Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les chefs d'entreprises,
Le Gouvernement a trouvé la France dans une situation économique difficile. Les déficits publics ont des niveaux jamais atteints par le passé. Pour la première fois depuis vingt ans, notre pays va connaître une récession en 1993.
Cette situation difficile, le Gouvernement en a pris toute la mesure. Depuis trois mois, il s'est donc engagé résolument dans une politique de redressement et de courage. Nous avons mis l'accent sur l'assainissement de notre économie pour que le chômage diminue.
Une telle politique ne saurait surprendre les chefs d'entreprise que vous êtes. Un gestionnaire sait que la fuite en avant n'est jamais la solution. Pour investir, pour lancer une nouvelle activité, il faut avoir une base saine.
L'assainissement de notre économie passe, vous le savez, par une maîtrise des déficits publics, tant budgétaires que sociaux. La dérive observée ces dernières années doit cesser si nous ne voulons pas être happés par le piège de la dette. Vous le savez bien : les déficits d'aujourd'hui ce sont les impôts de demain. Or la France est déjà le pays développé qui a les impôts et les cotisations les plus lourds. C'est la raison pour laquelle la loi de finances rectificative et la loi quinquennale sur les finances publiques ont prévu une limitation et une réduction progressive du déficit.
Le Gouvernement a également trouvé une économie exposée à une concurrence internationale toujours plus vive. Dans ce domaine aussi, nous avons pris, dès notre arrivée, des initiatives qui tranchaient avec la politique de nos prédécesseurs. En effet, j'ai pleinement conscience qu'il est de mon devoir de veiller à ce que les produits et services que vous fournissez se battent à armes égales sur les marchés internationaux. Il est profondément anormal que certains pays s'entourent de mesures protectionnistes et profitent de l'ouverture des marchés européens pour exercer une concurrence déloyale. J'ai tenu à m'entretenir directement à Bruxelles avec la Commission européenne et à Washington avec M. CLINTON de la nécessité d'une égalité de traitement dans les négociations du GATT.
Cette semaine, à Copenhague, la France a été entendue : le Conseil Européen a entériné l'idée selon laquelle il ne saurait y avoir d'accord que global - c'est-à-dire sur tous les sujets y compris l'agriculture expressément citée. C'est un point fondamental sur lequel nous ne pouvions transiger. Le Conseil a également affirmé sa conviction que la négociation doit être multilatérale, qu'elle doit permettre la promotion de l'emploi et préserver l'identité européenne, c'est-à-dire nos politiques communes.
La position de la France n'est pas dictée par la défense de certains intérêts catégoriels, comme certains veulent le laisser entendre. La position de la France est une position juste. Comment accepter que les Etats-Unis puissent décider unilatéralement un accroissement de près de 100 % des taxes d'importation de certains de nos produits ? Ce que veut la France, ce n'est pas être protégée davantage que ses voisins, c'est ne pas l'être moins. Ce qu'elle refuse, ce sont les pratiques déloyales telles que les contrefaçons ou le dumping social que vous dénonciez tout à l'heure.
A l'inverse, il serait illusoire de penser - et ceux qui le laisseraient entendre prendraient de lourdes responsabilités face à l'avenir - que la solution réside dans la fermeture de nos frontières. Notre économie est désormais ouverte sur l'extérieur. Plus d'un salarié sur quatre travaille aujourd'hui pour l'exportation. C'est pour nous une grande chance, à condition que cette ouverture puisse en retour nous profiter en élargissant les marchés accessibles à nos entreprises, c'est à dire en élargissant vos marchés. La France a besoin d'emploi; c'est par l'ouverture des marchés qu'elle les trouvera.
L'emploi est la première priorité du Gouvernement. Le but fondamental de notre politique, c'est la lutte contre le chômage, la lutte pour l'emploi. C'est sans conteste dans ce domaine que la situation qui nous a été laissée est la plus critique. Avec la montée du chômage c'est la cohésion même du pays qui est menacée. La lutte contre le chômage est l'affaire de tous. Elle demandera à tous du courage et des efforts. Elle demandera également un grand mouvement de solidarité. Cette solidarité, elle naît naturellement au contact des réalités auxquelles vous êtes quotidiennement confrontés. Je sais que, mieux que quiconque, vous saurez en faire preuve.
Pour sa part, le Gouvernement a multiplié les actions et les incitations financières ; c'est ainsi qu'un effort sans précédent a été mené en faveur du bâtiment et des travaux publics, par la mise en place d'un plan de relance qui apportera plus de 20 milliards de francs de commandes nouvelles à ce secteur ; un effort sans précédent a également été consenti en faveur de la réinsertion des chômeurs grâce notamment au doublement de la prime offerte dans le cadre des contrats de retour à l'emploi ; tout contrat d'embauche d'un jeune assorti d'une action de formation, signé en 1993 ouvrira droit à une prime versée à l'entreprise ; de plus, le Gouvernement a décidé d'alléger le coût des bas salaires par la budgétisation des cotisations familiales pour les revenus les plus bas. Cette mesure est la première étape de la suppression totale des cotisations d'allocations familiales supportées par les entreprises. Enfin, nous avons fortement incité au développement de l'apprentissage grâce au relèvement substantiel du crédit d'impôt pour l'embauche d'un apprenti.
Puis-je rappeler un chiffre ? En 1993 toute embauche d'un apprenti dans une petite entreprise ouvrira droit à une aide minimale de 14 000 F de la part de l'Etat.
La mise en place de l'ensemble de ce dispositif sera facilitée par le succès de l'emprunt dont la souscription a été lancée hier et qui est un appel à la confiance des Français dans l'action de lutte pour le redressement et pour l'emploi.
Ce combat ne peut toutefois être gagné par le Gouvernement seul. Par son action, le Gouvernement entend créer un environnement favorable à l'éclosion et au développement de l'esprit d'innovation et de l'esprit d'entreprise. Ces vertus, qui vous caractérisent, la France en a besoin. C'est l'entreprise et plus particulièrement la petite et moyenne entreprise qui sait le plus facilement et le plus efficacement évoluer et créer des emplois. L'engagement que vous venez de prendre solennellement de relever aux côtés du Gouvernement le défi pour l'emploi me confirme le bien fondé de cette analyse ; permettez-moi de vous rendre aujourd'hui publiquement hommage.
Comment passer sous silence l'importance que vous représentez dans l'économie de notre pays ? Les statistiques sont éloquentes. On vous qualifie de petit ou moyen. Mais quand vous êtes tous ensemble, votre activité représente le double de celle des grandes entreprises. Vous créez 30 % de la richesse nationale soit également le double de celle des grandes entreprises. Vos employés représentent le tiers de la population active de la France.
Conscient de votre dynamisme et de l'importance que vous représentez pour notre pays, j'ai souhaité que votre spécificité soit prise en compte. A cet effet, un ministère du développement économique chargé des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, que j'ai confié à M. MADELIN, a été créé. Le Gouvernement vous écoute et vous accorde une confiance toute particulière pour le redressement du pays.
J'ai rappelé les grandes orientations de la politique du Gouvernement et les premières mesures générales qui ont été prises pour sa mise en oeuvre. Au delà de ces mesures générales, j'ai le souci d'aller plus loin plus particulièrement pour vous, les petites et moyennes entreprises et pour l'emploi.
J'ai pleinement conscience de votre dynamisme. J'ai aussi pleinement conscience de vos besoins. C'est pourquoi, parmi les premières mesures prises, figurent en bonne place celles destinées à conforter votre trésorerie. D'ores et déjà, la baisse de près de 4 points en trois mois des taux d'intérêt à court terme, fruit du message de rigueur et de confiance du Gouvernement, est un acquis substantiel. Il représente un allégement de charges de 40 MdsF pour l'ensemble des entreprises. Le remboursement du décalage d'un mois de la TVA qui interviendra dès juillet pour les petites entreprises contribuera également à leur donner un ballon d'oxygène. Pour les autres entreprises, la créance correspondant au décalage d'un mois pourra être mobilisée auprès des banques. Dès juillet sera également mis en place le mécanisme de garantie par la SOFARIS de prêts destinés à couvrir des besoins de trésorerie. Enfin, les contraintes mises en place par le précédent Gouvernement en matière de taxe professionnelle sont supprimées : vous ne supporterez plus dans votre trésorerie de fin d'année un montant de la taxe professionnelle supérieur au plafond de 3,5 % de la valeur ajoutée.
Trop souvent, les transmissions d'entreprises sont synonymes de cessation d'activité. Le préjudice économique subi par la société dans son ensemble est alors considérable. C'est pourquoi des allégements significatifs ont d'ores et déjà été consentis pour faciliter la transmission des entreprises. Le paiement des droits de succession ou de donation peut être étalé pendant 15 ans à des conditions financières très favorables. La fiscalité sur les ventes de fonds de commerce a été réduite, particulièrement pour les petits commerces. 80 % des cessions de fonds de commerce seront désormais soumis à une taxation inférieure à 5 % au lieu de plus de 14 %, il y a encore peu de temps.
Je vous l'ai dit, le Gouvernement travaille à redonner aux Français confiance en eux, confiance en leur entreprise, confiance en leur économie. C'est cette confiance retrouvée qui permettra, avec l'aide de tous, le redressement et la prospérité. La confiance se gagne, mais il faut également l'entretenir. Pour cela, il faut mettre en place des mesures structurelles qui regardent le moyen terme. Il faut également une action suivie dans le temps.
C'est la justification de la loi quinquennale sur les finances publiques, qui montre notre volonté réelle et durable de redressement. C'est également ce qui motive la loi quinquennale pour l'emploi, que prépare en ce moment le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. La lutte pour la baisse des taux d'intérêt sera poursuivie. La lutte contre l'exclusion que représente le chômage sera, avec votre contribution, elle aussi poursuivie.
Pour les PME-PMI également, le Gouvernement inscrira son action dans la durée.
C'est pourquoi au-delà des mesures déjà prises et que je viens d'évoquer, d'autres actions et d'autres réflexions sont d'ores et déjà en cours. Elles concernent en particulier l'amélioration des conditions de fonctionnement des entreprises et de prévention des défaillances ; elles visent également à améliorer les conditions de la concurrence et de l'implantation des commerces ; elles concernent enfin la simplification des formalités sous tous leurs aspects.
L'amélioration des conditions de fonctionnement des entreprises passe par un meilleur financement. Dans le domaine de l'investissement, j'ai demandé que l'on modernise le système des prêts CODEVI, pour qu'il vous soit plus profitable. Ainsi, le plafond d'épargne sera augmenté et passera de 15 000 à 20 000 F par compte. Ce mouvement dégagera une dizaine de milliards de Francs de prêts bonifiés au bénéfice des petites et moyennes entreprises. Simultanément les taux seront abaissés. J'ai demandé aux banques que ces taux soient réduits de 8,75 à 8,25 %. Je me félicite par ailleurs de leur décision de baisser le taux de base bancaire qui sert de référence pour les crédits aux PME. En faisant baisser ce taux de 8,60 % à 8,40 %, les banques ont répercuté rapidement la dernière baisse intervenue sur le marché. Je souhaite qu'elles maintiennent ce comportement à l'avenir et qu'elles tiennent compte plus qu'aujourd'hui des besoins des PME.
Plusieurs parlementaires ont déposé des propositions visant à réformer les lois sur la prévention des difficultés et sur la faillite des entreprises. Ils ont raison. Il faut arrêter les phénomènes de faillites en cascade que nous observons trop souvent et dont vous êtes les principales victimes. Le Gouvernement a mis ces propositions à l'étude et je veillerai personnellement à ce que le calendrier des Assemblées permettent l'adoption de cette réforme lors de la session d'automne.
Pour mieux prévenir les situations irréversibles, j'ai également demandé que le champ d'intervention du Comité Interministériel des Restructurations Industrielles, le CIRI, ainsi que celui des comités régionaux et départementaux CORRI et CODEFI, soit élargi au secteur du bâtiment et travaux publics, aux industries agroalimentaires et à certains services. Les capacités financières d'intervention du CIRI ont déjà été doublées par abondement de 400 MF. Si nécessaire du fait de cette extension, des besoins financiers supplémentaires seront dégagés en loi de finances rectificative de fin d'année. Ainsi l'Etat se met en mesure d'accroître considérablement son effort en faveur des entreprises en difficulté.
J'ai parlé tout à l'heure des mesures en faveur de la trésorerie des petites et moyennes entreprises. Il en est une, fondamentale, sur laquelle d'importants progrès restent à faire. Je veux parler des délais de paiement. En supprimant le décalage d'un mois du remboursement de la TVA, l'Etat a montré la voie. Cette voie sera poursuivie. L'administration, que ce soit l'Etat, les collectivités territoriales ou les établissements publics, doivent réduire leurs délais de paiement. Il n'est pas admissible que par leurs retards, les pouvoirs publics mettent en péril des entreprises.
Des études seront menées en ce sens et devront aboutir à des résultats concrets dès cet automne. Monsieur le Ministre des entreprises et du développement économique est chargé en liaison avec Monsieur le Ministre du Budget de l'élaboration de ces propositions.
L'effort du Gouvernement doit être suivi par tous ; je pense notamment au crédit inter-entreprise. Les délais observés aujourd'hui, bien souvent imposés aux plus petites entreprises contre leur gré, ne sont pas acceptables car ils menacent leur survie et accroissent la fragilité de notre tissu économique.
Par ailleurs, pour réduire le traumatisme que constitue parfois la cession ou la transmission des entreprises, la politique de réduction des impôts qui frappent les ventes d'entreprises sera poursuivie. Je souhaite également que soient étudiées toutes les mesures juridiques qui permettraient de faciliter la transmission des entreprises.
Dans le domaine du commerce et de la distribution, l'évolution constatée ces dernières années en matière d'ouverture de grandes surfaces ne pouvait durer : en 1986 630 000 m2 ouverts, en 1989 le double, en 1992 plus du triple : nous étions arrivés l'an dernier à 1 900 000 m2. Il était temps de faire une pause pour examiner sereinement les possibilités de maîtriser ces excès. C'est la raison pour laquelle j'ai annoncé au Sénat mon souhait que soit suspendue l'implantation des grandes surfaces.
Je voudrais souligner, à ce sujet, combien est important pour notre pays, pour notre espace rural comme pour l'animation de nos villes, le maintien d'un commerce et d'un artisanat de proximité. Cette forme d'activité joue un rôle irremplaçable dans la vie sociale. Ce rôle doit être pris en compte et protégé. La solidarité nationale doit jouer dans ce domaine également.
La période de suspension doit être mise à profit pour renforcer les obligations imposées aux demandeurs afin que les conséquences pour l'ensemble du tissu économique de l'ouverture d'un grand magasin soient mieux évaluées. A l'issue de cette période, il conviendra de procéder à un réexamen des règles relatives à l'urbanisme commercial. Il conviendra aussi et surtout de revoir les règles de concurrence entre les grandes surfaces, leurs fournisseurs, et le petit commerce, en particulier le commerce rural. L'aménagement des règles relatives aux implantations des grandes surfaces devra donc être complété par une loi sur la concurrence. Il ne s'agit pas d'alimenter l'opposition entre les grands et les petits. Il s'agit là encore d'assurer à chacun des conditions de concurrence équilibrées et de donner à tous un cadre autorisant le développement et la prospérité, dans un souci de meilleur aménagement du territoire.
Par ailleurs, vous avez à maintes reprises souligné la complexité des procédures administratives auxquelles toutes les entreprises mais surtout les PME sont confrontées. Les moyens que vous pouvez consacrer à ces tâches sont en effet sans commune mesure avec ceux des grandes entreprises. Dans ce domaine également, les pouvoirs publics ont le devoir d'améliorer la situation des PME. Je vous confirme que ce sujet est une priorité du Gouvernement. C'est pourquoi j'ai délégué au ministre du développement économique chargé des PME, du commerce et de l'artisanat la présidence de la commission de simplification des formalités administratives pour toutes les simplifications touchant à l'entreprise. Grâce au travail d'analyse et de recensement effectué par votre Confédération, une première série de propositions sera présentée dès cet été.
Les simplifications administratives sont une préoccupation de tous les instants. Un énorme travail reste à faire dans ce domaine, vous l'avez montré. Nous ne nous arrêterons pas en chemin.
Très récemment, vous l'avez rappelé, le Conseil Economique et Social a remis un rapport détaillé sur l'entreprise individuelle et son avenir. J'ai demandé que les propositions formulées soient analysées, afin de faciliter l'essor de ce type d'activité pour donner un cadre simple et souple à tous ceux qui ont la volonté d'entreprendre.
Trop souvent, l'entreprise petite ou moyenne subit les contraintes que lui imposent ses donneurs d'ordre. La relation entre grande entreprise et sous-traitant doit participer du mouvement de solidarité prôné par le Gouvernement. C'est pourquoi j'ai demandé qu'on me fasse des propositions pour que soit élaboré un code de bonne conduite de la sous-traitance. Il ne s'agit pas là d'abord de modifier les dispositions législatives ou réglementaires même si des améliorations peuvent être apportées à la loi actuelle, mais plutôt d'accords contractuels. J'ai la conviction que l'adhésion à un tel code deviendra petit à petit une nécessité pour tous et que les grandes entreprises réaliseront alors mieux que leur avenir et leur développement est lié à la bonne santé de leurs sous-traitants.Mesdames et messieurs les chefs d'entreprises, vous militez pour un patriotisme économique votre président l'a excellemment rappelé. Il faut en effet que chacun, à sa place, prenne toutes ses responsabilités dans l'effort de la lutte pour l'emploi et pour le redressement. Je vous ai exposé comment le Gouvernement assume et assumera les siennes. Par votre présence en nombre, par le soutien que vous manifestez à l'action que nous menons, par le dynamisme dont vous faites preuve au service de vos idées et de vos entreprises, je suis convaincu que vous aurez à coeur de jouer pleinement votre rôle. Nous savons que les temps sont difficiles. Mais nous savons aussi que grâce aux efforts de tous, la croissance économique reviendra plus tôt. Nous en avons la certitude. C'est pourquoi nous redoublerons de courage. Ensemble, nous avons confiance en l'avenir. Ensemble, nous oeuvrerons au redressement de la France.
Mesdames et Messieurs les chefs d'entreprises,
Le Gouvernement a trouvé la France dans une situation économique difficile. Les déficits publics ont des niveaux jamais atteints par le passé. Pour la première fois depuis vingt ans, notre pays va connaître une récession en 1993.
Cette situation difficile, le Gouvernement en a pris toute la mesure. Depuis trois mois, il s'est donc engagé résolument dans une politique de redressement et de courage. Nous avons mis l'accent sur l'assainissement de notre économie pour que le chômage diminue.
Une telle politique ne saurait surprendre les chefs d'entreprise que vous êtes. Un gestionnaire sait que la fuite en avant n'est jamais la solution. Pour investir, pour lancer une nouvelle activité, il faut avoir une base saine.
L'assainissement de notre économie passe, vous le savez, par une maîtrise des déficits publics, tant budgétaires que sociaux. La dérive observée ces dernières années doit cesser si nous ne voulons pas être happés par le piège de la dette. Vous le savez bien : les déficits d'aujourd'hui ce sont les impôts de demain. Or la France est déjà le pays développé qui a les impôts et les cotisations les plus lourds. C'est la raison pour laquelle la loi de finances rectificative et la loi quinquennale sur les finances publiques ont prévu une limitation et une réduction progressive du déficit.
Le Gouvernement a également trouvé une économie exposée à une concurrence internationale toujours plus vive. Dans ce domaine aussi, nous avons pris, dès notre arrivée, des initiatives qui tranchaient avec la politique de nos prédécesseurs. En effet, j'ai pleinement conscience qu'il est de mon devoir de veiller à ce que les produits et services que vous fournissez se battent à armes égales sur les marchés internationaux. Il est profondément anormal que certains pays s'entourent de mesures protectionnistes et profitent de l'ouverture des marchés européens pour exercer une concurrence déloyale. J'ai tenu à m'entretenir directement à Bruxelles avec la Commission européenne et à Washington avec M. CLINTON de la nécessité d'une égalité de traitement dans les négociations du GATT.
Cette semaine, à Copenhague, la France a été entendue : le Conseil Européen a entériné l'idée selon laquelle il ne saurait y avoir d'accord que global - c'est-à-dire sur tous les sujets y compris l'agriculture expressément citée. C'est un point fondamental sur lequel nous ne pouvions transiger. Le Conseil a également affirmé sa conviction que la négociation doit être multilatérale, qu'elle doit permettre la promotion de l'emploi et préserver l'identité européenne, c'est-à-dire nos politiques communes.
La position de la France n'est pas dictée par la défense de certains intérêts catégoriels, comme certains veulent le laisser entendre. La position de la France est une position juste. Comment accepter que les Etats-Unis puissent décider unilatéralement un accroissement de près de 100 % des taxes d'importation de certains de nos produits ? Ce que veut la France, ce n'est pas être protégée davantage que ses voisins, c'est ne pas l'être moins. Ce qu'elle refuse, ce sont les pratiques déloyales telles que les contrefaçons ou le dumping social que vous dénonciez tout à l'heure.
A l'inverse, il serait illusoire de penser - et ceux qui le laisseraient entendre prendraient de lourdes responsabilités face à l'avenir - que la solution réside dans la fermeture de nos frontières. Notre économie est désormais ouverte sur l'extérieur. Plus d'un salarié sur quatre travaille aujourd'hui pour l'exportation. C'est pour nous une grande chance, à condition que cette ouverture puisse en retour nous profiter en élargissant les marchés accessibles à nos entreprises, c'est à dire en élargissant vos marchés. La France a besoin d'emploi; c'est par l'ouverture des marchés qu'elle les trouvera.
L'emploi est la première priorité du Gouvernement. Le but fondamental de notre politique, c'est la lutte contre le chômage, la lutte pour l'emploi. C'est sans conteste dans ce domaine que la situation qui nous a été laissée est la plus critique. Avec la montée du chômage c'est la cohésion même du pays qui est menacée. La lutte contre le chômage est l'affaire de tous. Elle demandera à tous du courage et des efforts. Elle demandera également un grand mouvement de solidarité. Cette solidarité, elle naît naturellement au contact des réalités auxquelles vous êtes quotidiennement confrontés. Je sais que, mieux que quiconque, vous saurez en faire preuve.
Pour sa part, le Gouvernement a multiplié les actions et les incitations financières ; c'est ainsi qu'un effort sans précédent a été mené en faveur du bâtiment et des travaux publics, par la mise en place d'un plan de relance qui apportera plus de 20 milliards de francs de commandes nouvelles à ce secteur ; un effort sans précédent a également été consenti en faveur de la réinsertion des chômeurs grâce notamment au doublement de la prime offerte dans le cadre des contrats de retour à l'emploi ; tout contrat d'embauche d'un jeune assorti d'une action de formation, signé en 1993 ouvrira droit à une prime versée à l'entreprise ; de plus, le Gouvernement a décidé d'alléger le coût des bas salaires par la budgétisation des cotisations familiales pour les revenus les plus bas. Cette mesure est la première étape de la suppression totale des cotisations d'allocations familiales supportées par les entreprises. Enfin, nous avons fortement incité au développement de l'apprentissage grâce au relèvement substantiel du crédit d'impôt pour l'embauche d'un apprenti.
Puis-je rappeler un chiffre ? En 1993 toute embauche d'un apprenti dans une petite entreprise ouvrira droit à une aide minimale de 14 000 F de la part de l'Etat.
La mise en place de l'ensemble de ce dispositif sera facilitée par le succès de l'emprunt dont la souscription a été lancée hier et qui est un appel à la confiance des Français dans l'action de lutte pour le redressement et pour l'emploi.
Ce combat ne peut toutefois être gagné par le Gouvernement seul. Par son action, le Gouvernement entend créer un environnement favorable à l'éclosion et au développement de l'esprit d'innovation et de l'esprit d'entreprise. Ces vertus, qui vous caractérisent, la France en a besoin. C'est l'entreprise et plus particulièrement la petite et moyenne entreprise qui sait le plus facilement et le plus efficacement évoluer et créer des emplois. L'engagement que vous venez de prendre solennellement de relever aux côtés du Gouvernement le défi pour l'emploi me confirme le bien fondé de cette analyse ; permettez-moi de vous rendre aujourd'hui publiquement hommage.
Comment passer sous silence l'importance que vous représentez dans l'économie de notre pays ? Les statistiques sont éloquentes. On vous qualifie de petit ou moyen. Mais quand vous êtes tous ensemble, votre activité représente le double de celle des grandes entreprises. Vous créez 30 % de la richesse nationale soit également le double de celle des grandes entreprises. Vos employés représentent le tiers de la population active de la France.
Conscient de votre dynamisme et de l'importance que vous représentez pour notre pays, j'ai souhaité que votre spécificité soit prise en compte. A cet effet, un ministère du développement économique chargé des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, que j'ai confié à M. MADELIN, a été créé. Le Gouvernement vous écoute et vous accorde une confiance toute particulière pour le redressement du pays.
J'ai rappelé les grandes orientations de la politique du Gouvernement et les premières mesures générales qui ont été prises pour sa mise en oeuvre. Au delà de ces mesures générales, j'ai le souci d'aller plus loin plus particulièrement pour vous, les petites et moyennes entreprises et pour l'emploi.
J'ai pleinement conscience de votre dynamisme. J'ai aussi pleinement conscience de vos besoins. C'est pourquoi, parmi les premières mesures prises, figurent en bonne place celles destinées à conforter votre trésorerie. D'ores et déjà, la baisse de près de 4 points en trois mois des taux d'intérêt à court terme, fruit du message de rigueur et de confiance du Gouvernement, est un acquis substantiel. Il représente un allégement de charges de 40 MdsF pour l'ensemble des entreprises. Le remboursement du décalage d'un mois de la TVA qui interviendra dès juillet pour les petites entreprises contribuera également à leur donner un ballon d'oxygène. Pour les autres entreprises, la créance correspondant au décalage d'un mois pourra être mobilisée auprès des banques. Dès juillet sera également mis en place le mécanisme de garantie par la SOFARIS de prêts destinés à couvrir des besoins de trésorerie. Enfin, les contraintes mises en place par le précédent Gouvernement en matière de taxe professionnelle sont supprimées : vous ne supporterez plus dans votre trésorerie de fin d'année un montant de la taxe professionnelle supérieur au plafond de 3,5 % de la valeur ajoutée.
Trop souvent, les transmissions d'entreprises sont synonymes de cessation d'activité. Le préjudice économique subi par la société dans son ensemble est alors considérable. C'est pourquoi des allégements significatifs ont d'ores et déjà été consentis pour faciliter la transmission des entreprises. Le paiement des droits de succession ou de donation peut être étalé pendant 15 ans à des conditions financières très favorables. La fiscalité sur les ventes de fonds de commerce a été réduite, particulièrement pour les petits commerces. 80 % des cessions de fonds de commerce seront désormais soumis à une taxation inférieure à 5 % au lieu de plus de 14 %, il y a encore peu de temps.
Je vous l'ai dit, le Gouvernement travaille à redonner aux Français confiance en eux, confiance en leur entreprise, confiance en leur économie. C'est cette confiance retrouvée qui permettra, avec l'aide de tous, le redressement et la prospérité. La confiance se gagne, mais il faut également l'entretenir. Pour cela, il faut mettre en place des mesures structurelles qui regardent le moyen terme. Il faut également une action suivie dans le temps.
C'est la justification de la loi quinquennale sur les finances publiques, qui montre notre volonté réelle et durable de redressement. C'est également ce qui motive la loi quinquennale pour l'emploi, que prépare en ce moment le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. La lutte pour la baisse des taux d'intérêt sera poursuivie. La lutte contre l'exclusion que représente le chômage sera, avec votre contribution, elle aussi poursuivie.
Pour les PME-PMI également, le Gouvernement inscrira son action dans la durée.
C'est pourquoi au-delà des mesures déjà prises et que je viens d'évoquer, d'autres actions et d'autres réflexions sont d'ores et déjà en cours. Elles concernent en particulier l'amélioration des conditions de fonctionnement des entreprises et de prévention des défaillances ; elles visent également à améliorer les conditions de la concurrence et de l'implantation des commerces ; elles concernent enfin la simplification des formalités sous tous leurs aspects.
L'amélioration des conditions de fonctionnement des entreprises passe par un meilleur financement. Dans le domaine de l'investissement, j'ai demandé que l'on modernise le système des prêts CODEVI, pour qu'il vous soit plus profitable. Ainsi, le plafond d'épargne sera augmenté et passera de 15 000 à 20 000 F par compte. Ce mouvement dégagera une dizaine de milliards de Francs de prêts bonifiés au bénéfice des petites et moyennes entreprises. Simultanément les taux seront abaissés. J'ai demandé aux banques que ces taux soient réduits de 8,75 à 8,25 %. Je me félicite par ailleurs de leur décision de baisser le taux de base bancaire qui sert de référence pour les crédits aux PME. En faisant baisser ce taux de 8,60 % à 8,40 %, les banques ont répercuté rapidement la dernière baisse intervenue sur le marché. Je souhaite qu'elles maintiennent ce comportement à l'avenir et qu'elles tiennent compte plus qu'aujourd'hui des besoins des PME.
Plusieurs parlementaires ont déposé des propositions visant à réformer les lois sur la prévention des difficultés et sur la faillite des entreprises. Ils ont raison. Il faut arrêter les phénomènes de faillites en cascade que nous observons trop souvent et dont vous êtes les principales victimes. Le Gouvernement a mis ces propositions à l'étude et je veillerai personnellement à ce que le calendrier des Assemblées permettent l'adoption de cette réforme lors de la session d'automne.
Pour mieux prévenir les situations irréversibles, j'ai également demandé que le champ d'intervention du Comité Interministériel des Restructurations Industrielles, le CIRI, ainsi que celui des comités régionaux et départementaux CORRI et CODEFI, soit élargi au secteur du bâtiment et travaux publics, aux industries agroalimentaires et à certains services. Les capacités financières d'intervention du CIRI ont déjà été doublées par abondement de 400 MF. Si nécessaire du fait de cette extension, des besoins financiers supplémentaires seront dégagés en loi de finances rectificative de fin d'année. Ainsi l'Etat se met en mesure d'accroître considérablement son effort en faveur des entreprises en difficulté.
J'ai parlé tout à l'heure des mesures en faveur de la trésorerie des petites et moyennes entreprises. Il en est une, fondamentale, sur laquelle d'importants progrès restent à faire. Je veux parler des délais de paiement. En supprimant le décalage d'un mois du remboursement de la TVA, l'Etat a montré la voie. Cette voie sera poursuivie. L'administration, que ce soit l'Etat, les collectivités territoriales ou les établissements publics, doivent réduire leurs délais de paiement. Il n'est pas admissible que par leurs retards, les pouvoirs publics mettent en péril des entreprises.
Des études seront menées en ce sens et devront aboutir à des résultats concrets dès cet automne. Monsieur le Ministre des entreprises et du développement économique est chargé en liaison avec Monsieur le Ministre du Budget de l'élaboration de ces propositions.
L'effort du Gouvernement doit être suivi par tous ; je pense notamment au crédit inter-entreprise. Les délais observés aujourd'hui, bien souvent imposés aux plus petites entreprises contre leur gré, ne sont pas acceptables car ils menacent leur survie et accroissent la fragilité de notre tissu économique.
Par ailleurs, pour réduire le traumatisme que constitue parfois la cession ou la transmission des entreprises, la politique de réduction des impôts qui frappent les ventes d'entreprises sera poursuivie. Je souhaite également que soient étudiées toutes les mesures juridiques qui permettraient de faciliter la transmission des entreprises.
Dans le domaine du commerce et de la distribution, l'évolution constatée ces dernières années en matière d'ouverture de grandes surfaces ne pouvait durer : en 1986 630 000 m2 ouverts, en 1989 le double, en 1992 plus du triple : nous étions arrivés l'an dernier à 1 900 000 m2. Il était temps de faire une pause pour examiner sereinement les possibilités de maîtriser ces excès. C'est la raison pour laquelle j'ai annoncé au Sénat mon souhait que soit suspendue l'implantation des grandes surfaces.
Je voudrais souligner, à ce sujet, combien est important pour notre pays, pour notre espace rural comme pour l'animation de nos villes, le maintien d'un commerce et d'un artisanat de proximité. Cette forme d'activité joue un rôle irremplaçable dans la vie sociale. Ce rôle doit être pris en compte et protégé. La solidarité nationale doit jouer dans ce domaine également.
La période de suspension doit être mise à profit pour renforcer les obligations imposées aux demandeurs afin que les conséquences pour l'ensemble du tissu économique de l'ouverture d'un grand magasin soient mieux évaluées. A l'issue de cette période, il conviendra de procéder à un réexamen des règles relatives à l'urbanisme commercial. Il conviendra aussi et surtout de revoir les règles de concurrence entre les grandes surfaces, leurs fournisseurs, et le petit commerce, en particulier le commerce rural. L'aménagement des règles relatives aux implantations des grandes surfaces devra donc être complété par une loi sur la concurrence. Il ne s'agit pas d'alimenter l'opposition entre les grands et les petits. Il s'agit là encore d'assurer à chacun des conditions de concurrence équilibrées et de donner à tous un cadre autorisant le développement et la prospérité, dans un souci de meilleur aménagement du territoire.
Par ailleurs, vous avez à maintes reprises souligné la complexité des procédures administratives auxquelles toutes les entreprises mais surtout les PME sont confrontées. Les moyens que vous pouvez consacrer à ces tâches sont en effet sans commune mesure avec ceux des grandes entreprises. Dans ce domaine également, les pouvoirs publics ont le devoir d'améliorer la situation des PME. Je vous confirme que ce sujet est une priorité du Gouvernement. C'est pourquoi j'ai délégué au ministre du développement économique chargé des PME, du commerce et de l'artisanat la présidence de la commission de simplification des formalités administratives pour toutes les simplifications touchant à l'entreprise. Grâce au travail d'analyse et de recensement effectué par votre Confédération, une première série de propositions sera présentée dès cet été.
Les simplifications administratives sont une préoccupation de tous les instants. Un énorme travail reste à faire dans ce domaine, vous l'avez montré. Nous ne nous arrêterons pas en chemin.
Très récemment, vous l'avez rappelé, le Conseil Economique et Social a remis un rapport détaillé sur l'entreprise individuelle et son avenir. J'ai demandé que les propositions formulées soient analysées, afin de faciliter l'essor de ce type d'activité pour donner un cadre simple et souple à tous ceux qui ont la volonté d'entreprendre.
Trop souvent, l'entreprise petite ou moyenne subit les contraintes que lui imposent ses donneurs d'ordre. La relation entre grande entreprise et sous-traitant doit participer du mouvement de solidarité prôné par le Gouvernement. C'est pourquoi j'ai demandé qu'on me fasse des propositions pour que soit élaboré un code de bonne conduite de la sous-traitance. Il ne s'agit pas là d'abord de modifier les dispositions législatives ou réglementaires même si des améliorations peuvent être apportées à la loi actuelle, mais plutôt d'accords contractuels. J'ai la conviction que l'adhésion à un tel code deviendra petit à petit une nécessité pour tous et que les grandes entreprises réaliseront alors mieux que leur avenir et leur développement est lié à la bonne santé de leurs sous-traitants.Mesdames et messieurs les chefs d'entreprises, vous militez pour un patriotisme économique votre président l'a excellemment rappelé. Il faut en effet que chacun, à sa place, prenne toutes ses responsabilités dans l'effort de la lutte pour l'emploi et pour le redressement. Je vous ai exposé comment le Gouvernement assume et assumera les siennes. Par votre présence en nombre, par le soutien que vous manifestez à l'action que nous menons, par le dynamisme dont vous faites preuve au service de vos idées et de vos entreprises, je suis convaincu que vous aurez à coeur de jouer pleinement votre rôle. Nous savons que les temps sont difficiles. Mais nous savons aussi que grâce aux efforts de tous, la croissance économique reviendra plus tôt. Nous en avons la certitude. C'est pourquoi nous redoublerons de courage. Ensemble, nous avons confiance en l'avenir. Ensemble, nous oeuvrerons au redressement de la France.