoriales, est-ce qu'il faut aller encore plus loin et faire du Sénat, vraiment, la chambre des collectivités territoriales, la chambre des régions par exemple ? Parce qu'on a le sentiment qu'il y a parfois entre le Sénat et l'Assemblée nationale, un peu doublure, non ?
CHRISTIAN PONCELET
Mais c'est une très bonne chose, pour la raison suivante : le Sénat est une assemblée législative à part entière mais qui, en plus, a une compétence de représentation des collectivités territoriales. Cette compétence permet au Sénat -et cela est reconnu, il suffit de lire les travaux du Parlement- de modifier et de corriger les propositions et projets de loi qui sont soumis à son appréciation. C'est ainsi qu'à peu près 68 % des amendements présentés par le Sénat sont acceptés par le gouvernement et la majorité actuelle. Comme l'a dit mieux que moi, Jules Ferry, mon illustre prédécesseur, " le Sénat est là pour veiller à ce que la loi soit bien faite " et c'est ce que nous faisons, et en plus nous exerçons un contrôle permanent sur l'action du gouvernement. Je sais bien que tous les gouvernements, quels qu'ils soient, n'aiment pas cela. Nous ne sommes pas contre les pouvoirs mais nous sommes un contre-pouvoir en quelque sorte, pour veiller à ce qu'il n'y ait pas de dérapage, pour veiller à ce qu'il n'y ait pas d'excès dans la démarche législative. N'oublions pas que le Sénat, l'Assemblée des sages, a été créé après que l'Assemblée nationale unique s'est comportée de telle manière qu'elle a conduit à la Terreur.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Alors, session parlementaire qui vient de s'ouvrir et qui va commencer par un débat, d'abord à l'Assemblée nationale puis au Sénat, sur la politique étrangère après les attentats du 11 septembre. Alors deux questions. La première : Lionel Jospin va s'exprimer, va faire une déclaration de politique étrangère. Ca vous paraît opportun, légitime, ou est-ce que vous avez le sentiment, comme quelques-uns à l'avance, que, dans cette épreuve de cohabitation, chacun cherche à aller un peu sur le terrain de l'autre, autrement dit du Président de la République ?
CHRISTIAN PONCELET
Non, il ne faut pas, en la circonstance, introduire dans un débat de cette nature, la polémique, c'est un sujet sérieux. Le terrorisme se développe sur l'ensemble de la planète. Le Premier ministre va faire une déclaration devant l'Assemblée nationale jeudi prochain 4 octobre.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
C'est ça.
CHRISTIAN PONCELET
Il devait venir le lendemain.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
C'est la tradition.
CHRISTIAN PONCELET
Oui, c'est la tradition.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Ou représenté par le ministre des Affaires étrangères.
CHRISTIAN PONCELET
Voilà. Je viens d'avoir un entretien avec lui et il a convenu que plutôt que de venir ou d'envoyer son ministre des Affaires étrangères relire la déclaration qu'il aura faite la veille à l'Assemblée nationale, peut-être était-il souhaitable de venir quelque temps après. Et il m'est agréable de vous dire qu'il a bien voulu accepter la proposition que j'avais faite, de venir la semaine prochaine. Il viendra le 10 octobre et il répondra à une série de questions. C'est extrêmement important, je voudrais objectivement le remercier d'avoir accepté cette démarche, très sincèrement, parce que entre le 4 et le 10, une semaine, il peut se passer beaucoup d'événements et, par conséquent, sa déclaration devant le Sénat peut prendre une tonalité nouvelle, on peut avoir la possibilité de lui poser des questions sur des événements nouveaux que l'on ne soupçonne pas aujourd'hui. Donc, je me félicite que ce débat de politique étrangère ait été organisé différemment des précédents.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
On appelle ça un débat mais en fait ce sont des réunions quasiment d'informations. Le Premier ministre s'exprime, explique ce que fait le gouvernement et vous allez lui poser un certain nombre de questions pour être mieux informé, ce n'est pas à proprement parlé un débat. Je veux dire ce n'est pas un échange contradictoire sur la politique étrangère de la France, si ?
CHRISTIAN PONCELET
Il y aura tout de même au travers des réponses qui lui sont posées, des contradictions qui pourront être présentées à certaines de ses déclarations. Mais pour ma part et j'y veillerais, il faut que ce débat garde une très grande sérénité, c'est un débat sur un sujet sérieux. Et comme toujours le Sénat, saura raison gardée. Il faut traiter avec réalisme et avec patience ce sujet extrêmement important et douloureux qu'est le terrorisme.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Quelle est la position du président du Sénat, la position personnelle ? Votre position personnelle sur ces événements ? Je veux dire sur la solidarité avec les Etats-Unis. Est-ce que c'est une solidarité qui doit être assortie de réserves ou pas ?
CHRISTIAN PONCELET
J'ai exprimé une totale solidarité avec le peuple américain et son gouvernement, ceci est clair. Nous sommes prêts à intervenir, aux côtés des Américains, c'est mon sentiment. Mais il va de soi qu'il faudra définir ensemble les interventions à réaliser. Nous ne devons pas avoir la moindre hésitation en ce qui concerne les concours à apporter au peuple américain. Il y a un point où je tiens à rendre hommage au gouvernement américain et au peuple américain. Le gouvernement américain a su garder toute sa sérénité, après la forte émotion soulevée par cette monstruosité qu'à été l'attentat des avions, qui étaient des avions bombes avec des passagers à bord. Le gouvernement a su contenir son émotion et éviter l'intervention brutale sur un point déterminé du globe, qui aurait frappé des innocents. Parce qu'il faut réfléchir à la circonstance, il faut cibler le secteur sur lequel on veut intervenir. Et puis je pose une question, mais qui peut m'y répondre ? Est-on certain de savoir qui en est l'auteur... ?
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Oussama BEN LADEN.
CHRISTIAN PONCELET
Oussama BEN LADEN est toujours en Afghanistan ?
PIERRE-LUC SÉGUILLON
En tout cas, c'est ce que disent les taliban.
CHRISTIAN PONCELET
C'est ce qu'ils disent, je ne suis pas obligé d'accorder crédit à leurs propos.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Attendez, vous êtes un Européen convaincu, si je ne me trompe pas.
CHRISTIAN PONCELET
Très convaincu.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Alors vous avez beaucoup défendu la cause européenne, la voix unique des européens, vous n'êtes pas frappé d'une chose, dans cette affaire, on a encore entendu Tony BLAIR lancé quasiment un ultimatum aujourd'hui aux taliban, on a parlé de commandos britanniques qui sont déjà à l'oeuvre avec les commandos américains. Est-ce que l'Europe marche...
CHRISTIAN PONCELET
Ca n'a pas été confirmé ça.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Mais enfin est-que l'Europe marche d'une même voie et d'un même pas dans cette affaire ?
CHRISTIAN PONCELET
Je constate, pour m'en réjouir en quelque sorte, c'est que les grandes démocraties en la circonstance s'unissent. Et le point fort c'est que POUTINE a répondu : " je suis aux côtés des Américains. La Russie est aux côtés des Américains pour lutter contre le terrorisme ". L'Europe, elle aussi, doit s'associer. Je voudrais qu'aucune démocratie digne de ce nom, ne puisse s'écarter...
PIERRE-LUC SÉGUILLON
... Puisse s'associer davantage comme corps collectif ou à travers les différents...
CHRISTIAN PONCELET
C'est à définir, les Américains eux-mêmes l'ont dit. Sur certains points nous demanderons une collaboration de telle nature, c'est-à-dire comme celle qui vient de s'exprimer dans l'ensemble des pays des démocraties : le blocage des fonds qui alimentent le terrorisme. Je crois que tous les pays, excepté peut-être l'Irak, mais tous les pays dit démocratiques ont souscrit à cette proposition. Cette solidarité s'exprimera en concertation avec nos amis américains.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Dites-moi au passage, vous avez dit " on n'est pas sûr que BEN LADEN soit en Afghanistan ". Est-ce que vous pensez qu'il faut être plus sévère vis-à-vis du régime saoudien et de l'Arabie Saoudite qui est à la fois le foyer historique, voire le foyer financier, voire le foyer politique, de ce fondamentalisme terreau du terrorisme ?
CHRISTIAN PONCELET
C'est une question à laquelle il est difficile de répondre.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Alors revenons à l'Assemblée ou plus exactement au Sénat, au Parlement. Vous allez avoir à discuter le projet de loi sur l'insécurité quotidienne. Est-ce que Lionel Jospin le Premier ministre a dit lui-même qu'il mériterait d'être complété en fonction de ce qui s'est passé le 11 septembre, pour faire face aux attentats terroristes en tout cas la menace terroriste. Vous allez formuler des propositions précises au Sénat ? Pour corriger ou compléter cette loi sur la sécurité quotidienne ?
CHRISTIAN PONCELET
Nous ne connaissons pas encore toutes les dispositions qui vont être proposées. Mais le Sénat comme toujours apportera sa contribution. Je crois que les propositions qui seront faites par le Premier ministre et qui tendent précisément à terroriser le terrorisme, à limiter ses effets, ces dispositions seront sans aucun doute approuvées par le Sénat. Et puis, il y a toute une série de mesures que nous voudrions prendre dans la loi sécurité, qui va être votée. Elles concernent les catastrophes comme celle de Toulouse. Là, il est urgent que nous arrêtions quelques dispositions.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Je vous arrête, oui, justement parce que vous êtes maire, aussi, vous savez comment les choses fonctionnent, il faudrait davantage de pouvoir pour les maires ou...
CHRISTIAN PONCELET
Il faudrait d'abord changer la nature des contrôles qui sont effectués sur ces sites.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
A risques.
CHRISTIAN PONCELET
Ces sites à risques, par exemple au lieu de se contenter des déclarations faites par les chefs d'entreprise sur certains points qui sont posés. Peut-être faudrait-il vérifier soi-même que toutes les dispositions sont bien prises. C'est le changement de la nature du contrôle. Et deuxièmement, le changement de niveau du contrôle. Je ne suis pas loin de penser qu'il faudrait, en ce qui concerne la nature du niveau de contrôle, avoir un niveau de contrôle comparable à celui qui existe pour les centrales nucléaires, en ce qui concerne ces sites à hauts risques. Afin que l'on puisse obtenir toutes les garanties nécessaires.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Autrement un contrôle quasi permanent, parce que c'est bien ce qui se passe pour les centrales nucléaires ?
CHRISTIAN PONCELET
Oui, un contrôle permanent. En ce qui concerne Toulouse, comme vous le savez, il y a encore un point d'interrogation.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Bien alors projet de loi de finances, c'est toujours bien sûr le grand texte que discutent les parlementaires et que vont discuter les sénateurs. On a beaucoup débattu, avant même qu'il ne soit discuté du projet de loi de finances présenté en conseil des ministres. Certains dans l'opposition, dit qu'il était irréaliste, parce qu'il se fondait sur une croissance de 2,5 %. Le ministre de l'Economie et des Finances, Laurent Fabius, a déjà dit aujourd'hui que cette croissance, qu'il avait mise dans une fourchette 2,5 - 2,3 elle serait plus près de 2 %. Il a dit y avoir un rapport économique et financier annexé à la loi de finances qui va dans ce sens. Ce correctif étant fait, qu'est-ce que vous pensez, vous de la loi de finances ?
CHRISTIAN PONCELET
Je pense que cette loi de finances est virtuelle. Elle n'est pas construite sur des bases solides. La croissance était déjà en diminution, l'exercice qui se termine va le démontrer, même en forte diminution. On a rectifié trois fois de suite, le niveau de croissance retenu au début de l'exercice. Et cette déclinaison de la croissance va se trouver malheureusement amplifiée par tous ces événements. Il n'y a pas un expert qui ne considère que les événements vont avoir un effet négatif sur la croissance. Donc dire qu'on aura une croissance de 2 et quelque, c'est manifestement faire preuve d'un grand optimisme. Et c'est se préparer au rejet. Le taux de croissance des ressources ne sera pas au rendez-vous, on le voit actuellement. Regardez le déficit, il est déjà en forte augmentation pour l'exercice en cours. C'est un budget qui manifestement est électoral.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Vous voulez dire, attendez, vous voulez dire qu'on se prépare à une bataille un peu dure, notamment au Sénat, sur ce budget ou vous avez, quand je dis " vous " l'opposition avez la majorité, l'opposition parlementaire avez la majorité au Sénat, vous vous préparez à une bataille ?
CHRISTIAN PONCELET
Non, il faudra dire les choses telles qu'elles sont. Actuellement, écoutez, on a pris une mesure qui s'appelle les 35 heures. Quand on a pris cette mesure, quelle a été l'observation que nous avons faite ? On dit : " Cette mesure nous voulons qu'elle soit chiffrée. " Et nous voulons que l'on nous dise dès maintenant, avant son application, comment on va la financer ? On n'a pas répondu à ces deux questions et aujourd'hui nous nous trouvons dans l'embarras, puisqu'on est obligé de puiser dans les excédents de la Sécurité sociale, mettant la caisse en déficit. On est obligé de prendre le produit de la taxe sur les entreprises pour financer les 35 heures. Vraiment c'est une politique un peu au jour le jour qui est faite. Ce n'est pas sérieux. Et on n'a pas fini de financer tout.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Permettez une dernière question avant la fin de cette émission. Vous connaissez bien Jacques CHIRAC, vous le fréquentez, vous le voyez souvent, vous savez bien comment il réagit. Il va y avoir cette réunion de la Cour de cassation, qui va statuer sur le statut pénal du chef de l'Etat. A la veille de cette réunion l'Avocat général a confirmé le statut particulier du chef de l'Etat. Néanmoins, il dit qu'à condition que toutes les mesures soient prises de garanties particulières conformes au statut du président, il peut être entendu, pourrait être entendu comme témoin. Qu'est-ce que vous lui conseilleriez à Jacques CHIRAC ?
CHRISTIAN PONCELET
Je lui conseillerais d'attendre le jugement prononcé par la Cour de cassation. Et quand le jugement sera prononcé, à ce moment-là, il sera suffisamment temps d'aviser. Aujourd'hui nous ne pouvons pas analyser une déclaration d'un Procureur général qui a pour but de prononcer une sanction. Il appartient à la Cour de se prononcer et c'est quand le jugement sera rendu que nous pourrons voir quelle est la nature de celui-ci, son importance et si il y a des dispositions à prendre ? Mais je suis confiant. Vous savez il faut cesser tout cela. Tout cela se dégonfle au fur et à mesure que l'on avance. Vous pensez que la situation actuelle du pays, sur le plan économique, sur le plan social, avec ses usines qui ferment, que la situation dans le monde se prête à ce qu'il y ait entre nous ces querelles, à ce qu'il y ait ces recherches de la tenue de l'attitude de l'un et de l'autre. Cela me paraît vraiment être quelque peu déplacé. Alors qu'aujourd'hui, il faudrait que l'on puisse mobiliser toutes nos forces, toutes nos énergies pour essayer de tirer dans le même sens et pouvoir faire face à cette situation à laquelle nous sommes confrontés. Le terrorisme est indivisible, il se manifestera partout. Nous avons l'obligation de serrer les coudes.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Merci, beaucoup. Tout de suite on retrouve le journal. FIN
(Source http://www.senat.fr, le 10 octobre 2001)
Christian PONCELET bonsoir.
CHRISTIAN PONCELET
Bonsoir.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Vous êtes à nouveau président du Sénat puisque vous avez été réélu hier soir pour un deuxième mandat de trois ans, avec un beau score, je crois qu'il est quasiment exceptionnel dans l'histoire du Sénat puisque, dès le premier tour, vous avez été réélu par 201 voix contre 105, une véritable élection de Maréchal...
CHRISTIAN PONCELET
Merci du compliment.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Alors, vous voilà reparti pour un deuxième mandat de trois ans, après donc le renouvellement triennal du Sénat qui a eu lieu il y a une semaine. Oh, une question au passage : vous avez 73 ans, c'est votre dernier mandat de président ou est-ce que vous pensez que vous en ferez encore un certain nombre, je veux dire, est-ce que vous allez faire comme les évêques et annoncer que, passés 71 ans...
CHRISTIAN PONCELET
Ecoutez, vous venez de l'indiquer, je commence un second mandat, laissez-moi l'accomplir, et puis au terme de celui-ci nous aviserons, n'est-ce pas.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Bon, alors, vous avez dit hier que vous alliez prendre un certain nombre d'initiatives pour... de réformes du Sénat, pour aller à l'encontre d'un procès qui serait fait au Sénat de manque de représentativité et de manque de légitimité. D'abord, qui est-ce qui fait ce procès, c'est.... ?
CHRISTIAN PONCELET
Oh, ce sont les hommes politiques, et cela est repris par les médias. Vous savez, on nous a adressé des propos bien souvent très inélégants. On a reproché au Sénat d'être une maison de retraite, et quand je regarde de plus près cette accusation, je constate que la différence de moyenne d'âge entre la moyenne d'âge de l'Assemblée, où on entre à 23 ans, et la moyenne d'âge du Sénat, où on entre à 35 ans, était de 6 ans. Après le renouvellement, il y a un fort rajeunissement, et cette différence de moyenne d'âge tombe à 4 ans. Quatre ans et quelques mois. Donc, il ne faut pas accuser le Sénat d'être le refuge de personnes âgées, c'est le contraire. Deuxièmement, on nous a dit : " Oh, ils sont vraiment anti-féministes ", rappelez-vous la loi sur la parité, il m'est agréable de vous dire au passage que cette loi sur la parité a été améliorée au Sénat.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Vous n'en étiez pas un très chaud partisan.
CHRISTIAN PONCELET
Ah non, ce que nous avons dit au départ et c'est ce qui a été mal interprété, c'était que la loi qui nous était présentée et qui était quelque peu modifiée par l'Assemblée nationale, même déformée sur certains points, cette loi ne correspondait pas à ce qui est souhaité. Par conséquent nous l'avons modifiée. Nous avons ajouté, ce qui est assez rare dans un projet de loi constitutionnel, un article supplémentaire pour responsabiliser les partis politiques. C'est ce projet de loi modifié au Sénat, et voté sans modification en seconde lecture par l'Assemblée nationale, qui a été soumis à l'appréciation du Parlement réuni en congrès à Versailles, Je me suis réjoui que, lors du renouvellement, il y ait plusieurs femmes qui soient entrées au Sénat.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
35 femmes maintenant, c'est à peu près le même pourcentage et même un peu plus que l'Assemblée...
CHRISTIAN PONCELET
Un peu plus que l'Assemblée nationale. Voilà, jeunesse et féminisation, deux arguments qui tombent lorsqu'on accuse le Sénat. Je ferai remarquer que le fait que l'on ait couplé à la fois la proportionnelle et la parité, a privé beaucoup de femmes d'entrer au Sénat. Comme vous l'avez remarqué, il y a une seule liste parmi les grandes formations politiques, et c'est là qu'intervient la règle de trois, une seule liste conduite par une femme.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Précisément, le couplage avec la proportionnelle, pour les départements où on élit plus de trois sénateurs, si je ne me trompe...
CHRISTIAN PONCELET
Non, trois sénateurs ou plus.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Trois sénateurs, c'est ça, a permis aussi peut-être un rééquilibrage droite/gauche, donc un Sénat plus représentatif ?
CHRISTIAN PONCELET
Oh, les rapports de force ne sont pas...
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Ils ont été modifiés, il y a 13 sièges de plus pour la gauche.
CHRISTIAN PONCELET
Très légèrement, étalés sur plusieurs formations. Si je me réfère à la formation à laquelle j'appartiens, nous avons un déficit de deux sièges, mais il est vrai que nous étions représentés dans de très nombreux départements. Il y a eu un léger rééquilibrage mais les rapports de force ne sont pas changés.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Alors, quelles propositions très concrètes est-ce que vous allez faire pour modifier le Sénat ?
CHRISTIAN PONCELET
Eh bien, écoutez, j'aurai l'occasion de m'en expliquer avec le Sénat. Il y a un point sur lequel j'insisterai tout particulièrement, c'est la modification de la durée du mandat. Cette question a déjà été soulevée dans le passé, elle a été soulevée aussi par certains hommes politiques.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Rappelons pour ceux qui nous écoutent que c'est un mandat de neuf ans.
CHRISTIAN PONCELET
Permettez-moi de vous faire observer que de nombreux ministres, de nombreux députés qui avaient critiqué le Sénat, n'avaient pas de termes assez forts pour le condamner, je les vois aujourd'hui arriver au Sénat, même des ministres en exercice. Ce qui veut dire que, contrairement à ce qu'ils disaient hier, ils portent une considération forte à la Haute Assemblée, et je m'en félicite.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Et vous allez dire qu'une fois qu'on est au Sénat, on n'a pas tellement envie de voir le mandat écourté.
CHRISTIAN PONCELET
Oui, mais il y a une consultation qui a été réalisée auprès de tous les sénateurs. A 70 % ils ont considéré, compte tenu de la réduction du mandat présidentiel qui passe donc de 7 ans à 5 ans, qu'il convenait peut-être de réduire notre mandat. L'idée que j'ai lancée serait de réduire le mandat à 6 ans. Je leur ai dit cela en ajoutant : " attention, attention, il s'agit pour nous de prendre cette initiative pour ne pas qu'on nous impose demain, mais d'autre part il s'agit au travers de cette réforme, de demander un renforcement des pouvoirs du Sénat, car le Sénat aujourd'hui a en compétence la défense des collectivités territoriales, c'est en toutes lettres dans la Constitution. Il faut donc que l'on donne le dernier mot au Sénat quand il s'agit de légiférer pour les collectivités territoriales ".
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Mais alors deux choses. La première : donc vous allez, durant votre mandat, tout faire pour que cette mandature soit réduite à 6 ans.
CHRISTIAN PONCELET
C'est une proposition que je ferai.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Deuxièmement, quand vous dites, en ce qui concerne la représentation des collectivités territoriales, est-ce qu'il faut aller encore plus loin et faire du Sénat, vraiment, la chambre des collectivités territoriales, la chambre des régions par exemple ? Parce qu'on a le sentiment qu'il y a parfois entre le Sénat et l'Assemblée nationale, un peu doublure, non ?
CHRISTIAN PONCELET
Mais c'est une très bonne chose, pour la raison suivante : le Sénat est une assemblée législative à part entière mais qui, en plus, a une compétence de représentation des collectivités territoriales. Cette compétence permet au Sénat -et cela est reconnu, il suffit de lire les travaux du Parlement- de modifier et de corriger les propositions et projets de loi qui sont soumis à son appréciation. C'est ainsi qu'à peu près 68 % des amendements présentés par le Sénat sont acceptés par le gouvernement et la majorité actuelle. Comme l'a dit mieux que moi, Jules Ferry, mon illustre prédécesseur, " le Sénat est là pour veiller à ce que la loi soit bien faite " et c'est ce que nous faisons, et en plus nous exerçons un contrôle permanent sur l'action du gouvernement. Je sais bien que tous les gouvernements, quels qu'ils soient, n'aiment pas cela. Nous ne sommes pas contre les pouvoirs mais nous sommes un contre-pouvoir en quelque sorte, pour veiller à ce qu'il n'y ait pas de dérapage, pour veiller à ce qu'il n'y ait pas d'excès dans la démarche législative. N'oublions pas que le Sénat, l'Assemblée des sages, a été créé après que l'Assemblée nationale unique s'est comportée de telle manière qu'elle a conduit à la Terreur.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Alors, session parlementaire qui vient de s'ouvrir et qui va commencer par un débat, d'abord à l'Assemblée nationale puis au Sénat, sur la politique étrangère après les attentats du 11 septembre. Alors deux questions. La première : Lionel Jospin va s'exprimer, va faire une déclaration de politique étrangère. Ca vous paraît opportun, légitime, ou est-ce que vous avez le sentiment, comme quelques-uns à l'avance, que, dans cette épreuve de cohabitation, chacun cherche à aller un peu sur le terrain de l'autre, autrement dit du Président de la République ?
CHRISTIAN PONCELET
Non, il ne faut pas, en la circonstance, introduire dans un débat de cette nature, la polémique, c'est un sujet sérieux. Le terrorisme se développe sur l'ensemble de la planète. Le Premier ministre va faire une déclaration devant l'Assemblée nationale jeudi prochain 4 octobre.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
C'est ça.
CHRISTIAN PONCELET
Il devait venir le lendemain.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
C'est la tradition.
CHRISTIAN PONCELET
Oui, c'est la tradition.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Ou représenté par le ministre des Affaires étrangères.
CHRISTIAN PONCELET
Voilà. Je viens d'avoir un entretien avec lui et il a convenu que plutôt que de venir ou d'envoyer son ministre des Affaires étrangères relire la déclaration qu'il aura faite la veille à l'Assemblée nationale, peut-être était-il souhaitable de venir quelque temps après. Et il m'est agréable de vous dire qu'il a bien voulu accepter la proposition que j'avais faite, de venir la semaine prochaine. Il viendra le 10 octobre et il répondra à une série de questions. C'est extrêmement important, je voudrais objectivement le remercier d'avoir accepté cette démarche, très sincèrement, parce que entre le 4 et le 10, une semaine, il peut se passer beaucoup d'événements et, par conséquent, sa déclaration devant le Sénat peut prendre une tonalité nouvelle, on peut avoir la possibilité de lui poser des questions sur des événements nouveaux que l'on ne soupçonne pas aujourd'hui. Donc, je me félicite que ce débat de politique étrangère ait été organisé différemment des précédents.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
On appelle ça un débat mais en fait ce sont des réunions quasiment d'informations. Le Premier ministre s'exprime, explique ce que fait le gouvernement et vous allez lui poser un certain nombre de questions pour être mieux informé, ce n'est pas à proprement parlé un débat. Je veux dire ce n'est pas un échange contradictoire sur la politique étrangère de la France, si ?
CHRISTIAN PONCELET
Il y aura tout de même au travers des réponses qui lui sont posées, des contradictions qui pourront être présentées à certaines de ses déclarations. Mais pour ma part et j'y veillerais, il faut que ce débat garde une très grande sérénité, c'est un débat sur un sujet sérieux. Et comme toujours le Sénat, saura raison gardée. Il faut traiter avec réalisme et avec patience ce sujet extrêmement important et douloureux qu'est le terrorisme.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Quelle est la position du président du Sénat, la position personnelle ? Votre position personnelle sur ces événements ? Je veux dire sur la solidarité avec les Etats-Unis. Est-ce que c'est une solidarité qui doit être assortie de réserves ou pas ?
CHRISTIAN PONCELET
J'ai exprimé une totale solidarité avec le peuple américain et son gouvernement, ceci est clair. Nous sommes prêts à intervenir, aux côtés des Américains, c'est mon sentiment. Mais il va de soi qu'il faudra définir ensemble les interventions à réaliser. Nous ne devons pas avoir la moindre hésitation en ce qui concerne les concours à apporter au peuple américain. Il y a un point où je tiens à rendre hommage au gouvernement américain et au peuple américain. Le gouvernement américain a su garder toute sa sérénité, après la forte émotion soulevée par cette monstruosité qu'à été l'attentat des avions, qui étaient des avions bombes avec des passagers à bord. Le gouvernement a su contenir son émotion et éviter l'intervention brutale sur un point déterminé du globe, qui aurait frappé des innocents. Parce qu'il faut réfléchir à la circonstance, il faut cibler le secteur sur lequel on veut intervenir. Et puis je pose une question, mais qui peut m'y répondre ? Est-on certain de savoir qui en est l'auteur... ?
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Oussama BEN LADEN.
CHRISTIAN PONCELET
Oussama BEN LADEN est toujours en Afghanistan ?
PIERRE-LUC SÉGUILLON
En tout cas, c'est ce que disent les taliban.
CHRISTIAN PONCELET
C'est ce qu'ils disent, je ne suis pas obligé d'accorder crédit à leurs propos.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Attendez, vous êtes un Européen convaincu, si je ne me trompe pas.
CHRISTIAN PONCELET
Très convaincu.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Alors vous avez beaucoup défendu la cause européenne, la voix unique des européens, vous n'êtes pas frappé d'une chose, dans cette affaire, on a encore entendu Tony BLAIR lancé quasiment un ultimatum aujourd'hui aux taliban, on a parlé de commandos britanniques qui sont déjà à l'oeuvre avec les commandos américains. Est-ce que l'Europe marche...
CHRISTIAN PONCELET
Ca n'a pas été confirmé ça.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Mais enfin est-que l'Europe marche d'une même voie et d'un même pas dans cette affaire ?
CHRISTIAN PONCELET
Je constate, pour m'en réjouir en quelque sorte, c'est que les grandes démocraties en la circonstance s'unissent. Et le point fort c'est que POUTINE a répondu : " je suis aux côtés des Américains. La Russie est aux côtés des Américains pour lutter contre le terrorisme ". L'Europe, elle aussi, doit s'associer. Je voudrais qu'aucune démocratie digne de ce nom, ne puisse s'écarter...
PIERRE-LUC SÉGUILLON
... Puisse s'associer davantage comme corps collectif ou à travers les différents...
CHRISTIAN PONCELET
C'est à définir, les Américains eux-mêmes l'ont dit. Sur certains points nous demanderons une collaboration de telle nature, c'est-à-dire comme celle qui vient de s'exprimer dans l'ensemble des pays des démocraties : le blocage des fonds qui alimentent le terrorisme. Je crois que tous les pays, excepté peut-être l'Irak, mais tous les pays dit démocratiques ont souscrit à cette proposition. Cette solidarité s'exprimera en concertation avec nos amis américains.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Dites-moi au passage, vous avez dit " on n'est pas sûr que BEN LADEN soit en Afghanistan ". Est-ce que vous pensez qu'il faut être plus sévère vis-à-vis du régime saoudien et de l'Arabie Saoudite qui est à la fois le foyer historique, voire le foyer financier, voire le foyer politique, de ce fondamentalisme terreau du terrorisme ?
CHRISTIAN PONCELET
C'est une question à laquelle il est difficile de répondre.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Alors revenons à l'Assemblée ou plus exactement au Sénat, au Parlement. Vous allez avoir à discuter le projet de loi sur l'insécurité quotidienne. Est-ce que Lionel Jospin le Premier ministre a dit lui-même qu'il mériterait d'être complété en fonction de ce qui s'est passé le 11 septembre, pour faire face aux attentats terroristes en tout cas la menace terroriste. Vous allez formuler des propositions précises au Sénat ? Pour corriger ou compléter cette loi sur la sécurité quotidienne ?
CHRISTIAN PONCELET
Nous ne connaissons pas encore toutes les dispositions qui vont être proposées. Mais le Sénat comme toujours apportera sa contribution. Je crois que les propositions qui seront faites par le Premier ministre et qui tendent précisément à terroriser le terrorisme, à limiter ses effets, ces dispositions seront sans aucun doute approuvées par le Sénat. Et puis, il y a toute une série de mesures que nous voudrions prendre dans la loi sécurité, qui va être votée. Elles concernent les catastrophes comme celle de Toulouse. Là, il est urgent que nous arrêtions quelques dispositions.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Je vous arrête, oui, justement parce que vous êtes maire, aussi, vous savez comment les choses fonctionnent, il faudrait davantage de pouvoir pour les maires ou...
CHRISTIAN PONCELET
Il faudrait d'abord changer la nature des contrôles qui sont effectués sur ces sites.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
A risques.
CHRISTIAN PONCELET
Ces sites à risques, par exemple au lieu de se contenter des déclarations faites par les chefs d'entreprise sur certains points qui sont posés. Peut-être faudrait-il vérifier soi-même que toutes les dispositions sont bien prises. C'est le changement de la nature du contrôle. Et deuxièmement, le changement de niveau du contrôle. Je ne suis pas loin de penser qu'il faudrait, en ce qui concerne la nature du niveau de contrôle, avoir un niveau de contrôle comparable à celui qui existe pour les centrales nucléaires, en ce qui concerne ces sites à hauts risques. Afin que l'on puisse obtenir toutes les garanties nécessaires.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Autrement un contrôle quasi permanent, parce que c'est bien ce qui se passe pour les centrales nucléaires ?
CHRISTIAN PONCELET
Oui, un contrôle permanent. En ce qui concerne Toulouse, comme vous le savez, il y a encore un point d'interrogation.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Bien alors projet de loi de finances, c'est toujours bien sûr le grand texte que discutent les parlementaires et que vont discuter les sénateurs. On a beaucoup débattu, avant même qu'il ne soit discuté du projet de loi de finances présenté en conseil des ministres. Certains dans l'opposition, dit qu'il était irréaliste, parce qu'il se fondait sur une croissance de 2,5 %. Le ministre de l'Economie et des Finances, Laurent Fabius, a déjà dit aujourd'hui que cette croissance, qu'il avait mise dans une fourchette 2,5 - 2,3 elle serait plus près de 2 %. Il a dit y avoir un rapport économique et financier annexé à la loi de finances qui va dans ce sens. Ce correctif étant fait, qu'est-ce que vous pensez, vous de la loi de finances ?
CHRISTIAN PONCELET
Je pense que cette loi de finances est virtuelle. Elle n'est pas construite sur des bases solides. La croissance était déjà en diminution, l'exercice qui se termine va le démontrer, même en forte diminution. On a rectifié trois fois de suite, le niveau de croissance retenu au début de l'exercice. Et cette déclinaison de la croissance va se trouver malheureusement amplifiée par tous ces événements. Il n'y a pas un expert qui ne considère que les événements vont avoir un effet négatif sur la croissance. Donc dire qu'on aura une croissance de 2 et quelque, c'est manifestement faire preuve d'un grand optimisme. Et c'est se préparer au rejet. Le taux de croissance des ressources ne sera pas au rendez-vous, on le voit actuellement. Regardez le déficit, il est déjà en forte augmentation pour l'exercice en cours. C'est un budget qui manifestement est électoral.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Vous voulez dire, attendez, vous voulez dire qu'on se prépare à une bataille un peu dure, notamment au Sénat, sur ce budget ou vous avez, quand je dis " vous " l'opposition avez la majorité, l'opposition parlementaire avez la majorité au Sénat, vous vous préparez à une bataille ?
CHRISTIAN PONCELET
Non, il faudra dire les choses telles qu'elles sont. Actuellement, écoutez, on a pris une mesure qui s'appelle les 35 heures. Quand on a pris cette mesure, quelle a été l'observation que nous avons faite ? On dit : " Cette mesure nous voulons qu'elle soit chiffrée. " Et nous voulons que l'on nous dise dès maintenant, avant son application, comment on va la financer ? On n'a pas répondu à ces deux questions et aujourd'hui nous nous trouvons dans l'embarras, puisqu'on est obligé de puiser dans les excédents de la Sécurité sociale, mettant la caisse en déficit. On est obligé de prendre le produit de la taxe sur les entreprises pour financer les 35 heures. Vraiment c'est une politique un peu au jour le jour qui est faite. Ce n'est pas sérieux. Et on n'a pas fini de financer tout.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Permettez une dernière question avant la fin de cette émission. Vous connaissez bien Jacques CHIRAC, vous le fréquentez, vous le voyez souvent, vous savez bien comment il réagit. Il va y avoir cette réunion de la Cour de cassation, qui va statuer sur le statut pénal du chef de l'Etat. A la veille de cette réunion l'Avocat général a confirmé le statut particulier du chef de l'Etat. Néanmoins, il dit qu'à condition que toutes les mesures soient prises de garanties particulières conformes au statut du président, il peut être entendu, pourrait être entendu comme témoin. Qu'est-ce que vous lui conseilleriez à Jacques CHIRAC ?
CHRISTIAN PONCELET
Je lui conseillerais d'attendre le jugement prononcé par la Cour de cassation. Et quand le jugement sera prononcé, à ce moment-là, il sera suffisamment temps d'aviser. Aujourd'hui nous ne pouvons pas analyser une déclaration d'un Procureur général qui a pour but de prononcer une sanction. Il appartient à la Cour de se prononcer et c'est quand le jugement sera rendu que nous pourrons voir quelle est la nature de celui-ci, son importance et si il y a des dispositions à prendre ? Mais je suis confiant. Vous savez il faut cesser tout cela. Tout cela se dégonfle au fur et à mesure que l'on avance. Vous pensez que la situation actuelle du pays, sur le plan économique, sur le plan social, avec ses usines qui ferment, que la situation dans le monde se prête à ce qu'il y ait entre nous ces querelles, à ce qu'il y ait ces recherches de la tenue de l'attitude de l'un et de l'autre. Cela me paraît vraiment être quelque peu déplacé. Alors qu'aujourd'hui, il faudrait que l'on puisse mobiliser toutes nos forces, toutes nos énergies pour essayer de tirer dans le même sens et pouvoir faire face à cette situation à laquelle nous sommes confrontés. Le terrorisme est indivisible, il se manifestera partout. Nous avons l'obligation de serrer les coudes.
PIERRE-LUC SÉGUILLON
Merci, beaucoup. Tout de suite on retrouve le journal. FIN
(Source http://www.senat.fr, le 10 octobre 2001)