Texte intégral
Monsieur le Président de l'Association des Ingénieurs Territoriaux de France,
Monsieur le Commissaire général des Rencontres,
Mesdames et Messieurs,
Merci de m'accueillir ce matin à vos rencontres des ingénieurs territoriaux de France, 1ère étape de ma visite à Saint-Etienne.
Venir ici me tenait à cur depuis ma prise de fonction en tant que ministre, tant cette ville est riche d'enjeux et d'initiatives remarquables en matière de logement et d'aménagement urbain, avec les problématiques propres, et trop souvent ignorées, aux territoires « détendus ». La palette des opérations que je visiterai tout à l'heure autour de la place Jacquard réaménagement des espaces publics, réhabilitation énergétique de logement, mixité en centre-ville grâce à l'accession sociale à la propriété atteste de cette richesse.
Mais la date de cette visite ne doit évidemment rien au hasard, puisque venir aujourd'hui à Saint-Etienne est l'occasion de participer, comme je le souhaitais, au rendez-vous incontournable que sont devenues vos Rencontres, et par là de saluer la contribution essentielle des ingénieurs territoriaux à la construction, à l'aménagement et au développement de notre pays dans tous ses milieux, du rural à l'urbain.
Ce rendez-vous intervient cette année dans un contexte dont nous nous réjouissons tous, celui de la reprise de la construction. Le nombre de logements autorisés à la construction sur les 3 derniers mois s'établit à plus de 100.000, soit une augmentation de près de 20 % par rapport au 1er trimestre 2015.
Ce chiffre, comme l'ensemble des indicateurs du logement, permet d'affirmer que nous sommes sur une tendance positive pour l'avenir et que le nombre des mises en chantiers, déjà en hausse de 2,5 % par rapport à l'année précédente, va s'amplifier.
L'ensemble des professionnels confirment cette évolution, et c'est aussi un gage pour la reprise des projets d'aménagement.
Cette dynamique est essentielle pour répondre aux besoins de logement qui restent criants dans notre pays. La soutenir constitue donc une priorité de mon action, en poursuivant la mise en uvre de la politique de relance initiée par le Gouvernement.
Mais la politique du logement ne se résume pas à construire toujours plus et de façon indifférenciée.
Car le logement où l'on vit, et l'environnement dans lequel on habite, ne sont pas des biens comme les autres.
Ce sont des biens communs indispensables pour l'émancipation et la construction d'un projet de vie. Ce sont des leviers majeurs de cohésion sociale et d'équilibre entre les territoires comme avec notre environnement naturel.
Notre responsabilité, c'est donc de produire des logements de qualité, adaptés aux moyens et aux besoins de chacun, dans un cadre respectueux de l'environnement et propice aux activités et à la vie sociale.
L'enjeu, c'est donc d'ouvrir une nouvelle étape du logement et de l'aménagement, celle de l'habitat durable. C'est le sens de mon action, car c'est une clé pour l'égalité et la qualité de vie de nos concitoyens comme pour le développement équilibré de nos territoires.
Construire l'habitat durable pour tous implique à la fois d'inscrire notre action dans la réalité sociale des territoires, et d'innover pour répondre à l'évolution des modes de vie comme aux impératifs environnementaux.
« Innovations et territoires », c'est le thème de vos Rencontres cette année, et c'est le couple moteur de la politique que je veux mener en faveur de l'habitat durable.
* Il nous faut innover face aux grandes mutations qui impactent le logement et l'aménagement :
- La transition énergétique et environnementale des territoires, dans le cadre de la mise en oeuvre de la LTE et de l'Accord de Paris pour le climat
- La révolution numérique en cours dans le domaine de la mobilité, de la construction, de l'aménagement
- La reconfiguration de la carte territoriale, et la nouvelle répartition des compétences qui l'accompagne
- La demande croissante de participation de citoyens qui veulent être acteurs de leur logement et de leur environnement
* Et il nous faut adapter notre action à la diversité et aux enjeux spécifiques des territoires :
- Les métropoles de la loi MAPTAM, et les enjeux particuliers du Grand Paris,
- La carte intercommunale en pleine reconfiguration
- Les territoires ruraux où, on l'oublie trop souvent, le manque de logement social, la nécessité de la rénovation énergétique des bâtiments ou encore l'enjeu d'un aménagement qui ne soit pas synonyme d'étalement et d'artificialisation des sols, sont également vivaces.
Cela implique de territorialiser l'ensemble des politiques de logement et d'aménagement, afin de favoriser une construction qui réponde et corresponde aux besoins de chacun, là où il vit. J'y reviendrai.
Cela implique également le développement d'une ingénierie « sur-mesure », présente dans tous les territoires et capable de s'adapter à la diversité des problématiques locales.
C'est ainsi que nous pourrons répondre au besoin d'accompagnement des élus dans tous les territoires pour mettre en oeuvre leurs projets de développement, et favoriser l'égalité entre les territoires.
Le renforcement de l'ingénierie au service de tous les territoires, dans la diversité de leurs moyens et de leurs enjeux, est une première évolution indispensable pour y favoriser le logement et l'aménagement durables.
Le champ des besoins est large. Ma conviction est qu'il nous faut développer de nouveaux modes de coopération entre l'ensemble des acteurs Etat, collectivités, secteur privé pour le couvrir.
* l'Etat : doit évoluer dans l'accompagnement des collectivités
En amont, être incitateur, favoriser l'émergence des projets et soutenir l'innovation : c'est le « nouveau conseil aux territoires » :
- notes d'enjeux pour les documents d'urbanisme
- démonstrateurs industriels de la ville durable dans les pôles métropolitains,
- Ecoquartiers,
- territoires à énergie positive
En aval, être facilitateur, accompagner et guider les porteurs de projet dans le déroulement du projet
- Coordination des autorisations du projet, au titre de l'urbanisme, du code de l'environnement
- Simplification et assouplissements normatifs : accessibilité, procédure intégrée pour le logement, permis environnemental
* Pour les collectivités, l'enjeu est de renforcer les compétences de maîtrise d'ouvrage :
En effet, vos Rencontres témoignent de l'ampleur des champs de compétences couverts :
- Aménagement
- transport
- Environnement
- Energie
- Déchets
- Espaces verts
Et dans ce contexte, vous, ingénieurs territoriaux, jouez un rôle extrêmement stratégique, notamment à travers :
- L'importance de la mise en réseaux,
- L'organisation des retours d'expériences
- Le partage des bonnes pratiques, et ces rencontres y participent
- La montée en puissance de l'ingénierie intercommunale
- Le travail d'articulation entre les équipes d'ingénierie des différentes collectivités
* le secteur privé, pour sa part, doit développer des prestations d'assistance à maîtrise d'ouvrage de qualité :
- en repensant sa couverture territoriale en fonction de la taille des collectivités
- en redynamisant et en actualisant les offres de services pour mieux répondre aux besoins spécifiques locaux.
* Enfin, la coproduction public-privé dans les projets de développement et d'aménagement peut constituer une voie pour renforcer les territoires en matière d'ingénierie. Le Réseau national des aménageurs, devant lequel j'intervenais récemment, en souligne l'importance. Et face à l'ampleur et à la diversité des besoins à couvrir, je crois en effet que c'est une solution à envisager dès lors qu'elle est pertinente localement.
Le développement d'une ingénierie territoriale « sur mesure » permettra ainsi d'aider les élus à faire face aux défis sociaux et environnementaux du développement de leur territoire.
Mais c'est l'ensemble des politiques de logement et d'aménagement qui doivent être territorialisées, pour développer l'habitat durable, par-delà les différences de ressources, de lieux de résidence et de cadre de vie.
C'est une priorité qui traverse l'ensemble de mon action afin de concilier, à travers les territoires, égalité d'accès à un logement abordable et réponse aux enjeux de la transition écologique.
Et les ingénieurs territoriaux ont un rôle essentiel à jouer dans la mise en oeuvre de ces priorités :
1/Renforcer la planification stratégique, à travers les SCOT et les PLU intercommunaux, pour définir des projets de territoire qui concilient préservation des ressources agricoles et naturelles, et développement des territoires, notamment dans la ruralité
Ainsi, 300 PLUi sont en cours d'élaboration, 250 nouveaux seront prochainement lancés et soutenus par l'Etat. Et nombre de ces PLUi se trouvent sur des territoires ruraux.
2/Répondre aux enjeux de production de logements adaptés aux situations locales notamment par une ingénierie foncière efficace.
C'est indispensable pour développer l'habitat durable y compris en zones détendues.
Il s'agit de veiller non seulement à la qualité de la construction, mais aussi à la vitalité des centre-bourgs, à la préservation de la richesse paysagère et environnementale des territoires, qui est une source de leur attractivité, et aux enjeux de mobilité comme d'approvisionnement énergétique.
Les territoires ruraux et semi-ruraux doivent ainsi bénéficier de stratégies d'aménagement durable, et la réforme territoriale nous en donne l'opportunité. C'est pourquoi j'ai demandé aux Préfets des nouvelles régions fusionnées d'établir un diagnostic des enjeux fonciers de leurs territoires, et un état des lieux des acteurs susceptibles d'intervenir en appui aux collectivités, en particulier les Etablissements Publics Fonciers, d'Etat comme locaux.
Je souhaite ainsi qu'à terme l'ensemble des territoires soient couverts par des EPF, car bien souvent en milieu rural, les acteurs publics fonciers sont seuls à porter la capacité d'anticipation et d'ingénierie indispensables pour répondre aux besoins de logements comme d'activité économique.
3/Relever les enjeux de rénovation des bâtiments existants en structurant un service public de la rénovation énergétique dans les territoires, en bonne intelligence avec les offres de services privées
- Les collectivités doivent être moteur, à travers la rénovation des bâtiments publics
- Pour aller plus loin, il nous faut sensibiliser et stimuler les propriétaires dans le parc privé de logements
4/ anticiper la mise en oeuvre de la future réglementation environnementale en matière de bâtiments avec le BEPOS et le bas carbone
- Fin juin un label BEPOS et carbone pour le bâtiment verra le jour
- Il permettra d'expérimenter pendant plus d'un an sur le terrain afin de finaliser la réglementation environnementale 2018
5/Promouvoir des projets urbains innovants sur le plan environnemental mais également sur le plan de l'intégration de la participation des habitants
- sobres en consommation énergétique, notamment par un usage performant des outils numériques (BIM),
- territoires à nature positive (annonce conférence environnementale)
- mixité sociale, fonctionnelle
- interaction avec leurs quartiers existants environnants
- économie circulaire
Conclusion
J'attends que vous preniez d'ailleurs toute votre place dans le réseau Vivapolis des acteurs de la ville durable afin de réfléchir conjointement
- dans le cadre de la conférence Habitat 3 à la valorisation des initiatives françaises en matière de développement urbain durable
- dans le cadre de la réflexion sur le renouveau du label écoquartier que j'ai annoncé lors de la conférence environnementale
En tant qu'acteurs-clés du développement équilibré de nos territoires, je sais que vous êtes en capacité d'apporter des idées novatrices et de faire progresser l'ensemble des réflexions en matière d'habitat et de ville durable.
Et j'y serai pleinement attentive, car je sais que ce sont des ambitions que nous partageons.
Je vous remercie.
Source http://www.logement.gouv.fr, le 25 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral80310|M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale (no 3742).
( )
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, madame la vice-présidente de la commission des lois, madame, monsieur les rapporteurs, la CMP est une étape lors de laquelle le Gouvernement est spectateur : c'est à peu près le seul moment de la procédure parlementaire où sa capacité d'influence est quasi nulle. Vous comprendrez donc que je serai très peu loquace, et que je me bornerai à remercier les acteurs de la réunion du 11 mai qui a, heureusement, abouti.
Je salue évidemment les deux rapporteurs, Colette Capdevielle et Pascal Popelin. Je n'oublie pas Dominique Raimbourg, qui a été un artisan de ce succès et auquel vous transmettrez mes remerciements. Merci aussi, évidemment, aux membres des différents groupes, qui reflètent les diverses composantes de l'Assemblée nationale et qui ont uvré à la construction de ce consensus.
Il est vrai que les débats dans cet hémicycle avaient montré le chemin, puisque le projet de loi avait été adopté en première lecture par une large majorité, ce qui n'est pas très courant pour des textes de cette importance 474 voix pour, 32 voix contre. Nous avons retrouvé cette quasi-unanimité au Sénat : 299 sénateurs s'étaient prononcés favorablement sur ce texte, quand seulement 29 d'entre eux avaient choisi de ne pas lui apporter leur soutien. Les deux assemblées avaient ainsi manifesté, dans les débats et dans les votes, leur claire volonté d'aboutir et de consolider la plupart des articles, lesquels ont été portés par trois ministres, de façon à balayer les différents aspects de la lutte contre le terrorisme, contre la criminalité organisée, et des réformes de la procédure pénale.
Vous l'avez dit, madame, monsieur les rapporteurs : la CMP a sagement su dépasser les différends qui existaient. L'engagement des deux présidents de commission n'y est sans doute pas pour rien.
Nous pouvons être, tous ensemble, assez fiers du travail accompli et de notre capacité de rassemblement autour de la sécurité, des garanties pour nos concitoyens, du renforcement des moyens des magistrats et de l'ensemble des simplifications procédurales qui ont abouti.
Il est précieux que, sur ces sujets, la volonté d'aboutir n'ait pas failli et qu'à chaque étape du processus parlementaire, on ait trouvé des points d'accord.
Ces efforts se constatent dans les chiffres : de 34 articles originels lors de sa présentation en conseil des ministres, le texte est passé à 102 articles à l'issue des débats au sein de cet hémicycle et il en compte maintenant 125 après les travaux de la commission mixte paritaire.
Bien sûr, des observateurs superficiels ou des esprits chagrins mais il n'y en a pas dans l'hémicycle critiqueront cet accroissement. Je préfère plus sérieusement y voir un travail parlementaire abouti, réalisé avec d'autant plus de constance et de méticulosité que, la plupart du temps, le Gouvernement était en parfaite harmonie avec les aspirations des parlementaires.
Je n'emploie pas cette précision, « la plupart du temps », par hasard. Il y a en effet, dans le texte de la CMP, des points qui n'auraient sans doute pas recueilli l'appui du Gouvernement dans l'hémicycle, mais c'est la manifestation légitime de la souveraineté parlementaire qui s'est exprimée. Mes convictions personnelles s'agissant des libertés du législateur sont suffisamment connues pour que je ne m'en formalise pas aujourd'hui.
Nous sommes tous les auteurs de ce texte et nous pouvons tous en revendiquer une partie importante. Ce projet de loi avait trois ambitions : des moyens supplémentaires pour lutter contre un phénomène dont on sait qu'il sera malheureusement durable, même s'il a fait une irruption brutale dans notre quotidien je veux bien sûr parler du terrorisme ; plus de garanties pour le justiciable personne ne comprendrait que notre équilibre soit altéré et enfin, surtout, une longue série de simplifications procédurales.
Avant de conclure, j'aborderai deux points sur lesquels je souhaiterais m'attarder un instant et qui me permettront de répondre aux questions qui sont posées à l'extérieur de nos murs, car ici chacun connaît les réponses.
Pourquoi avions-nous besoin d'une troisième loi antiterroriste depuis le début de ce quinquennat et qui sera sans doute promulguée cet été, après celle de décembre 2012 et celle du 13 novembre 2014 ? Céderions-nous, comme j'ai pu le lire, à une sorte de fuite en avant de l'antiterrorisme, certains ayant parlé d'un canard sans tête dont on ne sait pas trop où il va aboutir ? Je ne le crois pas. Je suis même férocement convaincu du contraire.
Ce texte vient, par de multiples aspects, consolider le modèle français de lutte contre le terrorisme qui confie à l'autorité judiciaire une large capacité d'action qui s'étend de la prévention à la répression. Il apporte de la modernité technologique afin de préserver cette spécificité qui confie à l'autorité judiciaire la capacité de mouvement. Il permettra de renforcer la police judiciaire qui ne doit pas être moins efficace que la police administrative pour continuer d'exercer pleinement son office. Dès lors, il s'inscrit dans l'avenir de notre pays, parce qu'il le prépare, et même, le rend possible.
Mais au-delà de l'antiterrorisme, ce texte, je veux le souligner, doit être vu comme l'un des éléments constitutifs de l'ambition que j'essaie de porter pour le ministère que j'ai le privilège de servir depuis un peu plus de trois mois. Il ne peut pas se lire indépendamment du projet de loi de modernisation de la justice du XXIe siècle que vous examinez en ce moment même, non plus que du travail réglementaire réalisé ou des moyens budgétaires qui sont mobilisés.
Les mots peuvent paraître galvaudés à force d'être répétés mais, avec ce texte, nous uvrons ensemble pour une justice plus efficace, plus accessible pour le citoyen et, surtout, pour une justice moins pauvre.
Je veux, par tous les moyens, poursuivre cet objectif tout à la fois évident et ambitieux. Je veux une autorité judiciaire qui, dans l'exercice quotidien comme face à la violence terroriste, continue de faire honneur à notre pays. Une justice dont nos concitoyens puissent se dire fiers et à laquelle ils puissent spontanément accorder leur confiance et le respect qui s'impose. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)source http://www.assemblee-nationale.fr, le 27 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80311|
Mesdames et Messieurs,
J'ai reçu ce matin les familles et les proches des passagers du vol MS804 d'Egyptair afin de leur adresser d'abord, au nom du président de la République, du Premier ministre et de tout le gouvernement, et bien sûr en mon nom personnel, accompagnés d'Alain Vidalies et de Mme Juliette Méadel qui participaient à cette réunion, notre profonde compassion et notre solidarité dans les moments particulièrement douloureux que ces personnes traversent.
Cette réunion a rassemblé une centaine de personnes dans un climat d'intense émotion - vous l'imaginez - mais aussi de grande dignité, en présence des responsables d'Aéroports de Paris, d'Egyptair, des associations d'aide aux victimes - la FENVAC et l'INAVEM - mais aussi des bénévoles, notamment de la Croix-Rouge.
Cette réunion a permis de partager l'ensemble des informations connues à ce stade sur la disparition de ce vol. Toutes les familles qui le souhaitaient ont pu s'exprimer. Elles ont pu poser des questions à tous les responsables présents qui ont répondu avec la même franchise qu'il était souhaitable par respect pour les personnes présentes.
J'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises déjà : à cet instant où je vous parle, toutes les hypothèses sont examinées et aucune n'est privilégiée.
Notre objectif est double : solidarité avec les familles mais aussi transparence à leur égard sur les circonstances de la disparition de cet avion. De concert avec l'ambassadeur d'Égypte qui était présent à cette réunion, j'ai beaucoup insisté sur la volonté des autorités françaises de dire toute la vérité sur ce qui s'est passé. C'est une demande légitime et essentielle pour toutes les familles.
Lors de cette réunion, le Parquet de Paris a fait le point sur l'état de l?enquête judiciaire qui a été immédiatement diligentée en France. Une enquête a été également déclenchée en Égypte.
Le bureau d'enquêtes et d'analyses a précisé les procédures qui visent à établir les causes de la disparition du vol. Le directeur de l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale a expliqué les méthodes et les procédures d'identification des victimes.
J'ai rappelé que la France met à la disposition des autorités égyptiennes l'ensemble des moyens dont elle dispose pour avancer dans la recherche de l'appareil et des victimes. Les enquêteurs du bureau d'enquêtes et d'analyses sont déjà arrivés au Caire hier après-midi, pour participer à l'enquête qui est ouverte par l'Égypte.
Nous avons également mobilisé un avion et un bâtiment de la marine nationale pour contribuer aux recherches. Enfin, notre ambassade au Caire accueille les familles qui souhaitent se rendre en Égypte, certaines l'ont fait dès hier.
Je suis bien sûr en contact permanent avec mon homologue, le ministre des affaires étrangères égyptien, M. Sameh Choukri, qui m'a confirmé le souhait des autorités égyptiennes de coopérer étroitement avec nous dans la recherche de la vérité, de toute la vérité, comme nous l'avons redit ce matin aux familles.
Je le dis à nouveau, comme je l'ai dit toute cette matinée aux familles : agir en transparence avec elles. Je m'engage à ce que la France rende compte, au fur et à mesure, de l'évolution des différentes procédures qui sont mises au service de la vérité. À cet égard, je dois à nouveau souligner, comme je l'ai fait hier et avant-hier, que des informations circulent, ici ou là, parfois d'ailleurs contradictoires, et donnent lieu trop souvent à des interprétations presque définitives. Je mets en garde contre cette manière de faire car elle met les familles dans une tension douloureuse que je voulais exprimer devant vous. La meilleure réponse à ces informations parcellaires, c'est que les enquêtes puissent se dérouler dans les meilleures conditions et le plus rapidement possible, parce que c'est par cette voie-là que nous pourrons avoir la vérité sur ce qui s'est passé.
Rechercher l'appareil est, bien sûr, aujourd'hui la priorité en cours, comme trouver les boîtes noires pour les analyser, ce qui nous permettra d'avoir les réponses aux questions qui se posent légitimement.
Je voudrais compléter mon propos en m'adressant aux médias, à la demande des familles. Plusieurs intervenants ont souhaité que leur anonymat soit respecté. Bien sûr, je le dis avec tout le respect que je leur dois, je suis particulièrement attentif à l'indépendance des médias ; cette question n'est pas en cause ni en débat. Je vous transmets simplement la demande des personnes qui se sont exprimées et qui souhaitent que, lorsqu'elles le demandent, la photo de leurs proches ne soit pas publiée ou même que le nom de certaines personnes de leur famille ne le soit pas non plus.
C'est leur liberté, je vous ai transmis leur demande, peut-être le feront-elles directement.
Au nom de la France, encore une fois, j'exprime ma solidarité mais aussi notre affection qui est celle des Françaises et des Français, j'en suis sûr, à l'égard de toutes ces personnes qui, brutalement ont appris qu'un de leurs proches, parfois une famille entière avait sombré en mer, et qui veulent savoir afin de faire leur deuil.
C'est un moment difficile, un moment douloureux et je voulais le redire encore, nous sommes à leurs côtés. Ce que nous avons à faire, au-delà des paroles, c'est notre travail avec les autorités égyptiennes pour que, le plus vite possible, nous puissions informer les familles et l'opinion publique de ce qui s'est passé réellement.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80312|
Je salue la tenue du premier sommet humanitaire mondial à Istanbul les 23 et 24 mai. La délégation française y est conduite par Mme Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. M. André Vallini, secrétaire d'État chargé du développement et de la Francophonie, participera notamment à des réunions sur l'initiative prise par M. Gordon Brown, que le secrétaire général des Nations unies a chargé de mettre en place un dispositif spécifique sur l'éducation en situation de crise.
Alors que les crises accroissent chaque jour les besoins humanitaires et que 60 millions de personnes dans le monde ont été contraintes de fuir leur foyer, ce sommet doit permettre à la communauté internationale de donner une nouvelle feuille de route à l'action internationale humanitaire. Il sera l'occasion de réaffirmer notre engagement en faveur de la protection des civils, de renforcer l'articulation entre aide humanitaire et développement, mais aussi de mieux répondre aux conséquences des catastrophes naturelles et du dérèglement climatique, dans le prolongement de notre mobilisation pour la COP21.
Aujourd'hui, 80% de l'action humanitaire intervient dans le contexte d'un conflit armé, situation qui touche de plus en plus de civils et en particulier des enfants. La France est mobilisée, sur le terrain et dans les enceintes internationales, pour assurer le respect du droit international humanitaire et de la protection des civils. C'est à cette fin que je présiderai le 10 juin à New York un débat public au conseil de sécurité des Nations unies sur la protection des civils dans les opérations de maintien de la paix. La France organisera aussi, en 2017, une conférence internationale pour promouvoir la protection des enfants dans les conflits armés, dix ans après l'adoption des «Principes et engagements de Paris».
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80313|Monsieur le Directeur du Tour de France, Cher Christian PRUDHOMME,
Monsieur le Préfet de Police,
Monsieur le Directeur général de la Gendarmerie nationale, Mon général,
Monsieur le Directeur général de la Police nationale,
Monsieur le Directeur général de la Sécurité civile et de la Gestion de crise,
Monsieur le Président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France,
Mesdames et Messieurs,
Le 2 juillet prochain, le Tour de France prendra son départ, et cela me fait extrêmement plaisir, au pied des murs du Mont Saint-Michel, dans la Manche. Les coureurs traverseront ce jour-là une première fois le département de la Manche, pour arriver aux plages d'Utah Beach, avant de le traverser une deuxième fois le lendemain, au cours d'une étape qui les mènera de Saint-Lô à Cherbourg.
L'élu normand que je suis, très fidèle au souvenir du grand Jacques ANQUETIL, ne peut que se réjouir doublement de ce programme. J'ai du reste prévu de me trouver moi-même à Cherbourg, le 3 juillet prochain, pour assister à l'arrivée du peloton. Cette émotion, je sais cependant que je vais la partager avec tous les Français. Le Tour de France fait partie de notre patrimoine national ; il est pour chacun d'entre nous, « l'enfant du peuple et de la paix ». Il est aussi, depuis 1903, le premier spectacle populaire gratuit offert chaque été aux Français et aux touristes, suivi par chaque année par 10 à 12 millions de spectateurs, massés sur les bords des routes et jusqu'au sommet des cols.
« L'un des agréments du Tour de France, disait ainsi Antoine BLONDIN, tient à ce qu'il se déroule dans une ambiance de fête champêtre, parfois imprégnée de l'odeur des foins. La course, ivre d'horizons, devient alors une sarabande. » Mais le Tour de France n'appartient pas qu'aux Français. Il s'agit du 3ème événement sportif mondial, diffusé dans 190 pays, couvert par 2 000 journalistes, regardé par 3,5 milliards de téléspectateurs. Son tracé passera cette année par l'Espagne, par Andorre et par la Suisse et je souhaite saluer les représentants de ces pays qui sont aujourd'hui parmi nous. Ils partagent notre passion et ils ont eux aussi à cur de faire en sorte que cette grande épreuve sportive soit également une grande fête populaire.
Pourtant, chacun comprend que, cette année, le Tour de France se déroulera dans un contexte particulier. Et c'est la raison pour laquelle j'ai souhaité vous réunir pour évoquer, au ministère de l'Intérieur, le dispositif qui sera mis en place cet été afin d'assurer, dans des conditions de vigilance particulière, la sécurité de cette grande manifestation. Comme vous le savez, notre pays est confronté à un risque terroriste dont j'ai déjà eu l'occasion de dire qu'il demeure très élevé. Face à un ennemi déterminé à nous frapper à tout moment, nous devons faire preuve à chaque instant, sur tout sujet, d'une vigilance extrême. Je tiens à ce titre à rendre une nouvelle fois hommage à la mobilisation exceptionnelle des policiers et des gendarmes qui, depuis des mois, jour après jour, dans des conditions souvent très difficiles, réalisent un travail admirable pour prévenir de nouveaux attentats, mais aussi pour assurer le respect de la loi et de l'ordre public. A ce titre, je souhaite rendre hommage aux 5 militaires de la gendarmerie qui, vendredi et samedi dernier, ont perdu la vie dans l'accomplissement de leur devoir. C'est dans ces circonstances particulièrement douloureuses, que je mesure le prix de votre engagement et du courage physique qu'il requiert. Si, en 2015, nous avons pu tenir bon face aux épreuves terribles que nous avons traversées, c'est grâce à ces femmes et à ces hommes qui sont prêts, dès lors que la situation l'exige, à mettre leur vie en péril pour sauver celle des autres. Je veux que les policiers, les gendarmes, les sapeurs-pompiers sachent qu'ils auront toujours mon plus fidèle soutien dans les missions délicates et dangereuses dont ils s'acquittent au quotidien, au service de la France et de la République.
Face à la menace terroriste, nous devons donc faire preuve d'une vigilance extrême et prévoir tous les moyens nécessaires. Nous devons être à chaque instant dans l'anticipation. C'est là le sens de la politique que mène le Gouvernement depuis des mois, en renforçant de façon considérable les moyens des forces de sécurité, en modernisant notre arsenal juridique, en assurant une meilleure coordination de nos services de renseignement, en améliorant la coopération indispensables avec nos partenaires européens et étrangers. Cette démarche de précaution s'impose en particulier pour assurer la sécurité des grands événements publics. Hier, la COP 21 ou le Festival de Cannes. Demain, l'EURO 2016 ou le Tour de France. Et chaque jour, la surveillance et la sécurisation des lieux sensibles, avec le concours des Forces Armées dans le cadre de l'opération sentinelle, est un objectif que nous devons atteindre.
Tous ces événements ont fait l'objet d'une préparation minutieuse en termes de sécurité, ce qui a déjà permis d'assurer l'organisation fluide et réussie de la COP 21 et du Festival de Cannes. La préparation de l'EURO 2016 se poursuit dans le même esprit ; c'est la raison pour laquelle, après avoir constaté des dysfonctionnements fâcheux dans le dispositif de sécurité mis en place au Stade de France lors de la finale de la Coupe de France de football samedi dernier, j'ai convoqué les organisateurs dès dimanche afin d'examiner avec eux les mesures qui devaient être prises afin de les corriger. Je n'accepterai aucun manquement.
Qu'en est-il des mesures prises pour assurer la sécurité et le bon déroulement de cette 103e édition du Tour de France ? Compte tenu des caractéristiques exceptionnelles de cet événement, qui dure un mois et s'étend sur 3500 Km de parcours, notre objectif consiste à assurer de façon optimale la sécurité des coureurs et du public, sans altérer sa dimension festive. Cet objectif, à la vérité, n'est pas nouveau puisque l'engagement du ministère de l'Intérieur remonte à l'origine même de cette épreuve en 1903. Je sais aussi combien les organisateurs du Tour font montre d'un grand professionnalisme, reconnu internationalement. Il est rassurant, M. le Directeur, d'avoir pour partenaire une organisation dont chacun sait et salue l'esprit d'excellence.
Compte tenu du contexte de menace que j'ai rappelé, le ministère de l'intérieur déploiera à cette fin cette année, à vos côtés, des moyens tout à fait exceptionnels. Je peux ainsi vous annoncer qu'au moins 23.000 gendarmes et policiers seront présents au bord des routes cette année pour assurer la sécurité du Tour de France. Des évaluations sont actuellement en cours afin d'examiner si nous devons rehausser encore, ici ou là, ce niveau d'engagement. Au-delà de ce service d'ordre de grande ampleur, le Tour continuera, cette année encore, à pouvoir bénéficier de l'escorte assurée par 50 motocyclistes de la Garde Républicaine, tandis que 12 policiers permanents accompagneront les coureurs pendant toute la durée de la course. Par ailleurs, pour la première fois cette année, j'ai demandé au GIGN d'accompagner le Tour de France tout au long de l'épreuve et de se tenir prêt à intervenir à tout moment en cas de besoin. Dans la logique du schéma national d'intervention que j'ai présenté le 19 avril dernier, il s'agit de disposer d'éléments capables de réagir dans l'urgence absolue à une attaque terroriste perpétrée aux abords et sur l'itinéraire de l'épreuve. Au-delà des forces de sécurité intérieure, tous les acteurs de la sécurité civile seront également mobilisés afin de secourir les spectateurs sur l'ensemble du parcours. Ainsi, l'ensemble des services d'incendie et de secours ont pris les dispositions nécessaires pour s'adapter à l'afflux de spectateurs.
Depuis plusieurs mois, l'organisateur et les services préfectoraux ont minutieusement préparé ce dispositif. Je voudrais également saluer la contribution qu'apportent les associations agréées de sécurité civile. Leurs nombreux bénévoles seront présents dans les zones d'affluence pour prendre en charge les blessures légères et assurer une mission générale de prévention auprès des spectateurs. Enfin, comme chaque année, la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France sera présente sur les zones techniques pour assurer des actions de prévention et de premier secours. Dans le même esprit, j'adresserai dans les prochains jours une circulaire aux préfets concernés par le Tour de France 2016 en leur demandant d'activer leur centre opérationnel départemental (COD).
Le Tour de France, comme d'autres grands événements sportifs relève d'une véritable coproduction de sécurité, qui associe les services de l'Etat et les organisateurs, que je tiens à remercier pour leur professionnalisme et pour leur engagement. Sur leur proposition, j'ai donc demandé aux directeurs généraux de la gendarmerie nationale, de la police nationale, et de la sécurité civile, d'être représentés en permanence au sein du PC mis en place. L'objectif consiste à fluidifier ainsi les échanges d'informations entre l'organisation de l'épreuve et les services opérationnels de sécurité et de secours. J'ai également décidé de désigner un membre du corps préfectoral qui sera intégré au PC organisateur sur l'ensemble du parcours, qui coordonnera l'ensemble des équipes du ministère de l'intérieur dans ce cadre et qui sera le point de contact privilégié des préfets des départements traversés par le Tour. Je sais que vous avez prévu de continuer cet après-midi, dans le cadre de plusieurs ateliers de travail, à préparer ensemble membres des forces de sécurité et de l'administration préfectorale, représentants des services d'ordre étrangers, organisateurs du tour - la mise en place de notre dispositif commun de sécurisation et je vous en félicite.
Une fois encore, ce sont plusieurs millions de spectateurs qui sont attendus cet été, sur le bord des routes de France, pour participer à cette grande fête qu'est et que doit rester le Tour de France. L'Etat, je peux vous l'assurer, assumera l'intégralité de ses devoirs, en s'appuyant sur le dévouement et le professionnalisme des forces de sécurité. Je sais que je peux également compter sur votre engagement et je vous en remercie chaleureusement.
Je vous remercie.
Source http://www.interieur.gouv.fr, le 25 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80314|
Les ministres des affaires étrangères des pays participant au Sommet Paris-Balkans 2016 se sont réunis le 24 mai 2016. Cette réunion, à laquelle participait le commissaire européen Johannes Hahn et le service européen pour l'action extérieure, s'inscrit dans le prolongement de la réunion ministérielle qui s'est tenue en avril 2015 à Brdo dans le cadre du processus de Brdo-Brijuni et dans le cadre de la préparation du Sommet de Paris sur les Balkans, qui se tiendra le 4 juillet 2016, dans le prolongement des Sommets de Berlin en 2014 et de Vienne en 2015.
À cette occasion, les ministres ont rappelé l'importance capitale de la perspective européenne des pays de la région et leur ancrage européen, pour les réformes politiques, socio-économiques et institutionnelles. Ils ont réaffirmé que l'UE et les pays des Balkans occidentaux partageaient des préoccupations communes s'agissant de leur voisinage et étaient confrontés aux mêmes défis globaux.
Dans ce contexte, ils ont reconnu que le défi migratoire nécessitait une approche inclusive et globale. La coopération dans ce domaine doit être renforcée, sur la base de la déclaration du mini-sommet du 25 octobre 2015. Ils ont réaffirmé la nécessité de se concentrer en priorité sur la lutte contre les réseaux criminels impliqués dans le trafic de migrants, l'asile et le renforcement des capacités en matière de contrôle des frontières et d'échange d'informations, en particulier avec Europol.
S'agissant de la lutte contre le terrorisme, et suite aux attentats de Paris et Bruxelles, les ministres ont souligné l'importance d'identifier des solutions collectives, seules à même de faire face à cette menace et de lutter contre la radicalisation religieuse. Les défis que constituent la radicalisation, le terrorisme et l'extrémisme violent, en particulier les combattants étrangers issus ou passant par l'Union européenne ou les Balkans occidentaux pour se rendre en Syrie et en Irak, nécessitent une coopération renforcée : échanges d'informations accrus, identification de bonnes pratiques en matière de formation, de valeurs communes, de prévention de la radicalisation, de déradicalisation et de réponse face aux activités terroristes.
Dans ce contexte, la coopération entre les pays de la région et avec l'Union européenne revêt une importance croissante pour la stabilisation de la région. Le rapprochement européen des pays des Balkans occidentaux passe par un alignement sur l'acquis européen, mais doit également se manifester à travers des projets concrets dans les domaines de la connectivité des infrastructures et de nouvelles perspectives pour la jeunesse.
S'appuyant sur ces principes, les ministres ont accueilli favorablement les progrès réalisés en matière de coopération régionale. Les participants ont souligné l'importance de la connectivité en matière de transports et d'énergie, qui représente un enjeu clé pour le développement et la croissance économique de la région.
Ils ont reconnu que des efforts supplémentaires devaient être déployés par chaque pays pour accélérer la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement («soft measures») adoptées lors du Sommet de Vienne et ont accueilli positivement la récente présentation, par la Commission européenne, d'une feuille de route devant mener à la mise en place d'un marché régional de l'électricité. Les participants ont également salué la perspective de la signature prochaine du Traité sur la communauté des transports.
Les participants ont réaffirmé leur engagement à poursuivre la mise en oeuvre de l'«agenda positif pour la jeunesse des Balkans», lancé par les ministres des affaires étrangères à Brdo en avril 2015 et salué les progrès déjà réalisés pour traduire cet engagement en propositions concrètes. Les pays participants se sont par ailleurs engagés à encourager leurs universités à proposer un nombre croissant de places dans les programmes de coopération ainsi que de bourses au profit d'étudiants des Balkans occidentaux. À cet égard, ils ont réaffirmé, avec la Commission européenne, leur volonté de franchir de nouvelles étapes dans la mise en oeuvre de l'Agenda positif lors du Sommet de Paris.
Enfin, les participants ont accueilli positivement les progrès réalisés dans la mise en place de l'office régional pour la coopération des jeunes (RYCO) et souligné l'engagement des pays des Balkans dans cette perspective. Ils ont rappelé que cet office serait officiellement lancé lors du Sommet de Paris.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80315|
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux d'accueillir aujourd'hui, avec Harlem Désir, les ministres, qui peuvent venir autour de moi.
Juste quelques mots pour expliquer le sens de cette réunion et redire le plaisir que j'ai d'accueillir aujourd'hui les ministres de la région des Balkans occidentaux.
C'est d'ailleurs la première fois que cette réunion se tient à Paris dans ce format. Avec nos partenaires slovènes, croates, allemands, italiens et autrichiens, avec le commissaire Johannes Hahn qui est chargé de la politique de voisinage et des négociations d'élargissement, nous travaillons très concrètement, autant que possible, à l'amélioration de la coopération régionale dans les Balkans.
Ce travail ne date pas d'aujourd'hui puisqu'il a commencé dans le cadre d'un processus que l'on appelle le processus de Brdo-Brijuni, à l'initiative du président slovène, Borut Pahor, c'était en 2013, avec un sommet auquel le président François Hollande a participé à l'époque.
Puis, ces travaux se sont poursuivis à Brdo, en avril dernier, à l'invitation de notre collègue et homologue, le ministre slovène des affaires étrangères, Karl Erjavec et avec le ministre croate, aujourd'hui, Miro Kovac.
Notre réunion d'aujourd'hui, qui fait suite à celles de Berlin et de Vienne, a deux objectifs. Le premier est de préparer le sommet qui aura lieu le 4 juillet prochain à Paris. Ce sommet aura lieu avec tous les partenaires des Balkans, ce qui veut dire faire le point sur les initiatives qui ont été prises lors des réunions précédentes, celles de Berlin et de Vienne en 2014 et en 2015, dans les domaines de coopérations régionales qui sont les suivants :
D'abord, une question essentielle pour l'avenir de toute cette région, c'est la question de l'énergie et celle des transports. Un travail très concret a été entrepris sur les infrastructures énergétiques et de transports. La commission présentera l'état des travaux effectués depuis le début du processus, le chemin qu'il reste à parcourir d'ici au mois de juillet pour obtenir des résultats qui sont à la hauteur de nos ambitions collectives.
Puis, il y a le thème de la jeunesse, un thème qui avait été retenu comme le domaine central lors des réunions et des sommets précédents. La jeunesse, c'est une évidence de dire qu'elle constitue les forces vives de cette région, comme des nôtres d'ailleurs. Et, cet avenir, l'avenir qui est le leur, ne peut être prometteur que si on lui permet aussi d'engager des programmes et des projets qui la concerne, et en particulier, de faciliter sa mobilité, la mobilité étudiante en premier lieu, mais aussi de bénéficier sur le terrain, dans la région, de programmes de coopérations avec l'Union européenne. C'est ce que l'on appelle l'agenda positif pour la jeunesse des Balkans. Ce sera l'un des éléments centraux du sommet du 4 juillet à Paris. Et puis, avec une perspective d'un projet tout à fait original, basé sur l'expérience, notamment la nôtre, franco-allemande, qui est la création d'un office régional pour la coopération pour la jeunesse.
Notre réunion sera également l'occasion d'un échange approfondi sur tous les défis communs que nous devons affronter ensemble. Aujourd'hui, tout le monde le sait, ils sont les conséquences de la guerre aux portes de l'Europe, en Syrie et au Levant. Face à l'afflux massif des réfugiés, chacun a dû faire face, chacun dans son pays. Et, au fil du temps, la coordination, la coopération se sont améliorées.
Ici, nous avons la conviction que les réponses peuvent être européennes, des réponses qui passent par la coopération entre tous les pays. Nous savons que nous devons faire face au risque terroriste. Nos efforts, là-aussi, doivent être communs. Beaucoup a été fait, mais nous devons encore faire plus et surtout mieux, en renforçant encore notre capacité à lutter ensemble contre un phénomène qui menace directement la sécurité de nos concitoyens.
C'est l'ensemble de ces aspects - des questions difficiles, vous l'imaginez - que nous allons examiner cet après-midi et ce soir, avec un objectif qui est de renforcer encore nos actions communes. Nous savons bien que nous avons un destin commun, que l'Histoire nous a marqués et qu'elle présente aussi des exigences et nous devons être à la hauteur de ces exigences.
Pour y répondre, nous devons le faire avec l'Union européenne et les pays des Balkans occidentaux, car l'Union européenne est aux côtés de ses partenaires des Balkans. La participation de Johannes Hahn en est la manifestation aujourd'hui, particulièrement concrète, celle d'une volonté et celle d'un engagement.
Et puis, il y a les actions communes entre les pays des Balkans eux-mêmes, car nous avons la conviction que c'est aussi par une coopération régionale, renforcée - j'ai eu des entretiens bilatéraux cet après-midi avec un certain nombre de nos amis ici présents et je vais poursuivre ces échanges - que cette coopération progresse et je m'en félicite.
Le cheminement européen de chacun des pays de la région est en marche, il est en cours, il est exigeant, j'en suis conscient, mais c'est la voie de l'avenir.
Merci, Mes Chers Collègues, merci d'être là, merci au commissaire européen d'avoir répondu à notre invitation pour préparer cet autre rendez-vous celui du 4 juillet.
Bon travail.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80316|
Monsieur le Député, comme vous le rappelez, la protection universelle maladie permet, depuis le 1er janvier 2016, à toute personne majeure résidant ou exerçant une activité professionnelle en France de bénéficier de manière autonome d'une couverture maladie. Pour celles et ceux qui n'exercent pas d'activité, l'ouverture des droits est soumise à deux conditions : la régularité du séjour et la stabilité de la résidence - à savoir le fait de résider six mois par an en France. Lors d'une installation en France, cette dernière condition est remplie à l'issue d'un délai de trois mois, sauf exceptions prévues par les textes.
Votre question concerne nos concitoyens de retour en France à l'issue d'une expatriation et porte en particulier sur les règles applicables aux personnes sans activité accompagnant ou rejoignant leur conjoint relevant d'un régime d'assurance-maladie en France.
Le problème ne se pose que pour les personnes qui ne bénéficient pas de dispositions de maintien des droits ouverts dans leur pays d'origine - lorsqu'elles en ont un. Or, ce maintien est en pratique très fréquent dans le cadre de la coordination européenne ou des accords bilatéraux de sécurité sociale.
Par ailleurs, pour sécuriser le fait que ces personnes doivent bien être éligibles d'emblée à la protection universelle maladie, un décret en cours de finalisation rendra explicite le fait que la condition de stabilité de résidence est présumée remplie pour les assurés comme pour les membres de leur famille : aucun délai de carence ne leur sera appliqué pour l'ouverture de leurs droits à titre personnel. Les personnes concernées pourront demander le réexamen de leur demande de rattachement à la Sécurité sociale à leur date d'installation en France et obtenir le remboursement des soins intervenus depuis lors.
J'espère avoir répondu à vos questions et aux inquiétudes légitimes des personnes qui vous ont interrogé.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80317|Monsieur le Ministre de l'Intérieur,
Mesdames et Messieurs les préfets,
Messieurs les directeurs d'agence régionale de santé, Mesdames et Messieurs les maires,
Mesdames, messieurs,
C'est avec fierté et humilité que j'ai accepté, le 12 février dernier, la mission que le Président de la République et le Premier ministre m'ont confiée de préparer, d'animer et de coordonner la politique d'Aide aux victimes. Aider les victimes c'est, au lendemain d'un attentat, d'un accident, ou d'un drame, être là pour les soutenir dans l'épreuve immédiate, ce qui ne passe pas uniquement par la parole, mais surtout par des actes. De quoi les victimes ont-elles besoin ? De protection d'abord pour assurer leur sécurité et celle de leur proches, c'est le travail des forces de l'ordre et du Ministre de l'intérieur ; de la réactivité du Parquet, d'une prise en charge rapide de leur état de santé, c'est le travail des forces de secours, des Sapeurs-pompiers et des médecins-hospitaliers ; mais d'un lieu d'accueil médico psychologique également, c'est aussi le rôle des psychiatres, aidés par les associations et les collectivités locales : d'une parole de soutien, enfin, et d'humanité.
Chacun d'entre vous a mené ce travail, d'une manière exemplaire le soir du 13 novembre. Je tiens à le dire, en cette journée consacrée au retour d'expérience. Je veux saluer le sang-froid et le professionnalisme, la maîtrise de tous les acteurs de l'urgence qui sont intervenus lors de ce vendredi soir fatal et simultanément sur 6 sites en même temps. Je veux également saluer votre courage et votre sens de l'Etat qui ont été perçus comme tels par les associations de victimes et les victimes que j'ai pu rencontrer. La politique d'aide aux victimes a besoin de chacun d'entre vous, il s'agit d'un travail collectif et collaboratif.
L'ampleur sans précédent de ces attentats, de par le nombre de victimes (130 morts, 478 blessées et 998 victimes choquées) et leur violence, a nécessité dans l'urgence la réactivité, bien souvent spontanée, de tous, pour apporter aux victimes les premiers soins et à leurs proches leur première prise en charge.
Le travail accompli par chaque service fut exemplaire, dans un contexte où la diversité des acteurs d'intervention rend indispensable la conduite coordonnée de l'action des pouvoirs publics.
L'aide aux victimes, dans ces moments-là, c'est aussi et surtout l'accès à l'information. C'est la raison pour laquelle le Premier ministre a signé, le 12 novembre 2015, la circulaire interministérielle qui a donné à la politique d'aide aux victimes son premier fondement avec la mise en place de la CIAV (Cellule Interministérielle d'Aide aux Victimes) dont je dispose et que je coordonne.
Le soir du 13 novembre, cette dernière a mobilisé plus de 120 personnes qui ont eu à gérer plus de 11 300 appels. Elle est l'expression de l'action de l'État dans la prise en charge globale des victimes d'actes de terrorisme. Je veillerai à ce qu'elle dispose des moyens humains et logistiques nécessaires à la prise en charge des familles et des proches.
Pour faire face à des situations aussi dramatiques et heureusement exceptionnelles, les retours d'expérience sont des exercices nécessaires pour améliorer l'efficacité de nos réponses par la prise en compte de meilleures initiatives et des expériences les plus prometteuses. Votre mobilisation dans cette démarche est donc essentielle. Les travaux post-attentats que vous avez menés sont riches d'instructions. Je veux en tirer quelques enseignements préliminaires :
La première des attentes des familles des victimes, c'est de savoir quel est le sort de leurs proches. L'identification des victimes est donc le premier sujet et pas le moins complexe. Il exige de la rapidité mais de la prudence. Il faut prendre le temps, parfois, avant d'identifier avec certitude une victime, les professionnels le savent bien. Enfin et plus particulièrement dans ce cadre, l'annonce des décès obéit à un cadre juridique strict.
Je sais que la Direction Générale de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises, la Direction Générale de la Santé, le Direction des Affaires Criminelles et de Grâces et le Centre de Crise et de Soutien travaillent pour optimiser l'identification des victimes. Parallèlement, la procédure judiciaire prévoit qu'après le travail préalable des services enquêteurs, notamment d'identification judiciaire, les corps des personnes décédées soient transportés au sein du ou des IML territorialement compétents. Sujet certes complexe par la massification potentielle des victimes, la nécessité d'une intégration dans une cinétique rapide et les contraintes médico-légales.
Je veillerai à ce que dans ces lieux qui sont pour les familles une étape éprouvante, une prise en charge multidisciplinaire puisse, grâce à l'appui de la CIAV et des psychologues, concilier efficacité procédurale et humanité.
Ces premiers instants, pour identifier les victimes dans l'urgence, sont déterminants, et vos retours vont nous permettre de faire évoluer le dispositif d'accueil, d'information, de prise en charge des victimes en cas de survenance de crises majeures.
Les premières leçons ont d'ailleurs été tirées pour que la réponse de l'Etat soit à la hauteur des situations de guerre, sur le sol français, comme celle que nous avons connu la nuit du 13 novembre.
L'instruction interministérielle relative à la prise en charge des victimes d'actes de terrorisme va ainsi être modifiée pour garantir une meilleure prise en charge des victimes et de leurs familles, autour de trois points majeurs :
1. Une meilleure remontée d'informations de chacun des acteurs au sein de la CIAV : tout d'abord en matière d'identification des corps et je veux saluer ici l'action de Bernard Cazeneuve qui, grâce à une nouvelle procédure accélérée d'identification des corps répond à l'un des points essentiels pour les familles de victimes, car tout commence à ce moment-là. Ensuite en ce qui concerne la centralisation de l'information au sujet d'hôpitaux où sont soignées les victimes mais aussi des Cellules d'Urgence Médico-Psychologique (CUMP). Ces dernières informeront en temps réel l'Agence régionale de santé (ARS), afin de mieux renseigner. Elles établiront pour chaque victime un certificat médical contenant les éléments circonstanciels les reliant à l'événement et attestant de ses répercussions médico-psychologiques. Cette nouvelle instruction permettra également une fluidité de l'information entre le procureur de la République, les services enquêteurs, le Centre opérationnel de réception et de régulation des urgences sanitaires et sociales du ministère de la Santé et la cellule interministérielle d'aide aux victimes.
2. Ce projet prévoit la pérennisation du centre d'accueil des familles. La CIAV mettra en place un lieu d'accueil unique pour les victimes et leurs proches, afin de leur permettre de se signaler, d'être informés de la situation de la personne qu'ils recherchent, de bénéficier d'un soutien psycho-traumatologique adapté et, le cas échéant, de fournir les éléments nécessaires à l'identification des victimes. En cas d'événement survenant à Paris ou à proximité, c'est le site de l'Ecole militaire qui est pré-désigné pour ce rôle.
3. Enfin, en cas d'événement survenant en province, la CIAV dépêchera auprès du préfet territorialement compétent une équipe déléguée, dont la mission sera de l'assister sur toutes les questions relatives aux victimes et à l'accompagnement des familles. De la même façon, le secrétariat d'Etat assurera lui-même ou par délégation un rôle de proximité.
Notre mission ne saurait toutefois s'arrêter là, à la seule prise en charge des victimes le jour du drame.
Après l'urgence, la vie des victimes et de leurs familles continue, avec ses traumatismes et ses difficultés. Ma mission, notre mission, c'est de veiller à leur parfaite prise en charge dans le temps pour les accompagner et les aider à retrouver l'équilibre.
C'est le sens du dispositif de suivi et d'accompagnement des victimes et de leurs proches, qui vient compléter le dispositif d'accueil, d'information, de prise en charge des victimes en cas de survenance de crises majeures, et auquel je suis particulièrement attachée.
A cet égard, le Comité de suivi des victimes, que j'ai réuni pour la première fois ce lundi 14 mars, permettra d'assurer la continuité de l'aide apportée par l'Etat. Placé sous mon autorité, il assure le suivi des victimes du 13 novembre 2015 figurant sur la liste unique des victimes établie par le parquet et de leurs proches et fédère l'action des ministères concernés et celle des caisses de sécurité sociale, des associations de victimes, et du Fonds de Garantie des victimes des actes de Terrorisme et d'autres Infractions (FGTI).
A l'issue de ce premier Comité, j'ai ainsi décidé :
d'améliorer le traitement des demandes des victimes, notamment en termes de délais et de transparence. A cet effet, il est demandé aux membres du Comité d'informer les familles sur l'avancement du suivi des dossiers et notamment sur les cas les plus complexes ;
d'élargir le champ d'intervention du Comité en assurant également le suivi des victimes d'attaques terroristes qui ont eu lieu depuis le 12 novembre 2015, en France et à l'international : il s'agit des victimes des attaques du 15 janvier 2016 à Ouagadougou (Burkina-Fasso), du 20 novembre 2015 à Bamako (Mali) et du 13 mars 2016 à Grand-Bassam (Côte d'Ivoire) ;
de permettre aux deux associations de victimes du 13 novembre « Life for Paris » et « 13 novembre : Fraternité et Vrité » de devenir membres, pour les points qui les concernent, de ce Comité.
Ce Comité de suivi va donc nous permettre de modéliser l'accompagnement médical, psychologique, financier et juridique des victimes d'attentats.
Vous le voyez, les premières mesures sont d'ores et déjà en cours de construction.
Cet effort d'amélioration de nos dispositifs doit être constant. Cela suppose une capacité à concevoir des solutions originales et innovantes et à savoir faire preuve d'imagination. Aussi, permettez-moi de conclure par une citation d'une grande romancière américaine, Willa Cather, qui disait : « On devient naturel à force d'expérience ». C'est tout le sens de ces retours d'expérience et des exercices qui permettront de tester nos dispositifs : pour être capables, le jour venu, à force d'expérience, d'apporter la réponse la plus rapide, la plus humaine et la plus naturelle possible.
Car je crois profondément que notre travail, dans l'urgence comme dans la prise en charge et l'accompagnement, consiste à affirmer en direction des victimes et de leurs familles une politique plus efficace, plus lisible et au final plus humaine.
Je sais pouvoir compter sur chacun d'entre vous pour m'aider dans cette grande et noble tâche. Et vous pouvez compter sur moi.
Je vous remercie.
Source http://www.gouvernement.fr, le 25 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80318|
Merci, Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur le Député,
Oui, la France, évidemment, est au coeur de toutes les décisions qui sont prises aujourd'hui en Europe.
Quand il s'agit de négocier avec la Russie et l'Ukraine, aux côtés de l'Allemagne, pour que ce conflit puisse cesser, c'est le président de la République qui prend l'initiative et cela s'appelle le «format Normandie».
Quand il s'agit de décider de l'avenir de la zone euro, et c'était la négociation sur le maintien ou non de la Grèce au sein de la monnaie commune, c'est le président de la République qui convainc l'ensemble des membres de la zone euro d'y maintenir la Grèce, évidemment en accord avec l'Allemagne.
Quand il s'agit de faire face à la crise des réfugiés et de dire que nous ne pourrons pas préserver Schengen, c'est-à-dire cet acquis qui est la liberté de circulation à l'intérieur des frontières, s'il n'y a pas un véritable contrôle de la frontière extérieure commune, c'est le ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve, avec le ministre allemand de l'intérieur, Thomas de Maizière, qui proposent la révision du code Schengen, la mise en place d'un corps européen de garde-frontières et le rétablissement d'un vrai contrôle de nos frontières extérieures communes.
Même quand il y a la remise du prix Charlemagne à une haute autorité morale, le pape François, vous venez de le rappelez, évidemment la France est représentée par un membre du gouvernement, Mme Najat Vallaud-Belkacem, qui remet au pape François une invitation de la part du président de la République à venir en France, et le pape accepte évidemment cette invitation, je peux vous le confirmer.
Oui, l'Europe est confrontée à des crises, nous y ferons face ensemble, avec les autres Européens, avec l'Allemagne qui est notre principal partenaire.
Je crois que sur tous les bancs de cette Assemblée, on devrait au contraire s'unir pour que la voix de la France soit entendue, celles d'une Europe fondée sur des valeurs, des valeurs qui permettent de battre l'extrême droite hier en Autriche, celles d'une Europe fondée sur la solidarité, celles d'une Europe fondée sur l'ambition de peser dans le monde de demain.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80319|
M. le président. L'ordre du jour appelle le débat sur le cadre législatif et réglementaire applicable aux essais cliniques, organisé à la demande de la commission des affaires sociales.
(...)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, qui ne peut être présente ce soir du fait des contraintes de son agenda.
Permettez-moi de revenir dans le détail sur l'événement tragique survenu à Rennes.
Le 10 janvier dernier s'est produit un accident dans le cadre d'un essai clinique de phase 1, réalisé par la société Biotrial, à Rennes. Cet événement d'une exceptionnelle gravité, et sans précédent, a entraîné le décès d'un homme et l'hospitalisation de cinq autres volontaires.
Dès que la ministre a eu connaissance de cet accident, elle s'est rendue sur place pour rencontrer les victimes et leurs familles. Je souhaite, à mon tour, faire part de la solidarité du Gouvernement à l'égard des proches et de la famille de Guillaume Molinet, décédé le 17 janvier dernier, ainsi qu'à l'ensemble des patients hospitalisés à la suite de cet accident.
Le 15 janvier, la ministre a saisi l'Inspection générale des affaires sociales, afin que soient analysées les causes de l'accident. Le rapport définitif de l'IGAS doit être remis au cours du présent mois.
Le 4 février, une note d'étape a été rendue publique par l'IGAS sans que soient identifiées les causes directes de l'accident. Bien que certains manquements aient été constatés, l'IGAS n'a pas considéré qu'ils justifiaient la suspension, à titre conservatoire, de l'autorisation de conduire des essais accordée au laboratoire Biotrial.
Le 1er mars, Marisol Touraine a adressé une circulaire aux directeurs généraux des agences régionales de santé, leur demandant de rappeler à l'ensemble des promoteurs et titulaires d'autorisations de lieux de recherche leurs obligations en matière de prise de décisions immédiates et de respect des délais de notification des effets et événements indésirables au cours des essais cliniques.
La circulaire prévoit que tout événement indésirable grave doit être déclaré sans délai, contre sept jours actuellement ; elle va donc plus loin que la réglementation actuelle.
S'agissant des essais sur volontaire sain, la ministre a demandé que tout effet indésirable grave conduisant à une hospitalisation soit considéré comme un « fait nouveau », au sens du code de la santé publique, et déclaré sans délai à l'ANSM, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, et aux comités de protection des personnes, ainsi que je viens de le mentionner. Un tel événement doit conduire à la suspension immédiate de l'essai. Cette disposition va plus loin, je le répète, que la réglementation française et la réglementation européenne en vigueur.
La ministre a également saisi le commissaire européen et ses homologues européens de ce sujet, et proposé la mise en place d'un comité d'experts internationaux pour renforcer la protection des volontaires sains au cours des essais cliniques. Je veux dire à ceux d'entre vous qui m'ont interrogée sur l'état d'avancement de ces travaux que le commissaire européen attend d'avoir le rapport définitif de l'IGAS pour se prononcer.
J'ajoute que, actuellement, la réglementation européenne ne fait pas de différence entre les types d'essais cliniques, qu'il s'agisse des essais de phase 1, 2, 3 ou 4. En clair, cela signifie que la réglementation est la même pour les essais sur volontaires sains, qui, hormis les prélèvements cliniques bien sûr, n'ont a priori aucune raison d'être hospitalisés en cours d'essai de façon impromptue, en cas d'événement indésirable grave. C'est le règlement européen tel qu'il s'appliquera dans tous les États membres. C'est cette imperfection qu'a relevée Marisol Touraine et qui l'a conduite à demander la constitution d'un comité d'experts internationaux, en vue de renforcer la protection des volontaires sains. En effet, la situation n'est pas exactement identique pour un volontaire sain ou un volontaire suivi pour une maladie chronique.
Les 16 février et 31 mars, le comité scientifique spécialisé temporaire, le CSST, mis en place par l'ANSM et qui s'est également réuni, a confirmé que le mécanisme à l'origine de l'accident de Rennes avait dépassé la seule inhibition d'un neuromédiateur du système endocannabinoïde, dont je vous fais grâce du nom précis, et impliquait très vraisemblablement la molécule BIA 10-2474 elle-même.
Les études menées chez l'animal ont été de nouveau examinées en détail, mais n'ont pas apporté d'éléments nouveaux, notamment sur le plan de la toxicité. Ces conclusions sont cependant toujours provisoires, certains éléments essentiels n'ayant pas encore été communiqués, en particulier les dosages sanguins réalisés pendant l'essai.
Par ailleurs, sans attendre une éventuelle mise à jour des recommandations européennes, l'ANSM a élaboré un plan d'action visant à améliorer la sécurité des essais cliniques. Celui-ci a été mis en uvre à la fin du mois de mars et regroupe différentes mesures concernant les processus internes d'instruction des autorisations, mais aussi l'analyse des données en cours de déroulement de l'essai par les promoteurs et les processus d'information de l'Agence en cas d'incident.
Enfin, je vous rappelle que d'autres investigations réalisées par le pôle de santé publique du parquet de Paris sont en cours.
Cet accident tragique nous a mis devant l'obligation de nous interroger une nouvelle fois sur le cadre législatif et réglementaire des essais cliniques, ainsi que vous l'avez tous souligné, mesdames, messieurs les sénateurs.
Le président Alain Milon a rappelé l'histoire de l'encadrement des essais cliniques. Je n'y reviendrai donc pas, mais je souhaite saluer ceux qui ont permis de faire avancer notre législation en la matière ; je pense bien sûr à Olivier Jardé, mais aussi à Jean-Pierre Godefroy, qui fut le rapporteur du Sénat et dont le travail a permis aux deux assemblées de parvenir à un compromis.
J'ai entendu vos critiques concernant la non-parution des décrets d'application de la loi Jardé, et je souhaite vous répondre précisément sur ce point.
Comme Olivier Jardé l'a lui-même rappelé devant la commission des affaires sociales le 2 mars dernier, le ministère de la santé a élaboré les projets de décret dès le mois d'avril 2012. Durant l'été 2012, ces projets ont été soumis à la relecture d'un groupe de travail, constitué à la demande de Marisol Touraine. À partir d'octobre et jusqu'à la fin de l'année 2012, ce projet a été soumis à la concertation.
Au début de l'année 2013, des travaux européens sur le règlement européen relatif aux essais cliniques ont été annoncés. Le ministère de la santé a participé à toutes les réunions à Bruxelles sur ce sujet. Au cours de cette même année, nous nous sommes interrogés sur l'opportunité de publier les très nombreux textes d'application, sachant que la loi devrait nécessairement être modifiée rapidement avec l'entrée en vigueur du règlement européen.
Un très large consensus s'est dégagé pour ne pas publier les textes. Modifier à deux reprises en trois ans la législation sur les essais cliniques aurait fait courir un risque majeur à la recherche française.
C'était également le point de vue d'Olivier Jardé, qui l'a exprimé de manière précise devant votre commission, et celui de François Lemaire, ancien chargé de mission au cabinet de Roselyne Bachelot qui, toujours devant votre commission, a souligné le caractère déraisonnable de ce calendrier.
Je souhaite rappeler en cet instant les propos qu'a tenus François Lemaire sur l'absence de lien entre la loi Jardé, qui est avant tout une loi de simplification du cadre des essais cliniques, et l'accident de Rennes : « La loi Jardé n'est pas en cause en cette affaire, puisqu'elle n'a pas touché à ce qui concerne le médicament, domaine qui relevait de la législation européenne. Elle porte essentiellement sur les recherches observationnelles, les collections biologiques [ ] Elle n'a pas touché au noyau dur du médicament et de la sécurité. On ne peut donc pas dire que si on l'avait appliquée avant, l'accident de Rennes n'aurait pas eu lieu ».
Je crois que cette mise au point était nécessaire pour mettre fin à certains doutes ou certaines inquiétudes que j'ai cru percevoir au cours de certaines interventions.
Les travaux préparatoires au projet de loi de modernisation de notre système de santé commencés au début de l'année 2014 ont offert un véhicule législatif adéquat pour adapter la loi Jardé au règlement européen. Au terme des débats parlementaires, l'article 216 de la loi promulguée le 26 janvier dernier a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures visant cette adaptation.
Le projet d'ordonnance renvoie ainsi toutes les dispositions sur les essais cliniques de médicaments au règlement européen, puisque c'est ce règlement européen qui fixe les règles relatives à la vigilance en la matière. Par conséquent, ces règles ne pourront être modifiées par décret que si elles sont plus protectrices que celles qui sont prévues par le règlement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous m'avez demandé où en était le projet d'ordonnance : il est en cours d'examen par le Conseil d'État. L'ordonnance devrait être publiée au mois de juin prochain et le projet de loi de ratification devrait être déposé au Parlement dans la foulée. Par ailleurs, un projet de décret pris en application de l'ordonnance est en cours d'élaboration. Ce dernier devrait être transmis au Conseil d'État avant l'été pour une publication à l'automne.
À l'issue des consultations sur le projet d'ordonnance, trois sujets délicats ont été identifiés.
Tout d'abord, il est vrai qu'il existe une forte opposition au tirage au sort des comités de protection des personnes. Pour autant, le Gouvernement n'entend pas renoncer à cette réforme. Il faut réfléchir précisément aux modalités de ce tirage au sort. L'idée d'un tirage au sort « intelligent » parmi des CPP particulièrement compétents dans certains domaines est à l'étude et pourrait être précisée dans le décret d'application.
Ensuite, la répartition des compétences entre les CPP et l'ANSM a également fait l'objet de débats. Le projet d'ordonnance prévoit ainsi de confier à l'Agence l'évaluation de la méthodologie des essais cliniques.
Enfin, il est prévu de créer un secrétariat unique pour l'ensemble des CPP qui permettrait d'accroître la rapidité des échanges entre comités et ANSM.
J'entends désormais répondre aux interrogations sur le fonctionnement des CPP et sur les relations des comités avec l'ANSM.
Le premier point porte sur le fonctionnement des comités : il existe aujourd'hui trente-neuf comités de protection des personnes répartis sur l'ensemble du territoire métropolitain. Cette multiplicité est un facteur d'hétérogénéité, qui se manifeste d'abord par une grande variabilité de l'activité des CPP, laquelle s'explique sans doute par la plus ou moins grande proximité des centres hospitalo-universitaires de grande taille. En l'absence de véritable coordination, chaque CPP développe sa propre jurisprudence sur les questions éthiques.
Cette hétérogénéité concerne également la gestion administrative et financière des CPP, puisque les budgets des comités se situaient entre 50 000 euros et 230 000 euros en 2015. Si la réglementation a prévu la mise à disposition de moyens en personnels, matériels et locaux, toutes les conventions ne valorisent pas de la même façon les prestations réellement servies aux comités.
Cette difficulté a conduit les pouvoirs publics à prévoir la mise en place dans la loi Jardé d'une commission nationale des recherches impliquant la personne humaine qui est chargée de la coordination, de l'harmonisation et de l'évaluation des comités. Celle-ci sera installée dès que le décret d'application de l'ordonnance sera publié, étant entendu, je l'espère, que l'ordonnance sera ratifiée dès cet été, ce qui dépend évidemment du Parlement, et que le décret pourra être publié à l'automne prochain.
Par ailleurs, la loi a prévu la mise en uvre d'un système d'attribution aléatoire des dossiers de recherches aux CPP pour renforcer leur indépendance. En effet, ce système de tirage au sort écarte tout soupçon de liens d'intérêts entre l'établissement de santé public, siège du CPP, et le CPP lui-même.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, si les conditions pratiques de cette attribution aléatoire sont encore en discussion, le dispositif aura pour conséquence de lisser l'activité des trente-neuf CPP ce n'est pas du tout le cas pour l'instant , de telle sorte que tous les comités traitent à peu près le même nombre de dossiers. Cela permettra également d'harmoniser le financement des comités et de simplifier leur gestion budgétaire. À ce sujet, je précise que le ministère de la santé continuera à maintenir son effort, comme il l'a toujours fait, pour répondre aux situations financières les plus délicates.
Le second point concerne le règlement européen relatif aux essais cliniques des médicaments qui nous contraint à revoir les relations entre l'ANSM et les comités. En effet, la mise en place d'un portail européen unique de dépôt des demandes de recherches sur le médicament, ainsi que l'obligation faite à chaque État de rendre une décision unique sur le projet de recherches qui lui est soumis impliquent de repenser l'articulation entre l'ANSM et les CPP.
Tout d'abord, le portail numérique européen suppose que l'ANSM actualise son système d'information et, parallèlement, que les CPP disposent d'un système d'information en interface avec l'ANSM.
Si j'entre autant dans le détail, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est parce que vous m'avez posé des questions précises, notamment sur les raisons pour lesquelles tel ou tel dispositif n'avait pas déjà été mis en uvre. Je tiens donc à expliquer les modalités très concrètes de mise en place de chacun de ces éléments.
M. Jean Desessard. Merci, madame la secrétaire d'État !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Une discussion doit ensuite s'engager avec la conférence nationale des comités de protection des personnes sur l'opportunité de mettre en place un secrétariat unique des CPP. Cette organisation n'est envisageable qu'à moyen terme, car l'ANSM et les CPP doivent au préalable préparer l'installation du portail européen, dont je viens de parler, et un système d'information concernant la totalité du fonctionnement des CPP doit également être défini.
Je veux en outre répondre aux questions relatives à l'éthique
Tout d'abord, il y a la question du consentement. Dans le cadre des essais cliniques, l'investigateur des essais a l'obligation de recueillir le consentement éclairé et signé de la personne volontaire. Le promoteur a également l'obligation de s'assurer que l'investigateur respecte ses obligations. Enfin, l'ANSM peut mener des audits en cours d'étude pour vérifier le strict respect de la réglementation et, en cas de manquement, déclencher les procédures juridiques et administratives.
À la suite de l'accident de Rennes, Marisol Touraine a immédiatement rappelé la nécessité de recueillir de nouveau le consentement éclairé et signé des volontaires sains pour poursuivre une étude, dès lors que serait survenu un fait nouveau, au sens du code de la santé publique. Lorsqu'un tel fait survient, il faut non seulement le déclarer immédiatement, mais également suspendre l'essai plutôt que de faire comme si de rien n'était, ainsi que refaire signer un consentement à la personne volontaire.
Ensuite se pose la question de la publicité, peu évoquée par les différents intervenants.
La publicité pour appel à participation à un essai clinique est parfois utilisée, non seulement par les industriels, mais aussi par des institutions académiques telles que l'INSERM. Je veux être claire : cette publicité ne peut en aucun cas porter sur le produit de santé expérimental.
Évidemment, le recrutement ne peut être automatique et suit une procédure réglementaire très stricte. Dans le cas de l'étude conduite par Biotrial, la publicité pour la recherche était conforme à la réglementation. Dès lors qu'une publicité pour promouvoir la participation à la recherche revêt un caractère non éthique, le recours au jury de déontologie publicitaire de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité permet de vérifier l'adéquation de la publicité, ou au contraire sa non-adéquation, avec le respect des règles.
Je terminerai mon intervention en répondant au président Alain Milon sur le développement de la recherche clinique en France
Oui, monsieur le président, nous pensons que le développement de la recherche clinique et la sécurité des essais cliniques sont des objectifs conciliables.
Le Conseil stratégique des industries de santé, qui réunissait le Gouvernement et les partenaires industriels le 11 avril dernier, a cité le développement de la recherche clinique parmi ses axes stratégiques pour 2016.
La France dispose déjà d'atouts considérables en matière de recherche. Les six instituts hospitalo-universitaires présents sur notre territoire ont ainsi conduit près de 1 500 essais thérapeutiques de 2012 à 2014.
Néanmoins, des pistes d'amélioration existent. Aujourd'hui, la contribution française aux essais thérapeutiques n'est pas égale dans tous les domaines. Si notre pays fait partie des leaders dans le domaine de l'oncologie, autrement dit de la cancérologie, ou dans celui des maladies rares, les indicateurs sont moins bons dans d'autres domaines, comme celui du diabète notamment.
C'est la raison pour laquelle la France a grandement contribué à l'élaboration du règlement européen relatif aux essais sur les médicaments et participe activement à l'élaboration du règlement européen sur les dispositifs médicaux. Le règlement a notamment permis d'avancer sur les délais d'instruction technico-administrative des protocoles. Dorénavant, ces délais sont réduits à soixante jours au maximum, ce qui constitue une avancée importante.
Aujourd'hui, l'enjeu est de continuer à garantir aux patients des conditions strictes de sécurité, tout en améliorant les délais. Alors, comment faire ?
Tout d'abord, il faut simplifier les procédures. C'est pourquoi Marisol Touraine a mis en place la convention unique. Depuis le mois de janvier 2015, 255 des 262 conventions de recherche l'ont utilisée. Cela montre une adhésion massive à ce nouveau dispositif, qui a permis de réduire de moitié les délais de signature des conventions, de 117 jours en moyenne à 53 jours. La France est ainsi passée du trentième rang en ce qui concerne le délai de contrat pour les essais cliniques à promotion industrielle à la fin de l'année 2014 au sixième rang au début de cette année.
Ensuite, nous devons multiplier les partenariats entre la recherche publique et la recherche privée pour encourager les financements en faveur de la recherche. À cet égard, nous nous réjouissons de la multiplication des créations de fonds d'investissement privés pour développer de tels partenariats.
Récemment encore, la nouvelle fondation d'une entreprise pharmaceutique pour la recherche en immuno-oncologie a ainsi lancé son premier appel à projets à destination de structures de recherche publique dans un domaine qui ne concerne pas, bien sûr, les médicaments fabriqués par ladite entreprise pharmaceutique. De la même façon, Marisol Touraine a récemment parrainé la signature d'un partenariat entre une autre fondation privée et l'INSERM. Ces initiatives vont dans le bon sens.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l'ambition du Gouvernement est double : assurer à nos concitoyens une sécurité totale en ce qui concerne les médicaments innovants et leur participation aux essais cliniques et, dans le même temps, permettre à la France d'être un leader de l'innovation dans le domaine de la santé. Ces deux objectifs sont conciliables et s'inscrivent dans une même démarche d'excellence, de responsabilité et d'éthique ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE. M. le président de la commission des affaires sociales applaudit également.)
M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur le cadre législatif et réglementaire applicable aux essais cliniques.
Source http://www.senat.fr, le 11 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80320|BRUCE TOUSSAINT
Alain VIDALIES est l'invité d'I TELE ce matin, bonjour et merci d'être avec nous.
ALAIN VIDALIES
Bonjour.
BRUCE TOUSSAINT
Vous êtes secrétaire d'Etat chargé des Transports. Peut-on parler de pénurie de carburant ce matin ?
ALAIN VIDALIES
Non ! Je ne crois pas qu'on ne peut pas parler de pénurie de carburant, la situation est la même qu'au début de la crise il y a à peu près dans notre pays sur les 12.000 stations-service 20 % qui aujourd'hui sont en difficulté, soit en pénurie complète, soit en pénurie d'un ou deux produits. La situation a quand même évolué, c'est-à-dire que c'était très concentré sur l'Ouest, le Nord- ouest, et que c'est en train de se diversifier, le volume n'évolue pas mais un certain nombre de régions qui n'étaient pas touchées le sont aujourd'hui - parfois de manière surprenante - on a 13 % de stations dans le Sud-ouest qui n'étaient absolument pas concernées par ces difficultés et, donc, il y a évidemment chacun le comprend un phénomène de précaution qui joue.
BRUCE TOUSSAINT
Alain VIDALIES, pourquoi ne pas dire plus facilement et plus naturellement qu'il y a une pénurie. Regardons ensemble, c'est juste une parenthèse, mais elle est importante, c'est quoi une pénurie ? On a regardé ensemble ce matin à la rédaction ce que ça voulait dire dans le Larousse : manque de ce qui est nécessaire, insuffisance. On y est ! C'est une pénurie, regardez, insuffisance, quand une station-service sur cinq est en difficulté on peut bien parler de pénurie ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez, vous jouez sur les mots, comme vous voulez.
BRUCE TOUSSAINT
Je ne joue pas sur les mots...
ALAIN VIDALIES
Mais il n'y a pas de pénurie
BRUCE TOUSSAINT
C'est la réalité que les Français vivent.
ALAIN VIDALIES
Non, il n'y a pas de pénurie. Pourquoi ? Parce que je n'ai pas de problème de stock, c'est ça qui est essentiel, du stock j'en ai, j'ai un problème de logistique - c'est-à-dire que le problème qui existe aujourd'hui c'est comment on amène le stock qui existe, qui est dans les dépôts, comment on l'amène dans les stations-service et, au départ, le problème il se crée parce qu'il y a les transporteurs qui bloquent cet accès et aujourd'hui la position du gouvernement est très claire : il y a la grève dans les raffineries, on respecte le droit de grève, mais ce n'est pas là que se pose le problème. Il y a des dépôts qui ne sont pas en grève, c'est-à-dire que les salariés sont dans ces dépôts ne sont pas en grève mais il y a des gens qui bloquent l'accès à ces dépôts et ça ce n'est pas acceptable et donc nous libérons l'accès à ces dépôts comme ça été fait ce matin pour que les camions puissent aller dans les stations-service.
BRUCE TOUSSAINT
On va y venir dans un instant ! Les raffineries, la CGT dit ce matin : « toutes les raffineries françaises il y en a huit je crois sont occupées et bloquées », est-ce que c'est vrai selon vous ?
ALAIN VIDALIES
C'est faux à ma connaissance, puisque les raffineries EXXON il y en a deux qui fonctionnent et dans l'une, c'est les salariés de la raffinerie qui sont en grève, c'est la CGT qui à l'extérieur essaie d'empêcher les gens de travailler, ça c'est le même raisonnement, on respecte le droit de grève des salariés, on n'empêche pas les autres de faire ce qu'ils souhaitent faire. Donc, il y a deux raffineries sur les huit : une qui est en arrêt technique, cinq qui sont en grève et deux qui fonctionnent.
BRUCE TOUSSAINT
Voilà donc le chiffre ce matin que vous nous donnez, six sur huit selon vous, ça n'a pas changé. Vous évoquiez le nombre de stations, tout à l'heure vous disiez 20 % avec une diversification, c'est-à-dire que ça se diversifie dans le pays, ça représente combien de stations, vous avez un chiffre approximatif à nous donner ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez il y a 12.000 stations en France, donc tout le monde voit bien à une centaine près ce qu'est le chiffre.
BRUCE TOUSSAINT
Fos-sur-Mer, ça été extrêmement tendu ce matin, je voudrais qu'on rejoigne quelques instants notre envoyée spéciale Stéphanie ROUQUIE qui va nous raconter ce qui s'est passé. A Fos-sur-Mer intervention, Stéphanie, des forces de l'ordre vers 4 h 15, ça été très musclé, là vous vous êtes déplacée à Port-de-Bouc où c'est à nouveau très tendu, Stéphanie ROUQUIER pour I TELE.
STÉPHANIE ROUQUIE, EN DUPLEX DE PORT-DE-BOUC BOUCHES DU RHÔNE
Effectivement ! Et le déblocage du dépôt pétrolier de Fos a été très musclé, il a duré deux heures, il y avait beaucoup de travail. Les CRS, les gendarmes mobiles étaient très nombreux et ils étaient très équipés, ils sont arrivés donc avec des drones et avec des hélicoptères, des canons à eau, des gaz lacrymogène et des flash-ball, mais il faut dire que face à eux les cégétistes, les militants étaient aussi très motivés, ils s'attendaient à cette intervention des forces de l'ordre. Donc là le dépôt pétrolier de Fos a été dégagé et maintenant on joue un peu au chat et à la souris, donc les militants sont un peu partis du dépôt de Fos et ils sont venus ici à Port-de-Bouc pour essayer de bloquer en fait cette route - cette grande route principale - et là effectivement les CRS ont répondu, les gendarmes mobiles en moins de 10 minutes sont arrivés aussi très équipés vous le voyez avec le canon à eau pointé directement sur eux et là on vient d'assister, il y a moins de cinq minutes, les gendarmes se sont avancés et ils ont fait partir en fait les militants qui viennent à l'instant de quitter le site.
BRUCE TOUSSAINT
Merci beaucoup Stéphanie ROUQUIE, en direct de Port-de-Bouc, donc dans les Bouches-du-Rhône. Alors d'abord la méthode, on a besoin de tant de moyens et de Comment dire ? D'équipements militaires et de guerre quasiment pour déloger ces grévistes ?
ALAIN VIDALIES
Il n'y a pas de guerre ! Attendez
BRUCE TOUSSAINT
On parle d'armes !
ALAIN VIDALIES
Ou on parle des Français qui aujourd'hui ont un peu accès aux stations service, quelle est la situation ? Moi je suis républicain, je défends un certain nombre de principes, le droit de grève est un principe constitutionnel, les gens qui font grève on respecte leur droit, on n'est pas intervenus dans les raffineries ; Là ce n'est pas du tout ça ! Là il s'agit de quoi ? Il s'agit de gens qui vont empêcher d'autres qui ne font pas grève de travailler en occupant l'espace public et, dans une République, il ne faudrait rien faire ? Non ! Nous intervenons. On intervient comment ? Pas la fleur au fusil, là c'est une intervention normale par rapport à des gens, moi les rapports que j'ai c'est qu'il y avait des gens qui lançaient des pneus, enfin évidemment ça été difficile, on aurait préféré éviter, mais c'était aujourd'hui la seule réponse possible, et je le dis clairement.
BRUCE TOUSSAINT
Y aura-t-il d'autres interventions des forces de l'ordre
ALAIN VIDALIES
Oui, oui.
BRUCE TOUSSAINT
Dans la journée ?
ALAIN VIDALIES
Ah ! Dans la journée, je ne vais pas ici vous donnez le planning naturellement, mais je l'ai annoncé dès hier de toute façon, dès avant-hier, nous allons libérer les dépôts, là où ce nest pas des grévistes mais des gens qui ont décidé d'empêcher la France de fonctionner et donc d'empêcher d'autres gens qui eux ne sont pas grévistes de travailler normalement, eh bien les principes républicains font que nous devons rétablir la liberté dans ces cas-là.
BRUCE TOUSSAINT
Par tous les moyens ?
ALAIN VIDALIES
Les moyens, je veux dire on ne sait pas, on ne va pas arriver en chantant, il y a des sommations, mais suite à une réponse qui est forcément une réponse en termes d'ordre public.
BRUCE TOUSSAINT
On va écouter ensemble ce que nous disait hier soir Francis DUSEUX, qui est le président de l'Union Française des Industries Pétrolières, parce qu'effectivement il y a une inquiétude maintenant sur les prochains jours, on écoute ensemble Francis DUSEUX.
FRANCIS DUSEUX, PRÉSIDENT DE L'UNION FRANÇAISE DES INDUSTRIES PÉTROLIÈRES EXTRAIT DU 23/05/2016
Qu'il y ait un blocage au niveau des ports le brut ne peut pas arriver, il y a du stockage qui est disponible dans les bacs du Havre mais très rapidement les bateaux vont être sur rade, on va attendre et on va être obligés d'arrêter l'ensemble des raffineries, donc là ça devient effectivement assez critique.
BRUCE TOUSSAINT
Qu'est-ce que vous lui répondez ?
ALAIN VIDALIES
Ah ! Il parle d'autre chose, soyons plus précis.
BRUCE TOUSSAINT
Oui.
ALAIN VIDALIES
Jusqu'à présent on a parlé des raffineries, ensuite on a parlé des dépôts, lui il parle des ports
BRUCE TOUSSAINT
Absolument.
ALAIN VIDALIES
Si on n'a pas de problème à cause de l'arrêt des raffineries c'est parce qu'effectivement 50 % de ce que nous consommons est
BRUCE TOUSSAINT
Non, mais ce qu'il nous raconte c'est la suite du mouvement, c'est ce qui va se passer dans 48 heures ou 72 heures.
ALAIN VIDALIES
Attendez ! Peut-être que vous vous avez des liens directs avec eux, pour l'instant ce n'est pas les choses chaque jour suffit sa peine, mais effectivement il y a une difficulté de ce point de vue-là, il a raison, mais on n'en n'est pas là pour l'instant, effectivement s'il y a un blocage des ports la situation deviendrait plus complexe. Mais on travaille aussi, y compris en termes de maintien de l'ordre, à cette question.
BRUCE TOUSSAINT
Quel message adressez-vous ce matin aux Français, aux gens qui nous regardent, qui n'ont plus d'essence, quel est le message que vous souhaitez envoyer ?
ALAIN VIDALIES
Les deux tiers du pays ne sont pas concernés, le catastrophisme ne sert à rien. Je dis aux gens
BRUCE TOUSSAINT
Donc, ça veut dire quoi, c'est-à-dire qu'un tiers du pays est concerné ?
ALAIN VIDALIES
Ca veut dire qu'un tiers des Français potentiellement à partir du moment où 20 %, 20 % des stations c'est à peu près il y a deux tiers du territoire sur lequel cette réalité-là n'existe pas aujourd'hui, le reste du territoire il y a des gens qui ont des difficultés, 20 % des stations. La France a été confrontée à ça, nous avons aujourd'hui je vous l'ai dit 20 % des stations, en 2010 on est montés jusqu'à 50 % des stations qui étaient bloquées. Donc le gouvernement applique les principes républicains, respecte le droit de grève lorsqu'il est appliqué et ailleurs fait respecter la liberté de travailler.
BRUCE TOUSSAINT
Un Français sur trois, c'est ce que vous dites ce matin, un Français sur trois est potentiellement concerné ?
ALAIN VIDALIES
Il est dans une zone où il peut avoir ce genre de difficulté, ça ne veut pas faire qu'un Français sur trois n'a pas d'essence pour que les choses ne soient pas
BRUCE TOUSSAINT
Potentiellement c'est ce que je viens de dire, absolument, potentiellement.
ALAIN VIDALIES
Potentiellement, voilà, nous sommes d'accord sur les mots.
BRUCE TOUSSAINT
Qu'est-ce que vous leur dites à ces 33 %...
ALAIN VIDALIES
Que le gouvernement fait son travail, que depuis vendredi nous avons exactement fait ce que nous avions annoncé : 1°) renouer le dialogue avec les camionneurs, puisque c'était eux qui bloquaient, j'ai envoyé une lettre à l'ensemble des organisations syndicales vendredi de telle sorte manière qu'aujourd'hui le mouvement des camionneurs sur la question des heures supplémentaires n'a plus de fondement ; ensuite, nous avons libéré les dépôts, le gouvernement fait ce qu'il a annoncé sur la base des principes qui ont été rappelés par le Premier ministre.
BRUCE TOUSSAINT
La CGT mène cette bataille syndicale et sociale, on va écouter ensemble Emmanuel LEPINE qui dirige la branche « pétrole » à la CGT et qui était notre invité à 7 h 30 tout à l'heure sur I TELE.
EMMANUEL LEPINE, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE LA BRANCHE « PÉTROLE » DE LA CGT EXTRAIT 7H30
Ce matin il y avait deux assemblées générales dans les deux raffineries qui restaient en mouvement et en production et la charge des CRS à ESSO Fos a provoqué une énorme motion en même temps à Notre-Dame-de-Gravenchon ce sont leurs collègues qui se sont fait tabasser et, du coup, la grève a été votée à Gravenchon. Donc, le résultat en quelque sorte de cette politique de soi-disant fermeté c'est d'enfoncer un peu plus le pays dans la pénurie puisque je considère que la pénurie le fautif c'est le gouvernement
BRUCE TOUSSAINT
On est typiquement dans un bras-de-fer avec un gouvernement qui fait preuve de fermeté et en face un syndicat, la CGT, qui ne veut pas lâcher. C'est quoi l'idée-là pour les prochaines heures et les prochains jours, donc on continue à se frotter comme ça et à quelle est la suite ?
ALAIN VIDALIES
Le gouvernement a un pouvoir légitime, démocratiquement élu, des principes puisqu'il faut en arriver-là les choses sont claires, nous prenons des décisions n'ont pas parce qu'on est élus par les adhérents de je ne sais quel parti ou quel syndicat mais parce qu'on a le pouvoir qui a été donné par les Français, nous prenons ces décisions dans le cadre du respect de la loi et de la Constitution et je pense que la cohérence elle est aujourd'hui du côté du gouvernement - que la CGT ait décidé de ce bras-de-fer pour des raisons qui n'apparaissent pas toujours évidentes c'est sa démarche, mais en tous les cas, nous, nous ferons respecter le droit tout en respectant le droit des militants syndicaux, notamment de faire grève.
BRUCE TOUSSAINT
On a entendu beaucoup de ministres et même le Premier ministre il y a quelques minutes sur Europe 1 utiliser le terme de prise d'otage, vous validez ce terme ?
ALAIN VIDALIES
C'est comme ça, évidemment, parce que c'est comme ça que les Français le ressentent, les Français ressentent que Ecoutez ! C'est assez simple, pourquoi - si la CGT est forte de sa conviction, elle a le droit de faire grève pourquoi aller bloquer le pays ?
BRUCE TOUSSAINT
Mais vous jouez quoi là aujourd'hui, le pourrissement ?
ALAIN VIDALIES
Ah ! Pas du tout, pas du tout, ce n'est pas du tout notre position.
BRUCE TOUSSAINT
Vous espérez que l'opinion se retourne contre la CGT ?
ALAIN VIDALIES
Je dois dire ce n'est pas le gouvernement qui a décidé de cette affaire, que la CGT soit contre la loi Travail c'est son problème et elle a raison de le manifester, nous avons assuré le droit de manifester parce que c'est un droit constitutionnel, nous respectons le droit de grève, eh bien il faut aussi respecter le droit d'aller et venir et le tout ça fait la République.
BRUCE TOUSSAINT
Il y aura sans doute aussi des perturbations du côté de la RATP dans quelques, un préavis de grève illimité a été lancé par la CGT
ALAIN VIDALIES
Oui.
BRUCE TOUSSAINT
Pourquoi, vous n'y croyez pas ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez le 2 juin, on verra ce qui se passe le 2 juin, ce n'est pas
BRUCE TOUSSAINT
Oui, c'est bientôt, c'est la semaine prochaine.
ALAIN VIDALIES
Oui ! D'accord, mais ce n'est pas aujourd'hui, ce n'est pas demain, on verra, en plus pour des considérations qui sont des considérations de négociations salariales, donc il y a aussi ces moments de tension, donc pour l'instant je pense que le dialogue peut reprendre.
BRUCE TOUSSAINT
Ce bras-de-fer encore une fois avec la CGT il ne peut pas aussi votre responsabilité gouvernementale n'est-elle pas à un moment donné d'engager le dialogue avec la CGT, où est-il, il n'y a pas de dialogue aujourd'hui avec la CGT ?
ALAIN VIDALIES
Mais enfin pourquoi vous dites ça ? Qu'est-ce que j'ai fait vendredi avec les conducteurs ? Est-ce qu'on n'a pas avancé d'une manière
BRUCE TOUSSAINT
Philippe MARTINEZ a été par Manuel VALLS récemment ?
ALAIN VIDALIES
Est-ce que je n'ai pas envoyé - d'abord vous ne savez pas s'il y a des contacts ou pas
BRUCE TOUSSAINT
Je vous le demande !
ALAIN VIDALIES
Voilà je peux vous dire les choses ne sont pas Voilà ! Premièrement
BRUCE TOUSSAINT
Il y a des contacts ?
ALAIN VIDALIES
Deuxièmement Je ne peux pas vous dire qu'il n'y a pas de contact, donc vous en tirez ce que vous voudrez
BRUCE TOUSSAINT
Donc, ça veut dire qu'il y a des contacts.
ALAIN VIDALIES
Deuxièmement, qu'est-ce que j'ai fait vendredi ? Pourquoi vous dites ça ? Je veux dire est-ce quil y a eu une avancée plus importante que celle sur l'origine du mouvement avec les camionneurs et la lettre que je leur envoie pour dire : « vous n'êtes pas concernés par la loi » et après ça dire au gouvernement : « vous n'entamez pas le dialogue », mais on ne peut pas être face à quelqu'un qui dit : « quelles que soient les avancées, quelle que soit votre position, nous on a raison, on ne bougera pas », non ce n'est pas comme ça que ça marche. Ceux qui ont fait preuve d'une volonté de discuter ça été le gouvernement, il faudrait peut-être qu'il y ait des échos de
BRUCE TOUSSAINT
Que cherche la CGT, selon vous ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez posez-leur la question, moi je pense qu'il y a des préoccupations, on le sait bien il y a eu une histoire difficile récente, il y a des problèmes je ne vais pas devenir commentateur, moi je suis responsable politique mais
BRUCE TOUSSAINT
D'accord !
ALAIN VIDALIES
Evidemment qu'il y a des raisons qui ne sont pas forcément liées au mouvement.
BRUCE TOUSSAINT
Il nous reste trois minutes, je voudrais qu'on aborde deux autres sujets qui vous concernent directement ou indirectement d'ailleurs. Vous savez il y a une grande question de la sécurité autour de l'Euro 2016, pour l'instant les critiques sont concentrées sur l'accueil des spectateurs dans les stades, mais ça concerne aussi les transports parce que ces spectateurs vont venir pour beaucoup en transports en commun, alors est-ce que d'ailleurs les transports en commun sont concernés par ces mesures de sécurité à l'occasion de l'Euro 2016 ?
ALAIN VIDALIES
Naturellement. Depuis le début il y a un groupe que le gouvernement a mis en place, depuis plus d'un an maintenant, dans lequel nous sommes totalement impliqués, avec des mesures spéciales y compris des mesures qui ont entraîné des modifications législatives puisque vous savez qu'il y a eu une loi importante qui a été votée il y a quelques semaines - dont les décrets d'application sont quasiment tous pris maintenant et qui notamment renforcent les pouvoirs des services de sécurité, de palpation, de contrôle et notamment des agents des services spécialisés de la SNCF.
BRUCE TOUSSAINT
Donc, il y aura plus de contrôles à l'occasion de cet Euro ?
ALAIN VIDALIES
Il y a plus de contrôles, il y a plus de moyens juridiques de pouvoir contrôler, fouiller les bagages, contrôler les identités, et ça c'est le résultat d'une loi que nous avons fait voter récemment.
BRUCE TOUSSAINT
En ce qui concerne le crash de l'avion et du vol Paris Le Caire d'Egypt Air, on sait que les recherches se poursuivent en Méditerranée, est-ce que vous avez de nouvelles informations d'ailleurs concernant ce crash ?
ALAIN VIDALIES
Non, les seules informations qu'on a c'est que les recherches avec le sonar vont débuter, c'est-à-dire les appareils qui permettent de voir d'essayer de retrouver l'épave de l'avion, essentiellement les boites noires, toutes les indications dont on a aujourd'hui et qui pour l'instant l'essentiel sont déjà dans la presse, notamment la présence de fumée dans le cockpit, ne permettent pas, aucune de ces indications je le dis clairement ne permet aujourd'hui de favoriser l'une ou l'autre des réponses à la question légitime que chacun se pose, à savoir : est-ce que c'est un accident ou est-ce que c'est un attentat, puisqu'elles sont compatibles avec les deux versions ?
BRUCE TOUSSAINT
Christophe BARBIER, à la fin de son édito tout à l'heure, vous posait la question suivante, qui est un peu en marge de cette catastrophe aérienne : est-ce que, tant qu'il y a un doute effectivement, est-ce qu'il faut du coup demander à AEROPORTS DE PARIS de renforcer une nouvelle fois la surveillance des bagagistes, on sait que des mesures avaient été prises il y a quelques mois, est-ce que c'est quelque chose qui est dans les esprits ?
ALAIN VIDALIES
Les mesures ont été prises il y a quelques mois, vous l'avez dit une vérification systématique des 8.000 engins concernés, et naturellement dans le cadre de l'enquête qui est en cours aujourd'hui ces vérifications sont réitérées dans le cadre de l'enquête qui a été confiée par le Parquet de Paris, notamment à la gendarmerie des transports aériens.
BRUCE TOUSSAINT
Merci beaucoup Alain VIDALIES ! Je reviens un instant sur évidemment ce qui nous occupe ce matin et qui concerne ces problèmes d'approvisionnement en carburant, pour info la CGT confirme que les huit raffineries seront arrêtées j'utilise volontairement le terme, le temps du futur, qui seront arrêtées alors que vous nous disiez tout à l'heure que pour l'instant seules six sur huit étaient concernée.
ALAIN VIDALIES
Ils jouent sur le futur
BRUCE TOUSSAINT
Voilà !
ALAIN VIDALIES
Peut-être leur espoir aujourd'hui
BRUCE TOUSSAINT
Ca change quelque chose si les huit sont arrêtées ce soir ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez, je vous l'ai dit, si
BRUCE TOUSSAINT
Est-ce que vous allez réquisitionner les personnels des raffineries ?
ALAIN VIDALIES
A ce stade, non. Je vous répète on a trois mois de stock stratégique, c'est-à-dire que même si on n'a plus de produit on a de quoi fournir, j'ai un problème de stock et un problème de logistique, c'est à ça aujourd'hui que je m'attèle, le reste ne pose pas de problème pour les Français aujourd'hui. Voilà !
BRUCE TOUSSAINT
Merci beaucoup Alain VIDALIES, merci d'avoir été notre invité ce matin, bonne journée.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 25 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80321|
J'ai tenu à être présente parmi vous aujourd'hui comme j'en avais pris l'engagement auprès de la Fondation FALRET car je partage avec Marisol TOURAINE votre combat et votre détermination pour changer le regard porté par notre société sur la santé mentale, sur les maladies psychiatriques et les handicaps qui en découlent.
La santé mentale est un enjeu majeur de santé publique mais c'est plus encore un enjeu de société.
Agir pour une santé mentale positive, cela ne se résume pas à l'absence de maladie. C'est agir pour la cohésion de nos sociétés et contribuer ainsi à réduire les inégalités sociales, la perte de chance et l'isolement.
Nous sommes tous concernés de près ou de loin par la santé mentale. Et c'est donc un évènement important qui s'ouvre ici sur le Parvis de la Défense durant trois jours.
Vous avez souhaité créer le premier village « santé mentale », village éphémère certes mais pour une cause durable et permanente nécessitant que nous partagions le même cap.
Ce cap, Marisol Touraine a souhaité le rappeler et le confirmer dans le cadre de la loi de modernisation de notre système de santé. Cette loi de modernisation a pour objectif de s'attaquer aux inégalités de santé, en soulignant la place déterminante de la prévention et de l'éducation en santé et en installant un parcours de soins, une prise en charge dans la proximité et la continuité, y compris en santé mentale.
C'est son article 69 qui porte spécifiquement sur la santé mentale et l'objectif est clairement affirmé : nous avons à relever le défi collectif de réduire les inégalités d'accès aux soins, à la santé, aux droits et à la participation sociale qui frappent tout particulièrement nos concitoyens concernés par un trouble de santé mentale. Les mesures concernant la psychiatrie et la santé mentale réaffirment l'organisation de la psychiatrie par secteur, ce dispositif spécifiquement français, qui permet à la population d'un territoire géographique d'avoir accès à des soins coordonnés, de proximité, et dispensés par une même équipe. Mais la mission de psychiatrie de secteur est incitée à évoluer. Une adaptation est tout d'abord nécessaire pour que l'hospitalisation ne soit qu'une période la plus courte possible dans un parcours de soins et de vie. Cela implique de développer une offre de services diversifiée et basée sur l'ambulatoire et la proximité, à partir du lieu de vie des personnes. Nous savons par exemple que chaque fois qu'une équipe mobile est mise en place dans le cadre du secteur de psychiatrie, le nombre d'hospitalisations diminue ainsi que le taux d'occupation des lits. La mission de psychiatrie de secteur consiste aussi à garantir à la population desservie la continuité des soins psychiatriques et leur accessibilité territoriale et financière.
Enfin, les établissements de santé assurant la mission de psychiatrie de secteur participent, sans nécessairement les piloter, aux actions menées en matière de prévention, de soins et d'insertion dans le cadre du projet territorial de santé mentale.
Je le redis : la santé mentale est l'affaire de tous. Et c'est donc l'objectif du projet territorial de santé mentale d''ouvrir sur une plus grande participation des habitants, des élus, des usagers et de leurs familles, ainsi que de tous les acteurs intervenant dans la santé mentale. Je veux ici insister sur la place des élus locaux et je tiens donc à saluer l'investissement des collectivités présentes aujourd'hui pour cet évènement.
C'est tout le sens de la démocratie sanitaire en santé mentale porté également par la loi de modernisation. C'est pour faire vivre cette démocratie locale en santé mentale que Marisol Touraine a souhaité que les conseils locaux de santé mentale soient entérinés par la loi : pilotés par les élus, ils font partie intégrante du projet territorial de santé, et sont les instances de concertation et de coordination entre la psychiatrie et les habitants, pour l'inclusion sociale, le logement, les loisirs, le travail.
En agissant sur les déterminants de santé, ils participent aussi à la prévention et à la promotion de la santé mentale à l'échelle de leur territoire (souvent un quartier, une commune, ou une intercommunalité).
Agir en faveur de la santé mentale, c'est aussi changer le regard porté par la société, agir pour la déstigmatisation et reconnaitre les compétences, les rôles sociaux des personnes concernées. De nombreuses initiatives existent et votre évènement y contribue pleinement. Les associations représentatives des personnes et des familles mènent ce combat depuis de nombreuses années, soutenues par des professionnels engagés.
C'est pour ces raisons que le Ministère des Affaires sociales et de la Santé apporte son soutien à ces initiatives. Je veux à ce propos vous dire l'importance que revêt à mes yeux le développement des groupes d'entraide mutuelle. Ce sont des dispositifs concrets, de proximité, gérés par les personnes elles-mêmes. Je suis favorable à ce qu'ils puissent se développer de plus en plus.
Je veux aussi partager avec vous un principe qui me tient particulièrement à cur : ne rien faire sans les personnes elles-mêmes et sans les familles. Ce que les anglo-saxons appellent l'« empowerment » et que l'on pourrait tout simplement appeler l'autonomisation, ou la capacité pour les personnes de faire ses choix, décider et agir. Cela suppose que les soins et services, qui étaient l'affaire des professionnels et des institutions, se recentrent sur la capacité et le pouvoir des personnes malades à gérer leurs troubles avec l'aide des professionnels.
Redonner l'espoir aux personnes, c'est agir pour leur rétablissement et les techniques de soins et d'accompagnement évoluent en ce sens. Nous avons en France des expériences probantes en matière de réhabilitation psychosociale centrée sur le rétablissement des personnes. Nous avons aussi des équipes de recherche associant d'ailleurs les personnes et les familles. Ce sont des atouts essentiels pour l'avenir et la qualité de votre programme de tables rondes et de débats durant ces trois jours témoignent de cette richesse.
Je veux enfin faire mienne l'ambition de l'accès et du maintien dans l'emploi des personnes en situation de handicap psychique. C'est le thème de votre dernier jour de débats.
C'est une priorité de mon action en lien étroit avec Myriam EL KOMHRI, Ministre du Travail. C'est pour soutenir les initiatives existantes et les développer partout en France que j'ai souhaité que la définition et les conditions concrètes de mise en uvre de l'emploi accompagné soit portés dans le cadre du projet de loi en cours de débat à l'Assemblée nationale.
L'objectif est simple : faire en sorte que tous les partenaires, allant du service public de l'emploi aux équipes médico-sociales et sanitaires ainsi que les MDPH mettent en oeuvre ensemble les accompagnements individuels auprès des personnes et le soutien aux employeurs.
La citoyenneté passe dans notre société beaucoup par le travail et c'est donc essentiel d'agir pour lever les obstacles vécus au quotidien par les personnes en situation de handicap psychique.
L'emploi accompagné, de la même façon que le logement ou l'éducation, sont deux thèmes qui seront abordés lors du rendez-vous de la Conférence nationale du handicap qui aura lieu le 19 mai en présence du Président de la République.
Le handicap psychique fera partie des discussions. Cette CNH sera l'occasion de faire le bilan des avancées mais aussi d'établir des constats exigeants de ce qu'il nous reste à faire.
Ce sera l'occasion aussi de réaffirmer la nécessité de rendre notre société encore plus inclusive.
Ce sera aussi et prioritairement l'occasion pour le Président de la République de rappeler le cap qu'il a fixé lors de la dernière CNH en décembre 2014.
Le handicap psychique fait partie de ce cap ! Et c'est pour cela que j'ai souhaité être présente aujourd'hui avec vous.
Mesdames, messieurs, je vous souhaite d'excellents travaux, d'excellents débats.
Ensemble, gardons le cap pour une santé mentale positive et l'inclusion des personnes en situation de handicap psychique.
C'est un cap que nous pouvons atteindre et sur lequel nous ne devons rien céder car il est le visage de la solidarité et la fraternité que notre société garantit à toutes celles et ceux qui, du fait de leur vulnérabilité, se trouvent en difficulté dans leur vie.
Merci pour votre mobilisation collective.
Je vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 13 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80322|
Nous sommes toutes et tous réunis aujourd'hui à l'occasion de ce rendez-vous annuel de la Conférence nationale du handicap. Le Président de la République a souhaité ce nouveau rendez-vous afin que nous puissions collectivement faire le bilan des actions menées et porter de nouvelles initiatives. Nous y sommes ! Et je suis très fière d'ouvrir en votre présence à tous et avec Marisol TOURAINE, Ministre des affaires sociales et de la santé, cette nouvelle CNH.
Ensemble, nous travaillons au quotidien pour faire vivre les principes de la loi du 11 février et nos engagements internationaux. Cette CNH est placée sous le sceau d'une société encore plus inclusive. Vous savez que j'accorde une place essentielle au dialogue, à la concertation et la capacité à pouvoir agir ensemble. C'est de ma responsabilité en tant que Secrétaire d'Etat en charge du handicap et de la lutte contre l'exclusion. La politique du handicap est éminemment interministérielle et ouverte à l'ensemble des forces de la société. C'est la seule façon selon moi de garantir les droits et la citoyenneté des personnes handicapées.
Les droits et la citoyenneté des personnes en situation de handicap, c'est d'abord une exigence collective de tous les instants. Bien sûr pour les pouvoirs publics, les responsables politiques mais aussi les associations, les entreprises et à vrai dire l'ensemble de la société française. La loi de 2005 a profondément changé la vision portée sur le handicap et a inscrit un devoir collectif de garantir une réponse sur mesure, un droit à compensation individuel, respectueux du projet de la personne, de ses besoins certes mais aussi de ses attentes, de ses envies, de ses projets.
Ce changement profond opéré par la loi de 2005, nous en sommes tous dépositaires. Nous agissons pour que la solidarité nationale s'exprime au quotidien pour les personnes handicapées mais aussi faire de l'émancipation des personnes un principe fort des politiques publiques. La différence liée au handicap ne doit pas, ne doit plus mettre les personnes à part ! Cette différence est la nôtre, c'est nos différences à tous qui font notre humanité, nos différences sont notre force collective, ce qui fonde notre société et nos valeurs de solidarité et de fraternité. La liberté de choix c'est important pour chacune et chacun d'entre nous. Et il faut entendre la parole et les demandes des personnes en situation de handicap.
Nous sommes tous concernés par le handicap. Nous pouvons tous contribuer à améliorer la vie quotidienne, la participation sociale et la citoyenneté des personnes et de leurs proches.
C'est pour assumer cette ambition et cette exigence de solidarité que le Président de la République a souhaité que soient abordées des questions concrètes, de la vie quotidienne des personnes en situation de handicap : l'éducation tout le long de la vie, le logement et l'emploi.
Il a également souhaité donner la parole aux personnes directement concernées. Elles nous disent et nous diront par leur témoignage leurs attentes, nous constaterons leur expertise et leur pouvoir d'agir. La participation directe des personnes en situation de handicap doit être renforcée et c'est pour cela que j'ai souhaité avec Dominique Gillot, Présidente du CNCPH, rénover le fonctionnement et la composition de cette instance de concertation et de dialogue.
Avec Marisol TOURAINE, et en tant que Secrétaire d'Etat chargée des personnes handicapées, j'agis au quotidien avec vous tous. De nombreuses réformes et évolutions ont été mises en oeuvre dans le sens des priorités fixées par le Président de la République.
Toutes ces réformes, ces avancées contribuent à garantir le « zéro sans solution ». L'efficacité de notre système, c'est-à-dire de nos institutions, des établissements et services est jugée à sa capacité à ne laisser personne au bord du chemin. Nous avons une responsabilité collective à ce sujet. Oui, nous avons encore beaucoup à faire, oui, tous n'est pas résolu loin de là mais les avancées sont réelles et concrètes. Nous devons rester humbles sur le chemin qui nous reste à parcourir. Mais la détermination de ce gouvernement, ma détermination est sans faille.
Le « zéro sans solution », c'est garantir une réponse accompagnée pour tous. En fait, notre politique du handicap, toutes nos réponses n'ont qu'une seule finalité : c'est le combat pour l'émancipation des personnes handicapées. Ce combat nous le menons tous ensemble pour toutes les situations de handicap et notamment pour celles et ceux qui ont des difficultés majeures et un faible niveau d'autonomie. Qu'il s'agisse de troubles du spectre de l'autisme, de polyhandicap, les handicaps rares ou encore le handicap psychique, il s'agit de construire des solutions sur mesure, inclusives autant que possible mais systématiquement adaptées et respectueuses des besoins spécifiques et des attentes.
Lorsque nous mettons en oeuvre le Plan Autisme 2013-2017, nous agissons pour que la France rejoigne le concert des nations exemplaires dans ce domaine. Cela commence par l'école dès le plus jeune âge mais aussi par la mise en oeuvre d'interventions fondées sur les recommandations de bonne pratique de la HAS et de l'ANESM et les connaissances scientifiques internationales. C'est juste pour mieux prendre en compte les expériences réussies au niveau international dans le domaine de l'insertion professionnelle des adultes autistes que j'ai confié à Josef Schovanec, qui est présent parmi nous aujourd'hui, une mission au sein de mon cabinet. L'accompagnement et la participation sociale des adultes ayant un trouble du spectre de l'autisme constituent un point faible des 3 premiers plans. Il faut y remédier.
Ce regard tourné vers l'international, vers les innovations sociales, je souhaite aussi le promouvoir par la création d'une fondation pour l'investissement social dont la présidence est confiée à Isabelle KOCHER, nouvelle directrice générale du groupe Engie et seule femme patronne du Cac40 ! Cette fondation a pour objectif d'apporter la preuve de l'efficacité des projets et des innovations dans le domaine de l'inclusion sociale. Cela concerne bien évidemment le handicap tout comme la lutte contre l'exclusion. Il s'agit de produire de la connaissance utile, des données sur l'impact social, le retour sur investissement social d'initiatives portées par les associations, les entreprises. Cette fondation est faite pour construire de l'expertise sur des projets, des actions qui n'entrent pas dans les cases habituelles. Je veux aussi que cette fondation regarde ailleurs, partout dans le monde pour identifier ce que nous ne faisons pas encore et que l'on pourrait adapter à notre système, à nos valeurs, nos façons de faire. Dans le domaine du handicap, ces projets sont nombreux et ils leur manquent souvent cette preuve d'impact social.
C'est parce que les innovations dans le domaine du handicap sont importantes et nombreuses que nous allons lancer un concours Innovation et Handicap, doté d'une enveloppe prévisionnelle de 2 M, afin de soutenir ce dynamisme. L'innovation est facteur d'investissement social et c'est ce que nous visons dans le cadre de la politique du handicap.
L'investissement social est au fondement du secteur médico-social, au fondement des pratiques des professionnels qui accompagnent les personnes. Nous soutenons les évolutions de ce secteur mais nous poursuivons également la création de services d'accompagnement et de réponses en établissement médico-social pour les enfants et les adultes tout le long de la vie.
Nous agissons aussi pour simplifier la vie quotidienne des personnes handicapées afin que personne ne renonce à ses droits parce que les démarches administratives sont compliquées. Les démarches et la participation citoyenne sont aussi rendues compliquées pour certaines personnes handicapées car les informations, les documents sont rédigés en langage administratif, technique et sont donc difficilement compréhensibles. C'est aussi le cas des textes législatifs et nous devons montrer l'exemple. C'est pour cela que je souhaite engager les démarches pour rendre accessible dans un « français facile à lire et à comprendre » chaque nouvelle loi adoptée. Cela se fera bien évidemment avec les personnes et les associations qui ont l'expertise de cette mise en accessibilité. A vrai dire, cela aussi utile à chacune et chacun d'entre nous car nous utilisons un jargon bien peu accessible.
Nous mettons également en oeuvre de façon pragmatique et raisonnée l'accessibilité de tous à tout qu'il s'agisse des établissements recevant du public, le numérique, la santé, la culture
Nous progressons aussi vers l'émancipation par des réformes structurelles telles que la généralisation des contrats d'objectifs et de moyens pour les établissements et services médico-sociaux, la réforme de la tarification ou l'évolution des ESAT. Ne nous trompons pas sur la finalité de ces réformes, elles ne sont pas administratives. Elles sont l'un des vecteurs concrets pour que notre système médico-social prenne encore plus, encore mieux, le virage inclusif. Ce virage est en cours, en témoigne par exemple les coopérations locales qui se renforcent entre les enseignants et les professionnels du secteur médico-social. Ces coopérations, cette synergie essentielle entre l'école et le médico-social contribuent à l'égalité d'accès à la réussite des élèves et des étudiants en situation de handicap.
De nombreuses autres avancées ont été réalisées depuis 2014 et Marisol TOURAINE a pu rappeler celles qui portent sur l'accès à la santé des personnes en situation de handicap.
Toutes ces mesures contribuent donc à la réponse accompagnée pour tous. Cette réforme de grande ampleur se déploie progressivement et elle constitue la colonne vertébrale de la politique gouvernementale. Le Président de la République en a fait sa priorité en décembre 2014 et ce sera lors de cette CNH le fil rouge de nos discussions.
J'aurais l'occasion, lors des trois tables rondes thématiques de revenir avec mes collègues Ministres sur les avancées dans le domaine de l'éducation, de l'emploi et du logement. Les avancées certes mais tout ce qu'il nous reste à faire. Je veux témoigner et saluer l'engagement et la détermination des Ministres présentes aujourd'hui, de l'ensemble de l'action du gouvernement portée par le Premier Ministre. Cette détermination est au coeur de ce rendez-vous annuel.
Mesdames, Messieurs, nous allons partager ce matin un moment démocratique important. Quels que nos points de vue, nos accords et désaccords, je sais que nous partageons le même objectif, les mêmes valeurs.
Je rencontre au quotidien les personnes en situation de handicap et les associations qui les représentent. Le Président de la République m'a demandé de réunir un comité de concertation
représentant les différents membres du CNCPH dans la perspective de cette CNH. J'ai entendu les attentes exprimées et j'ai pu récemment en échanger avec le Président de la République. Il s'exprimera devant nous en clôture de cette CNH.
Mesdames, Messieurs, je tiens à saluer votre engagement collectif, chacun dans votre rôles, chacun dans vos responsabilités.
C'est ensemble que nous construisons, jour après jour, une société plus inclusive.
Je vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 24 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80323|M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, prorogeant l'application de la loi no 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'État d'urgence (nos 3732, 3753).
La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, en raison de la persistance de graves menaces terroristes susceptibles de frapper l'ensemble du territoire national, le Gouvernement soumet à votre examen une troisième loi de prorogation de l'état d'urgence, pour une durée supplémentaire limitée à deux mois.
Je tiens, tout d'abord, à remercier le président Raimbourg et le co-rapporteur Poisson pour le suivi très méticuleux de l'état d'urgence qu'ils ont conduit depuis plusieurs mois. En commission des lois, le président Raimbourg nous a présenté un compte rendu très exhaustif qui permet d'avoir une photographie précise des mesures que nous avons mises en uvre : cela a été précieux pour la tenue des débats en commission.
Le contrôle du Parlement a, vous le savez, permis de faire la transparence et de lever les craintes et les inquiétudes qui s'étaient exprimées, ici ou là, au sujet de la mise en uvre de l'état d'urgence.
Chacun a pu constater que l'état d'urgence n'est pas synonyme d'arbitraire et que les actes et les décisions pris sur son fondement étaient tous prévus et strictement encadrés par le droit, tout comme les raisons justifiant d'y avoir recours et de le prolonger.
Je veux que les choses soient ici clairement dites : les mesures de police administrative que nous prenons en application de l'état d'urgence présentent un caractère exceptionnel. Elles sont, conformément aux principes constitutionnels et de droit, strictement proportionnées à la nature de la menace ainsi qu'au contexte d'ordre public qui en découle.
Le Conseil constitutionnel l'a d'ailleurs très clairement rappelé dans sa décision du 19 février dernier : les mesures prises dans le cadre de l'état d'urgence doivent concilier la prévention des atteintes à l'ordre public avec le respect des droits et des libertés, parmi lesquels figurent le droit et la liberté d'expression des idées et des opinions.
L'État et les forces de l'ordre disposent, du reste, des moyens juridiques et matériels nécessaires pour réprimer, avec la fermeté la plus grande, les débordements survenus à l'occasion des récentes manifestations, ainsi que pour interpeller, systématiquement, les casseurs qui se rendent coupables d'agissements intolérables.
J'en veux pour preuve le très grand nombre d'interpellations réalisées depuis le début de ces événements il y a deux mois : plus de 1 400 individus ont en effet été interpellés pour des faits de violence commis lors des manifestations contre le projet de loi travail. J'ajoute que 885 d'entre eux ont été placés en garde à vue et que 61 ont d'ores et déjà été condamnés par la justice, en comparution immédiate.
Quant aux manifestations qui se sont déroulées hier à Paris, et qui avaient été interdites, elles se sont traduites par six interpellations ayant donné lieu à six gardes à vues, dont trois pour participation à une manifestation interdite et détention de substances ou de produits incendiaires ou explosifs, deux pour participation à une manifestation interdite et une pour outrage à personne dépositaire de l'autorité publique.
Je veux le redire ici, solennellement, devant la représentation nationale : ce qui s'est produit hier à Paris, c'est-à-dire l'agression de deux policiers et l'incendie de leur véhicule, constitue des actes criminels d'une extrême gravité pour lesquels le procureur de la République a enclenché l'action publique pour des motifs qualifiant les actes en question de tentative d'homicide à l'encontre de personnes détentrices de l'autorité publiques.
Ces actes appellent la plus grande sévérité : c'est la raison pour laquelle de premières interpellations ont eu lieu dès hier. Elles permettront, à travers l'enquête et les auditions en cours, de déterminer la responsabilité exacte des interpellés dans les violences intervenues hier.
Je ne m'attarderai pas sur l'enquête : il convient, en ces matières, de respecter rigoureusement la séparation des pouvoirs. Il appartiendra donc, bien entendu, au procureur de la République de Paris de communiquer sur les faits qui se sont produits ainsi que sur le résultat des gardes à vue.
Je veux néanmoins d'ores et déjà dire que la police judiciaire, notamment la direction de la police judiciaire de la préfecture de police de Paris procède, sous l'autorité du procureur de la République, à l'exploitation de l'ensemble des éléments qui ont été rassemblés hier par les services, de manière à ce qu'il puisse être procédé à d'autres interpellations afin que tous ceux qui se trouvent à l'origine de ces actes en répondent devant la justice, de manière à ce que le droit passe rapidement et avec la plus grande sévérité.
Je me suis rendu hier soir au chevet du policier qui, avec beaucoup de maîtrise et de sang-froid, a protégé sa collègue et s'est protégé lui-même face à des actes de haine que j'ai trouvés d'une extrême barbarie. J'ai aussi trouvé extrêmement choquant de voir des individus autour du véhicule récupérer des images au moyen de caméras, sans bouger, sans intervenir, comme si c'était l'ordre normal des choses. Alors que des policiers étaient agressés avec la violence que l'on a vue, il y avait autour d'eux des individus en nombre, qui filmaient et ne bougeaient pas.
J'aurais énormément de difficulté à considérer qu'il y a chez ces hordes sauvages quelque chose qui ressemble à de l'humanité ou, a fortiori, à un début d'idéal. Il n'y a derrière tout cela que de la violence, de la brutalité, et cela traduit un abandon de tous les principes d'humanisme qui sont le fondement de notre civilisation et des valeurs républicaines.
Je veux aussi dire très calmement à l'opposition et à ceux qui la représentent ici que des violences dans des manifestations, il y en a eu souvent. Lorsqu'il y a un tel niveau de tension, on peut préférer les charmes de la politique à l'exigence éthique de vérité, mais, dans la responsabilité qui est la mienne, il n'y a qu'une chose qui compte, c'est l'exercice de l'État, au nom des principes républicains, avec pour seule boussole le sens de l'État et l'application du droit dans sa plus grande rigueur. Laisser penser qu'il y aurait, au sein de l'administration ou, a fortiori, du Gouvernement une forme de mansuétude à l'égard de ceux qui commettent de tels actes est faux et très injuste à l'égard des préfets qui, placés sous mon autorité, travaillent quotidiennement à la sécurité des Français, à l'identification des casseurs et à la judiciarisation de leur situation.
Si nous avons interpellé 1 400 personnes et procédé à des gardes à vue en nombre comme je viens de l'indiquer, si 71 personnes ont d'ores et déjà été lourdement condamnées, notamment dans les villes où les exactions ont été les plus nombreuses, c'est parce qu'il y a un travail inlassable de la police judiciaire, un travail inlassable des préfets, un travail d'investigation continu des services placés sous la responsabilité du ministère de l'intérieur.
Je le dis amicalement à Éric Ciotti, à Guillaume Larrivé et à l'ensemble des parlementaires du groupe Les Républicains et à leurs leaders, y compris à un certain nombre de membres de leur organisation qui ont exercé des responsabilités au sein du ministère de l'intérieur, si l'on veut apprécier les consignes données par un ministre à son administration, il y a une manière très simple de le faire, c'est d'exercer le contrôle parlementaire, de récupérer les télégrammes adressés aux préfets, les ordres d'opération donnés par les préfets aux forces de l'ordre sur la base des consignes qui leur sont adressées. Alors, grâce à un effort de transparence et à la bonne foi, il sera possible d'établir très clairement ce qu'il en est.
Mme Élisabeth Guigou. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je comprends que la passion de la politique, les échéances qui se préparent, la volonté de positionnement des uns et des autres puissent conduire à d'autres discours et à d'autres comportements mais moi, devant les Français, je ne veux m'assigner qu'un seul et unique devoir, protéger les Français contre les violences et rendre compte scrupuleusement devant la représentation nationale de l'action qui est conduite et de la fermeté qui est celle du Gouvernement sur ces questions.
En même temps, ce qui fait la force, la fermeté, l'autorité de l'État lorsqu'il y a une situation difficile comme celle à laquelle nous sommes confrontés, c'est le respect rigoureux et scrupuleux de tous les principes de droit lorsque l'État agit car c'est dans la force du droit que l'État puise aussi son autorité. Je ne peux donc pas prendre de disposition qui ne soit pas en toute occasion conforme aux principes de droit, et je vais prendre un exemple extrêmement concret.
Comme hier soir, j'avais donné avant-hier des instructions pour qu'une interdiction de paraître dans des manifestations soit notifiée à des individus violents
M. Christophe Caresche. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. et pour que leur judiciarisation soit facilitée au cas où ils s'y présenteraient, afin de protger aussi les manifestants sincères de la violence des casseurs. L'un de ceux qui ont été interpellés hier soir avait fait l'objet d'une décision cassée par le juge.
Je ne commente pas la chose jugée, je la respecte. Je ne cherche pas à faire pression sur les juges, ce qui, dans la responsabilité qui est la mienne, serait totalement inconvenant et contraire au principe de la séparation des pouvoirs. Je cherche simplement à faire uvre de pédagogie et à montrer la difficulté du problème à tous ceux qui, dans le vacarme, s'emploient à laisser penser, parfois avec la plus grande démagogie, que ce qui doit être fait ne l'est pas, ou que c'est une façon d'essayer d'être plus efficace.
Non, notre détermination est totale, notre volonté d'acier, et le respect du droit doit être la modalité d'intervention.
M. Pascal Popelin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Sinon, il n'y a plus de République, d'État de droit, de principes. Un ministre de l'intérieur qui veut faire en sorte que le droit passe ne peut pas s'éloigner des principes de droit en faisant preuve de démagogie. Face à un tel niveau de tension, il ne peut pas puiser son inspiration dans la pensée et les comportements de Donald Trump, même si ce dernier semble inspirer d'autres acteurs dans la classe politique française.
Mme Élisabeth Guigou. Très bien !
M. Pascal Popelin, rapporteur. Il fallait le dire !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je voudrais maintenant dire quelques mots du bilan de l'état d'urgence.
L'état d'urgence, je le rappelle, s'est traduit par 594 suites judiciaires après des perquisitions administratives, 223 pour infraction à la législation sur les armes, 206 pour infraction à la législation sur les stupéfiants. En outre, 28 informations judiciaires ont été ouvertes, 67 peines ont été prononcées à l'issue de ces procédures, et 56 personnes ont été placées en détention, soit des résultats particulièrement significatifs.
L'efficacité des mesures que nous avons prises va bien au-delà du bilan chiffré et des suites judiciaires. En effet, elles participent d'une stratégie cohérente et accélérée de détection et de déstabilisation des filières terroristes qui opèrent dans notre pays ou bien qui recrutent et acheminent des combattants vers les zones de conflit au Moyen-Orient. Nous avons ainsi pu empêcher ou retarder des projets de départ vers les théâtres d'opérations djihadistes, limiter les contacts entre les individus signalés comme appartenant à des groupes terroristes ou encore entraver des actions de soutien à ces mêmes groupes. Depuis 2013, pas moins de douze attentats ont été déjoués, dont sept depuis janvier 2015.
Je veux par conséquent saluer le travail réalisé par les services de renseignement, notamment la Direction générale de la sécurité intérieure, qui est saisie en propre ou avec la police judiciaire du suivi de 261 dossiers judiciaires concernant 1 157 individus pour leur implication dans des activités liées au terrorisme djihadiste. Parmi eux, 353 ont d'ores et déjà été interpellés, 13 font l'objet d'un mandat d'arrêt international, 223 ont été mis en examen, 171 ont été écroués et 52 font l'objet d'un contrôle judiciaire.
Ces chiffres montrent bien à quel point l'action quotidienne des services, sous l'autorité de la justice, porte ses fruits, permettant ainsi d'empêcher que des actions violentes et des attentats ne soient commis sur notre sol.
J'en viens à présent à la prorogation de l'état d'urgence et aux raisons pour lesquelles nous le croyons à nouveau absolument nécessaire.
Au cours des derniers mois, plusieurs attentats, qu'ils soient d'ampleur comparable ou bien inférieure à ceux du 13 novembre, ont été commis à l'étranger, visant les intérêts nationaux ou ceux de nos ressortissants. Les groupes djihadistes ont également visé des alliés directs de la France.
Le 22 mars, la Belgique a été frappée par un attentat d'une extrême gravité perpétré à Bruxelles, à l'aéroport de Zaventem et à la station de métro de Maelbeek. Grâce aux investigations menées, nous savons que les terroristes impliqués dans cet attentat appartenaient à la cellule qui a planifié et exécuté les attentats du 13 novembre à Paris et à Saint-Denis. En outre, le parquet fédéral belge a confirmé que les attentats du 22 mars avaient initialement été envisagés et programmés pour la France, avant que les terroristes, pris de cours par les investigations judiciaires menées en Belgique, ne soient contraints de précipiter leur action dans la capitale belge.
Daech a donc toujours le projet et les capacités de conduire des opérations terroristes d'envergure sur le sol européen, et a d'ailleurs, au mois de décembre dernier, explicitement appelé à cibler un certain nombre de sites.
La menace terroriste demeure donc à un niveau élevé. La France, comme l'Union européenne, représente une cible, en raison du combat résolu qu'elle mène contre les djihadistes au Sahel, en Irak et en Syrie, mais aussi, plus profondément, en raison des principes universels de liberté, de laïcité et d'émancipation qui sont les nôtres depuis plus de deux siècles et qui font horreur aux terroristes djihadistes.
Pour toutes ces raisons, et quelles que soient les précautions que nous prenons, il ne nous est pas permis de nous croire à l'abri, ni de considérer que le péril imminent qui a justifié en novembre dernier la proclamation de l'état d'urgence a disparu.
J'ajoute que, dans les mois qui viennent, les enjeux de sécurité seront particulièrement importants pour des raisons qui tiennent à l'organisation de cette grande manifestation qu'est l'Euro 2016 et d'autres manifestations estivales, qui devront mobiliser toute notre vigilance et faire l'objet de notre part de toutes les précautions.
C'est la raison pour laquelle nous avons souhaité que soit maintenu et poursuivi le contrôle aux frontières. C'est la raison pour laquelle nous maintenons le déploiement sur le territoire national de 110 000 policiers, gendarmes et militaires de nos armées dans le cadre de l'opération Sentinelle. C'est la raison pour laquelle a été adoptée la proposition de loi présentée par votre collègue Gilles Savary, qui va permettre à notre pays de se doter de moyens supplémentaires dans la lutte contre l'insécurité dans les transports. C'est la raison pour laquelle nous avons fait adopter le projet de loi de Jean-Jacques Urvoas renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme, son financement, texte qui améliore l'efficacité et les garanties de la procédure pénale.
Je veux enfin vous apporter certaines précisions concernant les mesures que nous comptons mobiliser dans le cadre de cette troisième prorogation de l'état d'urgence.
Comme l'autorise la loi du 3 avril 1955, le Gouvernement envisage de ne pas activer, dans ce cadre, l'article 11, qui permet de mettre en uvre des perquisitions administratives dans des lieux que l'on pense fréquentés par des individus constituant une menace pour l'ordre et la sécurité publics.
Cette mesure, que nous avons largement utilisée en essayant de jouer sur la stratégie de la sidération après les attentats du 13 novembre, ne présente plus le même intérêt opérationnel, la plupart des lieux identifiés ayant déjà fait l'objet d'investigations poussées. En outre, l'invalidation par le Conseil constitutionnel de la disposition permettant de réaliser la copie des données informatiques recueillies au cours des perquisitions administratives fait perdre une partie de son utilité à cette mesure.
En revanche, les autres mesures continueront d'être mobilisées pour maintenir les individus assignés à résidence, interdire à ceux qui font l'objet d'une interdiction de sortie du territoire mais qui n'ont pas été assignés à résidence de se trouver à proximité de certains lieux jugés particulièrement sensibles, ou encore établir des périmètres de protection. Ces mesures de maintien de l'ordre public en situation de crise grave seront bien sûr activées si elles se révèlent nécessaires.
Cette nouvelle prorogation de l'état d'urgence, dont nous sollicitons l'approbation par le Parlement, a de nouveau pour objet de concilier la protection de l'ordre et de la sécurité publics, dans le contexte d'une grave menace terroriste, avec ce à quoi nous tenons tous le plus ici, la protection des droits et des libertés garantis par notre Constitution.
Si nous sommes si déterminés sur la sécurité, c'est parce que nous savons qu'elle est la condition de la protection de nos valeurs et de nos principes républicains et démocratiques. C'est pour permettre au Gouvernement d'atteindre ces objectifs que nous proposons la prolongation de l'état d'urgence.
Je veux conclure mon propos en rendant une nouvelle fois un hommage vibrant aux forces de sécurité, qui, avec une énergie considérable et une grande dignité, je l'ai encore vu hier soir à l'hôpital Bégin où j'ai rendu visite au policier qui avait été agressé remplissent des missions dans un contexte extrêmement difficile et tendu. J'invite tous les théoriciens des violences policières à regarder les images d'hier,
Mme Élisabeth Guigou. Des images honteuses !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. à voir où était la violence et à voir aussi la manière très digne dont ce policier s'est protégé
M. Yves Goasdoué. Tout à fait !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. sans à aucun moment sortir son arme ou même y toucher.
Lorsque je l'ai vu hier soir, il m'a dit l'avoir fait pour des raisons qui tenaient à la formation qui lui avait été donnée, aux principes républicains auxquels il est attaché et à la volonté d'exemplarité qui est la sienne, comme policier, face à des violences qui sont autant de provocations destinées à engendrer d'autres violences, dont la manipulation permet ensuite de théoriser les violences policières.
Dans le contexte particulier dans lequel nous nous trouvons, il n'y a qu'une attitude à avoir et quel que soit le contexte, elle sera la mienne : la sagesse plutôt que l'outrance ; le respect du droit plutôt que la démagogie ; la protection des forces de l'ordre, exemplaires et magnifiques dans leurs missions, parce qu'on leur doit cette gratitude plutôt que la stigmatisation ; la fermeté et la détermination les plus grandes à l'égard de ces casseurs qui ne sont que des hordes violentes et barbares et qui doivent être punis par la loi avec la plus grande rigueur. Je veux, à ce propos, adresser également mes remerciements aux préfets, aux forces de l'ordre et aux procureurs de la République qui, par leur action, permettent l'application du droit.
Enfin, je veux aussi souhaiter que, dans ce contexte particulier je n'ai aucune naïveté et je connais les échéances , nous puissions toujours privilégier par notre discours l'attachement, qui doit être à chaque instant le nôtre, aux valeurs et aux principes de la République, plutôt que de nous laisser aller à l'abaissement de la politique dans des polémiques qui n'ont pas lieu d'être. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
( )
La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Comme à l'accoutumée, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt et d'attention les interventions ; des questions, en séance et en commission, ont été posées et appellent de la part du Gouvernement des réponses très circonstanciées.
Monsieur Larrivé, vous critiquez le fait que 99 % des personnes figurant dans le fichier des signalés pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste FSPRT ne fassent pas l'objet d'une assignation à résidence. Vous êtes juriste et savez parfaitement qu'un gouvernement ne peut prendre des arrêtés d'assignation à résidence sans tenir compte de la jurisprudence du juge administratif.
Toutes les personnes fichées au FSPRT ne relèvent pas de l'assignation à résidence ; certaines émettent des signaux faibles. Or l'assignation à résidence doit reposer sur le principe de proportionnalité. Nous avons tenu compte de ce principe pour assigner à résidence toutes les personnes qui devaient l'être en début de période. Lorsque ces décisions ont été attaquées, le juge administratif, notamment le Conseil d'État, a considéré que les éléments concourant à l'assignation devaient être beaucoup plus accusatoires, alors que les mesures initiales avaient un caractère préventif.
Une assignation à résidence, dans le cadre d'une mesure de police administrative, n'est pas le résultat d'une condamnation. Il s'agit d'une mesure de prévention d'un risque, prise en raison d'informations dont on dispose. Récemment, le Conseil d'État a demandé que lui soient communiqués des éléments inclus dans des dossiers à caractère judiciaire ce que le procureur de la République a accepté de faire dans un cas et refusé dans un autre.
S'il existe moins d'assignations à résidence que de personnes fichées au FSPRT, c'est que toutes ne relèvent pas de l'assignation à résidence et que nous devons tenir compte de la jurisprudence administrative. Je le redis à l'opposition, avec solennité ; je ne peux adhérer à ce raisonnement qui tend à faire croire que le Gouvernement est faible lorsqu'il respecte le droit voté par le législateur et interprété par le juge. La force de l'État, face à ceux qui se dressent contre son autorité, est de toujours être dans la conformité au droit !
Mme Marie-George Buffet. Exactement.
M. Bernard Cazeneuve, ministre. J'appelle chacun à la responsabilité. Monsieur Ciotti, vous avez énoncé à la tribune un certain nombre de choses fausses. Vous m'avez demandé pourquoi la manifestation d'hier n'avait pas été interdite. Mais elle l'était, monsieur le député ! La manifestation d'hier, à laquelle un certain nombre d'organisations ont appelé, était interdite.
M. Éric Ciotti, rapporteur. Je n'ai pas dit cela !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Vous m'avez demandé les raisons pour lesquelles nous ne profitons pas de l'état d'urgence pour procéder à l'interdiction des manifestations. Je vous réponds très clairement : nous avons interdit toutes les manifestations qui, en droit, pouvaient l'être. Lorsqu'une manifestation de casseurs est organisée à Rennes, nous l'interdisons.
M. Éric Ciotti. C'est la première fois !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Nous avons interdit une manifestation à Nantes.
M. Pierre Lellouche. Mais vous n'avez pas interdit Nuit debout !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Monsieur Lellouche, les raisons pour lesquelles nous ne l'avons pas fait tiennent à la décision du Conseil constitutionnel du 19 février, rendue au terme d'une question prioritaire de constitutionnalité, qui définit très clairement le cadre juridique dans lequel il peut être procédé à des interdictions.
M. Éric Ciotti. Vous n'avez pas même essayé !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. La différence entre l'opposition et le Gouvernement, c'est que le Gouvernement entend faire tout ce qui doit être fait dans la plus grande fermeté, mais dans le respect rigoureux des principes de droit, et notamment des principes constitutionnels.
M. Pierre Lellouche. Commencez par agir, vous vous interrogerez sur la conformité ensuite !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Nous estimons, avec raison, que si nous procédons à des interdictions en contravention avec les principes de droit définis par le législateur et rappelés par le Conseil constitutionnel, nous nous exposons à l'annulation des décisions. Dans le contexte actuel, annuler ces interdictions serait de nature à affaiblir l'autorité de l'État et à créer des tensions supplémentaires. Alors que la tension prévaut, nous considérons que nous devons veiller à ce que chaque décision soit rigoureusement conforme au droit. C'est là que réside la différence entre vous et nous !
On ne peut confondre le droit et le tordu : le droit doit s'appliquer pleinement. Préempter ces sujets en les instrumentalisant à des fins politiques, au risque de créer des tensions, est totalement irresponsable. Je le répète : laisser accroire qu'un gouvernement qui se conforme rigoureusement aux principes de droit, sans autres marges de manuvre juridiques que celles dont il dispose, fait montre de faiblesse est de nature à créer dans le pays un climat délétère. Je vous appelle donc de nouveau à la responsabilité !
M. Pierre Lellouche. Vous êtes le Gouvernement, agissez !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. De la même manière, je considère qu'il est irresponsable d'affirmer, sur internet, dans la presse, ou dans des prises de position politique, que la violence est consubstantielle à la police. Lorsque l'on écrit à longueur d'éditoriaux que les policiers sont des individus par nature violents, il ne faut pas s'étonner ensuite des réactions auxquelles nous avons assisté hier ! Ce sont de véritables appels à la violence qui sont lancés, dans l'irresponsabilité la plus totale.
M. Gérard Bapt et M. Jean-Luc Laurent. Très juste !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je vous rappelle aussi, messieurs de l'opposition, que toute personne dans cet hémicycle peut être appelée à exercer des responsabilités gouvernementales. Des violences, à l'occasion d'autres manifestations, se sont déjà produites ! Je pense aux manifestations contre le CPE, qui ont donné naissance aux groupes radicaux qui agissent aujourd'hui. Je pense aussi aux émeutes urbaines qui ont duré trois semaines, en plein état d'urgence, et alors que des couvre-feux avaient été instaurés. Aucun d'entre vous, alors, n'était dans la théorisation de la chienlit !
M. Éric Ciotti. Et vous, que disiez-vous ? Je vais vous citer !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Dans l'opposition, je me suis bien gardé, sur tous les sujets que j'ai eus à traiter, de tomber dans la démagogie et les discours à l'emporte-pièce.
M. Éric Ciotti. Ce n'était pas le cas de François Hollande !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Un jour ou l'autre, on se retrouve en situation de siéger au banc du Gouvernement, et les choses deviennent beaucoup moins simples.
Vous avez été dans la majorité et un certain nombre d'entre vous au Gouvernement. Vous savez la complexité des choses, la difficulté de faire face à ces groupes, pour des raisons qui tiennent à leur organisation et à ce qui est l'état du droit. Pourtant, des responsables de l'opposition, dont certains ont exercé des responsabilités éminentes dans l'administration du ministère de l'intérieur, tiennent des propos irresponsables. Ils laissent à penser que les instructions n'ont pas été données de manière à ce qu'il y ait la plus grande fermeté à l'égard des casseurs.
M. Éric Ciotti. Non !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Pour être clair, c'est ce que dit M. Péchenard ! C'est de la petite politique, monsieur Ciotti, mais je vais vous dire ce que j'ai fait : je viens de transmettre aux présidents des commissions des lois de l'Assemblée nationale et du Sénat la totalité des instructions signées par mes soins et qui font l'objet d'ordres d'opération donnés par les préfets aux forces de police. Vous exercerez ainsi votre contrôle parlementaire, et j'espère que le Parlement rétablira la vérité.
M. Pascal Popelin, rapporteur. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Les personnes qui s'expriment de la sorte devraient feraient preuve d'un esprit de responsabilité d'autant plus prononcé qu'elles ont exercé des fonctions importantes au sein du ministère de l'intérieur. Lorsqu'elles s'expriment ainsi, elles mettent en cause leurs anciens collègues, ce qui traduit d'ailleurs une culture de la confraternité assez curieuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.) Je tenais à le dire. Il faut un minimum de déontologie lorsque l'on exerce des responsabilités politiques. Ce genre de choses ne se font pas, ne sont pas convenables. Afin de mettre fin à cette campagne de manipulation, je transmets ce matin la totalité des instructions qui ont été adressées, par mes soins, par télégramme, à l'ensemble des préfets de France.
Mme Marie-Françoise Bechtel. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Vous pourrez consulter les ordres d'opérations. Je pense que l'on pourra ainsi mettre fin à une polémique aussi irresponsable que totalement indigne (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste), je le dis à regret. On ne peut pas dire en permanence que les policiers sont formidables, qu'ils font preuve d'un grand professionnalisme, qu'ils font tout ce qu'ils doivent faire, mais que cela est le fruit du hasard.
Mme Pascale Crozon et Mme Cécile Untermaier. Très juste !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. En d'autres termes, ils ne feraient pas tout cela parce qu'ils reçoivent des instructions, sont encadrés et appliquent une politique publique, mais par hasard. Eh bien, non : ils ne le font pas par hasard ! Ils le font parce qu'il y a des directeurs généraux dans cette maison, des préfets, que, pour ma part, je respecte. Je respecte les préfets, je respecte le directeur général de la police nationale, je respecte le directeur général de la gendarmerie nationale, je respecte les directeurs des services de renseignements. Ils travaillent quotidiennement avec moi, ils appliquent les instructions, ils sont dans la loyauté, et le discours que vous tenez, je le redis, ne correspond pas à la réalité on va l'établir et n'est pas responsable. J'appelle encore une fois chacun à la responsabilité.
Mme Cécile Untermaier. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Ensuite, vous dites qu'aucune mesure n'est prise pour éviter ces heurts : c'est faux ! Nous avons pris des arrêtés d'interdiction de paraître dans des manifestations qui concernaient des membres de groupes violents.
M. Éric Ciotti. Oui, avant-hier !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Nous l'avons fait à l'occasion des manifestations qui se sont révélées les plus violentes, ce qui montre que nous avons eu raison. Nous avons ainsi pris, pour le 17 mai, cinquante-quatre interdictions de manifester, dont quarante et une pour Paris et treize pour les autres départements. Aujourd'hui, nous en avons pris quarante.
M. Jacques Myard. Il faut dissoudre tous ces malfrats !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je vous fais remarquer, messieurs les députés, que les interdictions de paraître que nous avons prises ont fait l'objet de recours et qu'un certain nombre d'entre elles ont été annulées. C'est bien la preuve qu'il faut veiller constamment à la conformité au droit des dispositions que l'on arrête et que l'on ne peut pas prendre de risque. Monsieur Larrivé, vous me reprochez de n'avoir pas fait appel. Mais il s'agissait de référés-liberté ! On n'était donc pas au fond, et le résultat de l'appel serait intervenu à une date où l'interdiction aurait perdu tout intérêt.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Bien sûr !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Voilà pourquoi nous n'avons pas fait appel non que nous ne souhaitions pas conduire la démarche à son terme, mais, dans le cadre de ce dispositif, nous n'avions pas la possibilité temporelle de le faire. À chaque fois que nous prenons des décisions de police administrative pour protéger le pays contre des casseurs et qu'il nous est possible d'interjeter appel, nous le faisons systématiquement. Je vous ferai d'ailleurs remarquer, monsieur Larrivé, que j'ai repris, concernant les mêmes individus que ceux qui ont fait l'objet d'arrêtés cassés par la justice, des interdictions de paraître les mêmes, ce qui atteste notre persévérance. Chacun doit prendre ses responsabilités ; je prends les miennes. Au moment où nous parlons, où vous êtes dans la polémique vis-à-vis du Gouvernement, le préfet de police de Paris, le procureur de la République de Paris, le directeur de la police judiciaire de Paris sont en train de conduire des investigations nuit et jour pour identifier les individus, les judiciariser et les mettre hors d'état de nuire. Eh bien, pour ma part, je leur rends hommage pour le travail qu'ils font sous la direction du procureur de la République et la mienne. Telle est la vérité, et la vérité doit être dite aux Français !
M. Pierre Lellouche. Elle n'est pas brillante !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Si nous laissons à penser aux Français que, face à des actes d'une telle violence, la fermeté la plus réelle ne s'applique pas, nous risquons de créer, dans le pays, un climat de violence renforcée, de susciter des réactions d'autodéfense, de provoquer des antagonismes encore plus violents, ce qui est le contraire de la République. C'est la raison pour laquelle, je veux dire, en toute sincérité, devant la représentation nationale, à quel point je suis indigné de ces campagnes qui ne correspondent pas à la réalité de ce que nous faisons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)
Madame Maréchal-Le Pen, vous m'interrogez, vous aussi, et je respecte tout à fait vos interrogations, auxquelles j'ai d'ailleurs répondu pour partie. Mais je voudrais à mon tour vous faire quelques remarques. En effet, vous appelez de vos vux la plus grande fermeté mais, lorsque nous avons présenté les projets de loi antiterroristes, dans lesquels nous proposions de bloquer les sites qui appellent et provoquent au terrorisme, de combattre les terroristes en les identifiant sur internet, vous avez voté contre, au nom de la liberté d'expression, reprenant ici les propos de ceux qui sont les plus irresponsables face à la lutte contre le terrorisme.
Mme Marion Maréchal-Le Pen. Vous me parlez sans daigner me regarder !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Lorsque je suis allé devant la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures LIBE du Parlement européen et que j'ai demandé le soutien des parlementaires pour le vote de la directive sur les données concernant les passagers aériens, dite PNR, de manière à établir la traçabilité de ceux qui rentrent des théâtres de combat terroriste, la présidente de votre parti s'est fait désigner rapporteure pour avis de ce texte, pour s'y opposer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.) Lors du vote sur la loi renseignement, qui permet, afin de prévenir les actes terroristes, de doter les services de renseignement des moyens nécessaires pour comprendre les messages cryptés que s'échangent les terroristes en vue de nous frapper, qui s'est opposé, dans cet hémicycle, à ce texte ? Vous, madame Maréchal-Le Pen, ainsi que le député Collard. Et vous venez aujourd'hui nous donner des leçons de fermeté et de sécurité ! (Mêmes mouvements.)
M. Christophe Caresche. Démasquée !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Madame Maréchal-Le Pen, la présidente de votre parti a demandé hier ma démission.
Mme Marion Maréchal-Le Pen. Vous persistez à ne pas vouloir me regarder ; je suis là, monsieur le ministre !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je lui dis aujourd'hui, compte tenu de ses actes, de ses propos, ainsi que des propos manipulateurs de toutes les organisations d'extrême-droite (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste) que vous reprenez à votre compte, par exemple en laissant entendre, sur France Inter, en frelatant la réalité, que j'aurais indiqué, lors d'une émission de radio à laquelle je n'ai jamais participé, que prôner le djihad n'était pas un délit : non seulement je ne démissionnerai pas,
Mme Marion Maréchal-Le Pen. Dommage !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. mais je combattrai ce que vous faites et ce que vous dites, qui reposent sur la manipulation, le mensonge, l'extrémisme, le contraire de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe écologiste, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Je vous le dis, dans cet hémicycle, avec la plus grande fermeté et la plus grande netteté : quand on prend des positions comme les vôtres, qui visent à créer des problèmes partout, en votant contre toutes les solutions, on ne donne aucune leçon de sécurité à ceux qui sont en charge de la sécurité des Français ! (Mêmes mouvements. - Les députés du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste se lèvent et applaudissent.)
source http://www.assemblee-nationale.fr, le 25 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80324|JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, bonjour.
Manuel VALLS
Bonjour Jean-Jacques BOURDIN.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Vous êtes là sur RMC et BFM TV jusqu'à 09h, e ensuite, vous allez répondre aux questions des auditeurs de RMC
MANUEL VALLS
Avec plaisir
JEAN-JACQUES BOURDIN
Entre 09h et 09h30. La contestation s'étend, se durcit, les Français ne vous demandent qu'une chose, ce matin, une seule question : que faites-vous ?
MANUEL VALLS
D'abord, je pense à eux, parce que c'est eux qui pâtissent aujourd'hui de cette situation, ce sont des salariés, des ouvriers, souvent ceux qui sont au chômage, qui doivent faire de longues files d'attente devant les stations-services, qui subissent donc cette situation, cette situation aussi peut peser à terme sur l'économie française, alors que nous venons de connaître, pour le deuxième mois consécutif, une baisse du chômage, 20.000 chômeurs de moins cette année, c'est le deuxième mois consécutif, 70.000 chômeurs de moins
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, j'y reviendrai tout à l'heure.
MANUEL VALLS
Pour cette année 2016. C'est la première fois qu'on a une baisse sur les 12 derniers mois. Et donc l'économie doit être confortée, notre compétitivité doit être assurée. On voit bien que ce type de situation peut nuire, bien sûr, à notre économie. Donc je pense d'abord aux Français
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, à eux
MANUEL VALLS
Et notamment aux plus modestes, et ensuite, une nouvelle fois, devant vous, je veux dire ma détermination, mais par conviction, moi, je ne suis pas dans un combat contre la CGT ou dans un face à face ou un mano à mano avec Philippe MARTINEZ, comment peut-on penser un moment, avec mes convictions, moi, le maire d'Evry pendant 11 ans, que je veuille casser le modèle social français, que je veux remettre en cause le droit des syndicats, que je veux faire perdre des droits aux salariés, cette loi dont beaucoup d'aspects n'ont pas été compris, je le reconnais, par mes compatriotes, est bonne pour les entreprises, pour les PME, notamment, parce qu'elle va leur donner plus de visibilité, et cette loi est bonne pour les salariés, parce qu'elle leur donne plus de droits, elle est bonne également pour les syndicats, parce qu'elle leur donne plus d'heures de formation, elle est bonne pour les jeunes, parce qu'elle leur permet la Garantie Jeunes, c'est-à-dire 460 euros pour rentrer dans la vie active et pour se former. Donc cette loi, elle est bonne pour les salariés comme pour les entrepreneurs. Donc Jean-Jacques BOURDIN, j'ai des convictions, ces convictions, je les défends, ce texte me paraît utile pour le pays, et donc je suis évidemment serein en même temps déterminé
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, tout le monde se pose la question : qui gouverne ? Qui gouverne ? C'est vous ou c'est la CGT ? Eh oui, oui, parce que les Français se posent la question, vous le savez bien !
MANUEL VALLS
Mais je l'ai dit hier dans une formule, ça n'est pas la
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui, vous l'avez dit dans une formule : la CGT ne fait pas la loi dans le pays, cette radicalité est inacceptable, c'est ce que vous disiez hier à l'Assemblée nationale.
MANUEL VALLS
Jean-Jacques BOURDIN, oui, je suis très respectueux du rôle des syndicats, et notamment cette loi, elle va permettre, et c'est peut-être le coeur de sa philosophie, de faire en sorte que le dialogue social se fasse au niveau de l'entreprise, au plus près des terrains, du terrain, c'est-à-dire avec les entrepreneurs et les salariés. Donc je suis respectueux des syndicats, je suis respectueux de la CGT, dont je connais l'histoire, sa participation pleine et entière à l'histoire de notre pays, à la résistance, sa volonté de donner des droits aux salariés. Mais ça n'est pas la CGT qui peut bloquer le pays. Ça n'est pas la CGT qui peut imposer un texte de loi. La CGT, contrairement aux syndicats réformistes, contrairement à la CFDT, contrairement à l'UNSA, à la CFTC, à la CFE-CGC, n'a pas souhaité poursuivre les discussions, a refusé l'accord que nous avions trouvé avec ces syndicats que je viens de citer, les syndicats réformistes, puisqu'il y a eu une longue discussion, que j'ai menée avec Myriam El KHOMRI
JEAN-JACQUES BOURDIN
Un accord rejeté par certains syndicats, un accord sans majorité à l'Assemblée nationale, vous le savez bien, Manuel VALLS, et un accord rejeté par les Français à 70 %, ça fait beaucoup, pardonnez-moi, ça fait beaucoup ! Alors, je vais vous poser deux questions directes, il n'y aura donc pas de retrait de la loi Travail, on est bien d'accord ?
MANUEL VALLS
Donc, vous me posiez la question « qui gouverne »
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, qui gouverne ?
MANUEL VALLS
Le président de la République, le chef du gouvernement, le gouvernement, et avec l'engagement de responsabilité, le fameux 49.3, nous nous sommes donné
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous gouvernez contre les députés, vous gouvernez contre les Français, et vous gouvernez contre une partie des syndicats !
MANUEL VALLS
Mais Jean-Jacques BOURDIN, quelle est l'alternative ? Ou plutôt, quelles sont les alternatives ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors justement !
MANUEL VALLS
Alors, c'est le retrait du texte ? Ça n'est pas possible, le retrait du texte, c'est l'impossibilité, pas seulement pour ce gouvernement, mais pour tout gouvernement, de réformer, c'est quoi l'alternative ? Des élections législatives anticipées ? Mais alors, c'est le projet de la droite !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez songé à démissionner ?
MANUEL VALLS
Non, non, parce que ça n'est pas un problème de personne
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'homme ou de personne
MANUEL VALLS
C'est quoi l'alternative ? Nous allons le voir d'ailleurs dans quelques jours, puisque le texte Travail va venir au Sénat, où il y a une majorité de droite, qui va donner son projet, et qui sera évidemment aux antipodes, non seulement de ce que nous avons proposé, mais de ce qu'attendent éventuellement ceux qui manifestent. Donc il est hors de question de changer le cap, il peut toujours y avoir des modifications, des
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah !
MANUEL VALLS
Il peut toujours y avoir des modifications
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça m'intéresse !
MANUEL VALLS
Des améliorations, mais
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une réécriture d'un article par exemple ou l'article, eh bien, je pense à l'article 2, évidemment ?
MANUEL VALLS
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non ?
MANUEL VALLS
Pas de retrait du texte, et l'article 2 c'est-à-dire, la négociation dans l'entreprise défendu notamment par les syndicats réformistes, en l'occurrence par la CFDT, vous vous rendez compte, le premier syndicat de France aujourd'hui, Laurent BERGER, son secrétaire général, qui a été sévère au début sur la première mouture du texte, avec qui nous avons négocié durement sur le texte, considère que ce texte est bon pour les salariés et qu'il leur donne de nouveaux droits. Et moi, je vais retirer un texte
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il n'y aura pas de réécriture de l'article 2 !
MANUEL VALLS
Où je vais réécrire un article qui est le coeur de la philosophie, c'est-à-dire la négociation dans l'entreprise
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, il n'y en aura pas ?
MANUEL VALLS
Mais, ce pays se meurt parfois de ses conservatismes, de son impossibilité à réformer, c'est pour ça que nous sommes dans un moment crucial, je sais que les Français expriment leur opposition au gouvernement, à travers leur opposition à ce texte, qui sont inquiets pour l'avenir, pourtant, au moment où
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vais vous parler des Français, oui
MANUEL VALLS
Pourtant au moment où, encore une fois, les chiffres du chômage s'améliorent nettement, où nous retrouvons de la compétitivité et de la croissance, mais ça, je l'entends parfaitement, mais ma responsabilité, comme chef du gouvernement, ce n'est pas de suivre les sondages, c'est bien sûr d'écouter les Français, et j'entends notamment ceux qui sont en difficulté, ceux qui souffrent, les salariés, comme les chefs d'entreprise, les artisans ou les indépendants, je veux rappeler que ce texte de loi est bon aussi pour les indépendants, parce qu'il va leur donner davantage de possibilités de se former
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais Manuel VALLS
MANUEL VALLS
Donc, il ne s'agit pas d'un entêtement, je pense que ce texte est bon pour l'intérêt général, bon pour les entreprises, bon pour nous sommes dans un moment crucial, où, au fond, il y a deux conceptions
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, c'est un moment crucial
MANUEL VALLS
Deux conceptions, deux conceptions du syndicalisme, en l'occurrence, du dialogue social, on le voit bien, entre les syndicats réformistes et de l'autre côté, la CGT, et on le voit bien parfois aussi à gauche, vous disiez que nous n'avons pas pu faire passer le texte, mais est-ce qu'il y avait une alternative à l'Assemblée nationale ? Non, mais il y a eu une trentaine de députés socialistes qui ne voulaient pas voter ce texte, et c'est la raison pour laquelle, j'ai utilisé la responsabilité, l'engagement de responsabilité du gouvernement, mais après
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et vous l'utiliserez encore ?
MANUEL VALLS
Mais après avoir intégré 600 amendements qui avaient été adoptés par la Commission des Affaires sociales ou par le rapporteur
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes prêt à l'utiliser encore ?
MANUEL VALLS
Mais bien évidemment, moi, j'espère que chacun assumera pleinement ses responsabilités
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes prêt à utiliser le 49.3 encore une fois ?
MANUEL VALLS
Je l'ai utilisé à cette occasion-là, il y a eu un débat très approfondi à la Commission des Affaires spéciales, Christophe SIRUGUE, le rapporteur de la loi, a permis, avec les autres parlementaires, de tous bords d'ailleurs, qu'il y ait 600 amendements qui enrichissent le texte, il y a eu des modifications, mais ce qui est de l'ordre de l'équilibre, c'est-à-dire la négociation dans l'entreprise et le compte personnel pour les salariés, le compte personnel d'activité, qui permet aux salariés d'avoir plus de droits, ce compte personnel pour la formation notamment tout au long de la vie, ça, ce sont des éléments très importants.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, donc on ne réécrit pas l'article 2, on n'y touche pas ? Vous ne toucherez pas à l'article 2 ?
MANUEL VALLS
Il peut toujours y avoir tel ou tel élément de précision, mais le coeur, c'est-à-dire la négociation dans l'entreprise
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire que l'accord d'entreprise primera sur l'accord de branche ?
MANUEL VALLS
Bien sûr, c'est ce qui est au coeur du texte, et c'est un changement. Mais chacun dit : il faut que la France change, il faut qu'on soit capable de faire en sorte que le dialogue social soit un avantage pour le progrès social et pour le progrès économique, il faut qu'on se parle plus, notamment dans l'entreprise, et on tente une réforme, je vois bien les conservatismes de tous les côtés, à gauche comme à droite, mais mon rôle, c'est d'avancer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une du Parisien, prêt à lâcher du lest, donc vous n'êtes pas prêt à lâcher du lest ?
MANUEL VALLS
Qu'est-ce que ça veut dire lâcher du lest, s'il faut écouter, modifier tel ou tel élément
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes prêt à recevoir la CGT par exemple ?
MANUEL VALLS
Mais bien sûr, mais
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour négocier ?
MANUEL VALLS
Mais, nous avons des contacts permanents avec la CGT
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous pourriez ouvrir des négociations, là ?
MANUEL VALLS
Mais sur quoi ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Moi, je ne sais pas, sur des propositions de la CGT ?
MANUEL VALLS
La CGT, je voyais, il y a un instant, sur BFM, un responsable de la CGT qui proposait comme négociation le retrait du texte, nous avons discuté et négocié avec tous les partenaires sociaux ainsi qu'avec le patronat, il y a plusieurs mois, vous savez, ça n'a peut-être pas été assez dit, la discussion sur ce texte est préparée depuis un an. Il y a eu un rapport, celui de Jean-Denis COMBREXELLE, qui a proposé ces négociations dans l'entreprise. C'est encore une fois un vrai changement, une vraie révolution des mentalités que d'instaurer véritablement le dialogue social dans l'entreprise, et d'ailleurs, la CGT le sait, elle signe beaucoup d'accords dans l'entreprise, et au moment où d'ailleurs, à STX, on va créer sans doute des milliers d'emplois avec de nouvelles commandes, alors que, aussi, à PSA, contrairement ce que j'entendais, les accords de compétitivité ont permis à cette entreprise d'être sauvée, grâce aussi à l'accord de l'Etat, et de créer de l'emploi, le dialogue social pour certains, c'est la confrontation, moi, je n'accepte pas ni la confrontation ni la violence, je sais que pour beaucoup de nos compatriotes, les syndicats n'ont pas une bonne image, que le dialogue social
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais mettez-vous à la place mais oui, mais vous non plus, vous n'avez pas une bonne image !
MANUEL VALLS
Mais je ne dis pas le contraire
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous savez pourquoi ? Vous savez pourquoi les Français aujourd'hui sont partagés devant les actions de la CGT, mais vous le savez aussi bien que moi, pourquoi ? Parce qu'ils sont en grève contre vous, les Français, en grève contre le pouvoir, contre François HOLLANDE, et contre vous ! Ils ne vous veulent plus au pouvoir ! C'est pour ça qu'ils sont là, 70 % des Français refusent cette loi Travail, est-ce que vous croyez que c'est parce qu'ils connaissent la loi Travail ? C'est un refus à Manuel VALLS, c'est un refus à François HOLLANDE !
MANUEL VALLS
Je pense que ça peut être même un refus plus large
JEAN-JACQUES BOURDIN
A la politique peut-être !
MANUEL VALLS
Parce que c'est une forme de crise politique, de grande interrogation sur les institutions, sur le rôle des syndicats, y compris même sur notre démocratie. Mais vous savez, quand je vois, d'un côté, la montée des populismes, de l'extrême droite, quand je vois de l'autre côté la violence, parce que, vous savez, on passe très vite d'une actualité à une autre, mais il y a encore quelques jours, il y avait la violence sur les forces de l'ordre, sur les policiers, sur les gendarmes, il y a eu cette voiture qui a brûlé, ce symbole, et ce courage, ce sang-froid des policiers face à cette violence
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, entre parenthèses, des libérations un peu rapides peut-être, non ?
MANUEL VALLS
Mais ça, c'est le choix de la justice, quatre personnes avaient été interpellées
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous les avez trouvées un peu rapide ?
MANUEL VALLS
Quatre personnes ont été interpellées, à la place qui est la mienne, je fais très attention à ce type de commentaires, un est resté aujourd'hui incarcéré, les trois autres sont sous contrôle judiciaire, vous ne savez pas, Jean-Jacques BOURDIN, ce qu'il y a dans le dossier, ce que je constate, c'est que le Parquet a fait appel, moi, je pense que quand on agresse des policiers, quand on veut se faire du flic, quand on veut tuer des policiers
JEAN-JACQUES BOURDIN
On n'est pas remis en liberté ?
MANUEL VALLS
La place est en prison. Mais le Parquet a fait appel, moi, je me rappelle que je suis l'ancien ministre de l'Intérieur, aujourd'hui, chef du gouvernement
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est pour ça que je vous pose la question
MANUEL VALLS
Aux côtés de Bernard CAZENEUVE, et nous sommes aux côtés des policiers et des gendarmes qui sont des salariés comme les autres, mais sur qui, je voudrais dire un mot là-dessus, sur eux pèsent aussi beaucoup de responsabilités, leur public, la maîtrise de l'immigration, la lutte contre la délinquance, bien sûr, faire face au terrorisme, la préparation de l'Euro de foot, s'il y avait un peu de responsabilité collective, notamment du côté de la CGT, qui a sorti ces tracts odieux sur la responsabilité qui serait celle de la police ou du gouvernement, face à un certain nombre d'incidents, ce sont les policiers et les gendarmes qui sont blessés, encore il y a quelques jours, à Fos. S'il y avait un peu de responsabilité, on pourrait se dire que tout
JEAN-JACQUES BOURDIN
Irresponsable, la CGT ?
MANUEL VALLS
On pourrait se dire que toutes ces manifestations pèsent
JEAN-JACQUES BOURDIN
Irresponsable ?
MANUEL VALLS
Je crois qu'un syndicat avec l'histoire qui est celle de la CGT, doit faire preuve de responsabilité. Il y a dans le pays, il y a aussi, et ça, j'en suis convaincu, un besoin d'ordre, un besoin d'ordre républicain. Bien sûr, un ordre juste, parce qu'on a besoin de justice dans ce pays, de lutte contre les inégalités, un besoin d'ordre, donc ma responsabilité, comme chef du gouvernement, c'est de faire en sorte que l'autorité de l'Etat, que l'ordre soit respecté, et qu'on débloque tous ces sites qui ont été bloqués, parce que je souhaite que les Français, les usagers, comme les entreprises, soient approvisionnés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Justement, qu'allez-vous faire ? Je reviens à ma première question : qu'allez-vous faire ? Réquisitionner des salariés grévistes ? Est-ce que vous allez Je ne sais pas moi, organiser un référendum autour de cette loi Travail comme le demandait Arnaud MONTEBOURG à votre place hier matin, ici même. Qu'allez-vous faire ?
MANUEL VALLS
On ne peut pas organiser un référendum soit prétexte de loi de ce type, ce n'est pas prévu par la Constitution. Et puis moi je crois aussi encore une fois au rôle du Parlement, je crois au dialogue social. Je veux convaincre les Français qu'il y a dans ce texte de bonnes choses pour les jeunes, pour les indépendants, pour les petits patrons qui vont avoir plus de visibilité
JEAN-JACQUES BOURDIN
En attendant les Français n'arrivent pas à rouler, en attendant les Français sont gênés dans leur travail quotidien !!
MANUEL VALLS
La faute à qui ? La faute à un syndicat minoritaire qui veut imposer ///
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est la faute de la CGT.
MANUEL VALLS
Qui veut imposer sa loi, qui veut imposer la vision des choses.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous voulez imposer votre loi, la loi de la République.
MANUEL VALLS
La loi de la République Attendez, excusez-moi, le 49.3, c'est dans la Constitution, c'est la démocratie, c'est dans la Constitution !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous allez réquisitionner ? C'est la loi .
MANUEL VALLS
Le blocage des sites ce n'est pas dans la Constitution. Donc nous allons continuer à débloquer tous ces sites qui ont été bloqués. Nous allons continuer parce que
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous allez réquisitionner des salariés grévistes ?
MANUEL VALLS
On peut envisager toutes les solutions.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous l'avez envisagé ?
MANUEL VALLS
On peut envisager toutes les solutions. Il faut du droit là aussi, c'est en fonction d'une certaine situation. Donc Jean-Jacques BOURDIN, toutes les solutions sont envisagées
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais il y a des coupures de courant ce matin.
MANUEL VALLS
Non, il n'y a pas de coupure
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas vrai, il y en a, je vous donne des communes où il y a des coupures de courant.
MANUEL VALLS
Il y a des délestages, on voit bien. Puisque vous avez eu un dialogue ce matin avec le responsable de la CGT de la filière nucléaire, c'est un secteur hautement sensible, moi je crois de toute façon là à la responsabilité des salariés de cette grande entreprise qu'est EDF, qui n'est en rien par ailleurs puis-je le rappeler concernée par la loi Travail. En rien concernée.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a une volonté de sabotage ?
MANUEL VALLS
Mais la responsable de la CGT que vous interrogiez ce matin assumait parfaitement que nous puissions par exemple exporter davantage d'électricité, et que ça représente un coût supplémentaire pour notre économie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Importer, importer davantage.
MANUEL VALLS
Importer davantage, vous avez raison de me corriger, importer davantage et ainsi ça représenterait un coût supplémentaire pour l'économie et l'industrie. Mais bon sang, on est patriote ou pas dans ces moments là ? Quand la croissance revient, quand on fait baisser le chômage, quand il y a davantage de compétitivité, quand les carnets de commandes sont en train de se remplir parce que les entreprises grâce à ce que nous avons fait avec le CICE et le pacte de responsabilité retrouvent des marques.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est du sabotage de l'économie ?
MANUEL VALLS
C'est les mots
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les mots ont une réalité.
MANUEL VALLS
C'est une action irresponsable. Quand on mène une action qui consiste à bloquer et faire en sorte qu'il y ait aujourd'hui la possibilité de pénurie pour les usagers et pour les entreprises, et que ça puisse coûter à l'entreprise
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors est-ce que vous allez réquisitionner ?
MANUEL VALLS
Mais je ne vais pas l'annoncer ici à ce micro, toutes les possibilités sont
JEAN-JACQUES BOURDIN
Réquisitionner c'est une possibilité. Vous l'envisagez ?
MANUEL VALLS
Toutes les possibilités sont sur la table. On verra comment les choses se passent aujourd'hui. Moi j'attends de voir comment les choses se passent aujourd'hui. Je veux assurer seulement aux Français devant vous, ceux qui nous regardent comme ceux qui nous écoutent que le gouvernement est totalement mobilisé pour qu'il puisse parce que je connais encore une fois, je suis passé il y a quelques minutes devant une station essence, nous voyons la situation, il y a entre 20 et 30 % des stations-essence dans ce pays qui sont .
JEAN-JACQUES BOURDIN
N'était-ce pas irresponsable de parler de pénurie, d'absence de pénurie ? Le mot « pénurie », dès les premiers jours, alors que moi j'écoutais les auditeurs qui nous disent « mais non il n'y a pas d'essence ». Pas de pénurie, disait le gouvernement.
MANUEL VALLS
Il y a 20 à 30 % de stations-essence fermées ou en difficulté, ce ne sont pas toutes les stations-essence
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous étiez en Israël, Ségolène ROYAL était en Turquie, le président de la République était absent.
MANUEL VALLS
Non, le président de la République était là, le ministre en charge de ces questions-là, c'était à dire Alain VIDALIES, qui fait un très bon travail, était présent sur les médias, mon cabinet suivant parfaitement ce sujet là, et moi j'étais en Israël aussi à la fois pour vendre nos entreprises, pour gagner des marchés, et parce que la voix de la France elle compte aussi dans ces pays et en contact direct. Mais honnêtement, ça n'est pas là le sujet. Ce qui serait irresponsable c'est de ne pas tout faire pour que les usagers, les entreprises soient alimentés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
La pénurie elle est là.
MANUEL VALLS
Elle est là en partie, je ne minimise rien. Depuis le début je ne minimise ni les difficultés des Français, ni les difficultés possibles pour notre pays, ni l'attitude irresponsable de la CGT.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors vous avez dit tout à l'heure, il peut toujours y avoir des modifications, des améliorations sur la loi Travail. Où ?
MANUEL VALLS
Mais il y a eu déjà beaucoup de modification et d'amélioration
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qu'est-ce qu'on peut encore modifier dans cette loi ?
MANUEL VALLS
Il faudra modifier sans doute le texte qui va revenir du Sénat dans quelques semaines. Mais pour que chacun le comprenne, et d'ailleurs reconnaissons-le c'est beaucoup trop long.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors quelles améliorations
MANUEL VALLS
Je me faisais la remarque pour que vos auditeurs et vos téléspectateurs comprennent bien. En Grèce, le gouvernement de TSIPRAS, un gouvernement de gauche avec d'abord une grève générale, mène des réformes courageuses. Ces réformes ont été adoptées en quelques heures, 1500 pages sans amendement par le Parlement. Parce que parfois il faut aller vite dans la réforme. Nous, ce texte a du être adopté au Conseil des Ministres au début de l'année, il va être adopté définitivement au mois de juillet parce qu'il y a plusieurs lectures, à l'Assemblée et au Sénat, c'est notre Constitution. Donc le texte va revenir seulement à l'Assemblée nationale à la fin du mois de juin, début du mois de juillet
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, Il y aura des améliorations ?
MANUEL VALLS
Mais on verra, mais il n'y aura pas de modification de la philosophie du texte, ce qui est bon pour les entreprises, c'est-à-dire le dialogue social comme le compte personnel d'activité pour les salariés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Franchement, est-ce que vous vous sentez soutenu totalement par le président de la République ? Est-ce que vous n'avez pas trouvé étrange la sortie de monsieur Bruno LE ROUX hier qui dirige le groupe socialiste à l'Assemblée nationale et qui nous dit que l'article 2 pourrait être renégocié ?
MANUEL VALLS
Bruno LE ROUX a été et est d'un soutien d'une loyauté absolue à l'égard de l'action qui est
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il a commis une bourde ?
MANUEL VALLS
Non, parce que ce débat avait eu lieu au sein du groupe socialiste, au sein du Parlement sur l'équilibre
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez dû être surpris en entendant cela ?
MANUEL VALLS
Il a quelques instants dit clairement les choses, et il a considéré que s'il y avait eu un débat aujourd'hui il fallait ne pas réécrire ce texte.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est ce qu'il a dit ?
MANUEL VALLS
Vous lui poserez la question si vous l'invitez, je n'en doute pas un seul instant. Mais moi je le sais son soutien est loyal et c'est ça qui est le plus important. Je compte d'abord sur lui .
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous pensez que François HOLLANDE vous soutient loyalement dans cette affaire ?
MANUEL VALLS
Vous vous rendez compte s'il ne me soutenait pas loyalement, ou si moi je ne le soutenais pas loyalement .
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous pose la question, vous n'avez aucun doute ?
MANUEL VALLS
Je n'ai aucun doute sur
JEAN-JACQUES BOURDIN
Franchement, soyons clairs.
MANUEL VALLS
Franchement, comme on dit les yeux dans les yeux
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'avez aucun doute sur le soutien de François HOLLANDE ?
MANUEL VALLS
Non, je n'ai pas de doute. Hier au Conseil des Ministres, autour du président de la République, ce que je viens de vous dire, c'est-à-dire la nécessité de faire lever tous ces blocages, notre détermination à aller jusqu'au bout pour ce qui concerne ce texte. Le fait que l'article 2 est un élément important pour la négociation sociale.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes à fond soutenu.
MANUEL VALLS
Mais il ne peut pas en être autrement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, on va vous retrouver sur l'antenne de RMC en dialogue avec les auditeurs jusqu'à 9h30
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, merci d'être resté avec nous
MANUEL VALLS
Merci à vous.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et d'accepter de répondre, dans les circonstances actuelles, aux auditeurs de RMC. Je dois dire que nous n'avons jamais reçu autant d'appels que ce matin, ce qui montre l'urgence de la situation. Simplement une première question qui est arrivée par mail. C'est Luis qui nous a envoyé cette question, il a 37 ans, il est chauffeur poids-lourds dans les Yvelines : « Pourquoi laissez-vous faire ces manifestations et ces rassemblements alors que nous sommes en état d'urgence ? »
MANUEL VALLS
Mais parce que c'est un droit constitutionnel. C'est d'ailleurs l'honneur de notre démocratie alors qu'il y a une menace terroriste car, en effet, il faut le rappeler, nous sommes visés. Nous sommes même l'objectif numéro un de l'Etat islamique, de Daesh. Mais alors même que nous connaissons cette menace, que nous avons prolongé l'état d'urgence précisément pour assurer la sécurité de l'Euro de foot 2016 et du Tour de France. Malgré cela, dans notre pays, c'est une belle réponse à ceux nient nos valeurs, à ceux qui se sont attaqués à notre mode de vie il y a quelques mois je parle des terroristes. C'est une belle réponse, c'est l'honneur de la France que de permettre que la vie démocratique il y a eu des élections au mois de décembre, elles n'ont pas été annulées ; il y a eu des grands rendez-vous, il y a eu la COP21 ; il y a la possibilité toujours de manifester, d'organiser des réunions. Chacun ensuite, je le disais tout à l'heure à votre micro, doit assumer ses responsabilités, notamment non seulement ses responsabilités par rapport à ce qui pèse sur les policiers et les gendarmes mais aussi à ce que cela représente comme gêne pour les Français. Quand on se dit syndicat voulant défendre les salariés et qu'on met en difficulté des PME, des petites entreprises, des artisans et des commerçants, quand on oblige les salariés et les ouvriers de ce pays à faire la queue pour avoir de l'essence, je ne suis pas sûr qu'on défende véritablement les salariés de ce pays. Mais c'est l'honneur, encore une fois, de notre pays que de pouvoir permettre ce droit constitutionnel, ce droit de grève ou de manifester, de pouvoir toujours exister heureusement. C'est ça la France.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, je vais vous laisser avec Alexandre qui a 27 ans, qui est agent EDF en Haute-Savoie. Alexandre, bonjour. Je vous laisse avec le Premier ministre.
ALEXANDRE, AGENT EDF EN HAUTE-SAVOIE
Bonjour Jean-Jacques, bonjour Monsieur le Premier ministre.
MANUEL VALLS
Bonjour monsieur.
ALEXANDRE
Voilà, j'ai une question pour vous. Vous êtes un homme donc de convictions, je vous entends parler de principes. On voit que vous croyez en votre loi et, puisque vous avez l'air tellement persuadé que c'est une bonne chose pour tout le monde, je pense que vous devez penser aussi que les Français pensent que c'est une bonne chose pour eux, je vous demande pourquoi avez-vous fait passer la loi en 49-3 et derrière n'avez-vous pas fait un référendum ? Puisque vous êtes persuadé que c'est une bonne chose pour les Français, pourquoi n'avez-vous pas pris le risque a priori ce n'est pas un risque de faire un référendum ?
MANUEL VALLS
Non, ce n'est pas moi qui décide du référendum, mais enfin ça, c'est une autre affaire.
ALEXANDRE
C'est votre gouvernement.
MANUEL VALLS
C'est le président de la République.
ALEXANDRE
C'est le président de la République qui nomme le gouvernement.
MANUEL VALLS
Bien sûr. Deuxièmement, on ne peut pas faire par ailleurs de référendum sur ce type de texte, mais parce que c'est un texte qui touche différents aspects de la vie des entreprises et des salariés, parce que c'est un texte aussi il faut le dire d'une grande complexité, parce que le droit du travail est complexe, même s'il faut le simplifier. Parce que je pense aujourd'hui, je vous le dis très honnêtement, qu'on risque d'ailleurs de voter en pensant à autre chose bien évidemment. C'est ça aussi la démocratie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Contre vous.
MANUEL VALLS
Contre moi, contre le gouvernement, contre le système politique, contre la démocratie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Contre vous, contre François HOLLANDE, Manuel VALLS, le gouvernement et le pouvoir en place.
MANUEL VALLS
Et contre un peu
JEAN-JACQUES BOURDIN
Contre un peu tout le monde.
ALEXANDRE
Monsieur le Premier ministre, excusez-moi.
MANUEL VALLS
Allez-y, je vous en prie. Je vous écoute.
ALEXANDRE
Ne pensez-vous pas que quand un gouvernement décide à la place des gens, nous ne sommes plus en démocratie ?
MANUEL VALLS
Non, le gouvernement ne décide pas
ALEXANDRE
Nous avons voté pour vous certes, à peu près 20 % de la population avec des taux d'abstention
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez voté pour François HOLLANDE, Alexandre ?
ALEXANDRE
Oui. Oui, j'ai voté pour un gouvernement qui ne me représente plus. Je suis déçu. Et justement, puisque vous passez des lois sur le travail, ne pensez-vous pas qu'à ce compte-là on pourrait passer dans la loi du Travail un amendement qui consisterait à obliger les gens du gouvernement à respecter leurs promesses ? Si vous voulez, si j'ai voté pour vous quelque part vous êtes mon employé.
MANUEL VALLS
Et de quelles promesses et de quels engagements voulez-vous parler ? Moi, je crois à la démocratie. Je crois aussi à la démocratie représentative.
ALEXANDRE
Pourquoi vous ne faites pas de référendum si vous croyez à la démocratie ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alexandre, laissez Manuel VALLS vous répondre.
MANUEL VALLS
J'essaye de vous répondre.
ALEXANDRE
Excusez-moi, je vous laisse répondre.
MANUEL VALLS
Non, non, mais contrairement à vous, moi j'ai plus accès aux micros et je comprends que vous vouliez me poser des questions. Mais ce que je crois en même temps, c'est qu'un gouvernement après, à un moment il y a des élections, chacun portera le jugement et ce jugement, il approche si vous me permettez cette expression dans quelques mois, à l'occasion de l'élection présidentielle ; il faudra voir aussi au fond quels sont les projets pour le pays dans les années qui viennent : les projets de gauche, les projets de droite, qu'est-ce qui est bon pour chacun des Français. Mais moi, j'ai une responsabilité, je considère que c'est la responsabilité de l'intérêt général. Il y a un Parlement, il y a une constitution. J'avais une trentaine de députés socialistes qui ne voulaient pas de ce texte et qui voulaient mêler leurs voix avec celles de la droite, donc j'ai pris mes responsabilités et j'ai engagé ma responsabilité devant le Parlement. C'est la constitution. Il n'y a pas eu de motion de censure adoptée et c'est comme ça qu'on peut continuer à gouverner. Il y a eu de très grands textes adoptés grâce à l'engagement de responsabilité. Je pense notamment à la CSG qui avait été souhaitée par Michel ROCARD. Donc il y a des fois où un responsable politique doit être lucide bien sûr, être à l'écoute bien évidemment, mais doit être aussi courageux et, s'il a des convictions, il va jusqu'au bout et vous aurez l'occasion de nous juger dans quelques mois.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, merci Alexandre. Merci. Je vous coupe parce qu'il y a énormément d'appels. Simplement une question : en aucun cas, vous ne serez candidat à la présidence de la République, Manuel VALLS ? En aucun cas.
MANUEL VALLS
En aucun cas ; quand ? Demain, après-demain ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
En aucun cas. Il y a une élection dans un an.
MANUEL VALLS
Non mais moi, je ne m'enferme jamais dans ce type de question. Aujourd'hui très honnêtement
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas la question ?
MANUEL VALLS
Dans un moment difficile : menaces terroristes, ces blocages, ces confrontations que souhaite, qu'a voulues la CGT, je suis totalement concentré sur ma tâche. Chaque chose en son temps. J'ai déjà eu l'occasion de dire que je considérais que c'était le président de la République François HOLLANDE qui était légitime à porter
JEAN-JACQUES BOURDIN
Plus que jamais ?
MANUEL VALLS
Mais c'est lui qui prendra cette décision. C'est sa décision devant les Français mais, honnêtement, je ne pense pas que ce soit le sujet du matin.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, Annie justement qui vous écrit. « Le dialogue sert à quelque chose. Arrêtez de vous entêter. On ne vous demande pas de démissionner mais, s'il-vous-plaît, faites un pas en arrière. La CGT et l'Etat pourraient peut-être s'entendre et arranger les choses », voilà ce que vous dit Annie.
MANUEL VALLS
Annie qui doit nous écouter
JEAN-JACQUES BOURDIN
Elle vous écoute, oui.
MANUEL VALLS
J'ai discuté pendant plusieurs semaines avec tous les syndicats. Les syndicats comme la CFDT, la CFTC, la CFE-CGC, l'UNSA, le premier syndicat étudiant la FAGE, ont accepté, ont donné leur accord aux modifications, au compromis que nous avons bâti ensemble. La CGT n'était que sur une seule position, pas depuis une semaine : depuis des mois. Le retrait du texte, la mise en cause de l'article 2, ce sont deux conceptions du dialogue social qui se sont affrontées. Pas uniquement entre le gouvernement et la CGT mais au sein même du mouvement syndical, au sein même du mouvement ouvrier, au sein même des organisations de jeunesse. Donc mon rôle était aussi d'écouter la ceux qui veulent la réforme, on ne peut plus réformer sinon si on accepte en permanence ces oukases comme on dit, c'est-à-dire cette volonté de ne jamais avancer, donc il faut avancer. Est-ce qu'on considère aujourd'hui que les salariés sont plus protégés avec un droit du travail qui est trop confus ? Nous avons voulu le simplifier et, en le simplifiant, voulu que la négociation se déroule d'abord dans les entreprises.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, j'ai plusieurs auditeurs aussi qui reviennent sur ce que vous avez dit tout à l'heure. Vous avez évoqué des modifications et des améliorations sur cette loi Travail et les auditeurs vous demandent plus de précisions.
MANUEL VALLS
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce que vous êtes resté extrêmement vague. Alors quelles améliorations, quelles modifications possibles ?
MANUEL VALLS
Mais je suis resté volontairement vague parce que je n'en sais rien. Tout simplement parce que le texte vient d'être adopté à l'Assemblée nationale et il est déjà le fruit, je vous le disais il y a un instant, du compromis avec les syndicats réformistes, avec les parlementaires, notamment avec ces parlementaires socialistes qui sont particulièrement responsables.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais sur quel point il pourrait y avoir selon vous
MANUEL VALLS
Mais je n'en sais rien. Il va falloir déjà réécrire le texte quand il va revenir du Sénat parce que ce sera le projet
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais ça d'accord, mais on peut le réécrire différemment justement.
MANUEL VALLS
Mais ça ne viendra qu'à la fin du mois de juin, qu'au début du mois de juillet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous souhaitez des modifications et une forme de réécriture du texte ?
MANUEL VALLS
Jean-Jacques BOURDIN, je suis toujours ouvert quand il faut améliorer tel ou tel aspect, mais en revanche sur les grandes lignes du texte et notamment sur l'article 2, c'est-à-dire la négociation dans l'entreprise mais aussi la garantie jeunes, les nouveaux droits pour les salariés, la lutte contre le détachement illégal, ce que nous faisons pour les jeunes, ça il n'est pas question évidemment d'y toucher. Les droits nouveaux pour les salariés, vous allez voir, le texte qui va revenir du Sénat il va les mettre en cause. Les droits nouveaux pour les syndicats, la droite est aujourd'hui de plus en plus contre le paritarisme. Et d'ailleurs, je dis notamment à la CGT qu'elle fasse très attention. Son action, elle peut être peut-être soutenue ici ou là par les Français mais demain, si la droite l'emporte, ce sont les droits des syndicats, c'est le paritarisme, c'est la possibilité de négocier entre partenaires sociaux qui vont être mis en cause et ce type d'action, elle ne sert pas la cause des syndicats. Et moi, je me félicite qu'il y ait des responsables syndicaux, syndicats dits réformistes, qui disent qu'il faut que le texte soit maintenu, qu'on ne peut pas céder à ce type d'attitude, à cette volonté de faire plier le gouvernement en bloquant l'économie, en gênant les Français, au moment où nous obtenons des résultats économiques avec la baisse du chômage en mettant en danger la vie des entreprises.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, Nicolas est avec vous. Il a 33 ans, chef d'entreprise à Paris ; bonjour Nicolas.
NICOLAS, CHEF D'ENTREPRISE PARISIEN
Bonjour Monsieur le Premier ministre.
MANUEL VALLS
Bonjour.
NICOLAS
Bonjour. Je vous appelle, en fait, car aujourd'hui on peut constater que c'est votre électorat qui est dans la rue ainsi que tous les Français saturés par la démagogie politicienne. Aujourd'hui, une vidéo qui remonte à 2010 vous oppose entre vos propos de 2010 sur le gouvernement de François FILLON que vous critiquiez à l'époque et vos propos qui sont complètement opposés en 2016. Et je me pose la question : comment est-il possible aujourd'hui, en six ans de temps, d'avoir deux oppositions aussi violentes et comment on peut penser différemment sur une période aussi courte ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Vous dénonciez le passage en force de François FILLON en 2010 - j'ai le texte sous les yeux passage en force contre les syndicats qui s'opposaient à la réforme des retraites en 2010, rappelons-le. Vous étiez assez dur « assez » : vous étiez très dur dans vos propos contre le gouvernement en place à l'époque. Et vous êtes maintenant dans la position opposée.
MANUEL VALLS
Oui, je connais cette vidéo et cette question qui revient mais c'est une bonne question. Moi dans l'opposition, j'essayais en général sur les questions essentielles, je pense à la sécurité, à la laïcité, je pense même à la réforme des retraites, d'avoir une position responsable et ça veut bien dire que quand on tient parfois un propos dans l'opposition, il faut réfléchir à deux fois et ça veut bien dire que quand on a la chance, la responsabilité de gouverner et c'est un honneur, il faut toujours se rappeler que c'est difficile.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est une leçon ?
MANUEL VALLS
C'est toujours une leçon, elle vaut pour moi, elle vaut aussi pour eux qui aujourd'hui sont dans l'opposition qui ont gouverné et qui ont aspiré à gouverner.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Autre question qui reprend d'ailleurs une proposition faite par Bruno LE MAIRE, je crois à un service minimum obligatoire dans l'énergie. Est-ce que ça serait une bonne idée ?
MANUEL VALLS
Mais de fait, il existe puisqu'on ne peut pas arrêter la production d'électricité. On ne peut pas mettre en cause aujourd'hui le fonctionnement des centrales nucléaires pour des raisons de sécurité, pour des raisons d'intérêt national. Donc cela existe déjà. Le service minimum, il existe également dans les entreprises, ce qui n'empêche pas des grèves et la gêne que peuvent en ressentir les usagers.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Beaucoup vous disent « mais pourquoi ne pas aller jusqu'à la réquisition ? » Vous êtes ferme, vous êtes décidé à maintenir cette loi, vous êtes décidé à ne pas modifier la philosophie de cette loi et vous laissez parce que ça va durer, Manuel VALLS, c'est le risque !
MANUEL VALLS
Quel est le problème ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que le risque n'est pas là ? Est-ce que le risque que la situation dure parce que la CGT et intransigeante aujourd'hui ?
MANUEL VALLS
Je vous ai dit tout à l'heure qu'il y a un besoin d'ordre, il y a un besoin de bienveillance, d'écoute, d'attention aux plus modestes, à ceux qui sont en difficulté, bien sûr mais il y a aussi un besoin d'ordre et d'ordre républicain ; ce conflit a commencé il y a quelques jours, la CGT veut le faire durer et le gouvernement est ferme sur l'approvisionnement des entreprises comme des stations-essence.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc le conflit va durer !
MANUEL VALLS
Donc il peut durer ! Je ne le souhaite pas bien évidemment, donc c'est pour cela que nous sommes déterminés à approvisionner et les stations-essence pour faire en sorte que chacun puisse être alimenté par l'essence. Donc nous allons continuer notre action. Si le conflit dure, il ne faut écarter aucune solution mais si j'annonce aujourd'hui la réquisition alors que les conditions juridiques ne sont pas remplies, ça ne sert à rien ! Moi, je prendrai les décisions, nous prendrons les décisions en toute connaissance de cause.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Réquisition oui
MANUEL VALLS
Mais il nous faut écarter aucune solution !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aucune solution, bien
MANUEL VALLS
Aucune voie pour faire respecter cet ordre, ce besoin Les Français, je voyais votre sondage, qui disait qu'ils sont pour le retrait de la loi pour faire cesser le désordre. Qu'est-ce qu'ils expriment d'abord ? Ils expriment un besoin, d'ordre, ils ont une inquiétude sur ce qui est en train de se passer et e face, le gouvernement affirme et c'est quand même ma conviction que ce texte est utile pour les entreprises comme pour les salariés qu'il ira jusqu'au bout que nous ne retirons pas, que nous ne reviendrons pas sur l'article 2 et son équilibre et sa philosophie, c'est-à-dire la négociation dans l'entreprise sur tous les éléments positifs du texte, et donc ça veut bien dire qu'il faudra faire respecter la loi et l'ordre dans notre pays !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, Sofiane justement qui est fonctionnaire dans le Rhône, Sofiane bonjour !
SOFIANE
Oui, bonjour Jean-Jacques, bonjour Monsieur le Premier ministre !
MANUEL VALLS
Bonjour !
SOFIANE
Voilà donc je vous appelle aujourd'hui, j'ai une question à vous poser, Monsieur le Premier ministre. Donc est-ce que avec les événements d'aujourd'hui, est-ce que vous sentez encore le gouvernement légitime ?
MANUEL VALLS
Mais il est légitime ! Nous sommes dans une démocratie, nous sommes dans une démocratie et nous avons un mandat, celui de gouverner le pays pendant cinq ans !
SOFIANE
Oui mais un mandat, enfin il ne faut pas oublier que la plupart des électeurs socialistes aujourd'hui ne se reconnaissent plus dans votre gouvernement, dans vos décisions. Il ne faut pas oublier que vous avez fait passer deux lois en 49-3,il ne faut pas oublier aussi que vous avez beaucoup de frondeurs dans le Parti socialiste, donc enfin c'est légitime que je me pose cette question là et je ne suis pas le seul à poser cette question !
MANUEL VALLS
Toutes vos questions sont par essence légitimes. Sur le 49-3, je crois qu'il y a une très grande confusion. Le 19-3 dans notre Constitution, le 49-3, c'est dire aux parlementaires si vous ne voulez pas de cette politique, de cette voie, vous avez la possibilité de renverser le gouvernement. C'est donc bien de se soumettre au jugement des parlementaires, c'est tout l'inverse d'un passage en force et c'est donc un acte qui est démocratique. J'aurais souhaité bien sûr que le texte aille jusqu'au bout mais est-ce que j'ai été empêché de faire adopter cette loi ? Est-ce qu'il y a eu une motion, de censure ? Non, donc j'ai les moyens de gouverner. Est-ce que j'ai aujourd'hui les moyens de gouverner ? Oui, j'ai les moyens de gouverner quand il s'agit d'assurer de tout faire pour assurer la sécurité des Français par rapport à la menace terroriste. Est-ce que j'ai les moyens de gouverner pour faire en sorte que l'école, la sécurité, la justice, l'écologie soient aujourd'hui nos priorités ? Est-ce que j'ai les moyens de gouverner pour faire adopter cette loi sur le travail ? Est-ce que j'aurai les moyens de gouverner pour faire adopter une belle loi sur l'égalité pua la citoyenneté ou la loi dite Sapin 2 qui nous permet de mieux lutter contre la corruption et aussi de soutenir davantage les entreprises ? Oui, j'ai les moyens de gouverner et les Français auront à donner leur jugement dans quelques mois à l'occasion des élections présidentielles et législatives. Est-ce que vous me posez une autre question, c'est-à-dire est-ce qu'on peut mieux gouverner dans le dialogue, avec les Français à partir du dialogue social en étant attentif à ce qui se passe sur les réseaux sociaux en étant au fond dans une forme de démocratie permanente, participative ? C'est un vrai sujet et dans le monde tel qu'il est avec des citoyens qui sont éduqués, très bien informés, surinformés, dans le monde des réseaux sociaux, comment on gouverne ? Comment une démocratie moderne peut aujourd'hui se réformer ? C'est un vrai sujet. Moi, je suis bien conscient qu'aujourd'hui parfois, nos institutions, notre système politique, notre système parlementaire ne sont pas toujours adaptés à ce qu'est l'attente à la démocratie que souhaitent les Français mais moi, je ne peux pas gouverner en tenant uniquement compte des blocages, des manifestations, de ceux qui s'opposent à la loi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais Manuel VALLS, votre problème, c'est que 60% des Français vous rendent responsable des tensions sociales actuelles.
MANUEL VALLS
Mais quand il y a ces difficultés
JEAN-JACQUES BOURDIN
Peu importe
MANUEL VALLS
Je ne dis jamais « peu importe parce que je ne méprise jamais le jugement de mes concitoyens qu'il soit direct ou indirect mais il m'est arrivé par le passé, il m'arrivera sans doute dans l'avenir de prendre des décisions qui peuvent être impopulaires, qui ne correspondent pas tout de suite à l'attente des Français mais ces positions, je les assume. Sinon, à quoi servons-nous ? Si nous ne sommes là que pour gouverner au gré des sondages mais alors, il n'y a plus d'intérêt général. Vous vous rendez compte si François MITTERRAND en 81 avait écouté les sondages sur la peine de mort ? Il avait une conviction profonde. Moi, j'ai aussi des convictions profondes sur d'autres sujets quand j'engage des mois, des réformes parce que je crois qu'elles sont utiles pour le pays, il faut aller jusqu'au bout et encore une fois, nous avons beaucoup discuté, négocié avec les partenaires sociaux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une question corollaire. Est-ce que votre impopularité est telle, je dis bien votre impopularité est telle qu'elle vous empêcherait de gouverner ?
MANUEL VALLS
Je ne le crois pas, franchement
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'avez plus d'autorité ? Où est votre autorité aujourd'hui, Manuel VALLS ?
MANUEL VALLS
Comment, je n'ai plus d'autorité ?!
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais autorité dans l'opinion publique ! Où est votre autorité ?!
MANUEL VALLS
Non mais je n'exerce pas, pardon Jean-Jacques BOURDIN, je n'exerce pas une autorité par rapport à l'opinion ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non l'autorité pour décider et pour faire partager ces décisions ?
MANUEL VALLS
Mais je décide et nous décidons et nous continuerons de décider ! Ça n'est pas parce que la CGT aujourd'hui veut bloquer le pays, gêner les Français que moi je vais partir, je vais plier. Ca n'est pas possible, ça n'est pas ça ma conception de la démocratie. La démocratie, ce n'est pas la loi de la rue ; ça n'et pas la loi des sondages ; ça n'est pas la loi des manifestations. Chacun doit tenir compte bien sûr de ce qui se passe dans la rue des manifestations et des enquêtes d'opinion mais j'avance parce que nous avons des convictions. Sinon, il n'y a qu'à nommer un chef de bureau à la tête du gouvernement qui agira en fonction des sondages, ça n'est pas ma conception de la démocratie. Ecoutez, moi j'ai des convictions sur l'idée qu'on se fait de la République, sur l'autorité, sur l'ordre républicain, sur la laïcité, sur l'entreprise, sur le dialogue social, sur la lutte contre les inégalités. Quand j'entends par exemple, je vais prendre un exemple y compris parce qu'on peut l'entendre parfois chez les auditeurs, quand j'entends parler d'assistanat, de ceux qui vivent du système mais moi, je refuse ces mots ! Quand on décide d'augmenter le RSA, ou de créer la prime d'activité, ce n'est pas forcément toujours populaire et pourtant, c'est utile pour les plus pauvres, pour les modestes, pour les travailleurs précaires. Donc dans le monde qu'il est avec la montée des populismes, avec une part de démagogie où on mélange tout, eh bien, le rôle du politique, c'est comme ça, c'est d'assurer au fond, oui, l'intérêt général et ce que je crois bon pour le pays et aux Français de juger dans quelques mois ce qu'ils considèrent bon pour le pays, mauvais pour le pays et ils auront l'occasion de juger parce qu'aujourd'hui, ils jugent ce que nous faisons. Demain, ils jugeront aussi ce qui est proposé pour le pays. Tous ces Français qui aujourd'hui s'inquiètent sur la loi Travail qui est pourtant bonne pour les entreprises et pour les salariés, qu'ils regardent les projets en face, qu'ils se disent ce que représenterait le retrait du texte ou ce que représenterait demain l'adoption de ce que propose une partie de la droite et encore une fois c'est le débat démocratique. Ce que propose la CGT, c'est le retrait du texte et le retrait du texte, c'est moins de droits pour les salariés. Ce que propose la droite, c'est moins de droits pour les salariés et moins de dialogue social alors que nous avons besoin de dialogue social. Nous sommes dans une position qui est certes difficile mais qui me parait être la bonne pour le pays parce que nous devons à la fois faire en sorte qu'il y ait davantage de progrès social pour notre pays dans tous les domaines, sur le plan social, sur le plan éducatif, qu'il y ait davantage de compromis et c'est difficile, Jean-Jacques BOURDIN parce que je suis conscient qu'il y a de la radicalité dans notre société, qu'il y a aussi de la violence sociale, de la violence dans les comportements. C'est inacceptable qu'on s'attaque ainsi aux permanences d'élus, ou qu'on s'attaque aux policiers et aux gendarmes avec une violence Et ce ne sont pas ceux qui sont le plus en difficulté, ce sont parfois des garçons on la bien vu avec les interpellations qui viennent de tous les milieux sociaux. C'est inacceptable ! Et moi mon rôle c'est de dire « voilà qu'elle est mon idée de la démocratie ». Et puis c'est le rassemblement des Français autour des valeurs de la République. Donc, donc, je dois poursuivre cette tâche qui est la mienne, c'est l'honneur de la politique, et c'est l'idée que je me fais, malgré l'impopularité, malgré les contestations, mais il faut tenir. Il faut tenir, vous avez, dans ces moments difficiles. C'est comme ça qu'on voit ceux qui ont de la trempe, un sens de l'intérêt général et un sens de l'Etat. Le sens de l'Etat c'est tellement perdu. Ça serait facile Jean-Jacques BOURDIN de dire « je suis les sondages, je désavoue Myriam El KHOMRI, je suis ce que ici les frondeurs ou là la CGT veulent nous imposer », ce n'est pas ma conception de l'action publique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les François doivent toujours faire des efforts, vous dit Nelly, et perdre leurs avantages et leurs acquis.
MANUEL VALLS
Mais quels avantages Nelly ? Quels avantages ? Aujourd'hui, prenons des exemples concrets :
J'ai 23 ans je n'ai pas d'emploi, pas de diplôme et je suis sans ressource, mon horizon est bouché et demain je pourrais bénéficier de la garantie jeunes. C'est une allocation de 460 euros par moi, mais c'est aussi un accompagnement pour suivre une formation, trouver un emploi, raccrocher donc des wagons.
J'ai 20 ans, j'ai quitté le système scolaire, je n'ai pas de diplôme, je n'ai pas de formation et aujourd'hui grâce au compte personnel d'activité mon projet de formation sera financé et je pourrais être formé à un métier et accéder à un emploi.
Aujourd'hui je suis un indépendant, je me mets à mon compte pour ouvrir un petit commerce, je n'ai pas de droit individuel à la formation, la loi va le permettre.
Aujourd'hui je suis chef d'une entreprise, j'aurais plus de lisibilité, donc je pourrais davantage employer, embaucher avec des CDI.
Je suis un salarié sans qualification, j'ai quitté l'école sans aucun diplôme, j'ai commencé à travailler à 19 ans, au bout de bientôt dix ans d'expérience je souhaiterai pouvoir me former pour accéder à un emploi pour avoir plus de responsabilité ; demain avec le CPA je bénéficierai de 48 heures de formation par an et je pourrais ainsi financer une formation me permettant d'être promu à de nouvelles fonctions.
Le dialogue social dans l'entreprise ce n'est pas des droits en moins pour les salariés ? Donc il faut arrêter cette désinformation. Et moi je vais continuer me battre comme le fait Myriam EL KHOMRI, comme doivent le faire tous les membres du gouvernement pour expliquer cette loi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même Emmanuel MACRON ?
MANUEL VALLS
Tous, tous, un seul intérêt aujourd'hui, défendre cette loi et défendre l'intérêt général.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dites-moi, est-ce qu'Emmanuel MACRON peut toujours rester dans ce gouvernement en faisant entendre sans cesse des choix différents de ceux du gouvernement auquel il appartient. Franchement ?
MANUEL VALLS
Emmanuel MACRON a participé avec moi et Myriam EL KHOMRI à toutes les discussions, à toutes les négociations avec les salariés
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous voulez que je vous fasse la litanie de tous les propos tenus par Emmanuel MACRON qui ne correspondent pas à la ligne conduite par le gouvernement manuel VALLS ?
MANUEL VALLS
Comme je ne vais pas rester au-delà de 9h30 .
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce qu'elle serait longue, vous en convenez vous-même.
MANUEL VALLS
Je vais vous dire je suis assez indifférent à tout cela.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon !!
MANUEL VALLS
Oui parce que les évènements de 2015, les attaques terroristes, mais aussi d'une certaine manière ce qui se passe dans le pays avec cette violence que j'évoquais, m'ont changé dans la manière de gouverner, dans la manière de voir les problèmes, dans ma relation bien sûr avec les Français et aujourd'hui j'essaye de me concentrer sur ce qui est essentiel. Les petites phrases, les comportements
JEAN-JACQUES BOURDIN
Lorsqu'il dit « il faut privilégier l'investissement plutôt que les revalorisations salariales », c'est ce qu'il dit.
MANUEL VALLS
Mais il y a des revalorisations salariales y compris grâce au CICE, grâce aux marges qu'ont retrouvé les entreprises, ces dernières ont investi dans des machines outil, ont investi dans la formation, ont investi aussi dans l'augmentation des salaires. Nous avons-nous aussi
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous lui dites ce matin « il faut se taire et il faut suivre la ligne que je conduis moi, Manuel VALLS, Premier ministre ». Est-ce que vous lui envoyez ce message ce matin ? Parce que les Français ne comprennent plus ces voix discordantes, vous le savez bien.
MANUEL VALLS
Mais je vois tous les ministres régulièrement, ça sera fait encore tout à l'heure à 11h puisqu'à Matignon il y aura une réunion de ministres, comme nous le faisons tous les 15 jours. Dans ce moment là où il y a ce jugement, qui m'inquiète pour notre démocratie, si négatif, pas seulement sur les responsables politiques, mais c'est vrai sur les médias, c'est vrai sur nos institutions, c'est vrai sur tous les décideurs du pays, le comportement de chacun doit être non seulement impeccable, mais il doit être à la hauteur des
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc c'est irresponsable de parler
MANUEL VALLS
Non, je ne dis pas ça, il faut être concentré, que chacun . Regardez Bernard CAZENEUVE est concentré sur ses missions de sécurité, Jean-Yves LE DRIAN sur sa mission de défense, Najat VALLAUD-BELKACEM sur l'éducation, Myriam EL KHOMRI sur le travail, Marisol TOURAINE sur les questions sociales et de santé, Stéphane LE FOLL sur la difficulté des dossiers de l'agriculture. Chacun doit être concentré, chacun doit être responsable .
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas Emmanuel MACRON sur l'économie
MANUEL VALLS
Mais si, mais il s'occupe bien de l'économie de l'entreprise, mais que chacun soit concentré, c'est ce que nous devons aux Français, c'est cela le gouvernement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai deux dernières questions. La première est très concrète, le budget de la recherche, allez vous renoncer à supprimer 256 millions d'euros de crédit à l'Enseignement supérieur et à la Recherche ?
MANUEL VALLS
C'est un peu plus de 140 millions d'euros qui faisaient l'objet d'un gel, mais nous l'avons dit, l'université et la recherche sont des priorités. Aucun des grands programmes, aucun des grands centres de recherche de ce pays ne sera concerné par des baisses
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous maintenez ces coupes budgétaires, ces baisses
MANUEL VALLS
Non, non, non, nous l'avons dit, la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche en l'occurrence Najat VALLAUD-BELKACEM l'a dit. Et je crois même que pour les mois qui viennent et les années qui viennent surtout, je pense au prochain quinquennat, je pense à l'avenir, nous devons faire en sorte que l'université, c'est-à-dire là où maintenant beaucoup de Français étudient, avant on s'arrêtait au bac, aujourd'hui c'est l'université, c'est plus de 2 millions d'étudiants. La recherche et l'innovation parce que les grandes nations de demain ce seront celles qui auront le plus haut niveau de formation et d'innovation. Ca doit être sans doute l'une des grandes priorités des années qui viennent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas ce que disent les chercheurs et notamment les Prix Nobel
MANUEL VALLS
Les Prix Nobel vont être reçus par le président de la République, ils sont, je n'en doute pas un seul instant, rassurés par ces propos.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors j'ai une dernière question à laquelle je tiens absolument, Manuel VALLS, parce qu'elle concerne beaucoup de nos auditeurs, il s'agit du RSI. Le fameux RSI. Est-ce que vous allez le réformer avant la fin du quinquennat ?
MANUEL VALLS
Je savais que vous alliez me poser la question.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon ! Pourquoi ?
MANUEL VALLS
Parce que j'ai souvent cette question quand je viens sur votre antenne, et parce que comme je vous écoute, c'est un sujet qui remonte. Le gouvernement a pris à bras le corps le sujet du Régime social des indépendants, car le régime mis en place en 2006 et réformé dans la précipitation par la droite en 2008 a connu de graves dysfonctionnements au détriment de plusieurs millions de travailleurs indépendants. Je veux rappeler quelles sont les responsabilités. J'ai nommé l'an dernier deux députés en mission, Sylviane BULTEAU et Fabrice VERDIER qui est le député du Gard que vous connaissez bien. Nous avons repris leurs recommandations avec un objectif clair : rendre la protection sociale des travailleurs indépendants plus simple, plus lisible et plus juste. Et les premiers résultats sont là tangibles, même si je connais la difficulté que vivent beaucoup d'indépendants. Un milliard d'euros de cotisations ont été remboursés dès le mois de juillet dernier grâce à l'accélération de la procédure de régulation cotisations mise en place en 2015. Cela constitue un gain de trésorerie majeur pour ces professionnels. 100 %, parce que c'est ça qui ne marchait pas, des appels téléphoniques, sont désormais orientés vers des collaborateurs du RSI et non plus sous-traités par un prestataire. Un médiateur dans chaque département a été nommé pour réduire les litiges. Et les travailleurs indépendants les plus modestes qui s'acquittent de cotisations minimales valident désormais trois trimestres de retraite par an contre un seul jusqu'en 2014(sic). Le gouvernement a mis en place un comité de suivi chargé de veiller à la mise en place de ces réformes. Je veux aussi rappeler que le gouvernement, dans le cadre du Pacte de responsabilité a baissé de 1 milliard d'euros les cotisations des travailleurs indépendants depuis le 1er janvier 2015. Et que grâce à la loi Travail ils vont bénéficier de la formation. Donc je connais les difficultés, beaucoup appellent encore sur votre antenne. Nous allons donc continuer ce travail.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une dernière question, Michel SAPIN fait partie de votre gouvernement ?
MANUEL VALLS
Je crois oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui, il fait partie de votre gouvernement Michel SAPIN, il est proche de François HOLLANDE
MANUEL VALLS
Je le confirme.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous venez de me dire qu'il était proche de François HOLLANDE.
MANUEL VALLS
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous savez ce qu'il vient de dire ?
MANUEL VALLS
Non, vous allez me l'apprendre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Peut-être qu'il faut toucher à l'article 2 de la loi Travail.
MANUEL VALLS
On ne touchera pas à l'article 2.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est à dire que vous êtes Premier ministre, vous dites « on ne touchera pas l'article 2 », l'un des ministres importants, proche du président de la république dit « peut-être qu'il faut toucher à l'article 2 ». Alors qui gouverne, je vous pose la question, est-ce vous ou est-ce le président de la République qui décide ?
MANUEL VALLS
Jean-Jacques BOURDIN je n'ai pas vu la déclaration
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais je vous le dis, tenez je vous la donne.
MANUEL VALLS
Merci, je n'ai pas vu la déclaration. On peut toujours mais on peut toujours améliorer, toucher tel ou tel aspect, on peut toujours le faire
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on peut toucher à l'article 2 ?
MANUEL VALLS
Mais je vous l'ai dit tout à l'heure, mais la philosophie de l'article 2, la négociation dans l'entreprise, ça on n'y touchera pas. C'est clair.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Merci Manuel VALLS d'être venu nous voir.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 26 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80325|
FABIENNE SINTES
Marisol TOURAINE donc ministre des Affaires sociales et de la Santé avec nous sur France Info ce matin avec Yaël GOOSZ et Guy BIRENBAUM.
YAËL GOOSZ
Bonjour Marisol TOURAINE.
MARISOL TOURAINE
Bonjour Yaël GOOSZ.
YAËL GOOSZ
Semaine sociale suite, les policiers dans la rue à midi un peu partout en France contre la haine anti-flic, 350 blessés depuis le début du mouvement contre la loi Travail, vous n'êtes pas leur ministre mais qu'est-ce que vous avez à leur dire en tant que membre du gouvernement aux policiers ?
MARISOL TOURAINE
Que les Français les aiment et ils le savent, les Français aiment les policiers, ils leur font confiance et le gouvernement exprime son soutien, sa confiance dans les forces de l'ordre qui soumises à rude épreuve et qui ont beaucoup de tâches à accomplir : sécuriser des lieux publics, des lieux de manifestation, il va y avoir l'Euro, on sait que le risque terroriste est toujours au rendez-vous et, donc, il y a là une très forte pression. Nous savons qu'ils sont aujourd'hui confrontés à des tâches importantes, difficiles, qui sont reconnues par le gouvernement et d'ailleurs le ministre de l'Intérieur a donné, a signé avec leurs représentants syndicaux un protocole d'accord il y a quelques semaines qui comporte des éléments de revalorisation financière extrêmement importants.
YAËL GOOSZ
Trop de missions en même temps, entre l'Euro, la jungle de Calais
MARISOL TOURAINE
Il y a beaucoup de missions !
GUY BIRENBAUM
Les gardes statiques ?
MARISOL TOURAINE
Il y a beaucoup de missions, c'est la responsabilité des forces de l'ordre aujourd'hui et c'est cela la difficulté de leur métier, nous sommes dans un moment difficile, tendu, qui appelle la vigilance de tous et qui appelle le respect pour le travail des forces de l'ordre.
GUY BIRENBAUM
Vous dites les Français aiment la police mais il y a aussi des manifestants qui s'insurgent, en sens inverse, de la façon dont ils sont traités
MARISOL TOURAINE
Oui.
GUY BIRENBAUM
Alors il y a eu 53 personnes qui ont été interdites de manifester et à Paris 9 arrêtés sur 10 ont été suspendus par la justice administrative, ce qui tend à montrer que c'était peut-être beaucoup de communication ?
MARISOL TOURAINE
Ce qui prouve qu'il faut toujours être très attentif au respect des procédures de droit, c'est ce qu'a dit le tribunal et nous prenons acte de cette décision, les forces de l'ordre font un travail considérables, toutes les violences je le répète toutes les violences doivent être combattues et condamnées et, lorsque des policiers sont suspectés d'avoir commis des actes de violence contre certains manifestants, la police des polices se saisit de l'affaire et des sanctions peuvent être prononcées.
YAËL GOOSZ
Côté manif moins de monde dans la rue, six fois moins hier que le 31 mars, est-ce que vous voyez le bout du tunnel ?
MARISOL TOURAINE
La manifestation c'est un droit démocratique, c'est un droit constitutionnel, et chacun doit pouvoir exprimer ses positions, ses convictions, ses inquiétudes et ses engagements, mais
YAËL GOOSZ
Est-ce que vous dites que ça s'essouffle ?
MARISOL TOURAINE
Moi je ne suis pas là pour compter le nombre de manifestants
YAËL GOOSZ
Vous ne voulez pas le dire ?
MARISOL TOURAINE
Je suis extrêmement attentive à ce qui se passe dans le pays et je crois qu'il y a des inquiétudes légitimes, de bonne foi, auxquelles il faut pouvoir apporter des réponses. Mais le débat a eu lieu, des évolutions sont intervenues sur la loi Travail puisque c'est d'elle dont nous parlons des aménagements, des amendements ont été adoptés en commission et donc cette loi elle poursuit son parcours parlementaire, rien ne justifie
YAËL GOOSZ
Donc vous dites vivement juillet, le dernier 49.3 le juillet, vous dites ça ?
MARISOL TOURAINE
Rien ne justifie la violence, parce que je fais la différence entre des manifestants qui expriment leurs positions et leurs convictions et ceux qui sont dans les rangs des manifestants pour casser et pour discréditer, ce temps-là il est important, il faut que chacun assume ses responsabilités et nous allons de l'avant, le président de la République l'a dit : « nous devons aller de l'avant » parce que ce n'est pas en reculant qu'on permettra à notre pays d'affronter les défis qui sont les siens aujourd'hui.
GUY BIRENBAUM
Il y a un autre conflit social qui vous concerne très directement madame TOURAINE, le coup de gueule des buralistes, car le paquet neutre de cigarettes arrive ordonnance ce matin que vous présentez en conseil des ministres rappel pour nos auditeurs : qu'est-ce qui va changer vendredi ?
MARISOL TOURAINE
Vous avez raison ! Le 20 mai, c'est-à-dire vendredi, les fabricants de tabac vont devoir commencer à produire des paquets neutres pour les bureaux de tabac français. Le paquet neutre, c'est quoi ?
GUY BIRENBAUM
Pour nos auditeurs, vous le montrez-là sur le live de France Info.
MARISOL TOURAINE
C'est un paquet de cigarettes qui ne comporte plus de signe distinctif ! Pourquoi le paquet neutre ? Parce qu'on sait que, en particulier pour les jeunes, pas uniquement pour eux, tout ce qui est marketing a un impact phénoménal et donc on est sensible à la couleur d'un paquet, à la marque, au logo, à la forme du paquet et c'est ce marketing qu'il s'agit de casser, à partir du 20 mai donc les paquets neutres vont commencer à arriver mais les bureaux de tabac ont six mois, en fait sept mois - un peu plus pour écouler leurs stocks, s'adapter, et donc
GUY BIRENBAUM
Mais ils vont disent : « comment on va faire ? On va perdre ! On va perdre forcément en vente », ils sont inquiets les buralistes, ils menacent de bloquer les stocks pendant l'Euro.
MARISOL TOURAINE
Ecoutez, lorsque j'ai annoncé ma volonté de mettre en place le paquet neutre, les bureaux de tabac se sont entendre et c'était leur droit ils ont interpellé les parlementaires en disant : « mais le paquet neutre ça ne sert à rien, ce nest pas efficace », aujourd'hui ils reconnaissent que l'efficacité peut être là et ils imaginent que cette efficacité va être spectaculaire puisqu'ils parlent d'un effondrement de leur chiffre d'affaires, donc nous devons évidemment travailler à l'avenir du métier de buraliste. Mais moi je veux dire que ma priorité aujourd'hui c'est de faire en sorte que le tabac régresse en France, parce que le tabac tue plus en France qu'ailleurs, parce qu'il y a plus de fumeurs en France qu'ailleurs, que c'est
YAËL GOOSZ
Vous n'allez pas vous faire que des amis, notamment à droite, écoutez ce que Nicolas SARKOZY disait sur le sujet début février.
NICOLAS SARKOZY, EXTRAIT INTERVENTION EN FÉVRIER 2015
Si vous l'acceptez le paquet neutre pour les cigarettes mais vous aurez demain des intégristes qui vous demanderont la bouteille neutre et puis on aura aussi le fromage neutre, c'est la bataille de notre identité, c'est la bataille de notre histoire.
YAËL GOOSZ
Vous faites la grimace quand vous entendez ça ?
MARISOL TOURAINE
J'ai envie de sourire ! Parce que ce qui prouve que lorsque l'opposition politique devient systématique, elle perd parfois le sens de la mesure et Nicolas SARKOZY a perdu le nord, parce que moi je ne connais personne qui soit mort en mangeant trop de fromage, en revanche il y a 80.000 personnes qui meurent du tabac chaque année en France. C'est pour cela que vendredi entre en application en France la directive européenne anti-tabac, au-delà du paquet neutre
YAËL GOOSZ
Oui, et pourquoi vous ne le taxez pas davantage le tabac puisque c'est du tabac coloré, parce que c'est qui est efficace ?
MARISOL TOURAINE
Mais nous n'allons pas en rester là et nous allons prendre d'autres mesures
YAËL GOOSZ
Ah !
MARISOL TOURAINE
Parce que cette lutte contre le tabagisme elle suppose que nous agissions dans différentes directions : d'abord je vais créer un fonds de prévention du tabagisme pour renforcer les mesures de prévention dès cette année, nous le dotons de 32 millions d'euros, ce qui nous permettra de mettre en place toute une série d'actions ; ensuite, nous relançons des campagnes d'information et dès les prochaines semaines il y aura une campagne d'information pour aider les fumeurs qui le souhaitent à arrêter de fumer, 6 fumeurs sur 10 disent qu'ils veulent arrêter de fumer, Tabac info service - le numéro 39.89 - est très efficace - et depuis qu'il propose un suivi sur Smartphone les résultats sont très spectaculaires, 30 % des personnes qui se font suivre par Tabac info service ont arrêté de fumer plusieurs mois, lorsqu'on leur demande plusieurs mois après avoir terminé cette démarche. Donc, nous relançons cette campagne ; et puis
YAËL GOOSZ
Et puis à l'automne, à l'automne une sorte de Téléthon anti-tabac, qu'est-ce que c'est ?
MARISOL TOURAINE
A l'automne il y aura un Téléthon, si ce n'est qu'on ne demandera pas d'argent, un moi (s) sans tabac, moi, moi, m.o.i .
YAËL GOOSZ
Quel moi ? Quel mois ?
MARISOL TOURAINE
M.o.i, le mois de novembre, et avec un S entre parenthèse, un moi (s) sans tabac pour avoir une démarche collective, là c'est inspiré de ce que les Anglais ont fait et les Anglais ont de très bons résultats dans la lutte contre le tabagisme au fond c'est de se dire : « dans 15 jours tout le monde arrête, essaie d'arrêter de fumer dans trois jours et puis ça y est c'est parti le 1er novembre et pendant un mois on se tiendra les coudes, on se soutiendra » et on sait que ce la donne plus de chance à ceux qui veulent arrêter, de réussir dans le sevrage tabagique
YAËL GOOSZ
Elle aussi à arrêter de fumer, c'est Marine LE PEN, qui drague l'hôpital Julien LENGLET en parlait à 7 h 30 le FN vous qualifie de ministre autiste, elle écrit une longue lettre Marine LE PEN de soutien aux infirmières et aux aides-soignants, d'après le CEVIPOV 1 agent sur 4 de la fonction publique hospitalière est prêt à voter Marine LE PEN l'an prochain. Est-ce que c'est votre échec, ça, Marisol TOURAINE ?
MARISOL TOURAINE
Le Front national joue des peurs, des inquiétudes et moi je veux dire à tous ceux qui travaillent à l'hôpital qu'ils font un métier magnifique et que je leur exprime ma confiance et que je leur apporte mon soutien. Je l'ai fait concrètement !
YANN GOOSZ
Mais ça c'est comme pour les policiers, ça ne suffit pas, il faut du sonnant et du trébuchant.
MARISOL TOURAINE
Je l'ai fait concrètement ! Et il y en a eu, et il y en aura, et il y en a eu. Mais d'abord reconnaître l'hôpital public, sauver les hôpitaux de proximité, c'est pour cela que je mets actuellement en place des groupements hospitaliers de territoire pour que les plus petits hôpitaux puissent s'appuyer sur les grandes structures et donc l'avenir des hôpitaux dans les territoires, dans les territoires ruraux en particulier mais pas seulement soient assurés et soient confortés. Par ailleurs, nous avons engagé
YANN GOOSZ
Qui veut financer le dégel du point d'indice des fonctionnaires à l'hôpital, c'est qui ?
MARISOL TOURAINE
Eh bien c'est l'hôpital, c'est le
YANN GOOSZ
Ah ! Qui fera ses économies pour payer plus cher les fonctionnaires ?
MARISOL TOURAINE
Mais nous l'avons engagé, mais nous faisons déjà des économies et donc nous avons engagé des revalorisations. Parce qu'au-delà du point d'indice, depuis 2012, deux actions ont été engagées : la première, c'est celle de recrutement de personnel soignant, parce que personne ne peut dire qu'il y a trop de monde à l'hôpital - lorsqu'on a été hospitalisé on sait la lourdeur de la tâche des infirmières, des aides-soignantes, des professionnels de santé - et donc je dis : « Attention à ceux, à droite en particulier, qui annoncent que, s'ils revenais au pouvoir, ils diminueraient le nombre de fonctionnaires », nous avons augmenté de 23.000 le nombre de soignants dans les hôpitaux publics ; et puis nous avons pris, deuxième axe, des mesures sonnantes et trébuchantes, je vous donne un exemple, pour les personnes qui sont les personnels de santé qui sont en catégorie C donc qui sont à peu près autour du SMIC cela représente en deux ans une revalorisation de 480 euros net par an, c'est près de 500.000, un peu plus de 400.000 pardon de personnes à l'hôpital public qui sont concernées par cette revalorisation, une infirmière ou un infirmier c'est une revalorisation qui va de 250 à 500 euros par an net selon son échelon. Donc les revalorisations elles sont là, au-delà ou indépendamment du point d'indice, et c'est un élément que je veux souligner parce qu'il n'est pas vrai que le soutien à l'hôpital public c'est simplement un engagement politique ou un soutien moral, c'est aussi un engagement financier et des espèces sonnantes et trébuchantes.
YANN GOOSZ
Très rapidement Marisol TOURAINE, deux questions de santé publique.
GUY BIRENBAUM
Qu'est-ce qu'on fait avec le glyphosate, madame TOURAINE, si l'Europe là demain ou aujourd'hui décide qu'on le réintroduit ?
MARISOL TOURAINE
Le président de la République a dit très clairement lors de son intervention à l'occasion de la dernière conférence environnementale que le glyphosate ne serait pas autorisé en France parce qu'indépendamment aujourd'hui
GUY BIRENBAUM
Même si Bruxelles le décide ?
MARISOL TOURAINE
Indépendamment des débats sur le caractère cancérigène ou non du glyphosate nous considérons que c'est un perturbateur endocrinien, enfin les analyses ce n'est pas que nous considérons les études dont nous disposons montrent que c'est un perturbateur endocrinien, d'autres études sont attendues pour 2017, mais en tout cas nous ne renouvelons pas en attendant ces nouvelles études, nous ne renouvelons pas l'autorisation pour le glyphosate.
GUY BIRENBAUM
Mais, pardon, on enlève tous les Roundup par exemple des rayonnages, désormais il y a .300 produits qui contiennent du glyphosate, c'est énorme ?
MARISOL TOURAINE
Il n'y aura pas d'autorisation pour le glyphosate.
YANN GOOZ
Le vaccin Ebovac 2 contre le virus Ebola est-il dangereux, il y a un essai clinique en cours qui a été suspendu hier après des problèmes neurologiques constatés sur un patient ?
MARISOL TOURAINE
Le vaccin suit son cours, pour le moment il n'est pas administré à des personnes qui ne sont pas malades dans les pays concernés, c'est un essai clinique et il a été suspendu. Moi je veux saluer la réactivité des équipes, puisqu'elles ont immédiatement signalé la situation au ministère et aux autorités sanitaires et qu'elles ont commencé à étudier ce qui est en cause et il semblerait mais moi je suis extrêmement prudente il semblerait que l'incident qui a été identifié ne soit pas lié à l'administration du vaccin, mais les études se poursuivent, les experts indépendants vont se prononcer et donc pas d'inquiétude, en tout cas les équipes qui portent ce vaccin sont extrêmement attentives à faire en sorte que tout se passe de la manière la plus sécurisée qui soit. Je rappelle qu'Ebola
YANN GOOSZ
D'un mot ! D'un mot.
MARISOL TOURAINE
C'est un grand défi de santé publique.
YANN GOSZ
Lapsus de François HOLLANDE hier : « ça y est la campagne peut commencer », il est candidat ?
MARISOL TOURAINE
Il a dit qu'il l'annoncerait à la fin de l'année, donc je lui laisse son temps
YANN GOOSZ
Oh ! Secret de polichinelle maintenant ?
MARISOL TOURAINE
En tout cas il est là pour rappeler l'action qu'il a engagée, montrer le cap qu'il suit
YANN GOOSZ
Rappeler que ça va mieux !
MARISOL TOURAINE
Ca va mieux !
YANN GOOSZ
Ah !
MARISOL TOURAINE
Les indicateurs sont là et même si ça ne va pas mieux pour tout le monde. Vous savez moi ce qui me frappe c'est que et encore une étude le montrait hier lorsque vous demandez aux Français si ça va bien pour eux, ils disent oui massivement et ils sont inquiets pour la France, il est temps de transformer cet optimisme individuel en optimisme collectif et national
YANN GOOSZ
Et politique !
MARISOL TOURAINE
Et c'est à cela que nous travaillons.
FABIENNE SINTES
Merci beaucoup Marisol TOURAINE.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80326|
Je salue la libération ce mercredi de Nadia Savtchenko et de plusieurs autres prisonniers. Au cours des derniers mois, la France a plaidé sans relâche auprès des responsables russes en faveur de cette libération et, plus largement, en faveur de l'échange de tous les prisonniers selon le principe de «tous contre tous», agréé à Minsk le 12 février 2015.
La France, aux côtés de l'Allemagne, poursuivra ses efforts visant à la mise en oeuvre du Paquet de mesures de Minsk.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80327|
ARLETTE CHABOT
Bonjour Marisol TOURAINE.
MARISOL TOURAINE
Bonjour Arlette CHABOT.
ARLETTE CHABOT
Alors, cette actualité de ce matin, il y a une incertitude évidemment, accident, terrorisme, nous rappelle qu'il y a effectivement la possibilité, cette hypothèse du terrorisme, et donc qu'il y a une menace qui pèse toujours sur la France.
MARISOL TOURAINE
Oui, mais tout d'abord permettez-moi d'exprimer mes pensées aux familles des victimes, j'imagine l'angoisse dans laquelle elles sont aujourd'hui, à l'instant où nous parlons, plongées, et le gouvernement a immédiatement réagi. Le président de la République s'est entretenu avec son homologue égyptien, nous avons mis en place une cellule de crise au ministère des Affaires étrangères, et une cellule de soutien psychologique, médicale, psychologique, s'est mise en place à Roissy, à l'aéroport de Paris, pour soutenir, accompagner, prendre en charge, les familles qui en éprouveraient le besoin. A l'heure à laquelle nous parlons aucune hypothèse ne peut être écartée, tout doit être envisagé, mais il est trop tôt pour se prononcer, donc laissons l'enquête avancer, les choses vont se faire maintenant dans les heures qui viennent, évidemment, j'insiste, aucune hypothèse ne peut être écartée.
ARLETTE CHABOT
Alors, cette hypothèse d'un attentat nous ramène donc, je le disais, aux risques, ce qui rend encore plus insupportable, sans doute, les attaques contre les policiers. Comment avez-vous réagi hier en voyant cette image épouvantable d'une attaque contre une voiture de police, avec deux policiers à l'intérieur, comment vous avez réagi, comment vous qualifiez ?
MARISOL TOURAINE
Par la colère, la colère parce que ce que j'ai vu, ce qui a été fait hier après-midi, ce dont ont été victimes ces policiers, dont un a été blessé, c'est simplement inacceptable, intolérable. On a, face aux forces de police, qui sont engagées, comme vous l'indiquiez, qui sont engagées au quotidien, dans un contexte difficile, tendu, de menaces terroristes, de menaces contre la France, et contre les Français, nous avons affaire à des professionnels de la destruction, de la casse, de l'agression. Ce ne sont pas des manifestants qui sont engagés pour des idées, pour un projet, qui veulent revendiquer simplement. Nous sommes dans un pays de droit, nous sommes dans un pays libre, nous sommes dans une démocratie, et on peut revendiquer, on peut manifester, on peut demander, c'est la chance et la force de notre pays, mais on ne peut pas, on ne doit pas accepter des violences telles qu'elles se sont déroulées hier après-midi, et elles ne sont, d'ailleurs, pas acceptées. Le gouvernement est mobilisé, le ministre de l'Intérieur, personnellement, est engagé, les forces de police, la justice, pour interpeller et pour juger.
ARLETTE CHABOT
C'est l'autorité de l'Etat aussi, Marisol TOURAINE
MARISOL TOURAINE
Non, l'autorité de l'Etat
ARLETTE CHABOT
ou des questions se posent sur la capacité ou non du gouvernement à maintenir l'ordre.
MARISOL TOURAINE
L'autorité de l'Etat elle est là, l'autorité de l'Etat elle ne fait pas défaut. Les interpellations ont lieu, les jugements sont prononcés, des peines, lourdes parfois, sont appliquées, donc il n'y a pas de leçon à recevoir de la part de certains, parce que j'entends effectivement monter, à droite en particulier, l'idée que le gouvernement n'agirait pas, le gouvernement agit. Le gouvernement agit pour protéger les manifestants et pour punir, sanctionner, ceux qui viennent, à la fois perturber l'ordre public, et empêcher les manifestants de le faire dans de bonnes conditions.
ARLETTE CHABOT
Ce ne sont pas des casseurs qu'on voyait autrefois dans les manifestations, ou des gens qui venaient par exemple de banlieue qui venaient pour piller et casser, ce sont des militants politiques qui assument. Ça veut dire que s'ils appartiennent à des mouvements il faut les dissoudre, par exemple ?
MARISOL TOURAINE
Il faut examiner les situations, tout ce qui vient porter atteinte à l'ordre public est un enjeu, effectivement, et de sécurité, et de démocratie. Il n'y a aucune raison d'accepter des actes d'une violence inouïe, je le répète, c'est d'une violence inouïe. Et on ne peut pas considérer que dans notre pays il n'y ait pas tous les moyens de droit pour faire valoir des positions, et, en réalité, les seuls positions politiques qu'expriment ces personnes dont on ne voit pas le visage, dont on ne connaît pas l'identité, dont on ne connaît pas d'autres revendications que celle de casser, c'est ce qu'ils disent, « nous revendiquons la liberté de casser. » Cette liberté-là, dans un Etat de droit, elle n'existe pas.
ARLETTE CHABOT
La question est, selon vous, posée, de la poursuite du mouvement, des manifestations organisées par les syndicats contre la loi Travail, ils doivent s'interroger, les responsables syndicaux, la CGT, FO ?
MARISOL TOURAINE
Tout le monde doit s'interroger, tout le monde doit regarder ce qui se passe, le ministre de l'Intérieur, le gouvernement, vont évidemment regarder de manière encore plus attentive, encore plus précise, les conditions dans lesquelles se déroulent les manifestations, mais attention, il y va à la fois de notre capacité à vivre ensemble, de notre démocratie. Honnêtement, personne, je dis bien personne, n'a à gagner quoi que ce soit aux images que nous avons vues hier sur les écrans de nos télévisions.
ARLETTE CHABOT
Il y a une extrême gauche qui veut abattre la gauche au pouvoir, ou la gauche qui exerce le pouvoir aujourd'hui ?
MARISOL TOURAINE
Il y a une gauche qui ne comprend pas l'exercice du pouvoir, mais cette gauche-là, cette extrême gauche-là, elle n'est pas toute, quand même, elle ne se reconnaît pas toute dans les mouvements de casseurs. Moi je ne fais pas l'amalgame entre ces mouvements, ultra minoritaires, ultra violents, qui sont dans la destruction, l'agression, et éventuellement même des actes de mort, parce que hier ils auraient pu tuer, je ne fais pas l'amalgame entre ces mouvements-là
ARLETTE CHABOT
C'était leur volonté, d'ailleurs, de tuer.
MARISOL TOURAINE
Ultra minoritaires, et une gauche, même extrême, qui ne veut pas gouverner, qui est dans la revendication, qui est dans la contestation d'un gouvernement de gauche au pouvoir. Mais, pour faire avancer, et c'est là que nous en venons à la réalité sociale de notre pays, pour faire avancer notre pays, pour engager des actions de progrès social, pour permettre à notre pays de créer des emplois, d'être compétitif, d'être actif, d'être dynamique dans la compétition internationale, nous avons besoin d'assumer les responsabilités. Et nous les assumons pleinement, c'est-à-dire avec ce que cela a de difficile, avec ce que cela a parfois d'exigeant, et nous l'assumons parce que c'est la seule manière de transformer l'ordre social et de transformer notre pays, ce n'est pas en contestant, c'est en agissant.
ARLETTE CHABOT
Alors, Marisol TOURAINE, on en arrive à votre dossier. Demain les fabricants de cigarettes vont devoir mettre ces cigarettes dans des paquets neutres, anonymes, il n'y a plus de marque.
MARISOL TOURAINE
Le paquet neutre c'est ça.
ARLETTE CHABOT
Pourquoi vous croyez, vous, que ces paquets neutres, c'est-à-dire la marque toute petite, vont permettre d'arrêter de fumer, vont réduire la consommation de tabac, parce que les Français fument beaucoup, la consommation est plus forte en France qu'ailleurs ?
MARISOL TOURAINE
Les Français fument plus que les Anglais, les Allemands ou d'autres, je ne parle même pas des Australiens, et le tabac tue en France, 80.000 personnes chaque année, les jeunes, notamment, rentrent dans le tabac. Le paquet neutre c'est quoi ? D'abord ce n'est pas très beau, c'est laid, franchement
ARLETTE CHABOT
C'est laid, oui.
MARISOL TOURAINE
Et c'est fait pour
ARLETTE CHABOT
Qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse, l'ivresse elle est dedans, elle reste dedans.
MARISOL TOURAINE
Oui, mais l'objectif c'est de casser le côté attractif de beaucoup de paquets de cigarettes. Aujourd'hui, vous savez, les paquets de cigarettes, les marques de cigarettes, elles jouent, elles font du marketing, et elles envoient des messages, « vous êtes une femme, prenez une cigarette qui sera longue, fine, agréable, et qui vous donnera de l'allure, du chic », c'est cela qu'il faut casser. Toutes les cigarettes se valent, c'est du poison, un poison de mort, et peu importe le paquet, ce qu'il y a à l'intérieur ça tue.
ARLETTE CHABOT
Mais, il y a une mesure, Marisol TOURAINE, c'est tout simplement augmenter le prix du tabac. Vous ne voulez pas, ou vous ne pouvez pas, augmenter le prix du tabac ? C'est le plus dissuasif. Le modèle du paquet neutre c'est l'Australie, en Australie le paquet de cigarettes il est très cher.
MARISOL TOURAINE
Il a été augmenté après, et, vous savez, moi je suis tout à fait ouverte à ce débat, je porte l'idée d'une augmentation du prix du tabac. Lorsque j'ai annoncé la mise en place du paquet neutre j'ai indiqué que le prix du tabac n'augmenterait pas de manière significative avant que le paquet neutre ne soit mis en place, mais je me réjouis de ce débat, parce que lorsque j'ai lancé l'idée du paquet neutre on m'a dit « il y a deux choses qu'il ne faut pas faire, le paquet neutre d'une part, et d'autre part l'augmentation du prix du tabac parce que ça favorise la contrebande. » Alors si aujourd'hui, à la faveur de la mise en place du paquet neutre tout le monde me dit « en fait ce qu'il faut c'est augmenter le prix du tabac », alors c'est formidable, ça veut dire que tout le monde est prêt à s'engager.
ARLETTE CHABOT
On va terminer par ce qui se passera tout à l'heure, c'est-à-dire une conférence consacrée au handicap, avec le président de la République.
MARISOL TOURAINE
Au handicap, aujourd'hui. Le président de la République est engagé
ARLETTE CHABOT
Avec une mesure ?
MARISOL TOURAINE
Oui, le président est engagé fortement, nous avons pris de nombreuses mesures depuis 2012, il en a annoncera de nouvelles, et je lui laisse évidemment la primeur de ces annonces, mais l'une de ces mesures consistera, je peux vous en donner disons l'avant-goût, consistera à revoir le système de prime d'activité pour les personnes handicapées, c'est du pouvoir d'achat en plus pour les salariés qui ont des revenus modestes. Il se trouve qu'aujourd'hui dans le calcul de la prime d'activité on ne prend pas en compte l'allocation pour les personnes handicapées, nous allons la prendre en compte. Concrètement, une personne handicapée, qui a cette allocation, et qui travaille à mi-temps, aujourd'hui elle n'a pas de prime d'activité, demain, à partir du 1er juillet concrètement, le président de la République le dira, elle aura droit à la prime d'activité et pour elle un demi-SMIC d'activité et l'allocation handicapé, cela voudra dire une prime de 135 euros par mois, c'est donc un progrès concret, du pouvoir d'achat en plus, pour des personnes qui sont en situation de handicap.
ARLETTE CHABOT
135 euros par mois en plus.
MARISOL TOURAINE
Pour quelqu'un qui est à mi-temps, au SMIC.
ARLETTE CHABOT
Merci beaucoup Marisol TOURAINE d'être venue ce matin.
MARISOL TOURAINE
Bonne journée à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80328|Mesdames et Messieurs les Députés, Monsieur le Député,
Je tiens tout d'abord à excuser M. le ministre de l'intérieur, retenu pour honorer la mémoire d'un militaire du GIGN.
Vous l'avez dit, après les attentats du 13 novembre, la Commission européenne a accepté de répondre à une demande que le ministre de l'intérieur avait formulée au nom de la France visant à réviser la directive de 1991 sur les armes à feu.
Cette proposition est désormais en cours de négociation sur le plan européen et nous espérons parvenir à un accord sur le texte d'ici la fin du mois de juin.
Les priorités fixées par la France figurent très nettement dans le texte de la Commission et visent en particulier à accroître le contrôle des transactions commerciales des armes à feu - notamment sur internet - à assurer une meilleure traçabilité de ces dernières sur le territoire européen jusqu'à leur destruction, à élargir le champ d'application de la directive en incluant les collectionneurs et les armes neutralisées, à une uniformisation du marquage, à une interopérabilité des systèmes d'information dans le flux des transferts d'armes au sein de l'Union européenne et à l'interdiction des armes semi-automatiques les plus dangereuses car la directive précédente visait essentiellement les armes automatiques.
Aujourd'hui, la législation de certains États membres est encore beaucoup trop souple, qui permet d'acquérir des armes à feu sans contrôle strict sur les personnes cherchant à les détenir. Des armes circulent dans l'espace européen et nourrissent donc les filières de la grande criminalité, voire le terrorisme.
Notre objectif est donc de renforcer l'encadrement des armes légales sur le plan européen. Sur ce point, Monsieur le Député, je tiens à lever toute ambiguïté : la France n'a pas pour objectif d'interdire la détention d'armes à feu à des publics tels que les chasseurs ou les tireurs sportifs que vous avez évoqués, pour autant que des contrôles soient effectifs et que les personnes concernées appartiennent à une fédération ou à une association reconnue par les pouvoirs publics - ce qui est déjà le cas en France.
Nous voulons lutter contre tout type de trafic d'armes pouvant être utilisées par les terroristes ou par des criminels au sein de l'Union européenne.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80329|
« Les personnes handicapées peuvent être touchées dans leurs 5 sens, mais c'est un 6ème qui les délivre ; bien au-delà de la volonté, plus fort que tout, sans restriction, ce 6ème sens qui apparaît, c'est simplement l'envie de vivre. » A travers ces paroles, Grand corps malade a posé des mots sur une solide conviction, celle qui nous rassemble toutes et tous ce matin. La conviction que le handicap n'altère en rien la volonté d'un individu de trouver une place à part entière dans la société, de s'y accomplir, de s'y émanciper d'y participer, aussi. « Rien me concernant, sans moi », « rien pour moi, sans moi ».
Cette envie de vivre sa vie comme les autres, pour s'accomplir pleinement, doit rencontrer un engagement politique sans faille. Cet engagement, c'est celui de ce Gouvernement et c'est celui du Président de la République qui a fait le choix de réunir à l'Élysée cette conférence nationale du handicap.
1. Nous réunir dans ce lieu ne relève pas du symbole mais traduit une ambition. Celle d'emmener toute la société, l'ensemble des forces vives de la Nation, vers une société inclusive.
Ce fut l'un des axes forts du discours tenu ici même par le Président de la République en décembre 2014. Une feuille de route exigeante, 178 mesures, et derrière cela, l'ambition de construire ensemble une société inclusive.
Il ne s'agit pas d'un slogan, ni d'une simple promesse, mais d'un engagement : garantir à chacun, quelle que soit sa situation de handicap, la possibilité de vivre dignement et d'exercer sans entrave tous les droits que confère la citoyenneté. Le droit de voter, le droit de travailler, le droit d'accéder à des soins de qualité, le droit de recevoir un enseignement diversifié. Ces droits, qui appartiennent à tous, doivent pouvoir être exercés par chacun.
L'ambition de ce Gouvernement, c'est aussi de proposer des parcours et des soins adaptés, pour que plus personne ne soit contraint de rester « sans solution ». Notre ambition, c'est enfin de simplifier le quotidien des personnes en situation de handicap, notamment dans l'accès aux droits.
2. Depuis la conférence de décembre 2014, un chemin a été parcouru. Il s'agit aujourd'hui de le regarder ensemble, avec la même ambition d'avancer.
Les engagements ont été tenus. Le document de bilan qui vous a été remis en témoigne. Je tiens à saluer la mobilisation du secrétariat général du comité interministériel du handicap qui coordonne ces actions et veille à la bonne mise en uvre de ces engagements.
Chaque ministère est pleinement mobilisé. Les différents ministres auront l'occasion de témoigner leur engagement très fort dans les secteurs de l'éducation, de l'emploi ou du logement.
Je veux évidemment pour ma part revenir sur ce que nous avons réalisé dans le domaine des affaires sociales et de la santé. Les modes d'accompagnement des personnes handicapées ont été réformés en profondeur par la loi de modernisation de notre système de santé, avec le plan personnalisé de compensation du handicap et le plan d'accompagnement global. Les outils à destination des gestionnaires d'établissements ont été renforcés pour mieux adapter l'accompagnement à travers la récente réforme des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM). Enfin, le plan autisme a profondément amélioré l'accompagnement des personnes en situation de handicap.
Agir pour l'accompagnement, donc. Agir pour l'accès aux soins, aussi.
Nous avions pris l'engagement de faciliter la prise en compte du handicap en ville. C'est chose faite avec la mise en place de consultations dédiées aux personnes aux situations de handicap au sein des maisons de santé pluriprofessionnelles. Cette disposition, couplée à la vitesse exponentielle avec laquelle nous développons ces structures, va considérablement renforcer l'accès aux soins des personnes handicapées sur l'ensemble du territoire.
Nous avions pris l'engagement de développer la télémédecine et l'hospitalisation à domicile. J'ai la conviction qu'il s'agit là d'une voie incontournable pour renforcer la qualité et le confort dans la prise en charge des patients, particulièrement pour celles et ceux qui sont accueillis en établissement médico-social et en psychiatrie. Une évaluation de la montée en charge de l'hospitalisation à domicile dans les établissements médico-sociaux a été réalisée par mes services. Un rapport d'évaluation me sera remis d'ici peu et nous continuerons d'avancer.
Enfin, l'accueil dans les établissements de santé doit lui aussi être renforcé. La Haute autorité de Santé (HAS) a entamé l'élaboration d'un guide relatif à la prise en charge des personnes handicapées dans les établissements de santé. Celui-ci permettra d'améliorer les pratiques professionnelles et d'adapter l'organisation des soins.
3. Oui, il faut le dire, les actes et les réalisations sont là. Mais cette nouvelle donne ne peut être un prétexte à l'inaction. Au contraire, il nous faut poursuivre, amplifier le mouvement. Le sens de cette Conférence nationale du Handicap, c'est bien d'aller plus loin encore, en nous appuyant sur les réalisations de terrain qui montrent que oui « c'est possible ».
Je veux tiens à saluer l'ensemble des associations qui sont présentes ce matin et qui ont contribué à l'organisation de cet événement qui nous rassemble.
Toute la matinée, à travers différentes tables rondes, nous aurons à cur aborder l'ensemble des thématiques liées aux politiques du handicap. Logement, emploi, scolarisation : les expériences de chacun, la mobilisation des acteurs de terrain et leur capacité d'innovation sont déterminantes. Parce qu'elles contribuent à renforcer notre conviction qu'une société inclusive est possible, et parce qu'elles élargissent le champ des possibles.
Je souhaite donc que ces échanges nous permettent d'avancer encore, de ne rien éluder, de regarder en face les obstacles qui se présentent encore à l'application de certaines mesures pour les franchir ensemble.
Mesdames, messieurs,
« Ensemble », j'attache à ce terme un sens particulier s'agissant du sujet qui nous réunit ce matin. Parce que les politiques d'accompagnement des personnes handicapées nécessitent un engagement collectif pour se déployer. Mais aussi parce que pour certains, elles ne vont toujours pas de soi. Face à la volonté de certains de tourner en dérision les normes d'accessibilité des logements, et d'opposer l'intérêt des communes à l'épanouissement des personnes handicapées, c'est bien ensemble que nous marquerons notre détermination à continuer d'avancer.
Je vous souhaite une matinée riche en échanges et vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 24 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80330|
Mesdames, Messieurs,
Le 10 janvier dernier et dans les jours qui ont suivi, un accident s'est produit dans le cadre d'un essai clinique de Phase 1 réalisé dans et par la société BIOTRIAL à Rennes. Cet évènement, sans précédent dans notre pays, a entraîné le décès d'un homme, et l'hospitalisation de cinq autres volontaires, qui sont aujourd'hui tous rentrés chez eux. Mes pensées sont évidemment tournées vers Monsieur Guillaume Molinet, sa famille, ses proches, et les volontaires victimes de cet accident.
Dès que j'ai eu connaissance de cet accident, je me suis rendue sur place pour rencontrer les victimes et leurs familles, et m'assurer de leur prise en charge complète sur le plan sanitaire et social. Dans le cadre de cette prise en charge sanitaire, j'avais demandé au Directeur général de l'ARS d'identifier et de contacter les 90 volontaires ayant participé à cet essai depuis son lancement. Ils ont tous eu rendez-vous avec un neurologue et ont fait l'objet d'une IRM qui a permis de découvrir, chez l'un d'entre eux, un accident vasculaire cérébral. Ce volontaire se porte bien et ne présente pas de symptôme, mais cette situation interroge évidemment quant à sa relation avec la participation à l'essai j'y reviendrai.
J'ai par ailleurs immédiatement saisi l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et me suis engagée à la transparence la plus totale. Le 4 février dernier, je vous ai présenté un premier point de situation. Les inspecteurs de l'IGAS viennent de me remettre leur rapport final qui a fait l'objet d'une procédure contradictoire.
Entre temps, le comité scientifique spécialisé temporaire (CSST) de l'ANSM, qui avait lancé une procédure, a mis en évidence la probable responsabilité de la molécule quant à l'accident. Je rappelle par ailleurs qu'une procédure judiciaire est en cours sous l'autorité d'un juge d'instruction.
A la lumière du rapport qui m'a été remis par l'IGAS, je veux aujourd'hui vous présenter un plan d'action que je souhaite mettre en uvre quant à la réalisation d'essais cliniques en France.
I- La mission confiée à l'IGAS avait pour objet d'établir les conditions dans lesquelles il avait été fait application de la réglementation en matière de recherche biomédicale.
L'IGAS constate d'abord que l'Agence régionale de santé de Bretagne avait bien accordé à la société BIOTRIAL une autorisation de lieu répondant aux exigences requises.
Le rapport final confirme que les conditions dans lesquelles l'essai a été autorisé ne contreviennent pas à la réglementation dans son état actuel, même si des interrogations sont soulevées quant à l'appréciation du niveau de risque du produit par l'ANSM et le CPP, la latitude laissée aux opérateurs de la mise en uvre de l'étude et la répartition des rôles entre le laboratoire BIAL et BIOTRIAL.
En revanche, les inspecteurs estiment que la responsabilité du laboratoire BIAL et de BIOTRIAL est engagée à plusieurs titres.
- D'abord, quant au choix de la dose de la molécule BIA 10-2474 administrée aux volontaires.
- Ensuite, s'agissant du retard de l'information des autorités sanitaires. Selon les inspecteurs, la gravité de l'évènement survenu constitue un fait nouveau susceptible de compromettre la sécurité des volontaires. Par conséquent, cet accident aurait dû être déclaré sans délai à l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Or, les laboratoires n'ont procédé à une déclaration formelle que le jeudi 14 janvier, soit quatre jours après l'hospitalisation du premier volontaire, et trois jours après la décision de suspendre l'essai.
La responsabilité scientifique et éthique du laboratoire BIAL est par ailleurs engagée quant à son devoir de poursuivre les investigations relatives à la compréhension de l'accident.
Pour l'IGAS, la responsabilité de BIOTRIAL est par ailleurs engagée quant à la conduite de l'étude et la gestion de la crise.
- D'abord, la mission pointe l'absence de recherche d'informations en temps et en heure par le laboratoire sur l'état de santé du premier volontaire hospitalisé et la non suspension de l'administration du produit aux autres volontaires.
- Un second manquement majeur découle directement du premier, les inspecteurs ayant constaté que le laboratoire n'a pas formellement informé les autres volontaires de l'évènement survenu la veille. Cela ne leur a pas permis de confirmer de manière éclairée leur consentement à la poursuite de l'essai clinique.
Au-delà de ces manquements majeurs qui concernent la conduite de l'étude, les inspecteurs soulignent qu'après la suspension de l'étude le lundi 11 janvier, BIOTRIAL n'a pas mis en place de suivi renforcé et systématique des cinq autres volontaires, notamment sur plan neurologique. La mission souligne, enfin, des difficultés d'échanges d'informations entre BIOTRIAL et le CHU de Rennes.
La mission formule 19 recommandations pour mieux comprendre les causes de cet accident grave et reconsidérer le cadre de la protection des volontaires participant à des essais de première administration à l'homme. J'ai décidé de prendre en compte l'intégralité de ces recommandations.
II- Avant de vous présenter ce plan, je veux revenir sur la mise en uvre des actions que je vous avais présentées lors d'un point de situation le 4 février dernier.
L'ensemble des responsables de lieux d'essais cliniques de phase I se sont vu rappeler leurs obligations en matière de déclaration aux autorités sanitaires des évènements indésirables graves inattendus et des faits nouveaux survenus. J'avais adressé une instruction en ce sens aux Directeurs généraux ARS.
Par ailleurs, les promoteurs d'essais cliniques et investigateurs doivent dorénavant, à ma demande, déclarer tout évènement entraînant, dans le cadre d'un essai sur volontaire sain, l'hospitalisation de celui-ci, aux autorités sanitaires sans délai, comme un fait nouveau, et suspendre immédiatement l'étude jusqu'à ce que soit garantie la sécurité des volontaires. Ces mêmes volontaires doivent être clairement informés de la suspension de l'étude et des raisons de cette suspension. Leur consentement éclairé et écrit doit être obtenu avant toute reprise de l'étude.
Je constate d'ailleurs que ces nouvelles directives ont été appliquées à la lettre s'agissant d'un effet indésirable grave survenu il y a peu dans le cadre de l'essai EBOVAC.
Enfin, j'avais saisi Vytenis ANDRYUKATIS, Commissaire européen en charge de la santé, afin que soit engagée une réflexion pour renforcer la protection des volontaires sains dans les essais cliniques. A la suite de mon intervention, deux groupes de travail ont été installés au sein de l'Agence européenne du médicament dans cette optique.
III- J'en viens maintenant au plan d'action que je souhaite mettre en uvre à la suite du rapport définitif qui m'a été remis par l'IGAS.
Ce plan comporte quatre grands axes.
* Premier axe : conformément à la recommandation de l'IGAS, j'exige que BIOTRIAL fournisse un plan d'action garantissant que les manquements majeurs observés ne pourront pas se reproduire.
Ce plan d'action devra m'être remis sans délai. Il devra notamment comprendre les mesures de minimisation des risques telles qu'elles sont précisées par la mission dans son rapport, la mise à niveau des conditions de suivi des participants à la recherche, et le renforcement de la formation de ses personnels, particulièrement en matière de pharmacovigilance.
Si BIOTRIAL ne m'a pas transmis son plan d'action d'ici 1 mois, son autorisation de lieu de recherche pour essai de phase 1 sera suspendue. La réalité de mise en uvre de ce plan d'action fera l'objet d'une inspection conjointe de l'IGAS, de l'ARS Bretagne et de l'ANSM avant la fin de l'année.
* Deuxième axe : je veux que les 90 dossiers cliniques des volontaires sains concernés par l'essai fassent l'objet d'une expertise sanitaire indépendante.
Comme je l'ai dit, à la suite de l'accident, l'ensemble des volontaires ont été pris en charge sur le plan médical, y compris avec une IRM cérébrale. Ce suivi a permis de diagnostiquer un AVC chez un volontaire qui, comme l'indique l'IGAS, avait présenté des troubles visuels lors de sa participation à l'essai en novembre. Désormais, après le temps de la prise en charge, vient celui de l'expertise. Celle-ci sera confiée aux experts indépendants du Comité scientifique spécialisé temporaire (CSST) qui évalueront les 90 dossiers des volontaires. Par ailleurs, ces dossiers, anonymisés, seront également transmis au groupe d'experts européens que j'ai demandé à la Commission européenne et qui est d'ores et déjà au travail.
* Troisième axe : je veux renforcer les conditions d'autorisation des essais, notamment de première administration à l'homme.
En premier lieu, je demande à chaque directeur général d'agence régionale de Santé (ARS) d'inspecter cette année, en lien avec l'ANSM, tous les centres aujourd'hui autorisés à conduire des essais cliniques de leur région.
Ensuite, je veux renforcer les conditions dans lesquelles l'ANSM évalue les essais précoces chez l'homme. Je distingue trois priorités.
D'ores et déjà, l'ANSM devra transmettre, à la Direction générale de la Santé, un bilan mensuel de tous les effets indésirables graves inattendus notifiés dans ces essais de phase précoce, c'est à dire de phases 1 et 2.
Ensuite, je souhaite que les travaux d'amélioration de la gestion informatisée de ces essais cliniques soient accélérés, notamment pour renforcer la traçabilité des évènements indésirables pouvant survenir.
Enfin, je souhaite que d'ici la fin de l'année, une cellule dédiée aux essais précoces, notamment lorsqu'il s'agit de la première administration à l'homme, soit responsable de l'instruction, de l'évaluation finale et de la décision. La complexité de ces essais justifie une expertise pointue et du temps spécifique. Cette nouvelle organisation à l'ANSM devra en particulier garantir la possibilité d'un contact identifié et permanent à l'ANSM. Elle fera l'objet d'une mission d'appui de l'IGAS.
Déjà, la loi de modernisation de notre système de santé avait prévu de renforcer, par ordonnance, les conditions d'autorisation des essais cliniques. Celle-ci permettra la mise en place effective du tirage au sort des Comités de protection des personnes (CPP). Afin de renforcer leur indépendance et d'améliorer leur fonctionnement, un secrétariat national des CPP sera installé auprès de la Direction générale de la Santé. L'industriel n'aura plus de contact direct avec les CPP et aura pour unique interlocuteur l'ANSM, auprès de laquelle il déposera son dossier. Celle-ci effectuera le tirage au sort du CPP et transmettra cette information au secrétariat national. Par volonté de transparence, l'ensemble des avis rendus par le CPP sur un protocole sera désormais à disposition des volontaires de l'essai. L'ordonnance sera publiée avant le 20 juin, et le projet de loi la ratifiant sera transmis au Parlement dans la foulée.
Enfin, la mission a relevé que les obligations d'information des autorités sanitaires qui pèsent sur le promoteur au moment où il dépose son projet ne sont pas suffisantes dans la législation actuelle. Je vais donc clarifier les règles. Le projet de loi de ratification de l'ordonnance introduira des mesures en ce sens. Par ailleurs, les laboratoires devront garantir l'exhaustivité des données relatives à une étude en cours mises à disposition des autorités sanitaires en cas d'impératif de santé publique. D'ici la fin de l'année, des dispositions réglementaires spécifiques aux essais de phase 1 garantiront les délais de signalement des effets indésirables des faits nouveaux, et le fait qu'un essai de première administration à l'homme soit systématiquement considéré comme un essai à haut risque.
* J'en viens au quatrième et dernier axe de ce plan : je vais poursuivre mon action auprès de la Commission européenne.
L'action européenne doit porter tant sur la gestion des crises que l'analyse des pratiques. Elle doit répondre aux trois principes fondamentaux d'indépendance de transparence et d'harmonisation.
Je l'ai indiqué, deux groupes de travail ont été mis en place par l'Agence européenne du médicament. Ils travaillent aux évolutions nécessaires des lignes directrices européennes en matière de recherche sur le volontaire sain. Comme je vous l'ai dit, l'intégralité des examens, évidemment anonymisés, réalisés chez les volontaires de l'essai BIOTRIAL, leur seront transmis. Cela nous permettra de bénéficier d'une expertise complémentaire indépendante sur ces dossiers, et leur donnera un éclairage pour leurs travaux en cours.
Deuxième point, je vais proposer au HMA, le comité des agences nationales du médicament, que soit mises en place des modalités harmonisées d'évaluation et de gestion d'un accident grave comme celui de Rennes au niveau européen. Je souhaite d'autre part que soit menée une analyse comparative des pratiques d'autorisation des essais précoces dans les états membres européens.
Mesdames, Messieurs,
Quatre mois après l'accident dramatique de Rennes, le rapport de l'IGAS permet d'établir les responsabilités et d'identifier les manquements qui ont conduit à cet évènement. Le plan d'action que je viens de vous présenter en tire toutes les conséquences.
Le rapport de l'IGAS, tout comme le plan d'action, sont d'ores et déjà en ligne, conformément à l'exigence de transparence pour laquelle je me suis engagée.
Je vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 24 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80331|
Monsieur le Député, votre question porte sur deux points essentiels : d'une part, la transparence, de l'autre, ce que l'on appelle la «mixité» des accords de commerce, qui conditionne la consultation ou non des parlements nationaux en plus de celle du Parlement européen.
En ce qui concerne la transparence, M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger, Matthias Fekl, a eu l'occasion de rappeler à de nombreuses reprises devant l'Assemblée que le gouvernement souhaitait qu'elle soit totale. Nous avons commencé par demander à la Commission européenne de rendre publics les mandats obtenus pour négocier le TTIP et le TISA au nom des vingt-huit États membres, afin que les parlementaires et les citoyens puissent y avoir accès.
S'agissant de la mixité des accords en question, nous considérons que le CETA, en particulier, est mixte car sa ratification emporte des conséquences sur notre législation interne. Par conséquent, il doit être ratifié non seulement par le Parlement européen, comme c'est le cas pour tous les accords de commerce, mais également par les parlements nationaux.
Le Parlement européen et la Commission européenne auront à se prononcer mais nous sommes fondés à demander une ratification par l'ensemble des parlements nationaux. Concernant le TTIP, qui est encore en cours de négociation et pour lequel nous sommes très loin d'aboutir à un accord, il est absolument évident qu'il devra être ratifié par l'ensemble des parlements nationaux, donc par l'Assemblée nationale.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, votre question va me donner l'occasion de rectifier certaines informations diffusées au cours des dernières semaines. Je tiens d'abord à vous demander d'excuser l'absence de Matthias Fekl, secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, qui est en déplacement à Hong Kong.
La Commission européenne a manifesté en 2015 son souhait de voir rapidement disparaître une centaine d'accords de protection des investissements qui avaient été conclus entre les États membres de l'Union européenne, à l'époque où celle-ci n'en comptait que quinze, et des pays d'Europe centrale et orientale. La France est partie à douze de ces accords dont la Commission considère qu'ils contreviennent au droit communautaire. La fin de ces accords est l'occasion d'appliquer, au sein même de l'Union européenne, les principes que la France, notamment par la voix de Matthias Fekl, a défendus de manière ambitieuse dans les négociations sur les accords de libre-échange, en prônant - avec succès, au demeurant - la rupture avec l'ISDS, c'est-à-dire avec l'arbitrage privé.
Les principes que nous souhaitons voir appliqués sont la transparence, la lutte contre les conflits d'intérêts, la possibilité d'un appel et la protection du droit à réguler des États. Je souligne d'ailleurs que la Cour de justice des investissements, l'Investment Court System - ICS - a été accepté par le Canada et le Vietnam. À terme, l'objectif est de fonder une cour multilatérale des investissements, qui fait cruellement défaut dans la mondialisation.
À l'occasion de la fin des accords de protection des investissements intracommunautaires, la France a soutenu, dans le cadre des groupes de travail techniques du Conseil européen, un document ouvrant plusieurs pistes pour créer un mécanisme transitoire conforme aux principes de l'ICS, en vue de l'établissement d'une cour de justice des investissements au sein de l'Union européenne.
Un mécanisme spécifique est nécessaire dans des circonstances particulières, comme la défaillance de la justice d'un État membre, que la Commission identifiera très précisément. Continuer d'appliquer le droit communautaire sans créer de mécanisme spécifique serait une occasion manquée. Pour l'heure, les principes régissant l'ICS sont absents du droit communautaire aujourd'hui.
Nous appliquons donc aux accords conclus au sein de l'Union européenne les principes que nous avons voulu appliquer dans le cadre des accords multilatéraux. Il s'agit, non pas d'un arbitrage privé, mais d'un arbitrage public.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, rassurez-vous : qu'il s'agisse du CETA, l'accord avec le Canada, ou du TAFTA, l'accord en cours de négociation avec les États-Unis, la France défend les mêmes principes et lignes rouges.
Concernant la négociation avec les États-Unis, que vous avez évoquée, nous avons plusieurs lignes rouges. Premièrement, l'offre américaine doit être beaucoup plus substantielle qu'elle ne l'est aujourd'hui. On ne peut pas, d'un côté, demander à l'Union européenne d'ouvrir de nombreux marchés quand, de l'autre, les États-Unis ne prennent aucun engagement pour ce qui est, par exemple, d'ouvrir les marchés publics subfédéraux. Deuxièmement, nous considérons que certaines règles européennes en matière de sécurité sanitaire des aliments, d'environnement, de services publics ou encore en matière sociale ne doivent pas être remises en cause par un accord de commerce. Troisièmement, nous souhaitons un engagement clair en faveur de la préservation des acquis d'autres négociations commerciales, comme la protection des indications géographiques, qui sont fondamentales pour notre agriculture.
Or, dans le cadre de la négociation du CETA, ces lignes rouges et ces engagements ont été respectés. Le CETA n'est donc pas le TAFTA, d'abord parce que celui-ci n'est aujourd'hui qu'un projet d'accord en cours de négociation et que, comme l'a dit M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur à plusieurs reprises, nous sommes loin d'être parvenus à définir la base d'un accord. Ensuite, nous avons obtenu, dans le cadre du CETA, de modifier le projet initial de cour d'arbitrage privée.
Nous considérons donc - pour reprendre, en l'inversant, votre formule - que non seulement le CETA n'est pas le cheval de Troie du TAFTA, mais qu'il représente même un contre-modèle : l'accord économique et commercial global de l'Union européenne avec le Canada est plutôt positif, surtout comparé aux mesures défendues par certains dans le cadre de la négociation du TAFTA.
Nous souhaitons que le CETA soit reconnu comme un accord mixte ; il sera soumis à votre assemblée pour approbation. Nous souhaitons, dans le cadre de la négociation du TAFTA avec les États-Unis, obtenir les garanties que nous avons obtenues dans le cadre du CETA.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, je vous demande de considérer que nous défendons nos positions en toute bonne foi - c'est, du reste, ce que pensent nos partenaires dans ce débat au sein de l'Union européenne.
Les accords de protection des investissements - vous avez fait référence à des articles de presse à ce sujet - que j'ai évoqués tout à l'heure existaient dès avant que certains pays rejoignent l'Union européenne. Ces accords ont été conclus par l'Europe des Quinze et des pays d'Europe centrale et orientale qui ont à présent rejoint l'Union européenne. Ils ne sont pas conformes au droit communautaire : il faut donc les transformer pour leur donner une base juridiquement cohérente avec le fait que ces pays sont devenus membres de l'Union européenne.
Concernant l'arbitrage, nous ne soutenons absolument pas des dispositions que nous contestons par ailleurs. Nous voulons que les mécanismes d'arbitrage qui seront mis en place dans le cadre de ces nouveaux dispositifs de protection des investissements soient publics et non privés ; nous voulons qu'ils respectent les principes que nous défendons par ailleurs dans le cadre de la négociation avec les États-Unis, et que nous avons défendus dans le cadre de la négociation de l'accord avec le Canada, savoir la transparence et l'absence de conflits d'intérêts.
C'est sur cette base que la France, avec un certain nombre d'autres États membres, a remis des propositions à la Commission européenne. Nous souhaitons notamment instaurer une institution qui pourrait, à terme, être une cour permanente d'arbitrage au sein de l'Union européenne.
En ce qui concerne les investissements, et pour ce qui est de l'Union européenne, nous voulons éviter que le règlement des conflits éventuels soit dérogatoire du droit public - en l'occurrence, de l'arbitrage public. C'est notre position, qu'il s'agisse des accords internationaux, ou de la protection des investissements à l'intérieur de l'Union européenne, c'est-à-dire dans le cas d'un litige entre un investisseur européen et un État membre de l'Union européenne.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, vous avez raison de souligner à quel point les négociations sur le projet de traité appelé, en anglais, Trade in services agreement, c'est-à-dire «accord sur le commerce dans les services», sont importantes. Vingt-trois parties sont impliquées dans ces négociations - plus précisément, vingt-deux pays et l'Union européenne, c'est-à-dire l'ensemble de ses vingt-huit membres. C'est très important pour notre économie car l'expertise européenne - plus particulièrement française -excelle dans de nombreux domaines des services : les services financiers, les transports, la logistique, etc. Nos entreprises ont donc beaucoup à y gagner.
Dans le même temps, cette question est très sensible, comme vous l'avez dit, car lorsqu'on parle de services, on parle aussi de services publics. Des questions très sensibles liées à la souveraineté des États, ou à l'emploi, peuvent aussi se poser. Il faut donc de la transparence.
Nous avons demandé que certains documents, tels que le mandat de négociation, soient rendus publics : cela a été fait le 9 mars 2015. Vous demandez, à présent, que ces documents soient disponibles en français : nous relayons cette demande auprès de la Commission européenne. Ces textes sont déjà très techniques ; le fait de ne pouvoir y accéder dans sa propre langue complique encore le contrôle par les parlementaires, et par les parties intéressées dans le monde économique ou la société civile.
Pour nous, il ne doit pas y avoir de programme caché - cela n'aurait aucun sens. Il faut donc absolument que toutes les données de cette négociation soient rendues publiques. Certains points sont très sensibles : la protection des services audiovisuels, des services publics en général, et même du droit à réguler des États - ce dernier point est mentionné à la troisième page du mandat de négociation. Nous sommes donc tout à fait disposés - Matthias Fekl en particulier - à rendre compte, à chaque étape, devant l'Assemblée nationale, de chacun des éléments de cette négociation, de chacune des positions que nous défendons auprès de la Commission européenne et de nos partenaires, de chacune des garanties que nous voulons obtenir pour que cet accord sur les services soit bénéfique à notre économie, et ne mette pas en cause le droit à réguler de la France ni de l'Union européenne.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, vous avez posé deux questions. La première porte sur les indications géographiques protégées agricoles, la seconde sur les indications géographiques protégées non agricoles.
Comme vous l'avez dit, la protection des indications géographiques est absolument décisive. Les traités sont importants pour cela, car ils améliorent cette protection. Ils protègent les appellations les plus exposées aux risques d'usurpation. Les indications géographiques sont un instrument de promotion et de valorisation des produits d'un terroir et de leur renommée. Leur enregistrement au niveau international permet de leur accorder une protection contre toutes les usurpations, et d'envisager leur exportation.
La France a obtenu des succès précieux, d'abord dans le cadre du CETA, comme vous l'avez dit, mais aussi avec la révision de l'arrangement de Lisbonne, qui étend la protection des indications géographiques dans vingt-huit États. Cet acte est modernisé, et plus ouvert ; il traduit l'intérêt de nombreux pays pour notre approche des savoir-faire et de la qualité.
Pour ce qui est du CETA, comme vous l'avez dit, 42 indications géographiques ont été reconnues, outre les vins et spiritueux - qui étaient déjà couverts depuis 2004. C'est un très grand progrès : appuyons-nous sur ce modèle pour mener la négociation avec les États-Unis. En ce domaine, en effet, il reste beaucoup de chemin à parcourir, et le gouvernement restera ferme.
Deuxièmement, le gouvernement soutient l'instauration, au niveau européen, d'un système unique de protection des indications géographiques pour les produits non agricoles. Cela permettrait de valoriser les productions industrielles et artisanales et de renforcer la confiance des consommateurs. La France avait accueilli favorablement la publication du Livre vert de la Commission européenne en 2014. Le Parlement européen - vous l'avez dit - a invité en octobre 2015 la Commission européenne à faire une proposition législative ; la France s'exprime régulièrement en faveur d'une relance de ces travaux. Malheureusement, il est vrai que pour l'instant la Commission européenne n'avance pas.
Nous sommes donc d'accord avec vous : cette législation serait tout à fait complémentaire et cohérente avec ce que nous avons obtenu jusqu'ici au sujet des indications géographiques ; les enjeux sont les mêmes en matière d'emploi et de défense des savoir-faire de nos territoires. Nous continuerons à plaider en ce sens.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, vous avez tout d'abord évoqué des documents qui ont fuité, transmis par une ONG à la presse, lesquels relataient l'état des négociations entre l'Union européenne et les États-Unis. Mais ces documents ont simplement confirmé ce que le gouvernement français ne cesse de répéter, à savoir que celles-ci sont aujourd'hui déséquilibrées car il y a, d'un côté, un mandat de négociation qui permet à l'Union européenne de s'engager dans de nombreux domaines et, de l'autre, une offre des États-Unis qui n'est pas à la hauteur de ce que nous attendions de la négociation.
J'ajoute que rien dans ces informations qui ont fuité ne met en cause les lignes rouges que la France défend - qu'il s'agisse des services publics, des investissements ou encore des indications géographiques, c'est-à-dire tous les sujets que nous venons d'évoquer depuis le début de cette séance de questions.
Vous me demandez comment le gouvernement entend informer et associer le Parlement à chaque étape de la négociation. D'une part, nous avons demandé que les documents de négociation puissent être consultés beaucoup plus facilement par les parlementaires. Vous savez qu'initialement étaient prévues des salles de consultation, à Bruxelles pour les députés européens, mais réservés à ceux d'entre eux qui avaient des responsabilités au sein de la commission du commerce international, et, pour les parlementaires français, il fallait se rendre à l'ambassade des États-Unis.
Nous avons dit que ce n'était pas convenable ni même concevable, et nous avons obtenu que les consultations soient désormais possibles dans des bâtiments du secrétariat général des affaires européenne, qui dépendent donc du gouvernement français.
D'autre part, Matthias Fekl a mis en place un comité associant les parlementaires. Il réunit régulièrement ce comité auquel participent nombre d'entre vous et de vos collègues ainsi que des représentants d'ONG, et devant lequel il rend compte régulièrement de l'état des négociations, des documents disponibles, des positions défendues par la France et de celles des autres États membres, et des difficultés que nous rencontrons dans cette négociation.
Je tiens donc vraiment à vous assurer que, pour nous, un accord commercial entre l'Union européenne et les États-Unis ne peut se négocier que dans la transparence et ne pourra de toute façon voir le jour qu'avec le soutien de l'Assemblée nationale.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, vous avez raison de dire que, compte tenu de l'importance d'une telle négociation et des préoccupations qu'elle soulève tout à fait légitimement chez nos concitoyens et dans les secteurs économiques concernés, il ne peut y avoir que la plus grande clarté et la plus grande transparence en la matière.
Vous avez soulevé quatre questions.
La première concerne l'arbitrage. Vous savez que Matthias Fekl a défendu une position maintenant reprise par la Commission européenne : il ne peut y avoir de cour d'arbitrage privée. L'ancienne proposition, dite «ISDS», a donc été mise de côté, et c'est aujourd'hui la procédure de l'arbitrage public qui est défendue, non seulement par la France mais par l'ensemble de l'Union européenne.
Vous avez aussi soulevé la question des normes, entre autres sanitaires, normes protectrices pour lesquelles nous avons obtenu des garanties au sein de l'Union : pas de poulet chloré, pas de boeuf aux hormones. Les normes de ce type devront être respectées dans le cadre d'un accord de commerce international, d'autant plus que ce sera aussi un facteur de protection de nos productions de qualité - lesquelles impliquent évidemment des coûts supplémentaires -, en empêchant une concurrence déloyale du fait de l'autorisation de normes sanitaires au rabais.
Le sujet, très sensible, des données personnelles, n'avait pas encore été évoqué. Le numérique fait partie aujourd'hui en effet des échanges économiques et la protection de ces données ne relève pas exactement des mêmes modes de régulation aux États-Unis. C'est pourquoi l'Union européenne veut que les règles qu'elle adopte en ce domaine ne soient pas remises en cause par cet accord.
S'agissant des indications géographiques, nous nous rejoignons parfaitement. Je m'en suis d'ailleurs déjà expliqué.
Enfin, vous avez souligné un dernier point : l'association du Parlement. Outre le comité qu'il a créé, Matthias Fekl était, il y a encore quelques jours, devant la commission compétente, et il est prêt à se rendre autant que nécessaire devant toutes les commissions concernées de votre assemblée car le sujet ne concerne pas qu'une seule d'entre elles : il s'agit aussi d'agriculture et d'autres volets de l'économie, sans oublier, évidemment, les affaires étrangères.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, votre question me donne l'occasion de revenir sur ce qu'il en est de ce mécanisme d'arbitrage. Le document de travail rédigé par la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Autriche et la Finlande, auquel vous avez fait référence, a en effet été débattu dans les enceintes techniques du Conseil. Son objectif est de proposer une solution de compromis en vue de démanteler les accords de protection des investissements encore en vigueur entre les États membres de l'Union européenne et que la Commission juge contraires aux traités européens pour les raisons que j'ai déjà rappelées - lesdits accords ont été signés antérieurement à l'adhésion de certains des États concernés.
Dans ce contexte, les propositions formulées par la France et par ses partenaires sont parfaitement cohérentes avec les positions défendues à propos de l'ISDS dans le cadre du partenariat transatlantique et des autres accords commerciaux de l'Union européenne. Il s'agit en effet de réfléchir à l'instauration d'un véritable mécanisme juridictionnel complémentaire des tribunaux des États membres et qui permettrait de renforcer l'efficacité du marché intérieur. Les principes de base qui fondent ce marché étant encore souvent malmenés, il faut donc améliorer l'environnement juridique du monde des affaires au sein de l'Union tout en se conformant au droit communautaire.
Notre démarche s'inscrit pleinement dans cet objectif et ne vise en aucun cas à instaurer un ISDS au sein de l'Union européenne, puisque nous contestons ce mécanisme dans les négociations sur les autres accords de commerce international. Bien au contraire, il s'agirait d'un mécanisme d'arbitrage public.
Il y a eu des inexactitudes dans la façon dont cette question a été présentée. Les choses sont claires : la démarche de la France est de promouvoir partout, et dès que possible, les principes qui président déjà à la rupture avec l'arbitrage privé entre investisseurs et États dans les accords de libre-échange, et nous poursuivons la même logique au sein de l'Union européenne.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, je tiens à vous rassurer sur cette question, à laquelle les collectivités territoriales - et je le comprends - sont très sensibles. La position de la France, qui est aujourd'hui celle de l'Union européenne, est sans ambiguïté : il s'agit de préserver notre capacité à créer et maintenir des services publics nationaux et locaux. C'est une ligne rouge ; c'est l'un de nos impératifs.
Défendre les services publics est fondamental pour l'Union européenne. La France et d'autres États membres ont défendu cette position dans toutes les négociations commerciales, au sein de l'OMC comme dans les négociations visant à conclure des accords bilatéraux. Ni le partenariat transatlantique, ni l'accord général sur le commerce des services, ni aucun autre projet d'accord en négociation ne feront exception à cette règle.
Le point 20 du mandat de négociation du TTIP exclut d'ailleurs explicitement les services publics des négociations. En outre, plusieurs dispositions expresses précisent que les accords devront garantir le droit des parties à prendre les mesures que celles-ci estiment nécessaires pour atteindre les objectifs légitimes de protection de la santé, de la sécurité, du travail, des consommateurs, de l'environnement ou de la diversité culturelle.
Nous défendrons ces mêmes principes dans les négociations relatives à l'accord général sur le commerce des services. Cette liste n'est d'ailleurs qu'indicative, en raison du principe selon lequel les collectivités territoriales régulent elles-mêmes leurs services publics. Une négociation commerciale ne saurait remettre en cause cette libre administration, principe consacré par la Constitution dans son article 72. Cela n'est du moins ni l'intention de la Commission européenne ni celle des mandats de négociation que les États membres lui confient.
La protection des services publics constitue donc pour nous une position de principe, une ligne rouge à ne pas franchir dans la négociation et un acquis des négociations commerciales antérieures. La France s'est toujours assurée qu'un accord commercial de l'Union européenne ne puisse pas mettre en cause la capacité soit de l'Union elle-même, soit d'un État membre, soit d'une collectivité territoriale, à réguler ses services publics, en fonction d'objectifs qui sont tout simplement ceux de l'intérêt général.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, je vous remercie d'avoir mentionné les acquis de la négociation menée par la France au sein de l'Union européenne pour promouvoir la transparence et plusieurs éléments importants pour notre pays.
Quant à la question de l'arbitrage, elle est très importante car, aujourd'hui, plus de 3.500 accords de protection des investissements dans le monde prévoient un ISDS, c'est-à-dire un mécanisme d'arbitrage privé. On voit bien pourquoi ces accords ont été signés : dans certaines parties du monde, les investisseurs internationaux considéraient que le climat des affaires et l'État de droit n'étaient pas suffisamment garantis.
L'Union européenne, en revanche, estime que, sur notre continent, les investisseurs - européens ou internationaux - peuvent s'appuyer sur l'État de droit, car celui-ci existe bel et bien. Il n'est pas envisageable qu'un système d'arbitrage privé devienne supérieur aux règles que des États auraient fixées pour tel ou tel secteur de l'économie. C'est pourquoi ces mécanismes ont contribué à éroder la capacité des États à réguler librement.
Vous avez mentionné le recours de Philip Morris contre du gouvernement australien, visant le projet d'un paquet de cigarettes neutre. On pourrait aussi mentionner la procédure qu'a intentée l'entreprise Vattenfall contre la politique énergétique de l'Allemagne, que ce pays avait librement choisie. Divers conflits d'intérêt se sont multipliés dans ces enceintes arbitrales, où la transparence n'était pas assurée. Dès le début de l'année 2015, Matthias Fekl a présenté, d'abord avec l'Allemagne, puis avec d'autres États, une position en rupture avec l'arbitrage privé. Il a identifié plusieurs points forts, tels que la transparence, la préservation du droit à réguler, la lutte contre les conflits d'intérêts et l'instauration d'un appel. La France est le seul État membre à avoir adressé une proposition officielle sur ce sujet. La Commission l'a reprise dans sa quasi-intégralité, ce qui fait de notre proposition un consensus européen.
Cette proposition consiste à créer un système de cour de justice des investissements, qui remplace les arbitres privés par des juges publics, rémunérés par les États, et non plus par les parties au litige entre un investisseur et un État. De plus, elle instaure des exigences éthiques renforcées, et un mécanisme d'appel est créé. Ce système, proposé aux Canadiens, a été repris en grande partie dans le CETA. C'est un pas décisif.
Non seulement les Canadiens ont intégré ce nouveau dispositif, mais ils ont aussi accepté de travailler pour établir à terme une cour multilatérale des investissements, dont l'ICS soit être le modèle. C'est pourquoi nous défendons la même position pour le TTIP.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, nous devons partir d'un constat, celui de la paralysie de l'Organisation mondiale du commerce. Le cycle de Doha, que l'on avait appelé «cycle du développement», dure depuis 2011 et n'est toujours pas conclu. La France est mobilisée pour redynamiser les négociations, face au blocage de certains pays, notamment les pays émergents. Force est de constater, cependant, que ces blocages persistent.
C'est en réponse à cette paralysie que les négociations commerciales bilatérales ou régionales se sont multipliées. Il est vrai que ces négociations font peser un risque sur l'unité des règles du commerce mondial et sur l'inclusion des pays les plus pauvres dans ces accords. Il faut avoir conscience de cet élément, et l'intégrer pleinement à l'analyse.
Les enjeux sont immenses : il s'agit de défendre nos valeurs dans la bataille pour la définition des normes en matière de protection du consommateur, des droits sociaux, des droits de la santé ou de l'environnement. Il est évident que ces négociations n'ont de sens que si elles complètent et renforcent l'ordre multilatéral. Ainsi, la France estime qu'il serait souhaitable de négocier l'accord TISA sur les services dans un cadre multilatéral, dès lors que lorsque les conditions seront réunies pour que tous les pays puissent en bénéficier.
Par ailleurs, l'Union européenne s'engage fortement en faveur des pays en développement. En juillet 2015, lors de la conférence d'Addis-Abeba sur le financement du développement, elle a indiqué qu'elle s'engageait à rester le marché le plus ouvert aux exportations des pays en développement. L'Union européenne importe près de 860 milliards d'euros de biens des pays en développement chaque année. Son marché est le plus ouvert aux exportations des pays les moins avancés.
Mais elle tente aussi d'apporter un soutien aux pays ACP, en introduisant certaines flexibilités, comme l'exclusion des produits sensibles - jusqu'à 25% des lignes tarifaires - ou la libéralisation progressive, jusqu'à vingt ans. L'Union européenne négocie donc avec des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique des accords de partenariat économique qui présentent une asymétrie favorable aux pays en développement. De nombreuses lignes restent protégées pour ces pays, où les réductions des droits de douane sont offertes pour de très longues périodes. En outre, ces accords sont tous assortis d'un volet relatif au développement.
La France est donc mobilisée pour que ces pays ratifient de tels accords régionaux, afin de sécuriser leur accès préférentiel au marché européen, sur le long terme.
Madame la Députée, vous avez soulevé un sujet très vaste. Nous partageons votre préoccupation pour que les pays les moins avancés, les plus pauvres des pays en développement, ne soient pas les laissés pour compte des nouvelles règles des échanges commerciaux internationaux.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80332|Madame la Présidente de la commission des affaires européennes, Mesdames et Messieurs les Députés,
je me réjouis, tout d'abord, d'être devant vous cet après-midi afin de participer à ce débat relatif à la mise en oeuvre du plan Juncker, sur la base du rapport d'information de MM. Ramzy Hammadi et Arnaud Richard, dont je tiens à saluer l'excellent travail. Je tiens également à remercier la commission des affaires européennes et sa présidente, d'avoir inscrit ce sujet à l'ordre du jour de votre assemblée, quelques jours seulement avant la publication par la Commission européenne de son rapport d'évaluation à mi-parcours du plan Juncker, dont l'examen par les chefs d'État et de gouvernement est prévu lors du prochain Conseil européen des 28 et 29 juin.
L'Europe avait besoin du plan Juncker : depuis la crise financière de 2008, l'Union européenne connaissait des niveaux beaucoup trop faibles d'investissement public et privé, situation préjudiciable à son avenir économique comme à son potentiel de croissance.
C'est pourquoi le président de la République en avait fait son cheval de bataille lors du Conseil européen de juin 2012, comme l'a rappelé Gilles Savary.
Certes, mais je n'ai évoqué que la demande du président de la République portant sur le soutien à l'investissement et à la croissance.
Une première décision avait alors été prise : augmenter de 10 milliards d'euros le capital de la BEI pour lui permettre de financer de plus nombreux projets, à hauteur de 60 milliards d'euros. Ces aides ont d'ailleurs entraîné, dans notre pays, d'une augmentation très conséquente des prêts accordés par la BEI, j'y reviendrai.
Toutefois, le déficit d'investissement public et privé dans l'Union européenne restait trop important. Prenons les chiffres de la fin 2014 : alors que le produit intérieur brut et la consommation étaient pratiquement redescendus aux niveaux de 2007, le montant total des investissements était encore inférieur de 15% à celui constaté en 2007. Nous n'étions donc pas vraiment sortis de la crise. Certes, dans nombre d'États membres de l'Union européenne, la croissance redémarrait - d'ailleurs, cette tendance se confirme -, mais l'investissement et donc la préparation de l'avenir prenaient du retard, tout comme le soutien à l'activité et à l'emploi.
C'est pourquoi la mise en oeuvre urgente d'un plan d'investissement massif dans l'Union européenne, à partir de 2012, dès l'élection du nouveau président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, avait été une demande extrêmement pressante de la France. La feuille de route économique de l'Union européenne ne pouvait en effet se résumer au seul pacte de stabilité et de croissance, c'est-à-dire à la consolidation budgétaire, même si celle-ci est nécessaire.
Aujourd'hui, avec le président Jean-Claude Juncker, nous sommes parvenus à bâtir un triptyque combinant les objectifs de consolidation budgétaire, mais à un rythme compatible avec la situation de chacun des États membres, la conduite de réformes - et nous en menons, parfois parce qu'elles ne l'ont pas été auparavant - et, enfin, le soutien aux investissements.
L'Europe doit en effet se mobiliser pour l'économie réelle en permettant à ses entreprises, à ses industries ainsi qu'à ses acteurs publics d'investir dans les domaines déterminants pour l'avenir : le soutien à l'innovation, la modernisation de l'appareil productif et son adaptation aux nouveaux défis écologique et numérique.
En 2014, la France a donc défendu résolument, auprès du nouveau collège des commissaires, la priorité à la croissance et aux investissements. Puis, elle a logiquement soutenu la proposition présentée par le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, d'engager ce plan pour l'investissement en Europe.
L'idée du plan Juncker repose sur un objectif simple : permettre le financement de davantage de projets d'investissements publics et privés, notamment de projets plus risqués que ceux jusqu'à présent soutenus par la BEI, par d'autres banques ou par des fonds d'investissement.
La crise financière a en effet accru l'aversion des investisseurs pour les risque et un nombre considérable de projets, pourtant potentiellement générateurs de forte valeur ajoutée et d'emplois, se sont trouvés en défaut de financement, à cause du niveau de garanties exigé.
Telle est la vocation spécifique du plan Juncker et du FEIS : permettre le financement de projets plus risqués - parce que souvent plus novateurs et portant sur des domaines stratégiques pour l'avenir -, grâce à la garantie du budget européen, en s'appuyant sur l'expertise de la BEI et d'un comité d'investissement créé spécifiquement pour examiner et sélectionner les projets.
En accord avec le Parlement européen, qui a eu à se prononcer très rapidement sur le règlement européen portant création du FEIS, des priorités ont été identifiées : les secteurs les plus stratégiques pour l'avenir, à savoir la recherche, l'innovation, l'énergie, les infrastructures, les technologies de l'information et de la communication, la protection de l'environnement ainsi que la promotion du capital humain.
Même s'il faut attendre quelques jours pour que la Commission européenne publie un document totalement complet, quel bilan peut-on tirer, en ce milieu d'année 2016 ?
D'abord, l'adoption des instruments juridiques et la mise en place du FEIS et des comités d'investissement ont été très rapides. C'était important, quand on connaît la lenteur que peuvent parfois prendre les décisions européennes à se concrétiser.
Ensuite, le plan Juncker s'est, à son tour, déployé très rapidement. À l'heure où nous débattons, il fonctionne et finance des projets. Il est vrai que, lors de sa création, un doute subsistait à cet égard. Je me souviens de nos échanges et de nos interrogations, dans cette assemblée, juste après sa présentation par Jean-Claude Juncker : quelle serait la réalité du mécanisme ? allait-il fonctionner ? à quelle vitesse serait-il mis en oeuvre ?
Aujourd'hui, des projets ont pu être lancés grâce au plan Juncker, on peut visiter les sites où ils sont développés et rencontrer les acteurs qui les portent.
Au 19 mai 2016, étaient recensés 249 décisions d'approbation de projet prises par les instances de la BEI et du FEIS. Cette dénomination «approbation de projets» implique des prêts de la BEI, des prises de participation sous forme de garanties ou d'entrées au capital, accordées soit à des entreprises - grandes ou moyennes -, soit à des fonds d'investissement, soit à des consortiums regroupant des acteurs privés et publics, soit même à des acteurs publics. La montée en puissance du plan se déroule donc conformément à la feuille de route initiale.
En termes de montants, les projets approuvés engagent 12,8 milliards d'euros de financements, essentiellement sous forme de prêts, permettant de mobiliser 100 milliards d'euros d'investissements, soit 32% de l'objectif initial du plan, fixé à 315 milliards d'euros. Au terme de cette phase de lancement, les montants mobilisés devraient croître encore plus vite, avec un effet de levier encore plus important.
Les chiffres que je viens de vous communiquer portaient sur l'ensemble de l'Union. En France, quels sont les résultats observés ?
D'abord, notre pays est le deuxième bénéficiaire en nombre de projets approuvés dans le cadre du FEIS. Trente-trois ont été retenus : dix-sept sur le volet PME porté par le FEIS et seize sur le volet infrastructures et innovation, porté directement par la BEI. La France est en outre le premier pays bénéficiaire pour ce second volet.
Notre pays est surtout le premier pays bénéficiaire en termes de montant total des projets approuvés : 2,3 milliards d'euros d'engagements pour des projets représentant un montant total de 12,4 milliards d'euros d'investissements. Ces projets, grâce à la contribution du plan Juncker, peuvent donc être montés. Il convient alors de comptabiliser non seulement l'apport direct au titre de ce plan, qui prend généralement la forme d'un prêt de la BEI à un taux extrêmement avantageux, mais également les investissements supplémentaires que cela permet ; en effet, l'accord du FEIS entraîne la participation au projet d'autres banques et investisseurs, privés ou publics.
Un tiers des financements identifiables portent sur des montants inférieurs ou égaux à 50 millions d'euros, ce qui répond à la volonté initiale d'encourager des investissements plus risqués, et pas seulement des grands projets engageant plusieurs centaines de millions d'euros.
Par ailleurs, le secteur de l'industrie représente 3% des projets et 25% des financements.
Dans le même temps, en dehors du plan Juncker, le volume de prêts classiques obtenus par la France auprès de la BEI atteint des niveaux sans précédent : 8,7 milliards d'euros en 2015, contre 4,6 milliards d'euros en 2012, grâce à l'augmentation de capital de 10 milliards d'euros.
Je l'ai mentionnée tout à l'heure : elle avait été voulue par le président de la République lors du Conseil européen de juin 2012.
Les très bons résultats du plan Juncker en France ont été rendus possibles par la forte mobilisation de nos acteurs institutionnels et d'abord du Commissariat général à l'investissement, de la Caisse des dépôts et de la Banque publique d'investissement.
Je rappelle que les porteurs de projets présentent directement ceux-ci au comité d'investissement du plan Juncker : ce ne sont pas la France, l'Italie, l'Allemagne ou la Grèce qui défendent des projets, en négociant un financement proportionnel à leur poids géographique, économique ou démographique ; ce sont les porteurs de projets eux-mêmes qui doivent se présenter devant ce comité d'investissement.
Néanmoins, ce dispositif étant nouveau et peut-être un peu complexe à comprendre, pour les entreprises comme pour tous les autres porteurs de projets, nous avons considéré qu'il pouvait être utile de leur transmettre des informations et de les informer que leurs projets étaient éligibles au plan Juncker. Le Commissariat général à l'investissement, placé auprès du Premier ministre, a ainsi entrepris un travail très important - avant même, d'ailleurs, que le FEIS soit mis en place, en fait dès que nous avons acquis la certitude que le plan Juncker serait adopté -, visant à transmettre aux réseaux d'entreprises ainsi qu'à un certain nombre d'acteurs publics et privés, toutes les informations relatives aux conditions dans lesquelles leurs projets pouvaient être soumis. C'est évidemment l'une des raisons pour lesquelles la France est l'un des principaux pays bénéficiaires.
Nous voulons d'ailleurs, et nous l'avons indiqué à nombre de nos partenaires, faire partager cette expérience à d'autres États membres. Par exemple, M. le député a estimé qu'il serait bien de faire davantage bénéficier la Grèce du plan Juncker - car elle en bénéficie déjà. Nous avons eu des échanges et sommes prêts à transmettre le savoir-faire technique, opérationnel, financier à d'autres États membres, afin que leurs entreprises, leurs porteurs de projets, bénéficient du plan Juncker.
En France, de très nombreux projets ont pu être développés ; je vais vous donner quelques exemples, dont certains ont déjà été mentionnés. Le fonds d'infrastructures Capenergie 3, qui a bénéficié d'une participation à hauteur de 50 millions d'euros, va pouvoir financer des parcs éoliens, des fermes photovoltaïques et des méthaniseurs, en France et en Europe, pour 1 milliard d'euro. Pas moins de 40.000 foyers résidentiels bénéficieront d'actions d'efficacité énergétique - sujet que vous avez évoqué, Madame la Présidente -, grâce aux 400 millions d'euros de financements de la BEI. Celle-ci a également investi 18 millions d'euros au sein du fonds Ginkgo 2, pour dépolluer des sites industriels situés en centre-ville. Dernier exemple, dans le secteur agroalimentaire, la société coopérative agricole Les Maîtres Laitiers du Cotentin va recevoir 55 millions d'euros de financement pour l'exploitation d'une nouvelle usine de traitement du lait, à Méautis, en Normandie. La diversité de ces exemples - et d'autres pourraient être cités - montre que vraiment tous les secteurs de l'économie peuvent bénéficier du plan Juncker.
Enfin, et cela me semble très intéressant, au-delà de tous ces projets, qui représentent tout de même un certain volume, la Banque publique d'investissement, ainsi que quelques autres réseaux bancaires, dans tous les départements, distribuent à des petites entreprises, parfois de moins de dix salariés, des prêts, accordés à des taux particulièrement favorables, parce qu'ils relèvent du plan Juncker et bénéficient de cette garantie sur le budget de l'Union européenne.
Sur chacun de vos territoires, dans chacune de vos circonscriptions, j'en suis certain, vous apprendrez que des entreprises ont pu bénéficier d'un financement au titre du plan Juncker. Elles n'auront pas eu à aller déposer un dossier à Luxembourg, au siège de la BEI, mais, grâce à ce dispositif, la Banque publique d'investissement, -BPIFRANCE - leur aura accordé un prêt. J'ai eu l'occasion de visiter certaines d'entre elles, comme GD Laser, entreprise du Loiret spécialisée dans le secteur d'avenir du laser.
Le 11 avril dernier, avec le Premier ministre, nous sommes allés rencontrer, à Luxembourg, les dirigeants de la BEI, en particulier son président, M. Werner Hoyer, et son vice-président français, M. Ambroise Fayolle. Nous avons alors assisté à la signature de nombreux accords avec des entreprises françaises bénéficiaires du plan Juncker ou susceptibles de passer un accord pour développer leurs projets.
Le rapport d'information de la commission des affaires européennes soulève également la question très importante, dont on débat depuis le lancement du dispositif, des éventuels effets d'éviction ou d'aubaine que pourrait entraîner ce plan : effets d'éviction car des projets pourraient être financés au détriment d'autres, moins risqués mais tout aussi nécessaires ; effets d'aubaine car certains projets financés par le plan auraient de toute façon été financés sans lui.
L'examen des 249 décisions prises jusqu'à présent par la BEI et le FEIS montre plutôt l'efficacité du principe d'additionnalité, auquel la France est très attachée. En effet, sans le plan Juncker, la plupart des projets financés n'auraient pas pu voir le jour et certains autres auraient connu un développement moins important. Ce principe d'additionnalité est très important : même des projets recevant d'autres aides européennes, par exemple des fonds structurels du FEDER, peuvent bénéficier du plan Juncker. Certes, sans ce dernier, ils auraient donc tout de même existé, mais, grâce à lui, ils ont souvent pris une beaucoup plus grande ampleur.
Au vu de son succès, comme vous, mesdames et messieurs les députés, nous considérons que le plan Juncker doit être pérennisé et amplifié. Je ne sais pas si l'on peut déjà donner des montants mais rien, je pense, ne peut contredire l'ordre de grandeur évoqué.
Une question peut cependant être posée : faut-il simplement s'appuyer sur le mécanisme existant, qui, je le rappelle, repose sur une garantie sur le budget de l'Union européenne ? ou bien, sur la base de l'expérience réussie de cette première phase du plan Juncker - qui doit encore se déployer afin de réaliser les deux tiers restant pour atteindre l'objectif -, faut-il imaginer que d'autres instruments, potentiellement mobilisables et à faire évoluer, puissent servir à financer des investissements, dans les mêmes domaines, à l'échelle de l'Union européenne ? C'est un débat que nous devons peut-être ouvrir avec nos partenaires.
Il existe par exemple un fonds de secours, qui, lui aussi, joue très bien son rôle, mobilisé notamment pour le plan d'aide à la Grèce : le Mécanisme européen de stabilité. Dans l'état actuel des choses, ce dispositif doit uniquement servir pour répondre aux difficultés financières d'un État membre ou de son secteur bancaire. En s'inspirant de la réussite de cette sorte de FMI européen, ne pourrait-on pas imaginer un dispositif du même type, dédié au soutien aux investissements dans les domaines d'avenir ? Il serait utile d'ouvrir la réflexion car, en termes de fonds mobilisables, le MES possède un potentiel encore plus élevé que le plan Juncker.
Des complémentarités peuvent aussi être imaginées entre le plan Juncker continuant à monter en puissance et d'autres mécanismes restant à créer.
Ce qui est ce certain, en tout cas, comme l'a souligné la présidente, c'est que ce plan a apporté une contribution forte à la croissance et qu'il a été très largement orienté vers la transition énergétique. Aujourd'hui, les projets dans le domaine de l'énergie représentent 41% des projets Juncker de la BEI. Il faut d'ailleurs envisager une montée en puissance dans d'autres domaines, en particulier le numérique, secteur absolument décisif pour l'avenir de l'économie européenne et son positionnement dans la mondialisation.
Il faut enfin le faire connaître, aux acteurs économiques, car d'autres pourraient en bénéficier - en France, même si nous sommes très bien placés, mais aussi dans d'autres pays de l'Union européenne -, et aux citoyens parce que c'est une illustration d'une Europe au service de la création d'emplois et de la croissance, finalement d'une Europe concrète.
Les attentes européennes et nationales à l'égard du plan Juncker sont importantes, votre rapport d'information le souligne. Elles montrent à quel point il a suscité peut-être des questions mais aussi des espoirs. Aujourd'hui, ses premiers succès confirment que l'intuition du président de la Commission était la bonne, cela a été dit. L'Europe devait se mobiliser pour les investissements, elle devait mieux utiliser un certain nombre de ses outils, en particulier le budget de l'Union européenne, pour créer un effet de levier en faveur de la relance des investissements.
Les attentes qui s'expriment, selon nous, sont un bon signe : elles indiquent que le plan commence à être identifié ; on sait qu'il est disponible, qu'il est utile. Mais il ne faut pas décevoir ces attentes.
À cet égard, votre rapport d'information, vos propositions, la visibilité que, par ses travaux, l'Assemblée nationale a donnée au plan Juncker sont importants. Ce sera évidemment l'un des éléments sur lesquels s'appuiera le gouvernement pour formuler, au cours des prochaines semaines, des propositions visant à le pérenniser et à l'amplifier, au profit des investissements en Europe.
(Interventions des parlementaires)
Vous avez raison, Monsieur le Député : la politique de la BCE, qualifiée de quantitative easing ou d'assouplissement quantitatif, consistant en des injections de liquidités, a aussi fortement contribué à la reprise économique et au retour de la croissance en Europe. Indirectement, vous vous demandez si cela ne contribue pas également à la constitution de bulles financières.
Évidemment, il faut être attentif à cet aspect. La BCE l'est vigilante et un certain nombre de décisions ont été prises, suite à la crise financière, pour lutter contre les risques de nouvelles crises : la surveillance bancaire a été renforcée - c'est tout l'objet de l'union bancaire - et des freins de secours ou des outils d'intervention, comme le Mécanisme européen de stabilité ; que je viens d'évoquer, ont été mis en place.
Il reste nécessaire de soutenir le crédit. Ainsi, en plus du plan Juncker, qui a une vocation particulière - soutenir les projets les plus risqués -, il a fallu procéder à des injections de liquidités pour que les banques recommencent à prêter davantage, et à de meilleurs taux, aux entreprises et aux ménages. Nous avions aussi souhaité que le taux de change soit plus favorable à nos exportations, que l'euro baisse par rapport au dollar ; cette politique de la BCE y a contribué.
Je ne sais pas si votre proposition - un quantitative easing citoyen, avec des liquidités versées directement aux ménages - répond à la situation. Car il y a un autre débat, à propos de ce qu'on appelle la «monnaie hélicoptère» - j'ignore si c'est à cela que vous faisiez référence. Pour consolider encore plus le redémarrage économique, la BCE ou d'autres banques centrales devraient-elles distribuer de l'argent aux ménages ou aux citoyens ? Les économistes en débattent mais ce n'est vraiment pas d'actualité. Cela n'a jamais été fait, cela risquerait de déstabiliser l'économie de façon totalement imprévisible. Il existe d'autres outils de redistribution pour améliorer le pouvoir d'achat et favoriser les investissements des ménages.
Nous soutenons donc la politique de la BCE, en complément, évidemment, du plan Juncker.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, le plan Juncker a pour objectif de financer des projets dans des secteurs clés comme la recherche, l'innovation, l'énergie, les infrastructures, les technologies de l'information ou la protection de l'environnement. L'investissement dans la recherche représente donc l'une des priorités pour l'Europe. Il apparaît explicitement dans le règlement du FEIS que les projets de recherche, de développement et d'innovation, ainsi que ceux d'éducation et de formation, sont éligibles à la garantie de l'Union européenne.
D'après le dernier décompte de la Commission, près d'un quart - 23% exactement - des projets approuvés au titre du plan Juncker concernent la recherche, le développement et l'innovation. Il convient également de garder à l'esprit que la BEI intervient, dans le cadre de ses activités traditionnelles, en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche. Par exemple, le plan Campus ou l'accélérateur de particules du CERN - Organisation européenne pour la recherche nucléaire - ont bénéficié de l'appui de la BEI.
Néanmoins, il faut continuer à encourager le financement des projets dans ce domaine, pour qu'il y en ait davantage, afin de favoriser la montée en gamme des produits français et leur compétitivité. Je tiens à rappeler qu'il existe également d'autres outils pour financer la recherche, au plan européen mais aussi au plan français. Comme vous l'avez mentionné, le PIA, doté de près de 47 milliards d'euros, piloté par le Commissariat général à l'investissement, a été mis en place par l'État pour financer des investissements innovants en France, par le biais du fonds national de valorisation.
Au plan européen, le programme Horizon 2020, je le rappelle aussi, finance à hauteur d'environ 75 milliards d'euros l'innovation et la recherche au sein de l'Union européenne, pour la période 2014-2020. La plupart de nos universités et de nos grands organismes de recherche en bénéficient. De surcroît, le FEDER peut financer un certain nombre de projets dans le domaine de la recherche et du développement, en particulier pour ce qui concerne les universités et les entreprises.
Le soutien à la recherche est donc une priorité. Le plan Juncker y contribue, en complément d'autres dispositifs.
(Interventions des parlementaires)
Le plan Juncker n'a effectivement pas été pensé pour financer directement de petits projets, même si, comme je l'ai dit, de petites entreprises peuvent accéder à des financements par l'intermédiaire, en particulier, de la BEI. Il n'a pas non plus été conçu comme un instrument destiné à dispenser des subventions ; il fournit des prêts ou des prises de participation dans des capitaux.
Le regroupement de petits projets peut être encouragé, dans le cadre des plateformes d'investissement. Pour financer des petits projets, la combinaison de subventions de fonds structurels européens et de ressources de la BEI est possible. C'est ce qu'illustre bien l'opération en faveur de la troisième révolution industrielle, approuvée dans le Nord-Pas-de-Calais.
Par ailleurs, les financements traditionnels de la BEI restent une voie intéressante pour les collectivités. Il y aussi, dans ce domaine, un enjeu d'information et d'accompagnement. C'est pourquoi les préfets, les DIRECCTE - directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi -, le Commissariat général à l'investissement et les réseaux locaux de BPIFRANCE et de la Caisse des dépôts sont mobilisés pour faire connaître le plan, expliquer son fonctionnement et, le cas échéant, aider au montage des dossiers. Nous avons encore un grand effort à accomplir dans ce domaine.
Tous les projets ne peuvent sans doute pas relever du plan Juncker, vous avez raison de le dire. Pour certains projets de collectivités locales, il existe d'autres systèmes d'aides européennes. Le FEDER peut les soutenir, pour peu qu'ils relèvent des priorités du programme opérationnel négocié par chaque région avec l'Union européenne pour la période 2014-2020. Des prêts directs de la BEI peuvent également être accordés à des collectivités locales pour financer des projets. Je pense néanmoins qu'il existe une grande marge de progression possible pour structurer des regroupements de petits projets.
Au cours de ce débat, nous avons déjà évoqué, par exemple, le projet d'isolation thermique de 40.000 logements. Il est évident que, si chacun des bailleurs sociaux concernés avait voulu bénéficier lui-même du plan Juncker pour quelques dizaines ou centaines de logements, il n'y serait pas parvenu. C'est le regroupement de plusieurs porteurs de projets dans un même fonds, à la manière d'un consortium, qui a permis d'obtenir le financement par le plan Juncker.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, le secteur de la pêche demeure un secteur spécifique, non identifié comme secteur prioritaire du plan. Cependant, les porteurs de projets peuvent proposer des projets financièrement viables et répondant aux objectifs du plan Juncker pour des flottes de pêcheurs - par exemple, ceux qui viseraient à réduire leur impact environnemental et climatique, comme vous l'avez mentionné, ou à introduire des techniques de pêche innovantes.
Par ailleurs, et c'est l'essentiel, des fonds structurels européens sont alloués à ce secteur par le biais du FEAMP, vous l'avez rappelé. Ce fonds aide les pêcheurs à adopter des pratiques de pêche durable. Il aide les populations côtières à diversifier leurs activités économiques. Il finance des projets destinés à créer des emplois et à améliorer la qualité de vie le long du littoral européen. Je veux souligner qu'il est doté de 6,4 milliards d'euros pour la période 2014-2020.
Je crois qu'il faut être ouvert à vos propositions, en faisant en sorte que les projets susceptibles d'être soutenus répondent aux objectifs généraux du plan Juncker, en particulier en matière d'innovation ou d'environnement, puisque c'est la règle. Mais il importe surtout de continuer à bien utiliser le FEAMP, qui dispose des fonds disponibles pour soutenir le secteur et les activités de la pêche.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Rapporteur, je regrette le ton polémique de votre intervention. De toute évidence, vous l'avez dit vous-même, nous sommes d'accord sur un point : le succès du plan Juncker.
Mais nous sommes en désaccord sur un autre : l'idée que nous voudrions tirer la couverture à nous. Vos propos ne correspondent pas, je crois, à ce que l'on pense à Bruxelles, notamment du côté du président de la Commission européenne. En vérité, avant 2012, la seule stratégie envisagée, dans les instances européennes, pour sortir de la crise, c'était l'austérité et la consolidation budgétaire ; tel était le thème central de la Commission Barroso.
Lorsque le président de la République, François Hollande, a été élu, il a demandé d'inscrire la question du soutien à l'investissement et à la croissance à l'ordre du jour des travaux du Conseil européen. Ce fut bien le cas lors du premier Conseil où il a siégé, en juin 2012, réunion au terme de laquelle la Commission européenne a proposé un pacte pour la croissance de 120 milliards d'euros reprenant à son compte la proposition du président de la République. À ce stade, le seul point qui représentait une réelle avancée - je l'ai expliqué très précisément tout à l'heure -, ce fut l'augmentation de 10 milliards d'euros du capital de la BEI.
Cette somme a permis à la BEI d'accroître de 60 milliards d'euros ses soutiens à l'investissement en Europe.
Vous avez donc raison : on n'en était pas à 120 milliards mais à 60 milliards d'euros. Et c'est après avoir été élu que, sur la base des débats de la campagne électorale qu'il avait eus, en tant que candidat à l'investiture, avec les membres du Conseil européen puis devant le Parlement européen, Jean-Claude Juncker a proposé ce plan. Il s'agissait bien d'une réponse à cette attente, devenue très large, d'une politique d'investissements.
Nous considérons donc que la France doit être fière du plan Juncker, qui représente aussi un succès pour notre pays.
Je suis heureux que nous partagions ce jugement et ravi pour tous ceux qui, depuis plusieurs années, réclamaient la priorité aux investissements. Nous nous rejoignons sur ce point ; ne polémiquons donc pas.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, la politique économique que nous avons soutenue à l'échelle européenne consiste à combiner plusieurs outils : la politique monétaire ; une politique budgétaire moins focalisée sur la consolidation budgétaire, afin de ne plus contraindre des pays qui n'étaient pas sortis de la crise à mener des politiques d'austérité, porteuses d'un effet récessif ; une politique de soutien aux investissements ; une politique d'encouragement aux réformes structurelles. C'est l'ensemble de ces outils qui peut contribuer, et qui contribue aujourd'hui, au redémarrage de la croissance.
La politique monétaire a en particulier pour vocation de permettre au secteur bancaire de prêter davantage aux acteurs économiques. En même temps, je l'ai déjà rappelé, elle a permis de baisser le cours de l'euro par rapport à celui d'autres monnaies, en particulier du dollar.
Est-elle de nature à créer des bulles spéculatives ? C'est l'objet même de la surveillance financière, notamment bancaire : les marchés financiers doivent être encadrés et régulés car il importe de veiller à ce que ne réapparaissent pas des bulles.
Mais, aujourd'hui, la BCE doit être soutenue dans sa volonté de continuer à pratiquer l'assouplissement quantitatif et d'injecter des liquidités. En effet, aux termes de ses statuts, elle doit maintenir l'inflation en-dessous de 2% - plafond loin d'être atteint puisque l'inflation est aujourd'hui presque nulle. Comme la BCE ne souhaite pas que s'installe un risque de déflation, facteur possible de récession, tant qu'on n'avoisine pas les 2%, elle a raison de soutenir le crédit.
Le quantitative easing ne représente d'ailleurs qu'une des modalités possibles de cette politique, à côté de la baisse des taux directeurs. Tout cela permet de disposer d'un crédit abondant, à des coûts très peu élevés, voire avec des taux négatifs, et donc de recréer des capacités de financement de l'économie réelle. Il s'agit d'un des instruments possibles, non du seul.
Je me réjouis donc qu'un débat ait été consacré au plan Juncker.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80333|
Permettez-moi avant de commencer ce propos de vous exprimer d'abord la compassion et la solidarité du gouvernement français, du peuple français, après les terribles tremblements de terre qui ont touché la région de Kyushu il y a peu de temps, et qui ont fait tant de victimes.
Mesdames et Messieurs, en 1921, un oiseau venu de France arrivait au Japon. Kurotori, «l'oiseau noir», est arrivé au Japon. C'est le pseudonyme, vous le savez, que se donnait Claudel lorsqu'il a séjourné ici. Claudel est resté six années, de 1921 à 1927, et la résidence de France est sans doute le lieu idéal pour faire résonner son nom, lui qui fonda la maison franco-japonaise en 1924, et surtout l'institut franco-japonais du Kansai en 1927. Le Japon va marquer profondément Claudel, dans sa mémoire, bien sûr, mais aussi dans ses oeuvres, théâtrales, poétiques, dans ses écrits. C'est justement un de ses écrits que je voudrais vous citer ce soir. Dans Concours et circonstances, il observe qu'au Japon, «à chaque instant le pas et l'imagination du promeneur se trouvent arrêtés par un site concerté qui requiert l'hommage de son attention, du fait de l'intention incluse». Cette remarque-là, si je vous la cite, c'est qu'elle correspond particulièrement bien à mes premières et trop brèves impressions du Japon.
Pour vous qui vivez cela au quotidien, ces choses doivent paraître évidentes. Et je veux vous dire, vraiment, l'attention aux choses les plus infimes, le souci des détails, c'est tout sauf anecdotique, et ça traduit au Japon, me semble-t-il, une même préoccupation : celle de nous ramener sans cesse à l'essentiel, à la délicatesse des symboles, à des significations que nous avons parfois trop tendance à occulter. N'est pas Claudel qui le veut, je n'aurai pas passé sept ans mais seulement quatre jours au Japon, mais je peux vous assurer que ces quatre journées consacrées aux deux réunions du G7, dans le secteur de l'éducation et de la science et de la technologie, ont été particulièrement intenses, et même, pour vous dire la vérité, très émouvantes.
Je disais que le Japon nous incite en permanence à revenir à l'essentiel. Eh bien, ces deux G7 en sont la preuve. Vous savez que nous avons organisé à Paris la COP21 cette année, qui nous proposait de répondre à une question urgente : quel monde allons-nous laisser à nos enfants ? Et bien ces deux G7, notamment celui sur l'éducation, nous ont confrontés à une autre interrogation tout aussi pressante : quels enfants allons-nous laisser à notre monde ? le G7 éducation en particulier, il faut en avoir conscience, était un événement exceptionnel. Parce que pour ceux qui l'ignorent, le G7 éducation ne s'était pas réuni depuis 2006. Et c'est d'abord une initiative japonaise que de le réunir à nouveau et vraiment, je veux saluer, Monsieur le Ministre, votre clairvoyance. Je veux vous remercier aussi sincèrement d'avoir voulu placer cette rencontre du G7 éducation sous le signe de la solidarité avec la France, durement touchée en 2015 par les attentats. C'est un très beau témoignage d'amitié, d'une amitié ancienne et solide, mais aussi promise à un bel avenir. Il y a été question de la modernisation de notre éducation, de révolution numérique, de mutation de nos économies. Mais il y a été question également de lutte contre les inégalités à l'école, de lutte contre les discriminations, et de valeurs. Il y a été question du rôle éminent que l'éducation peut porter dans chacun de nos pays, pour faire en sorte d'éduquer aussi à la citoyenneté de nos jeunes. Ce sont pour moi des sujets essentiels, des priorités, même ; j'ai été heureuse de voir que sur chacun de ces sujets, nous avions un accord.
Cette communauté de destins et de devenirs, elle est aussi apparue d'évidence au G7 recherche. Là, c'est du vieillissement de la population, des inégalités entre les hommes et les femmes, du futur des mers et des océans, du développement des énergies propres que nous avons parlé, pour veiller à ce que nos efforts de recherche respectifs bénéficient à tous pour être vraiment efficaces et se transformer rapidement en innovations réelles. Là aussi, nous avons conclu ce G7 recherche par un sentiment simple : que nous sommes embarqués, tous, sur un même bateau, dans un même voyage, et que notre avenir n'est donc pas un avenir fragmenté en devenirs nationaux, mais c'est un avenir commun, mondial, et c'est à cette échelle mondiale que les problèmes se posent. C'est alors à cette échelle mondiale qu'ils doivent être résolus.
Ce déplacement, enfin, au-delà de ces deux rendez-vous internationaux, a été l'occasion de constater et de renforcer la richesse de nos liens, entre la France et le Japon. Je savais qu'il existait entre nous une correspondance et une complicité singulière. J'évoquais à l'instant Claudel ; on pourrait parler de Foujita, de Dominique Perrault, de Kô. Mais ce que je voulais voir par moi-même, et je l'ai vu, c'est qu'au-delà de ces artistes particuliers, il y a toujours une appétence et une fraternité entre les Français et le Japon, qu'on retrouve en particulier dans le fait qu'aujourd'hui au Japon, la langue française reste étudiée par près de 250.000 personnes de tous les âges.
La plus belle illustration de cette fraternité, c'est les huit jeunes lycéens qui sont dans la salle et auxquels je demanderai de bien vouloir approcher. Quatre jeunes lycéens français, quatre jeunes lycéens japonais, qui étudient chacun la langue de l'autre, et qui viennent de travailler à la rédaction d'un rapport commun sur l'enseignement de l'écologie en France et au Japon. C'est absolument fabuleux. Ils font partie du réseau Colibri, l'association qui a été fondée en 2005 par des professeurs français et japonais pour promouvoir ces échanges.
Merci de les applaudir : vous avez compris que vous avez là le visage de cette amitié franco-japonaise, la plus belle illustration qui soit. Je veux vous dire qu'au-delà de ces quatre lycéens français qui sont présents parmi eux, en France, l'apprentissage du japonais se développe de plus en plus, et c'est une excellente nouvelle. Nous en sommes à quelque 6.000 personnes qui le choisissent, et c'est la raison pour laquelle j'ai décidé - c'était une chose qui était attendue depuis de nombreuses années -, de créer un CAPES de japonais, pour faire en sorte qu'on ait en France des professeurs formés, d'un bon niveau, qui passent ce concours, qui est un concours important, et qui soient en capacité d'enseigner le japonais au collège et au lycée à nos élèves.
À l'université Toyo où j'étais ce matin et où j'ai été particulièrement bien accueillie aussi par des étudiants particulièrement volontaires et qui pour beaucoup d'entre eux apprenaient le français, à l'université Toyo, j'ai veillé à dire clairement que la France souhaite accueillir davantage d'étudiants japonais. Davantage - aujourd'hui, nous en sommes à quelque 2.000, ce n'est pas mal ; on peut faire mieux. Il faut que les jeunes Japonais, Mesdames et Messieurs les Lycéens japonais, vous sachiez qu'on est bien comme étudiant en France, qu'on est bien accueilli, que par la loi, par la politique volontariste ces derniers temps, nous avons beaucoup amélioré les choses, y compris d'ailleurs pour introduire des enseignements en anglais au sein de l'université, ce qui peut vous faciliter la tâche, mais aussi pour vous accueillir dans les meilleures conditions possibles, avec un guichet unique pour vous décharger des démarches administratives. Bref, notre porte vous est ouverte.
Et puis il faut que vous sachiez qu'avoir fait ses études en France pour un Japonais ou au Japon pour un Français, c'est loin d'être anodin. Tous ceux qui ont fait cette expérience dans cette salle j'espère le confirmeront, c'est une expérience d'une vie qui vous marque profondément. Cela n'est pas un hasard si le réseau France Alumni que nous avons voulu développer partout dans le monde pour les étrangers qui ont fait leurs études en France, ce réseau France Alumni, c'est au Japon qu'il compte le plus grand nombre d'inscrits. Pardon. C'est le troisième pays, mais c'est pareil. Il faut me donner raison, Monsieur l'Ambassadeur. C'est l'un des pays qui compte le plus grand nombre d'inscrits, c'est le troisième dans le monde. Cela veut dire qu'une fois qu'on a fait ses études en France, mesdames et messieurs futures étudiants japonais en France, on choisit généralement de garder un lien avec ce pays, avec sa langue, avec sa culture et vice-versa pour les étudiants français qui font leurs études au Japon. Derrière cela, il y a un choix de coeur, on le voit très bien. Souvent d'ailleurs, des couples mixtes se forment, j'ai pu le remarquer. Mais il y a aussi un choix de raison : parce que l'on voit bien à quel point les entreprises françaises sont actives au Japon et à quel point il y a des perspectives professionnelles qui se développent grâce à cette double culture.
Et quand je parle de culture, n'oubliez pas que la culture n'est pas que littéraire, artistique : la culture est aussi scientifique, oui la science est une culture, un art. Cette culture scientifique, force est de constater - et j'ai eu le plaisir d'aller à Tsukuba visiter le laboratoire de recherche sur la robotique qui est codirigé par les Français et les Japonais -, force est de constater que cette culture scientifique est merveilleusement élaborée, réalisée et efficace, parce qu'elle est conduite en complémentarité. Les résultats en la matière sont absolument remarquables. Je voudrais citer aussi la réussite toute particulière de la coopération franco-japonaise autour de la lutte contre le virus Ebola, qui associe l'INSERM, l'entreprise Toyama et St. Luke's International University. Ce sont vraiment de très belles réussites. Et dans cette Année franco-japonaise de l'Innovation, qui a été lancée par le Premier ministre français et le Premier ministre japonais, je crois que ce sont les plus belles illustrations que l'on puisse trouver pour dire que la France et le Japon doivent faire fructifier plus encore leurs relations.
Mesdames et Messieurs, en conclusion, de ces propos, vous aurez retenu, je l'espère, qu'entre la France et le Japon, il est question de développement économique, de développement scientifique, d'éducation, de recherche. Il est question surtout de valeurs, de sens, et cette recherche du sens, c'est un vrai plaisir pour moi que de la mener ensemble avec vous. Je crois qu'au fond, ce qui caractérise la véritable amitié, c'est-à-dire celle qui conduit l'autre à vous rappeler en permanence l'essentiel. Je crois que de ces quatre journées au Japon, ce que j'aurai retenu plus que tout, c'est l'essentiel.
Je vous remercie, j'ai été heureuse d'être là. Je remercie M. l'ambassadeur de son accueil, de l'organisation parfaite de ce séjour, et je veux vous dire «vive la France, et vive le Japon».
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80334|
C'est un grand plaisir et un grand honneur pour moi d'intervenir aujourd'hui devant vous dans l'enceinte de l'Université Toyo. Monsieur le Professeur, puisque vous avez évoqué le tremblement de terre que nous avons connu hier, qui était d'une faible intensité, laissez-moi d'abord exprimer toute la compassion du peuple français à l'égard du peuple japonais pour celui bien plus grave que le Japon a connu à Kumamoto, avec des pertes humaines. Nous sommes à vos côtés et dans la solidarité totale.
Je disais donc que c'est un grand honneur d'intervenir dans cette université. Je crois que ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre, mais nous avons de Bouddha de très nombreuses citations que nous avons conservées. Il en est une que je voudrais convoquer pour introduire mon propos : «il n'existe rien de constant, si ce n'est le changement», disait Bouddha. Oui, votre université, depuis sa fondation il y a 130 ans - il y aura 130 ans l'an prochain -, a considérablement changé. Mais elle l'a fait en conservant une relation particulière avec la philosophie, comme le désirait son fondateur, le docteur Enryo Inoue. De cette relation, le magnifique jardin de la philosophie est aujourd'hui la preuve. Cela traduit cette alliance si particulière que je constate depuis le début de mon déplacement au Japon entre la tradition et la modernité, entre l'audace architecturale des bâtiments les plus récents, et la préservation de l'esprit originel de cette université. Votre université, Mesdames et Messieurs, Chers Étudiants, est exemplaire de la qualité et de l'excellence de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique au Japon. Membre du club très fermé des «Top Global University» sélectionnées par le MEXT, je sais que cette université porte de très nombreux programmes de qualité. Mais je dois dire que ce à quoi je suis le plus sensible, c'est évidemment la place occupée ici par la langue française : 2.500 étudiants, des programmes d'échanges très fructueux, avec des universités françaises comme Strasbourg, Pierre et Marie Curie à Paris ou encore Nantes. Tout cela évidemment, est fort bienvenu. Et le fait enfin que votre université ait été l'une des premières universités mixtes filles-garçons du Japon, et que vous fêtiez cette année les 100 ans de l'ouverture du recrutement aux femmes, tout cela accroît mon intérêt pour votre université et explique pourquoi j'ai voulu venir ici.
Alors, dans cette institution qui est chargée d'histoire, je voudrais partager avec vous quelques réflexions sur l'université du XXIe siècle, c'est l'invitation qui m'a été faite. D'abord, l'université est un sujet majeur aujourd'hui. Je viens de participer - vous le rappeliez - aux deux réunions du G7 qui se sont tenues dans votre pays, l'une sur l'éducation, l'autre sur la recherche. La vision que chacun d'entre nous autour de cette table du G7 a de l'université, au fond, est la même. Nous avons tous conscience que l'université est un socle indispensable à l'épanouissement d'une société de la connaissance pour demain, que c'est une ressource essentielle dans les changements que nous traversons, et pour apporter des réponses aux défis que nous affrontons. Alors, me direz-vous, ce n'est pas la première fois en ce XXIe siècle que le monde change ; le monde n'a cessé de changer ces derniers siècles. Oui, mais la réalité c'est qu'autrefois, au XIXe siècle par exemple, le changement se comptait en siècles. C'était tous les siècles qu'on avait un changement très important, culturel, économique... au XXe siècle, le changement a commencé à se compter en décennies ; c'est tous les dix ans qu'on avait une rupture, un changement... Aujourd'hui, n'importe quel propriétaire d'ordinateur sent bien à quel point son matériel devient obsolète de plus en plus rapidement. Le monde d'hier n'est déjà plus celui d'aujourd'hui. Notre monde n'a jamais changé aussi vite et dans autant de domaines, et ce dans une période de temps aussi courte. À chacun de ces changements, évidemment, les défis se multiplient et deviennent de plus en plus urgents, de plus en plus pressant. Oui, ils sont multiples, ces défis économiques, sociaux, environnementaux. Ils recouvrent autant de risques que d'opportunités. Et partout dans le monde, ces évolutions provoquent une soif d'innovations et de savoirs sans précédent, ainsi que de nouveaux besoins en termes de qualifications et de compétences.
Or précisément, tout cela, c'est ce qui fonde l'université. L'innovation, le savoir, les qualifications, les compétences. Les lieux comme les universités, partout dans le monde, sont donc regardés comme des atouts formidables. Comme le lieu où on est capable de trouver des personnes solidement formées, pour des emplois très diversifiés. Comme des pôles d'attraction, aussi, pour faire venir les gens de l'étranger, des étudiants étrangers, par exemple, qui viennent ici et qui sont ensuite capables, en repartant dans leur pays, de donner un rôle à la réalité du Japon tel qu'ils l'ont vécu.
Tout le monde a donc de grandes attentes à l'égard des universités. Cela fait peser sur ces universités de lourdes responsabilités qu'elles ne peuvent assumer que si elles bénéficient d'un soutien sans faille de la part des citoyens, de la part des pouvoirs publics, de la part de chacun d'entre nous. Elles ne peuvent assumer ces responsabilités que si elles changent à leur tour pour prendre en compte ce besoin de savoirs que j'ai évoqué, car elles aussi, elles ont besoin de s'adapter, à cette nouvelle donne. On sait par exemple que pendant longtemps, l'enseignement supérieur, les universités ont été l'apanage de l'élite du pays. Elles accueillaient un nombre somme toute réduit d'étudiants, et donc il y avait une pédagogie qui allait avec ce nombre réduit d'étudiants accueillis. Aujourd'hui dans tous les pays, les universités accueillent une part de plus en plus importante de la jeunesse. C'est le cas au Japon, c'est le cas en France aussi. Nous sommes entrés dans une phase de démocratisation sans précédent. À tel point que l'on peut prévoir dans beaucoup de pays que dans dix ans à peine, plus de la moitié de la population sera diplômée du supérieur. C'est un chiffre considérable, mais ça n'est pas qu'un chiffre, c'est une réalité. Cela suppose donc pour l'université du XXIe siècle des changements considérables aussi.
Le premier enjeu est d'ordre quantitatif, c'est le plus évident, car les étudiants, ce sont des personnes. Il faut donc également adapter l'architecture des universités pour pouvoir quantitativement accueillir autant de monde. Les étudiants ne sont pas de «purs esprits» : il leur faut des campus avec des services, des besoins qui soient remplis avec des aides en termes de logement. Pour que vous ayez des idées claires, peut-être, à l'échelle de la planète, entre 2000 et 2015, on compte deux fois plus d'étudiants sur le globe. Aujourd'hui, vous êtes environ 200 millions d'étudiants et ce chiffre ne fera que croître. Donc oui, il faut que nos universités se repensent en termes de place et d'architecture grâce à l'appui des pouvoirs publics.
Mais la question n'est pas que quantitative, bien entendu, elle est surtout qualitative. Le sujet est donc de savoir comment les notions universités arrivent à passer d'un enseignement qui était réservé à quelques-uns, à un enseignement ouvert au plus grand nombre, pour vraiment relever le défi de la démocratisation. Cela suppose de s'adapter à la diversité des publics, des étudiants, des parcours, des métiers. Cela suppose de veiller à ce que chaque étudiant qui passe par ces murs réussisse à la fin, donc amener chaque étudiant à atteindre le meilleur de lui-même. Cela suppose des évolutions dans les mthodes pédagogiques, d'où l'intérêt d'innover en la matière, avec par exemple, un suivi de plus en plus personnalisé, avec aussi un meilleur usage des potentialités considérables du numérique, car dans ce domaine, il y a énormément de choses à développer et à amender, j'en suis persuadée.
Le troisième enjeu est celui de l'affirmation du rôle de l'enseignement supérieur dans la construction de nos sociétés, au-delà des formations vers l'emploi et de ses contributions au développement économique. D'une certaine façon, plus la démocratisation des publics qu'elle touche est importante, plus l'université revient au centre de la cité, retrouve la place centrale qui doit être la sienne dans un pays et dans une ville. Dans une société apprenante, l'université trouve toute sa place et ne se résume vraiment pas à la seule question de l'insertion professionnelle. L'université n'est pas là que pour préparer à l'exercice des métiers. L'université est liée à la connaissance, à la recherche, et plus généralement à ce qu'on appelle l'humanisme, qui intègre forcément la philosophie, et je sais qu'à Toyo, cette philosophie intègre une place très singulière. Il ne s'agit pas simplement de rendre les étudiants capables de faire : il faut aussi être capable de donner à nos actions, à notre présence au monde un sens. Il faut aussi pouvoir inscrire nos pratiques dans une réflexion et une conscience aiguës des enjeux qui sont les nôtres.
Pour cette raison, l'université doit avoir au XXIe siècle dans nos préoccupations, dans notre projet de société, une place absolument centrale. Elle n'est pas seulement destinée à accueillir les jeunes qui terminent leurs études secondaires, elle n'est plus ce lieu si étroitement lié à la jeunesse. Non, à l'avenir, les années d'études correspondront à une période beaucoup plus floue, beaucoup plus vaste. On reviendra étudier à l'université à 40, 50, 60, 70 ans, et l'université doit proposer de nouvelles filières de formation destinées à d'autres publics que simplement les jeunes. Je crois vraiment que l'avenir de nos pays se dessine aussi dans cette idée-là, et que cette idée d'une formation tout au long de la vie doit passer pour nos universités, à la fois par les amphithéâtres le mieux construits possible, le plus confortable possible, mais aussi par des MOOC, par de la formation à distance, en ligne, que les universités doivent investir.
Ce faisant, l'université du XXIe siècle ne contribuera pas seulement à la croissance économique du pays - c'est déjà très important qu'elle le fasse -, mais elle contribuera aussi à promouvoir les valeurs fondamentales qui forgent nos sociétés. Nous avons besoin de ces valeurs, car ce sont ces valeurs qui nous permettent de ne plus voir dans l'avenir quelque chose de sombre, de menaçant, une fatalité qu'on subirait, mais au contraire le résultat de notre travail, de nos efforts.
C'est pourquoi les stratégies pédagogiques et scientifiques des universités doivent demeurer larges et ouvertes. L'université du XXIe siècle sera ainsi un espace d'expression et de liberté, ce qu'elle a toujours été au fil des siècles passés. C'est d'ailleurs intéressant, parce que moi-même, je vous parle de l'université du XXIe siècle comme si elle restait à venir, mais nous sommes déjà dans le XXIe siècle. C'est déjà une réalité présente qui est en train de s'élaborer partout dans nos pays, si j'en crois ce qui se passe au Japon, mais aussi en France. Prenons la France : le président de la République, François Hollande, a décidé de placer la jeunesse au coeur de ses préoccupations, alors nous avons énormément travaillé pour améliorer la démocratisation de l'enseignement supérieur. Le nombre d'étudiants a été en France multiplié par huit au cours des cinquante dernières années. Il atteint aujourd'hui deux millions et demi.
Nous avons adopté en juillet 2013 une loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche qui prévoit notamment que tous les cinq ans, nous élaborons une stratégie nationale de l'enseignement supérieur au service de laquelle nous mettons des moyens financiers importants.
Cette loi prévoit surtout que les établissements de l'enseignement supérieur, les universités et les grandes écoles en France, puissent être regroupées pour une rencontre plus forte, notamment dans la compétition internationale. Enfin, cette loi prévoit que nous ouvrions de façon très large notre enseignement supérieur à toutes les populations, les jeunes comme les moins jeunes, comme je viens de le dire - toutes les populations, cela signifie également internationalement parlant. Nous avons une vraie chance en France qui est d'accueillir beaucoup d'étudiants étrangers, nous en avons 300.000. Nous sommes à la troisième place au niveau mondial en termes d'accueil des étudiants étrangers, mais je vous le dis aussi simplement que je le pense : nous voulons en accueillir plus, et notamment des Japonais. Alors venez, vraiment, vous serez les bienvenus. Pour promouvoir cette stratégie d'internationalisation, nous avons revu un certain nombre de nos politiques pour faire en sorte notamment que l'arrivée en France pour un étudiant étranger soit un fleuve tranquille, et non une tempête de procédures administratives toutes plus compliquées les unes que les autres. Aujourd'hui se développent ce qu'on appelle des guichets uniques, ce qu'on appelle de la bienveillance à l'égard de ceux qui nous viennent d'autres cultures, d'autres pays, et qu'on accompagne bien mieux que par le passé.
L'université du XXIe siècle est donc en train d'ouvrir ses portes au monde entier. Mais dans ce monde ouvert, il existe des espaces qui sont plus proches que d'autres.
L'espace le plus proche pour la France est l'espace européen. D'ailleurs, peut-être l'avez-vous en tête : l'Europe, avant de devenir l'espace politique, économique que l'on connaît aujourd'hui a d'abord été une Europe des universités, et nous sommes aujourd'hui les héritiers de cette histoire. C'est la raison pour laquelle nous voulons la conforter. Le fait d'être une Europe des universités, une Europe de l'humanisme, nous aide beaucoup lorsqu'il s'agit d'apporter des réponses aux défis que nous rencontrons, et celui des réfugiés, que nous connaissons actuellement, n'est pas le moindre. C'est ce qui nous permet d'être fermes sur nos valeurs, fermes sur l'importance que nous accordons à la culture, à la connaissance. C'est ce qui nous permet aussi d'allier la fidélité au passé et les exigences du présent.
J'en reviens au Japon. J'ai pu constater depuis trois jours que je suis ici à quel point nos visions sur l'éducation, sur la recherche, sur l'innovation, étaient proches entre la France et le Japon. J'ai vraiment apprécié les orientations vers plus d'ouverture, le recentrage sur l'humain, que vos politiques, dans ces domaines, mettent au premier plan. Je le disais tout à l'heure, nous souhaitons accueillir davantage d'étudiants japonais dans nos universités -nous en accueillons déjà : nous en avons quelque 2000 aujourd'hui - mais je constate que vous venez beaucoup dans les domaines des sciences humaines et sociales. C'est bien. Je comprends pourquoi. Je connais par exemple l'attrait qu'exercent les oeuvres d'un auteur comme Marcel Proust au Japon, qui a encore connu une nouvelle traduction récemment, et je vous en remercie. Mais je veux vous dire que nous avons plein d'autres possibilités en France dans nos formations scientifiques, d'ingénierie, dans le domaine du droit, de l'économie, des sciences politiques, et que nous voulons aussi vous faire découvrir cela.
Je tiens également à vous dire, car cela vous parlera, vous y serez sensibles, que par ailleurs, en France, se développe de plus en plus une appétence pour le japonais, pour la culture japonaise, qui m'a conduite à prendre une décision inédite dans notre histoire, que j'ai annoncée à mon homologue ministre de l'Éducation il y a deux jours, à savoir la création d'un concours de l'enseignement du japonais en France, le fameux CAPES, qui n'existait pas jusqu'à présent pour l'enseignement du japonais. Nous avons donc décidé de le créer pour pouvoir recruter des professeurs de japonais d'un bon niveau, de qualité, et qui puissent accompagner cette appétence des Français pour le japonais - ils sont près de 6000 aujourd'hui à vouloir l'apprendre en langue vivante. Je pense qu'avec la création de ce CAPES, nous pourrons encore démultiplier ce nombre.
Ensuite, cette proximité entre nous, c'est aussi l'innovation, la recherche. J'ai eu la chance de visiter un laboratoire à Tsukuba, où les équipes françaises et les équipes japonaises travaillaient ensemble sur la robotique, et arrivaient ensemble à des résultats extraordinairement élaborés et innovants. Nous avons lancé à Tokyo en octobre 2015 l'année franco-japonaise de l'innovation ; et biens c'est aussi ça, nos universités, notre recherche. C'est cette capacité à faire évoluer notre recherche et notre innovation dans le meilleur sens possible, en s'enrichissant dans cette relation si complémentaire. C'est la raison pour laquelle en juillet prochain, nous allons demander à de hauts responsables de 60 universités japonaises de venir en France pour participer à un séminaire conjoint sur la convention universitaire entre nos deux pays. C'est une opportunité qu'il nous faut absolument saisir. Et c'est également ainsi que l'on contribuera à l'émergence de cette université du XXIe voire du XXIIe siècle.
Mesdames et Messieurs, en conclusion, j'ai toujours été persuadée d'une chose - je le disais au président de l'université qui m'a accueillie tout à l'heure -, c'est que quand on va à l'étranger, en déplacement officiel comme je le fais en ce moment, il faut absolument passer par une université, parce que c'est le lieu où l'on sent à la fois l'âme d'un pays, son souffle vital et son inscription dans la modernité. Tradition et modernité : c'est ce que je ressens en étant parmi vous aujourd'hui. Ce que je ressens aussi, c'est que ce beau mot «humanisme» que j'évoquais tout à l'heure, et qui me tient tellement à coeur, trouve tout son sens. L'humanisme qui passe par la philosophie, l'humanisme qui passe par la connaissance, l'humanisme aussi, je l'espère, qui passe par les relations de plus en plus étroites entre votre pays et le nôtre. Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80335|.
La Conférence nationale du Handicap, au cours de laquelle le président de la République vient de réaffirmer notre engagement pour une société plus inclusive, est pour moi l'occasion de dire ma mobilisation sans relâche pour une école, elle-aussi, toujours plus inclusive.
L'école inclusive, c'est celle qui reconnaît que tous les enfants partagent la capacité d'apprendre et de progresser, [...] qui veille à l'inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction." C'est désormais inscrit dans la Loi de la Refondation pour l'École de la République adoptée en début de ce quinquennat.
C'est un changement de paradigme considérable : ce n'est désormais plus aux élèves de s'adapter aux besoins du système mais à l'Ecole de s'adapter aux spécificités des élèves et de mettre en place tous les dispositifs nécessaires à leur scolarisation et à leur réussite.
Les progrès accomplis par l'Éducation nationale sont considérables : près de 280 000 élèves en situation de handicap sont aujourd'hui scolarisés en milieu ordinaire, ce qui représente une augmentation de 25% depuis 2012. Les dispositifs collectifs créés se sont développés : le nombre d'unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) s'est accru de plus de 16%. Dans toutes les écoles de France, on compte aujourd'hui au moins un élève en situation de handicap.
Dès lors, pour certains élèves en situation de handicap, un accompagnement humain plus ciblé est nécessaire. Depuis 2014, nous avons fait de l'accompagnement des élèves en situation de handicap une mission reconnue au sein d'une filière métier identifiée. 28 000 personnes accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) ont désormais la possibilité, à terme, d'obtenir un contrat à durée indéterminé. Mais de plus en plus d'élèves ont besoin d'être accompagnés : ils étaient plus de 80 000 élèves en 2012, et plus de 122 000 en 2015. Alors pour répondre à ces besoins, depuis plusieurs années, nous sollicitons des personnes en contrat aidé. Chaque jour, au côté des enseignants, ces personnes facilitent la mise en uvre des parcours de formation adaptés, dynamiques et mobilisent leurs compétences au service de la réussite des élèves. La précarité de leurs contrats et la non-pérennité de leur présence aux côtés des élèves et des équipes pédagogiques n'était cependant pas acceptable plus longtemps dans un système scolaire qui se veut véritablement inclusif.
C'est pourquoi et après des mois de travail sur ce sujet, nous avons conclu à la nécessité de pérenniser ces emplois. Le président de la République l'a donc annoncé ce matin : sur les 5 ans à venir, les 56 000 contrats aidés (20h/semaine) seront transformés en 32 000 emplois (35h/semaine) d'AESH. Avec cette mesure ambitieuse, nous mettons enfin un terme aux ruptures d'accompagnement en cours d'année scolaire, nous assurons une meilleure qualité de l'accompagnement, et nous permettons à de nombreuses personnes qui le souhaitent et qui ont manifesté leur compétence au cours de leurs deux années en contrat aidé, d'accéder à des emplois reconnus. C'est évidemment une excellente nouvelle qui trouvera à s'appliquer dès la rentrée 2016.
Au-delà de l'accompagnement, rendre l'école accessible est pour moi un enjeu essentiel. Tout d'abord, il faut des enseignants mieux formés ; la réintroduction, dès 2013, d'une formation initiale et continue au sein des Ecoles Supérieures du Professorat et de l'Education (ESPE), est le gage d'une école qui s'adapte, qui prend en compte tous les élèves en mobilisant les outils d'aujourd'hui. Le numérique au service des besoins éducatifs particuliers pour la scolarisation des élèves en situation de handicap en fait partie, j'en suis foncièrement convaincue : le déploiement du numérique, et notamment les tablettes tactiles, apporte en effet des réponses efficaces aux problématiques d'accessibilité rencontrées par ces élèves, en offrant des solutions de personnalisation et d'adaptation diversifiées. C'est particulièrement efficace pour les élèves présentant des troubles "DYS" : les supports écrits sont plus adaptés et plus immédiatement compréhensibles. Grâce aux possibilités de paramétrages prévus initialement dans les logiciels, l'enseignant est capable d'atteindre tous les élèves.
J'ai ainsi demandé, dans le cadre du grand plan numérique actuellement déployé dans les établissements scolaires, que tous les nouveaux projets de ressources numériques soutenus par le ministère intègrent les exigences d'accessibilité prévues pour les élèves en situation de handicap.
Penser l'accessibilité de l'École, c'est encore penser à la manière dont s'organise la journée de l'enfant en situation de handicap, au-delà du temps scolaire. Car l'éducation ne s'arrête pas aux portes de l'école. Oui il faut veiller à ce que les activités périscolaires, dans le cadre de la réforme des rythmes éducatifs, soient davantage accessibles. C'est avec cette intention que le gouvernement a mobilisé les caisses d'allocations familiales partout sur le territoire, afin qu'elles puissent aider les communes et intercommunalités qui les sollicitent, financièrement et en termes de méthode. Et pour mieux accompagner les collectivités locales, j'ai initié avec Ségolène Neuville, secrétaire d'Etat chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre l'exclusion, et le Défenseur des Droits un groupe de travail associant tous les acteurs concernés, qui a permis la production d'un guide de bonnes pratiques mis à la disposition des communes et des intercommunalités.
Améliorer les parcours de tous les jeunes, c'est enfin penser la manière dont l'Ecole permet aux familles d'accompagner leur enfant tout au long de la scolarité. Tout parent souhaite la réussite de son enfant et je souhaite que toutes les familles, quelles que soient leur situation sociale, leur situation de handicap ou leurs difficultés à appréhender la langue française, puissent accéder à une information claire. Dans ce cadre, j'ai demandé à ce que les documents les plus usuels consultables ou téléchargeables sur nos sites education.gouv.fr et eduscol.education.fr puissent être rendus totalement accessibles (facile à lire et à comprendre (FALC), langue des signes française (LSF), audio, impression braille.) La mise en accessibilité des documents les plus utiles aux familles est un enjeu de responsabilité et de citoyenneté.
Il faut aller plus loin encore. On le sait, l'objectif du gouvernement est de permettre à chaque enfant de trouver une réponse adaptée à ses besoins spécifiques. Et certains jeunes, du fait de la nature ou du degré de leur handicap, ne peuvent fréquenter l'école sans l'accompagnement de professionnels du secteur médico-social. Dans ce cas, les établissements médico-sociaux se doivent de tout mettre en uvre pour leur offrir des perspectives d'épanouissement et de parcours de vie. Il y a donc pour nous un enjeu fort de complémentarité entre l'École et ces établissements. C'est dans cet état d'esprit que nous nous sommes engagées, avec Ségolène Neuville, secrétaire d'Etat chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, et les associations gestionnaires d'établissements médico-sociaux, à déplacer une centaine d'unités d'enseignements de ces établissements dans les enceintes mêmes d'établissements scolaires. Plus de 100 l'ont été au cours de cette année 2015/2016 et 100 nouvelles unités seront installées au cours de l'année scolaire prochaine. De même, nous souhaitons, dans une approche partagée, développer la coopération entre le secteur médico-social et l'éducation nationale parce que, chacun le sait, l'école ne peut pas tout, toute seule. Ainsi, localement, en tant que de besoin, l'Éducation nationale doit pouvoir s'appuyer sur les compétences professionnelles des acteurs médico-sociaux pour faciliter la scolarisation et la formation des élèves en situation de handicap par l'accompagnement direct, mais aussi par le soutien aux professionnels de l'école.
Je sais également que nous devons faire plus, et mieux, à l'égard des jeunes avec des troubles du spectre autistique (TSA). C'est le sens de notre engagement porté par le 3e Plan Autisme, que nous mettons en uvre. Nous connaissons aujourd'hui les bénéfices d'un dépistage précoce, ainsi que les avantages d'une mutualisation des interventions scolaires et médico-sociales ou sanitaires dans la prise en charge de ces jeunes enfants. Nous sommes en train de créer 110 unités d'enseignement avec les plateaux techniques du secteur médico-social, au sein d'écoles maternelles ; 60 ont déjà vu le jour et 50 nouvelles ouvriront au cours de la prochaine année scolaire. Des enfants de 3 à 6 ans, présentant des troubles du spectre autistique (TSA), peuvent donc désormais être scolarisés dans ce nouveau dispositif. Présents à l'école comme les autres élèves, ils bénéficient de temps consacrés aux apprentissages et à l'accompagnement médico-social.
Tant a été fait et il y a tant à faire encore pour l'école inclusive ; mais la voie est tracée. Elle porte l'école du 21ème siècle, fondée sur les valeurs républicaines. D'aucuns déploreront que les résultats ne seront visibles qu'à l'échelle d'une génération. Pour partie, oui ! Car c'est bien demain, au cur d'une société plus juste et humaniste, que nous percevrons l'empreinte d'une école qui met au cur de son projet l'idéal d'Égalité, en offrant à tous, quelle que soit leur situation, les conditions de la réussite personnelle et de l'insertion sociale.
Source http://www.education.gouv.fr, le 24 mai 2016
Monsieur le Commissaire général des Rencontres,
Mesdames et Messieurs,
Merci de m'accueillir ce matin à vos rencontres des ingénieurs territoriaux de France, 1ère étape de ma visite à Saint-Etienne.
Venir ici me tenait à cur depuis ma prise de fonction en tant que ministre, tant cette ville est riche d'enjeux et d'initiatives remarquables en matière de logement et d'aménagement urbain, avec les problématiques propres, et trop souvent ignorées, aux territoires « détendus ». La palette des opérations que je visiterai tout à l'heure autour de la place Jacquard réaménagement des espaces publics, réhabilitation énergétique de logement, mixité en centre-ville grâce à l'accession sociale à la propriété atteste de cette richesse.
Mais la date de cette visite ne doit évidemment rien au hasard, puisque venir aujourd'hui à Saint-Etienne est l'occasion de participer, comme je le souhaitais, au rendez-vous incontournable que sont devenues vos Rencontres, et par là de saluer la contribution essentielle des ingénieurs territoriaux à la construction, à l'aménagement et au développement de notre pays dans tous ses milieux, du rural à l'urbain.
Ce rendez-vous intervient cette année dans un contexte dont nous nous réjouissons tous, celui de la reprise de la construction. Le nombre de logements autorisés à la construction sur les 3 derniers mois s'établit à plus de 100.000, soit une augmentation de près de 20 % par rapport au 1er trimestre 2015.
Ce chiffre, comme l'ensemble des indicateurs du logement, permet d'affirmer que nous sommes sur une tendance positive pour l'avenir et que le nombre des mises en chantiers, déjà en hausse de 2,5 % par rapport à l'année précédente, va s'amplifier.
L'ensemble des professionnels confirment cette évolution, et c'est aussi un gage pour la reprise des projets d'aménagement.
Cette dynamique est essentielle pour répondre aux besoins de logement qui restent criants dans notre pays. La soutenir constitue donc une priorité de mon action, en poursuivant la mise en uvre de la politique de relance initiée par le Gouvernement.
Mais la politique du logement ne se résume pas à construire toujours plus et de façon indifférenciée.
Car le logement où l'on vit, et l'environnement dans lequel on habite, ne sont pas des biens comme les autres.
Ce sont des biens communs indispensables pour l'émancipation et la construction d'un projet de vie. Ce sont des leviers majeurs de cohésion sociale et d'équilibre entre les territoires comme avec notre environnement naturel.
Notre responsabilité, c'est donc de produire des logements de qualité, adaptés aux moyens et aux besoins de chacun, dans un cadre respectueux de l'environnement et propice aux activités et à la vie sociale.
L'enjeu, c'est donc d'ouvrir une nouvelle étape du logement et de l'aménagement, celle de l'habitat durable. C'est le sens de mon action, car c'est une clé pour l'égalité et la qualité de vie de nos concitoyens comme pour le développement équilibré de nos territoires.
Construire l'habitat durable pour tous implique à la fois d'inscrire notre action dans la réalité sociale des territoires, et d'innover pour répondre à l'évolution des modes de vie comme aux impératifs environnementaux.
« Innovations et territoires », c'est le thème de vos Rencontres cette année, et c'est le couple moteur de la politique que je veux mener en faveur de l'habitat durable.
* Il nous faut innover face aux grandes mutations qui impactent le logement et l'aménagement :
- La transition énergétique et environnementale des territoires, dans le cadre de la mise en oeuvre de la LTE et de l'Accord de Paris pour le climat
- La révolution numérique en cours dans le domaine de la mobilité, de la construction, de l'aménagement
- La reconfiguration de la carte territoriale, et la nouvelle répartition des compétences qui l'accompagne
- La demande croissante de participation de citoyens qui veulent être acteurs de leur logement et de leur environnement
* Et il nous faut adapter notre action à la diversité et aux enjeux spécifiques des territoires :
- Les métropoles de la loi MAPTAM, et les enjeux particuliers du Grand Paris,
- La carte intercommunale en pleine reconfiguration
- Les territoires ruraux où, on l'oublie trop souvent, le manque de logement social, la nécessité de la rénovation énergétique des bâtiments ou encore l'enjeu d'un aménagement qui ne soit pas synonyme d'étalement et d'artificialisation des sols, sont également vivaces.
Cela implique de territorialiser l'ensemble des politiques de logement et d'aménagement, afin de favoriser une construction qui réponde et corresponde aux besoins de chacun, là où il vit. J'y reviendrai.
Cela implique également le développement d'une ingénierie « sur-mesure », présente dans tous les territoires et capable de s'adapter à la diversité des problématiques locales.
C'est ainsi que nous pourrons répondre au besoin d'accompagnement des élus dans tous les territoires pour mettre en oeuvre leurs projets de développement, et favoriser l'égalité entre les territoires.
Le renforcement de l'ingénierie au service de tous les territoires, dans la diversité de leurs moyens et de leurs enjeux, est une première évolution indispensable pour y favoriser le logement et l'aménagement durables.
Le champ des besoins est large. Ma conviction est qu'il nous faut développer de nouveaux modes de coopération entre l'ensemble des acteurs Etat, collectivités, secteur privé pour le couvrir.
* l'Etat : doit évoluer dans l'accompagnement des collectivités
En amont, être incitateur, favoriser l'émergence des projets et soutenir l'innovation : c'est le « nouveau conseil aux territoires » :
- notes d'enjeux pour les documents d'urbanisme
- démonstrateurs industriels de la ville durable dans les pôles métropolitains,
- Ecoquartiers,
- territoires à énergie positive
En aval, être facilitateur, accompagner et guider les porteurs de projet dans le déroulement du projet
- Coordination des autorisations du projet, au titre de l'urbanisme, du code de l'environnement
- Simplification et assouplissements normatifs : accessibilité, procédure intégrée pour le logement, permis environnemental
* Pour les collectivités, l'enjeu est de renforcer les compétences de maîtrise d'ouvrage :
En effet, vos Rencontres témoignent de l'ampleur des champs de compétences couverts :
- Aménagement
- transport
- Environnement
- Energie
- Déchets
- Espaces verts
Et dans ce contexte, vous, ingénieurs territoriaux, jouez un rôle extrêmement stratégique, notamment à travers :
- L'importance de la mise en réseaux,
- L'organisation des retours d'expériences
- Le partage des bonnes pratiques, et ces rencontres y participent
- La montée en puissance de l'ingénierie intercommunale
- Le travail d'articulation entre les équipes d'ingénierie des différentes collectivités
* le secteur privé, pour sa part, doit développer des prestations d'assistance à maîtrise d'ouvrage de qualité :
- en repensant sa couverture territoriale en fonction de la taille des collectivités
- en redynamisant et en actualisant les offres de services pour mieux répondre aux besoins spécifiques locaux.
* Enfin, la coproduction public-privé dans les projets de développement et d'aménagement peut constituer une voie pour renforcer les territoires en matière d'ingénierie. Le Réseau national des aménageurs, devant lequel j'intervenais récemment, en souligne l'importance. Et face à l'ampleur et à la diversité des besoins à couvrir, je crois en effet que c'est une solution à envisager dès lors qu'elle est pertinente localement.
Le développement d'une ingénierie territoriale « sur mesure » permettra ainsi d'aider les élus à faire face aux défis sociaux et environnementaux du développement de leur territoire.
Mais c'est l'ensemble des politiques de logement et d'aménagement qui doivent être territorialisées, pour développer l'habitat durable, par-delà les différences de ressources, de lieux de résidence et de cadre de vie.
C'est une priorité qui traverse l'ensemble de mon action afin de concilier, à travers les territoires, égalité d'accès à un logement abordable et réponse aux enjeux de la transition écologique.
Et les ingénieurs territoriaux ont un rôle essentiel à jouer dans la mise en oeuvre de ces priorités :
1/Renforcer la planification stratégique, à travers les SCOT et les PLU intercommunaux, pour définir des projets de territoire qui concilient préservation des ressources agricoles et naturelles, et développement des territoires, notamment dans la ruralité
Ainsi, 300 PLUi sont en cours d'élaboration, 250 nouveaux seront prochainement lancés et soutenus par l'Etat. Et nombre de ces PLUi se trouvent sur des territoires ruraux.
2/Répondre aux enjeux de production de logements adaptés aux situations locales notamment par une ingénierie foncière efficace.
C'est indispensable pour développer l'habitat durable y compris en zones détendues.
Il s'agit de veiller non seulement à la qualité de la construction, mais aussi à la vitalité des centre-bourgs, à la préservation de la richesse paysagère et environnementale des territoires, qui est une source de leur attractivité, et aux enjeux de mobilité comme d'approvisionnement énergétique.
Les territoires ruraux et semi-ruraux doivent ainsi bénéficier de stratégies d'aménagement durable, et la réforme territoriale nous en donne l'opportunité. C'est pourquoi j'ai demandé aux Préfets des nouvelles régions fusionnées d'établir un diagnostic des enjeux fonciers de leurs territoires, et un état des lieux des acteurs susceptibles d'intervenir en appui aux collectivités, en particulier les Etablissements Publics Fonciers, d'Etat comme locaux.
Je souhaite ainsi qu'à terme l'ensemble des territoires soient couverts par des EPF, car bien souvent en milieu rural, les acteurs publics fonciers sont seuls à porter la capacité d'anticipation et d'ingénierie indispensables pour répondre aux besoins de logements comme d'activité économique.
3/Relever les enjeux de rénovation des bâtiments existants en structurant un service public de la rénovation énergétique dans les territoires, en bonne intelligence avec les offres de services privées
- Les collectivités doivent être moteur, à travers la rénovation des bâtiments publics
- Pour aller plus loin, il nous faut sensibiliser et stimuler les propriétaires dans le parc privé de logements
4/ anticiper la mise en oeuvre de la future réglementation environnementale en matière de bâtiments avec le BEPOS et le bas carbone
- Fin juin un label BEPOS et carbone pour le bâtiment verra le jour
- Il permettra d'expérimenter pendant plus d'un an sur le terrain afin de finaliser la réglementation environnementale 2018
5/Promouvoir des projets urbains innovants sur le plan environnemental mais également sur le plan de l'intégration de la participation des habitants
- sobres en consommation énergétique, notamment par un usage performant des outils numériques (BIM),
- territoires à nature positive (annonce conférence environnementale)
- mixité sociale, fonctionnelle
- interaction avec leurs quartiers existants environnants
- économie circulaire
Conclusion
J'attends que vous preniez d'ailleurs toute votre place dans le réseau Vivapolis des acteurs de la ville durable afin de réfléchir conjointement
- dans le cadre de la conférence Habitat 3 à la valorisation des initiatives françaises en matière de développement urbain durable
- dans le cadre de la réflexion sur le renouveau du label écoquartier que j'ai annoncé lors de la conférence environnementale
En tant qu'acteurs-clés du développement équilibré de nos territoires, je sais que vous êtes en capacité d'apporter des idées novatrices et de faire progresser l'ensemble des réflexions en matière d'habitat et de ville durable.
Et j'y serai pleinement attentive, car je sais que ce sont des ambitions que nous partageons.
Je vous remercie.
Source http://www.logement.gouv.fr, le 25 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral80310|M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale (no 3742).
( )
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, madame la vice-présidente de la commission des lois, madame, monsieur les rapporteurs, la CMP est une étape lors de laquelle le Gouvernement est spectateur : c'est à peu près le seul moment de la procédure parlementaire où sa capacité d'influence est quasi nulle. Vous comprendrez donc que je serai très peu loquace, et que je me bornerai à remercier les acteurs de la réunion du 11 mai qui a, heureusement, abouti.
Je salue évidemment les deux rapporteurs, Colette Capdevielle et Pascal Popelin. Je n'oublie pas Dominique Raimbourg, qui a été un artisan de ce succès et auquel vous transmettrez mes remerciements. Merci aussi, évidemment, aux membres des différents groupes, qui reflètent les diverses composantes de l'Assemblée nationale et qui ont uvré à la construction de ce consensus.
Il est vrai que les débats dans cet hémicycle avaient montré le chemin, puisque le projet de loi avait été adopté en première lecture par une large majorité, ce qui n'est pas très courant pour des textes de cette importance 474 voix pour, 32 voix contre. Nous avons retrouvé cette quasi-unanimité au Sénat : 299 sénateurs s'étaient prononcés favorablement sur ce texte, quand seulement 29 d'entre eux avaient choisi de ne pas lui apporter leur soutien. Les deux assemblées avaient ainsi manifesté, dans les débats et dans les votes, leur claire volonté d'aboutir et de consolider la plupart des articles, lesquels ont été portés par trois ministres, de façon à balayer les différents aspects de la lutte contre le terrorisme, contre la criminalité organisée, et des réformes de la procédure pénale.
Vous l'avez dit, madame, monsieur les rapporteurs : la CMP a sagement su dépasser les différends qui existaient. L'engagement des deux présidents de commission n'y est sans doute pas pour rien.
Nous pouvons être, tous ensemble, assez fiers du travail accompli et de notre capacité de rassemblement autour de la sécurité, des garanties pour nos concitoyens, du renforcement des moyens des magistrats et de l'ensemble des simplifications procédurales qui ont abouti.
Il est précieux que, sur ces sujets, la volonté d'aboutir n'ait pas failli et qu'à chaque étape du processus parlementaire, on ait trouvé des points d'accord.
Ces efforts se constatent dans les chiffres : de 34 articles originels lors de sa présentation en conseil des ministres, le texte est passé à 102 articles à l'issue des débats au sein de cet hémicycle et il en compte maintenant 125 après les travaux de la commission mixte paritaire.
Bien sûr, des observateurs superficiels ou des esprits chagrins mais il n'y en a pas dans l'hémicycle critiqueront cet accroissement. Je préfère plus sérieusement y voir un travail parlementaire abouti, réalisé avec d'autant plus de constance et de méticulosité que, la plupart du temps, le Gouvernement était en parfaite harmonie avec les aspirations des parlementaires.
Je n'emploie pas cette précision, « la plupart du temps », par hasard. Il y a en effet, dans le texte de la CMP, des points qui n'auraient sans doute pas recueilli l'appui du Gouvernement dans l'hémicycle, mais c'est la manifestation légitime de la souveraineté parlementaire qui s'est exprimée. Mes convictions personnelles s'agissant des libertés du législateur sont suffisamment connues pour que je ne m'en formalise pas aujourd'hui.
Nous sommes tous les auteurs de ce texte et nous pouvons tous en revendiquer une partie importante. Ce projet de loi avait trois ambitions : des moyens supplémentaires pour lutter contre un phénomène dont on sait qu'il sera malheureusement durable, même s'il a fait une irruption brutale dans notre quotidien je veux bien sûr parler du terrorisme ; plus de garanties pour le justiciable personne ne comprendrait que notre équilibre soit altéré et enfin, surtout, une longue série de simplifications procédurales.
Avant de conclure, j'aborderai deux points sur lesquels je souhaiterais m'attarder un instant et qui me permettront de répondre aux questions qui sont posées à l'extérieur de nos murs, car ici chacun connaît les réponses.
Pourquoi avions-nous besoin d'une troisième loi antiterroriste depuis le début de ce quinquennat et qui sera sans doute promulguée cet été, après celle de décembre 2012 et celle du 13 novembre 2014 ? Céderions-nous, comme j'ai pu le lire, à une sorte de fuite en avant de l'antiterrorisme, certains ayant parlé d'un canard sans tête dont on ne sait pas trop où il va aboutir ? Je ne le crois pas. Je suis même férocement convaincu du contraire.
Ce texte vient, par de multiples aspects, consolider le modèle français de lutte contre le terrorisme qui confie à l'autorité judiciaire une large capacité d'action qui s'étend de la prévention à la répression. Il apporte de la modernité technologique afin de préserver cette spécificité qui confie à l'autorité judiciaire la capacité de mouvement. Il permettra de renforcer la police judiciaire qui ne doit pas être moins efficace que la police administrative pour continuer d'exercer pleinement son office. Dès lors, il s'inscrit dans l'avenir de notre pays, parce qu'il le prépare, et même, le rend possible.
Mais au-delà de l'antiterrorisme, ce texte, je veux le souligner, doit être vu comme l'un des éléments constitutifs de l'ambition que j'essaie de porter pour le ministère que j'ai le privilège de servir depuis un peu plus de trois mois. Il ne peut pas se lire indépendamment du projet de loi de modernisation de la justice du XXIe siècle que vous examinez en ce moment même, non plus que du travail réglementaire réalisé ou des moyens budgétaires qui sont mobilisés.
Les mots peuvent paraître galvaudés à force d'être répétés mais, avec ce texte, nous uvrons ensemble pour une justice plus efficace, plus accessible pour le citoyen et, surtout, pour une justice moins pauvre.
Je veux, par tous les moyens, poursuivre cet objectif tout à la fois évident et ambitieux. Je veux une autorité judiciaire qui, dans l'exercice quotidien comme face à la violence terroriste, continue de faire honneur à notre pays. Une justice dont nos concitoyens puissent se dire fiers et à laquelle ils puissent spontanément accorder leur confiance et le respect qui s'impose. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)source http://www.assemblee-nationale.fr, le 27 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80311|
Mesdames et Messieurs,
J'ai reçu ce matin les familles et les proches des passagers du vol MS804 d'Egyptair afin de leur adresser d'abord, au nom du président de la République, du Premier ministre et de tout le gouvernement, et bien sûr en mon nom personnel, accompagnés d'Alain Vidalies et de Mme Juliette Méadel qui participaient à cette réunion, notre profonde compassion et notre solidarité dans les moments particulièrement douloureux que ces personnes traversent.
Cette réunion a rassemblé une centaine de personnes dans un climat d'intense émotion - vous l'imaginez - mais aussi de grande dignité, en présence des responsables d'Aéroports de Paris, d'Egyptair, des associations d'aide aux victimes - la FENVAC et l'INAVEM - mais aussi des bénévoles, notamment de la Croix-Rouge.
Cette réunion a permis de partager l'ensemble des informations connues à ce stade sur la disparition de ce vol. Toutes les familles qui le souhaitaient ont pu s'exprimer. Elles ont pu poser des questions à tous les responsables présents qui ont répondu avec la même franchise qu'il était souhaitable par respect pour les personnes présentes.
J'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises déjà : à cet instant où je vous parle, toutes les hypothèses sont examinées et aucune n'est privilégiée.
Notre objectif est double : solidarité avec les familles mais aussi transparence à leur égard sur les circonstances de la disparition de cet avion. De concert avec l'ambassadeur d'Égypte qui était présent à cette réunion, j'ai beaucoup insisté sur la volonté des autorités françaises de dire toute la vérité sur ce qui s'est passé. C'est une demande légitime et essentielle pour toutes les familles.
Lors de cette réunion, le Parquet de Paris a fait le point sur l'état de l?enquête judiciaire qui a été immédiatement diligentée en France. Une enquête a été également déclenchée en Égypte.
Le bureau d'enquêtes et d'analyses a précisé les procédures qui visent à établir les causes de la disparition du vol. Le directeur de l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale a expliqué les méthodes et les procédures d'identification des victimes.
J'ai rappelé que la France met à la disposition des autorités égyptiennes l'ensemble des moyens dont elle dispose pour avancer dans la recherche de l'appareil et des victimes. Les enquêteurs du bureau d'enquêtes et d'analyses sont déjà arrivés au Caire hier après-midi, pour participer à l'enquête qui est ouverte par l'Égypte.
Nous avons également mobilisé un avion et un bâtiment de la marine nationale pour contribuer aux recherches. Enfin, notre ambassade au Caire accueille les familles qui souhaitent se rendre en Égypte, certaines l'ont fait dès hier.
Je suis bien sûr en contact permanent avec mon homologue, le ministre des affaires étrangères égyptien, M. Sameh Choukri, qui m'a confirmé le souhait des autorités égyptiennes de coopérer étroitement avec nous dans la recherche de la vérité, de toute la vérité, comme nous l'avons redit ce matin aux familles.
Je le dis à nouveau, comme je l'ai dit toute cette matinée aux familles : agir en transparence avec elles. Je m'engage à ce que la France rende compte, au fur et à mesure, de l'évolution des différentes procédures qui sont mises au service de la vérité. À cet égard, je dois à nouveau souligner, comme je l'ai fait hier et avant-hier, que des informations circulent, ici ou là, parfois d'ailleurs contradictoires, et donnent lieu trop souvent à des interprétations presque définitives. Je mets en garde contre cette manière de faire car elle met les familles dans une tension douloureuse que je voulais exprimer devant vous. La meilleure réponse à ces informations parcellaires, c'est que les enquêtes puissent se dérouler dans les meilleures conditions et le plus rapidement possible, parce que c'est par cette voie-là que nous pourrons avoir la vérité sur ce qui s'est passé.
Rechercher l'appareil est, bien sûr, aujourd'hui la priorité en cours, comme trouver les boîtes noires pour les analyser, ce qui nous permettra d'avoir les réponses aux questions qui se posent légitimement.
Je voudrais compléter mon propos en m'adressant aux médias, à la demande des familles. Plusieurs intervenants ont souhaité que leur anonymat soit respecté. Bien sûr, je le dis avec tout le respect que je leur dois, je suis particulièrement attentif à l'indépendance des médias ; cette question n'est pas en cause ni en débat. Je vous transmets simplement la demande des personnes qui se sont exprimées et qui souhaitent que, lorsqu'elles le demandent, la photo de leurs proches ne soit pas publiée ou même que le nom de certaines personnes de leur famille ne le soit pas non plus.
C'est leur liberté, je vous ai transmis leur demande, peut-être le feront-elles directement.
Au nom de la France, encore une fois, j'exprime ma solidarité mais aussi notre affection qui est celle des Françaises et des Français, j'en suis sûr, à l'égard de toutes ces personnes qui, brutalement ont appris qu'un de leurs proches, parfois une famille entière avait sombré en mer, et qui veulent savoir afin de faire leur deuil.
C'est un moment difficile, un moment douloureux et je voulais le redire encore, nous sommes à leurs côtés. Ce que nous avons à faire, au-delà des paroles, c'est notre travail avec les autorités égyptiennes pour que, le plus vite possible, nous puissions informer les familles et l'opinion publique de ce qui s'est passé réellement.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80312|
Je salue la tenue du premier sommet humanitaire mondial à Istanbul les 23 et 24 mai. La délégation française y est conduite par Mme Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. M. André Vallini, secrétaire d'État chargé du développement et de la Francophonie, participera notamment à des réunions sur l'initiative prise par M. Gordon Brown, que le secrétaire général des Nations unies a chargé de mettre en place un dispositif spécifique sur l'éducation en situation de crise.
Alors que les crises accroissent chaque jour les besoins humanitaires et que 60 millions de personnes dans le monde ont été contraintes de fuir leur foyer, ce sommet doit permettre à la communauté internationale de donner une nouvelle feuille de route à l'action internationale humanitaire. Il sera l'occasion de réaffirmer notre engagement en faveur de la protection des civils, de renforcer l'articulation entre aide humanitaire et développement, mais aussi de mieux répondre aux conséquences des catastrophes naturelles et du dérèglement climatique, dans le prolongement de notre mobilisation pour la COP21.
Aujourd'hui, 80% de l'action humanitaire intervient dans le contexte d'un conflit armé, situation qui touche de plus en plus de civils et en particulier des enfants. La France est mobilisée, sur le terrain et dans les enceintes internationales, pour assurer le respect du droit international humanitaire et de la protection des civils. C'est à cette fin que je présiderai le 10 juin à New York un débat public au conseil de sécurité des Nations unies sur la protection des civils dans les opérations de maintien de la paix. La France organisera aussi, en 2017, une conférence internationale pour promouvoir la protection des enfants dans les conflits armés, dix ans après l'adoption des «Principes et engagements de Paris».
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80313|Monsieur le Directeur du Tour de France, Cher Christian PRUDHOMME,
Monsieur le Préfet de Police,
Monsieur le Directeur général de la Gendarmerie nationale, Mon général,
Monsieur le Directeur général de la Police nationale,
Monsieur le Directeur général de la Sécurité civile et de la Gestion de crise,
Monsieur le Président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France,
Mesdames et Messieurs,
Le 2 juillet prochain, le Tour de France prendra son départ, et cela me fait extrêmement plaisir, au pied des murs du Mont Saint-Michel, dans la Manche. Les coureurs traverseront ce jour-là une première fois le département de la Manche, pour arriver aux plages d'Utah Beach, avant de le traverser une deuxième fois le lendemain, au cours d'une étape qui les mènera de Saint-Lô à Cherbourg.
L'élu normand que je suis, très fidèle au souvenir du grand Jacques ANQUETIL, ne peut que se réjouir doublement de ce programme. J'ai du reste prévu de me trouver moi-même à Cherbourg, le 3 juillet prochain, pour assister à l'arrivée du peloton. Cette émotion, je sais cependant que je vais la partager avec tous les Français. Le Tour de France fait partie de notre patrimoine national ; il est pour chacun d'entre nous, « l'enfant du peuple et de la paix ». Il est aussi, depuis 1903, le premier spectacle populaire gratuit offert chaque été aux Français et aux touristes, suivi par chaque année par 10 à 12 millions de spectateurs, massés sur les bords des routes et jusqu'au sommet des cols.
« L'un des agréments du Tour de France, disait ainsi Antoine BLONDIN, tient à ce qu'il se déroule dans une ambiance de fête champêtre, parfois imprégnée de l'odeur des foins. La course, ivre d'horizons, devient alors une sarabande. » Mais le Tour de France n'appartient pas qu'aux Français. Il s'agit du 3ème événement sportif mondial, diffusé dans 190 pays, couvert par 2 000 journalistes, regardé par 3,5 milliards de téléspectateurs. Son tracé passera cette année par l'Espagne, par Andorre et par la Suisse et je souhaite saluer les représentants de ces pays qui sont aujourd'hui parmi nous. Ils partagent notre passion et ils ont eux aussi à cur de faire en sorte que cette grande épreuve sportive soit également une grande fête populaire.
Pourtant, chacun comprend que, cette année, le Tour de France se déroulera dans un contexte particulier. Et c'est la raison pour laquelle j'ai souhaité vous réunir pour évoquer, au ministère de l'Intérieur, le dispositif qui sera mis en place cet été afin d'assurer, dans des conditions de vigilance particulière, la sécurité de cette grande manifestation. Comme vous le savez, notre pays est confronté à un risque terroriste dont j'ai déjà eu l'occasion de dire qu'il demeure très élevé. Face à un ennemi déterminé à nous frapper à tout moment, nous devons faire preuve à chaque instant, sur tout sujet, d'une vigilance extrême. Je tiens à ce titre à rendre une nouvelle fois hommage à la mobilisation exceptionnelle des policiers et des gendarmes qui, depuis des mois, jour après jour, dans des conditions souvent très difficiles, réalisent un travail admirable pour prévenir de nouveaux attentats, mais aussi pour assurer le respect de la loi et de l'ordre public. A ce titre, je souhaite rendre hommage aux 5 militaires de la gendarmerie qui, vendredi et samedi dernier, ont perdu la vie dans l'accomplissement de leur devoir. C'est dans ces circonstances particulièrement douloureuses, que je mesure le prix de votre engagement et du courage physique qu'il requiert. Si, en 2015, nous avons pu tenir bon face aux épreuves terribles que nous avons traversées, c'est grâce à ces femmes et à ces hommes qui sont prêts, dès lors que la situation l'exige, à mettre leur vie en péril pour sauver celle des autres. Je veux que les policiers, les gendarmes, les sapeurs-pompiers sachent qu'ils auront toujours mon plus fidèle soutien dans les missions délicates et dangereuses dont ils s'acquittent au quotidien, au service de la France et de la République.
Face à la menace terroriste, nous devons donc faire preuve d'une vigilance extrême et prévoir tous les moyens nécessaires. Nous devons être à chaque instant dans l'anticipation. C'est là le sens de la politique que mène le Gouvernement depuis des mois, en renforçant de façon considérable les moyens des forces de sécurité, en modernisant notre arsenal juridique, en assurant une meilleure coordination de nos services de renseignement, en améliorant la coopération indispensables avec nos partenaires européens et étrangers. Cette démarche de précaution s'impose en particulier pour assurer la sécurité des grands événements publics. Hier, la COP 21 ou le Festival de Cannes. Demain, l'EURO 2016 ou le Tour de France. Et chaque jour, la surveillance et la sécurisation des lieux sensibles, avec le concours des Forces Armées dans le cadre de l'opération sentinelle, est un objectif que nous devons atteindre.
Tous ces événements ont fait l'objet d'une préparation minutieuse en termes de sécurité, ce qui a déjà permis d'assurer l'organisation fluide et réussie de la COP 21 et du Festival de Cannes. La préparation de l'EURO 2016 se poursuit dans le même esprit ; c'est la raison pour laquelle, après avoir constaté des dysfonctionnements fâcheux dans le dispositif de sécurité mis en place au Stade de France lors de la finale de la Coupe de France de football samedi dernier, j'ai convoqué les organisateurs dès dimanche afin d'examiner avec eux les mesures qui devaient être prises afin de les corriger. Je n'accepterai aucun manquement.
Qu'en est-il des mesures prises pour assurer la sécurité et le bon déroulement de cette 103e édition du Tour de France ? Compte tenu des caractéristiques exceptionnelles de cet événement, qui dure un mois et s'étend sur 3500 Km de parcours, notre objectif consiste à assurer de façon optimale la sécurité des coureurs et du public, sans altérer sa dimension festive. Cet objectif, à la vérité, n'est pas nouveau puisque l'engagement du ministère de l'Intérieur remonte à l'origine même de cette épreuve en 1903. Je sais aussi combien les organisateurs du Tour font montre d'un grand professionnalisme, reconnu internationalement. Il est rassurant, M. le Directeur, d'avoir pour partenaire une organisation dont chacun sait et salue l'esprit d'excellence.
Compte tenu du contexte de menace que j'ai rappelé, le ministère de l'intérieur déploiera à cette fin cette année, à vos côtés, des moyens tout à fait exceptionnels. Je peux ainsi vous annoncer qu'au moins 23.000 gendarmes et policiers seront présents au bord des routes cette année pour assurer la sécurité du Tour de France. Des évaluations sont actuellement en cours afin d'examiner si nous devons rehausser encore, ici ou là, ce niveau d'engagement. Au-delà de ce service d'ordre de grande ampleur, le Tour continuera, cette année encore, à pouvoir bénéficier de l'escorte assurée par 50 motocyclistes de la Garde Républicaine, tandis que 12 policiers permanents accompagneront les coureurs pendant toute la durée de la course. Par ailleurs, pour la première fois cette année, j'ai demandé au GIGN d'accompagner le Tour de France tout au long de l'épreuve et de se tenir prêt à intervenir à tout moment en cas de besoin. Dans la logique du schéma national d'intervention que j'ai présenté le 19 avril dernier, il s'agit de disposer d'éléments capables de réagir dans l'urgence absolue à une attaque terroriste perpétrée aux abords et sur l'itinéraire de l'épreuve. Au-delà des forces de sécurité intérieure, tous les acteurs de la sécurité civile seront également mobilisés afin de secourir les spectateurs sur l'ensemble du parcours. Ainsi, l'ensemble des services d'incendie et de secours ont pris les dispositions nécessaires pour s'adapter à l'afflux de spectateurs.
Depuis plusieurs mois, l'organisateur et les services préfectoraux ont minutieusement préparé ce dispositif. Je voudrais également saluer la contribution qu'apportent les associations agréées de sécurité civile. Leurs nombreux bénévoles seront présents dans les zones d'affluence pour prendre en charge les blessures légères et assurer une mission générale de prévention auprès des spectateurs. Enfin, comme chaque année, la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France sera présente sur les zones techniques pour assurer des actions de prévention et de premier secours. Dans le même esprit, j'adresserai dans les prochains jours une circulaire aux préfets concernés par le Tour de France 2016 en leur demandant d'activer leur centre opérationnel départemental (COD).
Le Tour de France, comme d'autres grands événements sportifs relève d'une véritable coproduction de sécurité, qui associe les services de l'Etat et les organisateurs, que je tiens à remercier pour leur professionnalisme et pour leur engagement. Sur leur proposition, j'ai donc demandé aux directeurs généraux de la gendarmerie nationale, de la police nationale, et de la sécurité civile, d'être représentés en permanence au sein du PC mis en place. L'objectif consiste à fluidifier ainsi les échanges d'informations entre l'organisation de l'épreuve et les services opérationnels de sécurité et de secours. J'ai également décidé de désigner un membre du corps préfectoral qui sera intégré au PC organisateur sur l'ensemble du parcours, qui coordonnera l'ensemble des équipes du ministère de l'intérieur dans ce cadre et qui sera le point de contact privilégié des préfets des départements traversés par le Tour. Je sais que vous avez prévu de continuer cet après-midi, dans le cadre de plusieurs ateliers de travail, à préparer ensemble membres des forces de sécurité et de l'administration préfectorale, représentants des services d'ordre étrangers, organisateurs du tour - la mise en place de notre dispositif commun de sécurisation et je vous en félicite.
Une fois encore, ce sont plusieurs millions de spectateurs qui sont attendus cet été, sur le bord des routes de France, pour participer à cette grande fête qu'est et que doit rester le Tour de France. L'Etat, je peux vous l'assurer, assumera l'intégralité de ses devoirs, en s'appuyant sur le dévouement et le professionnalisme des forces de sécurité. Je sais que je peux également compter sur votre engagement et je vous en remercie chaleureusement.
Je vous remercie.
Source http://www.interieur.gouv.fr, le 25 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80314|
Les ministres des affaires étrangères des pays participant au Sommet Paris-Balkans 2016 se sont réunis le 24 mai 2016. Cette réunion, à laquelle participait le commissaire européen Johannes Hahn et le service européen pour l'action extérieure, s'inscrit dans le prolongement de la réunion ministérielle qui s'est tenue en avril 2015 à Brdo dans le cadre du processus de Brdo-Brijuni et dans le cadre de la préparation du Sommet de Paris sur les Balkans, qui se tiendra le 4 juillet 2016, dans le prolongement des Sommets de Berlin en 2014 et de Vienne en 2015.
À cette occasion, les ministres ont rappelé l'importance capitale de la perspective européenne des pays de la région et leur ancrage européen, pour les réformes politiques, socio-économiques et institutionnelles. Ils ont réaffirmé que l'UE et les pays des Balkans occidentaux partageaient des préoccupations communes s'agissant de leur voisinage et étaient confrontés aux mêmes défis globaux.
Dans ce contexte, ils ont reconnu que le défi migratoire nécessitait une approche inclusive et globale. La coopération dans ce domaine doit être renforcée, sur la base de la déclaration du mini-sommet du 25 octobre 2015. Ils ont réaffirmé la nécessité de se concentrer en priorité sur la lutte contre les réseaux criminels impliqués dans le trafic de migrants, l'asile et le renforcement des capacités en matière de contrôle des frontières et d'échange d'informations, en particulier avec Europol.
S'agissant de la lutte contre le terrorisme, et suite aux attentats de Paris et Bruxelles, les ministres ont souligné l'importance d'identifier des solutions collectives, seules à même de faire face à cette menace et de lutter contre la radicalisation religieuse. Les défis que constituent la radicalisation, le terrorisme et l'extrémisme violent, en particulier les combattants étrangers issus ou passant par l'Union européenne ou les Balkans occidentaux pour se rendre en Syrie et en Irak, nécessitent une coopération renforcée : échanges d'informations accrus, identification de bonnes pratiques en matière de formation, de valeurs communes, de prévention de la radicalisation, de déradicalisation et de réponse face aux activités terroristes.
Dans ce contexte, la coopération entre les pays de la région et avec l'Union européenne revêt une importance croissante pour la stabilisation de la région. Le rapprochement européen des pays des Balkans occidentaux passe par un alignement sur l'acquis européen, mais doit également se manifester à travers des projets concrets dans les domaines de la connectivité des infrastructures et de nouvelles perspectives pour la jeunesse.
S'appuyant sur ces principes, les ministres ont accueilli favorablement les progrès réalisés en matière de coopération régionale. Les participants ont souligné l'importance de la connectivité en matière de transports et d'énergie, qui représente un enjeu clé pour le développement et la croissance économique de la région.
Ils ont reconnu que des efforts supplémentaires devaient être déployés par chaque pays pour accélérer la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement («soft measures») adoptées lors du Sommet de Vienne et ont accueilli positivement la récente présentation, par la Commission européenne, d'une feuille de route devant mener à la mise en place d'un marché régional de l'électricité. Les participants ont également salué la perspective de la signature prochaine du Traité sur la communauté des transports.
Les participants ont réaffirmé leur engagement à poursuivre la mise en oeuvre de l'«agenda positif pour la jeunesse des Balkans», lancé par les ministres des affaires étrangères à Brdo en avril 2015 et salué les progrès déjà réalisés pour traduire cet engagement en propositions concrètes. Les pays participants se sont par ailleurs engagés à encourager leurs universités à proposer un nombre croissant de places dans les programmes de coopération ainsi que de bourses au profit d'étudiants des Balkans occidentaux. À cet égard, ils ont réaffirmé, avec la Commission européenne, leur volonté de franchir de nouvelles étapes dans la mise en oeuvre de l'Agenda positif lors du Sommet de Paris.
Enfin, les participants ont accueilli positivement les progrès réalisés dans la mise en place de l'office régional pour la coopération des jeunes (RYCO) et souligné l'engagement des pays des Balkans dans cette perspective. Ils ont rappelé que cet office serait officiellement lancé lors du Sommet de Paris.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80315|
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux d'accueillir aujourd'hui, avec Harlem Désir, les ministres, qui peuvent venir autour de moi.
Juste quelques mots pour expliquer le sens de cette réunion et redire le plaisir que j'ai d'accueillir aujourd'hui les ministres de la région des Balkans occidentaux.
C'est d'ailleurs la première fois que cette réunion se tient à Paris dans ce format. Avec nos partenaires slovènes, croates, allemands, italiens et autrichiens, avec le commissaire Johannes Hahn qui est chargé de la politique de voisinage et des négociations d'élargissement, nous travaillons très concrètement, autant que possible, à l'amélioration de la coopération régionale dans les Balkans.
Ce travail ne date pas d'aujourd'hui puisqu'il a commencé dans le cadre d'un processus que l'on appelle le processus de Brdo-Brijuni, à l'initiative du président slovène, Borut Pahor, c'était en 2013, avec un sommet auquel le président François Hollande a participé à l'époque.
Puis, ces travaux se sont poursuivis à Brdo, en avril dernier, à l'invitation de notre collègue et homologue, le ministre slovène des affaires étrangères, Karl Erjavec et avec le ministre croate, aujourd'hui, Miro Kovac.
Notre réunion d'aujourd'hui, qui fait suite à celles de Berlin et de Vienne, a deux objectifs. Le premier est de préparer le sommet qui aura lieu le 4 juillet prochain à Paris. Ce sommet aura lieu avec tous les partenaires des Balkans, ce qui veut dire faire le point sur les initiatives qui ont été prises lors des réunions précédentes, celles de Berlin et de Vienne en 2014 et en 2015, dans les domaines de coopérations régionales qui sont les suivants :
D'abord, une question essentielle pour l'avenir de toute cette région, c'est la question de l'énergie et celle des transports. Un travail très concret a été entrepris sur les infrastructures énergétiques et de transports. La commission présentera l'état des travaux effectués depuis le début du processus, le chemin qu'il reste à parcourir d'ici au mois de juillet pour obtenir des résultats qui sont à la hauteur de nos ambitions collectives.
Puis, il y a le thème de la jeunesse, un thème qui avait été retenu comme le domaine central lors des réunions et des sommets précédents. La jeunesse, c'est une évidence de dire qu'elle constitue les forces vives de cette région, comme des nôtres d'ailleurs. Et, cet avenir, l'avenir qui est le leur, ne peut être prometteur que si on lui permet aussi d'engager des programmes et des projets qui la concerne, et en particulier, de faciliter sa mobilité, la mobilité étudiante en premier lieu, mais aussi de bénéficier sur le terrain, dans la région, de programmes de coopérations avec l'Union européenne. C'est ce que l'on appelle l'agenda positif pour la jeunesse des Balkans. Ce sera l'un des éléments centraux du sommet du 4 juillet à Paris. Et puis, avec une perspective d'un projet tout à fait original, basé sur l'expérience, notamment la nôtre, franco-allemande, qui est la création d'un office régional pour la coopération pour la jeunesse.
Notre réunion sera également l'occasion d'un échange approfondi sur tous les défis communs que nous devons affronter ensemble. Aujourd'hui, tout le monde le sait, ils sont les conséquences de la guerre aux portes de l'Europe, en Syrie et au Levant. Face à l'afflux massif des réfugiés, chacun a dû faire face, chacun dans son pays. Et, au fil du temps, la coordination, la coopération se sont améliorées.
Ici, nous avons la conviction que les réponses peuvent être européennes, des réponses qui passent par la coopération entre tous les pays. Nous savons que nous devons faire face au risque terroriste. Nos efforts, là-aussi, doivent être communs. Beaucoup a été fait, mais nous devons encore faire plus et surtout mieux, en renforçant encore notre capacité à lutter ensemble contre un phénomène qui menace directement la sécurité de nos concitoyens.
C'est l'ensemble de ces aspects - des questions difficiles, vous l'imaginez - que nous allons examiner cet après-midi et ce soir, avec un objectif qui est de renforcer encore nos actions communes. Nous savons bien que nous avons un destin commun, que l'Histoire nous a marqués et qu'elle présente aussi des exigences et nous devons être à la hauteur de ces exigences.
Pour y répondre, nous devons le faire avec l'Union européenne et les pays des Balkans occidentaux, car l'Union européenne est aux côtés de ses partenaires des Balkans. La participation de Johannes Hahn en est la manifestation aujourd'hui, particulièrement concrète, celle d'une volonté et celle d'un engagement.
Et puis, il y a les actions communes entre les pays des Balkans eux-mêmes, car nous avons la conviction que c'est aussi par une coopération régionale, renforcée - j'ai eu des entretiens bilatéraux cet après-midi avec un certain nombre de nos amis ici présents et je vais poursuivre ces échanges - que cette coopération progresse et je m'en félicite.
Le cheminement européen de chacun des pays de la région est en marche, il est en cours, il est exigeant, j'en suis conscient, mais c'est la voie de l'avenir.
Merci, Mes Chers Collègues, merci d'être là, merci au commissaire européen d'avoir répondu à notre invitation pour préparer cet autre rendez-vous celui du 4 juillet.
Bon travail.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80316|
Monsieur le Député, comme vous le rappelez, la protection universelle maladie permet, depuis le 1er janvier 2016, à toute personne majeure résidant ou exerçant une activité professionnelle en France de bénéficier de manière autonome d'une couverture maladie. Pour celles et ceux qui n'exercent pas d'activité, l'ouverture des droits est soumise à deux conditions : la régularité du séjour et la stabilité de la résidence - à savoir le fait de résider six mois par an en France. Lors d'une installation en France, cette dernière condition est remplie à l'issue d'un délai de trois mois, sauf exceptions prévues par les textes.
Votre question concerne nos concitoyens de retour en France à l'issue d'une expatriation et porte en particulier sur les règles applicables aux personnes sans activité accompagnant ou rejoignant leur conjoint relevant d'un régime d'assurance-maladie en France.
Le problème ne se pose que pour les personnes qui ne bénéficient pas de dispositions de maintien des droits ouverts dans leur pays d'origine - lorsqu'elles en ont un. Or, ce maintien est en pratique très fréquent dans le cadre de la coordination européenne ou des accords bilatéraux de sécurité sociale.
Par ailleurs, pour sécuriser le fait que ces personnes doivent bien être éligibles d'emblée à la protection universelle maladie, un décret en cours de finalisation rendra explicite le fait que la condition de stabilité de résidence est présumée remplie pour les assurés comme pour les membres de leur famille : aucun délai de carence ne leur sera appliqué pour l'ouverture de leurs droits à titre personnel. Les personnes concernées pourront demander le réexamen de leur demande de rattachement à la Sécurité sociale à leur date d'installation en France et obtenir le remboursement des soins intervenus depuis lors.
J'espère avoir répondu à vos questions et aux inquiétudes légitimes des personnes qui vous ont interrogé.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80317|Monsieur le Ministre de l'Intérieur,
Mesdames et Messieurs les préfets,
Messieurs les directeurs d'agence régionale de santé, Mesdames et Messieurs les maires,
Mesdames, messieurs,
C'est avec fierté et humilité que j'ai accepté, le 12 février dernier, la mission que le Président de la République et le Premier ministre m'ont confiée de préparer, d'animer et de coordonner la politique d'Aide aux victimes. Aider les victimes c'est, au lendemain d'un attentat, d'un accident, ou d'un drame, être là pour les soutenir dans l'épreuve immédiate, ce qui ne passe pas uniquement par la parole, mais surtout par des actes. De quoi les victimes ont-elles besoin ? De protection d'abord pour assurer leur sécurité et celle de leur proches, c'est le travail des forces de l'ordre et du Ministre de l'intérieur ; de la réactivité du Parquet, d'une prise en charge rapide de leur état de santé, c'est le travail des forces de secours, des Sapeurs-pompiers et des médecins-hospitaliers ; mais d'un lieu d'accueil médico psychologique également, c'est aussi le rôle des psychiatres, aidés par les associations et les collectivités locales : d'une parole de soutien, enfin, et d'humanité.
Chacun d'entre vous a mené ce travail, d'une manière exemplaire le soir du 13 novembre. Je tiens à le dire, en cette journée consacrée au retour d'expérience. Je veux saluer le sang-froid et le professionnalisme, la maîtrise de tous les acteurs de l'urgence qui sont intervenus lors de ce vendredi soir fatal et simultanément sur 6 sites en même temps. Je veux également saluer votre courage et votre sens de l'Etat qui ont été perçus comme tels par les associations de victimes et les victimes que j'ai pu rencontrer. La politique d'aide aux victimes a besoin de chacun d'entre vous, il s'agit d'un travail collectif et collaboratif.
L'ampleur sans précédent de ces attentats, de par le nombre de victimes (130 morts, 478 blessées et 998 victimes choquées) et leur violence, a nécessité dans l'urgence la réactivité, bien souvent spontanée, de tous, pour apporter aux victimes les premiers soins et à leurs proches leur première prise en charge.
Le travail accompli par chaque service fut exemplaire, dans un contexte où la diversité des acteurs d'intervention rend indispensable la conduite coordonnée de l'action des pouvoirs publics.
L'aide aux victimes, dans ces moments-là, c'est aussi et surtout l'accès à l'information. C'est la raison pour laquelle le Premier ministre a signé, le 12 novembre 2015, la circulaire interministérielle qui a donné à la politique d'aide aux victimes son premier fondement avec la mise en place de la CIAV (Cellule Interministérielle d'Aide aux Victimes) dont je dispose et que je coordonne.
Le soir du 13 novembre, cette dernière a mobilisé plus de 120 personnes qui ont eu à gérer plus de 11 300 appels. Elle est l'expression de l'action de l'État dans la prise en charge globale des victimes d'actes de terrorisme. Je veillerai à ce qu'elle dispose des moyens humains et logistiques nécessaires à la prise en charge des familles et des proches.
Pour faire face à des situations aussi dramatiques et heureusement exceptionnelles, les retours d'expérience sont des exercices nécessaires pour améliorer l'efficacité de nos réponses par la prise en compte de meilleures initiatives et des expériences les plus prometteuses. Votre mobilisation dans cette démarche est donc essentielle. Les travaux post-attentats que vous avez menés sont riches d'instructions. Je veux en tirer quelques enseignements préliminaires :
La première des attentes des familles des victimes, c'est de savoir quel est le sort de leurs proches. L'identification des victimes est donc le premier sujet et pas le moins complexe. Il exige de la rapidité mais de la prudence. Il faut prendre le temps, parfois, avant d'identifier avec certitude une victime, les professionnels le savent bien. Enfin et plus particulièrement dans ce cadre, l'annonce des décès obéit à un cadre juridique strict.
Je sais que la Direction Générale de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises, la Direction Générale de la Santé, le Direction des Affaires Criminelles et de Grâces et le Centre de Crise et de Soutien travaillent pour optimiser l'identification des victimes. Parallèlement, la procédure judiciaire prévoit qu'après le travail préalable des services enquêteurs, notamment d'identification judiciaire, les corps des personnes décédées soient transportés au sein du ou des IML territorialement compétents. Sujet certes complexe par la massification potentielle des victimes, la nécessité d'une intégration dans une cinétique rapide et les contraintes médico-légales.
Je veillerai à ce que dans ces lieux qui sont pour les familles une étape éprouvante, une prise en charge multidisciplinaire puisse, grâce à l'appui de la CIAV et des psychologues, concilier efficacité procédurale et humanité.
Ces premiers instants, pour identifier les victimes dans l'urgence, sont déterminants, et vos retours vont nous permettre de faire évoluer le dispositif d'accueil, d'information, de prise en charge des victimes en cas de survenance de crises majeures.
Les premières leçons ont d'ailleurs été tirées pour que la réponse de l'Etat soit à la hauteur des situations de guerre, sur le sol français, comme celle que nous avons connu la nuit du 13 novembre.
L'instruction interministérielle relative à la prise en charge des victimes d'actes de terrorisme va ainsi être modifiée pour garantir une meilleure prise en charge des victimes et de leurs familles, autour de trois points majeurs :
1. Une meilleure remontée d'informations de chacun des acteurs au sein de la CIAV : tout d'abord en matière d'identification des corps et je veux saluer ici l'action de Bernard Cazeneuve qui, grâce à une nouvelle procédure accélérée d'identification des corps répond à l'un des points essentiels pour les familles de victimes, car tout commence à ce moment-là. Ensuite en ce qui concerne la centralisation de l'information au sujet d'hôpitaux où sont soignées les victimes mais aussi des Cellules d'Urgence Médico-Psychologique (CUMP). Ces dernières informeront en temps réel l'Agence régionale de santé (ARS), afin de mieux renseigner. Elles établiront pour chaque victime un certificat médical contenant les éléments circonstanciels les reliant à l'événement et attestant de ses répercussions médico-psychologiques. Cette nouvelle instruction permettra également une fluidité de l'information entre le procureur de la République, les services enquêteurs, le Centre opérationnel de réception et de régulation des urgences sanitaires et sociales du ministère de la Santé et la cellule interministérielle d'aide aux victimes.
2. Ce projet prévoit la pérennisation du centre d'accueil des familles. La CIAV mettra en place un lieu d'accueil unique pour les victimes et leurs proches, afin de leur permettre de se signaler, d'être informés de la situation de la personne qu'ils recherchent, de bénéficier d'un soutien psycho-traumatologique adapté et, le cas échéant, de fournir les éléments nécessaires à l'identification des victimes. En cas d'événement survenant à Paris ou à proximité, c'est le site de l'Ecole militaire qui est pré-désigné pour ce rôle.
3. Enfin, en cas d'événement survenant en province, la CIAV dépêchera auprès du préfet territorialement compétent une équipe déléguée, dont la mission sera de l'assister sur toutes les questions relatives aux victimes et à l'accompagnement des familles. De la même façon, le secrétariat d'Etat assurera lui-même ou par délégation un rôle de proximité.
Notre mission ne saurait toutefois s'arrêter là, à la seule prise en charge des victimes le jour du drame.
Après l'urgence, la vie des victimes et de leurs familles continue, avec ses traumatismes et ses difficultés. Ma mission, notre mission, c'est de veiller à leur parfaite prise en charge dans le temps pour les accompagner et les aider à retrouver l'équilibre.
C'est le sens du dispositif de suivi et d'accompagnement des victimes et de leurs proches, qui vient compléter le dispositif d'accueil, d'information, de prise en charge des victimes en cas de survenance de crises majeures, et auquel je suis particulièrement attachée.
A cet égard, le Comité de suivi des victimes, que j'ai réuni pour la première fois ce lundi 14 mars, permettra d'assurer la continuité de l'aide apportée par l'Etat. Placé sous mon autorité, il assure le suivi des victimes du 13 novembre 2015 figurant sur la liste unique des victimes établie par le parquet et de leurs proches et fédère l'action des ministères concernés et celle des caisses de sécurité sociale, des associations de victimes, et du Fonds de Garantie des victimes des actes de Terrorisme et d'autres Infractions (FGTI).
A l'issue de ce premier Comité, j'ai ainsi décidé :
d'améliorer le traitement des demandes des victimes, notamment en termes de délais et de transparence. A cet effet, il est demandé aux membres du Comité d'informer les familles sur l'avancement du suivi des dossiers et notamment sur les cas les plus complexes ;
d'élargir le champ d'intervention du Comité en assurant également le suivi des victimes d'attaques terroristes qui ont eu lieu depuis le 12 novembre 2015, en France et à l'international : il s'agit des victimes des attaques du 15 janvier 2016 à Ouagadougou (Burkina-Fasso), du 20 novembre 2015 à Bamako (Mali) et du 13 mars 2016 à Grand-Bassam (Côte d'Ivoire) ;
de permettre aux deux associations de victimes du 13 novembre « Life for Paris » et « 13 novembre : Fraternité et Vrité » de devenir membres, pour les points qui les concernent, de ce Comité.
Ce Comité de suivi va donc nous permettre de modéliser l'accompagnement médical, psychologique, financier et juridique des victimes d'attentats.
Vous le voyez, les premières mesures sont d'ores et déjà en cours de construction.
Cet effort d'amélioration de nos dispositifs doit être constant. Cela suppose une capacité à concevoir des solutions originales et innovantes et à savoir faire preuve d'imagination. Aussi, permettez-moi de conclure par une citation d'une grande romancière américaine, Willa Cather, qui disait : « On devient naturel à force d'expérience ». C'est tout le sens de ces retours d'expérience et des exercices qui permettront de tester nos dispositifs : pour être capables, le jour venu, à force d'expérience, d'apporter la réponse la plus rapide, la plus humaine et la plus naturelle possible.
Car je crois profondément que notre travail, dans l'urgence comme dans la prise en charge et l'accompagnement, consiste à affirmer en direction des victimes et de leurs familles une politique plus efficace, plus lisible et au final plus humaine.
Je sais pouvoir compter sur chacun d'entre vous pour m'aider dans cette grande et noble tâche. Et vous pouvez compter sur moi.
Je vous remercie.
Source http://www.gouvernement.fr, le 25 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80318|
Merci, Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur le Député,
Oui, la France, évidemment, est au coeur de toutes les décisions qui sont prises aujourd'hui en Europe.
Quand il s'agit de négocier avec la Russie et l'Ukraine, aux côtés de l'Allemagne, pour que ce conflit puisse cesser, c'est le président de la République qui prend l'initiative et cela s'appelle le «format Normandie».
Quand il s'agit de décider de l'avenir de la zone euro, et c'était la négociation sur le maintien ou non de la Grèce au sein de la monnaie commune, c'est le président de la République qui convainc l'ensemble des membres de la zone euro d'y maintenir la Grèce, évidemment en accord avec l'Allemagne.
Quand il s'agit de faire face à la crise des réfugiés et de dire que nous ne pourrons pas préserver Schengen, c'est-à-dire cet acquis qui est la liberté de circulation à l'intérieur des frontières, s'il n'y a pas un véritable contrôle de la frontière extérieure commune, c'est le ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve, avec le ministre allemand de l'intérieur, Thomas de Maizière, qui proposent la révision du code Schengen, la mise en place d'un corps européen de garde-frontières et le rétablissement d'un vrai contrôle de nos frontières extérieures communes.
Même quand il y a la remise du prix Charlemagne à une haute autorité morale, le pape François, vous venez de le rappelez, évidemment la France est représentée par un membre du gouvernement, Mme Najat Vallaud-Belkacem, qui remet au pape François une invitation de la part du président de la République à venir en France, et le pape accepte évidemment cette invitation, je peux vous le confirmer.
Oui, l'Europe est confrontée à des crises, nous y ferons face ensemble, avec les autres Européens, avec l'Allemagne qui est notre principal partenaire.
Je crois que sur tous les bancs de cette Assemblée, on devrait au contraire s'unir pour que la voix de la France soit entendue, celles d'une Europe fondée sur des valeurs, des valeurs qui permettent de battre l'extrême droite hier en Autriche, celles d'une Europe fondée sur la solidarité, celles d'une Europe fondée sur l'ambition de peser dans le monde de demain.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80319|
M. le président. L'ordre du jour appelle le débat sur le cadre législatif et réglementaire applicable aux essais cliniques, organisé à la demande de la commission des affaires sociales.
(...)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, qui ne peut être présente ce soir du fait des contraintes de son agenda.
Permettez-moi de revenir dans le détail sur l'événement tragique survenu à Rennes.
Le 10 janvier dernier s'est produit un accident dans le cadre d'un essai clinique de phase 1, réalisé par la société Biotrial, à Rennes. Cet événement d'une exceptionnelle gravité, et sans précédent, a entraîné le décès d'un homme et l'hospitalisation de cinq autres volontaires.
Dès que la ministre a eu connaissance de cet accident, elle s'est rendue sur place pour rencontrer les victimes et leurs familles. Je souhaite, à mon tour, faire part de la solidarité du Gouvernement à l'égard des proches et de la famille de Guillaume Molinet, décédé le 17 janvier dernier, ainsi qu'à l'ensemble des patients hospitalisés à la suite de cet accident.
Le 15 janvier, la ministre a saisi l'Inspection générale des affaires sociales, afin que soient analysées les causes de l'accident. Le rapport définitif de l'IGAS doit être remis au cours du présent mois.
Le 4 février, une note d'étape a été rendue publique par l'IGAS sans que soient identifiées les causes directes de l'accident. Bien que certains manquements aient été constatés, l'IGAS n'a pas considéré qu'ils justifiaient la suspension, à titre conservatoire, de l'autorisation de conduire des essais accordée au laboratoire Biotrial.
Le 1er mars, Marisol Touraine a adressé une circulaire aux directeurs généraux des agences régionales de santé, leur demandant de rappeler à l'ensemble des promoteurs et titulaires d'autorisations de lieux de recherche leurs obligations en matière de prise de décisions immédiates et de respect des délais de notification des effets et événements indésirables au cours des essais cliniques.
La circulaire prévoit que tout événement indésirable grave doit être déclaré sans délai, contre sept jours actuellement ; elle va donc plus loin que la réglementation actuelle.
S'agissant des essais sur volontaire sain, la ministre a demandé que tout effet indésirable grave conduisant à une hospitalisation soit considéré comme un « fait nouveau », au sens du code de la santé publique, et déclaré sans délai à l'ANSM, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, et aux comités de protection des personnes, ainsi que je viens de le mentionner. Un tel événement doit conduire à la suspension immédiate de l'essai. Cette disposition va plus loin, je le répète, que la réglementation française et la réglementation européenne en vigueur.
La ministre a également saisi le commissaire européen et ses homologues européens de ce sujet, et proposé la mise en place d'un comité d'experts internationaux pour renforcer la protection des volontaires sains au cours des essais cliniques. Je veux dire à ceux d'entre vous qui m'ont interrogée sur l'état d'avancement de ces travaux que le commissaire européen attend d'avoir le rapport définitif de l'IGAS pour se prononcer.
J'ajoute que, actuellement, la réglementation européenne ne fait pas de différence entre les types d'essais cliniques, qu'il s'agisse des essais de phase 1, 2, 3 ou 4. En clair, cela signifie que la réglementation est la même pour les essais sur volontaires sains, qui, hormis les prélèvements cliniques bien sûr, n'ont a priori aucune raison d'être hospitalisés en cours d'essai de façon impromptue, en cas d'événement indésirable grave. C'est le règlement européen tel qu'il s'appliquera dans tous les États membres. C'est cette imperfection qu'a relevée Marisol Touraine et qui l'a conduite à demander la constitution d'un comité d'experts internationaux, en vue de renforcer la protection des volontaires sains. En effet, la situation n'est pas exactement identique pour un volontaire sain ou un volontaire suivi pour une maladie chronique.
Les 16 février et 31 mars, le comité scientifique spécialisé temporaire, le CSST, mis en place par l'ANSM et qui s'est également réuni, a confirmé que le mécanisme à l'origine de l'accident de Rennes avait dépassé la seule inhibition d'un neuromédiateur du système endocannabinoïde, dont je vous fais grâce du nom précis, et impliquait très vraisemblablement la molécule BIA 10-2474 elle-même.
Les études menées chez l'animal ont été de nouveau examinées en détail, mais n'ont pas apporté d'éléments nouveaux, notamment sur le plan de la toxicité. Ces conclusions sont cependant toujours provisoires, certains éléments essentiels n'ayant pas encore été communiqués, en particulier les dosages sanguins réalisés pendant l'essai.
Par ailleurs, sans attendre une éventuelle mise à jour des recommandations européennes, l'ANSM a élaboré un plan d'action visant à améliorer la sécurité des essais cliniques. Celui-ci a été mis en uvre à la fin du mois de mars et regroupe différentes mesures concernant les processus internes d'instruction des autorisations, mais aussi l'analyse des données en cours de déroulement de l'essai par les promoteurs et les processus d'information de l'Agence en cas d'incident.
Enfin, je vous rappelle que d'autres investigations réalisées par le pôle de santé publique du parquet de Paris sont en cours.
Cet accident tragique nous a mis devant l'obligation de nous interroger une nouvelle fois sur le cadre législatif et réglementaire des essais cliniques, ainsi que vous l'avez tous souligné, mesdames, messieurs les sénateurs.
Le président Alain Milon a rappelé l'histoire de l'encadrement des essais cliniques. Je n'y reviendrai donc pas, mais je souhaite saluer ceux qui ont permis de faire avancer notre législation en la matière ; je pense bien sûr à Olivier Jardé, mais aussi à Jean-Pierre Godefroy, qui fut le rapporteur du Sénat et dont le travail a permis aux deux assemblées de parvenir à un compromis.
J'ai entendu vos critiques concernant la non-parution des décrets d'application de la loi Jardé, et je souhaite vous répondre précisément sur ce point.
Comme Olivier Jardé l'a lui-même rappelé devant la commission des affaires sociales le 2 mars dernier, le ministère de la santé a élaboré les projets de décret dès le mois d'avril 2012. Durant l'été 2012, ces projets ont été soumis à la relecture d'un groupe de travail, constitué à la demande de Marisol Touraine. À partir d'octobre et jusqu'à la fin de l'année 2012, ce projet a été soumis à la concertation.
Au début de l'année 2013, des travaux européens sur le règlement européen relatif aux essais cliniques ont été annoncés. Le ministère de la santé a participé à toutes les réunions à Bruxelles sur ce sujet. Au cours de cette même année, nous nous sommes interrogés sur l'opportunité de publier les très nombreux textes d'application, sachant que la loi devrait nécessairement être modifiée rapidement avec l'entrée en vigueur du règlement européen.
Un très large consensus s'est dégagé pour ne pas publier les textes. Modifier à deux reprises en trois ans la législation sur les essais cliniques aurait fait courir un risque majeur à la recherche française.
C'était également le point de vue d'Olivier Jardé, qui l'a exprimé de manière précise devant votre commission, et celui de François Lemaire, ancien chargé de mission au cabinet de Roselyne Bachelot qui, toujours devant votre commission, a souligné le caractère déraisonnable de ce calendrier.
Je souhaite rappeler en cet instant les propos qu'a tenus François Lemaire sur l'absence de lien entre la loi Jardé, qui est avant tout une loi de simplification du cadre des essais cliniques, et l'accident de Rennes : « La loi Jardé n'est pas en cause en cette affaire, puisqu'elle n'a pas touché à ce qui concerne le médicament, domaine qui relevait de la législation européenne. Elle porte essentiellement sur les recherches observationnelles, les collections biologiques [ ] Elle n'a pas touché au noyau dur du médicament et de la sécurité. On ne peut donc pas dire que si on l'avait appliquée avant, l'accident de Rennes n'aurait pas eu lieu ».
Je crois que cette mise au point était nécessaire pour mettre fin à certains doutes ou certaines inquiétudes que j'ai cru percevoir au cours de certaines interventions.
Les travaux préparatoires au projet de loi de modernisation de notre système de santé commencés au début de l'année 2014 ont offert un véhicule législatif adéquat pour adapter la loi Jardé au règlement européen. Au terme des débats parlementaires, l'article 216 de la loi promulguée le 26 janvier dernier a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures visant cette adaptation.
Le projet d'ordonnance renvoie ainsi toutes les dispositions sur les essais cliniques de médicaments au règlement européen, puisque c'est ce règlement européen qui fixe les règles relatives à la vigilance en la matière. Par conséquent, ces règles ne pourront être modifiées par décret que si elles sont plus protectrices que celles qui sont prévues par le règlement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous m'avez demandé où en était le projet d'ordonnance : il est en cours d'examen par le Conseil d'État. L'ordonnance devrait être publiée au mois de juin prochain et le projet de loi de ratification devrait être déposé au Parlement dans la foulée. Par ailleurs, un projet de décret pris en application de l'ordonnance est en cours d'élaboration. Ce dernier devrait être transmis au Conseil d'État avant l'été pour une publication à l'automne.
À l'issue des consultations sur le projet d'ordonnance, trois sujets délicats ont été identifiés.
Tout d'abord, il est vrai qu'il existe une forte opposition au tirage au sort des comités de protection des personnes. Pour autant, le Gouvernement n'entend pas renoncer à cette réforme. Il faut réfléchir précisément aux modalités de ce tirage au sort. L'idée d'un tirage au sort « intelligent » parmi des CPP particulièrement compétents dans certains domaines est à l'étude et pourrait être précisée dans le décret d'application.
Ensuite, la répartition des compétences entre les CPP et l'ANSM a également fait l'objet de débats. Le projet d'ordonnance prévoit ainsi de confier à l'Agence l'évaluation de la méthodologie des essais cliniques.
Enfin, il est prévu de créer un secrétariat unique pour l'ensemble des CPP qui permettrait d'accroître la rapidité des échanges entre comités et ANSM.
J'entends désormais répondre aux interrogations sur le fonctionnement des CPP et sur les relations des comités avec l'ANSM.
Le premier point porte sur le fonctionnement des comités : il existe aujourd'hui trente-neuf comités de protection des personnes répartis sur l'ensemble du territoire métropolitain. Cette multiplicité est un facteur d'hétérogénéité, qui se manifeste d'abord par une grande variabilité de l'activité des CPP, laquelle s'explique sans doute par la plus ou moins grande proximité des centres hospitalo-universitaires de grande taille. En l'absence de véritable coordination, chaque CPP développe sa propre jurisprudence sur les questions éthiques.
Cette hétérogénéité concerne également la gestion administrative et financière des CPP, puisque les budgets des comités se situaient entre 50 000 euros et 230 000 euros en 2015. Si la réglementation a prévu la mise à disposition de moyens en personnels, matériels et locaux, toutes les conventions ne valorisent pas de la même façon les prestations réellement servies aux comités.
Cette difficulté a conduit les pouvoirs publics à prévoir la mise en place dans la loi Jardé d'une commission nationale des recherches impliquant la personne humaine qui est chargée de la coordination, de l'harmonisation et de l'évaluation des comités. Celle-ci sera installée dès que le décret d'application de l'ordonnance sera publié, étant entendu, je l'espère, que l'ordonnance sera ratifiée dès cet été, ce qui dépend évidemment du Parlement, et que le décret pourra être publié à l'automne prochain.
Par ailleurs, la loi a prévu la mise en uvre d'un système d'attribution aléatoire des dossiers de recherches aux CPP pour renforcer leur indépendance. En effet, ce système de tirage au sort écarte tout soupçon de liens d'intérêts entre l'établissement de santé public, siège du CPP, et le CPP lui-même.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, si les conditions pratiques de cette attribution aléatoire sont encore en discussion, le dispositif aura pour conséquence de lisser l'activité des trente-neuf CPP ce n'est pas du tout le cas pour l'instant , de telle sorte que tous les comités traitent à peu près le même nombre de dossiers. Cela permettra également d'harmoniser le financement des comités et de simplifier leur gestion budgétaire. À ce sujet, je précise que le ministère de la santé continuera à maintenir son effort, comme il l'a toujours fait, pour répondre aux situations financières les plus délicates.
Le second point concerne le règlement européen relatif aux essais cliniques des médicaments qui nous contraint à revoir les relations entre l'ANSM et les comités. En effet, la mise en place d'un portail européen unique de dépôt des demandes de recherches sur le médicament, ainsi que l'obligation faite à chaque État de rendre une décision unique sur le projet de recherches qui lui est soumis impliquent de repenser l'articulation entre l'ANSM et les CPP.
Tout d'abord, le portail numérique européen suppose que l'ANSM actualise son système d'information et, parallèlement, que les CPP disposent d'un système d'information en interface avec l'ANSM.
Si j'entre autant dans le détail, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est parce que vous m'avez posé des questions précises, notamment sur les raisons pour lesquelles tel ou tel dispositif n'avait pas déjà été mis en uvre. Je tiens donc à expliquer les modalités très concrètes de mise en place de chacun de ces éléments.
M. Jean Desessard. Merci, madame la secrétaire d'État !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Une discussion doit ensuite s'engager avec la conférence nationale des comités de protection des personnes sur l'opportunité de mettre en place un secrétariat unique des CPP. Cette organisation n'est envisageable qu'à moyen terme, car l'ANSM et les CPP doivent au préalable préparer l'installation du portail européen, dont je viens de parler, et un système d'information concernant la totalité du fonctionnement des CPP doit également être défini.
Je veux en outre répondre aux questions relatives à l'éthique
Tout d'abord, il y a la question du consentement. Dans le cadre des essais cliniques, l'investigateur des essais a l'obligation de recueillir le consentement éclairé et signé de la personne volontaire. Le promoteur a également l'obligation de s'assurer que l'investigateur respecte ses obligations. Enfin, l'ANSM peut mener des audits en cours d'étude pour vérifier le strict respect de la réglementation et, en cas de manquement, déclencher les procédures juridiques et administratives.
À la suite de l'accident de Rennes, Marisol Touraine a immédiatement rappelé la nécessité de recueillir de nouveau le consentement éclairé et signé des volontaires sains pour poursuivre une étude, dès lors que serait survenu un fait nouveau, au sens du code de la santé publique. Lorsqu'un tel fait survient, il faut non seulement le déclarer immédiatement, mais également suspendre l'essai plutôt que de faire comme si de rien n'était, ainsi que refaire signer un consentement à la personne volontaire.
Ensuite se pose la question de la publicité, peu évoquée par les différents intervenants.
La publicité pour appel à participation à un essai clinique est parfois utilisée, non seulement par les industriels, mais aussi par des institutions académiques telles que l'INSERM. Je veux être claire : cette publicité ne peut en aucun cas porter sur le produit de santé expérimental.
Évidemment, le recrutement ne peut être automatique et suit une procédure réglementaire très stricte. Dans le cas de l'étude conduite par Biotrial, la publicité pour la recherche était conforme à la réglementation. Dès lors qu'une publicité pour promouvoir la participation à la recherche revêt un caractère non éthique, le recours au jury de déontologie publicitaire de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité permet de vérifier l'adéquation de la publicité, ou au contraire sa non-adéquation, avec le respect des règles.
Je terminerai mon intervention en répondant au président Alain Milon sur le développement de la recherche clinique en France
Oui, monsieur le président, nous pensons que le développement de la recherche clinique et la sécurité des essais cliniques sont des objectifs conciliables.
Le Conseil stratégique des industries de santé, qui réunissait le Gouvernement et les partenaires industriels le 11 avril dernier, a cité le développement de la recherche clinique parmi ses axes stratégiques pour 2016.
La France dispose déjà d'atouts considérables en matière de recherche. Les six instituts hospitalo-universitaires présents sur notre territoire ont ainsi conduit près de 1 500 essais thérapeutiques de 2012 à 2014.
Néanmoins, des pistes d'amélioration existent. Aujourd'hui, la contribution française aux essais thérapeutiques n'est pas égale dans tous les domaines. Si notre pays fait partie des leaders dans le domaine de l'oncologie, autrement dit de la cancérologie, ou dans celui des maladies rares, les indicateurs sont moins bons dans d'autres domaines, comme celui du diabète notamment.
C'est la raison pour laquelle la France a grandement contribué à l'élaboration du règlement européen relatif aux essais sur les médicaments et participe activement à l'élaboration du règlement européen sur les dispositifs médicaux. Le règlement a notamment permis d'avancer sur les délais d'instruction technico-administrative des protocoles. Dorénavant, ces délais sont réduits à soixante jours au maximum, ce qui constitue une avancée importante.
Aujourd'hui, l'enjeu est de continuer à garantir aux patients des conditions strictes de sécurité, tout en améliorant les délais. Alors, comment faire ?
Tout d'abord, il faut simplifier les procédures. C'est pourquoi Marisol Touraine a mis en place la convention unique. Depuis le mois de janvier 2015, 255 des 262 conventions de recherche l'ont utilisée. Cela montre une adhésion massive à ce nouveau dispositif, qui a permis de réduire de moitié les délais de signature des conventions, de 117 jours en moyenne à 53 jours. La France est ainsi passée du trentième rang en ce qui concerne le délai de contrat pour les essais cliniques à promotion industrielle à la fin de l'année 2014 au sixième rang au début de cette année.
Ensuite, nous devons multiplier les partenariats entre la recherche publique et la recherche privée pour encourager les financements en faveur de la recherche. À cet égard, nous nous réjouissons de la multiplication des créations de fonds d'investissement privés pour développer de tels partenariats.
Récemment encore, la nouvelle fondation d'une entreprise pharmaceutique pour la recherche en immuno-oncologie a ainsi lancé son premier appel à projets à destination de structures de recherche publique dans un domaine qui ne concerne pas, bien sûr, les médicaments fabriqués par ladite entreprise pharmaceutique. De la même façon, Marisol Touraine a récemment parrainé la signature d'un partenariat entre une autre fondation privée et l'INSERM. Ces initiatives vont dans le bon sens.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l'ambition du Gouvernement est double : assurer à nos concitoyens une sécurité totale en ce qui concerne les médicaments innovants et leur participation aux essais cliniques et, dans le même temps, permettre à la France d'être un leader de l'innovation dans le domaine de la santé. Ces deux objectifs sont conciliables et s'inscrivent dans une même démarche d'excellence, de responsabilité et d'éthique ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE. M. le président de la commission des affaires sociales applaudit également.)
M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur le cadre législatif et réglementaire applicable aux essais cliniques.
Source http://www.senat.fr, le 11 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80320|BRUCE TOUSSAINT
Alain VIDALIES est l'invité d'I TELE ce matin, bonjour et merci d'être avec nous.
ALAIN VIDALIES
Bonjour.
BRUCE TOUSSAINT
Vous êtes secrétaire d'Etat chargé des Transports. Peut-on parler de pénurie de carburant ce matin ?
ALAIN VIDALIES
Non ! Je ne crois pas qu'on ne peut pas parler de pénurie de carburant, la situation est la même qu'au début de la crise il y a à peu près dans notre pays sur les 12.000 stations-service 20 % qui aujourd'hui sont en difficulté, soit en pénurie complète, soit en pénurie d'un ou deux produits. La situation a quand même évolué, c'est-à-dire que c'était très concentré sur l'Ouest, le Nord- ouest, et que c'est en train de se diversifier, le volume n'évolue pas mais un certain nombre de régions qui n'étaient pas touchées le sont aujourd'hui - parfois de manière surprenante - on a 13 % de stations dans le Sud-ouest qui n'étaient absolument pas concernées par ces difficultés et, donc, il y a évidemment chacun le comprend un phénomène de précaution qui joue.
BRUCE TOUSSAINT
Alain VIDALIES, pourquoi ne pas dire plus facilement et plus naturellement qu'il y a une pénurie. Regardons ensemble, c'est juste une parenthèse, mais elle est importante, c'est quoi une pénurie ? On a regardé ensemble ce matin à la rédaction ce que ça voulait dire dans le Larousse : manque de ce qui est nécessaire, insuffisance. On y est ! C'est une pénurie, regardez, insuffisance, quand une station-service sur cinq est en difficulté on peut bien parler de pénurie ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez, vous jouez sur les mots, comme vous voulez.
BRUCE TOUSSAINT
Je ne joue pas sur les mots...
ALAIN VIDALIES
Mais il n'y a pas de pénurie
BRUCE TOUSSAINT
C'est la réalité que les Français vivent.
ALAIN VIDALIES
Non, il n'y a pas de pénurie. Pourquoi ? Parce que je n'ai pas de problème de stock, c'est ça qui est essentiel, du stock j'en ai, j'ai un problème de logistique - c'est-à-dire que le problème qui existe aujourd'hui c'est comment on amène le stock qui existe, qui est dans les dépôts, comment on l'amène dans les stations-service et, au départ, le problème il se crée parce qu'il y a les transporteurs qui bloquent cet accès et aujourd'hui la position du gouvernement est très claire : il y a la grève dans les raffineries, on respecte le droit de grève, mais ce n'est pas là que se pose le problème. Il y a des dépôts qui ne sont pas en grève, c'est-à-dire que les salariés sont dans ces dépôts ne sont pas en grève mais il y a des gens qui bloquent l'accès à ces dépôts et ça ce n'est pas acceptable et donc nous libérons l'accès à ces dépôts comme ça été fait ce matin pour que les camions puissent aller dans les stations-service.
BRUCE TOUSSAINT
On va y venir dans un instant ! Les raffineries, la CGT dit ce matin : « toutes les raffineries françaises il y en a huit je crois sont occupées et bloquées », est-ce que c'est vrai selon vous ?
ALAIN VIDALIES
C'est faux à ma connaissance, puisque les raffineries EXXON il y en a deux qui fonctionnent et dans l'une, c'est les salariés de la raffinerie qui sont en grève, c'est la CGT qui à l'extérieur essaie d'empêcher les gens de travailler, ça c'est le même raisonnement, on respecte le droit de grève des salariés, on n'empêche pas les autres de faire ce qu'ils souhaitent faire. Donc, il y a deux raffineries sur les huit : une qui est en arrêt technique, cinq qui sont en grève et deux qui fonctionnent.
BRUCE TOUSSAINT
Voilà donc le chiffre ce matin que vous nous donnez, six sur huit selon vous, ça n'a pas changé. Vous évoquiez le nombre de stations, tout à l'heure vous disiez 20 % avec une diversification, c'est-à-dire que ça se diversifie dans le pays, ça représente combien de stations, vous avez un chiffre approximatif à nous donner ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez il y a 12.000 stations en France, donc tout le monde voit bien à une centaine près ce qu'est le chiffre.
BRUCE TOUSSAINT
Fos-sur-Mer, ça été extrêmement tendu ce matin, je voudrais qu'on rejoigne quelques instants notre envoyée spéciale Stéphanie ROUQUIE qui va nous raconter ce qui s'est passé. A Fos-sur-Mer intervention, Stéphanie, des forces de l'ordre vers 4 h 15, ça été très musclé, là vous vous êtes déplacée à Port-de-Bouc où c'est à nouveau très tendu, Stéphanie ROUQUIER pour I TELE.
STÉPHANIE ROUQUIE, EN DUPLEX DE PORT-DE-BOUC BOUCHES DU RHÔNE
Effectivement ! Et le déblocage du dépôt pétrolier de Fos a été très musclé, il a duré deux heures, il y avait beaucoup de travail. Les CRS, les gendarmes mobiles étaient très nombreux et ils étaient très équipés, ils sont arrivés donc avec des drones et avec des hélicoptères, des canons à eau, des gaz lacrymogène et des flash-ball, mais il faut dire que face à eux les cégétistes, les militants étaient aussi très motivés, ils s'attendaient à cette intervention des forces de l'ordre. Donc là le dépôt pétrolier de Fos a été dégagé et maintenant on joue un peu au chat et à la souris, donc les militants sont un peu partis du dépôt de Fos et ils sont venus ici à Port-de-Bouc pour essayer de bloquer en fait cette route - cette grande route principale - et là effectivement les CRS ont répondu, les gendarmes mobiles en moins de 10 minutes sont arrivés aussi très équipés vous le voyez avec le canon à eau pointé directement sur eux et là on vient d'assister, il y a moins de cinq minutes, les gendarmes se sont avancés et ils ont fait partir en fait les militants qui viennent à l'instant de quitter le site.
BRUCE TOUSSAINT
Merci beaucoup Stéphanie ROUQUIE, en direct de Port-de-Bouc, donc dans les Bouches-du-Rhône. Alors d'abord la méthode, on a besoin de tant de moyens et de Comment dire ? D'équipements militaires et de guerre quasiment pour déloger ces grévistes ?
ALAIN VIDALIES
Il n'y a pas de guerre ! Attendez
BRUCE TOUSSAINT
On parle d'armes !
ALAIN VIDALIES
Ou on parle des Français qui aujourd'hui ont un peu accès aux stations service, quelle est la situation ? Moi je suis républicain, je défends un certain nombre de principes, le droit de grève est un principe constitutionnel, les gens qui font grève on respecte leur droit, on n'est pas intervenus dans les raffineries ; Là ce n'est pas du tout ça ! Là il s'agit de quoi ? Il s'agit de gens qui vont empêcher d'autres qui ne font pas grève de travailler en occupant l'espace public et, dans une République, il ne faudrait rien faire ? Non ! Nous intervenons. On intervient comment ? Pas la fleur au fusil, là c'est une intervention normale par rapport à des gens, moi les rapports que j'ai c'est qu'il y avait des gens qui lançaient des pneus, enfin évidemment ça été difficile, on aurait préféré éviter, mais c'était aujourd'hui la seule réponse possible, et je le dis clairement.
BRUCE TOUSSAINT
Y aura-t-il d'autres interventions des forces de l'ordre
ALAIN VIDALIES
Oui, oui.
BRUCE TOUSSAINT
Dans la journée ?
ALAIN VIDALIES
Ah ! Dans la journée, je ne vais pas ici vous donnez le planning naturellement, mais je l'ai annoncé dès hier de toute façon, dès avant-hier, nous allons libérer les dépôts, là où ce nest pas des grévistes mais des gens qui ont décidé d'empêcher la France de fonctionner et donc d'empêcher d'autres gens qui eux ne sont pas grévistes de travailler normalement, eh bien les principes républicains font que nous devons rétablir la liberté dans ces cas-là.
BRUCE TOUSSAINT
Par tous les moyens ?
ALAIN VIDALIES
Les moyens, je veux dire on ne sait pas, on ne va pas arriver en chantant, il y a des sommations, mais suite à une réponse qui est forcément une réponse en termes d'ordre public.
BRUCE TOUSSAINT
On va écouter ensemble ce que nous disait hier soir Francis DUSEUX, qui est le président de l'Union Française des Industries Pétrolières, parce qu'effectivement il y a une inquiétude maintenant sur les prochains jours, on écoute ensemble Francis DUSEUX.
FRANCIS DUSEUX, PRÉSIDENT DE L'UNION FRANÇAISE DES INDUSTRIES PÉTROLIÈRES EXTRAIT DU 23/05/2016
Qu'il y ait un blocage au niveau des ports le brut ne peut pas arriver, il y a du stockage qui est disponible dans les bacs du Havre mais très rapidement les bateaux vont être sur rade, on va attendre et on va être obligés d'arrêter l'ensemble des raffineries, donc là ça devient effectivement assez critique.
BRUCE TOUSSAINT
Qu'est-ce que vous lui répondez ?
ALAIN VIDALIES
Ah ! Il parle d'autre chose, soyons plus précis.
BRUCE TOUSSAINT
Oui.
ALAIN VIDALIES
Jusqu'à présent on a parlé des raffineries, ensuite on a parlé des dépôts, lui il parle des ports
BRUCE TOUSSAINT
Absolument.
ALAIN VIDALIES
Si on n'a pas de problème à cause de l'arrêt des raffineries c'est parce qu'effectivement 50 % de ce que nous consommons est
BRUCE TOUSSAINT
Non, mais ce qu'il nous raconte c'est la suite du mouvement, c'est ce qui va se passer dans 48 heures ou 72 heures.
ALAIN VIDALIES
Attendez ! Peut-être que vous vous avez des liens directs avec eux, pour l'instant ce n'est pas les choses chaque jour suffit sa peine, mais effectivement il y a une difficulté de ce point de vue-là, il a raison, mais on n'en n'est pas là pour l'instant, effectivement s'il y a un blocage des ports la situation deviendrait plus complexe. Mais on travaille aussi, y compris en termes de maintien de l'ordre, à cette question.
BRUCE TOUSSAINT
Quel message adressez-vous ce matin aux Français, aux gens qui nous regardent, qui n'ont plus d'essence, quel est le message que vous souhaitez envoyer ?
ALAIN VIDALIES
Les deux tiers du pays ne sont pas concernés, le catastrophisme ne sert à rien. Je dis aux gens
BRUCE TOUSSAINT
Donc, ça veut dire quoi, c'est-à-dire qu'un tiers du pays est concerné ?
ALAIN VIDALIES
Ca veut dire qu'un tiers des Français potentiellement à partir du moment où 20 %, 20 % des stations c'est à peu près il y a deux tiers du territoire sur lequel cette réalité-là n'existe pas aujourd'hui, le reste du territoire il y a des gens qui ont des difficultés, 20 % des stations. La France a été confrontée à ça, nous avons aujourd'hui je vous l'ai dit 20 % des stations, en 2010 on est montés jusqu'à 50 % des stations qui étaient bloquées. Donc le gouvernement applique les principes républicains, respecte le droit de grève lorsqu'il est appliqué et ailleurs fait respecter la liberté de travailler.
BRUCE TOUSSAINT
Un Français sur trois, c'est ce que vous dites ce matin, un Français sur trois est potentiellement concerné ?
ALAIN VIDALIES
Il est dans une zone où il peut avoir ce genre de difficulté, ça ne veut pas faire qu'un Français sur trois n'a pas d'essence pour que les choses ne soient pas
BRUCE TOUSSAINT
Potentiellement c'est ce que je viens de dire, absolument, potentiellement.
ALAIN VIDALIES
Potentiellement, voilà, nous sommes d'accord sur les mots.
BRUCE TOUSSAINT
Qu'est-ce que vous leur dites à ces 33 %...
ALAIN VIDALIES
Que le gouvernement fait son travail, que depuis vendredi nous avons exactement fait ce que nous avions annoncé : 1°) renouer le dialogue avec les camionneurs, puisque c'était eux qui bloquaient, j'ai envoyé une lettre à l'ensemble des organisations syndicales vendredi de telle sorte manière qu'aujourd'hui le mouvement des camionneurs sur la question des heures supplémentaires n'a plus de fondement ; ensuite, nous avons libéré les dépôts, le gouvernement fait ce qu'il a annoncé sur la base des principes qui ont été rappelés par le Premier ministre.
BRUCE TOUSSAINT
La CGT mène cette bataille syndicale et sociale, on va écouter ensemble Emmanuel LEPINE qui dirige la branche « pétrole » à la CGT et qui était notre invité à 7 h 30 tout à l'heure sur I TELE.
EMMANUEL LEPINE, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE LA BRANCHE « PÉTROLE » DE LA CGT EXTRAIT 7H30
Ce matin il y avait deux assemblées générales dans les deux raffineries qui restaient en mouvement et en production et la charge des CRS à ESSO Fos a provoqué une énorme motion en même temps à Notre-Dame-de-Gravenchon ce sont leurs collègues qui se sont fait tabasser et, du coup, la grève a été votée à Gravenchon. Donc, le résultat en quelque sorte de cette politique de soi-disant fermeté c'est d'enfoncer un peu plus le pays dans la pénurie puisque je considère que la pénurie le fautif c'est le gouvernement
BRUCE TOUSSAINT
On est typiquement dans un bras-de-fer avec un gouvernement qui fait preuve de fermeté et en face un syndicat, la CGT, qui ne veut pas lâcher. C'est quoi l'idée-là pour les prochaines heures et les prochains jours, donc on continue à se frotter comme ça et à quelle est la suite ?
ALAIN VIDALIES
Le gouvernement a un pouvoir légitime, démocratiquement élu, des principes puisqu'il faut en arriver-là les choses sont claires, nous prenons des décisions n'ont pas parce qu'on est élus par les adhérents de je ne sais quel parti ou quel syndicat mais parce qu'on a le pouvoir qui a été donné par les Français, nous prenons ces décisions dans le cadre du respect de la loi et de la Constitution et je pense que la cohérence elle est aujourd'hui du côté du gouvernement - que la CGT ait décidé de ce bras-de-fer pour des raisons qui n'apparaissent pas toujours évidentes c'est sa démarche, mais en tous les cas, nous, nous ferons respecter le droit tout en respectant le droit des militants syndicaux, notamment de faire grève.
BRUCE TOUSSAINT
On a entendu beaucoup de ministres et même le Premier ministre il y a quelques minutes sur Europe 1 utiliser le terme de prise d'otage, vous validez ce terme ?
ALAIN VIDALIES
C'est comme ça, évidemment, parce que c'est comme ça que les Français le ressentent, les Français ressentent que Ecoutez ! C'est assez simple, pourquoi - si la CGT est forte de sa conviction, elle a le droit de faire grève pourquoi aller bloquer le pays ?
BRUCE TOUSSAINT
Mais vous jouez quoi là aujourd'hui, le pourrissement ?
ALAIN VIDALIES
Ah ! Pas du tout, pas du tout, ce n'est pas du tout notre position.
BRUCE TOUSSAINT
Vous espérez que l'opinion se retourne contre la CGT ?
ALAIN VIDALIES
Je dois dire ce n'est pas le gouvernement qui a décidé de cette affaire, que la CGT soit contre la loi Travail c'est son problème et elle a raison de le manifester, nous avons assuré le droit de manifester parce que c'est un droit constitutionnel, nous respectons le droit de grève, eh bien il faut aussi respecter le droit d'aller et venir et le tout ça fait la République.
BRUCE TOUSSAINT
Il y aura sans doute aussi des perturbations du côté de la RATP dans quelques, un préavis de grève illimité a été lancé par la CGT
ALAIN VIDALIES
Oui.
BRUCE TOUSSAINT
Pourquoi, vous n'y croyez pas ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez le 2 juin, on verra ce qui se passe le 2 juin, ce n'est pas
BRUCE TOUSSAINT
Oui, c'est bientôt, c'est la semaine prochaine.
ALAIN VIDALIES
Oui ! D'accord, mais ce n'est pas aujourd'hui, ce n'est pas demain, on verra, en plus pour des considérations qui sont des considérations de négociations salariales, donc il y a aussi ces moments de tension, donc pour l'instant je pense que le dialogue peut reprendre.
BRUCE TOUSSAINT
Ce bras-de-fer encore une fois avec la CGT il ne peut pas aussi votre responsabilité gouvernementale n'est-elle pas à un moment donné d'engager le dialogue avec la CGT, où est-il, il n'y a pas de dialogue aujourd'hui avec la CGT ?
ALAIN VIDALIES
Mais enfin pourquoi vous dites ça ? Qu'est-ce que j'ai fait vendredi avec les conducteurs ? Est-ce qu'on n'a pas avancé d'une manière
BRUCE TOUSSAINT
Philippe MARTINEZ a été par Manuel VALLS récemment ?
ALAIN VIDALIES
Est-ce que je n'ai pas envoyé - d'abord vous ne savez pas s'il y a des contacts ou pas
BRUCE TOUSSAINT
Je vous le demande !
ALAIN VIDALIES
Voilà je peux vous dire les choses ne sont pas Voilà ! Premièrement
BRUCE TOUSSAINT
Il y a des contacts ?
ALAIN VIDALIES
Deuxièmement Je ne peux pas vous dire qu'il n'y a pas de contact, donc vous en tirez ce que vous voudrez
BRUCE TOUSSAINT
Donc, ça veut dire qu'il y a des contacts.
ALAIN VIDALIES
Deuxièmement, qu'est-ce que j'ai fait vendredi ? Pourquoi vous dites ça ? Je veux dire est-ce quil y a eu une avancée plus importante que celle sur l'origine du mouvement avec les camionneurs et la lettre que je leur envoie pour dire : « vous n'êtes pas concernés par la loi » et après ça dire au gouvernement : « vous n'entamez pas le dialogue », mais on ne peut pas être face à quelqu'un qui dit : « quelles que soient les avancées, quelle que soit votre position, nous on a raison, on ne bougera pas », non ce n'est pas comme ça que ça marche. Ceux qui ont fait preuve d'une volonté de discuter ça été le gouvernement, il faudrait peut-être qu'il y ait des échos de
BRUCE TOUSSAINT
Que cherche la CGT, selon vous ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez posez-leur la question, moi je pense qu'il y a des préoccupations, on le sait bien il y a eu une histoire difficile récente, il y a des problèmes je ne vais pas devenir commentateur, moi je suis responsable politique mais
BRUCE TOUSSAINT
D'accord !
ALAIN VIDALIES
Evidemment qu'il y a des raisons qui ne sont pas forcément liées au mouvement.
BRUCE TOUSSAINT
Il nous reste trois minutes, je voudrais qu'on aborde deux autres sujets qui vous concernent directement ou indirectement d'ailleurs. Vous savez il y a une grande question de la sécurité autour de l'Euro 2016, pour l'instant les critiques sont concentrées sur l'accueil des spectateurs dans les stades, mais ça concerne aussi les transports parce que ces spectateurs vont venir pour beaucoup en transports en commun, alors est-ce que d'ailleurs les transports en commun sont concernés par ces mesures de sécurité à l'occasion de l'Euro 2016 ?
ALAIN VIDALIES
Naturellement. Depuis le début il y a un groupe que le gouvernement a mis en place, depuis plus d'un an maintenant, dans lequel nous sommes totalement impliqués, avec des mesures spéciales y compris des mesures qui ont entraîné des modifications législatives puisque vous savez qu'il y a eu une loi importante qui a été votée il y a quelques semaines - dont les décrets d'application sont quasiment tous pris maintenant et qui notamment renforcent les pouvoirs des services de sécurité, de palpation, de contrôle et notamment des agents des services spécialisés de la SNCF.
BRUCE TOUSSAINT
Donc, il y aura plus de contrôles à l'occasion de cet Euro ?
ALAIN VIDALIES
Il y a plus de contrôles, il y a plus de moyens juridiques de pouvoir contrôler, fouiller les bagages, contrôler les identités, et ça c'est le résultat d'une loi que nous avons fait voter récemment.
BRUCE TOUSSAINT
En ce qui concerne le crash de l'avion et du vol Paris Le Caire d'Egypt Air, on sait que les recherches se poursuivent en Méditerranée, est-ce que vous avez de nouvelles informations d'ailleurs concernant ce crash ?
ALAIN VIDALIES
Non, les seules informations qu'on a c'est que les recherches avec le sonar vont débuter, c'est-à-dire les appareils qui permettent de voir d'essayer de retrouver l'épave de l'avion, essentiellement les boites noires, toutes les indications dont on a aujourd'hui et qui pour l'instant l'essentiel sont déjà dans la presse, notamment la présence de fumée dans le cockpit, ne permettent pas, aucune de ces indications je le dis clairement ne permet aujourd'hui de favoriser l'une ou l'autre des réponses à la question légitime que chacun se pose, à savoir : est-ce que c'est un accident ou est-ce que c'est un attentat, puisqu'elles sont compatibles avec les deux versions ?
BRUCE TOUSSAINT
Christophe BARBIER, à la fin de son édito tout à l'heure, vous posait la question suivante, qui est un peu en marge de cette catastrophe aérienne : est-ce que, tant qu'il y a un doute effectivement, est-ce qu'il faut du coup demander à AEROPORTS DE PARIS de renforcer une nouvelle fois la surveillance des bagagistes, on sait que des mesures avaient été prises il y a quelques mois, est-ce que c'est quelque chose qui est dans les esprits ?
ALAIN VIDALIES
Les mesures ont été prises il y a quelques mois, vous l'avez dit une vérification systématique des 8.000 engins concernés, et naturellement dans le cadre de l'enquête qui est en cours aujourd'hui ces vérifications sont réitérées dans le cadre de l'enquête qui a été confiée par le Parquet de Paris, notamment à la gendarmerie des transports aériens.
BRUCE TOUSSAINT
Merci beaucoup Alain VIDALIES ! Je reviens un instant sur évidemment ce qui nous occupe ce matin et qui concerne ces problèmes d'approvisionnement en carburant, pour info la CGT confirme que les huit raffineries seront arrêtées j'utilise volontairement le terme, le temps du futur, qui seront arrêtées alors que vous nous disiez tout à l'heure que pour l'instant seules six sur huit étaient concernée.
ALAIN VIDALIES
Ils jouent sur le futur
BRUCE TOUSSAINT
Voilà !
ALAIN VIDALIES
Peut-être leur espoir aujourd'hui
BRUCE TOUSSAINT
Ca change quelque chose si les huit sont arrêtées ce soir ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez, je vous l'ai dit, si
BRUCE TOUSSAINT
Est-ce que vous allez réquisitionner les personnels des raffineries ?
ALAIN VIDALIES
A ce stade, non. Je vous répète on a trois mois de stock stratégique, c'est-à-dire que même si on n'a plus de produit on a de quoi fournir, j'ai un problème de stock et un problème de logistique, c'est à ça aujourd'hui que je m'attèle, le reste ne pose pas de problème pour les Français aujourd'hui. Voilà !
BRUCE TOUSSAINT
Merci beaucoup Alain VIDALIES, merci d'avoir été notre invité ce matin, bonne journée.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 25 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80321|
J'ai tenu à être présente parmi vous aujourd'hui comme j'en avais pris l'engagement auprès de la Fondation FALRET car je partage avec Marisol TOURAINE votre combat et votre détermination pour changer le regard porté par notre société sur la santé mentale, sur les maladies psychiatriques et les handicaps qui en découlent.
La santé mentale est un enjeu majeur de santé publique mais c'est plus encore un enjeu de société.
Agir pour une santé mentale positive, cela ne se résume pas à l'absence de maladie. C'est agir pour la cohésion de nos sociétés et contribuer ainsi à réduire les inégalités sociales, la perte de chance et l'isolement.
Nous sommes tous concernés de près ou de loin par la santé mentale. Et c'est donc un évènement important qui s'ouvre ici sur le Parvis de la Défense durant trois jours.
Vous avez souhaité créer le premier village « santé mentale », village éphémère certes mais pour une cause durable et permanente nécessitant que nous partagions le même cap.
Ce cap, Marisol Touraine a souhaité le rappeler et le confirmer dans le cadre de la loi de modernisation de notre système de santé. Cette loi de modernisation a pour objectif de s'attaquer aux inégalités de santé, en soulignant la place déterminante de la prévention et de l'éducation en santé et en installant un parcours de soins, une prise en charge dans la proximité et la continuité, y compris en santé mentale.
C'est son article 69 qui porte spécifiquement sur la santé mentale et l'objectif est clairement affirmé : nous avons à relever le défi collectif de réduire les inégalités d'accès aux soins, à la santé, aux droits et à la participation sociale qui frappent tout particulièrement nos concitoyens concernés par un trouble de santé mentale. Les mesures concernant la psychiatrie et la santé mentale réaffirment l'organisation de la psychiatrie par secteur, ce dispositif spécifiquement français, qui permet à la population d'un territoire géographique d'avoir accès à des soins coordonnés, de proximité, et dispensés par une même équipe. Mais la mission de psychiatrie de secteur est incitée à évoluer. Une adaptation est tout d'abord nécessaire pour que l'hospitalisation ne soit qu'une période la plus courte possible dans un parcours de soins et de vie. Cela implique de développer une offre de services diversifiée et basée sur l'ambulatoire et la proximité, à partir du lieu de vie des personnes. Nous savons par exemple que chaque fois qu'une équipe mobile est mise en place dans le cadre du secteur de psychiatrie, le nombre d'hospitalisations diminue ainsi que le taux d'occupation des lits. La mission de psychiatrie de secteur consiste aussi à garantir à la population desservie la continuité des soins psychiatriques et leur accessibilité territoriale et financière.
Enfin, les établissements de santé assurant la mission de psychiatrie de secteur participent, sans nécessairement les piloter, aux actions menées en matière de prévention, de soins et d'insertion dans le cadre du projet territorial de santé mentale.
Je le redis : la santé mentale est l'affaire de tous. Et c'est donc l'objectif du projet territorial de santé mentale d''ouvrir sur une plus grande participation des habitants, des élus, des usagers et de leurs familles, ainsi que de tous les acteurs intervenant dans la santé mentale. Je veux ici insister sur la place des élus locaux et je tiens donc à saluer l'investissement des collectivités présentes aujourd'hui pour cet évènement.
C'est tout le sens de la démocratie sanitaire en santé mentale porté également par la loi de modernisation. C'est pour faire vivre cette démocratie locale en santé mentale que Marisol Touraine a souhaité que les conseils locaux de santé mentale soient entérinés par la loi : pilotés par les élus, ils font partie intégrante du projet territorial de santé, et sont les instances de concertation et de coordination entre la psychiatrie et les habitants, pour l'inclusion sociale, le logement, les loisirs, le travail.
En agissant sur les déterminants de santé, ils participent aussi à la prévention et à la promotion de la santé mentale à l'échelle de leur territoire (souvent un quartier, une commune, ou une intercommunalité).
Agir en faveur de la santé mentale, c'est aussi changer le regard porté par la société, agir pour la déstigmatisation et reconnaitre les compétences, les rôles sociaux des personnes concernées. De nombreuses initiatives existent et votre évènement y contribue pleinement. Les associations représentatives des personnes et des familles mènent ce combat depuis de nombreuses années, soutenues par des professionnels engagés.
C'est pour ces raisons que le Ministère des Affaires sociales et de la Santé apporte son soutien à ces initiatives. Je veux à ce propos vous dire l'importance que revêt à mes yeux le développement des groupes d'entraide mutuelle. Ce sont des dispositifs concrets, de proximité, gérés par les personnes elles-mêmes. Je suis favorable à ce qu'ils puissent se développer de plus en plus.
Je veux aussi partager avec vous un principe qui me tient particulièrement à cur : ne rien faire sans les personnes elles-mêmes et sans les familles. Ce que les anglo-saxons appellent l'« empowerment » et que l'on pourrait tout simplement appeler l'autonomisation, ou la capacité pour les personnes de faire ses choix, décider et agir. Cela suppose que les soins et services, qui étaient l'affaire des professionnels et des institutions, se recentrent sur la capacité et le pouvoir des personnes malades à gérer leurs troubles avec l'aide des professionnels.
Redonner l'espoir aux personnes, c'est agir pour leur rétablissement et les techniques de soins et d'accompagnement évoluent en ce sens. Nous avons en France des expériences probantes en matière de réhabilitation psychosociale centrée sur le rétablissement des personnes. Nous avons aussi des équipes de recherche associant d'ailleurs les personnes et les familles. Ce sont des atouts essentiels pour l'avenir et la qualité de votre programme de tables rondes et de débats durant ces trois jours témoignent de cette richesse.
Je veux enfin faire mienne l'ambition de l'accès et du maintien dans l'emploi des personnes en situation de handicap psychique. C'est le thème de votre dernier jour de débats.
C'est une priorité de mon action en lien étroit avec Myriam EL KOMHRI, Ministre du Travail. C'est pour soutenir les initiatives existantes et les développer partout en France que j'ai souhaité que la définition et les conditions concrètes de mise en uvre de l'emploi accompagné soit portés dans le cadre du projet de loi en cours de débat à l'Assemblée nationale.
L'objectif est simple : faire en sorte que tous les partenaires, allant du service public de l'emploi aux équipes médico-sociales et sanitaires ainsi que les MDPH mettent en oeuvre ensemble les accompagnements individuels auprès des personnes et le soutien aux employeurs.
La citoyenneté passe dans notre société beaucoup par le travail et c'est donc essentiel d'agir pour lever les obstacles vécus au quotidien par les personnes en situation de handicap psychique.
L'emploi accompagné, de la même façon que le logement ou l'éducation, sont deux thèmes qui seront abordés lors du rendez-vous de la Conférence nationale du handicap qui aura lieu le 19 mai en présence du Président de la République.
Le handicap psychique fera partie des discussions. Cette CNH sera l'occasion de faire le bilan des avancées mais aussi d'établir des constats exigeants de ce qu'il nous reste à faire.
Ce sera l'occasion aussi de réaffirmer la nécessité de rendre notre société encore plus inclusive.
Ce sera aussi et prioritairement l'occasion pour le Président de la République de rappeler le cap qu'il a fixé lors de la dernière CNH en décembre 2014.
Le handicap psychique fait partie de ce cap ! Et c'est pour cela que j'ai souhaité être présente aujourd'hui avec vous.
Mesdames, messieurs, je vous souhaite d'excellents travaux, d'excellents débats.
Ensemble, gardons le cap pour une santé mentale positive et l'inclusion des personnes en situation de handicap psychique.
C'est un cap que nous pouvons atteindre et sur lequel nous ne devons rien céder car il est le visage de la solidarité et la fraternité que notre société garantit à toutes celles et ceux qui, du fait de leur vulnérabilité, se trouvent en difficulté dans leur vie.
Merci pour votre mobilisation collective.
Je vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 13 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80322|
Nous sommes toutes et tous réunis aujourd'hui à l'occasion de ce rendez-vous annuel de la Conférence nationale du handicap. Le Président de la République a souhaité ce nouveau rendez-vous afin que nous puissions collectivement faire le bilan des actions menées et porter de nouvelles initiatives. Nous y sommes ! Et je suis très fière d'ouvrir en votre présence à tous et avec Marisol TOURAINE, Ministre des affaires sociales et de la santé, cette nouvelle CNH.
Ensemble, nous travaillons au quotidien pour faire vivre les principes de la loi du 11 février et nos engagements internationaux. Cette CNH est placée sous le sceau d'une société encore plus inclusive. Vous savez que j'accorde une place essentielle au dialogue, à la concertation et la capacité à pouvoir agir ensemble. C'est de ma responsabilité en tant que Secrétaire d'Etat en charge du handicap et de la lutte contre l'exclusion. La politique du handicap est éminemment interministérielle et ouverte à l'ensemble des forces de la société. C'est la seule façon selon moi de garantir les droits et la citoyenneté des personnes handicapées.
Les droits et la citoyenneté des personnes en situation de handicap, c'est d'abord une exigence collective de tous les instants. Bien sûr pour les pouvoirs publics, les responsables politiques mais aussi les associations, les entreprises et à vrai dire l'ensemble de la société française. La loi de 2005 a profondément changé la vision portée sur le handicap et a inscrit un devoir collectif de garantir une réponse sur mesure, un droit à compensation individuel, respectueux du projet de la personne, de ses besoins certes mais aussi de ses attentes, de ses envies, de ses projets.
Ce changement profond opéré par la loi de 2005, nous en sommes tous dépositaires. Nous agissons pour que la solidarité nationale s'exprime au quotidien pour les personnes handicapées mais aussi faire de l'émancipation des personnes un principe fort des politiques publiques. La différence liée au handicap ne doit pas, ne doit plus mettre les personnes à part ! Cette différence est la nôtre, c'est nos différences à tous qui font notre humanité, nos différences sont notre force collective, ce qui fonde notre société et nos valeurs de solidarité et de fraternité. La liberté de choix c'est important pour chacune et chacun d'entre nous. Et il faut entendre la parole et les demandes des personnes en situation de handicap.
Nous sommes tous concernés par le handicap. Nous pouvons tous contribuer à améliorer la vie quotidienne, la participation sociale et la citoyenneté des personnes et de leurs proches.
C'est pour assumer cette ambition et cette exigence de solidarité que le Président de la République a souhaité que soient abordées des questions concrètes, de la vie quotidienne des personnes en situation de handicap : l'éducation tout le long de la vie, le logement et l'emploi.
Il a également souhaité donner la parole aux personnes directement concernées. Elles nous disent et nous diront par leur témoignage leurs attentes, nous constaterons leur expertise et leur pouvoir d'agir. La participation directe des personnes en situation de handicap doit être renforcée et c'est pour cela que j'ai souhaité avec Dominique Gillot, Présidente du CNCPH, rénover le fonctionnement et la composition de cette instance de concertation et de dialogue.
Avec Marisol TOURAINE, et en tant que Secrétaire d'Etat chargée des personnes handicapées, j'agis au quotidien avec vous tous. De nombreuses réformes et évolutions ont été mises en oeuvre dans le sens des priorités fixées par le Président de la République.
Toutes ces réformes, ces avancées contribuent à garantir le « zéro sans solution ». L'efficacité de notre système, c'est-à-dire de nos institutions, des établissements et services est jugée à sa capacité à ne laisser personne au bord du chemin. Nous avons une responsabilité collective à ce sujet. Oui, nous avons encore beaucoup à faire, oui, tous n'est pas résolu loin de là mais les avancées sont réelles et concrètes. Nous devons rester humbles sur le chemin qui nous reste à parcourir. Mais la détermination de ce gouvernement, ma détermination est sans faille.
Le « zéro sans solution », c'est garantir une réponse accompagnée pour tous. En fait, notre politique du handicap, toutes nos réponses n'ont qu'une seule finalité : c'est le combat pour l'émancipation des personnes handicapées. Ce combat nous le menons tous ensemble pour toutes les situations de handicap et notamment pour celles et ceux qui ont des difficultés majeures et un faible niveau d'autonomie. Qu'il s'agisse de troubles du spectre de l'autisme, de polyhandicap, les handicaps rares ou encore le handicap psychique, il s'agit de construire des solutions sur mesure, inclusives autant que possible mais systématiquement adaptées et respectueuses des besoins spécifiques et des attentes.
Lorsque nous mettons en oeuvre le Plan Autisme 2013-2017, nous agissons pour que la France rejoigne le concert des nations exemplaires dans ce domaine. Cela commence par l'école dès le plus jeune âge mais aussi par la mise en oeuvre d'interventions fondées sur les recommandations de bonne pratique de la HAS et de l'ANESM et les connaissances scientifiques internationales. C'est juste pour mieux prendre en compte les expériences réussies au niveau international dans le domaine de l'insertion professionnelle des adultes autistes que j'ai confié à Josef Schovanec, qui est présent parmi nous aujourd'hui, une mission au sein de mon cabinet. L'accompagnement et la participation sociale des adultes ayant un trouble du spectre de l'autisme constituent un point faible des 3 premiers plans. Il faut y remédier.
Ce regard tourné vers l'international, vers les innovations sociales, je souhaite aussi le promouvoir par la création d'une fondation pour l'investissement social dont la présidence est confiée à Isabelle KOCHER, nouvelle directrice générale du groupe Engie et seule femme patronne du Cac40 ! Cette fondation a pour objectif d'apporter la preuve de l'efficacité des projets et des innovations dans le domaine de l'inclusion sociale. Cela concerne bien évidemment le handicap tout comme la lutte contre l'exclusion. Il s'agit de produire de la connaissance utile, des données sur l'impact social, le retour sur investissement social d'initiatives portées par les associations, les entreprises. Cette fondation est faite pour construire de l'expertise sur des projets, des actions qui n'entrent pas dans les cases habituelles. Je veux aussi que cette fondation regarde ailleurs, partout dans le monde pour identifier ce que nous ne faisons pas encore et que l'on pourrait adapter à notre système, à nos valeurs, nos façons de faire. Dans le domaine du handicap, ces projets sont nombreux et ils leur manquent souvent cette preuve d'impact social.
C'est parce que les innovations dans le domaine du handicap sont importantes et nombreuses que nous allons lancer un concours Innovation et Handicap, doté d'une enveloppe prévisionnelle de 2 M, afin de soutenir ce dynamisme. L'innovation est facteur d'investissement social et c'est ce que nous visons dans le cadre de la politique du handicap.
L'investissement social est au fondement du secteur médico-social, au fondement des pratiques des professionnels qui accompagnent les personnes. Nous soutenons les évolutions de ce secteur mais nous poursuivons également la création de services d'accompagnement et de réponses en établissement médico-social pour les enfants et les adultes tout le long de la vie.
Nous agissons aussi pour simplifier la vie quotidienne des personnes handicapées afin que personne ne renonce à ses droits parce que les démarches administratives sont compliquées. Les démarches et la participation citoyenne sont aussi rendues compliquées pour certaines personnes handicapées car les informations, les documents sont rédigés en langage administratif, technique et sont donc difficilement compréhensibles. C'est aussi le cas des textes législatifs et nous devons montrer l'exemple. C'est pour cela que je souhaite engager les démarches pour rendre accessible dans un « français facile à lire et à comprendre » chaque nouvelle loi adoptée. Cela se fera bien évidemment avec les personnes et les associations qui ont l'expertise de cette mise en accessibilité. A vrai dire, cela aussi utile à chacune et chacun d'entre nous car nous utilisons un jargon bien peu accessible.
Nous mettons également en oeuvre de façon pragmatique et raisonnée l'accessibilité de tous à tout qu'il s'agisse des établissements recevant du public, le numérique, la santé, la culture
Nous progressons aussi vers l'émancipation par des réformes structurelles telles que la généralisation des contrats d'objectifs et de moyens pour les établissements et services médico-sociaux, la réforme de la tarification ou l'évolution des ESAT. Ne nous trompons pas sur la finalité de ces réformes, elles ne sont pas administratives. Elles sont l'un des vecteurs concrets pour que notre système médico-social prenne encore plus, encore mieux, le virage inclusif. Ce virage est en cours, en témoigne par exemple les coopérations locales qui se renforcent entre les enseignants et les professionnels du secteur médico-social. Ces coopérations, cette synergie essentielle entre l'école et le médico-social contribuent à l'égalité d'accès à la réussite des élèves et des étudiants en situation de handicap.
De nombreuses autres avancées ont été réalisées depuis 2014 et Marisol TOURAINE a pu rappeler celles qui portent sur l'accès à la santé des personnes en situation de handicap.
Toutes ces mesures contribuent donc à la réponse accompagnée pour tous. Cette réforme de grande ampleur se déploie progressivement et elle constitue la colonne vertébrale de la politique gouvernementale. Le Président de la République en a fait sa priorité en décembre 2014 et ce sera lors de cette CNH le fil rouge de nos discussions.
J'aurais l'occasion, lors des trois tables rondes thématiques de revenir avec mes collègues Ministres sur les avancées dans le domaine de l'éducation, de l'emploi et du logement. Les avancées certes mais tout ce qu'il nous reste à faire. Je veux témoigner et saluer l'engagement et la détermination des Ministres présentes aujourd'hui, de l'ensemble de l'action du gouvernement portée par le Premier Ministre. Cette détermination est au coeur de ce rendez-vous annuel.
Mesdames, Messieurs, nous allons partager ce matin un moment démocratique important. Quels que nos points de vue, nos accords et désaccords, je sais que nous partageons le même objectif, les mêmes valeurs.
Je rencontre au quotidien les personnes en situation de handicap et les associations qui les représentent. Le Président de la République m'a demandé de réunir un comité de concertation
représentant les différents membres du CNCPH dans la perspective de cette CNH. J'ai entendu les attentes exprimées et j'ai pu récemment en échanger avec le Président de la République. Il s'exprimera devant nous en clôture de cette CNH.
Mesdames, Messieurs, je tiens à saluer votre engagement collectif, chacun dans votre rôles, chacun dans vos responsabilités.
C'est ensemble que nous construisons, jour après jour, une société plus inclusive.
Je vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 24 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80323|M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, prorogeant l'application de la loi no 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'État d'urgence (nos 3732, 3753).
La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, en raison de la persistance de graves menaces terroristes susceptibles de frapper l'ensemble du territoire national, le Gouvernement soumet à votre examen une troisième loi de prorogation de l'état d'urgence, pour une durée supplémentaire limitée à deux mois.
Je tiens, tout d'abord, à remercier le président Raimbourg et le co-rapporteur Poisson pour le suivi très méticuleux de l'état d'urgence qu'ils ont conduit depuis plusieurs mois. En commission des lois, le président Raimbourg nous a présenté un compte rendu très exhaustif qui permet d'avoir une photographie précise des mesures que nous avons mises en uvre : cela a été précieux pour la tenue des débats en commission.
Le contrôle du Parlement a, vous le savez, permis de faire la transparence et de lever les craintes et les inquiétudes qui s'étaient exprimées, ici ou là, au sujet de la mise en uvre de l'état d'urgence.
Chacun a pu constater que l'état d'urgence n'est pas synonyme d'arbitraire et que les actes et les décisions pris sur son fondement étaient tous prévus et strictement encadrés par le droit, tout comme les raisons justifiant d'y avoir recours et de le prolonger.
Je veux que les choses soient ici clairement dites : les mesures de police administrative que nous prenons en application de l'état d'urgence présentent un caractère exceptionnel. Elles sont, conformément aux principes constitutionnels et de droit, strictement proportionnées à la nature de la menace ainsi qu'au contexte d'ordre public qui en découle.
Le Conseil constitutionnel l'a d'ailleurs très clairement rappelé dans sa décision du 19 février dernier : les mesures prises dans le cadre de l'état d'urgence doivent concilier la prévention des atteintes à l'ordre public avec le respect des droits et des libertés, parmi lesquels figurent le droit et la liberté d'expression des idées et des opinions.
L'État et les forces de l'ordre disposent, du reste, des moyens juridiques et matériels nécessaires pour réprimer, avec la fermeté la plus grande, les débordements survenus à l'occasion des récentes manifestations, ainsi que pour interpeller, systématiquement, les casseurs qui se rendent coupables d'agissements intolérables.
J'en veux pour preuve le très grand nombre d'interpellations réalisées depuis le début de ces événements il y a deux mois : plus de 1 400 individus ont en effet été interpellés pour des faits de violence commis lors des manifestations contre le projet de loi travail. J'ajoute que 885 d'entre eux ont été placés en garde à vue et que 61 ont d'ores et déjà été condamnés par la justice, en comparution immédiate.
Quant aux manifestations qui se sont déroulées hier à Paris, et qui avaient été interdites, elles se sont traduites par six interpellations ayant donné lieu à six gardes à vues, dont trois pour participation à une manifestation interdite et détention de substances ou de produits incendiaires ou explosifs, deux pour participation à une manifestation interdite et une pour outrage à personne dépositaire de l'autorité publique.
Je veux le redire ici, solennellement, devant la représentation nationale : ce qui s'est produit hier à Paris, c'est-à-dire l'agression de deux policiers et l'incendie de leur véhicule, constitue des actes criminels d'une extrême gravité pour lesquels le procureur de la République a enclenché l'action publique pour des motifs qualifiant les actes en question de tentative d'homicide à l'encontre de personnes détentrices de l'autorité publiques.
Ces actes appellent la plus grande sévérité : c'est la raison pour laquelle de premières interpellations ont eu lieu dès hier. Elles permettront, à travers l'enquête et les auditions en cours, de déterminer la responsabilité exacte des interpellés dans les violences intervenues hier.
Je ne m'attarderai pas sur l'enquête : il convient, en ces matières, de respecter rigoureusement la séparation des pouvoirs. Il appartiendra donc, bien entendu, au procureur de la République de Paris de communiquer sur les faits qui se sont produits ainsi que sur le résultat des gardes à vue.
Je veux néanmoins d'ores et déjà dire que la police judiciaire, notamment la direction de la police judiciaire de la préfecture de police de Paris procède, sous l'autorité du procureur de la République, à l'exploitation de l'ensemble des éléments qui ont été rassemblés hier par les services, de manière à ce qu'il puisse être procédé à d'autres interpellations afin que tous ceux qui se trouvent à l'origine de ces actes en répondent devant la justice, de manière à ce que le droit passe rapidement et avec la plus grande sévérité.
Je me suis rendu hier soir au chevet du policier qui, avec beaucoup de maîtrise et de sang-froid, a protégé sa collègue et s'est protégé lui-même face à des actes de haine que j'ai trouvés d'une extrême barbarie. J'ai aussi trouvé extrêmement choquant de voir des individus autour du véhicule récupérer des images au moyen de caméras, sans bouger, sans intervenir, comme si c'était l'ordre normal des choses. Alors que des policiers étaient agressés avec la violence que l'on a vue, il y avait autour d'eux des individus en nombre, qui filmaient et ne bougeaient pas.
J'aurais énormément de difficulté à considérer qu'il y a chez ces hordes sauvages quelque chose qui ressemble à de l'humanité ou, a fortiori, à un début d'idéal. Il n'y a derrière tout cela que de la violence, de la brutalité, et cela traduit un abandon de tous les principes d'humanisme qui sont le fondement de notre civilisation et des valeurs républicaines.
Je veux aussi dire très calmement à l'opposition et à ceux qui la représentent ici que des violences dans des manifestations, il y en a eu souvent. Lorsqu'il y a un tel niveau de tension, on peut préférer les charmes de la politique à l'exigence éthique de vérité, mais, dans la responsabilité qui est la mienne, il n'y a qu'une chose qui compte, c'est l'exercice de l'État, au nom des principes républicains, avec pour seule boussole le sens de l'État et l'application du droit dans sa plus grande rigueur. Laisser penser qu'il y aurait, au sein de l'administration ou, a fortiori, du Gouvernement une forme de mansuétude à l'égard de ceux qui commettent de tels actes est faux et très injuste à l'égard des préfets qui, placés sous mon autorité, travaillent quotidiennement à la sécurité des Français, à l'identification des casseurs et à la judiciarisation de leur situation.
Si nous avons interpellé 1 400 personnes et procédé à des gardes à vue en nombre comme je viens de l'indiquer, si 71 personnes ont d'ores et déjà été lourdement condamnées, notamment dans les villes où les exactions ont été les plus nombreuses, c'est parce qu'il y a un travail inlassable de la police judiciaire, un travail inlassable des préfets, un travail d'investigation continu des services placés sous la responsabilité du ministère de l'intérieur.
Je le dis amicalement à Éric Ciotti, à Guillaume Larrivé et à l'ensemble des parlementaires du groupe Les Républicains et à leurs leaders, y compris à un certain nombre de membres de leur organisation qui ont exercé des responsabilités au sein du ministère de l'intérieur, si l'on veut apprécier les consignes données par un ministre à son administration, il y a une manière très simple de le faire, c'est d'exercer le contrôle parlementaire, de récupérer les télégrammes adressés aux préfets, les ordres d'opération donnés par les préfets aux forces de l'ordre sur la base des consignes qui leur sont adressées. Alors, grâce à un effort de transparence et à la bonne foi, il sera possible d'établir très clairement ce qu'il en est.
Mme Élisabeth Guigou. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je comprends que la passion de la politique, les échéances qui se préparent, la volonté de positionnement des uns et des autres puissent conduire à d'autres discours et à d'autres comportements mais moi, devant les Français, je ne veux m'assigner qu'un seul et unique devoir, protéger les Français contre les violences et rendre compte scrupuleusement devant la représentation nationale de l'action qui est conduite et de la fermeté qui est celle du Gouvernement sur ces questions.
En même temps, ce qui fait la force, la fermeté, l'autorité de l'État lorsqu'il y a une situation difficile comme celle à laquelle nous sommes confrontés, c'est le respect rigoureux et scrupuleux de tous les principes de droit lorsque l'État agit car c'est dans la force du droit que l'État puise aussi son autorité. Je ne peux donc pas prendre de disposition qui ne soit pas en toute occasion conforme aux principes de droit, et je vais prendre un exemple extrêmement concret.
Comme hier soir, j'avais donné avant-hier des instructions pour qu'une interdiction de paraître dans des manifestations soit notifiée à des individus violents
M. Christophe Caresche. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. et pour que leur judiciarisation soit facilitée au cas où ils s'y présenteraient, afin de protger aussi les manifestants sincères de la violence des casseurs. L'un de ceux qui ont été interpellés hier soir avait fait l'objet d'une décision cassée par le juge.
Je ne commente pas la chose jugée, je la respecte. Je ne cherche pas à faire pression sur les juges, ce qui, dans la responsabilité qui est la mienne, serait totalement inconvenant et contraire au principe de la séparation des pouvoirs. Je cherche simplement à faire uvre de pédagogie et à montrer la difficulté du problème à tous ceux qui, dans le vacarme, s'emploient à laisser penser, parfois avec la plus grande démagogie, que ce qui doit être fait ne l'est pas, ou que c'est une façon d'essayer d'être plus efficace.
Non, notre détermination est totale, notre volonté d'acier, et le respect du droit doit être la modalité d'intervention.
M. Pascal Popelin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Sinon, il n'y a plus de République, d'État de droit, de principes. Un ministre de l'intérieur qui veut faire en sorte que le droit passe ne peut pas s'éloigner des principes de droit en faisant preuve de démagogie. Face à un tel niveau de tension, il ne peut pas puiser son inspiration dans la pensée et les comportements de Donald Trump, même si ce dernier semble inspirer d'autres acteurs dans la classe politique française.
Mme Élisabeth Guigou. Très bien !
M. Pascal Popelin, rapporteur. Il fallait le dire !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je voudrais maintenant dire quelques mots du bilan de l'état d'urgence.
L'état d'urgence, je le rappelle, s'est traduit par 594 suites judiciaires après des perquisitions administratives, 223 pour infraction à la législation sur les armes, 206 pour infraction à la législation sur les stupéfiants. En outre, 28 informations judiciaires ont été ouvertes, 67 peines ont été prononcées à l'issue de ces procédures, et 56 personnes ont été placées en détention, soit des résultats particulièrement significatifs.
L'efficacité des mesures que nous avons prises va bien au-delà du bilan chiffré et des suites judiciaires. En effet, elles participent d'une stratégie cohérente et accélérée de détection et de déstabilisation des filières terroristes qui opèrent dans notre pays ou bien qui recrutent et acheminent des combattants vers les zones de conflit au Moyen-Orient. Nous avons ainsi pu empêcher ou retarder des projets de départ vers les théâtres d'opérations djihadistes, limiter les contacts entre les individus signalés comme appartenant à des groupes terroristes ou encore entraver des actions de soutien à ces mêmes groupes. Depuis 2013, pas moins de douze attentats ont été déjoués, dont sept depuis janvier 2015.
Je veux par conséquent saluer le travail réalisé par les services de renseignement, notamment la Direction générale de la sécurité intérieure, qui est saisie en propre ou avec la police judiciaire du suivi de 261 dossiers judiciaires concernant 1 157 individus pour leur implication dans des activités liées au terrorisme djihadiste. Parmi eux, 353 ont d'ores et déjà été interpellés, 13 font l'objet d'un mandat d'arrêt international, 223 ont été mis en examen, 171 ont été écroués et 52 font l'objet d'un contrôle judiciaire.
Ces chiffres montrent bien à quel point l'action quotidienne des services, sous l'autorité de la justice, porte ses fruits, permettant ainsi d'empêcher que des actions violentes et des attentats ne soient commis sur notre sol.
J'en viens à présent à la prorogation de l'état d'urgence et aux raisons pour lesquelles nous le croyons à nouveau absolument nécessaire.
Au cours des derniers mois, plusieurs attentats, qu'ils soient d'ampleur comparable ou bien inférieure à ceux du 13 novembre, ont été commis à l'étranger, visant les intérêts nationaux ou ceux de nos ressortissants. Les groupes djihadistes ont également visé des alliés directs de la France.
Le 22 mars, la Belgique a été frappée par un attentat d'une extrême gravité perpétré à Bruxelles, à l'aéroport de Zaventem et à la station de métro de Maelbeek. Grâce aux investigations menées, nous savons que les terroristes impliqués dans cet attentat appartenaient à la cellule qui a planifié et exécuté les attentats du 13 novembre à Paris et à Saint-Denis. En outre, le parquet fédéral belge a confirmé que les attentats du 22 mars avaient initialement été envisagés et programmés pour la France, avant que les terroristes, pris de cours par les investigations judiciaires menées en Belgique, ne soient contraints de précipiter leur action dans la capitale belge.
Daech a donc toujours le projet et les capacités de conduire des opérations terroristes d'envergure sur le sol européen, et a d'ailleurs, au mois de décembre dernier, explicitement appelé à cibler un certain nombre de sites.
La menace terroriste demeure donc à un niveau élevé. La France, comme l'Union européenne, représente une cible, en raison du combat résolu qu'elle mène contre les djihadistes au Sahel, en Irak et en Syrie, mais aussi, plus profondément, en raison des principes universels de liberté, de laïcité et d'émancipation qui sont les nôtres depuis plus de deux siècles et qui font horreur aux terroristes djihadistes.
Pour toutes ces raisons, et quelles que soient les précautions que nous prenons, il ne nous est pas permis de nous croire à l'abri, ni de considérer que le péril imminent qui a justifié en novembre dernier la proclamation de l'état d'urgence a disparu.
J'ajoute que, dans les mois qui viennent, les enjeux de sécurité seront particulièrement importants pour des raisons qui tiennent à l'organisation de cette grande manifestation qu'est l'Euro 2016 et d'autres manifestations estivales, qui devront mobiliser toute notre vigilance et faire l'objet de notre part de toutes les précautions.
C'est la raison pour laquelle nous avons souhaité que soit maintenu et poursuivi le contrôle aux frontières. C'est la raison pour laquelle nous maintenons le déploiement sur le territoire national de 110 000 policiers, gendarmes et militaires de nos armées dans le cadre de l'opération Sentinelle. C'est la raison pour laquelle a été adoptée la proposition de loi présentée par votre collègue Gilles Savary, qui va permettre à notre pays de se doter de moyens supplémentaires dans la lutte contre l'insécurité dans les transports. C'est la raison pour laquelle nous avons fait adopter le projet de loi de Jean-Jacques Urvoas renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme, son financement, texte qui améliore l'efficacité et les garanties de la procédure pénale.
Je veux enfin vous apporter certaines précisions concernant les mesures que nous comptons mobiliser dans le cadre de cette troisième prorogation de l'état d'urgence.
Comme l'autorise la loi du 3 avril 1955, le Gouvernement envisage de ne pas activer, dans ce cadre, l'article 11, qui permet de mettre en uvre des perquisitions administratives dans des lieux que l'on pense fréquentés par des individus constituant une menace pour l'ordre et la sécurité publics.
Cette mesure, que nous avons largement utilisée en essayant de jouer sur la stratégie de la sidération après les attentats du 13 novembre, ne présente plus le même intérêt opérationnel, la plupart des lieux identifiés ayant déjà fait l'objet d'investigations poussées. En outre, l'invalidation par le Conseil constitutionnel de la disposition permettant de réaliser la copie des données informatiques recueillies au cours des perquisitions administratives fait perdre une partie de son utilité à cette mesure.
En revanche, les autres mesures continueront d'être mobilisées pour maintenir les individus assignés à résidence, interdire à ceux qui font l'objet d'une interdiction de sortie du territoire mais qui n'ont pas été assignés à résidence de se trouver à proximité de certains lieux jugés particulièrement sensibles, ou encore établir des périmètres de protection. Ces mesures de maintien de l'ordre public en situation de crise grave seront bien sûr activées si elles se révèlent nécessaires.
Cette nouvelle prorogation de l'état d'urgence, dont nous sollicitons l'approbation par le Parlement, a de nouveau pour objet de concilier la protection de l'ordre et de la sécurité publics, dans le contexte d'une grave menace terroriste, avec ce à quoi nous tenons tous le plus ici, la protection des droits et des libertés garantis par notre Constitution.
Si nous sommes si déterminés sur la sécurité, c'est parce que nous savons qu'elle est la condition de la protection de nos valeurs et de nos principes républicains et démocratiques. C'est pour permettre au Gouvernement d'atteindre ces objectifs que nous proposons la prolongation de l'état d'urgence.
Je veux conclure mon propos en rendant une nouvelle fois un hommage vibrant aux forces de sécurité, qui, avec une énergie considérable et une grande dignité, je l'ai encore vu hier soir à l'hôpital Bégin où j'ai rendu visite au policier qui avait été agressé remplissent des missions dans un contexte extrêmement difficile et tendu. J'invite tous les théoriciens des violences policières à regarder les images d'hier,
Mme Élisabeth Guigou. Des images honteuses !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. à voir où était la violence et à voir aussi la manière très digne dont ce policier s'est protégé
M. Yves Goasdoué. Tout à fait !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. sans à aucun moment sortir son arme ou même y toucher.
Lorsque je l'ai vu hier soir, il m'a dit l'avoir fait pour des raisons qui tenaient à la formation qui lui avait été donnée, aux principes républicains auxquels il est attaché et à la volonté d'exemplarité qui est la sienne, comme policier, face à des violences qui sont autant de provocations destinées à engendrer d'autres violences, dont la manipulation permet ensuite de théoriser les violences policières.
Dans le contexte particulier dans lequel nous nous trouvons, il n'y a qu'une attitude à avoir et quel que soit le contexte, elle sera la mienne : la sagesse plutôt que l'outrance ; le respect du droit plutôt que la démagogie ; la protection des forces de l'ordre, exemplaires et magnifiques dans leurs missions, parce qu'on leur doit cette gratitude plutôt que la stigmatisation ; la fermeté et la détermination les plus grandes à l'égard de ces casseurs qui ne sont que des hordes violentes et barbares et qui doivent être punis par la loi avec la plus grande rigueur. Je veux, à ce propos, adresser également mes remerciements aux préfets, aux forces de l'ordre et aux procureurs de la République qui, par leur action, permettent l'application du droit.
Enfin, je veux aussi souhaiter que, dans ce contexte particulier je n'ai aucune naïveté et je connais les échéances , nous puissions toujours privilégier par notre discours l'attachement, qui doit être à chaque instant le nôtre, aux valeurs et aux principes de la République, plutôt que de nous laisser aller à l'abaissement de la politique dans des polémiques qui n'ont pas lieu d'être. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
( )
La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Comme à l'accoutumée, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt et d'attention les interventions ; des questions, en séance et en commission, ont été posées et appellent de la part du Gouvernement des réponses très circonstanciées.
Monsieur Larrivé, vous critiquez le fait que 99 % des personnes figurant dans le fichier des signalés pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste FSPRT ne fassent pas l'objet d'une assignation à résidence. Vous êtes juriste et savez parfaitement qu'un gouvernement ne peut prendre des arrêtés d'assignation à résidence sans tenir compte de la jurisprudence du juge administratif.
Toutes les personnes fichées au FSPRT ne relèvent pas de l'assignation à résidence ; certaines émettent des signaux faibles. Or l'assignation à résidence doit reposer sur le principe de proportionnalité. Nous avons tenu compte de ce principe pour assigner à résidence toutes les personnes qui devaient l'être en début de période. Lorsque ces décisions ont été attaquées, le juge administratif, notamment le Conseil d'État, a considéré que les éléments concourant à l'assignation devaient être beaucoup plus accusatoires, alors que les mesures initiales avaient un caractère préventif.
Une assignation à résidence, dans le cadre d'une mesure de police administrative, n'est pas le résultat d'une condamnation. Il s'agit d'une mesure de prévention d'un risque, prise en raison d'informations dont on dispose. Récemment, le Conseil d'État a demandé que lui soient communiqués des éléments inclus dans des dossiers à caractère judiciaire ce que le procureur de la République a accepté de faire dans un cas et refusé dans un autre.
S'il existe moins d'assignations à résidence que de personnes fichées au FSPRT, c'est que toutes ne relèvent pas de l'assignation à résidence et que nous devons tenir compte de la jurisprudence administrative. Je le redis à l'opposition, avec solennité ; je ne peux adhérer à ce raisonnement qui tend à faire croire que le Gouvernement est faible lorsqu'il respecte le droit voté par le législateur et interprété par le juge. La force de l'État, face à ceux qui se dressent contre son autorité, est de toujours être dans la conformité au droit !
Mme Marie-George Buffet. Exactement.
M. Bernard Cazeneuve, ministre. J'appelle chacun à la responsabilité. Monsieur Ciotti, vous avez énoncé à la tribune un certain nombre de choses fausses. Vous m'avez demandé pourquoi la manifestation d'hier n'avait pas été interdite. Mais elle l'était, monsieur le député ! La manifestation d'hier, à laquelle un certain nombre d'organisations ont appelé, était interdite.
M. Éric Ciotti, rapporteur. Je n'ai pas dit cela !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Vous m'avez demandé les raisons pour lesquelles nous ne profitons pas de l'état d'urgence pour procéder à l'interdiction des manifestations. Je vous réponds très clairement : nous avons interdit toutes les manifestations qui, en droit, pouvaient l'être. Lorsqu'une manifestation de casseurs est organisée à Rennes, nous l'interdisons.
M. Éric Ciotti. C'est la première fois !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Nous avons interdit une manifestation à Nantes.
M. Pierre Lellouche. Mais vous n'avez pas interdit Nuit debout !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Monsieur Lellouche, les raisons pour lesquelles nous ne l'avons pas fait tiennent à la décision du Conseil constitutionnel du 19 février, rendue au terme d'une question prioritaire de constitutionnalité, qui définit très clairement le cadre juridique dans lequel il peut être procédé à des interdictions.
M. Éric Ciotti. Vous n'avez pas même essayé !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. La différence entre l'opposition et le Gouvernement, c'est que le Gouvernement entend faire tout ce qui doit être fait dans la plus grande fermeté, mais dans le respect rigoureux des principes de droit, et notamment des principes constitutionnels.
M. Pierre Lellouche. Commencez par agir, vous vous interrogerez sur la conformité ensuite !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Nous estimons, avec raison, que si nous procédons à des interdictions en contravention avec les principes de droit définis par le législateur et rappelés par le Conseil constitutionnel, nous nous exposons à l'annulation des décisions. Dans le contexte actuel, annuler ces interdictions serait de nature à affaiblir l'autorité de l'État et à créer des tensions supplémentaires. Alors que la tension prévaut, nous considérons que nous devons veiller à ce que chaque décision soit rigoureusement conforme au droit. C'est là que réside la différence entre vous et nous !
On ne peut confondre le droit et le tordu : le droit doit s'appliquer pleinement. Préempter ces sujets en les instrumentalisant à des fins politiques, au risque de créer des tensions, est totalement irresponsable. Je le répète : laisser accroire qu'un gouvernement qui se conforme rigoureusement aux principes de droit, sans autres marges de manuvre juridiques que celles dont il dispose, fait montre de faiblesse est de nature à créer dans le pays un climat délétère. Je vous appelle donc de nouveau à la responsabilité !
M. Pierre Lellouche. Vous êtes le Gouvernement, agissez !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. De la même manière, je considère qu'il est irresponsable d'affirmer, sur internet, dans la presse, ou dans des prises de position politique, que la violence est consubstantielle à la police. Lorsque l'on écrit à longueur d'éditoriaux que les policiers sont des individus par nature violents, il ne faut pas s'étonner ensuite des réactions auxquelles nous avons assisté hier ! Ce sont de véritables appels à la violence qui sont lancés, dans l'irresponsabilité la plus totale.
M. Gérard Bapt et M. Jean-Luc Laurent. Très juste !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je vous rappelle aussi, messieurs de l'opposition, que toute personne dans cet hémicycle peut être appelée à exercer des responsabilités gouvernementales. Des violences, à l'occasion d'autres manifestations, se sont déjà produites ! Je pense aux manifestations contre le CPE, qui ont donné naissance aux groupes radicaux qui agissent aujourd'hui. Je pense aussi aux émeutes urbaines qui ont duré trois semaines, en plein état d'urgence, et alors que des couvre-feux avaient été instaurés. Aucun d'entre vous, alors, n'était dans la théorisation de la chienlit !
M. Éric Ciotti. Et vous, que disiez-vous ? Je vais vous citer !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Dans l'opposition, je me suis bien gardé, sur tous les sujets que j'ai eus à traiter, de tomber dans la démagogie et les discours à l'emporte-pièce.
M. Éric Ciotti. Ce n'était pas le cas de François Hollande !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Un jour ou l'autre, on se retrouve en situation de siéger au banc du Gouvernement, et les choses deviennent beaucoup moins simples.
Vous avez été dans la majorité et un certain nombre d'entre vous au Gouvernement. Vous savez la complexité des choses, la difficulté de faire face à ces groupes, pour des raisons qui tiennent à leur organisation et à ce qui est l'état du droit. Pourtant, des responsables de l'opposition, dont certains ont exercé des responsabilités éminentes dans l'administration du ministère de l'intérieur, tiennent des propos irresponsables. Ils laissent à penser que les instructions n'ont pas été données de manière à ce qu'il y ait la plus grande fermeté à l'égard des casseurs.
M. Éric Ciotti. Non !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Pour être clair, c'est ce que dit M. Péchenard ! C'est de la petite politique, monsieur Ciotti, mais je vais vous dire ce que j'ai fait : je viens de transmettre aux présidents des commissions des lois de l'Assemblée nationale et du Sénat la totalité des instructions signées par mes soins et qui font l'objet d'ordres d'opération donnés par les préfets aux forces de police. Vous exercerez ainsi votre contrôle parlementaire, et j'espère que le Parlement rétablira la vérité.
M. Pascal Popelin, rapporteur. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Les personnes qui s'expriment de la sorte devraient feraient preuve d'un esprit de responsabilité d'autant plus prononcé qu'elles ont exercé des fonctions importantes au sein du ministère de l'intérieur. Lorsqu'elles s'expriment ainsi, elles mettent en cause leurs anciens collègues, ce qui traduit d'ailleurs une culture de la confraternité assez curieuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.) Je tenais à le dire. Il faut un minimum de déontologie lorsque l'on exerce des responsabilités politiques. Ce genre de choses ne se font pas, ne sont pas convenables. Afin de mettre fin à cette campagne de manipulation, je transmets ce matin la totalité des instructions qui ont été adressées, par mes soins, par télégramme, à l'ensemble des préfets de France.
Mme Marie-Françoise Bechtel. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Vous pourrez consulter les ordres d'opérations. Je pense que l'on pourra ainsi mettre fin à une polémique aussi irresponsable que totalement indigne (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste), je le dis à regret. On ne peut pas dire en permanence que les policiers sont formidables, qu'ils font preuve d'un grand professionnalisme, qu'ils font tout ce qu'ils doivent faire, mais que cela est le fruit du hasard.
Mme Pascale Crozon et Mme Cécile Untermaier. Très juste !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. En d'autres termes, ils ne feraient pas tout cela parce qu'ils reçoivent des instructions, sont encadrés et appliquent une politique publique, mais par hasard. Eh bien, non : ils ne le font pas par hasard ! Ils le font parce qu'il y a des directeurs généraux dans cette maison, des préfets, que, pour ma part, je respecte. Je respecte les préfets, je respecte le directeur général de la police nationale, je respecte le directeur général de la gendarmerie nationale, je respecte les directeurs des services de renseignements. Ils travaillent quotidiennement avec moi, ils appliquent les instructions, ils sont dans la loyauté, et le discours que vous tenez, je le redis, ne correspond pas à la réalité on va l'établir et n'est pas responsable. J'appelle encore une fois chacun à la responsabilité.
Mme Cécile Untermaier. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Ensuite, vous dites qu'aucune mesure n'est prise pour éviter ces heurts : c'est faux ! Nous avons pris des arrêtés d'interdiction de paraître dans des manifestations qui concernaient des membres de groupes violents.
M. Éric Ciotti. Oui, avant-hier !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Nous l'avons fait à l'occasion des manifestations qui se sont révélées les plus violentes, ce qui montre que nous avons eu raison. Nous avons ainsi pris, pour le 17 mai, cinquante-quatre interdictions de manifester, dont quarante et une pour Paris et treize pour les autres départements. Aujourd'hui, nous en avons pris quarante.
M. Jacques Myard. Il faut dissoudre tous ces malfrats !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je vous fais remarquer, messieurs les députés, que les interdictions de paraître que nous avons prises ont fait l'objet de recours et qu'un certain nombre d'entre elles ont été annulées. C'est bien la preuve qu'il faut veiller constamment à la conformité au droit des dispositions que l'on arrête et que l'on ne peut pas prendre de risque. Monsieur Larrivé, vous me reprochez de n'avoir pas fait appel. Mais il s'agissait de référés-liberté ! On n'était donc pas au fond, et le résultat de l'appel serait intervenu à une date où l'interdiction aurait perdu tout intérêt.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Bien sûr !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Voilà pourquoi nous n'avons pas fait appel non que nous ne souhaitions pas conduire la démarche à son terme, mais, dans le cadre de ce dispositif, nous n'avions pas la possibilité temporelle de le faire. À chaque fois que nous prenons des décisions de police administrative pour protéger le pays contre des casseurs et qu'il nous est possible d'interjeter appel, nous le faisons systématiquement. Je vous ferai d'ailleurs remarquer, monsieur Larrivé, que j'ai repris, concernant les mêmes individus que ceux qui ont fait l'objet d'arrêtés cassés par la justice, des interdictions de paraître les mêmes, ce qui atteste notre persévérance. Chacun doit prendre ses responsabilités ; je prends les miennes. Au moment où nous parlons, où vous êtes dans la polémique vis-à-vis du Gouvernement, le préfet de police de Paris, le procureur de la République de Paris, le directeur de la police judiciaire de Paris sont en train de conduire des investigations nuit et jour pour identifier les individus, les judiciariser et les mettre hors d'état de nuire. Eh bien, pour ma part, je leur rends hommage pour le travail qu'ils font sous la direction du procureur de la République et la mienne. Telle est la vérité, et la vérité doit être dite aux Français !
M. Pierre Lellouche. Elle n'est pas brillante !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Si nous laissons à penser aux Français que, face à des actes d'une telle violence, la fermeté la plus réelle ne s'applique pas, nous risquons de créer, dans le pays, un climat de violence renforcée, de susciter des réactions d'autodéfense, de provoquer des antagonismes encore plus violents, ce qui est le contraire de la République. C'est la raison pour laquelle, je veux dire, en toute sincérité, devant la représentation nationale, à quel point je suis indigné de ces campagnes qui ne correspondent pas à la réalité de ce que nous faisons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)
Madame Maréchal-Le Pen, vous m'interrogez, vous aussi, et je respecte tout à fait vos interrogations, auxquelles j'ai d'ailleurs répondu pour partie. Mais je voudrais à mon tour vous faire quelques remarques. En effet, vous appelez de vos vux la plus grande fermeté mais, lorsque nous avons présenté les projets de loi antiterroristes, dans lesquels nous proposions de bloquer les sites qui appellent et provoquent au terrorisme, de combattre les terroristes en les identifiant sur internet, vous avez voté contre, au nom de la liberté d'expression, reprenant ici les propos de ceux qui sont les plus irresponsables face à la lutte contre le terrorisme.
Mme Marion Maréchal-Le Pen. Vous me parlez sans daigner me regarder !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Lorsque je suis allé devant la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures LIBE du Parlement européen et que j'ai demandé le soutien des parlementaires pour le vote de la directive sur les données concernant les passagers aériens, dite PNR, de manière à établir la traçabilité de ceux qui rentrent des théâtres de combat terroriste, la présidente de votre parti s'est fait désigner rapporteure pour avis de ce texte, pour s'y opposer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.) Lors du vote sur la loi renseignement, qui permet, afin de prévenir les actes terroristes, de doter les services de renseignement des moyens nécessaires pour comprendre les messages cryptés que s'échangent les terroristes en vue de nous frapper, qui s'est opposé, dans cet hémicycle, à ce texte ? Vous, madame Maréchal-Le Pen, ainsi que le député Collard. Et vous venez aujourd'hui nous donner des leçons de fermeté et de sécurité ! (Mêmes mouvements.)
M. Christophe Caresche. Démasquée !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Madame Maréchal-Le Pen, la présidente de votre parti a demandé hier ma démission.
Mme Marion Maréchal-Le Pen. Vous persistez à ne pas vouloir me regarder ; je suis là, monsieur le ministre !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je lui dis aujourd'hui, compte tenu de ses actes, de ses propos, ainsi que des propos manipulateurs de toutes les organisations d'extrême-droite (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste) que vous reprenez à votre compte, par exemple en laissant entendre, sur France Inter, en frelatant la réalité, que j'aurais indiqué, lors d'une émission de radio à laquelle je n'ai jamais participé, que prôner le djihad n'était pas un délit : non seulement je ne démissionnerai pas,
Mme Marion Maréchal-Le Pen. Dommage !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. mais je combattrai ce que vous faites et ce que vous dites, qui reposent sur la manipulation, le mensonge, l'extrémisme, le contraire de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe écologiste, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Je vous le dis, dans cet hémicycle, avec la plus grande fermeté et la plus grande netteté : quand on prend des positions comme les vôtres, qui visent à créer des problèmes partout, en votant contre toutes les solutions, on ne donne aucune leçon de sécurité à ceux qui sont en charge de la sécurité des Français ! (Mêmes mouvements. - Les députés du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste se lèvent et applaudissent.)
source http://www.assemblee-nationale.fr, le 25 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80324|JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, bonjour.
Manuel VALLS
Bonjour Jean-Jacques BOURDIN.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Vous êtes là sur RMC et BFM TV jusqu'à 09h, e ensuite, vous allez répondre aux questions des auditeurs de RMC
MANUEL VALLS
Avec plaisir
JEAN-JACQUES BOURDIN
Entre 09h et 09h30. La contestation s'étend, se durcit, les Français ne vous demandent qu'une chose, ce matin, une seule question : que faites-vous ?
MANUEL VALLS
D'abord, je pense à eux, parce que c'est eux qui pâtissent aujourd'hui de cette situation, ce sont des salariés, des ouvriers, souvent ceux qui sont au chômage, qui doivent faire de longues files d'attente devant les stations-services, qui subissent donc cette situation, cette situation aussi peut peser à terme sur l'économie française, alors que nous venons de connaître, pour le deuxième mois consécutif, une baisse du chômage, 20.000 chômeurs de moins cette année, c'est le deuxième mois consécutif, 70.000 chômeurs de moins
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, j'y reviendrai tout à l'heure.
MANUEL VALLS
Pour cette année 2016. C'est la première fois qu'on a une baisse sur les 12 derniers mois. Et donc l'économie doit être confortée, notre compétitivité doit être assurée. On voit bien que ce type de situation peut nuire, bien sûr, à notre économie. Donc je pense d'abord aux Français
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, à eux
MANUEL VALLS
Et notamment aux plus modestes, et ensuite, une nouvelle fois, devant vous, je veux dire ma détermination, mais par conviction, moi, je ne suis pas dans un combat contre la CGT ou dans un face à face ou un mano à mano avec Philippe MARTINEZ, comment peut-on penser un moment, avec mes convictions, moi, le maire d'Evry pendant 11 ans, que je veuille casser le modèle social français, que je veux remettre en cause le droit des syndicats, que je veux faire perdre des droits aux salariés, cette loi dont beaucoup d'aspects n'ont pas été compris, je le reconnais, par mes compatriotes, est bonne pour les entreprises, pour les PME, notamment, parce qu'elle va leur donner plus de visibilité, et cette loi est bonne pour les salariés, parce qu'elle leur donne plus de droits, elle est bonne également pour les syndicats, parce qu'elle leur donne plus d'heures de formation, elle est bonne pour les jeunes, parce qu'elle leur permet la Garantie Jeunes, c'est-à-dire 460 euros pour rentrer dans la vie active et pour se former. Donc cette loi, elle est bonne pour les salariés comme pour les entrepreneurs. Donc Jean-Jacques BOURDIN, j'ai des convictions, ces convictions, je les défends, ce texte me paraît utile pour le pays, et donc je suis évidemment serein en même temps déterminé
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, tout le monde se pose la question : qui gouverne ? Qui gouverne ? C'est vous ou c'est la CGT ? Eh oui, oui, parce que les Français se posent la question, vous le savez bien !
MANUEL VALLS
Mais je l'ai dit hier dans une formule, ça n'est pas la
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui, vous l'avez dit dans une formule : la CGT ne fait pas la loi dans le pays, cette radicalité est inacceptable, c'est ce que vous disiez hier à l'Assemblée nationale.
MANUEL VALLS
Jean-Jacques BOURDIN, oui, je suis très respectueux du rôle des syndicats, et notamment cette loi, elle va permettre, et c'est peut-être le coeur de sa philosophie, de faire en sorte que le dialogue social se fasse au niveau de l'entreprise, au plus près des terrains, du terrain, c'est-à-dire avec les entrepreneurs et les salariés. Donc je suis respectueux des syndicats, je suis respectueux de la CGT, dont je connais l'histoire, sa participation pleine et entière à l'histoire de notre pays, à la résistance, sa volonté de donner des droits aux salariés. Mais ça n'est pas la CGT qui peut bloquer le pays. Ça n'est pas la CGT qui peut imposer un texte de loi. La CGT, contrairement aux syndicats réformistes, contrairement à la CFDT, contrairement à l'UNSA, à la CFTC, à la CFE-CGC, n'a pas souhaité poursuivre les discussions, a refusé l'accord que nous avions trouvé avec ces syndicats que je viens de citer, les syndicats réformistes, puisqu'il y a eu une longue discussion, que j'ai menée avec Myriam El KHOMRI
JEAN-JACQUES BOURDIN
Un accord rejeté par certains syndicats, un accord sans majorité à l'Assemblée nationale, vous le savez bien, Manuel VALLS, et un accord rejeté par les Français à 70 %, ça fait beaucoup, pardonnez-moi, ça fait beaucoup ! Alors, je vais vous poser deux questions directes, il n'y aura donc pas de retrait de la loi Travail, on est bien d'accord ?
MANUEL VALLS
Donc, vous me posiez la question « qui gouverne »
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, qui gouverne ?
MANUEL VALLS
Le président de la République, le chef du gouvernement, le gouvernement, et avec l'engagement de responsabilité, le fameux 49.3, nous nous sommes donné
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous gouvernez contre les députés, vous gouvernez contre les Français, et vous gouvernez contre une partie des syndicats !
MANUEL VALLS
Mais Jean-Jacques BOURDIN, quelle est l'alternative ? Ou plutôt, quelles sont les alternatives ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors justement !
MANUEL VALLS
Alors, c'est le retrait du texte ? Ça n'est pas possible, le retrait du texte, c'est l'impossibilité, pas seulement pour ce gouvernement, mais pour tout gouvernement, de réformer, c'est quoi l'alternative ? Des élections législatives anticipées ? Mais alors, c'est le projet de la droite !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez songé à démissionner ?
MANUEL VALLS
Non, non, parce que ça n'est pas un problème de personne
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'homme ou de personne
MANUEL VALLS
C'est quoi l'alternative ? Nous allons le voir d'ailleurs dans quelques jours, puisque le texte Travail va venir au Sénat, où il y a une majorité de droite, qui va donner son projet, et qui sera évidemment aux antipodes, non seulement de ce que nous avons proposé, mais de ce qu'attendent éventuellement ceux qui manifestent. Donc il est hors de question de changer le cap, il peut toujours y avoir des modifications, des
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah !
MANUEL VALLS
Il peut toujours y avoir des modifications
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça m'intéresse !
MANUEL VALLS
Des améliorations, mais
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une réécriture d'un article par exemple ou l'article, eh bien, je pense à l'article 2, évidemment ?
MANUEL VALLS
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non ?
MANUEL VALLS
Pas de retrait du texte, et l'article 2 c'est-à-dire, la négociation dans l'entreprise défendu notamment par les syndicats réformistes, en l'occurrence par la CFDT, vous vous rendez compte, le premier syndicat de France aujourd'hui, Laurent BERGER, son secrétaire général, qui a été sévère au début sur la première mouture du texte, avec qui nous avons négocié durement sur le texte, considère que ce texte est bon pour les salariés et qu'il leur donne de nouveaux droits. Et moi, je vais retirer un texte
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il n'y aura pas de réécriture de l'article 2 !
MANUEL VALLS
Où je vais réécrire un article qui est le coeur de la philosophie, c'est-à-dire la négociation dans l'entreprise
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, il n'y en aura pas ?
MANUEL VALLS
Mais, ce pays se meurt parfois de ses conservatismes, de son impossibilité à réformer, c'est pour ça que nous sommes dans un moment crucial, je sais que les Français expriment leur opposition au gouvernement, à travers leur opposition à ce texte, qui sont inquiets pour l'avenir, pourtant, au moment où
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vais vous parler des Français, oui
MANUEL VALLS
Pourtant au moment où, encore une fois, les chiffres du chômage s'améliorent nettement, où nous retrouvons de la compétitivité et de la croissance, mais ça, je l'entends parfaitement, mais ma responsabilité, comme chef du gouvernement, ce n'est pas de suivre les sondages, c'est bien sûr d'écouter les Français, et j'entends notamment ceux qui sont en difficulté, ceux qui souffrent, les salariés, comme les chefs d'entreprise, les artisans ou les indépendants, je veux rappeler que ce texte de loi est bon aussi pour les indépendants, parce qu'il va leur donner davantage de possibilités de se former
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais Manuel VALLS
MANUEL VALLS
Donc, il ne s'agit pas d'un entêtement, je pense que ce texte est bon pour l'intérêt général, bon pour les entreprises, bon pour nous sommes dans un moment crucial, où, au fond, il y a deux conceptions
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, c'est un moment crucial
MANUEL VALLS
Deux conceptions, deux conceptions du syndicalisme, en l'occurrence, du dialogue social, on le voit bien, entre les syndicats réformistes et de l'autre côté, la CGT, et on le voit bien parfois aussi à gauche, vous disiez que nous n'avons pas pu faire passer le texte, mais est-ce qu'il y avait une alternative à l'Assemblée nationale ? Non, mais il y a eu une trentaine de députés socialistes qui ne voulaient pas voter ce texte, et c'est la raison pour laquelle, j'ai utilisé la responsabilité, l'engagement de responsabilité du gouvernement, mais après
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et vous l'utiliserez encore ?
MANUEL VALLS
Mais après avoir intégré 600 amendements qui avaient été adoptés par la Commission des Affaires sociales ou par le rapporteur
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes prêt à l'utiliser encore ?
MANUEL VALLS
Mais bien évidemment, moi, j'espère que chacun assumera pleinement ses responsabilités
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes prêt à utiliser le 49.3 encore une fois ?
MANUEL VALLS
Je l'ai utilisé à cette occasion-là, il y a eu un débat très approfondi à la Commission des Affaires spéciales, Christophe SIRUGUE, le rapporteur de la loi, a permis, avec les autres parlementaires, de tous bords d'ailleurs, qu'il y ait 600 amendements qui enrichissent le texte, il y a eu des modifications, mais ce qui est de l'ordre de l'équilibre, c'est-à-dire la négociation dans l'entreprise et le compte personnel pour les salariés, le compte personnel d'activité, qui permet aux salariés d'avoir plus de droits, ce compte personnel pour la formation notamment tout au long de la vie, ça, ce sont des éléments très importants.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, donc on ne réécrit pas l'article 2, on n'y touche pas ? Vous ne toucherez pas à l'article 2 ?
MANUEL VALLS
Il peut toujours y avoir tel ou tel élément de précision, mais le coeur, c'est-à-dire la négociation dans l'entreprise
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire que l'accord d'entreprise primera sur l'accord de branche ?
MANUEL VALLS
Bien sûr, c'est ce qui est au coeur du texte, et c'est un changement. Mais chacun dit : il faut que la France change, il faut qu'on soit capable de faire en sorte que le dialogue social soit un avantage pour le progrès social et pour le progrès économique, il faut qu'on se parle plus, notamment dans l'entreprise, et on tente une réforme, je vois bien les conservatismes de tous les côtés, à gauche comme à droite, mais mon rôle, c'est d'avancer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une du Parisien, prêt à lâcher du lest, donc vous n'êtes pas prêt à lâcher du lest ?
MANUEL VALLS
Qu'est-ce que ça veut dire lâcher du lest, s'il faut écouter, modifier tel ou tel élément
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes prêt à recevoir la CGT par exemple ?
MANUEL VALLS
Mais bien sûr, mais
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour négocier ?
MANUEL VALLS
Mais, nous avons des contacts permanents avec la CGT
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous pourriez ouvrir des négociations, là ?
MANUEL VALLS
Mais sur quoi ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Moi, je ne sais pas, sur des propositions de la CGT ?
MANUEL VALLS
La CGT, je voyais, il y a un instant, sur BFM, un responsable de la CGT qui proposait comme négociation le retrait du texte, nous avons discuté et négocié avec tous les partenaires sociaux ainsi qu'avec le patronat, il y a plusieurs mois, vous savez, ça n'a peut-être pas été assez dit, la discussion sur ce texte est préparée depuis un an. Il y a eu un rapport, celui de Jean-Denis COMBREXELLE, qui a proposé ces négociations dans l'entreprise. C'est encore une fois un vrai changement, une vraie révolution des mentalités que d'instaurer véritablement le dialogue social dans l'entreprise, et d'ailleurs, la CGT le sait, elle signe beaucoup d'accords dans l'entreprise, et au moment où d'ailleurs, à STX, on va créer sans doute des milliers d'emplois avec de nouvelles commandes, alors que, aussi, à PSA, contrairement ce que j'entendais, les accords de compétitivité ont permis à cette entreprise d'être sauvée, grâce aussi à l'accord de l'Etat, et de créer de l'emploi, le dialogue social pour certains, c'est la confrontation, moi, je n'accepte pas ni la confrontation ni la violence, je sais que pour beaucoup de nos compatriotes, les syndicats n'ont pas une bonne image, que le dialogue social
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais mettez-vous à la place mais oui, mais vous non plus, vous n'avez pas une bonne image !
MANUEL VALLS
Mais je ne dis pas le contraire
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous savez pourquoi ? Vous savez pourquoi les Français aujourd'hui sont partagés devant les actions de la CGT, mais vous le savez aussi bien que moi, pourquoi ? Parce qu'ils sont en grève contre vous, les Français, en grève contre le pouvoir, contre François HOLLANDE, et contre vous ! Ils ne vous veulent plus au pouvoir ! C'est pour ça qu'ils sont là, 70 % des Français refusent cette loi Travail, est-ce que vous croyez que c'est parce qu'ils connaissent la loi Travail ? C'est un refus à Manuel VALLS, c'est un refus à François HOLLANDE !
MANUEL VALLS
Je pense que ça peut être même un refus plus large
JEAN-JACQUES BOURDIN
A la politique peut-être !
MANUEL VALLS
Parce que c'est une forme de crise politique, de grande interrogation sur les institutions, sur le rôle des syndicats, y compris même sur notre démocratie. Mais vous savez, quand je vois, d'un côté, la montée des populismes, de l'extrême droite, quand je vois de l'autre côté la violence, parce que, vous savez, on passe très vite d'une actualité à une autre, mais il y a encore quelques jours, il y avait la violence sur les forces de l'ordre, sur les policiers, sur les gendarmes, il y a eu cette voiture qui a brûlé, ce symbole, et ce courage, ce sang-froid des policiers face à cette violence
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, entre parenthèses, des libérations un peu rapides peut-être, non ?
MANUEL VALLS
Mais ça, c'est le choix de la justice, quatre personnes avaient été interpellées
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous les avez trouvées un peu rapide ?
MANUEL VALLS
Quatre personnes ont été interpellées, à la place qui est la mienne, je fais très attention à ce type de commentaires, un est resté aujourd'hui incarcéré, les trois autres sont sous contrôle judiciaire, vous ne savez pas, Jean-Jacques BOURDIN, ce qu'il y a dans le dossier, ce que je constate, c'est que le Parquet a fait appel, moi, je pense que quand on agresse des policiers, quand on veut se faire du flic, quand on veut tuer des policiers
JEAN-JACQUES BOURDIN
On n'est pas remis en liberté ?
MANUEL VALLS
La place est en prison. Mais le Parquet a fait appel, moi, je me rappelle que je suis l'ancien ministre de l'Intérieur, aujourd'hui, chef du gouvernement
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est pour ça que je vous pose la question
MANUEL VALLS
Aux côtés de Bernard CAZENEUVE, et nous sommes aux côtés des policiers et des gendarmes qui sont des salariés comme les autres, mais sur qui, je voudrais dire un mot là-dessus, sur eux pèsent aussi beaucoup de responsabilités, leur public, la maîtrise de l'immigration, la lutte contre la délinquance, bien sûr, faire face au terrorisme, la préparation de l'Euro de foot, s'il y avait un peu de responsabilité collective, notamment du côté de la CGT, qui a sorti ces tracts odieux sur la responsabilité qui serait celle de la police ou du gouvernement, face à un certain nombre d'incidents, ce sont les policiers et les gendarmes qui sont blessés, encore il y a quelques jours, à Fos. S'il y avait un peu de responsabilité, on pourrait se dire que tout
JEAN-JACQUES BOURDIN
Irresponsable, la CGT ?
MANUEL VALLS
On pourrait se dire que toutes ces manifestations pèsent
JEAN-JACQUES BOURDIN
Irresponsable ?
MANUEL VALLS
Je crois qu'un syndicat avec l'histoire qui est celle de la CGT, doit faire preuve de responsabilité. Il y a dans le pays, il y a aussi, et ça, j'en suis convaincu, un besoin d'ordre, un besoin d'ordre républicain. Bien sûr, un ordre juste, parce qu'on a besoin de justice dans ce pays, de lutte contre les inégalités, un besoin d'ordre, donc ma responsabilité, comme chef du gouvernement, c'est de faire en sorte que l'autorité de l'Etat, que l'ordre soit respecté, et qu'on débloque tous ces sites qui ont été bloqués, parce que je souhaite que les Français, les usagers, comme les entreprises, soient approvisionnés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Justement, qu'allez-vous faire ? Je reviens à ma première question : qu'allez-vous faire ? Réquisitionner des salariés grévistes ? Est-ce que vous allez Je ne sais pas moi, organiser un référendum autour de cette loi Travail comme le demandait Arnaud MONTEBOURG à votre place hier matin, ici même. Qu'allez-vous faire ?
MANUEL VALLS
On ne peut pas organiser un référendum soit prétexte de loi de ce type, ce n'est pas prévu par la Constitution. Et puis moi je crois aussi encore une fois au rôle du Parlement, je crois au dialogue social. Je veux convaincre les Français qu'il y a dans ce texte de bonnes choses pour les jeunes, pour les indépendants, pour les petits patrons qui vont avoir plus de visibilité
JEAN-JACQUES BOURDIN
En attendant les Français n'arrivent pas à rouler, en attendant les Français sont gênés dans leur travail quotidien !!
MANUEL VALLS
La faute à qui ? La faute à un syndicat minoritaire qui veut imposer ///
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est la faute de la CGT.
MANUEL VALLS
Qui veut imposer sa loi, qui veut imposer la vision des choses.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous voulez imposer votre loi, la loi de la République.
MANUEL VALLS
La loi de la République Attendez, excusez-moi, le 49.3, c'est dans la Constitution, c'est la démocratie, c'est dans la Constitution !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous allez réquisitionner ? C'est la loi .
MANUEL VALLS
Le blocage des sites ce n'est pas dans la Constitution. Donc nous allons continuer à débloquer tous ces sites qui ont été bloqués. Nous allons continuer parce que
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous allez réquisitionner des salariés grévistes ?
MANUEL VALLS
On peut envisager toutes les solutions.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous l'avez envisagé ?
MANUEL VALLS
On peut envisager toutes les solutions. Il faut du droit là aussi, c'est en fonction d'une certaine situation. Donc Jean-Jacques BOURDIN, toutes les solutions sont envisagées
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais il y a des coupures de courant ce matin.
MANUEL VALLS
Non, il n'y a pas de coupure
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas vrai, il y en a, je vous donne des communes où il y a des coupures de courant.
MANUEL VALLS
Il y a des délestages, on voit bien. Puisque vous avez eu un dialogue ce matin avec le responsable de la CGT de la filière nucléaire, c'est un secteur hautement sensible, moi je crois de toute façon là à la responsabilité des salariés de cette grande entreprise qu'est EDF, qui n'est en rien par ailleurs puis-je le rappeler concernée par la loi Travail. En rien concernée.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a une volonté de sabotage ?
MANUEL VALLS
Mais la responsable de la CGT que vous interrogiez ce matin assumait parfaitement que nous puissions par exemple exporter davantage d'électricité, et que ça représente un coût supplémentaire pour notre économie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Importer, importer davantage.
MANUEL VALLS
Importer davantage, vous avez raison de me corriger, importer davantage et ainsi ça représenterait un coût supplémentaire pour l'économie et l'industrie. Mais bon sang, on est patriote ou pas dans ces moments là ? Quand la croissance revient, quand on fait baisser le chômage, quand il y a davantage de compétitivité, quand les carnets de commandes sont en train de se remplir parce que les entreprises grâce à ce que nous avons fait avec le CICE et le pacte de responsabilité retrouvent des marques.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est du sabotage de l'économie ?
MANUEL VALLS
C'est les mots
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les mots ont une réalité.
MANUEL VALLS
C'est une action irresponsable. Quand on mène une action qui consiste à bloquer et faire en sorte qu'il y ait aujourd'hui la possibilité de pénurie pour les usagers et pour les entreprises, et que ça puisse coûter à l'entreprise
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors est-ce que vous allez réquisitionner ?
MANUEL VALLS
Mais je ne vais pas l'annoncer ici à ce micro, toutes les possibilités sont
JEAN-JACQUES BOURDIN
Réquisitionner c'est une possibilité. Vous l'envisagez ?
MANUEL VALLS
Toutes les possibilités sont sur la table. On verra comment les choses se passent aujourd'hui. Moi j'attends de voir comment les choses se passent aujourd'hui. Je veux assurer seulement aux Français devant vous, ceux qui nous regardent comme ceux qui nous écoutent que le gouvernement est totalement mobilisé pour qu'il puisse parce que je connais encore une fois, je suis passé il y a quelques minutes devant une station essence, nous voyons la situation, il y a entre 20 et 30 % des stations-essence dans ce pays qui sont .
JEAN-JACQUES BOURDIN
N'était-ce pas irresponsable de parler de pénurie, d'absence de pénurie ? Le mot « pénurie », dès les premiers jours, alors que moi j'écoutais les auditeurs qui nous disent « mais non il n'y a pas d'essence ». Pas de pénurie, disait le gouvernement.
MANUEL VALLS
Il y a 20 à 30 % de stations-essence fermées ou en difficulté, ce ne sont pas toutes les stations-essence
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous étiez en Israël, Ségolène ROYAL était en Turquie, le président de la République était absent.
MANUEL VALLS
Non, le président de la République était là, le ministre en charge de ces questions-là, c'était à dire Alain VIDALIES, qui fait un très bon travail, était présent sur les médias, mon cabinet suivant parfaitement ce sujet là, et moi j'étais en Israël aussi à la fois pour vendre nos entreprises, pour gagner des marchés, et parce que la voix de la France elle compte aussi dans ces pays et en contact direct. Mais honnêtement, ça n'est pas là le sujet. Ce qui serait irresponsable c'est de ne pas tout faire pour que les usagers, les entreprises soient alimentés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
La pénurie elle est là.
MANUEL VALLS
Elle est là en partie, je ne minimise rien. Depuis le début je ne minimise ni les difficultés des Français, ni les difficultés possibles pour notre pays, ni l'attitude irresponsable de la CGT.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors vous avez dit tout à l'heure, il peut toujours y avoir des modifications, des améliorations sur la loi Travail. Où ?
MANUEL VALLS
Mais il y a eu déjà beaucoup de modification et d'amélioration
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qu'est-ce qu'on peut encore modifier dans cette loi ?
MANUEL VALLS
Il faudra modifier sans doute le texte qui va revenir du Sénat dans quelques semaines. Mais pour que chacun le comprenne, et d'ailleurs reconnaissons-le c'est beaucoup trop long.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors quelles améliorations
MANUEL VALLS
Je me faisais la remarque pour que vos auditeurs et vos téléspectateurs comprennent bien. En Grèce, le gouvernement de TSIPRAS, un gouvernement de gauche avec d'abord une grève générale, mène des réformes courageuses. Ces réformes ont été adoptées en quelques heures, 1500 pages sans amendement par le Parlement. Parce que parfois il faut aller vite dans la réforme. Nous, ce texte a du être adopté au Conseil des Ministres au début de l'année, il va être adopté définitivement au mois de juillet parce qu'il y a plusieurs lectures, à l'Assemblée et au Sénat, c'est notre Constitution. Donc le texte va revenir seulement à l'Assemblée nationale à la fin du mois de juin, début du mois de juillet
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, Il y aura des améliorations ?
MANUEL VALLS
Mais on verra, mais il n'y aura pas de modification de la philosophie du texte, ce qui est bon pour les entreprises, c'est-à-dire le dialogue social comme le compte personnel d'activité pour les salariés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Franchement, est-ce que vous vous sentez soutenu totalement par le président de la République ? Est-ce que vous n'avez pas trouvé étrange la sortie de monsieur Bruno LE ROUX hier qui dirige le groupe socialiste à l'Assemblée nationale et qui nous dit que l'article 2 pourrait être renégocié ?
MANUEL VALLS
Bruno LE ROUX a été et est d'un soutien d'une loyauté absolue à l'égard de l'action qui est
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il a commis une bourde ?
MANUEL VALLS
Non, parce que ce débat avait eu lieu au sein du groupe socialiste, au sein du Parlement sur l'équilibre
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez dû être surpris en entendant cela ?
MANUEL VALLS
Il a quelques instants dit clairement les choses, et il a considéré que s'il y avait eu un débat aujourd'hui il fallait ne pas réécrire ce texte.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est ce qu'il a dit ?
MANUEL VALLS
Vous lui poserez la question si vous l'invitez, je n'en doute pas un seul instant. Mais moi je le sais son soutien est loyal et c'est ça qui est le plus important. Je compte d'abord sur lui .
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous pensez que François HOLLANDE vous soutient loyalement dans cette affaire ?
MANUEL VALLS
Vous vous rendez compte s'il ne me soutenait pas loyalement, ou si moi je ne le soutenais pas loyalement .
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous pose la question, vous n'avez aucun doute ?
MANUEL VALLS
Je n'ai aucun doute sur
JEAN-JACQUES BOURDIN
Franchement, soyons clairs.
MANUEL VALLS
Franchement, comme on dit les yeux dans les yeux
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'avez aucun doute sur le soutien de François HOLLANDE ?
MANUEL VALLS
Non, je n'ai pas de doute. Hier au Conseil des Ministres, autour du président de la République, ce que je viens de vous dire, c'est-à-dire la nécessité de faire lever tous ces blocages, notre détermination à aller jusqu'au bout pour ce qui concerne ce texte. Le fait que l'article 2 est un élément important pour la négociation sociale.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes à fond soutenu.
MANUEL VALLS
Mais il ne peut pas en être autrement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, on va vous retrouver sur l'antenne de RMC en dialogue avec les auditeurs jusqu'à 9h30
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, merci d'être resté avec nous
MANUEL VALLS
Merci à vous.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et d'accepter de répondre, dans les circonstances actuelles, aux auditeurs de RMC. Je dois dire que nous n'avons jamais reçu autant d'appels que ce matin, ce qui montre l'urgence de la situation. Simplement une première question qui est arrivée par mail. C'est Luis qui nous a envoyé cette question, il a 37 ans, il est chauffeur poids-lourds dans les Yvelines : « Pourquoi laissez-vous faire ces manifestations et ces rassemblements alors que nous sommes en état d'urgence ? »
MANUEL VALLS
Mais parce que c'est un droit constitutionnel. C'est d'ailleurs l'honneur de notre démocratie alors qu'il y a une menace terroriste car, en effet, il faut le rappeler, nous sommes visés. Nous sommes même l'objectif numéro un de l'Etat islamique, de Daesh. Mais alors même que nous connaissons cette menace, que nous avons prolongé l'état d'urgence précisément pour assurer la sécurité de l'Euro de foot 2016 et du Tour de France. Malgré cela, dans notre pays, c'est une belle réponse à ceux nient nos valeurs, à ceux qui se sont attaqués à notre mode de vie il y a quelques mois je parle des terroristes. C'est une belle réponse, c'est l'honneur de la France que de permettre que la vie démocratique il y a eu des élections au mois de décembre, elles n'ont pas été annulées ; il y a eu des grands rendez-vous, il y a eu la COP21 ; il y a la possibilité toujours de manifester, d'organiser des réunions. Chacun ensuite, je le disais tout à l'heure à votre micro, doit assumer ses responsabilités, notamment non seulement ses responsabilités par rapport à ce qui pèse sur les policiers et les gendarmes mais aussi à ce que cela représente comme gêne pour les Français. Quand on se dit syndicat voulant défendre les salariés et qu'on met en difficulté des PME, des petites entreprises, des artisans et des commerçants, quand on oblige les salariés et les ouvriers de ce pays à faire la queue pour avoir de l'essence, je ne suis pas sûr qu'on défende véritablement les salariés de ce pays. Mais c'est l'honneur, encore une fois, de notre pays que de pouvoir permettre ce droit constitutionnel, ce droit de grève ou de manifester, de pouvoir toujours exister heureusement. C'est ça la France.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, je vais vous laisser avec Alexandre qui a 27 ans, qui est agent EDF en Haute-Savoie. Alexandre, bonjour. Je vous laisse avec le Premier ministre.
ALEXANDRE, AGENT EDF EN HAUTE-SAVOIE
Bonjour Jean-Jacques, bonjour Monsieur le Premier ministre.
MANUEL VALLS
Bonjour monsieur.
ALEXANDRE
Voilà, j'ai une question pour vous. Vous êtes un homme donc de convictions, je vous entends parler de principes. On voit que vous croyez en votre loi et, puisque vous avez l'air tellement persuadé que c'est une bonne chose pour tout le monde, je pense que vous devez penser aussi que les Français pensent que c'est une bonne chose pour eux, je vous demande pourquoi avez-vous fait passer la loi en 49-3 et derrière n'avez-vous pas fait un référendum ? Puisque vous êtes persuadé que c'est une bonne chose pour les Français, pourquoi n'avez-vous pas pris le risque a priori ce n'est pas un risque de faire un référendum ?
MANUEL VALLS
Non, ce n'est pas moi qui décide du référendum, mais enfin ça, c'est une autre affaire.
ALEXANDRE
C'est votre gouvernement.
MANUEL VALLS
C'est le président de la République.
ALEXANDRE
C'est le président de la République qui nomme le gouvernement.
MANUEL VALLS
Bien sûr. Deuxièmement, on ne peut pas faire par ailleurs de référendum sur ce type de texte, mais parce que c'est un texte qui touche différents aspects de la vie des entreprises et des salariés, parce que c'est un texte aussi il faut le dire d'une grande complexité, parce que le droit du travail est complexe, même s'il faut le simplifier. Parce que je pense aujourd'hui, je vous le dis très honnêtement, qu'on risque d'ailleurs de voter en pensant à autre chose bien évidemment. C'est ça aussi la démocratie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Contre vous.
MANUEL VALLS
Contre moi, contre le gouvernement, contre le système politique, contre la démocratie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Contre vous, contre François HOLLANDE, Manuel VALLS, le gouvernement et le pouvoir en place.
MANUEL VALLS
Et contre un peu
JEAN-JACQUES BOURDIN
Contre un peu tout le monde.
ALEXANDRE
Monsieur le Premier ministre, excusez-moi.
MANUEL VALLS
Allez-y, je vous en prie. Je vous écoute.
ALEXANDRE
Ne pensez-vous pas que quand un gouvernement décide à la place des gens, nous ne sommes plus en démocratie ?
MANUEL VALLS
Non, le gouvernement ne décide pas
ALEXANDRE
Nous avons voté pour vous certes, à peu près 20 % de la population avec des taux d'abstention
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez voté pour François HOLLANDE, Alexandre ?
ALEXANDRE
Oui. Oui, j'ai voté pour un gouvernement qui ne me représente plus. Je suis déçu. Et justement, puisque vous passez des lois sur le travail, ne pensez-vous pas qu'à ce compte-là on pourrait passer dans la loi du Travail un amendement qui consisterait à obliger les gens du gouvernement à respecter leurs promesses ? Si vous voulez, si j'ai voté pour vous quelque part vous êtes mon employé.
MANUEL VALLS
Et de quelles promesses et de quels engagements voulez-vous parler ? Moi, je crois à la démocratie. Je crois aussi à la démocratie représentative.
ALEXANDRE
Pourquoi vous ne faites pas de référendum si vous croyez à la démocratie ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alexandre, laissez Manuel VALLS vous répondre.
MANUEL VALLS
J'essaye de vous répondre.
ALEXANDRE
Excusez-moi, je vous laisse répondre.
MANUEL VALLS
Non, non, mais contrairement à vous, moi j'ai plus accès aux micros et je comprends que vous vouliez me poser des questions. Mais ce que je crois en même temps, c'est qu'un gouvernement après, à un moment il y a des élections, chacun portera le jugement et ce jugement, il approche si vous me permettez cette expression dans quelques mois, à l'occasion de l'élection présidentielle ; il faudra voir aussi au fond quels sont les projets pour le pays dans les années qui viennent : les projets de gauche, les projets de droite, qu'est-ce qui est bon pour chacun des Français. Mais moi, j'ai une responsabilité, je considère que c'est la responsabilité de l'intérêt général. Il y a un Parlement, il y a une constitution. J'avais une trentaine de députés socialistes qui ne voulaient pas de ce texte et qui voulaient mêler leurs voix avec celles de la droite, donc j'ai pris mes responsabilités et j'ai engagé ma responsabilité devant le Parlement. C'est la constitution. Il n'y a pas eu de motion de censure adoptée et c'est comme ça qu'on peut continuer à gouverner. Il y a eu de très grands textes adoptés grâce à l'engagement de responsabilité. Je pense notamment à la CSG qui avait été souhaitée par Michel ROCARD. Donc il y a des fois où un responsable politique doit être lucide bien sûr, être à l'écoute bien évidemment, mais doit être aussi courageux et, s'il a des convictions, il va jusqu'au bout et vous aurez l'occasion de nous juger dans quelques mois.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, merci Alexandre. Merci. Je vous coupe parce qu'il y a énormément d'appels. Simplement une question : en aucun cas, vous ne serez candidat à la présidence de la République, Manuel VALLS ? En aucun cas.
MANUEL VALLS
En aucun cas ; quand ? Demain, après-demain ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
En aucun cas. Il y a une élection dans un an.
MANUEL VALLS
Non mais moi, je ne m'enferme jamais dans ce type de question. Aujourd'hui très honnêtement
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas la question ?
MANUEL VALLS
Dans un moment difficile : menaces terroristes, ces blocages, ces confrontations que souhaite, qu'a voulues la CGT, je suis totalement concentré sur ma tâche. Chaque chose en son temps. J'ai déjà eu l'occasion de dire que je considérais que c'était le président de la République François HOLLANDE qui était légitime à porter
JEAN-JACQUES BOURDIN
Plus que jamais ?
MANUEL VALLS
Mais c'est lui qui prendra cette décision. C'est sa décision devant les Français mais, honnêtement, je ne pense pas que ce soit le sujet du matin.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, Annie justement qui vous écrit. « Le dialogue sert à quelque chose. Arrêtez de vous entêter. On ne vous demande pas de démissionner mais, s'il-vous-plaît, faites un pas en arrière. La CGT et l'Etat pourraient peut-être s'entendre et arranger les choses », voilà ce que vous dit Annie.
MANUEL VALLS
Annie qui doit nous écouter
JEAN-JACQUES BOURDIN
Elle vous écoute, oui.
MANUEL VALLS
J'ai discuté pendant plusieurs semaines avec tous les syndicats. Les syndicats comme la CFDT, la CFTC, la CFE-CGC, l'UNSA, le premier syndicat étudiant la FAGE, ont accepté, ont donné leur accord aux modifications, au compromis que nous avons bâti ensemble. La CGT n'était que sur une seule position, pas depuis une semaine : depuis des mois. Le retrait du texte, la mise en cause de l'article 2, ce sont deux conceptions du dialogue social qui se sont affrontées. Pas uniquement entre le gouvernement et la CGT mais au sein même du mouvement syndical, au sein même du mouvement ouvrier, au sein même des organisations de jeunesse. Donc mon rôle était aussi d'écouter la ceux qui veulent la réforme, on ne peut plus réformer sinon si on accepte en permanence ces oukases comme on dit, c'est-à-dire cette volonté de ne jamais avancer, donc il faut avancer. Est-ce qu'on considère aujourd'hui que les salariés sont plus protégés avec un droit du travail qui est trop confus ? Nous avons voulu le simplifier et, en le simplifiant, voulu que la négociation se déroule d'abord dans les entreprises.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, j'ai plusieurs auditeurs aussi qui reviennent sur ce que vous avez dit tout à l'heure. Vous avez évoqué des modifications et des améliorations sur cette loi Travail et les auditeurs vous demandent plus de précisions.
MANUEL VALLS
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce que vous êtes resté extrêmement vague. Alors quelles améliorations, quelles modifications possibles ?
MANUEL VALLS
Mais je suis resté volontairement vague parce que je n'en sais rien. Tout simplement parce que le texte vient d'être adopté à l'Assemblée nationale et il est déjà le fruit, je vous le disais il y a un instant, du compromis avec les syndicats réformistes, avec les parlementaires, notamment avec ces parlementaires socialistes qui sont particulièrement responsables.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais sur quel point il pourrait y avoir selon vous
MANUEL VALLS
Mais je n'en sais rien. Il va falloir déjà réécrire le texte quand il va revenir du Sénat parce que ce sera le projet
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais ça d'accord, mais on peut le réécrire différemment justement.
MANUEL VALLS
Mais ça ne viendra qu'à la fin du mois de juin, qu'au début du mois de juillet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous souhaitez des modifications et une forme de réécriture du texte ?
MANUEL VALLS
Jean-Jacques BOURDIN, je suis toujours ouvert quand il faut améliorer tel ou tel aspect, mais en revanche sur les grandes lignes du texte et notamment sur l'article 2, c'est-à-dire la négociation dans l'entreprise mais aussi la garantie jeunes, les nouveaux droits pour les salariés, la lutte contre le détachement illégal, ce que nous faisons pour les jeunes, ça il n'est pas question évidemment d'y toucher. Les droits nouveaux pour les salariés, vous allez voir, le texte qui va revenir du Sénat il va les mettre en cause. Les droits nouveaux pour les syndicats, la droite est aujourd'hui de plus en plus contre le paritarisme. Et d'ailleurs, je dis notamment à la CGT qu'elle fasse très attention. Son action, elle peut être peut-être soutenue ici ou là par les Français mais demain, si la droite l'emporte, ce sont les droits des syndicats, c'est le paritarisme, c'est la possibilité de négocier entre partenaires sociaux qui vont être mis en cause et ce type d'action, elle ne sert pas la cause des syndicats. Et moi, je me félicite qu'il y ait des responsables syndicaux, syndicats dits réformistes, qui disent qu'il faut que le texte soit maintenu, qu'on ne peut pas céder à ce type d'attitude, à cette volonté de faire plier le gouvernement en bloquant l'économie, en gênant les Français, au moment où nous obtenons des résultats économiques avec la baisse du chômage en mettant en danger la vie des entreprises.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Manuel VALLS, Nicolas est avec vous. Il a 33 ans, chef d'entreprise à Paris ; bonjour Nicolas.
NICOLAS, CHEF D'ENTREPRISE PARISIEN
Bonjour Monsieur le Premier ministre.
MANUEL VALLS
Bonjour.
NICOLAS
Bonjour. Je vous appelle, en fait, car aujourd'hui on peut constater que c'est votre électorat qui est dans la rue ainsi que tous les Français saturés par la démagogie politicienne. Aujourd'hui, une vidéo qui remonte à 2010 vous oppose entre vos propos de 2010 sur le gouvernement de François FILLON que vous critiquiez à l'époque et vos propos qui sont complètement opposés en 2016. Et je me pose la question : comment est-il possible aujourd'hui, en six ans de temps, d'avoir deux oppositions aussi violentes et comment on peut penser différemment sur une période aussi courte ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Vous dénonciez le passage en force de François FILLON en 2010 - j'ai le texte sous les yeux passage en force contre les syndicats qui s'opposaient à la réforme des retraites en 2010, rappelons-le. Vous étiez assez dur « assez » : vous étiez très dur dans vos propos contre le gouvernement en place à l'époque. Et vous êtes maintenant dans la position opposée.
MANUEL VALLS
Oui, je connais cette vidéo et cette question qui revient mais c'est une bonne question. Moi dans l'opposition, j'essayais en général sur les questions essentielles, je pense à la sécurité, à la laïcité, je pense même à la réforme des retraites, d'avoir une position responsable et ça veut bien dire que quand on tient parfois un propos dans l'opposition, il faut réfléchir à deux fois et ça veut bien dire que quand on a la chance, la responsabilité de gouverner et c'est un honneur, il faut toujours se rappeler que c'est difficile.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est une leçon ?
MANUEL VALLS
C'est toujours une leçon, elle vaut pour moi, elle vaut aussi pour eux qui aujourd'hui sont dans l'opposition qui ont gouverné et qui ont aspiré à gouverner.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Autre question qui reprend d'ailleurs une proposition faite par Bruno LE MAIRE, je crois à un service minimum obligatoire dans l'énergie. Est-ce que ça serait une bonne idée ?
MANUEL VALLS
Mais de fait, il existe puisqu'on ne peut pas arrêter la production d'électricité. On ne peut pas mettre en cause aujourd'hui le fonctionnement des centrales nucléaires pour des raisons de sécurité, pour des raisons d'intérêt national. Donc cela existe déjà. Le service minimum, il existe également dans les entreprises, ce qui n'empêche pas des grèves et la gêne que peuvent en ressentir les usagers.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Beaucoup vous disent « mais pourquoi ne pas aller jusqu'à la réquisition ? » Vous êtes ferme, vous êtes décidé à maintenir cette loi, vous êtes décidé à ne pas modifier la philosophie de cette loi et vous laissez parce que ça va durer, Manuel VALLS, c'est le risque !
MANUEL VALLS
Quel est le problème ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que le risque n'est pas là ? Est-ce que le risque que la situation dure parce que la CGT et intransigeante aujourd'hui ?
MANUEL VALLS
Je vous ai dit tout à l'heure qu'il y a un besoin d'ordre, il y a un besoin de bienveillance, d'écoute, d'attention aux plus modestes, à ceux qui sont en difficulté, bien sûr mais il y a aussi un besoin d'ordre et d'ordre républicain ; ce conflit a commencé il y a quelques jours, la CGT veut le faire durer et le gouvernement est ferme sur l'approvisionnement des entreprises comme des stations-essence.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc le conflit va durer !
MANUEL VALLS
Donc il peut durer ! Je ne le souhaite pas bien évidemment, donc c'est pour cela que nous sommes déterminés à approvisionner et les stations-essence pour faire en sorte que chacun puisse être alimenté par l'essence. Donc nous allons continuer notre action. Si le conflit dure, il ne faut écarter aucune solution mais si j'annonce aujourd'hui la réquisition alors que les conditions juridiques ne sont pas remplies, ça ne sert à rien ! Moi, je prendrai les décisions, nous prendrons les décisions en toute connaissance de cause.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Réquisition oui
MANUEL VALLS
Mais il nous faut écarter aucune solution !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aucune solution, bien
MANUEL VALLS
Aucune voie pour faire respecter cet ordre, ce besoin Les Français, je voyais votre sondage, qui disait qu'ils sont pour le retrait de la loi pour faire cesser le désordre. Qu'est-ce qu'ils expriment d'abord ? Ils expriment un besoin, d'ordre, ils ont une inquiétude sur ce qui est en train de se passer et e face, le gouvernement affirme et c'est quand même ma conviction que ce texte est utile pour les entreprises comme pour les salariés qu'il ira jusqu'au bout que nous ne retirons pas, que nous ne reviendrons pas sur l'article 2 et son équilibre et sa philosophie, c'est-à-dire la négociation dans l'entreprise sur tous les éléments positifs du texte, et donc ça veut bien dire qu'il faudra faire respecter la loi et l'ordre dans notre pays !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, Sofiane justement qui est fonctionnaire dans le Rhône, Sofiane bonjour !
SOFIANE
Oui, bonjour Jean-Jacques, bonjour Monsieur le Premier ministre !
MANUEL VALLS
Bonjour !
SOFIANE
Voilà donc je vous appelle aujourd'hui, j'ai une question à vous poser, Monsieur le Premier ministre. Donc est-ce que avec les événements d'aujourd'hui, est-ce que vous sentez encore le gouvernement légitime ?
MANUEL VALLS
Mais il est légitime ! Nous sommes dans une démocratie, nous sommes dans une démocratie et nous avons un mandat, celui de gouverner le pays pendant cinq ans !
SOFIANE
Oui mais un mandat, enfin il ne faut pas oublier que la plupart des électeurs socialistes aujourd'hui ne se reconnaissent plus dans votre gouvernement, dans vos décisions. Il ne faut pas oublier que vous avez fait passer deux lois en 49-3,il ne faut pas oublier aussi que vous avez beaucoup de frondeurs dans le Parti socialiste, donc enfin c'est légitime que je me pose cette question là et je ne suis pas le seul à poser cette question !
MANUEL VALLS
Toutes vos questions sont par essence légitimes. Sur le 49-3, je crois qu'il y a une très grande confusion. Le 19-3 dans notre Constitution, le 49-3, c'est dire aux parlementaires si vous ne voulez pas de cette politique, de cette voie, vous avez la possibilité de renverser le gouvernement. C'est donc bien de se soumettre au jugement des parlementaires, c'est tout l'inverse d'un passage en force et c'est donc un acte qui est démocratique. J'aurais souhaité bien sûr que le texte aille jusqu'au bout mais est-ce que j'ai été empêché de faire adopter cette loi ? Est-ce qu'il y a eu une motion, de censure ? Non, donc j'ai les moyens de gouverner. Est-ce que j'ai aujourd'hui les moyens de gouverner ? Oui, j'ai les moyens de gouverner quand il s'agit d'assurer de tout faire pour assurer la sécurité des Français par rapport à la menace terroriste. Est-ce que j'ai les moyens de gouverner pour faire en sorte que l'école, la sécurité, la justice, l'écologie soient aujourd'hui nos priorités ? Est-ce que j'ai les moyens de gouverner pour faire adopter cette loi sur le travail ? Est-ce que j'aurai les moyens de gouverner pour faire adopter une belle loi sur l'égalité pua la citoyenneté ou la loi dite Sapin 2 qui nous permet de mieux lutter contre la corruption et aussi de soutenir davantage les entreprises ? Oui, j'ai les moyens de gouverner et les Français auront à donner leur jugement dans quelques mois à l'occasion des élections présidentielles et législatives. Est-ce que vous me posez une autre question, c'est-à-dire est-ce qu'on peut mieux gouverner dans le dialogue, avec les Français à partir du dialogue social en étant attentif à ce qui se passe sur les réseaux sociaux en étant au fond dans une forme de démocratie permanente, participative ? C'est un vrai sujet et dans le monde tel qu'il est avec des citoyens qui sont éduqués, très bien informés, surinformés, dans le monde des réseaux sociaux, comment on gouverne ? Comment une démocratie moderne peut aujourd'hui se réformer ? C'est un vrai sujet. Moi, je suis bien conscient qu'aujourd'hui parfois, nos institutions, notre système politique, notre système parlementaire ne sont pas toujours adaptés à ce qu'est l'attente à la démocratie que souhaitent les Français mais moi, je ne peux pas gouverner en tenant uniquement compte des blocages, des manifestations, de ceux qui s'opposent à la loi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais Manuel VALLS, votre problème, c'est que 60% des Français vous rendent responsable des tensions sociales actuelles.
MANUEL VALLS
Mais quand il y a ces difficultés
JEAN-JACQUES BOURDIN
Peu importe
MANUEL VALLS
Je ne dis jamais « peu importe parce que je ne méprise jamais le jugement de mes concitoyens qu'il soit direct ou indirect mais il m'est arrivé par le passé, il m'arrivera sans doute dans l'avenir de prendre des décisions qui peuvent être impopulaires, qui ne correspondent pas tout de suite à l'attente des Français mais ces positions, je les assume. Sinon, à quoi servons-nous ? Si nous ne sommes là que pour gouverner au gré des sondages mais alors, il n'y a plus d'intérêt général. Vous vous rendez compte si François MITTERRAND en 81 avait écouté les sondages sur la peine de mort ? Il avait une conviction profonde. Moi, j'ai aussi des convictions profondes sur d'autres sujets quand j'engage des mois, des réformes parce que je crois qu'elles sont utiles pour le pays, il faut aller jusqu'au bout et encore une fois, nous avons beaucoup discuté, négocié avec les partenaires sociaux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une question corollaire. Est-ce que votre impopularité est telle, je dis bien votre impopularité est telle qu'elle vous empêcherait de gouverner ?
MANUEL VALLS
Je ne le crois pas, franchement
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'avez plus d'autorité ? Où est votre autorité aujourd'hui, Manuel VALLS ?
MANUEL VALLS
Comment, je n'ai plus d'autorité ?!
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais autorité dans l'opinion publique ! Où est votre autorité ?!
MANUEL VALLS
Non mais je n'exerce pas, pardon Jean-Jacques BOURDIN, je n'exerce pas une autorité par rapport à l'opinion ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non l'autorité pour décider et pour faire partager ces décisions ?
MANUEL VALLS
Mais je décide et nous décidons et nous continuerons de décider ! Ça n'est pas parce que la CGT aujourd'hui veut bloquer le pays, gêner les Français que moi je vais partir, je vais plier. Ca n'est pas possible, ça n'est pas ça ma conception de la démocratie. La démocratie, ce n'est pas la loi de la rue ; ça n'et pas la loi des sondages ; ça n'est pas la loi des manifestations. Chacun doit tenir compte bien sûr de ce qui se passe dans la rue des manifestations et des enquêtes d'opinion mais j'avance parce que nous avons des convictions. Sinon, il n'y a qu'à nommer un chef de bureau à la tête du gouvernement qui agira en fonction des sondages, ça n'est pas ma conception de la démocratie. Ecoutez, moi j'ai des convictions sur l'idée qu'on se fait de la République, sur l'autorité, sur l'ordre républicain, sur la laïcité, sur l'entreprise, sur le dialogue social, sur la lutte contre les inégalités. Quand j'entends par exemple, je vais prendre un exemple y compris parce qu'on peut l'entendre parfois chez les auditeurs, quand j'entends parler d'assistanat, de ceux qui vivent du système mais moi, je refuse ces mots ! Quand on décide d'augmenter le RSA, ou de créer la prime d'activité, ce n'est pas forcément toujours populaire et pourtant, c'est utile pour les plus pauvres, pour les modestes, pour les travailleurs précaires. Donc dans le monde qu'il est avec la montée des populismes, avec une part de démagogie où on mélange tout, eh bien, le rôle du politique, c'est comme ça, c'est d'assurer au fond, oui, l'intérêt général et ce que je crois bon pour le pays et aux Français de juger dans quelques mois ce qu'ils considèrent bon pour le pays, mauvais pour le pays et ils auront l'occasion de juger parce qu'aujourd'hui, ils jugent ce que nous faisons. Demain, ils jugeront aussi ce qui est proposé pour le pays. Tous ces Français qui aujourd'hui s'inquiètent sur la loi Travail qui est pourtant bonne pour les entreprises et pour les salariés, qu'ils regardent les projets en face, qu'ils se disent ce que représenterait le retrait du texte ou ce que représenterait demain l'adoption de ce que propose une partie de la droite et encore une fois c'est le débat démocratique. Ce que propose la CGT, c'est le retrait du texte et le retrait du texte, c'est moins de droits pour les salariés. Ce que propose la droite, c'est moins de droits pour les salariés et moins de dialogue social alors que nous avons besoin de dialogue social. Nous sommes dans une position qui est certes difficile mais qui me parait être la bonne pour le pays parce que nous devons à la fois faire en sorte qu'il y ait davantage de progrès social pour notre pays dans tous les domaines, sur le plan social, sur le plan éducatif, qu'il y ait davantage de compromis et c'est difficile, Jean-Jacques BOURDIN parce que je suis conscient qu'il y a de la radicalité dans notre société, qu'il y a aussi de la violence sociale, de la violence dans les comportements. C'est inacceptable qu'on s'attaque ainsi aux permanences d'élus, ou qu'on s'attaque aux policiers et aux gendarmes avec une violence Et ce ne sont pas ceux qui sont le plus en difficulté, ce sont parfois des garçons on la bien vu avec les interpellations qui viennent de tous les milieux sociaux. C'est inacceptable ! Et moi mon rôle c'est de dire « voilà qu'elle est mon idée de la démocratie ». Et puis c'est le rassemblement des Français autour des valeurs de la République. Donc, donc, je dois poursuivre cette tâche qui est la mienne, c'est l'honneur de la politique, et c'est l'idée que je me fais, malgré l'impopularité, malgré les contestations, mais il faut tenir. Il faut tenir, vous avez, dans ces moments difficiles. C'est comme ça qu'on voit ceux qui ont de la trempe, un sens de l'intérêt général et un sens de l'Etat. Le sens de l'Etat c'est tellement perdu. Ça serait facile Jean-Jacques BOURDIN de dire « je suis les sondages, je désavoue Myriam El KHOMRI, je suis ce que ici les frondeurs ou là la CGT veulent nous imposer », ce n'est pas ma conception de l'action publique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les François doivent toujours faire des efforts, vous dit Nelly, et perdre leurs avantages et leurs acquis.
MANUEL VALLS
Mais quels avantages Nelly ? Quels avantages ? Aujourd'hui, prenons des exemples concrets :
J'ai 23 ans je n'ai pas d'emploi, pas de diplôme et je suis sans ressource, mon horizon est bouché et demain je pourrais bénéficier de la garantie jeunes. C'est une allocation de 460 euros par moi, mais c'est aussi un accompagnement pour suivre une formation, trouver un emploi, raccrocher donc des wagons.
J'ai 20 ans, j'ai quitté le système scolaire, je n'ai pas de diplôme, je n'ai pas de formation et aujourd'hui grâce au compte personnel d'activité mon projet de formation sera financé et je pourrais être formé à un métier et accéder à un emploi.
Aujourd'hui je suis un indépendant, je me mets à mon compte pour ouvrir un petit commerce, je n'ai pas de droit individuel à la formation, la loi va le permettre.
Aujourd'hui je suis chef d'une entreprise, j'aurais plus de lisibilité, donc je pourrais davantage employer, embaucher avec des CDI.
Je suis un salarié sans qualification, j'ai quitté l'école sans aucun diplôme, j'ai commencé à travailler à 19 ans, au bout de bientôt dix ans d'expérience je souhaiterai pouvoir me former pour accéder à un emploi pour avoir plus de responsabilité ; demain avec le CPA je bénéficierai de 48 heures de formation par an et je pourrais ainsi financer une formation me permettant d'être promu à de nouvelles fonctions.
Le dialogue social dans l'entreprise ce n'est pas des droits en moins pour les salariés ? Donc il faut arrêter cette désinformation. Et moi je vais continuer me battre comme le fait Myriam EL KHOMRI, comme doivent le faire tous les membres du gouvernement pour expliquer cette loi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même Emmanuel MACRON ?
MANUEL VALLS
Tous, tous, un seul intérêt aujourd'hui, défendre cette loi et défendre l'intérêt général.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dites-moi, est-ce qu'Emmanuel MACRON peut toujours rester dans ce gouvernement en faisant entendre sans cesse des choix différents de ceux du gouvernement auquel il appartient. Franchement ?
MANUEL VALLS
Emmanuel MACRON a participé avec moi et Myriam EL KHOMRI à toutes les discussions, à toutes les négociations avec les salariés
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous voulez que je vous fasse la litanie de tous les propos tenus par Emmanuel MACRON qui ne correspondent pas à la ligne conduite par le gouvernement manuel VALLS ?
MANUEL VALLS
Comme je ne vais pas rester au-delà de 9h30 .
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce qu'elle serait longue, vous en convenez vous-même.
MANUEL VALLS
Je vais vous dire je suis assez indifférent à tout cela.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon !!
MANUEL VALLS
Oui parce que les évènements de 2015, les attaques terroristes, mais aussi d'une certaine manière ce qui se passe dans le pays avec cette violence que j'évoquais, m'ont changé dans la manière de gouverner, dans la manière de voir les problèmes, dans ma relation bien sûr avec les Français et aujourd'hui j'essaye de me concentrer sur ce qui est essentiel. Les petites phrases, les comportements
JEAN-JACQUES BOURDIN
Lorsqu'il dit « il faut privilégier l'investissement plutôt que les revalorisations salariales », c'est ce qu'il dit.
MANUEL VALLS
Mais il y a des revalorisations salariales y compris grâce au CICE, grâce aux marges qu'ont retrouvé les entreprises, ces dernières ont investi dans des machines outil, ont investi dans la formation, ont investi aussi dans l'augmentation des salaires. Nous avons-nous aussi
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous lui dites ce matin « il faut se taire et il faut suivre la ligne que je conduis moi, Manuel VALLS, Premier ministre ». Est-ce que vous lui envoyez ce message ce matin ? Parce que les Français ne comprennent plus ces voix discordantes, vous le savez bien.
MANUEL VALLS
Mais je vois tous les ministres régulièrement, ça sera fait encore tout à l'heure à 11h puisqu'à Matignon il y aura une réunion de ministres, comme nous le faisons tous les 15 jours. Dans ce moment là où il y a ce jugement, qui m'inquiète pour notre démocratie, si négatif, pas seulement sur les responsables politiques, mais c'est vrai sur les médias, c'est vrai sur nos institutions, c'est vrai sur tous les décideurs du pays, le comportement de chacun doit être non seulement impeccable, mais il doit être à la hauteur des
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc c'est irresponsable de parler
MANUEL VALLS
Non, je ne dis pas ça, il faut être concentré, que chacun . Regardez Bernard CAZENEUVE est concentré sur ses missions de sécurité, Jean-Yves LE DRIAN sur sa mission de défense, Najat VALLAUD-BELKACEM sur l'éducation, Myriam EL KHOMRI sur le travail, Marisol TOURAINE sur les questions sociales et de santé, Stéphane LE FOLL sur la difficulté des dossiers de l'agriculture. Chacun doit être concentré, chacun doit être responsable .
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas Emmanuel MACRON sur l'économie
MANUEL VALLS
Mais si, mais il s'occupe bien de l'économie de l'entreprise, mais que chacun soit concentré, c'est ce que nous devons aux Français, c'est cela le gouvernement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai deux dernières questions. La première est très concrète, le budget de la recherche, allez vous renoncer à supprimer 256 millions d'euros de crédit à l'Enseignement supérieur et à la Recherche ?
MANUEL VALLS
C'est un peu plus de 140 millions d'euros qui faisaient l'objet d'un gel, mais nous l'avons dit, l'université et la recherche sont des priorités. Aucun des grands programmes, aucun des grands centres de recherche de ce pays ne sera concerné par des baisses
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous maintenez ces coupes budgétaires, ces baisses
MANUEL VALLS
Non, non, non, nous l'avons dit, la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche en l'occurrence Najat VALLAUD-BELKACEM l'a dit. Et je crois même que pour les mois qui viennent et les années qui viennent surtout, je pense au prochain quinquennat, je pense à l'avenir, nous devons faire en sorte que l'université, c'est-à-dire là où maintenant beaucoup de Français étudient, avant on s'arrêtait au bac, aujourd'hui c'est l'université, c'est plus de 2 millions d'étudiants. La recherche et l'innovation parce que les grandes nations de demain ce seront celles qui auront le plus haut niveau de formation et d'innovation. Ca doit être sans doute l'une des grandes priorités des années qui viennent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas ce que disent les chercheurs et notamment les Prix Nobel
MANUEL VALLS
Les Prix Nobel vont être reçus par le président de la République, ils sont, je n'en doute pas un seul instant, rassurés par ces propos.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors j'ai une dernière question à laquelle je tiens absolument, Manuel VALLS, parce qu'elle concerne beaucoup de nos auditeurs, il s'agit du RSI. Le fameux RSI. Est-ce que vous allez le réformer avant la fin du quinquennat ?
MANUEL VALLS
Je savais que vous alliez me poser la question.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon ! Pourquoi ?
MANUEL VALLS
Parce que j'ai souvent cette question quand je viens sur votre antenne, et parce que comme je vous écoute, c'est un sujet qui remonte. Le gouvernement a pris à bras le corps le sujet du Régime social des indépendants, car le régime mis en place en 2006 et réformé dans la précipitation par la droite en 2008 a connu de graves dysfonctionnements au détriment de plusieurs millions de travailleurs indépendants. Je veux rappeler quelles sont les responsabilités. J'ai nommé l'an dernier deux députés en mission, Sylviane BULTEAU et Fabrice VERDIER qui est le député du Gard que vous connaissez bien. Nous avons repris leurs recommandations avec un objectif clair : rendre la protection sociale des travailleurs indépendants plus simple, plus lisible et plus juste. Et les premiers résultats sont là tangibles, même si je connais la difficulté que vivent beaucoup d'indépendants. Un milliard d'euros de cotisations ont été remboursés dès le mois de juillet dernier grâce à l'accélération de la procédure de régulation cotisations mise en place en 2015. Cela constitue un gain de trésorerie majeur pour ces professionnels. 100 %, parce que c'est ça qui ne marchait pas, des appels téléphoniques, sont désormais orientés vers des collaborateurs du RSI et non plus sous-traités par un prestataire. Un médiateur dans chaque département a été nommé pour réduire les litiges. Et les travailleurs indépendants les plus modestes qui s'acquittent de cotisations minimales valident désormais trois trimestres de retraite par an contre un seul jusqu'en 2014(sic). Le gouvernement a mis en place un comité de suivi chargé de veiller à la mise en place de ces réformes. Je veux aussi rappeler que le gouvernement, dans le cadre du Pacte de responsabilité a baissé de 1 milliard d'euros les cotisations des travailleurs indépendants depuis le 1er janvier 2015. Et que grâce à la loi Travail ils vont bénéficier de la formation. Donc je connais les difficultés, beaucoup appellent encore sur votre antenne. Nous allons donc continuer ce travail.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une dernière question, Michel SAPIN fait partie de votre gouvernement ?
MANUEL VALLS
Je crois oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui, il fait partie de votre gouvernement Michel SAPIN, il est proche de François HOLLANDE
MANUEL VALLS
Je le confirme.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous venez de me dire qu'il était proche de François HOLLANDE.
MANUEL VALLS
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous savez ce qu'il vient de dire ?
MANUEL VALLS
Non, vous allez me l'apprendre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Peut-être qu'il faut toucher à l'article 2 de la loi Travail.
MANUEL VALLS
On ne touchera pas à l'article 2.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est à dire que vous êtes Premier ministre, vous dites « on ne touchera pas l'article 2 », l'un des ministres importants, proche du président de la république dit « peut-être qu'il faut toucher à l'article 2 ». Alors qui gouverne, je vous pose la question, est-ce vous ou est-ce le président de la République qui décide ?
MANUEL VALLS
Jean-Jacques BOURDIN je n'ai pas vu la déclaration
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais je vous le dis, tenez je vous la donne.
MANUEL VALLS
Merci, je n'ai pas vu la déclaration. On peut toujours mais on peut toujours améliorer, toucher tel ou tel aspect, on peut toujours le faire
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on peut toucher à l'article 2 ?
MANUEL VALLS
Mais je vous l'ai dit tout à l'heure, mais la philosophie de l'article 2, la négociation dans l'entreprise, ça on n'y touchera pas. C'est clair.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Merci Manuel VALLS d'être venu nous voir.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 26 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80325|
FABIENNE SINTES
Marisol TOURAINE donc ministre des Affaires sociales et de la Santé avec nous sur France Info ce matin avec Yaël GOOSZ et Guy BIRENBAUM.
YAËL GOOSZ
Bonjour Marisol TOURAINE.
MARISOL TOURAINE
Bonjour Yaël GOOSZ.
YAËL GOOSZ
Semaine sociale suite, les policiers dans la rue à midi un peu partout en France contre la haine anti-flic, 350 blessés depuis le début du mouvement contre la loi Travail, vous n'êtes pas leur ministre mais qu'est-ce que vous avez à leur dire en tant que membre du gouvernement aux policiers ?
MARISOL TOURAINE
Que les Français les aiment et ils le savent, les Français aiment les policiers, ils leur font confiance et le gouvernement exprime son soutien, sa confiance dans les forces de l'ordre qui soumises à rude épreuve et qui ont beaucoup de tâches à accomplir : sécuriser des lieux publics, des lieux de manifestation, il va y avoir l'Euro, on sait que le risque terroriste est toujours au rendez-vous et, donc, il y a là une très forte pression. Nous savons qu'ils sont aujourd'hui confrontés à des tâches importantes, difficiles, qui sont reconnues par le gouvernement et d'ailleurs le ministre de l'Intérieur a donné, a signé avec leurs représentants syndicaux un protocole d'accord il y a quelques semaines qui comporte des éléments de revalorisation financière extrêmement importants.
YAËL GOOSZ
Trop de missions en même temps, entre l'Euro, la jungle de Calais
MARISOL TOURAINE
Il y a beaucoup de missions !
GUY BIRENBAUM
Les gardes statiques ?
MARISOL TOURAINE
Il y a beaucoup de missions, c'est la responsabilité des forces de l'ordre aujourd'hui et c'est cela la difficulté de leur métier, nous sommes dans un moment difficile, tendu, qui appelle la vigilance de tous et qui appelle le respect pour le travail des forces de l'ordre.
GUY BIRENBAUM
Vous dites les Français aiment la police mais il y a aussi des manifestants qui s'insurgent, en sens inverse, de la façon dont ils sont traités
MARISOL TOURAINE
Oui.
GUY BIRENBAUM
Alors il y a eu 53 personnes qui ont été interdites de manifester et à Paris 9 arrêtés sur 10 ont été suspendus par la justice administrative, ce qui tend à montrer que c'était peut-être beaucoup de communication ?
MARISOL TOURAINE
Ce qui prouve qu'il faut toujours être très attentif au respect des procédures de droit, c'est ce qu'a dit le tribunal et nous prenons acte de cette décision, les forces de l'ordre font un travail considérables, toutes les violences je le répète toutes les violences doivent être combattues et condamnées et, lorsque des policiers sont suspectés d'avoir commis des actes de violence contre certains manifestants, la police des polices se saisit de l'affaire et des sanctions peuvent être prononcées.
YAËL GOOSZ
Côté manif moins de monde dans la rue, six fois moins hier que le 31 mars, est-ce que vous voyez le bout du tunnel ?
MARISOL TOURAINE
La manifestation c'est un droit démocratique, c'est un droit constitutionnel, et chacun doit pouvoir exprimer ses positions, ses convictions, ses inquiétudes et ses engagements, mais
YAËL GOOSZ
Est-ce que vous dites que ça s'essouffle ?
MARISOL TOURAINE
Moi je ne suis pas là pour compter le nombre de manifestants
YAËL GOOSZ
Vous ne voulez pas le dire ?
MARISOL TOURAINE
Je suis extrêmement attentive à ce qui se passe dans le pays et je crois qu'il y a des inquiétudes légitimes, de bonne foi, auxquelles il faut pouvoir apporter des réponses. Mais le débat a eu lieu, des évolutions sont intervenues sur la loi Travail puisque c'est d'elle dont nous parlons des aménagements, des amendements ont été adoptés en commission et donc cette loi elle poursuit son parcours parlementaire, rien ne justifie
YAËL GOOSZ
Donc vous dites vivement juillet, le dernier 49.3 le juillet, vous dites ça ?
MARISOL TOURAINE
Rien ne justifie la violence, parce que je fais la différence entre des manifestants qui expriment leurs positions et leurs convictions et ceux qui sont dans les rangs des manifestants pour casser et pour discréditer, ce temps-là il est important, il faut que chacun assume ses responsabilités et nous allons de l'avant, le président de la République l'a dit : « nous devons aller de l'avant » parce que ce n'est pas en reculant qu'on permettra à notre pays d'affronter les défis qui sont les siens aujourd'hui.
GUY BIRENBAUM
Il y a un autre conflit social qui vous concerne très directement madame TOURAINE, le coup de gueule des buralistes, car le paquet neutre de cigarettes arrive ordonnance ce matin que vous présentez en conseil des ministres rappel pour nos auditeurs : qu'est-ce qui va changer vendredi ?
MARISOL TOURAINE
Vous avez raison ! Le 20 mai, c'est-à-dire vendredi, les fabricants de tabac vont devoir commencer à produire des paquets neutres pour les bureaux de tabac français. Le paquet neutre, c'est quoi ?
GUY BIRENBAUM
Pour nos auditeurs, vous le montrez-là sur le live de France Info.
MARISOL TOURAINE
C'est un paquet de cigarettes qui ne comporte plus de signe distinctif ! Pourquoi le paquet neutre ? Parce qu'on sait que, en particulier pour les jeunes, pas uniquement pour eux, tout ce qui est marketing a un impact phénoménal et donc on est sensible à la couleur d'un paquet, à la marque, au logo, à la forme du paquet et c'est ce marketing qu'il s'agit de casser, à partir du 20 mai donc les paquets neutres vont commencer à arriver mais les bureaux de tabac ont six mois, en fait sept mois - un peu plus pour écouler leurs stocks, s'adapter, et donc
GUY BIRENBAUM
Mais ils vont disent : « comment on va faire ? On va perdre ! On va perdre forcément en vente », ils sont inquiets les buralistes, ils menacent de bloquer les stocks pendant l'Euro.
MARISOL TOURAINE
Ecoutez, lorsque j'ai annoncé ma volonté de mettre en place le paquet neutre, les bureaux de tabac se sont entendre et c'était leur droit ils ont interpellé les parlementaires en disant : « mais le paquet neutre ça ne sert à rien, ce nest pas efficace », aujourd'hui ils reconnaissent que l'efficacité peut être là et ils imaginent que cette efficacité va être spectaculaire puisqu'ils parlent d'un effondrement de leur chiffre d'affaires, donc nous devons évidemment travailler à l'avenir du métier de buraliste. Mais moi je veux dire que ma priorité aujourd'hui c'est de faire en sorte que le tabac régresse en France, parce que le tabac tue plus en France qu'ailleurs, parce qu'il y a plus de fumeurs en France qu'ailleurs, que c'est
YAËL GOOSZ
Vous n'allez pas vous faire que des amis, notamment à droite, écoutez ce que Nicolas SARKOZY disait sur le sujet début février.
NICOLAS SARKOZY, EXTRAIT INTERVENTION EN FÉVRIER 2015
Si vous l'acceptez le paquet neutre pour les cigarettes mais vous aurez demain des intégristes qui vous demanderont la bouteille neutre et puis on aura aussi le fromage neutre, c'est la bataille de notre identité, c'est la bataille de notre histoire.
YAËL GOOSZ
Vous faites la grimace quand vous entendez ça ?
MARISOL TOURAINE
J'ai envie de sourire ! Parce que ce qui prouve que lorsque l'opposition politique devient systématique, elle perd parfois le sens de la mesure et Nicolas SARKOZY a perdu le nord, parce que moi je ne connais personne qui soit mort en mangeant trop de fromage, en revanche il y a 80.000 personnes qui meurent du tabac chaque année en France. C'est pour cela que vendredi entre en application en France la directive européenne anti-tabac, au-delà du paquet neutre
YAËL GOOSZ
Oui, et pourquoi vous ne le taxez pas davantage le tabac puisque c'est du tabac coloré, parce que c'est qui est efficace ?
MARISOL TOURAINE
Mais nous n'allons pas en rester là et nous allons prendre d'autres mesures
YAËL GOOSZ
Ah !
MARISOL TOURAINE
Parce que cette lutte contre le tabagisme elle suppose que nous agissions dans différentes directions : d'abord je vais créer un fonds de prévention du tabagisme pour renforcer les mesures de prévention dès cette année, nous le dotons de 32 millions d'euros, ce qui nous permettra de mettre en place toute une série d'actions ; ensuite, nous relançons des campagnes d'information et dès les prochaines semaines il y aura une campagne d'information pour aider les fumeurs qui le souhaitent à arrêter de fumer, 6 fumeurs sur 10 disent qu'ils veulent arrêter de fumer, Tabac info service - le numéro 39.89 - est très efficace - et depuis qu'il propose un suivi sur Smartphone les résultats sont très spectaculaires, 30 % des personnes qui se font suivre par Tabac info service ont arrêté de fumer plusieurs mois, lorsqu'on leur demande plusieurs mois après avoir terminé cette démarche. Donc, nous relançons cette campagne ; et puis
YAËL GOOSZ
Et puis à l'automne, à l'automne une sorte de Téléthon anti-tabac, qu'est-ce que c'est ?
MARISOL TOURAINE
A l'automne il y aura un Téléthon, si ce n'est qu'on ne demandera pas d'argent, un moi (s) sans tabac, moi, moi, m.o.i .
YAËL GOOSZ
Quel moi ? Quel mois ?
MARISOL TOURAINE
M.o.i, le mois de novembre, et avec un S entre parenthèse, un moi (s) sans tabac pour avoir une démarche collective, là c'est inspiré de ce que les Anglais ont fait et les Anglais ont de très bons résultats dans la lutte contre le tabagisme au fond c'est de se dire : « dans 15 jours tout le monde arrête, essaie d'arrêter de fumer dans trois jours et puis ça y est c'est parti le 1er novembre et pendant un mois on se tiendra les coudes, on se soutiendra » et on sait que ce la donne plus de chance à ceux qui veulent arrêter, de réussir dans le sevrage tabagique
YAËL GOOSZ
Elle aussi à arrêter de fumer, c'est Marine LE PEN, qui drague l'hôpital Julien LENGLET en parlait à 7 h 30 le FN vous qualifie de ministre autiste, elle écrit une longue lettre Marine LE PEN de soutien aux infirmières et aux aides-soignants, d'après le CEVIPOV 1 agent sur 4 de la fonction publique hospitalière est prêt à voter Marine LE PEN l'an prochain. Est-ce que c'est votre échec, ça, Marisol TOURAINE ?
MARISOL TOURAINE
Le Front national joue des peurs, des inquiétudes et moi je veux dire à tous ceux qui travaillent à l'hôpital qu'ils font un métier magnifique et que je leur exprime ma confiance et que je leur apporte mon soutien. Je l'ai fait concrètement !
YANN GOOSZ
Mais ça c'est comme pour les policiers, ça ne suffit pas, il faut du sonnant et du trébuchant.
MARISOL TOURAINE
Je l'ai fait concrètement ! Et il y en a eu, et il y en aura, et il y en a eu. Mais d'abord reconnaître l'hôpital public, sauver les hôpitaux de proximité, c'est pour cela que je mets actuellement en place des groupements hospitaliers de territoire pour que les plus petits hôpitaux puissent s'appuyer sur les grandes structures et donc l'avenir des hôpitaux dans les territoires, dans les territoires ruraux en particulier mais pas seulement soient assurés et soient confortés. Par ailleurs, nous avons engagé
YANN GOOSZ
Qui veut financer le dégel du point d'indice des fonctionnaires à l'hôpital, c'est qui ?
MARISOL TOURAINE
Eh bien c'est l'hôpital, c'est le
YANN GOOSZ
Ah ! Qui fera ses économies pour payer plus cher les fonctionnaires ?
MARISOL TOURAINE
Mais nous l'avons engagé, mais nous faisons déjà des économies et donc nous avons engagé des revalorisations. Parce qu'au-delà du point d'indice, depuis 2012, deux actions ont été engagées : la première, c'est celle de recrutement de personnel soignant, parce que personne ne peut dire qu'il y a trop de monde à l'hôpital - lorsqu'on a été hospitalisé on sait la lourdeur de la tâche des infirmières, des aides-soignantes, des professionnels de santé - et donc je dis : « Attention à ceux, à droite en particulier, qui annoncent que, s'ils revenais au pouvoir, ils diminueraient le nombre de fonctionnaires », nous avons augmenté de 23.000 le nombre de soignants dans les hôpitaux publics ; et puis nous avons pris, deuxième axe, des mesures sonnantes et trébuchantes, je vous donne un exemple, pour les personnes qui sont les personnels de santé qui sont en catégorie C donc qui sont à peu près autour du SMIC cela représente en deux ans une revalorisation de 480 euros net par an, c'est près de 500.000, un peu plus de 400.000 pardon de personnes à l'hôpital public qui sont concernées par cette revalorisation, une infirmière ou un infirmier c'est une revalorisation qui va de 250 à 500 euros par an net selon son échelon. Donc les revalorisations elles sont là, au-delà ou indépendamment du point d'indice, et c'est un élément que je veux souligner parce qu'il n'est pas vrai que le soutien à l'hôpital public c'est simplement un engagement politique ou un soutien moral, c'est aussi un engagement financier et des espèces sonnantes et trébuchantes.
YANN GOOSZ
Très rapidement Marisol TOURAINE, deux questions de santé publique.
GUY BIRENBAUM
Qu'est-ce qu'on fait avec le glyphosate, madame TOURAINE, si l'Europe là demain ou aujourd'hui décide qu'on le réintroduit ?
MARISOL TOURAINE
Le président de la République a dit très clairement lors de son intervention à l'occasion de la dernière conférence environnementale que le glyphosate ne serait pas autorisé en France parce qu'indépendamment aujourd'hui
GUY BIRENBAUM
Même si Bruxelles le décide ?
MARISOL TOURAINE
Indépendamment des débats sur le caractère cancérigène ou non du glyphosate nous considérons que c'est un perturbateur endocrinien, enfin les analyses ce n'est pas que nous considérons les études dont nous disposons montrent que c'est un perturbateur endocrinien, d'autres études sont attendues pour 2017, mais en tout cas nous ne renouvelons pas en attendant ces nouvelles études, nous ne renouvelons pas l'autorisation pour le glyphosate.
GUY BIRENBAUM
Mais, pardon, on enlève tous les Roundup par exemple des rayonnages, désormais il y a .300 produits qui contiennent du glyphosate, c'est énorme ?
MARISOL TOURAINE
Il n'y aura pas d'autorisation pour le glyphosate.
YANN GOOZ
Le vaccin Ebovac 2 contre le virus Ebola est-il dangereux, il y a un essai clinique en cours qui a été suspendu hier après des problèmes neurologiques constatés sur un patient ?
MARISOL TOURAINE
Le vaccin suit son cours, pour le moment il n'est pas administré à des personnes qui ne sont pas malades dans les pays concernés, c'est un essai clinique et il a été suspendu. Moi je veux saluer la réactivité des équipes, puisqu'elles ont immédiatement signalé la situation au ministère et aux autorités sanitaires et qu'elles ont commencé à étudier ce qui est en cause et il semblerait mais moi je suis extrêmement prudente il semblerait que l'incident qui a été identifié ne soit pas lié à l'administration du vaccin, mais les études se poursuivent, les experts indépendants vont se prononcer et donc pas d'inquiétude, en tout cas les équipes qui portent ce vaccin sont extrêmement attentives à faire en sorte que tout se passe de la manière la plus sécurisée qui soit. Je rappelle qu'Ebola
YANN GOOSZ
D'un mot ! D'un mot.
MARISOL TOURAINE
C'est un grand défi de santé publique.
YANN GOSZ
Lapsus de François HOLLANDE hier : « ça y est la campagne peut commencer », il est candidat ?
MARISOL TOURAINE
Il a dit qu'il l'annoncerait à la fin de l'année, donc je lui laisse son temps
YANN GOOSZ
Oh ! Secret de polichinelle maintenant ?
MARISOL TOURAINE
En tout cas il est là pour rappeler l'action qu'il a engagée, montrer le cap qu'il suit
YANN GOOSZ
Rappeler que ça va mieux !
MARISOL TOURAINE
Ca va mieux !
YANN GOOSZ
Ah !
MARISOL TOURAINE
Les indicateurs sont là et même si ça ne va pas mieux pour tout le monde. Vous savez moi ce qui me frappe c'est que et encore une étude le montrait hier lorsque vous demandez aux Français si ça va bien pour eux, ils disent oui massivement et ils sont inquiets pour la France, il est temps de transformer cet optimisme individuel en optimisme collectif et national
YANN GOOSZ
Et politique !
MARISOL TOURAINE
Et c'est à cela que nous travaillons.
FABIENNE SINTES
Merci beaucoup Marisol TOURAINE.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80326|
Je salue la libération ce mercredi de Nadia Savtchenko et de plusieurs autres prisonniers. Au cours des derniers mois, la France a plaidé sans relâche auprès des responsables russes en faveur de cette libération et, plus largement, en faveur de l'échange de tous les prisonniers selon le principe de «tous contre tous», agréé à Minsk le 12 février 2015.
La France, aux côtés de l'Allemagne, poursuivra ses efforts visant à la mise en oeuvre du Paquet de mesures de Minsk.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80327|
ARLETTE CHABOT
Bonjour Marisol TOURAINE.
MARISOL TOURAINE
Bonjour Arlette CHABOT.
ARLETTE CHABOT
Alors, cette actualité de ce matin, il y a une incertitude évidemment, accident, terrorisme, nous rappelle qu'il y a effectivement la possibilité, cette hypothèse du terrorisme, et donc qu'il y a une menace qui pèse toujours sur la France.
MARISOL TOURAINE
Oui, mais tout d'abord permettez-moi d'exprimer mes pensées aux familles des victimes, j'imagine l'angoisse dans laquelle elles sont aujourd'hui, à l'instant où nous parlons, plongées, et le gouvernement a immédiatement réagi. Le président de la République s'est entretenu avec son homologue égyptien, nous avons mis en place une cellule de crise au ministère des Affaires étrangères, et une cellule de soutien psychologique, médicale, psychologique, s'est mise en place à Roissy, à l'aéroport de Paris, pour soutenir, accompagner, prendre en charge, les familles qui en éprouveraient le besoin. A l'heure à laquelle nous parlons aucune hypothèse ne peut être écartée, tout doit être envisagé, mais il est trop tôt pour se prononcer, donc laissons l'enquête avancer, les choses vont se faire maintenant dans les heures qui viennent, évidemment, j'insiste, aucune hypothèse ne peut être écartée.
ARLETTE CHABOT
Alors, cette hypothèse d'un attentat nous ramène donc, je le disais, aux risques, ce qui rend encore plus insupportable, sans doute, les attaques contre les policiers. Comment avez-vous réagi hier en voyant cette image épouvantable d'une attaque contre une voiture de police, avec deux policiers à l'intérieur, comment vous avez réagi, comment vous qualifiez ?
MARISOL TOURAINE
Par la colère, la colère parce que ce que j'ai vu, ce qui a été fait hier après-midi, ce dont ont été victimes ces policiers, dont un a été blessé, c'est simplement inacceptable, intolérable. On a, face aux forces de police, qui sont engagées, comme vous l'indiquiez, qui sont engagées au quotidien, dans un contexte difficile, tendu, de menaces terroristes, de menaces contre la France, et contre les Français, nous avons affaire à des professionnels de la destruction, de la casse, de l'agression. Ce ne sont pas des manifestants qui sont engagés pour des idées, pour un projet, qui veulent revendiquer simplement. Nous sommes dans un pays de droit, nous sommes dans un pays libre, nous sommes dans une démocratie, et on peut revendiquer, on peut manifester, on peut demander, c'est la chance et la force de notre pays, mais on ne peut pas, on ne doit pas accepter des violences telles qu'elles se sont déroulées hier après-midi, et elles ne sont, d'ailleurs, pas acceptées. Le gouvernement est mobilisé, le ministre de l'Intérieur, personnellement, est engagé, les forces de police, la justice, pour interpeller et pour juger.
ARLETTE CHABOT
C'est l'autorité de l'Etat aussi, Marisol TOURAINE
MARISOL TOURAINE
Non, l'autorité de l'Etat
ARLETTE CHABOT
ou des questions se posent sur la capacité ou non du gouvernement à maintenir l'ordre.
MARISOL TOURAINE
L'autorité de l'Etat elle est là, l'autorité de l'Etat elle ne fait pas défaut. Les interpellations ont lieu, les jugements sont prononcés, des peines, lourdes parfois, sont appliquées, donc il n'y a pas de leçon à recevoir de la part de certains, parce que j'entends effectivement monter, à droite en particulier, l'idée que le gouvernement n'agirait pas, le gouvernement agit. Le gouvernement agit pour protéger les manifestants et pour punir, sanctionner, ceux qui viennent, à la fois perturber l'ordre public, et empêcher les manifestants de le faire dans de bonnes conditions.
ARLETTE CHABOT
Ce ne sont pas des casseurs qu'on voyait autrefois dans les manifestations, ou des gens qui venaient par exemple de banlieue qui venaient pour piller et casser, ce sont des militants politiques qui assument. Ça veut dire que s'ils appartiennent à des mouvements il faut les dissoudre, par exemple ?
MARISOL TOURAINE
Il faut examiner les situations, tout ce qui vient porter atteinte à l'ordre public est un enjeu, effectivement, et de sécurité, et de démocratie. Il n'y a aucune raison d'accepter des actes d'une violence inouïe, je le répète, c'est d'une violence inouïe. Et on ne peut pas considérer que dans notre pays il n'y ait pas tous les moyens de droit pour faire valoir des positions, et, en réalité, les seuls positions politiques qu'expriment ces personnes dont on ne voit pas le visage, dont on ne connaît pas l'identité, dont on ne connaît pas d'autres revendications que celle de casser, c'est ce qu'ils disent, « nous revendiquons la liberté de casser. » Cette liberté-là, dans un Etat de droit, elle n'existe pas.
ARLETTE CHABOT
La question est, selon vous, posée, de la poursuite du mouvement, des manifestations organisées par les syndicats contre la loi Travail, ils doivent s'interroger, les responsables syndicaux, la CGT, FO ?
MARISOL TOURAINE
Tout le monde doit s'interroger, tout le monde doit regarder ce qui se passe, le ministre de l'Intérieur, le gouvernement, vont évidemment regarder de manière encore plus attentive, encore plus précise, les conditions dans lesquelles se déroulent les manifestations, mais attention, il y va à la fois de notre capacité à vivre ensemble, de notre démocratie. Honnêtement, personne, je dis bien personne, n'a à gagner quoi que ce soit aux images que nous avons vues hier sur les écrans de nos télévisions.
ARLETTE CHABOT
Il y a une extrême gauche qui veut abattre la gauche au pouvoir, ou la gauche qui exerce le pouvoir aujourd'hui ?
MARISOL TOURAINE
Il y a une gauche qui ne comprend pas l'exercice du pouvoir, mais cette gauche-là, cette extrême gauche-là, elle n'est pas toute, quand même, elle ne se reconnaît pas toute dans les mouvements de casseurs. Moi je ne fais pas l'amalgame entre ces mouvements, ultra minoritaires, ultra violents, qui sont dans la destruction, l'agression, et éventuellement même des actes de mort, parce que hier ils auraient pu tuer, je ne fais pas l'amalgame entre ces mouvements-là
ARLETTE CHABOT
C'était leur volonté, d'ailleurs, de tuer.
MARISOL TOURAINE
Ultra minoritaires, et une gauche, même extrême, qui ne veut pas gouverner, qui est dans la revendication, qui est dans la contestation d'un gouvernement de gauche au pouvoir. Mais, pour faire avancer, et c'est là que nous en venons à la réalité sociale de notre pays, pour faire avancer notre pays, pour engager des actions de progrès social, pour permettre à notre pays de créer des emplois, d'être compétitif, d'être actif, d'être dynamique dans la compétition internationale, nous avons besoin d'assumer les responsabilités. Et nous les assumons pleinement, c'est-à-dire avec ce que cela a de difficile, avec ce que cela a parfois d'exigeant, et nous l'assumons parce que c'est la seule manière de transformer l'ordre social et de transformer notre pays, ce n'est pas en contestant, c'est en agissant.
ARLETTE CHABOT
Alors, Marisol TOURAINE, on en arrive à votre dossier. Demain les fabricants de cigarettes vont devoir mettre ces cigarettes dans des paquets neutres, anonymes, il n'y a plus de marque.
MARISOL TOURAINE
Le paquet neutre c'est ça.
ARLETTE CHABOT
Pourquoi vous croyez, vous, que ces paquets neutres, c'est-à-dire la marque toute petite, vont permettre d'arrêter de fumer, vont réduire la consommation de tabac, parce que les Français fument beaucoup, la consommation est plus forte en France qu'ailleurs ?
MARISOL TOURAINE
Les Français fument plus que les Anglais, les Allemands ou d'autres, je ne parle même pas des Australiens, et le tabac tue en France, 80.000 personnes chaque année, les jeunes, notamment, rentrent dans le tabac. Le paquet neutre c'est quoi ? D'abord ce n'est pas très beau, c'est laid, franchement
ARLETTE CHABOT
C'est laid, oui.
MARISOL TOURAINE
Et c'est fait pour
ARLETTE CHABOT
Qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse, l'ivresse elle est dedans, elle reste dedans.
MARISOL TOURAINE
Oui, mais l'objectif c'est de casser le côté attractif de beaucoup de paquets de cigarettes. Aujourd'hui, vous savez, les paquets de cigarettes, les marques de cigarettes, elles jouent, elles font du marketing, et elles envoient des messages, « vous êtes une femme, prenez une cigarette qui sera longue, fine, agréable, et qui vous donnera de l'allure, du chic », c'est cela qu'il faut casser. Toutes les cigarettes se valent, c'est du poison, un poison de mort, et peu importe le paquet, ce qu'il y a à l'intérieur ça tue.
ARLETTE CHABOT
Mais, il y a une mesure, Marisol TOURAINE, c'est tout simplement augmenter le prix du tabac. Vous ne voulez pas, ou vous ne pouvez pas, augmenter le prix du tabac ? C'est le plus dissuasif. Le modèle du paquet neutre c'est l'Australie, en Australie le paquet de cigarettes il est très cher.
MARISOL TOURAINE
Il a été augmenté après, et, vous savez, moi je suis tout à fait ouverte à ce débat, je porte l'idée d'une augmentation du prix du tabac. Lorsque j'ai annoncé la mise en place du paquet neutre j'ai indiqué que le prix du tabac n'augmenterait pas de manière significative avant que le paquet neutre ne soit mis en place, mais je me réjouis de ce débat, parce que lorsque j'ai lancé l'idée du paquet neutre on m'a dit « il y a deux choses qu'il ne faut pas faire, le paquet neutre d'une part, et d'autre part l'augmentation du prix du tabac parce que ça favorise la contrebande. » Alors si aujourd'hui, à la faveur de la mise en place du paquet neutre tout le monde me dit « en fait ce qu'il faut c'est augmenter le prix du tabac », alors c'est formidable, ça veut dire que tout le monde est prêt à s'engager.
ARLETTE CHABOT
On va terminer par ce qui se passera tout à l'heure, c'est-à-dire une conférence consacrée au handicap, avec le président de la République.
MARISOL TOURAINE
Au handicap, aujourd'hui. Le président de la République est engagé
ARLETTE CHABOT
Avec une mesure ?
MARISOL TOURAINE
Oui, le président est engagé fortement, nous avons pris de nombreuses mesures depuis 2012, il en a annoncera de nouvelles, et je lui laisse évidemment la primeur de ces annonces, mais l'une de ces mesures consistera, je peux vous en donner disons l'avant-goût, consistera à revoir le système de prime d'activité pour les personnes handicapées, c'est du pouvoir d'achat en plus pour les salariés qui ont des revenus modestes. Il se trouve qu'aujourd'hui dans le calcul de la prime d'activité on ne prend pas en compte l'allocation pour les personnes handicapées, nous allons la prendre en compte. Concrètement, une personne handicapée, qui a cette allocation, et qui travaille à mi-temps, aujourd'hui elle n'a pas de prime d'activité, demain, à partir du 1er juillet concrètement, le président de la République le dira, elle aura droit à la prime d'activité et pour elle un demi-SMIC d'activité et l'allocation handicapé, cela voudra dire une prime de 135 euros par mois, c'est donc un progrès concret, du pouvoir d'achat en plus, pour des personnes qui sont en situation de handicap.
ARLETTE CHABOT
135 euros par mois en plus.
MARISOL TOURAINE
Pour quelqu'un qui est à mi-temps, au SMIC.
ARLETTE CHABOT
Merci beaucoup Marisol TOURAINE d'être venue ce matin.
MARISOL TOURAINE
Bonne journée à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80328|Mesdames et Messieurs les Députés, Monsieur le Député,
Je tiens tout d'abord à excuser M. le ministre de l'intérieur, retenu pour honorer la mémoire d'un militaire du GIGN.
Vous l'avez dit, après les attentats du 13 novembre, la Commission européenne a accepté de répondre à une demande que le ministre de l'intérieur avait formulée au nom de la France visant à réviser la directive de 1991 sur les armes à feu.
Cette proposition est désormais en cours de négociation sur le plan européen et nous espérons parvenir à un accord sur le texte d'ici la fin du mois de juin.
Les priorités fixées par la France figurent très nettement dans le texte de la Commission et visent en particulier à accroître le contrôle des transactions commerciales des armes à feu - notamment sur internet - à assurer une meilleure traçabilité de ces dernières sur le territoire européen jusqu'à leur destruction, à élargir le champ d'application de la directive en incluant les collectionneurs et les armes neutralisées, à une uniformisation du marquage, à une interopérabilité des systèmes d'information dans le flux des transferts d'armes au sein de l'Union européenne et à l'interdiction des armes semi-automatiques les plus dangereuses car la directive précédente visait essentiellement les armes automatiques.
Aujourd'hui, la législation de certains États membres est encore beaucoup trop souple, qui permet d'acquérir des armes à feu sans contrôle strict sur les personnes cherchant à les détenir. Des armes circulent dans l'espace européen et nourrissent donc les filières de la grande criminalité, voire le terrorisme.
Notre objectif est donc de renforcer l'encadrement des armes légales sur le plan européen. Sur ce point, Monsieur le Député, je tiens à lever toute ambiguïté : la France n'a pas pour objectif d'interdire la détention d'armes à feu à des publics tels que les chasseurs ou les tireurs sportifs que vous avez évoqués, pour autant que des contrôles soient effectifs et que les personnes concernées appartiennent à une fédération ou à une association reconnue par les pouvoirs publics - ce qui est déjà le cas en France.
Nous voulons lutter contre tout type de trafic d'armes pouvant être utilisées par les terroristes ou par des criminels au sein de l'Union européenne.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80329|
« Les personnes handicapées peuvent être touchées dans leurs 5 sens, mais c'est un 6ème qui les délivre ; bien au-delà de la volonté, plus fort que tout, sans restriction, ce 6ème sens qui apparaît, c'est simplement l'envie de vivre. » A travers ces paroles, Grand corps malade a posé des mots sur une solide conviction, celle qui nous rassemble toutes et tous ce matin. La conviction que le handicap n'altère en rien la volonté d'un individu de trouver une place à part entière dans la société, de s'y accomplir, de s'y émanciper d'y participer, aussi. « Rien me concernant, sans moi », « rien pour moi, sans moi ».
Cette envie de vivre sa vie comme les autres, pour s'accomplir pleinement, doit rencontrer un engagement politique sans faille. Cet engagement, c'est celui de ce Gouvernement et c'est celui du Président de la République qui a fait le choix de réunir à l'Élysée cette conférence nationale du handicap.
1. Nous réunir dans ce lieu ne relève pas du symbole mais traduit une ambition. Celle d'emmener toute la société, l'ensemble des forces vives de la Nation, vers une société inclusive.
Ce fut l'un des axes forts du discours tenu ici même par le Président de la République en décembre 2014. Une feuille de route exigeante, 178 mesures, et derrière cela, l'ambition de construire ensemble une société inclusive.
Il ne s'agit pas d'un slogan, ni d'une simple promesse, mais d'un engagement : garantir à chacun, quelle que soit sa situation de handicap, la possibilité de vivre dignement et d'exercer sans entrave tous les droits que confère la citoyenneté. Le droit de voter, le droit de travailler, le droit d'accéder à des soins de qualité, le droit de recevoir un enseignement diversifié. Ces droits, qui appartiennent à tous, doivent pouvoir être exercés par chacun.
L'ambition de ce Gouvernement, c'est aussi de proposer des parcours et des soins adaptés, pour que plus personne ne soit contraint de rester « sans solution ». Notre ambition, c'est enfin de simplifier le quotidien des personnes en situation de handicap, notamment dans l'accès aux droits.
2. Depuis la conférence de décembre 2014, un chemin a été parcouru. Il s'agit aujourd'hui de le regarder ensemble, avec la même ambition d'avancer.
Les engagements ont été tenus. Le document de bilan qui vous a été remis en témoigne. Je tiens à saluer la mobilisation du secrétariat général du comité interministériel du handicap qui coordonne ces actions et veille à la bonne mise en uvre de ces engagements.
Chaque ministère est pleinement mobilisé. Les différents ministres auront l'occasion de témoigner leur engagement très fort dans les secteurs de l'éducation, de l'emploi ou du logement.
Je veux évidemment pour ma part revenir sur ce que nous avons réalisé dans le domaine des affaires sociales et de la santé. Les modes d'accompagnement des personnes handicapées ont été réformés en profondeur par la loi de modernisation de notre système de santé, avec le plan personnalisé de compensation du handicap et le plan d'accompagnement global. Les outils à destination des gestionnaires d'établissements ont été renforcés pour mieux adapter l'accompagnement à travers la récente réforme des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM). Enfin, le plan autisme a profondément amélioré l'accompagnement des personnes en situation de handicap.
Agir pour l'accompagnement, donc. Agir pour l'accès aux soins, aussi.
Nous avions pris l'engagement de faciliter la prise en compte du handicap en ville. C'est chose faite avec la mise en place de consultations dédiées aux personnes aux situations de handicap au sein des maisons de santé pluriprofessionnelles. Cette disposition, couplée à la vitesse exponentielle avec laquelle nous développons ces structures, va considérablement renforcer l'accès aux soins des personnes handicapées sur l'ensemble du territoire.
Nous avions pris l'engagement de développer la télémédecine et l'hospitalisation à domicile. J'ai la conviction qu'il s'agit là d'une voie incontournable pour renforcer la qualité et le confort dans la prise en charge des patients, particulièrement pour celles et ceux qui sont accueillis en établissement médico-social et en psychiatrie. Une évaluation de la montée en charge de l'hospitalisation à domicile dans les établissements médico-sociaux a été réalisée par mes services. Un rapport d'évaluation me sera remis d'ici peu et nous continuerons d'avancer.
Enfin, l'accueil dans les établissements de santé doit lui aussi être renforcé. La Haute autorité de Santé (HAS) a entamé l'élaboration d'un guide relatif à la prise en charge des personnes handicapées dans les établissements de santé. Celui-ci permettra d'améliorer les pratiques professionnelles et d'adapter l'organisation des soins.
3. Oui, il faut le dire, les actes et les réalisations sont là. Mais cette nouvelle donne ne peut être un prétexte à l'inaction. Au contraire, il nous faut poursuivre, amplifier le mouvement. Le sens de cette Conférence nationale du Handicap, c'est bien d'aller plus loin encore, en nous appuyant sur les réalisations de terrain qui montrent que oui « c'est possible ».
Je veux tiens à saluer l'ensemble des associations qui sont présentes ce matin et qui ont contribué à l'organisation de cet événement qui nous rassemble.
Toute la matinée, à travers différentes tables rondes, nous aurons à cur aborder l'ensemble des thématiques liées aux politiques du handicap. Logement, emploi, scolarisation : les expériences de chacun, la mobilisation des acteurs de terrain et leur capacité d'innovation sont déterminantes. Parce qu'elles contribuent à renforcer notre conviction qu'une société inclusive est possible, et parce qu'elles élargissent le champ des possibles.
Je souhaite donc que ces échanges nous permettent d'avancer encore, de ne rien éluder, de regarder en face les obstacles qui se présentent encore à l'application de certaines mesures pour les franchir ensemble.
Mesdames, messieurs,
« Ensemble », j'attache à ce terme un sens particulier s'agissant du sujet qui nous réunit ce matin. Parce que les politiques d'accompagnement des personnes handicapées nécessitent un engagement collectif pour se déployer. Mais aussi parce que pour certains, elles ne vont toujours pas de soi. Face à la volonté de certains de tourner en dérision les normes d'accessibilité des logements, et d'opposer l'intérêt des communes à l'épanouissement des personnes handicapées, c'est bien ensemble que nous marquerons notre détermination à continuer d'avancer.
Je vous souhaite une matinée riche en échanges et vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 24 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80330|
Mesdames, Messieurs,
Le 10 janvier dernier et dans les jours qui ont suivi, un accident s'est produit dans le cadre d'un essai clinique de Phase 1 réalisé dans et par la société BIOTRIAL à Rennes. Cet évènement, sans précédent dans notre pays, a entraîné le décès d'un homme, et l'hospitalisation de cinq autres volontaires, qui sont aujourd'hui tous rentrés chez eux. Mes pensées sont évidemment tournées vers Monsieur Guillaume Molinet, sa famille, ses proches, et les volontaires victimes de cet accident.
Dès que j'ai eu connaissance de cet accident, je me suis rendue sur place pour rencontrer les victimes et leurs familles, et m'assurer de leur prise en charge complète sur le plan sanitaire et social. Dans le cadre de cette prise en charge sanitaire, j'avais demandé au Directeur général de l'ARS d'identifier et de contacter les 90 volontaires ayant participé à cet essai depuis son lancement. Ils ont tous eu rendez-vous avec un neurologue et ont fait l'objet d'une IRM qui a permis de découvrir, chez l'un d'entre eux, un accident vasculaire cérébral. Ce volontaire se porte bien et ne présente pas de symptôme, mais cette situation interroge évidemment quant à sa relation avec la participation à l'essai j'y reviendrai.
J'ai par ailleurs immédiatement saisi l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et me suis engagée à la transparence la plus totale. Le 4 février dernier, je vous ai présenté un premier point de situation. Les inspecteurs de l'IGAS viennent de me remettre leur rapport final qui a fait l'objet d'une procédure contradictoire.
Entre temps, le comité scientifique spécialisé temporaire (CSST) de l'ANSM, qui avait lancé une procédure, a mis en évidence la probable responsabilité de la molécule quant à l'accident. Je rappelle par ailleurs qu'une procédure judiciaire est en cours sous l'autorité d'un juge d'instruction.
A la lumière du rapport qui m'a été remis par l'IGAS, je veux aujourd'hui vous présenter un plan d'action que je souhaite mettre en uvre quant à la réalisation d'essais cliniques en France.
I- La mission confiée à l'IGAS avait pour objet d'établir les conditions dans lesquelles il avait été fait application de la réglementation en matière de recherche biomédicale.
L'IGAS constate d'abord que l'Agence régionale de santé de Bretagne avait bien accordé à la société BIOTRIAL une autorisation de lieu répondant aux exigences requises.
Le rapport final confirme que les conditions dans lesquelles l'essai a été autorisé ne contreviennent pas à la réglementation dans son état actuel, même si des interrogations sont soulevées quant à l'appréciation du niveau de risque du produit par l'ANSM et le CPP, la latitude laissée aux opérateurs de la mise en uvre de l'étude et la répartition des rôles entre le laboratoire BIAL et BIOTRIAL.
En revanche, les inspecteurs estiment que la responsabilité du laboratoire BIAL et de BIOTRIAL est engagée à plusieurs titres.
- D'abord, quant au choix de la dose de la molécule BIA 10-2474 administrée aux volontaires.
- Ensuite, s'agissant du retard de l'information des autorités sanitaires. Selon les inspecteurs, la gravité de l'évènement survenu constitue un fait nouveau susceptible de compromettre la sécurité des volontaires. Par conséquent, cet accident aurait dû être déclaré sans délai à l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Or, les laboratoires n'ont procédé à une déclaration formelle que le jeudi 14 janvier, soit quatre jours après l'hospitalisation du premier volontaire, et trois jours après la décision de suspendre l'essai.
La responsabilité scientifique et éthique du laboratoire BIAL est par ailleurs engagée quant à son devoir de poursuivre les investigations relatives à la compréhension de l'accident.
Pour l'IGAS, la responsabilité de BIOTRIAL est par ailleurs engagée quant à la conduite de l'étude et la gestion de la crise.
- D'abord, la mission pointe l'absence de recherche d'informations en temps et en heure par le laboratoire sur l'état de santé du premier volontaire hospitalisé et la non suspension de l'administration du produit aux autres volontaires.
- Un second manquement majeur découle directement du premier, les inspecteurs ayant constaté que le laboratoire n'a pas formellement informé les autres volontaires de l'évènement survenu la veille. Cela ne leur a pas permis de confirmer de manière éclairée leur consentement à la poursuite de l'essai clinique.
Au-delà de ces manquements majeurs qui concernent la conduite de l'étude, les inspecteurs soulignent qu'après la suspension de l'étude le lundi 11 janvier, BIOTRIAL n'a pas mis en place de suivi renforcé et systématique des cinq autres volontaires, notamment sur plan neurologique. La mission souligne, enfin, des difficultés d'échanges d'informations entre BIOTRIAL et le CHU de Rennes.
La mission formule 19 recommandations pour mieux comprendre les causes de cet accident grave et reconsidérer le cadre de la protection des volontaires participant à des essais de première administration à l'homme. J'ai décidé de prendre en compte l'intégralité de ces recommandations.
II- Avant de vous présenter ce plan, je veux revenir sur la mise en uvre des actions que je vous avais présentées lors d'un point de situation le 4 février dernier.
L'ensemble des responsables de lieux d'essais cliniques de phase I se sont vu rappeler leurs obligations en matière de déclaration aux autorités sanitaires des évènements indésirables graves inattendus et des faits nouveaux survenus. J'avais adressé une instruction en ce sens aux Directeurs généraux ARS.
Par ailleurs, les promoteurs d'essais cliniques et investigateurs doivent dorénavant, à ma demande, déclarer tout évènement entraînant, dans le cadre d'un essai sur volontaire sain, l'hospitalisation de celui-ci, aux autorités sanitaires sans délai, comme un fait nouveau, et suspendre immédiatement l'étude jusqu'à ce que soit garantie la sécurité des volontaires. Ces mêmes volontaires doivent être clairement informés de la suspension de l'étude et des raisons de cette suspension. Leur consentement éclairé et écrit doit être obtenu avant toute reprise de l'étude.
Je constate d'ailleurs que ces nouvelles directives ont été appliquées à la lettre s'agissant d'un effet indésirable grave survenu il y a peu dans le cadre de l'essai EBOVAC.
Enfin, j'avais saisi Vytenis ANDRYUKATIS, Commissaire européen en charge de la santé, afin que soit engagée une réflexion pour renforcer la protection des volontaires sains dans les essais cliniques. A la suite de mon intervention, deux groupes de travail ont été installés au sein de l'Agence européenne du médicament dans cette optique.
III- J'en viens maintenant au plan d'action que je souhaite mettre en uvre à la suite du rapport définitif qui m'a été remis par l'IGAS.
Ce plan comporte quatre grands axes.
* Premier axe : conformément à la recommandation de l'IGAS, j'exige que BIOTRIAL fournisse un plan d'action garantissant que les manquements majeurs observés ne pourront pas se reproduire.
Ce plan d'action devra m'être remis sans délai. Il devra notamment comprendre les mesures de minimisation des risques telles qu'elles sont précisées par la mission dans son rapport, la mise à niveau des conditions de suivi des participants à la recherche, et le renforcement de la formation de ses personnels, particulièrement en matière de pharmacovigilance.
Si BIOTRIAL ne m'a pas transmis son plan d'action d'ici 1 mois, son autorisation de lieu de recherche pour essai de phase 1 sera suspendue. La réalité de mise en uvre de ce plan d'action fera l'objet d'une inspection conjointe de l'IGAS, de l'ARS Bretagne et de l'ANSM avant la fin de l'année.
* Deuxième axe : je veux que les 90 dossiers cliniques des volontaires sains concernés par l'essai fassent l'objet d'une expertise sanitaire indépendante.
Comme je l'ai dit, à la suite de l'accident, l'ensemble des volontaires ont été pris en charge sur le plan médical, y compris avec une IRM cérébrale. Ce suivi a permis de diagnostiquer un AVC chez un volontaire qui, comme l'indique l'IGAS, avait présenté des troubles visuels lors de sa participation à l'essai en novembre. Désormais, après le temps de la prise en charge, vient celui de l'expertise. Celle-ci sera confiée aux experts indépendants du Comité scientifique spécialisé temporaire (CSST) qui évalueront les 90 dossiers des volontaires. Par ailleurs, ces dossiers, anonymisés, seront également transmis au groupe d'experts européens que j'ai demandé à la Commission européenne et qui est d'ores et déjà au travail.
* Troisième axe : je veux renforcer les conditions d'autorisation des essais, notamment de première administration à l'homme.
En premier lieu, je demande à chaque directeur général d'agence régionale de Santé (ARS) d'inspecter cette année, en lien avec l'ANSM, tous les centres aujourd'hui autorisés à conduire des essais cliniques de leur région.
Ensuite, je veux renforcer les conditions dans lesquelles l'ANSM évalue les essais précoces chez l'homme. Je distingue trois priorités.
D'ores et déjà, l'ANSM devra transmettre, à la Direction générale de la Santé, un bilan mensuel de tous les effets indésirables graves inattendus notifiés dans ces essais de phase précoce, c'est à dire de phases 1 et 2.
Ensuite, je souhaite que les travaux d'amélioration de la gestion informatisée de ces essais cliniques soient accélérés, notamment pour renforcer la traçabilité des évènements indésirables pouvant survenir.
Enfin, je souhaite que d'ici la fin de l'année, une cellule dédiée aux essais précoces, notamment lorsqu'il s'agit de la première administration à l'homme, soit responsable de l'instruction, de l'évaluation finale et de la décision. La complexité de ces essais justifie une expertise pointue et du temps spécifique. Cette nouvelle organisation à l'ANSM devra en particulier garantir la possibilité d'un contact identifié et permanent à l'ANSM. Elle fera l'objet d'une mission d'appui de l'IGAS.
Déjà, la loi de modernisation de notre système de santé avait prévu de renforcer, par ordonnance, les conditions d'autorisation des essais cliniques. Celle-ci permettra la mise en place effective du tirage au sort des Comités de protection des personnes (CPP). Afin de renforcer leur indépendance et d'améliorer leur fonctionnement, un secrétariat national des CPP sera installé auprès de la Direction générale de la Santé. L'industriel n'aura plus de contact direct avec les CPP et aura pour unique interlocuteur l'ANSM, auprès de laquelle il déposera son dossier. Celle-ci effectuera le tirage au sort du CPP et transmettra cette information au secrétariat national. Par volonté de transparence, l'ensemble des avis rendus par le CPP sur un protocole sera désormais à disposition des volontaires de l'essai. L'ordonnance sera publiée avant le 20 juin, et le projet de loi la ratifiant sera transmis au Parlement dans la foulée.
Enfin, la mission a relevé que les obligations d'information des autorités sanitaires qui pèsent sur le promoteur au moment où il dépose son projet ne sont pas suffisantes dans la législation actuelle. Je vais donc clarifier les règles. Le projet de loi de ratification de l'ordonnance introduira des mesures en ce sens. Par ailleurs, les laboratoires devront garantir l'exhaustivité des données relatives à une étude en cours mises à disposition des autorités sanitaires en cas d'impératif de santé publique. D'ici la fin de l'année, des dispositions réglementaires spécifiques aux essais de phase 1 garantiront les délais de signalement des effets indésirables des faits nouveaux, et le fait qu'un essai de première administration à l'homme soit systématiquement considéré comme un essai à haut risque.
* J'en viens au quatrième et dernier axe de ce plan : je vais poursuivre mon action auprès de la Commission européenne.
L'action européenne doit porter tant sur la gestion des crises que l'analyse des pratiques. Elle doit répondre aux trois principes fondamentaux d'indépendance de transparence et d'harmonisation.
Je l'ai indiqué, deux groupes de travail ont été mis en place par l'Agence européenne du médicament. Ils travaillent aux évolutions nécessaires des lignes directrices européennes en matière de recherche sur le volontaire sain. Comme je vous l'ai dit, l'intégralité des examens, évidemment anonymisés, réalisés chez les volontaires de l'essai BIOTRIAL, leur seront transmis. Cela nous permettra de bénéficier d'une expertise complémentaire indépendante sur ces dossiers, et leur donnera un éclairage pour leurs travaux en cours.
Deuxième point, je vais proposer au HMA, le comité des agences nationales du médicament, que soit mises en place des modalités harmonisées d'évaluation et de gestion d'un accident grave comme celui de Rennes au niveau européen. Je souhaite d'autre part que soit menée une analyse comparative des pratiques d'autorisation des essais précoces dans les états membres européens.
Mesdames, Messieurs,
Quatre mois après l'accident dramatique de Rennes, le rapport de l'IGAS permet d'établir les responsabilités et d'identifier les manquements qui ont conduit à cet évènement. Le plan d'action que je viens de vous présenter en tire toutes les conséquences.
Le rapport de l'IGAS, tout comme le plan d'action, sont d'ores et déjà en ligne, conformément à l'exigence de transparence pour laquelle je me suis engagée.
Je vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 24 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80331|
Monsieur le Député, votre question porte sur deux points essentiels : d'une part, la transparence, de l'autre, ce que l'on appelle la «mixité» des accords de commerce, qui conditionne la consultation ou non des parlements nationaux en plus de celle du Parlement européen.
En ce qui concerne la transparence, M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger, Matthias Fekl, a eu l'occasion de rappeler à de nombreuses reprises devant l'Assemblée que le gouvernement souhaitait qu'elle soit totale. Nous avons commencé par demander à la Commission européenne de rendre publics les mandats obtenus pour négocier le TTIP et le TISA au nom des vingt-huit États membres, afin que les parlementaires et les citoyens puissent y avoir accès.
S'agissant de la mixité des accords en question, nous considérons que le CETA, en particulier, est mixte car sa ratification emporte des conséquences sur notre législation interne. Par conséquent, il doit être ratifié non seulement par le Parlement européen, comme c'est le cas pour tous les accords de commerce, mais également par les parlements nationaux.
Le Parlement européen et la Commission européenne auront à se prononcer mais nous sommes fondés à demander une ratification par l'ensemble des parlements nationaux. Concernant le TTIP, qui est encore en cours de négociation et pour lequel nous sommes très loin d'aboutir à un accord, il est absolument évident qu'il devra être ratifié par l'ensemble des parlements nationaux, donc par l'Assemblée nationale.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, votre question va me donner l'occasion de rectifier certaines informations diffusées au cours des dernières semaines. Je tiens d'abord à vous demander d'excuser l'absence de Matthias Fekl, secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, qui est en déplacement à Hong Kong.
La Commission européenne a manifesté en 2015 son souhait de voir rapidement disparaître une centaine d'accords de protection des investissements qui avaient été conclus entre les États membres de l'Union européenne, à l'époque où celle-ci n'en comptait que quinze, et des pays d'Europe centrale et orientale. La France est partie à douze de ces accords dont la Commission considère qu'ils contreviennent au droit communautaire. La fin de ces accords est l'occasion d'appliquer, au sein même de l'Union européenne, les principes que la France, notamment par la voix de Matthias Fekl, a défendus de manière ambitieuse dans les négociations sur les accords de libre-échange, en prônant - avec succès, au demeurant - la rupture avec l'ISDS, c'est-à-dire avec l'arbitrage privé.
Les principes que nous souhaitons voir appliqués sont la transparence, la lutte contre les conflits d'intérêts, la possibilité d'un appel et la protection du droit à réguler des États. Je souligne d'ailleurs que la Cour de justice des investissements, l'Investment Court System - ICS - a été accepté par le Canada et le Vietnam. À terme, l'objectif est de fonder une cour multilatérale des investissements, qui fait cruellement défaut dans la mondialisation.
À l'occasion de la fin des accords de protection des investissements intracommunautaires, la France a soutenu, dans le cadre des groupes de travail techniques du Conseil européen, un document ouvrant plusieurs pistes pour créer un mécanisme transitoire conforme aux principes de l'ICS, en vue de l'établissement d'une cour de justice des investissements au sein de l'Union européenne.
Un mécanisme spécifique est nécessaire dans des circonstances particulières, comme la défaillance de la justice d'un État membre, que la Commission identifiera très précisément. Continuer d'appliquer le droit communautaire sans créer de mécanisme spécifique serait une occasion manquée. Pour l'heure, les principes régissant l'ICS sont absents du droit communautaire aujourd'hui.
Nous appliquons donc aux accords conclus au sein de l'Union européenne les principes que nous avons voulu appliquer dans le cadre des accords multilatéraux. Il s'agit, non pas d'un arbitrage privé, mais d'un arbitrage public.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, rassurez-vous : qu'il s'agisse du CETA, l'accord avec le Canada, ou du TAFTA, l'accord en cours de négociation avec les États-Unis, la France défend les mêmes principes et lignes rouges.
Concernant la négociation avec les États-Unis, que vous avez évoquée, nous avons plusieurs lignes rouges. Premièrement, l'offre américaine doit être beaucoup plus substantielle qu'elle ne l'est aujourd'hui. On ne peut pas, d'un côté, demander à l'Union européenne d'ouvrir de nombreux marchés quand, de l'autre, les États-Unis ne prennent aucun engagement pour ce qui est, par exemple, d'ouvrir les marchés publics subfédéraux. Deuxièmement, nous considérons que certaines règles européennes en matière de sécurité sanitaire des aliments, d'environnement, de services publics ou encore en matière sociale ne doivent pas être remises en cause par un accord de commerce. Troisièmement, nous souhaitons un engagement clair en faveur de la préservation des acquis d'autres négociations commerciales, comme la protection des indications géographiques, qui sont fondamentales pour notre agriculture.
Or, dans le cadre de la négociation du CETA, ces lignes rouges et ces engagements ont été respectés. Le CETA n'est donc pas le TAFTA, d'abord parce que celui-ci n'est aujourd'hui qu'un projet d'accord en cours de négociation et que, comme l'a dit M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur à plusieurs reprises, nous sommes loin d'être parvenus à définir la base d'un accord. Ensuite, nous avons obtenu, dans le cadre du CETA, de modifier le projet initial de cour d'arbitrage privée.
Nous considérons donc - pour reprendre, en l'inversant, votre formule - que non seulement le CETA n'est pas le cheval de Troie du TAFTA, mais qu'il représente même un contre-modèle : l'accord économique et commercial global de l'Union européenne avec le Canada est plutôt positif, surtout comparé aux mesures défendues par certains dans le cadre de la négociation du TAFTA.
Nous souhaitons que le CETA soit reconnu comme un accord mixte ; il sera soumis à votre assemblée pour approbation. Nous souhaitons, dans le cadre de la négociation du TAFTA avec les États-Unis, obtenir les garanties que nous avons obtenues dans le cadre du CETA.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, je vous demande de considérer que nous défendons nos positions en toute bonne foi - c'est, du reste, ce que pensent nos partenaires dans ce débat au sein de l'Union européenne.
Les accords de protection des investissements - vous avez fait référence à des articles de presse à ce sujet - que j'ai évoqués tout à l'heure existaient dès avant que certains pays rejoignent l'Union européenne. Ces accords ont été conclus par l'Europe des Quinze et des pays d'Europe centrale et orientale qui ont à présent rejoint l'Union européenne. Ils ne sont pas conformes au droit communautaire : il faut donc les transformer pour leur donner une base juridiquement cohérente avec le fait que ces pays sont devenus membres de l'Union européenne.
Concernant l'arbitrage, nous ne soutenons absolument pas des dispositions que nous contestons par ailleurs. Nous voulons que les mécanismes d'arbitrage qui seront mis en place dans le cadre de ces nouveaux dispositifs de protection des investissements soient publics et non privés ; nous voulons qu'ils respectent les principes que nous défendons par ailleurs dans le cadre de la négociation avec les États-Unis, et que nous avons défendus dans le cadre de la négociation de l'accord avec le Canada, savoir la transparence et l'absence de conflits d'intérêts.
C'est sur cette base que la France, avec un certain nombre d'autres États membres, a remis des propositions à la Commission européenne. Nous souhaitons notamment instaurer une institution qui pourrait, à terme, être une cour permanente d'arbitrage au sein de l'Union européenne.
En ce qui concerne les investissements, et pour ce qui est de l'Union européenne, nous voulons éviter que le règlement des conflits éventuels soit dérogatoire du droit public - en l'occurrence, de l'arbitrage public. C'est notre position, qu'il s'agisse des accords internationaux, ou de la protection des investissements à l'intérieur de l'Union européenne, c'est-à-dire dans le cas d'un litige entre un investisseur européen et un État membre de l'Union européenne.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, vous avez raison de souligner à quel point les négociations sur le projet de traité appelé, en anglais, Trade in services agreement, c'est-à-dire «accord sur le commerce dans les services», sont importantes. Vingt-trois parties sont impliquées dans ces négociations - plus précisément, vingt-deux pays et l'Union européenne, c'est-à-dire l'ensemble de ses vingt-huit membres. C'est très important pour notre économie car l'expertise européenne - plus particulièrement française -excelle dans de nombreux domaines des services : les services financiers, les transports, la logistique, etc. Nos entreprises ont donc beaucoup à y gagner.
Dans le même temps, cette question est très sensible, comme vous l'avez dit, car lorsqu'on parle de services, on parle aussi de services publics. Des questions très sensibles liées à la souveraineté des États, ou à l'emploi, peuvent aussi se poser. Il faut donc de la transparence.
Nous avons demandé que certains documents, tels que le mandat de négociation, soient rendus publics : cela a été fait le 9 mars 2015. Vous demandez, à présent, que ces documents soient disponibles en français : nous relayons cette demande auprès de la Commission européenne. Ces textes sont déjà très techniques ; le fait de ne pouvoir y accéder dans sa propre langue complique encore le contrôle par les parlementaires, et par les parties intéressées dans le monde économique ou la société civile.
Pour nous, il ne doit pas y avoir de programme caché - cela n'aurait aucun sens. Il faut donc absolument que toutes les données de cette négociation soient rendues publiques. Certains points sont très sensibles : la protection des services audiovisuels, des services publics en général, et même du droit à réguler des États - ce dernier point est mentionné à la troisième page du mandat de négociation. Nous sommes donc tout à fait disposés - Matthias Fekl en particulier - à rendre compte, à chaque étape, devant l'Assemblée nationale, de chacun des éléments de cette négociation, de chacune des positions que nous défendons auprès de la Commission européenne et de nos partenaires, de chacune des garanties que nous voulons obtenir pour que cet accord sur les services soit bénéfique à notre économie, et ne mette pas en cause le droit à réguler de la France ni de l'Union européenne.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, vous avez posé deux questions. La première porte sur les indications géographiques protégées agricoles, la seconde sur les indications géographiques protégées non agricoles.
Comme vous l'avez dit, la protection des indications géographiques est absolument décisive. Les traités sont importants pour cela, car ils améliorent cette protection. Ils protègent les appellations les plus exposées aux risques d'usurpation. Les indications géographiques sont un instrument de promotion et de valorisation des produits d'un terroir et de leur renommée. Leur enregistrement au niveau international permet de leur accorder une protection contre toutes les usurpations, et d'envisager leur exportation.
La France a obtenu des succès précieux, d'abord dans le cadre du CETA, comme vous l'avez dit, mais aussi avec la révision de l'arrangement de Lisbonne, qui étend la protection des indications géographiques dans vingt-huit États. Cet acte est modernisé, et plus ouvert ; il traduit l'intérêt de nombreux pays pour notre approche des savoir-faire et de la qualité.
Pour ce qui est du CETA, comme vous l'avez dit, 42 indications géographiques ont été reconnues, outre les vins et spiritueux - qui étaient déjà couverts depuis 2004. C'est un très grand progrès : appuyons-nous sur ce modèle pour mener la négociation avec les États-Unis. En ce domaine, en effet, il reste beaucoup de chemin à parcourir, et le gouvernement restera ferme.
Deuxièmement, le gouvernement soutient l'instauration, au niveau européen, d'un système unique de protection des indications géographiques pour les produits non agricoles. Cela permettrait de valoriser les productions industrielles et artisanales et de renforcer la confiance des consommateurs. La France avait accueilli favorablement la publication du Livre vert de la Commission européenne en 2014. Le Parlement européen - vous l'avez dit - a invité en octobre 2015 la Commission européenne à faire une proposition législative ; la France s'exprime régulièrement en faveur d'une relance de ces travaux. Malheureusement, il est vrai que pour l'instant la Commission européenne n'avance pas.
Nous sommes donc d'accord avec vous : cette législation serait tout à fait complémentaire et cohérente avec ce que nous avons obtenu jusqu'ici au sujet des indications géographiques ; les enjeux sont les mêmes en matière d'emploi et de défense des savoir-faire de nos territoires. Nous continuerons à plaider en ce sens.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, vous avez tout d'abord évoqué des documents qui ont fuité, transmis par une ONG à la presse, lesquels relataient l'état des négociations entre l'Union européenne et les États-Unis. Mais ces documents ont simplement confirmé ce que le gouvernement français ne cesse de répéter, à savoir que celles-ci sont aujourd'hui déséquilibrées car il y a, d'un côté, un mandat de négociation qui permet à l'Union européenne de s'engager dans de nombreux domaines et, de l'autre, une offre des États-Unis qui n'est pas à la hauteur de ce que nous attendions de la négociation.
J'ajoute que rien dans ces informations qui ont fuité ne met en cause les lignes rouges que la France défend - qu'il s'agisse des services publics, des investissements ou encore des indications géographiques, c'est-à-dire tous les sujets que nous venons d'évoquer depuis le début de cette séance de questions.
Vous me demandez comment le gouvernement entend informer et associer le Parlement à chaque étape de la négociation. D'une part, nous avons demandé que les documents de négociation puissent être consultés beaucoup plus facilement par les parlementaires. Vous savez qu'initialement étaient prévues des salles de consultation, à Bruxelles pour les députés européens, mais réservés à ceux d'entre eux qui avaient des responsabilités au sein de la commission du commerce international, et, pour les parlementaires français, il fallait se rendre à l'ambassade des États-Unis.
Nous avons dit que ce n'était pas convenable ni même concevable, et nous avons obtenu que les consultations soient désormais possibles dans des bâtiments du secrétariat général des affaires européenne, qui dépendent donc du gouvernement français.
D'autre part, Matthias Fekl a mis en place un comité associant les parlementaires. Il réunit régulièrement ce comité auquel participent nombre d'entre vous et de vos collègues ainsi que des représentants d'ONG, et devant lequel il rend compte régulièrement de l'état des négociations, des documents disponibles, des positions défendues par la France et de celles des autres États membres, et des difficultés que nous rencontrons dans cette négociation.
Je tiens donc vraiment à vous assurer que, pour nous, un accord commercial entre l'Union européenne et les États-Unis ne peut se négocier que dans la transparence et ne pourra de toute façon voir le jour qu'avec le soutien de l'Assemblée nationale.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, vous avez raison de dire que, compte tenu de l'importance d'une telle négociation et des préoccupations qu'elle soulève tout à fait légitimement chez nos concitoyens et dans les secteurs économiques concernés, il ne peut y avoir que la plus grande clarté et la plus grande transparence en la matière.
Vous avez soulevé quatre questions.
La première concerne l'arbitrage. Vous savez que Matthias Fekl a défendu une position maintenant reprise par la Commission européenne : il ne peut y avoir de cour d'arbitrage privée. L'ancienne proposition, dite «ISDS», a donc été mise de côté, et c'est aujourd'hui la procédure de l'arbitrage public qui est défendue, non seulement par la France mais par l'ensemble de l'Union européenne.
Vous avez aussi soulevé la question des normes, entre autres sanitaires, normes protectrices pour lesquelles nous avons obtenu des garanties au sein de l'Union : pas de poulet chloré, pas de boeuf aux hormones. Les normes de ce type devront être respectées dans le cadre d'un accord de commerce international, d'autant plus que ce sera aussi un facteur de protection de nos productions de qualité - lesquelles impliquent évidemment des coûts supplémentaires -, en empêchant une concurrence déloyale du fait de l'autorisation de normes sanitaires au rabais.
Le sujet, très sensible, des données personnelles, n'avait pas encore été évoqué. Le numérique fait partie aujourd'hui en effet des échanges économiques et la protection de ces données ne relève pas exactement des mêmes modes de régulation aux États-Unis. C'est pourquoi l'Union européenne veut que les règles qu'elle adopte en ce domaine ne soient pas remises en cause par cet accord.
S'agissant des indications géographiques, nous nous rejoignons parfaitement. Je m'en suis d'ailleurs déjà expliqué.
Enfin, vous avez souligné un dernier point : l'association du Parlement. Outre le comité qu'il a créé, Matthias Fekl était, il y a encore quelques jours, devant la commission compétente, et il est prêt à se rendre autant que nécessaire devant toutes les commissions concernées de votre assemblée car le sujet ne concerne pas qu'une seule d'entre elles : il s'agit aussi d'agriculture et d'autres volets de l'économie, sans oublier, évidemment, les affaires étrangères.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, votre question me donne l'occasion de revenir sur ce qu'il en est de ce mécanisme d'arbitrage. Le document de travail rédigé par la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Autriche et la Finlande, auquel vous avez fait référence, a en effet été débattu dans les enceintes techniques du Conseil. Son objectif est de proposer une solution de compromis en vue de démanteler les accords de protection des investissements encore en vigueur entre les États membres de l'Union européenne et que la Commission juge contraires aux traités européens pour les raisons que j'ai déjà rappelées - lesdits accords ont été signés antérieurement à l'adhésion de certains des États concernés.
Dans ce contexte, les propositions formulées par la France et par ses partenaires sont parfaitement cohérentes avec les positions défendues à propos de l'ISDS dans le cadre du partenariat transatlantique et des autres accords commerciaux de l'Union européenne. Il s'agit en effet de réfléchir à l'instauration d'un véritable mécanisme juridictionnel complémentaire des tribunaux des États membres et qui permettrait de renforcer l'efficacité du marché intérieur. Les principes de base qui fondent ce marché étant encore souvent malmenés, il faut donc améliorer l'environnement juridique du monde des affaires au sein de l'Union tout en se conformant au droit communautaire.
Notre démarche s'inscrit pleinement dans cet objectif et ne vise en aucun cas à instaurer un ISDS au sein de l'Union européenne, puisque nous contestons ce mécanisme dans les négociations sur les autres accords de commerce international. Bien au contraire, il s'agirait d'un mécanisme d'arbitrage public.
Il y a eu des inexactitudes dans la façon dont cette question a été présentée. Les choses sont claires : la démarche de la France est de promouvoir partout, et dès que possible, les principes qui président déjà à la rupture avec l'arbitrage privé entre investisseurs et États dans les accords de libre-échange, et nous poursuivons la même logique au sein de l'Union européenne.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, je tiens à vous rassurer sur cette question, à laquelle les collectivités territoriales - et je le comprends - sont très sensibles. La position de la France, qui est aujourd'hui celle de l'Union européenne, est sans ambiguïté : il s'agit de préserver notre capacité à créer et maintenir des services publics nationaux et locaux. C'est une ligne rouge ; c'est l'un de nos impératifs.
Défendre les services publics est fondamental pour l'Union européenne. La France et d'autres États membres ont défendu cette position dans toutes les négociations commerciales, au sein de l'OMC comme dans les négociations visant à conclure des accords bilatéraux. Ni le partenariat transatlantique, ni l'accord général sur le commerce des services, ni aucun autre projet d'accord en négociation ne feront exception à cette règle.
Le point 20 du mandat de négociation du TTIP exclut d'ailleurs explicitement les services publics des négociations. En outre, plusieurs dispositions expresses précisent que les accords devront garantir le droit des parties à prendre les mesures que celles-ci estiment nécessaires pour atteindre les objectifs légitimes de protection de la santé, de la sécurité, du travail, des consommateurs, de l'environnement ou de la diversité culturelle.
Nous défendrons ces mêmes principes dans les négociations relatives à l'accord général sur le commerce des services. Cette liste n'est d'ailleurs qu'indicative, en raison du principe selon lequel les collectivités territoriales régulent elles-mêmes leurs services publics. Une négociation commerciale ne saurait remettre en cause cette libre administration, principe consacré par la Constitution dans son article 72. Cela n'est du moins ni l'intention de la Commission européenne ni celle des mandats de négociation que les États membres lui confient.
La protection des services publics constitue donc pour nous une position de principe, une ligne rouge à ne pas franchir dans la négociation et un acquis des négociations commerciales antérieures. La France s'est toujours assurée qu'un accord commercial de l'Union européenne ne puisse pas mettre en cause la capacité soit de l'Union elle-même, soit d'un État membre, soit d'une collectivité territoriale, à réguler ses services publics, en fonction d'objectifs qui sont tout simplement ceux de l'intérêt général.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, je vous remercie d'avoir mentionné les acquis de la négociation menée par la France au sein de l'Union européenne pour promouvoir la transparence et plusieurs éléments importants pour notre pays.
Quant à la question de l'arbitrage, elle est très importante car, aujourd'hui, plus de 3.500 accords de protection des investissements dans le monde prévoient un ISDS, c'est-à-dire un mécanisme d'arbitrage privé. On voit bien pourquoi ces accords ont été signés : dans certaines parties du monde, les investisseurs internationaux considéraient que le climat des affaires et l'État de droit n'étaient pas suffisamment garantis.
L'Union européenne, en revanche, estime que, sur notre continent, les investisseurs - européens ou internationaux - peuvent s'appuyer sur l'État de droit, car celui-ci existe bel et bien. Il n'est pas envisageable qu'un système d'arbitrage privé devienne supérieur aux règles que des États auraient fixées pour tel ou tel secteur de l'économie. C'est pourquoi ces mécanismes ont contribué à éroder la capacité des États à réguler librement.
Vous avez mentionné le recours de Philip Morris contre du gouvernement australien, visant le projet d'un paquet de cigarettes neutre. On pourrait aussi mentionner la procédure qu'a intentée l'entreprise Vattenfall contre la politique énergétique de l'Allemagne, que ce pays avait librement choisie. Divers conflits d'intérêt se sont multipliés dans ces enceintes arbitrales, où la transparence n'était pas assurée. Dès le début de l'année 2015, Matthias Fekl a présenté, d'abord avec l'Allemagne, puis avec d'autres États, une position en rupture avec l'arbitrage privé. Il a identifié plusieurs points forts, tels que la transparence, la préservation du droit à réguler, la lutte contre les conflits d'intérêts et l'instauration d'un appel. La France est le seul État membre à avoir adressé une proposition officielle sur ce sujet. La Commission l'a reprise dans sa quasi-intégralité, ce qui fait de notre proposition un consensus européen.
Cette proposition consiste à créer un système de cour de justice des investissements, qui remplace les arbitres privés par des juges publics, rémunérés par les États, et non plus par les parties au litige entre un investisseur et un État. De plus, elle instaure des exigences éthiques renforcées, et un mécanisme d'appel est créé. Ce système, proposé aux Canadiens, a été repris en grande partie dans le CETA. C'est un pas décisif.
Non seulement les Canadiens ont intégré ce nouveau dispositif, mais ils ont aussi accepté de travailler pour établir à terme une cour multilatérale des investissements, dont l'ICS soit être le modèle. C'est pourquoi nous défendons la même position pour le TTIP.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, nous devons partir d'un constat, celui de la paralysie de l'Organisation mondiale du commerce. Le cycle de Doha, que l'on avait appelé «cycle du développement», dure depuis 2011 et n'est toujours pas conclu. La France est mobilisée pour redynamiser les négociations, face au blocage de certains pays, notamment les pays émergents. Force est de constater, cependant, que ces blocages persistent.
C'est en réponse à cette paralysie que les négociations commerciales bilatérales ou régionales se sont multipliées. Il est vrai que ces négociations font peser un risque sur l'unité des règles du commerce mondial et sur l'inclusion des pays les plus pauvres dans ces accords. Il faut avoir conscience de cet élément, et l'intégrer pleinement à l'analyse.
Les enjeux sont immenses : il s'agit de défendre nos valeurs dans la bataille pour la définition des normes en matière de protection du consommateur, des droits sociaux, des droits de la santé ou de l'environnement. Il est évident que ces négociations n'ont de sens que si elles complètent et renforcent l'ordre multilatéral. Ainsi, la France estime qu'il serait souhaitable de négocier l'accord TISA sur les services dans un cadre multilatéral, dès lors que lorsque les conditions seront réunies pour que tous les pays puissent en bénéficier.
Par ailleurs, l'Union européenne s'engage fortement en faveur des pays en développement. En juillet 2015, lors de la conférence d'Addis-Abeba sur le financement du développement, elle a indiqué qu'elle s'engageait à rester le marché le plus ouvert aux exportations des pays en développement. L'Union européenne importe près de 860 milliards d'euros de biens des pays en développement chaque année. Son marché est le plus ouvert aux exportations des pays les moins avancés.
Mais elle tente aussi d'apporter un soutien aux pays ACP, en introduisant certaines flexibilités, comme l'exclusion des produits sensibles - jusqu'à 25% des lignes tarifaires - ou la libéralisation progressive, jusqu'à vingt ans. L'Union européenne négocie donc avec des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique des accords de partenariat économique qui présentent une asymétrie favorable aux pays en développement. De nombreuses lignes restent protégées pour ces pays, où les réductions des droits de douane sont offertes pour de très longues périodes. En outre, ces accords sont tous assortis d'un volet relatif au développement.
La France est donc mobilisée pour que ces pays ratifient de tels accords régionaux, afin de sécuriser leur accès préférentiel au marché européen, sur le long terme.
Madame la Députée, vous avez soulevé un sujet très vaste. Nous partageons votre préoccupation pour que les pays les moins avancés, les plus pauvres des pays en développement, ne soient pas les laissés pour compte des nouvelles règles des échanges commerciaux internationaux.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80332|Madame la Présidente de la commission des affaires européennes, Mesdames et Messieurs les Députés,
je me réjouis, tout d'abord, d'être devant vous cet après-midi afin de participer à ce débat relatif à la mise en oeuvre du plan Juncker, sur la base du rapport d'information de MM. Ramzy Hammadi et Arnaud Richard, dont je tiens à saluer l'excellent travail. Je tiens également à remercier la commission des affaires européennes et sa présidente, d'avoir inscrit ce sujet à l'ordre du jour de votre assemblée, quelques jours seulement avant la publication par la Commission européenne de son rapport d'évaluation à mi-parcours du plan Juncker, dont l'examen par les chefs d'État et de gouvernement est prévu lors du prochain Conseil européen des 28 et 29 juin.
L'Europe avait besoin du plan Juncker : depuis la crise financière de 2008, l'Union européenne connaissait des niveaux beaucoup trop faibles d'investissement public et privé, situation préjudiciable à son avenir économique comme à son potentiel de croissance.
C'est pourquoi le président de la République en avait fait son cheval de bataille lors du Conseil européen de juin 2012, comme l'a rappelé Gilles Savary.
Certes, mais je n'ai évoqué que la demande du président de la République portant sur le soutien à l'investissement et à la croissance.
Une première décision avait alors été prise : augmenter de 10 milliards d'euros le capital de la BEI pour lui permettre de financer de plus nombreux projets, à hauteur de 60 milliards d'euros. Ces aides ont d'ailleurs entraîné, dans notre pays, d'une augmentation très conséquente des prêts accordés par la BEI, j'y reviendrai.
Toutefois, le déficit d'investissement public et privé dans l'Union européenne restait trop important. Prenons les chiffres de la fin 2014 : alors que le produit intérieur brut et la consommation étaient pratiquement redescendus aux niveaux de 2007, le montant total des investissements était encore inférieur de 15% à celui constaté en 2007. Nous n'étions donc pas vraiment sortis de la crise. Certes, dans nombre d'États membres de l'Union européenne, la croissance redémarrait - d'ailleurs, cette tendance se confirme -, mais l'investissement et donc la préparation de l'avenir prenaient du retard, tout comme le soutien à l'activité et à l'emploi.
C'est pourquoi la mise en oeuvre urgente d'un plan d'investissement massif dans l'Union européenne, à partir de 2012, dès l'élection du nouveau président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, avait été une demande extrêmement pressante de la France. La feuille de route économique de l'Union européenne ne pouvait en effet se résumer au seul pacte de stabilité et de croissance, c'est-à-dire à la consolidation budgétaire, même si celle-ci est nécessaire.
Aujourd'hui, avec le président Jean-Claude Juncker, nous sommes parvenus à bâtir un triptyque combinant les objectifs de consolidation budgétaire, mais à un rythme compatible avec la situation de chacun des États membres, la conduite de réformes - et nous en menons, parfois parce qu'elles ne l'ont pas été auparavant - et, enfin, le soutien aux investissements.
L'Europe doit en effet se mobiliser pour l'économie réelle en permettant à ses entreprises, à ses industries ainsi qu'à ses acteurs publics d'investir dans les domaines déterminants pour l'avenir : le soutien à l'innovation, la modernisation de l'appareil productif et son adaptation aux nouveaux défis écologique et numérique.
En 2014, la France a donc défendu résolument, auprès du nouveau collège des commissaires, la priorité à la croissance et aux investissements. Puis, elle a logiquement soutenu la proposition présentée par le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, d'engager ce plan pour l'investissement en Europe.
L'idée du plan Juncker repose sur un objectif simple : permettre le financement de davantage de projets d'investissements publics et privés, notamment de projets plus risqués que ceux jusqu'à présent soutenus par la BEI, par d'autres banques ou par des fonds d'investissement.
La crise financière a en effet accru l'aversion des investisseurs pour les risque et un nombre considérable de projets, pourtant potentiellement générateurs de forte valeur ajoutée et d'emplois, se sont trouvés en défaut de financement, à cause du niveau de garanties exigé.
Telle est la vocation spécifique du plan Juncker et du FEIS : permettre le financement de projets plus risqués - parce que souvent plus novateurs et portant sur des domaines stratégiques pour l'avenir -, grâce à la garantie du budget européen, en s'appuyant sur l'expertise de la BEI et d'un comité d'investissement créé spécifiquement pour examiner et sélectionner les projets.
En accord avec le Parlement européen, qui a eu à se prononcer très rapidement sur le règlement européen portant création du FEIS, des priorités ont été identifiées : les secteurs les plus stratégiques pour l'avenir, à savoir la recherche, l'innovation, l'énergie, les infrastructures, les technologies de l'information et de la communication, la protection de l'environnement ainsi que la promotion du capital humain.
Même s'il faut attendre quelques jours pour que la Commission européenne publie un document totalement complet, quel bilan peut-on tirer, en ce milieu d'année 2016 ?
D'abord, l'adoption des instruments juridiques et la mise en place du FEIS et des comités d'investissement ont été très rapides. C'était important, quand on connaît la lenteur que peuvent parfois prendre les décisions européennes à se concrétiser.
Ensuite, le plan Juncker s'est, à son tour, déployé très rapidement. À l'heure où nous débattons, il fonctionne et finance des projets. Il est vrai que, lors de sa création, un doute subsistait à cet égard. Je me souviens de nos échanges et de nos interrogations, dans cette assemblée, juste après sa présentation par Jean-Claude Juncker : quelle serait la réalité du mécanisme ? allait-il fonctionner ? à quelle vitesse serait-il mis en oeuvre ?
Aujourd'hui, des projets ont pu être lancés grâce au plan Juncker, on peut visiter les sites où ils sont développés et rencontrer les acteurs qui les portent.
Au 19 mai 2016, étaient recensés 249 décisions d'approbation de projet prises par les instances de la BEI et du FEIS. Cette dénomination «approbation de projets» implique des prêts de la BEI, des prises de participation sous forme de garanties ou d'entrées au capital, accordées soit à des entreprises - grandes ou moyennes -, soit à des fonds d'investissement, soit à des consortiums regroupant des acteurs privés et publics, soit même à des acteurs publics. La montée en puissance du plan se déroule donc conformément à la feuille de route initiale.
En termes de montants, les projets approuvés engagent 12,8 milliards d'euros de financements, essentiellement sous forme de prêts, permettant de mobiliser 100 milliards d'euros d'investissements, soit 32% de l'objectif initial du plan, fixé à 315 milliards d'euros. Au terme de cette phase de lancement, les montants mobilisés devraient croître encore plus vite, avec un effet de levier encore plus important.
Les chiffres que je viens de vous communiquer portaient sur l'ensemble de l'Union. En France, quels sont les résultats observés ?
D'abord, notre pays est le deuxième bénéficiaire en nombre de projets approuvés dans le cadre du FEIS. Trente-trois ont été retenus : dix-sept sur le volet PME porté par le FEIS et seize sur le volet infrastructures et innovation, porté directement par la BEI. La France est en outre le premier pays bénéficiaire pour ce second volet.
Notre pays est surtout le premier pays bénéficiaire en termes de montant total des projets approuvés : 2,3 milliards d'euros d'engagements pour des projets représentant un montant total de 12,4 milliards d'euros d'investissements. Ces projets, grâce à la contribution du plan Juncker, peuvent donc être montés. Il convient alors de comptabiliser non seulement l'apport direct au titre de ce plan, qui prend généralement la forme d'un prêt de la BEI à un taux extrêmement avantageux, mais également les investissements supplémentaires que cela permet ; en effet, l'accord du FEIS entraîne la participation au projet d'autres banques et investisseurs, privés ou publics.
Un tiers des financements identifiables portent sur des montants inférieurs ou égaux à 50 millions d'euros, ce qui répond à la volonté initiale d'encourager des investissements plus risqués, et pas seulement des grands projets engageant plusieurs centaines de millions d'euros.
Par ailleurs, le secteur de l'industrie représente 3% des projets et 25% des financements.
Dans le même temps, en dehors du plan Juncker, le volume de prêts classiques obtenus par la France auprès de la BEI atteint des niveaux sans précédent : 8,7 milliards d'euros en 2015, contre 4,6 milliards d'euros en 2012, grâce à l'augmentation de capital de 10 milliards d'euros.
Je l'ai mentionnée tout à l'heure : elle avait été voulue par le président de la République lors du Conseil européen de juin 2012.
Les très bons résultats du plan Juncker en France ont été rendus possibles par la forte mobilisation de nos acteurs institutionnels et d'abord du Commissariat général à l'investissement, de la Caisse des dépôts et de la Banque publique d'investissement.
Je rappelle que les porteurs de projets présentent directement ceux-ci au comité d'investissement du plan Juncker : ce ne sont pas la France, l'Italie, l'Allemagne ou la Grèce qui défendent des projets, en négociant un financement proportionnel à leur poids géographique, économique ou démographique ; ce sont les porteurs de projets eux-mêmes qui doivent se présenter devant ce comité d'investissement.
Néanmoins, ce dispositif étant nouveau et peut-être un peu complexe à comprendre, pour les entreprises comme pour tous les autres porteurs de projets, nous avons considéré qu'il pouvait être utile de leur transmettre des informations et de les informer que leurs projets étaient éligibles au plan Juncker. Le Commissariat général à l'investissement, placé auprès du Premier ministre, a ainsi entrepris un travail très important - avant même, d'ailleurs, que le FEIS soit mis en place, en fait dès que nous avons acquis la certitude que le plan Juncker serait adopté -, visant à transmettre aux réseaux d'entreprises ainsi qu'à un certain nombre d'acteurs publics et privés, toutes les informations relatives aux conditions dans lesquelles leurs projets pouvaient être soumis. C'est évidemment l'une des raisons pour lesquelles la France est l'un des principaux pays bénéficiaires.
Nous voulons d'ailleurs, et nous l'avons indiqué à nombre de nos partenaires, faire partager cette expérience à d'autres États membres. Par exemple, M. le député a estimé qu'il serait bien de faire davantage bénéficier la Grèce du plan Juncker - car elle en bénéficie déjà. Nous avons eu des échanges et sommes prêts à transmettre le savoir-faire technique, opérationnel, financier à d'autres États membres, afin que leurs entreprises, leurs porteurs de projets, bénéficient du plan Juncker.
En France, de très nombreux projets ont pu être développés ; je vais vous donner quelques exemples, dont certains ont déjà été mentionnés. Le fonds d'infrastructures Capenergie 3, qui a bénéficié d'une participation à hauteur de 50 millions d'euros, va pouvoir financer des parcs éoliens, des fermes photovoltaïques et des méthaniseurs, en France et en Europe, pour 1 milliard d'euro. Pas moins de 40.000 foyers résidentiels bénéficieront d'actions d'efficacité énergétique - sujet que vous avez évoqué, Madame la Présidente -, grâce aux 400 millions d'euros de financements de la BEI. Celle-ci a également investi 18 millions d'euros au sein du fonds Ginkgo 2, pour dépolluer des sites industriels situés en centre-ville. Dernier exemple, dans le secteur agroalimentaire, la société coopérative agricole Les Maîtres Laitiers du Cotentin va recevoir 55 millions d'euros de financement pour l'exploitation d'une nouvelle usine de traitement du lait, à Méautis, en Normandie. La diversité de ces exemples - et d'autres pourraient être cités - montre que vraiment tous les secteurs de l'économie peuvent bénéficier du plan Juncker.
Enfin, et cela me semble très intéressant, au-delà de tous ces projets, qui représentent tout de même un certain volume, la Banque publique d'investissement, ainsi que quelques autres réseaux bancaires, dans tous les départements, distribuent à des petites entreprises, parfois de moins de dix salariés, des prêts, accordés à des taux particulièrement favorables, parce qu'ils relèvent du plan Juncker et bénéficient de cette garantie sur le budget de l'Union européenne.
Sur chacun de vos territoires, dans chacune de vos circonscriptions, j'en suis certain, vous apprendrez que des entreprises ont pu bénéficier d'un financement au titre du plan Juncker. Elles n'auront pas eu à aller déposer un dossier à Luxembourg, au siège de la BEI, mais, grâce à ce dispositif, la Banque publique d'investissement, -BPIFRANCE - leur aura accordé un prêt. J'ai eu l'occasion de visiter certaines d'entre elles, comme GD Laser, entreprise du Loiret spécialisée dans le secteur d'avenir du laser.
Le 11 avril dernier, avec le Premier ministre, nous sommes allés rencontrer, à Luxembourg, les dirigeants de la BEI, en particulier son président, M. Werner Hoyer, et son vice-président français, M. Ambroise Fayolle. Nous avons alors assisté à la signature de nombreux accords avec des entreprises françaises bénéficiaires du plan Juncker ou susceptibles de passer un accord pour développer leurs projets.
Le rapport d'information de la commission des affaires européennes soulève également la question très importante, dont on débat depuis le lancement du dispositif, des éventuels effets d'éviction ou d'aubaine que pourrait entraîner ce plan : effets d'éviction car des projets pourraient être financés au détriment d'autres, moins risqués mais tout aussi nécessaires ; effets d'aubaine car certains projets financés par le plan auraient de toute façon été financés sans lui.
L'examen des 249 décisions prises jusqu'à présent par la BEI et le FEIS montre plutôt l'efficacité du principe d'additionnalité, auquel la France est très attachée. En effet, sans le plan Juncker, la plupart des projets financés n'auraient pas pu voir le jour et certains autres auraient connu un développement moins important. Ce principe d'additionnalité est très important : même des projets recevant d'autres aides européennes, par exemple des fonds structurels du FEDER, peuvent bénéficier du plan Juncker. Certes, sans ce dernier, ils auraient donc tout de même existé, mais, grâce à lui, ils ont souvent pris une beaucoup plus grande ampleur.
Au vu de son succès, comme vous, mesdames et messieurs les députés, nous considérons que le plan Juncker doit être pérennisé et amplifié. Je ne sais pas si l'on peut déjà donner des montants mais rien, je pense, ne peut contredire l'ordre de grandeur évoqué.
Une question peut cependant être posée : faut-il simplement s'appuyer sur le mécanisme existant, qui, je le rappelle, repose sur une garantie sur le budget de l'Union européenne ? ou bien, sur la base de l'expérience réussie de cette première phase du plan Juncker - qui doit encore se déployer afin de réaliser les deux tiers restant pour atteindre l'objectif -, faut-il imaginer que d'autres instruments, potentiellement mobilisables et à faire évoluer, puissent servir à financer des investissements, dans les mêmes domaines, à l'échelle de l'Union européenne ? C'est un débat que nous devons peut-être ouvrir avec nos partenaires.
Il existe par exemple un fonds de secours, qui, lui aussi, joue très bien son rôle, mobilisé notamment pour le plan d'aide à la Grèce : le Mécanisme européen de stabilité. Dans l'état actuel des choses, ce dispositif doit uniquement servir pour répondre aux difficultés financières d'un État membre ou de son secteur bancaire. En s'inspirant de la réussite de cette sorte de FMI européen, ne pourrait-on pas imaginer un dispositif du même type, dédié au soutien aux investissements dans les domaines d'avenir ? Il serait utile d'ouvrir la réflexion car, en termes de fonds mobilisables, le MES possède un potentiel encore plus élevé que le plan Juncker.
Des complémentarités peuvent aussi être imaginées entre le plan Juncker continuant à monter en puissance et d'autres mécanismes restant à créer.
Ce qui est ce certain, en tout cas, comme l'a souligné la présidente, c'est que ce plan a apporté une contribution forte à la croissance et qu'il a été très largement orienté vers la transition énergétique. Aujourd'hui, les projets dans le domaine de l'énergie représentent 41% des projets Juncker de la BEI. Il faut d'ailleurs envisager une montée en puissance dans d'autres domaines, en particulier le numérique, secteur absolument décisif pour l'avenir de l'économie européenne et son positionnement dans la mondialisation.
Il faut enfin le faire connaître, aux acteurs économiques, car d'autres pourraient en bénéficier - en France, même si nous sommes très bien placés, mais aussi dans d'autres pays de l'Union européenne -, et aux citoyens parce que c'est une illustration d'une Europe au service de la création d'emplois et de la croissance, finalement d'une Europe concrète.
Les attentes européennes et nationales à l'égard du plan Juncker sont importantes, votre rapport d'information le souligne. Elles montrent à quel point il a suscité peut-être des questions mais aussi des espoirs. Aujourd'hui, ses premiers succès confirment que l'intuition du président de la Commission était la bonne, cela a été dit. L'Europe devait se mobiliser pour les investissements, elle devait mieux utiliser un certain nombre de ses outils, en particulier le budget de l'Union européenne, pour créer un effet de levier en faveur de la relance des investissements.
Les attentes qui s'expriment, selon nous, sont un bon signe : elles indiquent que le plan commence à être identifié ; on sait qu'il est disponible, qu'il est utile. Mais il ne faut pas décevoir ces attentes.
À cet égard, votre rapport d'information, vos propositions, la visibilité que, par ses travaux, l'Assemblée nationale a donnée au plan Juncker sont importants. Ce sera évidemment l'un des éléments sur lesquels s'appuiera le gouvernement pour formuler, au cours des prochaines semaines, des propositions visant à le pérenniser et à l'amplifier, au profit des investissements en Europe.
(Interventions des parlementaires)
Vous avez raison, Monsieur le Député : la politique de la BCE, qualifiée de quantitative easing ou d'assouplissement quantitatif, consistant en des injections de liquidités, a aussi fortement contribué à la reprise économique et au retour de la croissance en Europe. Indirectement, vous vous demandez si cela ne contribue pas également à la constitution de bulles financières.
Évidemment, il faut être attentif à cet aspect. La BCE l'est vigilante et un certain nombre de décisions ont été prises, suite à la crise financière, pour lutter contre les risques de nouvelles crises : la surveillance bancaire a été renforcée - c'est tout l'objet de l'union bancaire - et des freins de secours ou des outils d'intervention, comme le Mécanisme européen de stabilité ; que je viens d'évoquer, ont été mis en place.
Il reste nécessaire de soutenir le crédit. Ainsi, en plus du plan Juncker, qui a une vocation particulière - soutenir les projets les plus risqués -, il a fallu procéder à des injections de liquidités pour que les banques recommencent à prêter davantage, et à de meilleurs taux, aux entreprises et aux ménages. Nous avions aussi souhaité que le taux de change soit plus favorable à nos exportations, que l'euro baisse par rapport au dollar ; cette politique de la BCE y a contribué.
Je ne sais pas si votre proposition - un quantitative easing citoyen, avec des liquidités versées directement aux ménages - répond à la situation. Car il y a un autre débat, à propos de ce qu'on appelle la «monnaie hélicoptère» - j'ignore si c'est à cela que vous faisiez référence. Pour consolider encore plus le redémarrage économique, la BCE ou d'autres banques centrales devraient-elles distribuer de l'argent aux ménages ou aux citoyens ? Les économistes en débattent mais ce n'est vraiment pas d'actualité. Cela n'a jamais été fait, cela risquerait de déstabiliser l'économie de façon totalement imprévisible. Il existe d'autres outils de redistribution pour améliorer le pouvoir d'achat et favoriser les investissements des ménages.
Nous soutenons donc la politique de la BCE, en complément, évidemment, du plan Juncker.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, le plan Juncker a pour objectif de financer des projets dans des secteurs clés comme la recherche, l'innovation, l'énergie, les infrastructures, les technologies de l'information ou la protection de l'environnement. L'investissement dans la recherche représente donc l'une des priorités pour l'Europe. Il apparaît explicitement dans le règlement du FEIS que les projets de recherche, de développement et d'innovation, ainsi que ceux d'éducation et de formation, sont éligibles à la garantie de l'Union européenne.
D'après le dernier décompte de la Commission, près d'un quart - 23% exactement - des projets approuvés au titre du plan Juncker concernent la recherche, le développement et l'innovation. Il convient également de garder à l'esprit que la BEI intervient, dans le cadre de ses activités traditionnelles, en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche. Par exemple, le plan Campus ou l'accélérateur de particules du CERN - Organisation européenne pour la recherche nucléaire - ont bénéficié de l'appui de la BEI.
Néanmoins, il faut continuer à encourager le financement des projets dans ce domaine, pour qu'il y en ait davantage, afin de favoriser la montée en gamme des produits français et leur compétitivité. Je tiens à rappeler qu'il existe également d'autres outils pour financer la recherche, au plan européen mais aussi au plan français. Comme vous l'avez mentionné, le PIA, doté de près de 47 milliards d'euros, piloté par le Commissariat général à l'investissement, a été mis en place par l'État pour financer des investissements innovants en France, par le biais du fonds national de valorisation.
Au plan européen, le programme Horizon 2020, je le rappelle aussi, finance à hauteur d'environ 75 milliards d'euros l'innovation et la recherche au sein de l'Union européenne, pour la période 2014-2020. La plupart de nos universités et de nos grands organismes de recherche en bénéficient. De surcroît, le FEDER peut financer un certain nombre de projets dans le domaine de la recherche et du développement, en particulier pour ce qui concerne les universités et les entreprises.
Le soutien à la recherche est donc une priorité. Le plan Juncker y contribue, en complément d'autres dispositifs.
(Interventions des parlementaires)
Le plan Juncker n'a effectivement pas été pensé pour financer directement de petits projets, même si, comme je l'ai dit, de petites entreprises peuvent accéder à des financements par l'intermédiaire, en particulier, de la BEI. Il n'a pas non plus été conçu comme un instrument destiné à dispenser des subventions ; il fournit des prêts ou des prises de participation dans des capitaux.
Le regroupement de petits projets peut être encouragé, dans le cadre des plateformes d'investissement. Pour financer des petits projets, la combinaison de subventions de fonds structurels européens et de ressources de la BEI est possible. C'est ce qu'illustre bien l'opération en faveur de la troisième révolution industrielle, approuvée dans le Nord-Pas-de-Calais.
Par ailleurs, les financements traditionnels de la BEI restent une voie intéressante pour les collectivités. Il y aussi, dans ce domaine, un enjeu d'information et d'accompagnement. C'est pourquoi les préfets, les DIRECCTE - directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi -, le Commissariat général à l'investissement et les réseaux locaux de BPIFRANCE et de la Caisse des dépôts sont mobilisés pour faire connaître le plan, expliquer son fonctionnement et, le cas échéant, aider au montage des dossiers. Nous avons encore un grand effort à accomplir dans ce domaine.
Tous les projets ne peuvent sans doute pas relever du plan Juncker, vous avez raison de le dire. Pour certains projets de collectivités locales, il existe d'autres systèmes d'aides européennes. Le FEDER peut les soutenir, pour peu qu'ils relèvent des priorités du programme opérationnel négocié par chaque région avec l'Union européenne pour la période 2014-2020. Des prêts directs de la BEI peuvent également être accordés à des collectivités locales pour financer des projets. Je pense néanmoins qu'il existe une grande marge de progression possible pour structurer des regroupements de petits projets.
Au cours de ce débat, nous avons déjà évoqué, par exemple, le projet d'isolation thermique de 40.000 logements. Il est évident que, si chacun des bailleurs sociaux concernés avait voulu bénéficier lui-même du plan Juncker pour quelques dizaines ou centaines de logements, il n'y serait pas parvenu. C'est le regroupement de plusieurs porteurs de projets dans un même fonds, à la manière d'un consortium, qui a permis d'obtenir le financement par le plan Juncker.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, le secteur de la pêche demeure un secteur spécifique, non identifié comme secteur prioritaire du plan. Cependant, les porteurs de projets peuvent proposer des projets financièrement viables et répondant aux objectifs du plan Juncker pour des flottes de pêcheurs - par exemple, ceux qui viseraient à réduire leur impact environnemental et climatique, comme vous l'avez mentionné, ou à introduire des techniques de pêche innovantes.
Par ailleurs, et c'est l'essentiel, des fonds structurels européens sont alloués à ce secteur par le biais du FEAMP, vous l'avez rappelé. Ce fonds aide les pêcheurs à adopter des pratiques de pêche durable. Il aide les populations côtières à diversifier leurs activités économiques. Il finance des projets destinés à créer des emplois et à améliorer la qualité de vie le long du littoral européen. Je veux souligner qu'il est doté de 6,4 milliards d'euros pour la période 2014-2020.
Je crois qu'il faut être ouvert à vos propositions, en faisant en sorte que les projets susceptibles d'être soutenus répondent aux objectifs généraux du plan Juncker, en particulier en matière d'innovation ou d'environnement, puisque c'est la règle. Mais il importe surtout de continuer à bien utiliser le FEAMP, qui dispose des fonds disponibles pour soutenir le secteur et les activités de la pêche.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Rapporteur, je regrette le ton polémique de votre intervention. De toute évidence, vous l'avez dit vous-même, nous sommes d'accord sur un point : le succès du plan Juncker.
Mais nous sommes en désaccord sur un autre : l'idée que nous voudrions tirer la couverture à nous. Vos propos ne correspondent pas, je crois, à ce que l'on pense à Bruxelles, notamment du côté du président de la Commission européenne. En vérité, avant 2012, la seule stratégie envisagée, dans les instances européennes, pour sortir de la crise, c'était l'austérité et la consolidation budgétaire ; tel était le thème central de la Commission Barroso.
Lorsque le président de la République, François Hollande, a été élu, il a demandé d'inscrire la question du soutien à l'investissement et à la croissance à l'ordre du jour des travaux du Conseil européen. Ce fut bien le cas lors du premier Conseil où il a siégé, en juin 2012, réunion au terme de laquelle la Commission européenne a proposé un pacte pour la croissance de 120 milliards d'euros reprenant à son compte la proposition du président de la République. À ce stade, le seul point qui représentait une réelle avancée - je l'ai expliqué très précisément tout à l'heure -, ce fut l'augmentation de 10 milliards d'euros du capital de la BEI.
Cette somme a permis à la BEI d'accroître de 60 milliards d'euros ses soutiens à l'investissement en Europe.
Vous avez donc raison : on n'en était pas à 120 milliards mais à 60 milliards d'euros. Et c'est après avoir été élu que, sur la base des débats de la campagne électorale qu'il avait eus, en tant que candidat à l'investiture, avec les membres du Conseil européen puis devant le Parlement européen, Jean-Claude Juncker a proposé ce plan. Il s'agissait bien d'une réponse à cette attente, devenue très large, d'une politique d'investissements.
Nous considérons donc que la France doit être fière du plan Juncker, qui représente aussi un succès pour notre pays.
Je suis heureux que nous partagions ce jugement et ravi pour tous ceux qui, depuis plusieurs années, réclamaient la priorité aux investissements. Nous nous rejoignons sur ce point ; ne polémiquons donc pas.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, la politique économique que nous avons soutenue à l'échelle européenne consiste à combiner plusieurs outils : la politique monétaire ; une politique budgétaire moins focalisée sur la consolidation budgétaire, afin de ne plus contraindre des pays qui n'étaient pas sortis de la crise à mener des politiques d'austérité, porteuses d'un effet récessif ; une politique de soutien aux investissements ; une politique d'encouragement aux réformes structurelles. C'est l'ensemble de ces outils qui peut contribuer, et qui contribue aujourd'hui, au redémarrage de la croissance.
La politique monétaire a en particulier pour vocation de permettre au secteur bancaire de prêter davantage aux acteurs économiques. En même temps, je l'ai déjà rappelé, elle a permis de baisser le cours de l'euro par rapport à celui d'autres monnaies, en particulier du dollar.
Est-elle de nature à créer des bulles spéculatives ? C'est l'objet même de la surveillance financière, notamment bancaire : les marchés financiers doivent être encadrés et régulés car il importe de veiller à ce que ne réapparaissent pas des bulles.
Mais, aujourd'hui, la BCE doit être soutenue dans sa volonté de continuer à pratiquer l'assouplissement quantitatif et d'injecter des liquidités. En effet, aux termes de ses statuts, elle doit maintenir l'inflation en-dessous de 2% - plafond loin d'être atteint puisque l'inflation est aujourd'hui presque nulle. Comme la BCE ne souhaite pas que s'installe un risque de déflation, facteur possible de récession, tant qu'on n'avoisine pas les 2%, elle a raison de soutenir le crédit.
Le quantitative easing ne représente d'ailleurs qu'une des modalités possibles de cette politique, à côté de la baisse des taux directeurs. Tout cela permet de disposer d'un crédit abondant, à des coûts très peu élevés, voire avec des taux négatifs, et donc de recréer des capacités de financement de l'économie réelle. Il s'agit d'un des instruments possibles, non du seul.
Je me réjouis donc qu'un débat ait été consacré au plan Juncker.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80333|
Permettez-moi avant de commencer ce propos de vous exprimer d'abord la compassion et la solidarité du gouvernement français, du peuple français, après les terribles tremblements de terre qui ont touché la région de Kyushu il y a peu de temps, et qui ont fait tant de victimes.
Mesdames et Messieurs, en 1921, un oiseau venu de France arrivait au Japon. Kurotori, «l'oiseau noir», est arrivé au Japon. C'est le pseudonyme, vous le savez, que se donnait Claudel lorsqu'il a séjourné ici. Claudel est resté six années, de 1921 à 1927, et la résidence de France est sans doute le lieu idéal pour faire résonner son nom, lui qui fonda la maison franco-japonaise en 1924, et surtout l'institut franco-japonais du Kansai en 1927. Le Japon va marquer profondément Claudel, dans sa mémoire, bien sûr, mais aussi dans ses oeuvres, théâtrales, poétiques, dans ses écrits. C'est justement un de ses écrits que je voudrais vous citer ce soir. Dans Concours et circonstances, il observe qu'au Japon, «à chaque instant le pas et l'imagination du promeneur se trouvent arrêtés par un site concerté qui requiert l'hommage de son attention, du fait de l'intention incluse». Cette remarque-là, si je vous la cite, c'est qu'elle correspond particulièrement bien à mes premières et trop brèves impressions du Japon.
Pour vous qui vivez cela au quotidien, ces choses doivent paraître évidentes. Et je veux vous dire, vraiment, l'attention aux choses les plus infimes, le souci des détails, c'est tout sauf anecdotique, et ça traduit au Japon, me semble-t-il, une même préoccupation : celle de nous ramener sans cesse à l'essentiel, à la délicatesse des symboles, à des significations que nous avons parfois trop tendance à occulter. N'est pas Claudel qui le veut, je n'aurai pas passé sept ans mais seulement quatre jours au Japon, mais je peux vous assurer que ces quatre journées consacrées aux deux réunions du G7, dans le secteur de l'éducation et de la science et de la technologie, ont été particulièrement intenses, et même, pour vous dire la vérité, très émouvantes.
Je disais que le Japon nous incite en permanence à revenir à l'essentiel. Eh bien, ces deux G7 en sont la preuve. Vous savez que nous avons organisé à Paris la COP21 cette année, qui nous proposait de répondre à une question urgente : quel monde allons-nous laisser à nos enfants ? Et bien ces deux G7, notamment celui sur l'éducation, nous ont confrontés à une autre interrogation tout aussi pressante : quels enfants allons-nous laisser à notre monde ? le G7 éducation en particulier, il faut en avoir conscience, était un événement exceptionnel. Parce que pour ceux qui l'ignorent, le G7 éducation ne s'était pas réuni depuis 2006. Et c'est d'abord une initiative japonaise que de le réunir à nouveau et vraiment, je veux saluer, Monsieur le Ministre, votre clairvoyance. Je veux vous remercier aussi sincèrement d'avoir voulu placer cette rencontre du G7 éducation sous le signe de la solidarité avec la France, durement touchée en 2015 par les attentats. C'est un très beau témoignage d'amitié, d'une amitié ancienne et solide, mais aussi promise à un bel avenir. Il y a été question de la modernisation de notre éducation, de révolution numérique, de mutation de nos économies. Mais il y a été question également de lutte contre les inégalités à l'école, de lutte contre les discriminations, et de valeurs. Il y a été question du rôle éminent que l'éducation peut porter dans chacun de nos pays, pour faire en sorte d'éduquer aussi à la citoyenneté de nos jeunes. Ce sont pour moi des sujets essentiels, des priorités, même ; j'ai été heureuse de voir que sur chacun de ces sujets, nous avions un accord.
Cette communauté de destins et de devenirs, elle est aussi apparue d'évidence au G7 recherche. Là, c'est du vieillissement de la population, des inégalités entre les hommes et les femmes, du futur des mers et des océans, du développement des énergies propres que nous avons parlé, pour veiller à ce que nos efforts de recherche respectifs bénéficient à tous pour être vraiment efficaces et se transformer rapidement en innovations réelles. Là aussi, nous avons conclu ce G7 recherche par un sentiment simple : que nous sommes embarqués, tous, sur un même bateau, dans un même voyage, et que notre avenir n'est donc pas un avenir fragmenté en devenirs nationaux, mais c'est un avenir commun, mondial, et c'est à cette échelle mondiale que les problèmes se posent. C'est alors à cette échelle mondiale qu'ils doivent être résolus.
Ce déplacement, enfin, au-delà de ces deux rendez-vous internationaux, a été l'occasion de constater et de renforcer la richesse de nos liens, entre la France et le Japon. Je savais qu'il existait entre nous une correspondance et une complicité singulière. J'évoquais à l'instant Claudel ; on pourrait parler de Foujita, de Dominique Perrault, de Kô. Mais ce que je voulais voir par moi-même, et je l'ai vu, c'est qu'au-delà de ces artistes particuliers, il y a toujours une appétence et une fraternité entre les Français et le Japon, qu'on retrouve en particulier dans le fait qu'aujourd'hui au Japon, la langue française reste étudiée par près de 250.000 personnes de tous les âges.
La plus belle illustration de cette fraternité, c'est les huit jeunes lycéens qui sont dans la salle et auxquels je demanderai de bien vouloir approcher. Quatre jeunes lycéens français, quatre jeunes lycéens japonais, qui étudient chacun la langue de l'autre, et qui viennent de travailler à la rédaction d'un rapport commun sur l'enseignement de l'écologie en France et au Japon. C'est absolument fabuleux. Ils font partie du réseau Colibri, l'association qui a été fondée en 2005 par des professeurs français et japonais pour promouvoir ces échanges.
Merci de les applaudir : vous avez compris que vous avez là le visage de cette amitié franco-japonaise, la plus belle illustration qui soit. Je veux vous dire qu'au-delà de ces quatre lycéens français qui sont présents parmi eux, en France, l'apprentissage du japonais se développe de plus en plus, et c'est une excellente nouvelle. Nous en sommes à quelque 6.000 personnes qui le choisissent, et c'est la raison pour laquelle j'ai décidé - c'était une chose qui était attendue depuis de nombreuses années -, de créer un CAPES de japonais, pour faire en sorte qu'on ait en France des professeurs formés, d'un bon niveau, qui passent ce concours, qui est un concours important, et qui soient en capacité d'enseigner le japonais au collège et au lycée à nos élèves.
À l'université Toyo où j'étais ce matin et où j'ai été particulièrement bien accueillie aussi par des étudiants particulièrement volontaires et qui pour beaucoup d'entre eux apprenaient le français, à l'université Toyo, j'ai veillé à dire clairement que la France souhaite accueillir davantage d'étudiants japonais. Davantage - aujourd'hui, nous en sommes à quelque 2.000, ce n'est pas mal ; on peut faire mieux. Il faut que les jeunes Japonais, Mesdames et Messieurs les Lycéens japonais, vous sachiez qu'on est bien comme étudiant en France, qu'on est bien accueilli, que par la loi, par la politique volontariste ces derniers temps, nous avons beaucoup amélioré les choses, y compris d'ailleurs pour introduire des enseignements en anglais au sein de l'université, ce qui peut vous faciliter la tâche, mais aussi pour vous accueillir dans les meilleures conditions possibles, avec un guichet unique pour vous décharger des démarches administratives. Bref, notre porte vous est ouverte.
Et puis il faut que vous sachiez qu'avoir fait ses études en France pour un Japonais ou au Japon pour un Français, c'est loin d'être anodin. Tous ceux qui ont fait cette expérience dans cette salle j'espère le confirmeront, c'est une expérience d'une vie qui vous marque profondément. Cela n'est pas un hasard si le réseau France Alumni que nous avons voulu développer partout dans le monde pour les étrangers qui ont fait leurs études en France, ce réseau France Alumni, c'est au Japon qu'il compte le plus grand nombre d'inscrits. Pardon. C'est le troisième pays, mais c'est pareil. Il faut me donner raison, Monsieur l'Ambassadeur. C'est l'un des pays qui compte le plus grand nombre d'inscrits, c'est le troisième dans le monde. Cela veut dire qu'une fois qu'on a fait ses études en France, mesdames et messieurs futures étudiants japonais en France, on choisit généralement de garder un lien avec ce pays, avec sa langue, avec sa culture et vice-versa pour les étudiants français qui font leurs études au Japon. Derrière cela, il y a un choix de coeur, on le voit très bien. Souvent d'ailleurs, des couples mixtes se forment, j'ai pu le remarquer. Mais il y a aussi un choix de raison : parce que l'on voit bien à quel point les entreprises françaises sont actives au Japon et à quel point il y a des perspectives professionnelles qui se développent grâce à cette double culture.
Et quand je parle de culture, n'oubliez pas que la culture n'est pas que littéraire, artistique : la culture est aussi scientifique, oui la science est une culture, un art. Cette culture scientifique, force est de constater - et j'ai eu le plaisir d'aller à Tsukuba visiter le laboratoire de recherche sur la robotique qui est codirigé par les Français et les Japonais -, force est de constater que cette culture scientifique est merveilleusement élaborée, réalisée et efficace, parce qu'elle est conduite en complémentarité. Les résultats en la matière sont absolument remarquables. Je voudrais citer aussi la réussite toute particulière de la coopération franco-japonaise autour de la lutte contre le virus Ebola, qui associe l'INSERM, l'entreprise Toyama et St. Luke's International University. Ce sont vraiment de très belles réussites. Et dans cette Année franco-japonaise de l'Innovation, qui a été lancée par le Premier ministre français et le Premier ministre japonais, je crois que ce sont les plus belles illustrations que l'on puisse trouver pour dire que la France et le Japon doivent faire fructifier plus encore leurs relations.
Mesdames et Messieurs, en conclusion, de ces propos, vous aurez retenu, je l'espère, qu'entre la France et le Japon, il est question de développement économique, de développement scientifique, d'éducation, de recherche. Il est question surtout de valeurs, de sens, et cette recherche du sens, c'est un vrai plaisir pour moi que de la mener ensemble avec vous. Je crois qu'au fond, ce qui caractérise la véritable amitié, c'est-à-dire celle qui conduit l'autre à vous rappeler en permanence l'essentiel. Je crois que de ces quatre journées au Japon, ce que j'aurai retenu plus que tout, c'est l'essentiel.
Je vous remercie, j'ai été heureuse d'être là. Je remercie M. l'ambassadeur de son accueil, de l'organisation parfaite de ce séjour, et je veux vous dire «vive la France, et vive le Japon».
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 mai 2016 |N|N|N|N|Texte intégral 80334|
C'est un grand plaisir et un grand honneur pour moi d'intervenir aujourd'hui devant vous dans l'enceinte de l'Université Toyo. Monsieur le Professeur, puisque vous avez évoqué le tremblement de terre que nous avons connu hier, qui était d'une faible intensité, laissez-moi d'abord exprimer toute la compassion du peuple français à l'égard du peuple japonais pour celui bien plus grave que le Japon a connu à Kumamoto, avec des pertes humaines. Nous sommes à vos côtés et dans la solidarité totale.
Je disais donc que c'est un grand honneur d'intervenir dans cette université. Je crois que ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre, mais nous avons de Bouddha de très nombreuses citations que nous avons conservées. Il en est une que je voudrais convoquer pour introduire mon propos : «il n'existe rien de constant, si ce n'est le changement», disait Bouddha. Oui, votre université, depuis sa fondation il y a 130 ans - il y aura 130 ans l'an prochain -, a considérablement changé. Mais elle l'a fait en conservant une relation particulière avec la philosophie, comme le désirait son fondateur, le docteur Enryo Inoue. De cette relation, le magnifique jardin de la philosophie est aujourd'hui la preuve. Cela traduit cette alliance si particulière que je constate depuis le début de mon déplacement au Japon entre la tradition et la modernité, entre l'audace architecturale des bâtiments les plus récents, et la préservation de l'esprit originel de cette université. Votre université, Mesdames et Messieurs, Chers Étudiants, est exemplaire de la qualité et de l'excellence de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique au Japon. Membre du club très fermé des «Top Global University» sélectionnées par le MEXT, je sais que cette université porte de très nombreux programmes de qualité. Mais je dois dire que ce à quoi je suis le plus sensible, c'est évidemment la place occupée ici par la langue française : 2.500 étudiants, des programmes d'échanges très fructueux, avec des universités françaises comme Strasbourg, Pierre et Marie Curie à Paris ou encore Nantes. Tout cela évidemment, est fort bienvenu. Et le fait enfin que votre université ait été l'une des premières universités mixtes filles-garçons du Japon, et que vous fêtiez cette année les 100 ans de l'ouverture du recrutement aux femmes, tout cela accroît mon intérêt pour votre université et explique pourquoi j'ai voulu venir ici.
Alors, dans cette institution qui est chargée d'histoire, je voudrais partager avec vous quelques réflexions sur l'université du XXIe siècle, c'est l'invitation qui m'a été faite. D'abord, l'université est un sujet majeur aujourd'hui. Je viens de participer - vous le rappeliez - aux deux réunions du G7 qui se sont tenues dans votre pays, l'une sur l'éducation, l'autre sur la recherche. La vision que chacun d'entre nous autour de cette table du G7 a de l'université, au fond, est la même. Nous avons tous conscience que l'université est un socle indispensable à l'épanouissement d'une société de la connaissance pour demain, que c'est une ressource essentielle dans les changements que nous traversons, et pour apporter des réponses aux défis que nous affrontons. Alors, me direz-vous, ce n'est pas la première fois en ce XXIe siècle que le monde change ; le monde n'a cessé de changer ces derniers siècles. Oui, mais la réalité c'est qu'autrefois, au XIXe siècle par exemple, le changement se comptait en siècles. C'était tous les siècles qu'on avait un changement très important, culturel, économique... au XXe siècle, le changement a commencé à se compter en décennies ; c'est tous les dix ans qu'on avait une rupture, un changement... Aujourd'hui, n'importe quel propriétaire d'ordinateur sent bien à quel point son matériel devient obsolète de plus en plus rapidement. Le monde d'hier n'est déjà plus celui d'aujourd'hui. Notre monde n'a jamais changé aussi vite et dans autant de domaines, et ce dans une période de temps aussi courte. À chacun de ces changements, évidemment, les défis se multiplient et deviennent de plus en plus urgents, de plus en plus pressant. Oui, ils sont multiples, ces défis économiques, sociaux, environnementaux. Ils recouvrent autant de risques que d'opportunités. Et partout dans le monde, ces évolutions provoquent une soif d'innovations et de savoirs sans précédent, ainsi que de nouveaux besoins en termes de qualifications et de compétences.
Or précisément, tout cela, c'est ce qui fonde l'université. L'innovation, le savoir, les qualifications, les compétences. Les lieux comme les universités, partout dans le monde, sont donc regardés comme des atouts formidables. Comme le lieu où on est capable de trouver des personnes solidement formées, pour des emplois très diversifiés. Comme des pôles d'attraction, aussi, pour faire venir les gens de l'étranger, des étudiants étrangers, par exemple, qui viennent ici et qui sont ensuite capables, en repartant dans leur pays, de donner un rôle à la réalité du Japon tel qu'ils l'ont vécu.
Tout le monde a donc de grandes attentes à l'égard des universités. Cela fait peser sur ces universités de lourdes responsabilités qu'elles ne peuvent assumer que si elles bénéficient d'un soutien sans faille de la part des citoyens, de la part des pouvoirs publics, de la part de chacun d'entre nous. Elles ne peuvent assumer ces responsabilités que si elles changent à leur tour pour prendre en compte ce besoin de savoirs que j'ai évoqué, car elles aussi, elles ont besoin de s'adapter, à cette nouvelle donne. On sait par exemple que pendant longtemps, l'enseignement supérieur, les universités ont été l'apanage de l'élite du pays. Elles accueillaient un nombre somme toute réduit d'étudiants, et donc il y avait une pédagogie qui allait avec ce nombre réduit d'étudiants accueillis. Aujourd'hui dans tous les pays, les universités accueillent une part de plus en plus importante de la jeunesse. C'est le cas au Japon, c'est le cas en France aussi. Nous sommes entrés dans une phase de démocratisation sans précédent. À tel point que l'on peut prévoir dans beaucoup de pays que dans dix ans à peine, plus de la moitié de la population sera diplômée du supérieur. C'est un chiffre considérable, mais ça n'est pas qu'un chiffre, c'est une réalité. Cela suppose donc pour l'université du XXIe siècle des changements considérables aussi.
Le premier enjeu est d'ordre quantitatif, c'est le plus évident, car les étudiants, ce sont des personnes. Il faut donc également adapter l'architecture des universités pour pouvoir quantitativement accueillir autant de monde. Les étudiants ne sont pas de «purs esprits» : il leur faut des campus avec des services, des besoins qui soient remplis avec des aides en termes de logement. Pour que vous ayez des idées claires, peut-être, à l'échelle de la planète, entre 2000 et 2015, on compte deux fois plus d'étudiants sur le globe. Aujourd'hui, vous êtes environ 200 millions d'étudiants et ce chiffre ne fera que croître. Donc oui, il faut que nos universités se repensent en termes de place et d'architecture grâce à l'appui des pouvoirs publics.
Mais la question n'est pas que quantitative, bien entendu, elle est surtout qualitative. Le sujet est donc de savoir comment les notions universités arrivent à passer d'un enseignement qui était réservé à quelques-uns, à un enseignement ouvert au plus grand nombre, pour vraiment relever le défi de la démocratisation. Cela suppose de s'adapter à la diversité des publics, des étudiants, des parcours, des métiers. Cela suppose de veiller à ce que chaque étudiant qui passe par ces murs réussisse à la fin, donc amener chaque étudiant à atteindre le meilleur de lui-même. Cela suppose des évolutions dans les mthodes pédagogiques, d'où l'intérêt d'innover en la matière, avec par exemple, un suivi de plus en plus personnalisé, avec aussi un meilleur usage des potentialités considérables du numérique, car dans ce domaine, il y a énormément de choses à développer et à amender, j'en suis persuadée.
Le troisième enjeu est celui de l'affirmation du rôle de l'enseignement supérieur dans la construction de nos sociétés, au-delà des formations vers l'emploi et de ses contributions au développement économique. D'une certaine façon, plus la démocratisation des publics qu'elle touche est importante, plus l'université revient au centre de la cité, retrouve la place centrale qui doit être la sienne dans un pays et dans une ville. Dans une société apprenante, l'université trouve toute sa place et ne se résume vraiment pas à la seule question de l'insertion professionnelle. L'université n'est pas là que pour préparer à l'exercice des métiers. L'université est liée à la connaissance, à la recherche, et plus généralement à ce qu'on appelle l'humanisme, qui intègre forcément la philosophie, et je sais qu'à Toyo, cette philosophie intègre une place très singulière. Il ne s'agit pas simplement de rendre les étudiants capables de faire : il faut aussi être capable de donner à nos actions, à notre présence au monde un sens. Il faut aussi pouvoir inscrire nos pratiques dans une réflexion et une conscience aiguës des enjeux qui sont les nôtres.
Pour cette raison, l'université doit avoir au XXIe siècle dans nos préoccupations, dans notre projet de société, une place absolument centrale. Elle n'est pas seulement destinée à accueillir les jeunes qui terminent leurs études secondaires, elle n'est plus ce lieu si étroitement lié à la jeunesse. Non, à l'avenir, les années d'études correspondront à une période beaucoup plus floue, beaucoup plus vaste. On reviendra étudier à l'université à 40, 50, 60, 70 ans, et l'université doit proposer de nouvelles filières de formation destinées à d'autres publics que simplement les jeunes. Je crois vraiment que l'avenir de nos pays se dessine aussi dans cette idée-là, et que cette idée d'une formation tout au long de la vie doit passer pour nos universités, à la fois par les amphithéâtres le mieux construits possible, le plus confortable possible, mais aussi par des MOOC, par de la formation à distance, en ligne, que les universités doivent investir.
Ce faisant, l'université du XXIe siècle ne contribuera pas seulement à la croissance économique du pays - c'est déjà très important qu'elle le fasse -, mais elle contribuera aussi à promouvoir les valeurs fondamentales qui forgent nos sociétés. Nous avons besoin de ces valeurs, car ce sont ces valeurs qui nous permettent de ne plus voir dans l'avenir quelque chose de sombre, de menaçant, une fatalité qu'on subirait, mais au contraire le résultat de notre travail, de nos efforts.
C'est pourquoi les stratégies pédagogiques et scientifiques des universités doivent demeurer larges et ouvertes. L'université du XXIe siècle sera ainsi un espace d'expression et de liberté, ce qu'elle a toujours été au fil des siècles passés. C'est d'ailleurs intéressant, parce que moi-même, je vous parle de l'université du XXIe siècle comme si elle restait à venir, mais nous sommes déjà dans le XXIe siècle. C'est déjà une réalité présente qui est en train de s'élaborer partout dans nos pays, si j'en crois ce qui se passe au Japon, mais aussi en France. Prenons la France : le président de la République, François Hollande, a décidé de placer la jeunesse au coeur de ses préoccupations, alors nous avons énormément travaillé pour améliorer la démocratisation de l'enseignement supérieur. Le nombre d'étudiants a été en France multiplié par huit au cours des cinquante dernières années. Il atteint aujourd'hui deux millions et demi.
Nous avons adopté en juillet 2013 une loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche qui prévoit notamment que tous les cinq ans, nous élaborons une stratégie nationale de l'enseignement supérieur au service de laquelle nous mettons des moyens financiers importants.
Cette loi prévoit surtout que les établissements de l'enseignement supérieur, les universités et les grandes écoles en France, puissent être regroupées pour une rencontre plus forte, notamment dans la compétition internationale. Enfin, cette loi prévoit que nous ouvrions de façon très large notre enseignement supérieur à toutes les populations, les jeunes comme les moins jeunes, comme je viens de le dire - toutes les populations, cela signifie également internationalement parlant. Nous avons une vraie chance en France qui est d'accueillir beaucoup d'étudiants étrangers, nous en avons 300.000. Nous sommes à la troisième place au niveau mondial en termes d'accueil des étudiants étrangers, mais je vous le dis aussi simplement que je le pense : nous voulons en accueillir plus, et notamment des Japonais. Alors venez, vraiment, vous serez les bienvenus. Pour promouvoir cette stratégie d'internationalisation, nous avons revu un certain nombre de nos politiques pour faire en sorte notamment que l'arrivée en France pour un étudiant étranger soit un fleuve tranquille, et non une tempête de procédures administratives toutes plus compliquées les unes que les autres. Aujourd'hui se développent ce qu'on appelle des guichets uniques, ce qu'on appelle de la bienveillance à l'égard de ceux qui nous viennent d'autres cultures, d'autres pays, et qu'on accompagne bien mieux que par le passé.
L'université du XXIe siècle est donc en train d'ouvrir ses portes au monde entier. Mais dans ce monde ouvert, il existe des espaces qui sont plus proches que d'autres.
L'espace le plus proche pour la France est l'espace européen. D'ailleurs, peut-être l'avez-vous en tête : l'Europe, avant de devenir l'espace politique, économique que l'on connaît aujourd'hui a d'abord été une Europe des universités, et nous sommes aujourd'hui les héritiers de cette histoire. C'est la raison pour laquelle nous voulons la conforter. Le fait d'être une Europe des universités, une Europe de l'humanisme, nous aide beaucoup lorsqu'il s'agit d'apporter des réponses aux défis que nous rencontrons, et celui des réfugiés, que nous connaissons actuellement, n'est pas le moindre. C'est ce qui nous permet d'être fermes sur nos valeurs, fermes sur l'importance que nous accordons à la culture, à la connaissance. C'est ce qui nous permet aussi d'allier la fidélité au passé et les exigences du présent.
J'en reviens au Japon. J'ai pu constater depuis trois jours que je suis ici à quel point nos visions sur l'éducation, sur la recherche, sur l'innovation, étaient proches entre la France et le Japon. J'ai vraiment apprécié les orientations vers plus d'ouverture, le recentrage sur l'humain, que vos politiques, dans ces domaines, mettent au premier plan. Je le disais tout à l'heure, nous souhaitons accueillir davantage d'étudiants japonais dans nos universités -nous en accueillons déjà : nous en avons quelque 2000 aujourd'hui - mais je constate que vous venez beaucoup dans les domaines des sciences humaines et sociales. C'est bien. Je comprends pourquoi. Je connais par exemple l'attrait qu'exercent les oeuvres d'un auteur comme Marcel Proust au Japon, qui a encore connu une nouvelle traduction récemment, et je vous en remercie. Mais je veux vous dire que nous avons plein d'autres possibilités en France dans nos formations scientifiques, d'ingénierie, dans le domaine du droit, de l'économie, des sciences politiques, et que nous voulons aussi vous faire découvrir cela.
Je tiens également à vous dire, car cela vous parlera, vous y serez sensibles, que par ailleurs, en France, se développe de plus en plus une appétence pour le japonais, pour la culture japonaise, qui m'a conduite à prendre une décision inédite dans notre histoire, que j'ai annoncée à mon homologue ministre de l'Éducation il y a deux jours, à savoir la création d'un concours de l'enseignement du japonais en France, le fameux CAPES, qui n'existait pas jusqu'à présent pour l'enseignement du japonais. Nous avons donc décidé de le créer pour pouvoir recruter des professeurs de japonais d'un bon niveau, de qualité, et qui puissent accompagner cette appétence des Français pour le japonais - ils sont près de 6000 aujourd'hui à vouloir l'apprendre en langue vivante. Je pense qu'avec la création de ce CAPES, nous pourrons encore démultiplier ce nombre.
Ensuite, cette proximité entre nous, c'est aussi l'innovation, la recherche. J'ai eu la chance de visiter un laboratoire à Tsukuba, où les équipes françaises et les équipes japonaises travaillaient ensemble sur la robotique, et arrivaient ensemble à des résultats extraordinairement élaborés et innovants. Nous avons lancé à Tokyo en octobre 2015 l'année franco-japonaise de l'innovation ; et biens c'est aussi ça, nos universités, notre recherche. C'est cette capacité à faire évoluer notre recherche et notre innovation dans le meilleur sens possible, en s'enrichissant dans cette relation si complémentaire. C'est la raison pour laquelle en juillet prochain, nous allons demander à de hauts responsables de 60 universités japonaises de venir en France pour participer à un séminaire conjoint sur la convention universitaire entre nos deux pays. C'est une opportunité qu'il nous faut absolument saisir. Et c'est également ainsi que l'on contribuera à l'émergence de cette université du XXIe voire du XXIIe siècle.
Mesdames et Messieurs, en conclusion, j'ai toujours été persuadée d'une chose - je le disais au président de l'université qui m'a accueillie tout à l'heure -, c'est que quand on va à l'étranger, en déplacement officiel comme je le fais en ce moment, il faut absolument passer par une université, parce que c'est le lieu où l'on sent à la fois l'âme d'un pays, son souffle vital et son inscription dans la modernité. Tradition et modernité : c'est ce que je ressens en étant parmi vous aujourd'hui. Ce que je ressens aussi, c'est que ce beau mot «humanisme» que j'évoquais tout à l'heure, et qui me tient tellement à coeur, trouve tout son sens. L'humanisme qui passe par la philosophie, l'humanisme qui passe par la connaissance, l'humanisme aussi, je l'espère, qui passe par les relations de plus en plus étroites entre votre pays et le nôtre. Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 mai 2016|N|N|N|N|Texte intégral 80335|.
La Conférence nationale du Handicap, au cours de laquelle le président de la République vient de réaffirmer notre engagement pour une société plus inclusive, est pour moi l'occasion de dire ma mobilisation sans relâche pour une école, elle-aussi, toujours plus inclusive.
L'école inclusive, c'est celle qui reconnaît que tous les enfants partagent la capacité d'apprendre et de progresser, [...] qui veille à l'inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction." C'est désormais inscrit dans la Loi de la Refondation pour l'École de la République adoptée en début de ce quinquennat.
C'est un changement de paradigme considérable : ce n'est désormais plus aux élèves de s'adapter aux besoins du système mais à l'Ecole de s'adapter aux spécificités des élèves et de mettre en place tous les dispositifs nécessaires à leur scolarisation et à leur réussite.
Les progrès accomplis par l'Éducation nationale sont considérables : près de 280 000 élèves en situation de handicap sont aujourd'hui scolarisés en milieu ordinaire, ce qui représente une augmentation de 25% depuis 2012. Les dispositifs collectifs créés se sont développés : le nombre d'unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) s'est accru de plus de 16%. Dans toutes les écoles de France, on compte aujourd'hui au moins un élève en situation de handicap.
Dès lors, pour certains élèves en situation de handicap, un accompagnement humain plus ciblé est nécessaire. Depuis 2014, nous avons fait de l'accompagnement des élèves en situation de handicap une mission reconnue au sein d'une filière métier identifiée. 28 000 personnes accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) ont désormais la possibilité, à terme, d'obtenir un contrat à durée indéterminé. Mais de plus en plus d'élèves ont besoin d'être accompagnés : ils étaient plus de 80 000 élèves en 2012, et plus de 122 000 en 2015. Alors pour répondre à ces besoins, depuis plusieurs années, nous sollicitons des personnes en contrat aidé. Chaque jour, au côté des enseignants, ces personnes facilitent la mise en uvre des parcours de formation adaptés, dynamiques et mobilisent leurs compétences au service de la réussite des élèves. La précarité de leurs contrats et la non-pérennité de leur présence aux côtés des élèves et des équipes pédagogiques n'était cependant pas acceptable plus longtemps dans un système scolaire qui se veut véritablement inclusif.
C'est pourquoi et après des mois de travail sur ce sujet, nous avons conclu à la nécessité de pérenniser ces emplois. Le président de la République l'a donc annoncé ce matin : sur les 5 ans à venir, les 56 000 contrats aidés (20h/semaine) seront transformés en 32 000 emplois (35h/semaine) d'AESH. Avec cette mesure ambitieuse, nous mettons enfin un terme aux ruptures d'accompagnement en cours d'année scolaire, nous assurons une meilleure qualité de l'accompagnement, et nous permettons à de nombreuses personnes qui le souhaitent et qui ont manifesté leur compétence au cours de leurs deux années en contrat aidé, d'accéder à des emplois reconnus. C'est évidemment une excellente nouvelle qui trouvera à s'appliquer dès la rentrée 2016.
Au-delà de l'accompagnement, rendre l'école accessible est pour moi un enjeu essentiel. Tout d'abord, il faut des enseignants mieux formés ; la réintroduction, dès 2013, d'une formation initiale et continue au sein des Ecoles Supérieures du Professorat et de l'Education (ESPE), est le gage d'une école qui s'adapte, qui prend en compte tous les élèves en mobilisant les outils d'aujourd'hui. Le numérique au service des besoins éducatifs particuliers pour la scolarisation des élèves en situation de handicap en fait partie, j'en suis foncièrement convaincue : le déploiement du numérique, et notamment les tablettes tactiles, apporte en effet des réponses efficaces aux problématiques d'accessibilité rencontrées par ces élèves, en offrant des solutions de personnalisation et d'adaptation diversifiées. C'est particulièrement efficace pour les élèves présentant des troubles "DYS" : les supports écrits sont plus adaptés et plus immédiatement compréhensibles. Grâce aux possibilités de paramétrages prévus initialement dans les logiciels, l'enseignant est capable d'atteindre tous les élèves.
J'ai ainsi demandé, dans le cadre du grand plan numérique actuellement déployé dans les établissements scolaires, que tous les nouveaux projets de ressources numériques soutenus par le ministère intègrent les exigences d'accessibilité prévues pour les élèves en situation de handicap.
Penser l'accessibilité de l'École, c'est encore penser à la manière dont s'organise la journée de l'enfant en situation de handicap, au-delà du temps scolaire. Car l'éducation ne s'arrête pas aux portes de l'école. Oui il faut veiller à ce que les activités périscolaires, dans le cadre de la réforme des rythmes éducatifs, soient davantage accessibles. C'est avec cette intention que le gouvernement a mobilisé les caisses d'allocations familiales partout sur le territoire, afin qu'elles puissent aider les communes et intercommunalités qui les sollicitent, financièrement et en termes de méthode. Et pour mieux accompagner les collectivités locales, j'ai initié avec Ségolène Neuville, secrétaire d'Etat chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre l'exclusion, et le Défenseur des Droits un groupe de travail associant tous les acteurs concernés, qui a permis la production d'un guide de bonnes pratiques mis à la disposition des communes et des intercommunalités.
Améliorer les parcours de tous les jeunes, c'est enfin penser la manière dont l'Ecole permet aux familles d'accompagner leur enfant tout au long de la scolarité. Tout parent souhaite la réussite de son enfant et je souhaite que toutes les familles, quelles que soient leur situation sociale, leur situation de handicap ou leurs difficultés à appréhender la langue française, puissent accéder à une information claire. Dans ce cadre, j'ai demandé à ce que les documents les plus usuels consultables ou téléchargeables sur nos sites education.gouv.fr et eduscol.education.fr puissent être rendus totalement accessibles (facile à lire et à comprendre (FALC), langue des signes française (LSF), audio, impression braille.) La mise en accessibilité des documents les plus utiles aux familles est un enjeu de responsabilité et de citoyenneté.
Il faut aller plus loin encore. On le sait, l'objectif du gouvernement est de permettre à chaque enfant de trouver une réponse adaptée à ses besoins spécifiques. Et certains jeunes, du fait de la nature ou du degré de leur handicap, ne peuvent fréquenter l'école sans l'accompagnement de professionnels du secteur médico-social. Dans ce cas, les établissements médico-sociaux se doivent de tout mettre en uvre pour leur offrir des perspectives d'épanouissement et de parcours de vie. Il y a donc pour nous un enjeu fort de complémentarité entre l'École et ces établissements. C'est dans cet état d'esprit que nous nous sommes engagées, avec Ségolène Neuville, secrétaire d'Etat chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, et les associations gestionnaires d'établissements médico-sociaux, à déplacer une centaine d'unités d'enseignements de ces établissements dans les enceintes mêmes d'établissements scolaires. Plus de 100 l'ont été au cours de cette année 2015/2016 et 100 nouvelles unités seront installées au cours de l'année scolaire prochaine. De même, nous souhaitons, dans une approche partagée, développer la coopération entre le secteur médico-social et l'éducation nationale parce que, chacun le sait, l'école ne peut pas tout, toute seule. Ainsi, localement, en tant que de besoin, l'Éducation nationale doit pouvoir s'appuyer sur les compétences professionnelles des acteurs médico-sociaux pour faciliter la scolarisation et la formation des élèves en situation de handicap par l'accompagnement direct, mais aussi par le soutien aux professionnels de l'école.
Je sais également que nous devons faire plus, et mieux, à l'égard des jeunes avec des troubles du spectre autistique (TSA). C'est le sens de notre engagement porté par le 3e Plan Autisme, que nous mettons en uvre. Nous connaissons aujourd'hui les bénéfices d'un dépistage précoce, ainsi que les avantages d'une mutualisation des interventions scolaires et médico-sociales ou sanitaires dans la prise en charge de ces jeunes enfants. Nous sommes en train de créer 110 unités d'enseignement avec les plateaux techniques du secteur médico-social, au sein d'écoles maternelles ; 60 ont déjà vu le jour et 50 nouvelles ouvriront au cours de la prochaine année scolaire. Des enfants de 3 à 6 ans, présentant des troubles du spectre autistique (TSA), peuvent donc désormais être scolarisés dans ce nouveau dispositif. Présents à l'école comme les autres élèves, ils bénéficient de temps consacrés aux apprentissages et à l'accompagnement médico-social.
Tant a été fait et il y a tant à faire encore pour l'école inclusive ; mais la voie est tracée. Elle porte l'école du 21ème siècle, fondée sur les valeurs républicaines. D'aucuns déploreront que les résultats ne seront visibles qu'à l'échelle d'une génération. Pour partie, oui ! Car c'est bien demain, au cur d'une société plus juste et humaniste, que nous percevrons l'empreinte d'une école qui met au cur de son projet l'idéal d'Égalité, en offrant à tous, quelle que soit leur situation, les conditions de la réussite personnelle et de l'insertion sociale.
Source http://www.education.gouv.fr, le 24 mai 2016