Déclaration de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur la politique en faveur de l'emploi des jeunes au budget de 2002 et sa mise en oeuvre à travers le réseau des missions locales, Paris le 7 novembre 2001.

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Circonstance : Réunion du Conseil national des missions locales (CNML) à Paris le 7 novembre 2001

Texte intégral

Monsieur le Président du CNML,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec grand plaisir que je vous retrouve pour conclure les travaux de votre Conseil National. Je salue tout d'abord les nouveaux membres qui vous ont rejoints et que je remercie de s'investir dans cette mission.
Nous nous sommes rencontrés l'année dernière et j'ai retenu de notre échange beaucoup de remarques, de suggestions qui nous ont permis d'enrichir notre politique en faveur de l'emploi des jeunes et qui sont à la base des propositions que j'ai faites dans le cadre du second programme de lutte contre l'exclusion tel que notamment le renforcement du programme Trace sur lequel je reviendrai tout à l'heure.
J'ai surtout acquis lors de cet échange puis à l'occasion de mes rencontres avec des équipes de Missions locales, que nous avions dans le domaine de l'emploi des jeunes un objectif partagé :
permettre l'accès à l'emploi de tous les jeunes et contribuer à leur garantir une véritable égalité des chances.
Nous avons également dans la conduite de cette politique une responsabilité complémentaire : L'État dans la définition d'une politique en faveur de l'emploi des jeunes, c'est à dire des moyens des outils, des objectifs. Vous élus locaux, dans la mise en uvre de politiques locales en mobilisant les partenaires au sein des missions locales que vous présidez et en participant à l'animation de ce réseau.
NOTRE PRIORITE : L'ACCES A L EMPLOI ET L'EGALITE DES CHANCES.
En 1997 il y avait 588 000 jeunes demandeurs d'emploi dont 130 409 inscrits depuis plus d'un an. Le gouvernement a souhaité développer une politique volontariste en faveur de l'emploi des jeunes pour réduire ce taux de chômage inacceptable. Le soutien à la croissance, l'enrichissement de la croissance en emplois, la mise en uvre de programmes ambitieux tels que celui des nouveaux services emploi jeunes, le programme Trace ont contribué à cette amélioration significative :
Les chiffres sont là. En quatre ans :
- Le nombre de jeunes au chômage (352 000 contre 588 000) a baissé de 40%
- Les jeunes chômeurs de longue durée sont passés de 130 000 à 65 000
- le taux de chômage des jeunes est passé de 28,1% à 18,7%
Mais nous savons que notre effort ne doit pas se relâcher car les à-coups de la conjoncture requièrent toute notre vigilance et que trop de nombreux jeunes n'ont pas profité du retour à l'emploi : la baisse du chômage est moins significative pour ceux qui ont quitté l'école au niveau du brevet ou sans diplôme et le taux de chômage des jeunes sans diplôme est supérieur de 20 points par rapport à ceux qui ont le bac.
Des phénomènes plus structurels affectent également l'emploi des jeunes :
-une polarisation sur certains secteurs d'activité : services, commerce, restauration
-une forte proportion de jeunes employés sur des métiers non qualifiés
-une plus forte précarisation des emplois et une instabilité des parcours
-une prépondérance des emplois aidés..
Tous ces éléments nous confortent dans nos choix et nos projets : l'emploi des jeunes reste une priorité nationale et c'est bien cet objectif que nous avons inscrit dans le projet de loi de finances 2002 et que nous avons anticipé avec les mesures supplémentaires créées en cette fin d'année.
Les 80 000 places supplémentaires de CES notifiées aux services pour le dernier trimestre doivent permettre à plus de jeunes de trouver une réponse à leur première étape de parcours d'insertion professionnelle : un CES de trois ou six mois c'est une première expérience professionnelle dans une association, une collectivité locale qui permet de trouver les premiers repères de l'emploi, de se poser la question du choix du métier, de faire émerger le besoin de formation, d'avoir une première rémunération :c'est le premier pas de l'insertion.
Il y également en 2002 le doublement du programme Trace : 120 000 jeunes seront accompagnés dans un parcours à la fin de 2002. Pour vous permettre d'améliorer les capacités d'accompagnement personnalisé, nous créons 410 postes supplémentaires de référents sans cofinancement préalable exigé. Souvent, on fait le reproche à l'État de se défausser sur les collectivités territoriales. Tel n'est pas le cas dans le cadre du programme Trace. L'État a assumé ses responsabilités en finançant intégralement la bourse d'accès à l'emploi, en renforçant le réseau de manière significative. Les missions locales sont des structures partenariales et vous y êtes très attachés. C'est pourquoi je souhaite vivement que les conseils régionaux, les communes mais aussi les conseils généraux s'associent à cet effort pour accroître les moyens. Ce cofinancement contribuera à maintenir la densité de l'accompagnement et sa qualité. Nous avons besoin de ces postes car les premières évaluations du programme démontrent bien que la plus value du programme réside dans cet accompagnement personnalisé qui permet un suivi global de toutes les problématiques rencontrées par ces jeunes.
J'ai bien entendu vos remarques sur les jeunes en situation de grande difficulté pour lesquels même l'accès au programme est difficile. Pour ces jeunes la durée de l'accompagnement sera prolongé si nécessaire de 6 mois (10 000 places sont prévues) et cet effort devra s'accompagner d'un travail de partenariat avec les associations d'accueil d'urgence et de réinsertion, les équipes de prévention spécialisée formalisé dans des conventions à conclure entre les missions locales et les institutions spécialisées.
Nous avons également pris en considération les remarques tenant à l'insécurisation financière des jeunes en parcours Trace. Beaucoup de jeunes sont dépourvus de toute ressource et trop souvent des jeunes ont dû interrompre leurs parcours du fait de l'absence totale de revenus entre deux étapes de travail, de formation. Le FAJ (Fonds d'aide aux jeunes )peut résoudre des difficultés aiguës : il ne suffit pas. La création du dispositif de la bourse d'accès à l'emploi (300 euros par mois versés dans la limite de 900 euros par semestre ) est une première étape. Le dispositif sera opérationnel au premier janvier.
Ces dispositifs sont les piliers de notre action en faveur de l'emploi des jeunes mais ils ne sont pas les seuls. L'alternance, les nouveaux emplois (10 000 emplois supplémentaires en 2002), le programme de consolidation que nous avons lancé en juillet sont autant de solutions que les missions locales doivent proposer aux jeunes. Il est pour cela nécessaire que le réseau des missions locales s'inscrive dans les politiques territoriales de l'emploi et soit considéré comme partie prenante du service public de l'emploi de façon à assurer une parfaite fluidité entre les opérateurs les mesures : c'est indispensable.
CETTE POLITIQUE DOIT SES RESULTATS A LA MOBILISATION DU RESEAU ET SA DYNAMIQUE D'ANIMATION.
Une politique n'a de sens que si elle est relayée au plus près des usagers. Je veux ici sincèrement remercier le Conseil national des Missions locales, son bureau, son Président pour l'excellent travail effectué depuis trois ans. Vous avez engagé avec succès plusieurs chantiers pour organiser le réseau autour de la convention collective, enrichir le partenariat. Vous avez pris l'initiative dans les réflexions sur la territorialisation des politiques, l'évaluation la capitalisation des expériences.
La convention collective.
Avec ce chantier important vous avez voulu et accompli un immense travail qui permet aujourd'hui d'harmoniser le réseau, de donner aux salariés des références, des modes d'organisation communs. Je voudrai remercier particulièrement M. Loiseau qui a été à l'origine de cette négociation dont tous aujourd'hui se félicitent. Je sais aussi le sérieux avec lequel se fait le travail de positionnement des salariés dans la grille. Comme vous le savez nous accompagnerons en 2002 une partie du surcoût de cette application et j'ai obtenu la possibilité de prendre en charge une partie de cette majoration pour 2001.
Il faut veiller à ce que cette convention puisse bénéficier à tous les salariés. Elle est à ce titre un élément décisif de l'unification de ce réseau.
Il reste le problème posé par les Missions locales constituées sous forme de GIP. Ce n'est pas une question facile. Je souhaite Monsieur le Président que votre Conseil se penche sur cette question en créant un groupe de travail avec des représentants des structures concernées et que vous puissiez me faire pour le début de l'année prochaine des propositions pour que nous puissions répondre à cette difficulté.
Enfin pour ce qui concerne le devenir des jeunes que vous employez dans le cadre du dispositif des emplois jeunes je précise que vous pouvez bénéficier des dispositions prises pour la consolidation des emplois.
Le travail de partenariat
Nous l'avons vu : il est nécessaire pour mener à bien cette immense tâche d'accompagnement des jeunes vers l'emploi. Vous avez conclu avec l'ANPE une convention pour la mise en uvre du PAP et je me réjouis de voir que sa mise en uvre au plan local se déroule bien et qu'elle génère des coopérations fructueuses.
Il en est de même pour la convention conclue avec l'AFPA. Pour toucher les jeunes les plus en difficulté, la DIIJ développe actuellement de nombreux accords avec les réseaux associatifs.
L'animation territoriale
Le protocole 2000 constitue un élément majeur pour dynamiser l'activité des missions locales. Il est le signe de l'engagement de l'État. De nombreux conseils régionaux s'impliquent fortement dans l'action des missions locales. Des associations régionales de missions locales se sont constituées dans presque toutes les régions. Toutes les conditions sont réunies pour que dans chaque région, ce protocole trouve une application concrète définie entre ces trois partenaires.
Les missions locales par leur histoire, leur fonctionnement quotidien sont des acteurs de la territorialisation des politiques. J'ai eu l'occasion de rappeler aux Préfets et aux Directeurs du travail que vous êtes des partenaires évidents des équipes locales d'action, que vos programmes doivent se conjuguer avec les actions pour l'emploi menées dans les territoires que ce soit pour travailler sur les difficultés de recrutement, l'accompagnement du développement des nouveaux services, la dynamisation de l'offre de formation. Vous êtes aussi par le service de proximité que vous offrez aux jeunes, qu'ils résident dans des zones rurales ou urbaines sensibles, des relais pour les politiques de développement durable et équilibré.
L'évaluation et la capitalisation
La force et la légitimité d'un réseau c'est sa capacité à évaluer son action. Je sais que c'est un de vos axes de travail. Il est nécessaire en effet de pouvoir définir un ensemble d'indicateurs qui permettent de mesurer et de valoriser l'action menée au sein des structures. Cette évaluation permanente et transparente ne peut que contribuer à l'amélioration des résultats. C'est aussi l'occasion de repérer les bonnes pratiques et de capitaliser les expériences.
La sécurisation financière du réseau.
Dernier point que je ne saurais éluder. Nous avons fait de la sécurisation du réseau un objectif prioritaire.
Les crédits d'État en faveur du réseau qui étaient de 300 MF en 1997 vont passer à 523 MF en 2002. Cet effort est prolongé en 2002 avec le soutien à Trace, l'accompagnement de la mise en uvre de la convention collective. Nous avons eu cette année des soucis avec le FSE. La nouvelle programmation est construite sur la notion de remboursement de dépenses et nous avons du adapter nos modes de financement. Le réseau des missions locales doit continuer à bénéficier d'un système qui lui permette d'éviter les ruptures de trésorerie et nous sommes en discussion avec le Budget pour améliorer le dispositif pour 2002.
Les travaux que vous menez sur l'harmonisation des règles de gestion et de conventionnement pluriannuel d'objectif, outils qui doivent permettre à chaque mission locale de travailler dans des conditions de transparence et de sérénité indispensables à l'exécution de leur mission doivent aboutir rapidement.
La Délégation interministérielle à l'insertion des Jeunes traite l'ensemble de ces dossiers en étroite concertation avec le CNML. Je sais qu'elle vous apporte un appui efficace. Je compte beaucoup sur cette collaboration pour développer et harmoniser ce réseau dont le rôle est désormais reconnu et clarifié.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, nous avons ensemble contribué à améliorer la situation de l'emploi des jeunes. Mais nous ne devons pas nous satisfaire des résultats observés aujourd'hui. Nous savons que c'est un combat de tous les instants et qu'il est plus que jamais impératif de donner confiance aux jeunes de ce pays et plus encore à ceux qui ont le sentiment d'être oubliés.
Je voudrais que nous puissions ensemble, dans les mois qui viennent relever deux défis exigeants mais qui seraient le symbole de notre capacité à travailler ensemble :
- Faire en sorte qu'il n'y ait plus un seul jeune chômeur de longue durée : c'est la véritable première étape de toute politique de lutte contre le chômage de longue durée : quand les jeunes ont un emploi, quand ils ont des projets quand leurs parents ne se désespèrent plus pour eux alors on peut ensemble s'attaquer aux autres échéances.
- Poursuivre le chantier de l'autonomie des jeunes : l'emploi est bien sûr la véritable autonomie ; mais pour y parvenir nous savons qu'il faut donner aux jeunes les moyens de vivre, d'étudier, d'apprendre, de se loger, de se cultiver
La commission pour l'autonomie des jeunes va commencer ses travaux et toutes les contributions seront les bienvenues. Vous y serez représentés et je sais que nous pourrons compter sur vos analyses et propositions.
Le président Destot m'a fait part de votre intention d'organiser dans le courant du mois de janvier un rassemblement national des missions locales pour présenter le dispositif de la bourse d'accès à l'emploi et échanger au sein d'ateliers sur des pratiques innovantes. C'est une très bonne initiative à laquelle je participerais avec grand plaisir.
D'ores et déjà je vous remercie de votre engagement pour l'emploi des jeunes.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 12 novembre 2001)