Déclaration de M. Alain Juppé, Premier ministre et président du RPR, sur le bilan de l'action gouvernementale, les réformes entreprises et la nécessité de ressouder le Pacte républicain, Paris le 5 mai 1996.

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Circonstance : Convention des cadres et des élus RPR, Paris le 5 mai 1996

Texte intégral

Mes chers compagnons,
Merci d'avoir été aussi nombreux à répondre "présent" aujourd'hui.
Merci pour votre soutien chaleureux et pour votre action quotidienne, sur le terrain, auprès de nos concitoyens dont vous êtes les relais indispensables.
Oui, vous pouvez être fiers de ce que vous faites. C'est grâce à vous que nos idées sont débattues dans le pays, c'est grâce à vous que les décisions du Président de la République et du Gouvernement sont expliquées, illustrées et défendues, non seulement auprès de nos adhérents et sympathisants, mais aussi auprès de tous ceux de nos concitoyens que vous rencontrez dans vos permanences ou sur le terrain, c'est grâce à vous que notre démocratie est vivante.
Je vais vous faire une confidence : si je suis aussi heureux d'être là parmi vous, c'est parce que, comme à chacune de nos rencontres, je m'y retrouve en famille, notre famille gaulliste, ardente et généreuse, soudée et solidaire, comme doit l'être une vraie famille.
A deux jours de l'anniversaire d'une date essentielle pour l'histoire politique, de notre mouvement et de notre pays, je mesure à quel point votre enthousiasme est intact, et à quel point il m'est précieux.
Oui, j'ai besoin de vous. Vous avez joué un rôle décisif dans l'élection de Jacques CHIRAC et vous tenez aujourd'hui une place essentielle dans la mise en oeuvre de sa politique car vous êtes, vous aussi, constamment sur la brèche.
Je sais que vous avez été comme moi immensément heureux de l'élection de Jacques CHIRAC à la Présidence de la République. Pour beaucoup d'entre vous, c'était l'aboutissement d'une vie de militant, après plus de vingt ans d'engagement exemplaire pour faire revenir un gaulliste à la tête du pays.
Vous n'avez ménagé ni votre temps, ni votre peine. Jamais vous ne vous êtes découragés, toujours vous avez eu confiance, et dans les moments difficiles vous avez su avoir le sursaut nécessaire parce que, pour vous, la France commande tout, parce que la France mérite que l'on se dévoue entièrement pour elle. C'est cela, aussi, le tempérament gaulliste.
Avant de vous dire ce que nous avons déjà réalisé et ce que nous allons faire, je voudrais d'abord me féliciter avec vous de la bonne santé de notre Rassemblement.
Après l'élection présidentielle, notre mouvement a su faire preuve de dynamisme pour conserver sa place de première formation politique de notre pays.
Sa vitalité, sa capacité d'action sur le terrain et sa force de conviction, notre Rassemblement les puise en particulier dans sa force militante, la première de France et de loin.
Nous sommes aujourd'hui, grâce à vos efforts, plus de 151 000 adhérents et je tiens à remercier ici Jean-François Mancel, notre Secrétaire Général, ainsi que toute l'équipe formée autour de lui, pour l'action exemplaire qu'il déploie depuis sa nomination comme Secrétaire Général. Il a su, en 1995, porter nos effectifs au niveau le plus élevé depuis plus de 10 ans.
C'est à lui que revient l'initiative de la campagne d'adhésion que nous lançons aujourd'hui et que nous avons baptisée "1 + 1".
Son principe est simple : que chacun des nôtres, parmi ses proches, ses collègues de bureau, ses amis ou ses connaissances, apporte au Rassemblement une nouvelle adhésion.
Nous venons également de signer des contrats d'objectifs, liant chaque Fédération au Centre National. Merci encore cher Jean-François Mancel et cher Pierre Bedier, Délégué général aux Fédérations, d'avoir lancé et mené à bien cette démarche originale et dynamique qui doit stimuler nos cadres à tous les niveaux géographiques et donner, s'il est possible, plus de transparence encore aux relations entre le Centre National et nos Fédérations départementales.
Toutes ces initiatives illustrent la réalité de notre enthousiasme, la vitalité de nos convictions et notre fidélité à l'idéal gaulliste, enraciné dans le soutien populaire.
Notre mouvement tient la forme et il doit continuer de tenir le cap, avec cohérence, sans états d'âme, aux côtés de nos partenaires dans une majorité unie et solidaire.
La majorité parlementaire n'a d'ailleurs jamais fait défaut au Gouvernement, -ce dont je la remercie- puisqu'elle est animée de la même volonté réformatrice que le Gouvernement.
J'entends dire, ici ou là, que majorité ne signifie pas uniformité. C'est un sentiment que je partage totalement, et ce n'est pas un gaulliste qui dira le contraire.
Notre mouvement tire une fierté légitime de sa diversité et certains débats qui sont encore dans nos mémoires - je pense en particulier à celui relatif au Traité d'Union Européenne en 1992 - ont montré que cette diversité n'était pas un vain mot.
Je suis ouvert aux propositions des uns et des autres. Je souhaite que les instances de notre mouvement et de notre groupe parlementaire soient - comme cela a été le cas - depuis un an des lieux d'échanges et de discussions. Une fois le cap fixé ensemble et les arbitrages rendus, notre mouvement, et, au-delà, la majorité toute entière doivent en retour faire preuve de cohésion.
Bref, pour que notre démocratie fonctionne, il faut à la fois que le Gouvernement soit à l'écoute de sa majorité et que la majorité soit à l'appui de son Gouvernement. Je salue ici les présidents de nos groupes à l'Assemblée Nationale et au Sénat, Michel PERICARD et Josselin de ROHAN dont les conseils et le soutien me sont précieux. Je salue le Président de l'Assemblée Nationale Philippe SEGUIN qui, dans la fidélité de nos idées, a su redonner tout son rôle et tout son poids au travail parlementaire.
Mes chers compagnons, je veux maintenant vous rappeler ce que nous avons déjà réalisé et ce que nous allons faire. Notre bilan d'étape est important.
Vous le savez, la situation n'était pas facile et entreprendre des réformes de fond, utiles pour le pays, n'était pas sans risque, mais nous avions été élus pour réformer, avec une priorité absolue, l'emploi, vers lequel doit converger chacun de nos actes réformateurs.
On aime à dire que la France est incapable de se réformer. J'affirme ici qu'il n'en est rien. La France en est capable, lorsqu'elle trouve un sens aux réformes qu'on lui propose.
Certes, on ne change pas si facilement dans notre pays. Il convient de surmonter la résistance des intérêts particuliers ou catégoriels, en démontrant à nos concitoyens que la réforme est entreprise dans le sens du progrès collectif, grâce à une répartition équitable des efforts de chacun.
On ne peut plus gouverner la France comme on le faisait il y a 20 ou 40 ans, et l'on ne changera pas la France sans les Français. Il ne faut ruser ni avec elle, ni avec eux.
La grandeur d'une politique ne consiste pas à suivre l'opinion en cherchant coûte que coûte à lui plaire, mais au contraire à la guider, à la préparer aux évolutions nécessaires tout en tenant compte de ses craintes, même si elles ne paraissent pas rationnelles, et de ses appréhensions qu'il lui faut dominer.
Encore faut-il que les réformes aient un sens, perceptible par tous nos concitoyens et je voudrais insister devant vous sur une idée qui est, hélas, devenue un sujet tabou.
Sa prise en compte conditionne pourtant la réussite de toute réforme en profondeur de notre société ; je pense au besoin d'identité des Français, qui est souvent la traduction d'une crainte face aux bouleversements du monde, et aussi la conscience que nous avons tous d'appartenir à un peuple dont la communauté de pensée est forte et repose sur les valeurs essentielles qui ont forgé notre Histoire.
La Nation, en effet, doit être replacée au coeur de notre débat politique. J'entends déjà les protestations de certains qui, pour mieux dénigrer cette idée, crieront au nationalisme, alors que le nationalisme n'est pas autre chose qu'une perversion ou un détournement de l'idée généreuse que nous nous faisons de la Nation.
Comment ne pas voir que toute réforme se révèle impossible si chacun n'adhère pas à une vision commune de l'avenir de notre peuple ?
Aucune réforme durable ne pourra être menée à bien sur le reniement des valeurs essentielles qui fondent notre société.
Ces valeurs, Jacques CHIRAC les a rappelées pendant sa campagne. Elles s'ordonnent autour du concept de Pacte républicain. Elles ont pour nom la liberté et notamment la liberté d'initiative et d'entreprise, l'égalité et notamment l'égalité des chances dans la vie professionnelle ou dans l'accès à la santé, à la culture, au sport, et au savoir, la fraternité enfin, face aux difficultés ou aux drames de l'existence, qu'il s'agisse du chômage, de l'exclusion ou encore de la maladie, de la solitude ou du handicap.
Pour consolider l'unité de la Nation et ressouder le Pacte républicain, la priorité absolue que j'ai d'emblée fixée au Gouvernement est celle de l'emploi, et c'est dans ce sens que nous avons engagé le redressement de la France, en faisant preuve, et il en fallait, de courage, d'imagination et de volonté.
Il fallait d'abord du courage pour assainir la situation très dégradée de notre économie, et notamment de nos finances publiques.
Sans tapage, nous avons réduit les dépenses publiques de 50 milliards de francs en quelques mois, ce qui est considérable et que personne jusqu'à présent n'avait osé entreprendre.
Il nous a parallèlement fallu augmenter temporairement certaines recettes, et je sais que les Français ont pu en éprouver de la déception. Pouvions-nous, je vous le demande, poursuivre dans une voie qui conduisait droit à la faillite ? Notre devoir n'était-il pas au contraire, de rompre avec l'infernale logique socialiste qui voulait qu'un gouvernement puisse tirer des chèques en blanc sur ses successeurs, aux dépens de la France et des Français !
Au total, l'économie française a tiré un gain net important de cette remise en ordre. Grâce à la baisse substantielle des taux d'intérêt qui sont à leur niveau le plus bas depuis plus de vingt ans, les Français bénéficient aujourd'hui de nouvelles perspectives d'investissement et de consommation.
La consommation - l'exemple des ventes de véhicules automobiles l'illustre parfaitement - est repartie de même que l'investissement immobilier.
Le prêt à taux zéro, lancé il y a quelques mois se révèle un facteur d'incitation très efficace en faveur de l'accession à la propriété. Les mesures de soutien à l'activité décidées en décembre et à la fin du mois de janvier vont progressivement, sous l'impulsion de Jean ARTHUIS et d'Alain LAMASSOURE, faire sentir leurs effets.
On parle beaucoup d'augmentation d'impôts ou de charges, je le disais tout à l'heure, mais on ne parle jamais des baisses. Je voudrais donc souligner ici l'effort sans précédent consenti en faveur des PME-PMI, avec la diminution de 10% des cotisations sociales décidée l'été dernier pour tous les salaires inférieurs à 8 300 francs.
Ce fut un geste très important en direction de ces entreprises, dont nous avons la conviction qu'elles sont capables de créer des emplois.
Les mesures de simplification, arrêtées dès l'automne dernier par Jean-Pierre RAFFARIN, vont se combiner dans les mois qui viennent avec l'effet des dispositions législatives qui seront adoptées, d'ici la fin de la session unique, pour harmoniser la concurrence, rendre plus transparentes les relations entre les producteurs et les distributeurs, éviter la prolifération des grandes surfaces qui font peser une menace mortelle sur nos centres-villes et nos commerces indépendants et promouvoir l'entreprise artisanale.
Je n'hésite pas à le dire : aucun Gouvernement n'aura, en si peu de temps, conduit une action aussi complète et cohérente en faveur de la petite et moyenne entreprise.
Notre économie, beaucoup d'experts ou d'hommes politiques le reconnaissent aujourd'hui, est dans une position plus favorable pour profiter, le moment venu, de la reprise qui se dessinera, j'en suis convaincu, à la fin de l'année.
Encore faut-il que ces premiers résultats ne soient pas remis en cause en 1997 par une insuffisante maîtrise de nos dépenses publiques et notamment des budgets de l'Etat ou des collectivités locales.
Nos concitoyens ne confondent plus aujourd'hui bien être social et progression ininterrompue des dépenses publiques. Ils aspirent au contraire à une réduction de ces dépenses. Jacques CHIRAC l'avait dit pendant sa campagne et nous y sommes : notre objectif, ce n'est pas plus d'Etat, mais mieux d'Etat. L'élaboration du projet de loi de finances pour 1997 doit être l'occasion de remettre en cause des dépenses dont l'utilité publique n'est plus évidente et qui font peser une charge insupportable sur les contribuables français. Je souhaite que toutes les collectivités s'inspirent de cette attitude et fassent également la chasse aux dépenses inutiles.
Après les efforts qu'ils ont consentis en 1995, les Français ne nous pardonneraient pas un retour aux déficits, qui serait synonyme d'une remontée des taux d'intérêts et donc d'une régression économique.
C'est pourquoi je présenterai en septembre prochain à la fois un plan de maîtrise de dépenses publiques et un plan d'allégement de la pression fiscale pour les cinq prochaines années.
Nous avons, dans le même temps, engagé l'effort de solidarité promis par le Président de la République pour réduire la fracture sociale, ce drame qui menace la cohésion nécessaire de notre société. C'est le second volet de notre politique. Plus encore que de la volonté, il y fallait de l'imagination et de l'audace.
Je pense d'abord au contrat initiative emploi pour lutter contre le chômage de longue durée. C'est aujourd'hui une vraie réussite : près de 45% des bénéficiaires concernés - et ils sont au nombre de 265 000 - étaient au chômage depuis deux ans.
Je veux aussi parler du logement social pour les plus démunis avec la construction de 10 000 logements d'extrême urgence et de 20 000 logements sociaux supplémentaires. Ce programme ambitieux sera achevé à la fin de l'année ; d'ores et déjà, plus de 20 000 logements ont été réalisés.
Dans le même temps le Pacte de Relance pour la Ville a été bien accueilli et beaucoup d'élus ou d'acteurs de terrain ont souligné son ambition, sa cohérence et l'équilibre qu'il réalise entre les préoccupations d'ordre économique ou social d'une part, celles qui tiennent au cadre de vie et à la sécurité d'autre part. Depuis la présentation de ce Pacte, Jean-Claude GAUDIN et Eric RAOULT n'ont pas cessé de dialoguer dans tous les quartiers difficiles avec les élus ou les présidents d'association. Cent mille emplois de ville seront proposés aux jeunes des quartiers difficiles et dans les prochains jours les zones franches seront sélectionnées au terme d'une concertation exemplaire avec les responsables locaux. C'est le "plan Raoult-Gaudin", qui vaut mieux que tous les "plans Marshall".
Le combat pour l'emploi est une priorité absolue et d'abord pour les jeunes ; je m'y étais engagé lors du sommet social, fin décembre. L'insertion des jeunes est vitale pour l'avenir de notre pays, et c'est pourquoi en liaison avec les responsables de Région, j'ai mis en place des programmes régionaux pour l'emploi des jeunes sur tout le territoire, afin d'offrir, dès maintenant, aux jeunes qui arrivent sur le marché de l'emploi un dispositif efficace pour les aider dans leur recherche.
Dans la lutte contre la fracture sociale, je pense enfin à l'Education qui est au coeur du pacte républicain et à l'effort d'imagination considérable qu'il faut produire pour jeter les bases d'un nouveau système, orienté vraiment vers le monde du travail, c'est-à-dire, vers l'emploi. Une vaste réflexion est engagée dans ce domaine sous la houlette de François Bayrou.
La réforme des collèges et des lycées se poursuit. S'agissant de l'enseignement supérieur, les modifications attendues parfois avec impatience par l'ensemble de nos concitoyens, notamment en ce qui concerne le premier cycle, seront arrêtées au plus tard cet été.
Nous avons simultanément lancé de grandes réformes structurelles. Le grand chantier de la protection sociale, si longtemps différé, est ouvert et progresse de façon décisive. C'est le troisième volet de notre action, et là, vous le savez, il faut de la ténacité.
Réformer, comme nous le faisons, la protection sociale, c'est sauver l'existence même de la sécurité sociale dont la pérennité était menacée par l'accumulation répétée de déficits massifs - plus de 60 milliards de francs - devenus au fil des années intolérables.
Dans le prolongement de notre action pour sauver notre système de protection sociale, le Gouvernement a ouvert le grand dossier de la politique familiale.
Vous savez le prix que nous attachons à la famille, qui constitue la cellule de base de notre société et qui demeure aujourd'hui une référence incontournable. Elle est le lieu privilégié, le lieu naturel de l'épanouissement de la personne humaine et de l'intégration à notre société et à la communauté nationale.
Nous pouvons être fiers de l'action déjà menée en faveur des familles car nous y consacrons des efforts et des moyens considérables. Dès demain, s'ouvrira la Conférence annuelle de la famille. J'attends beaucoup de cette journée et des propositions qui s'en dégageront.
Le Gouvernement n'a pas arrêté de plan en la matière.
C'est notamment le cas pour l'éventuelle fiscalisation des allocations familiales. Sur cette affaire, naturellement très sensible, je souhaite que chacun puisse s'exprimer en se demandant s'il faut aider toutes les familles exactement de la même manière, quel que soit leur niveau de revenu. La question mérite d'être posée et discutée sérieusement au moins une fois. Je souhaite entendre toutes les organisations ou associations représentatives avant de me prononcer.
J'en viens maintenant au quatrième volet de notre action, qui porte sur la restauration de l'Etat.
Au coeur du pacte républicain, il y a et il y aura toujours l'Etat, garant de nos libertés et de l'égalité des chances : c'est sur lui que repose la République, parce que sans lui, la France n'existerait pas.
Qui aurait à gagner d'un Etat faible ou désemparé ? Personne, sauf ceux qui souhaitent attenter à l'ordre public et à nos lois. Sa solidité, sa force, son intégrité assurent la permanence de notre identité. A lui donc d'accomplir sa mission, d'être lui-même, complètement lui-même, mais rien que lui-même.
Engager, comme nous le faisons, la restauration de l'Etat, c'est d'abord garantir la sécurité de nos concitoyens.
A cet égard, nous revenons de loin. Le laxisme quotidien des gouvernements socialistes avait engendré, hélas, un sentiment de crainte individuelle et collective, le plus souvent parfaitement fondé.
Mais, grâce à l'action du gouvernement précédent, avec Charles PASQUA, puis à la ténacité dont a fait preuve Jean-Louis DEBRÉ, nos efforts ont porté leurs fruits. Après la stabilisation observée en 1993-1994, la baisse de la délinquance est devenue une réalité en 1995 puisque les crimes et les délits ont connu, cette année-là, une diminution de 6,5%. N'en déplaise à nos adversaires, cette baisse est la plus forte jamais enregistrée depuis 1988 !
Nous devons poursuivre dans ce sens. Les attentats que nous avons connus l'année dernière ont illustré malheureusement la nécessité d'une vigilance quotidienne. Je veux cependant souligner devant vous la rapidité avec laquelle la crise terroriste qui a secoué notre pays entre le mois de juillet et le mois d'octobre a été dénouée. Qu'honneur en soit rendu à la Police et à la Gendarmerie Nationales ainsi qu'à Jean-Louis DEBRÉ et à Charles MILLON.
En matière de sécurité, malgré les critiques faciles et injustifiées que nous avons pu essuyer, la Corse rentre progressivement dans la légalité, d'où elle n'aurait jamais du sortir. Cela a été long, trop long diront certains, mais la politique de fermeté a payé. La police et la gendarmerie ont commencé d'enregistrer des succès. Je les en félicite et je m'en réjouis. Mais il faut persévérer dans la fermeté.
Nous agissons sans la moindre ambiguïté. L'ordre républicain sera rétabli sans faiblesse et le dialogue se poursuivra pour assurer à la Corse les moyens nécessaires à un meilleur développement économique.
S'agissant de l'immigration, je vous demande de ne pas tomber dans le piège tendu par ceux qui nous accusent à l'avance de vouloir "durcir" les lois que Charles PASQUA a fait adopter en 1993 et 1994.
Je rappelle, mais ce n'est pas surprenant, que ceux qui protestent le plus contre une éventuelle modification de ces lois sont ceux-là mêmes qui en avaient combattu l'adoption avec le plus d'énergie en 1993 et 1994. L'idéal, à leurs yeux, serait sans doute qu'il n'y ait pas de lois du tout !
Soyons sérieux ; l'affaire est grave et ne se prête pas aux gesticulations médiatiques qui nuisent à une approche sereine de ces questions.
L'ensemble de la majorité a soutenu l'adoption de ces lois et il n'est pas davantage question, aujourd'hui, d'y revenir que de les dénaturer brutalement et dans la passion.
Les résultats sont éloquents : en 1994 et 1995 les flux migratoires légaux et notamment les regroupements familiaux ont diminué de manière sensible. Poursuivons dans cette voie qui s'avère fructueuse. Il reste que l'immigration clandestine sévit encore et que des analyses convergentes ont révélé dans ce domaine les lacunes de notre dispositif, tant législatif que réglementaire.
Lorsque nous aurons pris le recul suffisant, lorsque le déchaînement des passions, dans un sens ou dans un autre, sera apaisé, alors, soyez en sûrs, le Gouvernement saura prendre, comme c'est son devoir, toutes ses responsabilités.
J'en viens à la réforme de l'Etat ; elle n'a que trop tardé. L'objectif est de faire de l'Etat un véritable partenaire du citoyen, tout à la fois accessible, imaginatif, concret et efficace. Il y a là une "petite" révolution qui est en train de se préparer, à tous les niveaux, du ministre à l'agent administratif local, et qui suppose un changement profond des mentalités.
Ce sera notamment l'objet de la déconcentration progressive des services de l'Etat que tous les élus appellent à juste titre de leurs voeux, car elle est le complément indispensable de la décentralisation dont ils ont été les bénéficiaires tout au long des années 1980.
L'autre volet de la réforme de l'Etat sera la simplification des procédures, tant il est vrai que nos concitoyens ont trop souvent du mal à se retrouver dans le maquis des réglementations.
Je vous ai parlé de notre sécurité intérieure, et je voudrais évoquer maintenant les questions liées à la réforme de notre Défense Nationale, qui doit s'adapter à un nouvel environnement.
Vous le savez, une nouvelle loi de programmation militaire est en cours d'élaboration. Elle couvrira les six années qui viennent et permettra bientôt, de faire bénéficier notre pays d'un dispositif qui intègre les bouleversements stratégiques de notre monde et assure à notre Défense et aux hommes qui y concourent, des moyens efficaces et adaptés. Parallèlement, la professionnalisation de nos armées et une réforme profonde du Service National seront mises en oeuvre conformément aux orientations arrêtées par le Président de la République. Le débat est en cours au Parlement et dans toutes les communes de France. Le Gouvernement veillera, par delà la professionnalisation, à ce qu'un lien étroit soit maintenu entre la Nation et son armée.
Mes chers compagnons, et l'exemple de la Défense Nationale le montre bien, il n'est pas possible de dissocier la politique intérieure de la politique étrangère.
Vous le savez, la France porte en elle des valeurs universelles léguées par notre histoire et par celles et ceux qui ont combattu pour sa grandeur. Elle a, de ce fait, vocation, à rayonner à travers l'Europe et le monde.
La politique étrangère, c'est le Président Jacques Chirac qui en est tout à la fois l'inspirateur et le principal acteur, avec le concours des ministres compétents, Hervé de CHARETTE, Michel BARNIER, Jacques GODFRAIN et Margie SUDRE.
En matière de politique étrangère, le Président de la République a marqué, dès son arrivée, ses ambitions pour la France.
En Europe, il s'agit de poursuivre la construction de l'Union. L'Histoire témoigne que l'union de l'Europe ne peut résulter d'une fusion artificielle des peuples, mais, au contraire, de leur constant et systématique rapprochement, dans le cadre d'accords librement consentis. C'est dans cette logique que nous devons affronter les prochaines échéances, au premier rang desquelles figure l'élargissement.
L'Europe rassemblée et élargie aux dimension du continent est une condition pour garantir la paix et la prospérité. C'est aussi une nécessité historique : que penseraient les pays récemment libérés du joug totalitaire, et auxquels nous avons, pendant cinquante ans, promis de les accueillir, si aujourd'hui nous leur fermions la porte !
Mais il nous faut agir aussi avec la plus grande détermination et la plus grande vigilance, en faveur d'une construction européenne qui respecte la souveraineté des Nations et évite les risques de dilution, d'effacement et de désaffection qui la menacent.
Notre pays doit retrouver sa place dans le monde et y tenir son rang, et nous avons pu constater en Bosnie, au Liban, mais aussi en Asie, combien Jacques CHIRAC attachait le plus grand prix à ce que la voix de la France soit de nouveau entendue et respectée dans le concert des Nations.
Je pense particulièrement au Proche-Orient. Si le Président de la République a fait passer avec autant de force le message de la France, et si ce message a été si bien accueilli, c'est parce que les peuples de cette région souffraient de ne plus nous entendre et en éprouvaient sans doute quelque découragement.
Ne nous y trompons pas, notre silence ou notre résignation ne rendent service ni à la France, ni au reste du monde. Avec Jacques CHIRAC, la France a cessé d'être silencieuse ou résignée.
Voilà, mes chers compagnons, ce que nous avons fait et ce que nous allons faire. Nous pouvons en être fiers.
Mais il faut aller plus loin dans cette politique ambitieuse de réformes, car, derrière, se profile un choix de société : veut-on une France frileuse, repliée sur elle-même, cloisonnée et crispée sur ses inégalités, ou au contraire une France fidèle à sa vocation, c'est-à-dire une France vivante, forte, solidaire et généreuse ?
De notre choix résulteront soit l'amertume ou la désillusion, soit le dynamisme retrouvé dans une société qui se met en mouvement.
La réussite n'est possible qu'au prix d'une forte adhésion nationale. Je m'y emploie très concrètement en favorisant au maximum le dialogue social, ce qui suppose des interlocuteurs solides, responsables, ouverts et imaginatifs.
Mes chers compagnons, les Français sont plus audacieux qu'on ne le pense en matière de réforme. C'est donc à nous de ne pas décevoir leur attente.
Préparer l'avenir de notre pays, c'est d'abord mener à bien les grandes réformes souhaitées par Jacques CHIRAC pendant la campagne, puis engagées par le Gouvernement depuis un an, conformément aux orientations du Président de la République.
Le calendrier de réalisation de ces réformes débordera d'ailleurs l'horizon de l'actuelle législature : je pense en particulier à la révision de notre dispositif de Défense, à la loi d'orientation contre l'exclusion ou aux réformes attendues par nos concitoyens dans le domaine de l'Education Nationale, comme dans celui de la fiscalité, toutes réformes dont la mise en oeuvre est à la dimension d'un septennat et exige un effort de longue haleine.
Mais préparer l'avenir, c'est aussi pour les militants et les élus que nous sommes, préparer les échéances de 1998. 1998 sera une année électorale par excellence, avec bien sûr les élections législatives de mars 1998, mais aussi et dans un ordre qui reste à déterminer, les élections régionales, cantonales et, pour certains départements, sénatoriales.
Au-delà de leur dimension locale ou de ce qu'elles représentent pour chacune ou chacun d'entre nous, en tant que candidat, l'enjeu de ces élections et notamment de la principale d'entre elles - les législatives - sera de donner au Président de la République les moyens d'aller jusqu'au bout des engagements qu'il a souscrits devant le peuple français à l'occasion de l'élection présidentielle.
Comme toute élection, les législatives de 1998 se joueront à la fois sur un bilan, sur un projet et sur la qualité des hommes et des femmes qui auront été désignés pour les porter.
Notre bilan sera un bilan de législature et nous pourrons en être fiers.
De 1993 à 1995, beaucoup a été fait sous l'impulsion d'Edouard BALLADUR et de ses ministres.
Des réformes significatives ont été engagées - je pense par exemple à la réforme des retraites ou à l'adoption de plusieurs textes dans les domaines de la sécurité, de l'immigration ou de l'aménagement du territoire - et elles l'ont été avec le soutien de toutes les formations de la majorité et de tous les parlementaires qui la composent.
Clef de voûte de nos institutions, l'élection présidentielle a marqué un nouveau départ pour notre pays. Ce que les formations de la majorité ont entrepris ensemble depuis un an et ce que nous aurons le temps de conduire à bien d'ici à 1998 enrichira de manière décisive notre bilan et permettra à nos parlementaires et à nos candidats d'aller au combat avec confiance.
Une élection cependant ne se gagne jamais seulement sur un bilan. Il nous faudra présenter aux Françaises et aux Français un projet, un projet qui s'inscrive en harmonie avec la vision du Président de la République et des grandes orientations arrêtées par lui.
Ce projet sera tout à la fois celui de la future législature et de la deuxième partie du premier septennat de Jacques CHIRAC.
Cohérence et imagination devront en être les maîtres-mots : cohérence par rapport aux perspectives ouvertes par l'élection présidentielle et que nous ne cesserons jamais d'explorer et de mettre en valeur, imagination parce que le monde change autour de nous et que nos concitoyens eux-mêmes changent.
Ce projet, ce sera aussi celui de l'entrée de notre pays dans le troisième millénaire avec tout ce que cette échéance représente pour les Françaises et les Français comme part de rêve, comme aspiration à l'audace, à la générosité, mais aussi à la maîtrise partagée d'un destin collectif dans une Europe élargie aux dimensions du continent.
Ce projet, c'est ensemble que nous allons commencer à l'élaborer et ce sera l'une des toutes premières priorités de notre mouvement dans les prochains mois. Depuis plusieurs mois, et je voulais devant vous en remercier notre Secrétaire général, Jean-François MANCEL qui en a eu l'initiative, le Rassemblement Pour la République a organisé en son sein des débats au niveau des fédérations comme au niveau du Conseil National : l'Europe, la Défense en ont été les premiers thèmes, et d'autres suivront dès l'automne.
Mais l'élaboration d'un projet de la majorité pour 1998 va nous fournir l'occasion d'élargir l'horizon de notre réflexion et je m'en réjouis. Je souhaite que cette entreprise de grande ampleur, qui devra être pilotée par notre Centre National, nous permette de tirer profit de notre diversité qui a toujours, tout au long de son histoire, fait la force du mouvement gaulliste.
Je forme le voeu que nombreuses soient vos propositions et qu'elles permettent tout à la fois d'éclairer l'avenir de notre peuple et d'en traduire au mieux les aspirations pour les prochaines années.
Je me suis déjà entretenu avec François LEOTARD, le nouveau Président de l'UDF, des conditions de préparation du projet de la majorité pour la future législature. Dans ce domaine, les démarches de nos deux formations seront parallèles avant de converger, sans doute à l'automne.
C'est unie, en effet, que la majorité ira, en 1998, à la bataille législative : unie autour de son bilan qui sera celui des gouvernements qui se sont succédés depuis 1993, unie autour de son projet, unie, aussi, je le souhaite, dans le choix des hommes et des femmes qui devront dans chaque circonscription défendre et illustrer ce bilan et ce projet.
Notre tâche à cet égard sera à la fois plus facile et plus difficile qu'en 1993. Plus facile, puisqu'aussi bien les députés sortants de la majorité repartiront au combat et ce d'autant plus, je le sais, qu'ils sont au travail depuis le début de la législature et n'ont cessé depuis lors de "labourer" le terrain.
Plus difficile aussi, d'une part parce que le remplacement des sortants qui ne seraient pas à nouveau candidats devra s'effectuer en bon ordre, d'autre part en raison de la simultanéité de plusieurs élections en 1998. Il faudra prendre garde aux dissidences éventuelles et assurer, si possible, l'harmonie des candidatures dans toutes les catégories d'élection.
Mes chers compatriotes, l'union de la majorité, nous y sommes, comme nos électeurs, passionnément attachés. En 1992 comme en 1993, elle fut notre atout maître.
Elle reste, plus que jamais, la condition de nos victoires à venir. Mais elle n'est pas seulement pour nous un passage obligé, à des fins tactiques. Elle est d'abord l'expression d'une conviction : celle que les orientations définies par le Président de la République, et que nous avons soutenues avec une majorité du peuple français le 7 mai 1995, sont bonnes pour la France et pour chacun de nos concitoyens.
Ne nous cachons certes pas, qu'une fraction de ceux qui ont apporté leurs suffrages à Jacques CHIRAC lors de l'élection présidentielle, se disent aujourd'hui impatients. Mais gardons notre sang-froid.
Le gaullisme, celui des temps fondateurs comme celui d'aujourd'hui, s'est toujours défini, comme le refus de la facilité, le refus de la démission ou de la démagogie.
L'idéal gaulliste, c'est l'effort de la Nation française sur elle-même pour conjurer ses vieux démons - ceux de la division et ceux du laisser-aller notamment -, pour aller de l'avant sur la voie du progrès économique et social et pour tenir son rang en Europe et dans le monde. Nous savons, nous. que tel a toujours été et tel reste le projet de Jacques CHIRAC.
L'union de la majorité sera notre credo parce qu'elle a permis le 7 mai 1995 l'élection de Jacques CHIRAC.
Nous diviser en 1998, ce serait renier le 7 mai 1995, ce serait renier les choix que nous avons faits ce jour là, en cette date historique, qui vit le retour du premier d'entre nous à l'Elysée et l'enterrement tant attendu des chimères socialistes.
L'union de la majorité n'est pas une fin en soi. Elle est un moyen, elle est un atout pour tenir nos promesses de 1995. Tous les grands chantiers évoqués par Jacques CHIRAC pendant sa campagne sont aujourd'hui ouverts. Beaucoup ont largement progressé. D'autres sont à leur début. L'expression d'une forte attente des électeurs de Jacques CHIRAC doit être pour toute la majorité et singulièrement pour nous, gaullistes, qui ne sommes jamais meilleurs que dans les difficultés, un formidable aiguillon.
Le projet de Jacques CHIRAC - la France pour tous - est le projet d'un septennat. Nous en avons jeté les fondations et elles sont solides. Dans une économie assainie qui a échappé au vertige des déficits, mais dans laquelle le poids des dépenses, puis des prélèvements publics, doit encore être réduit, il nous faut, pour emporter en 1998 l'adhésion des Françaises et des Français, réduire durablement le chômage, alléger les charges qu'entravent l'initiative et l'esprit d'entreprise et faire reculer l'exclusion. La tâche est difficile, nous le savons, mais c'est bien l'enjeu. Je n'ai, pour ma part, pas d'autre ambition et je sais que vous la partagez.
Je vous invite, mes chers compagnons, à redoubler d'efforts pour expliquer sans relâche à nos concitoyens notre politique.
Il ne s'agit pas seulement de vaincre en 1998, il s'agit d'abord, et c'est le plus important, de convaincre nos compatriotes qu'ils ont fait une bonne partie du chemin, qu'ils ont consenti en 1995 des efforts importants, que le moment approche où ils pourront en récolter les fruits, et que l'erreur fatale serait de perdre courage et de dévier de cette route.
Nous autres, gaullistes, pour qui le renoncement est le péché capital, avons à cet égard une responsabilité particulière.
Je crois, en effet, et de tout mon coeur que la France du XXlème siècle aura besoin du gaullisme.
Parce que le gaullisme, c'est l'esprit de réforme - et nous le démontrons jour après jour.
Parce que le gaullisme, c'est le sens de l'humain, le besoin de justice, l'exigence de la cohésion sociale si chère à Jacques CHIRAC.
Parce que le gaullisme, c'est l'idée de Nation, la passion de l'unité nationale qui signifie tout à la fois identité et générosité.
Parce que le gaullisme c'est, pour la France, une voix libre et forte dans le monde.
Pour toutes ces raisons, oui, je le crois, le gaullisme, c'est l'avenir.
Vive le Rassemblement !
Vive la République !Vive La France !