Texte intégral
Dans " surveiller et punir " Michel FOUCAULT a approché la logique de l'État qui excluait pour sanctionner.
Dans " rassurer et protéger " Jean DELUMEAU décrit les grandes peurs qui aboutissent au sentiment d'insécurité depuis des siècles en Occident.
Ces quatre mots de deux professeurs au Collège de France à 15 ans d'intervalle " surveiller, punir, rassurer et protéger " résument la complémentarité et parfois la confrontation entre les missions de la justice et de la police.
Face à la délinquance la police surveille, la justice punit. La justice rassure, la police protège.
" Law and order " disent les Britanniques : la justice applique la loi, la police assure l'ordre.
Pour ce travail en commun il faut que chacun assume pleinement sa mission, ce qui ne veut pas dire que ces missions se confondent.
C'est dans la différence de ces missions légales que se met en valeur une politique républicaine de sécurité.
- La justice n'est pas un sous-traitant mais un aboutissement. La police transmet, la justice tranche. Ce n'est pas pour rien que la justice porte le nom d'une vertu.
- La justice n'est pas plurielle : on ne parle pas, ou on ne devrait pas parler, de justice privée, et nul n'évoque les justices municipales. La justice est une, judiciaire ou administrative, civile ou pénale, prud'homale ou commerciale. Elle est constitutionnellement garantie et reconnue.
- La justice n'est pas question : elle est réponse : réponse dans un cadre strict, c'est la procédure. Réponse souvent lente et inadaptée mais réponse obligée (le défaut de la justice serait le déni de justice), et réponse qui oblige : c'est l'exécution des décisions de justice.
La justice n'est pas rivale de la police puisqu'elle est solidaire au seul nom de la loi. Le policier pratique l'arrestation " au nom de la loi ", et la justice est rendue au nom du peuple français. Il est des juges de paix, il est des officiers de paix. La police craint les bavures et la justice craint les erreurs.
Toutes deux ont pour objectif de servir la loi et de prouver la vérité.
La loi du Code de Procédure Pénale affirme que le Parquet " requiert son application " et dirige et contrôle la police judiciaire. De cette affirmation naît une architecture qu'il s'agit de mettre en oeuvre de la manière la plus efficace dans le respect des compétences de chacun, au service des citoyens.
Aujourd'hui, la justice n'est plus " une pâle machine à considérants ", elle est aussi un service public éminent qui doit rendre compte de ses résultats, de ses doutes, de ses succès ou de ses échecs. Elle doit être attentive à l'accueil du public, à la diversité des réponses attendues et à ce qu'il advient après ces décisions. Par celles-ci, elle contribue à mettre en valeur les principes républicains, à prendre position sur les droits et devoirs de la citoyenneté, à constater des accords, à distribuer des conseils, à prendre des sanctions.
La jurisprudence est discours, elle est parfois référence, elle ne doit jamais être une facilité qui ignorerait ou méconnaîtrait le cas individuel qu'elle a à traiter. Cette mission essentielle de la justice est le point d'appui nécessaire pour des villes plus sûres sans laquelle toute politique de sécurité intérieure vient se dissoudre dans les hésitations de la politique pénale quotidienne. Aussi la communication que je présenterai au prochain Conseil des Ministres rappellera-t-elle que les Procureurs mettent en oeuvre l'action publique dans le cadre des directives pénales que je leur adresserai.
La politique pénale doit être égale sur le territoire parce qu'elle engage la responsabilité du Gouvernement et garantit l'égalité des citoyens devant la loi.
Il m'apparaît que la justice doit :
- donner du sens à la sanction pénale ( 1 ),
-diversifier ses réponses pénales, particulièrement à l'égard des mineurs, ( 2 ),
- participer pleinement à la politique de la ville ( 3 ).
I -DONNER UN SENS À LA SANCTION PÉNALE
La justice est l'expression même de la citoyenneté. Elle est l'institution où vienne se confronter les tensions sociales et qui, en s'appuyant sur les valeurs citoyennes, tranche les conflits qui lui sont soumis.
Ce rôle de régulateur lui est spécifique, et elle le remplit à l'occasion d'un débat contradictoire qui lui permet de prendre du recul et de rechercher quels sont les principes fondateurs de notre société qui doivent être mis en avant.
A première vue vient à l'esprit l'action immédiate qui est remplie par le juge lorsqu'il rend une décision de condamnation assortie d'une sanction pénale. Cette intervention "première" contribue à la sécurité publique par ses effets immédiats : éloignement de certains délinquants dangereux, fin du trouble à l'ordre public constitué par des actes graves, apaisement des passions liées à un fait criminel... On peut qualifier cette intervention de première urgence.
Pourtant il convient de ne pas s'arrêter à cette première constatation mais d'aller plus avant dans la mission de la justice.
Chaque décision judiciaire porte en elle son exécution: elle serait vaine sans exécution. La nature de la sanction pénale et son exécution sont des facteurs de lutte conte l'insécurité. En prononçant des sanctions adaptées le juge contribue très directement à limiter la récidive et donc l'insécurité. L'objectif de la décision n'est pas seulement de réprimer, il est aussi de faire en sorte que le délinquant ne réitère pas ses actes et que le passage par l'institution judiciaire contribue à l'amendement du délinquant. Le but de la justice n'est certainement pas de voir les statistiques de son contentieux pénal s'alourdir: il est de faire en sorte que la réponse apportée permette en elle-même de faire baisser la délinquance.
Cette préoccupation est présente de manière constante à tous les stades de l'intervention de l'institution judiciaire. La médiation pénale, que je compte encourager, permet d'éviter le procès par l'indemnisation immédiate de la victime. Elle contribue à favoriser l'amendement du coupable et apporte une satisfaction à la victime. Le prononcé, autant que cela est possible, de peines alternatives à l'emprisonnement comme le travail d'intérêt général ou l'ajournement de la peine, est un moyen efficace de favoriser la réinsertion et donc d'éviter la récidive.
L'action du juge de l'application des peines, assisté par les services de réinsertion de l'administration pénitentiaire en milieux ouvert et fermé, est l'illustration de ce rôle de prévention de la récidive et donc de lutte contre l'insécurité. En accordant notamment des libérations conditionnelles le juge permet directement de faire reculer l'insécurité. Des études récentes ont conclu que le taux de récidive était inversement proportionnel à la durée de la détention, et qu'il était deux fois plus faible après une mesure de libération conditionnelle qu'après une sortie de prison en fin de peine. Je tiendrai compte de ces orientations, dans les projets que je souhaite développer dans ce domaine.
L'institution judiciaire est une et aux côtés des juridictions, il convient de souligner l'action conduite par l'administration pénitentiaire dans toutes ses composantes, ainsi que par la protection judiciaire de la jeunesse en matière de lutte contre la récidive, pour mesurer comment la justice contribue quotidiennement de façon très directe à la prévention et à la sécurité.
La réponse judiciaire, nous le voyons, à un sens très clair: contribuer à assurer la sécurité; à la place qui est la sienne par une intervention durable et constructive.
Enfin pour conclure sur ce point il m'apparaît utile de rappeler que la certitude de la peine est la garantie la plus efficace contre le développement de la délinquance.
Le sentiment d'impunité peut résulter de l'absence d'élucidation des affaires que la police et non la justice peut seule maîtriser.
II -DIVERSIFIER CES RÉPONSES PÉNALES PARTICULIÈREMENT POUR LES MINEURS :
Les réponses judiciaires à la délinquance quotidienne qui est la plus perturbante pour nos concitoyens ont considérablement évolué au cours des quinze dernières années.
La justice a su évoluer en transformant ses modes d'action qui ont été profondément renouvelés à l'initiative des Procureurs de la République dont je tiens à rappeler l'action dynamique dans la mise en oeuvre de la politique pénale.
Traitement en temps réel, territorialisation, réponse à la délinquance des mineurs et aide aux victimes sont désormais les axes de cette politique pénale que j'aurai l'occasion de rappeler aux procureurs généraux lors d'une prochaine réunion.
l - Le traitement en temps réel contribue de manière particulièrement efficace à la politique de sécurité à laquelle participent les Procureurs de la République et les juridictions pénales.
Ce nouveau mode de traitement des affaires, voulu et encouragé par la chancellerie, utilisé par la plupart des Parquets implique une saisine immédiate des magistrats dès l'interpellation de l'auteur d'une infraction pénale par les officiers de Police Judiciaire. Il permet d'apporter des réponses rapides et diversifiées aux actes de délinquance. Ainsi sur un total de plus de 397 000 décisions rendues par les tribunaux correctionnels, la convocation immédiate du mis en cause à l'issue de la garde à vue, par un officier ou un agent de police judiciaire représente 177 000 affaires, soit 44%, reléguant au second rang la citation directe par le ministère public qui était le mode habituel de saisine des juridictions il y de cela 15 ans.
Cette évolution se traduit donc par une accélération des procédures lorsque des poursuites sont exercées mais également par une exécution effective et rapide des sanctions, spécialement des peines de substitution tel que le travail d'intérêt général.
L'efficacité et la lisibilité de l'action judiciaire sont ainsi améliorées tant à l'égard des victimes qu'à l'égard des auteurs d'infractions.
Le second intérêt majeur du traitement en temps réel est de favoriser le recours à des réponses alternatives aux poursuites.
La médiation pénale, le classement de la procédure assortie d'une condition par exemple de remboursement, le simple rappel à la loi ou l'avertissement constituent dans de nombreux cas des mesures beaucoup plus significatives que des poursuites, à la fois pour l'auteur et pour la victime, dès lors qu'elles sont mises en oeuvre dans un temps aussi proche que possible de l'infraction.
Ces modes non juridictionnels de traitement des affaires qui ne peuvent bien sûr s'appliquer à des faits d'une certaine gravité, comportent une dimension essentiellement éducative visant à modifier le comportement du mis en cause en l'incitant notamment à réparer les conséquences de l'infraction. Ils contribuent à la prévention de la récidive qui est un objectif primordial de la politique de sécurité. Je suis persuadée que l'utilisation de cette voie doit être encore développée, notamment grâce au soutien que vous apportez, Mesdames et Messieurs les élus, en particulier dans le cadre des travaux des conseils communaux de prévention de la délinquance, à l'action des bénévoles et des associations dans la mise en oeuvre des mesures alternatives décidées par les magistrats.
2 - La territorialisation
Si la Justice pénale est désormais plus rapide, elle doit aussi se rapprocher des citoyens en inscrivant son action sur un territoire plus précis, notamment dans les zones où les problèmes de délinquance et d'insécurité sont les plus sensibles.
Les contrats locaux de sécurité qui seront signés par les préfets, les Procureurs de la République et les maires, constitueront à cet égard, j'en suis convaincue, l'instrument privilégié d'une politique efficace de sécurité.
J'ai souhaité pour cette raison que les Parquets y soient pleinement associés.
Les Procureurs de la République et les magistrats du siège spécialement les juges des enfants et les juges d'application des peines, qui participeront à la mise en oeuvre de ces contrats pourront grâce aux partenariat local disposer d'informations utiles sur la réalité de la délinquance et le sentiment d'insécurité de la population et développer une coopération fructueuse entre les collectivités locales et l'institution judiciaire.
L'engagement de l'autorité judiciaire dans les contrats locaux de sécurité pourra se manifester par la mise en place dans certaines zones où la nécessité de réintroduire la loi et le droit s'impose particulièrement, de structures de justice de proximité.
J'en citerai deux qui constituent une réussite incontestable : les maisons de la justice et du droit et les groupes locaux de traitement de la délinquance.
- les maisons de justice et du droit qui sont actuellement au nombre de 50-dont 13 dans l'île de la Réunion où elles prolongent les modes traditionnels de règlement des conflits- constituent un lieu fédérateur idéal pour monter des projets.
J'ai pu constater, par exemple aux Mureaux, où j'ai inauguré la première maison de Justice du département des Yvelines lundi dernier, que ces lieux sont un support particulièrement propice pour un projet intercommunal qui rassemble sur un même objectif des maires de toutes tendances politiques, d'autant plus que ces élus avaient déjà créé conjointement un bassin d'emploi.
Les Maisons de Justice et du Droit ont aussi beaucoup développé l'aide apportée aux victimes d'infractions pénales. Je veux donner une nouvelle impulsion à ce secteur en développant le soutien aux associations dans le domaine de l'accompagnement personnalisé à la victime d'infraction pénale. En ce sens, je viens de conclure le principe d'un accord-cadre avec I'INAVEM, association nationale d'aide aux victimes, qui s'engage à embaucher 250 emplois-jeunes pour développer ses prestations.
Mais ce service doit être intégré parmi d'autres. Ainsi, il était intéressant de constater qu'aux Mureaux, dans le quartier où est implantée la maison de Justice, voilà plus de 10 ans qu'ont commencé à être tenues dans ce quartier des permanences du centre d'information des droits des femmes. Cette activité s'est étendue à des consultations d'aide aux victimes puis à la médiation pénale et à la gestion de postes de travail d'intérêt général.
- Les groupes locaux de traitement de la délinquance prolongent le souci de territorialisation de l'action de la justice. A Créteil, Nanterre et Bobigny ils ont pour vocation de prendre en compte la situation particulièrement difficile d'un quartier dans tous ses aspects et de la traiter aussi bien par la voie de la prévention que par celle de l'action judiciaire. Les procureurs de la République seront d'ailleurs appelés par la circulaire interministérielle sur les contrats locaux de sécurité à s'engager personnellement dans cette démarche.
3 - La délinquance des mineurs
La Protection Judiciaire de la Jeunesse est l'une des priorités de mon action qui se traduit par un effort budgétaire important se concrétisant par la reprise des recrutements d'éducateurs avec la création de 100 postes dans le projet de loi de finances pour 1998.
Même si la part de la délinquance des mineurs dont la délinquance générale est difficile à mesurer, son influence sur le sentiment d'insécurité est une réalité. L'aggravation des faits de violences commis par les mineurs est partout soulignée.
La rapidité de l'intervention de la Justice pénale concernant les actes de délinquance commis par les mineurs est indispensable pour éviter la récidive.
Une dizaine de Parquets, essentiellement ceux des grandes villes, comme ceux de BOBIGNY, MARSEILLE et LILLE s'efforcent dans cet esprit de mettre en oeuvre une réponse systématique à tous les actes de délinquance commis par les mineurs et spécialement par ceux qui n'ont pas d'antécédent judiciaire. Nous allons aujourd'hui étendre ces modalités de traitement à tous les parquets dans le cadre de directives de politique pénale générale.
Le but recherché est de prévenir les actes de délinquance par des réponses pénales immédiates ayant un effet de rappel à la loi à l'égard des mineurs primo-délinquants.
Les mesures d'aide et de réparation, par exemple la remise en état de locaux dégradés ou des excuses à la victime, constituent à cet égard une forme de médiation pénale particulièrement adaptée à la délinquance des mineurs.
Les solutions éducatives dont la primauté est inscrite dans l'ordonnance de 1945, sont autant que possible privilégiées par les juges des enfants, qui sont saisis de cas souvent très lourds et accomplissent en liaison avec les parents et les éducateurs un travail remarquable à l'égard des mineurs.
A l'égard des mineurs multi-réitérants des réponses nouvelles doivent être mises en oeuvre. J'ai souhaité une évaluation de l'expérience des unités à encadrement éducatif renforcé ( UEER ) qui est actuellement en cours. Ce bilan sans préjugé mené par les inspections générales de trois ministères qui portera également sur les solutions d'hébergement en foyer d'action éducative permettra d'opérer les choix définitifs.
J'entends que le rôle charnière des services éducatifs auprès des tribunaux ( S.E.A.T. ), dépendants de la protection judiciaire de la jeunesse soit valorisé, compte tenu de la qualité des prestations qu'ils offrent aux juridictions pour éclairer les réquisitions et les décisions des magistrats.
4- L'aide aux victimes:
Je veux promouvoir une politique pénale tournée vers les victimes, ces dernières doivent être accueillies, soutenues et indemnisées, c'est pour cette raison que j'ai proposé la création d'un véritable statut des victimes dans le projet de loi sur la délinquance sexuelle qui a été adopté en première lecture par l'assemblée nationale, et qui est en cours de discussion devant le sénat.
L'action des associations d'aide aux victimes sera encouragée non seulement par un soutien financier effectif du ministère de la justice, mais aussi par l'apport des emplois jeunes résultant de la loi récemment adoptée.
III - PARTICIPER PLEINEMENT À LA POLITIOUE DE LA VILLE
La justice est désormais totalement partie prenante de la politique de la Ville.
C'est à partir du rapport de Gilbert BONNEMAISON, de la création des conseils de prévention de la délinquance au début des années 1980, que la justice a commencé à s'ouvrir à ses partenaires extérieurs, à travailler en amont.
Quinze ans plus tard, nous disposons d'un véritable dispositif d'intervention dans les politiques locales que seule la politique de la ville a permis de faire naître puis vivre.
Cette ouverture a permis d'intégrer de nouvelles données dans la culture professionnelle des magistrats, ce qui explique la considérable évolution des pratiques professionnelles, dans le cadre de la politique de la Ville, depuis près de dix ans.
La Justice, en effet, ne peut pas se rendre uniquement dans les Palais et dans ses formes traditionnelles. Elle doit également évoluer dans ses modes de réponses et s'ouvrir vers sur de nouveaux territoires.
Ce lien entre l'économique, le social, le droit, le travail en partenariat dans le cadre de la politique de la ville permet d'intervenir de façon globale pour une plus grande efficacité. Voilà un mode d'approche exemplaire du traitement des lourdes questions de société que nous devons affronter tous ensemble, au lieu de disperser les efforts dans d'inutiles querelles de territoires, qu'ils soient géographiques, politiques ou administratifs.
La politique de la Ville ne peut se réduire à une manne financière ; elle doit constituer le support d'un travail interministériel et partenarial. Sans doute doit-elle connaître aujourd'hui une nouvelle étape, dans laquelle la réponse aux incivilités, la prévention de la délinquance, doivent retrouver une place aujourd'hui insuffisante ou mal identifiée. La DIV doit aider à l'animation de ce travail interministériel dont j'attends beaucoup.
Le rapport demandé à Jean-Pierre Sueur sera très utile pour aider à recaler ce dispositif qui a besoin d'un nouveau souffle.
Mais, en ce qui me concerne, je tiens à affirmer ici la nécessité pour la justice d'amplifier la participation de la justice à la politique de la ville.
Il existe une politique judiciaire de la ville pour intervenir de la façon la plus efficace possible sur les territoires qui ont connu de fortes évolutions démographiques, sociales, confrontés aux problèmes de délinquance, que connaissent tous les grands pôles urbains.
Je veux que les magistrats et fonctionnaires des greffes, de la protection judiciaire de la jeunesse et de l'administration pénitentiaire qui exercent sur les sites de la politique de la ville, confrontés aux difficultés les plus grandes d'exercice de leur métier, soient soutenus par leur administration centrale, que les postes vacants soient remplacés en priorité par rapport à d'autres juridictions moins exposées, qu'ils n'aient pas à réclamer un remplacement de poste, un véhicule pour se déplacer ou un télécopieur pour communiquer sur les sites de la politique de la ville, confrontés aux difficultés les plus grandes d'exercice de leur métier, soient soutenus par leur administration centrale, que les postes vacants soient remplacés en priorité par rapport à d'autres juridictions moins exposées, qu'ils n'aient pas à réclamer un remplacement de poste, un véhicule pour se déplacer ou un télécopieur pour communiquer.
Grâce au dégel des crédits pour l'année 1997 et au projet de budget du ministère de la justice en hausse de 4% pour 1998, j'ai pu donner les instructions nécessaires pour qu'une politique volontariste soit menée en ce sens et je veillerai à son application, même si je sais la réalité des pesanteurs et des délais d'effectivité en la matière.
La justice devient trop le "réceptacle" de tous les dysfonctionnements sociaux. Tout juge des enfants, tout juge de l'application des peines sait que la majeure partie des justiciables qu'il voit dans son cabinet est concernée par ces questions de pauvreté, d'exclusion, de violences subies pendant l'enfance...
La Justice doit aider à recréer le lien social en disant le droit, pas à aggraver l'exclusion. C'est pourquoi un volet essentiel de mon programme de lutte contre l'exclusion est centré sur l'accès au droit des personnes les plus en difficulté. .
Les juges ne se contentent pas de connaître des situations paroxystiques sans tenter de les comprendre, de répondre au symptôme sans traiter la cause. Où que l'on tourne ses yeux lorsque l'on parle de la Justice, on constate que cette institution est au cur des difficultés que connaît notre société et donc au cur de la politique de la ville.
Même au sein du ministère de la Justice, tout n'est pas affaire de loi et de réglementation, rien ne remplace l'engagement des hommes et des femmes. C'est pourquoi j'entends développer le dispositif départemental Justice Ville qui n'a pas encore répondu à toutes les espérances qu'on avait pu placer en lui lorsqu'il a été créé en 1992.
Ainsi, grâce aux échanges que permettent les maisons de Justice et du Droit, grâce aux services qu'elles rendent aux habitants, grâce à la présence des magistrats et leur participation aux actions menées dans les quartiers, l'action de la justice doit également aider à une meilleure perception de nos efforts par la population.
L'intervention d'un magistrat en Maison de Justice et du Droit, ce lieu d'échanges et de mise en commun de savoirs et de savoir-faire, sa participation à un conseil communal de prévention de la délinquance, doivent aussi être, d'une certaine manière, les exemples d'un fonctionnement transparent de la Justice, d'une justice proche et bien comprise, au service des citoyens.
Pour des villes plus sûres, la justice est prête a rencontrer les partenaires, à multiplier les lieux d'échanges et de mise en commun de savoir et de savoir faire.
D'une certaine manière les défis de la sécurité conduisent la justice à se transformer, et à évoluer vers un mode de fonctionnement plus transparent, mieux compris et au service des citoyens.
(Source : http://www.justice.gouv.fr, le 14 septembre 2001)
Dans " rassurer et protéger " Jean DELUMEAU décrit les grandes peurs qui aboutissent au sentiment d'insécurité depuis des siècles en Occident.
Ces quatre mots de deux professeurs au Collège de France à 15 ans d'intervalle " surveiller, punir, rassurer et protéger " résument la complémentarité et parfois la confrontation entre les missions de la justice et de la police.
Face à la délinquance la police surveille, la justice punit. La justice rassure, la police protège.
" Law and order " disent les Britanniques : la justice applique la loi, la police assure l'ordre.
Pour ce travail en commun il faut que chacun assume pleinement sa mission, ce qui ne veut pas dire que ces missions se confondent.
C'est dans la différence de ces missions légales que se met en valeur une politique républicaine de sécurité.
- La justice n'est pas un sous-traitant mais un aboutissement. La police transmet, la justice tranche. Ce n'est pas pour rien que la justice porte le nom d'une vertu.
- La justice n'est pas plurielle : on ne parle pas, ou on ne devrait pas parler, de justice privée, et nul n'évoque les justices municipales. La justice est une, judiciaire ou administrative, civile ou pénale, prud'homale ou commerciale. Elle est constitutionnellement garantie et reconnue.
- La justice n'est pas question : elle est réponse : réponse dans un cadre strict, c'est la procédure. Réponse souvent lente et inadaptée mais réponse obligée (le défaut de la justice serait le déni de justice), et réponse qui oblige : c'est l'exécution des décisions de justice.
La justice n'est pas rivale de la police puisqu'elle est solidaire au seul nom de la loi. Le policier pratique l'arrestation " au nom de la loi ", et la justice est rendue au nom du peuple français. Il est des juges de paix, il est des officiers de paix. La police craint les bavures et la justice craint les erreurs.
Toutes deux ont pour objectif de servir la loi et de prouver la vérité.
La loi du Code de Procédure Pénale affirme que le Parquet " requiert son application " et dirige et contrôle la police judiciaire. De cette affirmation naît une architecture qu'il s'agit de mettre en oeuvre de la manière la plus efficace dans le respect des compétences de chacun, au service des citoyens.
Aujourd'hui, la justice n'est plus " une pâle machine à considérants ", elle est aussi un service public éminent qui doit rendre compte de ses résultats, de ses doutes, de ses succès ou de ses échecs. Elle doit être attentive à l'accueil du public, à la diversité des réponses attendues et à ce qu'il advient après ces décisions. Par celles-ci, elle contribue à mettre en valeur les principes républicains, à prendre position sur les droits et devoirs de la citoyenneté, à constater des accords, à distribuer des conseils, à prendre des sanctions.
La jurisprudence est discours, elle est parfois référence, elle ne doit jamais être une facilité qui ignorerait ou méconnaîtrait le cas individuel qu'elle a à traiter. Cette mission essentielle de la justice est le point d'appui nécessaire pour des villes plus sûres sans laquelle toute politique de sécurité intérieure vient se dissoudre dans les hésitations de la politique pénale quotidienne. Aussi la communication que je présenterai au prochain Conseil des Ministres rappellera-t-elle que les Procureurs mettent en oeuvre l'action publique dans le cadre des directives pénales que je leur adresserai.
La politique pénale doit être égale sur le territoire parce qu'elle engage la responsabilité du Gouvernement et garantit l'égalité des citoyens devant la loi.
Il m'apparaît que la justice doit :
- donner du sens à la sanction pénale ( 1 ),
-diversifier ses réponses pénales, particulièrement à l'égard des mineurs, ( 2 ),
- participer pleinement à la politique de la ville ( 3 ).
I -DONNER UN SENS À LA SANCTION PÉNALE
La justice est l'expression même de la citoyenneté. Elle est l'institution où vienne se confronter les tensions sociales et qui, en s'appuyant sur les valeurs citoyennes, tranche les conflits qui lui sont soumis.
Ce rôle de régulateur lui est spécifique, et elle le remplit à l'occasion d'un débat contradictoire qui lui permet de prendre du recul et de rechercher quels sont les principes fondateurs de notre société qui doivent être mis en avant.
A première vue vient à l'esprit l'action immédiate qui est remplie par le juge lorsqu'il rend une décision de condamnation assortie d'une sanction pénale. Cette intervention "première" contribue à la sécurité publique par ses effets immédiats : éloignement de certains délinquants dangereux, fin du trouble à l'ordre public constitué par des actes graves, apaisement des passions liées à un fait criminel... On peut qualifier cette intervention de première urgence.
Pourtant il convient de ne pas s'arrêter à cette première constatation mais d'aller plus avant dans la mission de la justice.
Chaque décision judiciaire porte en elle son exécution: elle serait vaine sans exécution. La nature de la sanction pénale et son exécution sont des facteurs de lutte conte l'insécurité. En prononçant des sanctions adaptées le juge contribue très directement à limiter la récidive et donc l'insécurité. L'objectif de la décision n'est pas seulement de réprimer, il est aussi de faire en sorte que le délinquant ne réitère pas ses actes et que le passage par l'institution judiciaire contribue à l'amendement du délinquant. Le but de la justice n'est certainement pas de voir les statistiques de son contentieux pénal s'alourdir: il est de faire en sorte que la réponse apportée permette en elle-même de faire baisser la délinquance.
Cette préoccupation est présente de manière constante à tous les stades de l'intervention de l'institution judiciaire. La médiation pénale, que je compte encourager, permet d'éviter le procès par l'indemnisation immédiate de la victime. Elle contribue à favoriser l'amendement du coupable et apporte une satisfaction à la victime. Le prononcé, autant que cela est possible, de peines alternatives à l'emprisonnement comme le travail d'intérêt général ou l'ajournement de la peine, est un moyen efficace de favoriser la réinsertion et donc d'éviter la récidive.
L'action du juge de l'application des peines, assisté par les services de réinsertion de l'administration pénitentiaire en milieux ouvert et fermé, est l'illustration de ce rôle de prévention de la récidive et donc de lutte contre l'insécurité. En accordant notamment des libérations conditionnelles le juge permet directement de faire reculer l'insécurité. Des études récentes ont conclu que le taux de récidive était inversement proportionnel à la durée de la détention, et qu'il était deux fois plus faible après une mesure de libération conditionnelle qu'après une sortie de prison en fin de peine. Je tiendrai compte de ces orientations, dans les projets que je souhaite développer dans ce domaine.
L'institution judiciaire est une et aux côtés des juridictions, il convient de souligner l'action conduite par l'administration pénitentiaire dans toutes ses composantes, ainsi que par la protection judiciaire de la jeunesse en matière de lutte contre la récidive, pour mesurer comment la justice contribue quotidiennement de façon très directe à la prévention et à la sécurité.
La réponse judiciaire, nous le voyons, à un sens très clair: contribuer à assurer la sécurité; à la place qui est la sienne par une intervention durable et constructive.
Enfin pour conclure sur ce point il m'apparaît utile de rappeler que la certitude de la peine est la garantie la plus efficace contre le développement de la délinquance.
Le sentiment d'impunité peut résulter de l'absence d'élucidation des affaires que la police et non la justice peut seule maîtriser.
II -DIVERSIFIER CES RÉPONSES PÉNALES PARTICULIÈREMENT POUR LES MINEURS :
Les réponses judiciaires à la délinquance quotidienne qui est la plus perturbante pour nos concitoyens ont considérablement évolué au cours des quinze dernières années.
La justice a su évoluer en transformant ses modes d'action qui ont été profondément renouvelés à l'initiative des Procureurs de la République dont je tiens à rappeler l'action dynamique dans la mise en oeuvre de la politique pénale.
Traitement en temps réel, territorialisation, réponse à la délinquance des mineurs et aide aux victimes sont désormais les axes de cette politique pénale que j'aurai l'occasion de rappeler aux procureurs généraux lors d'une prochaine réunion.
l - Le traitement en temps réel contribue de manière particulièrement efficace à la politique de sécurité à laquelle participent les Procureurs de la République et les juridictions pénales.
Ce nouveau mode de traitement des affaires, voulu et encouragé par la chancellerie, utilisé par la plupart des Parquets implique une saisine immédiate des magistrats dès l'interpellation de l'auteur d'une infraction pénale par les officiers de Police Judiciaire. Il permet d'apporter des réponses rapides et diversifiées aux actes de délinquance. Ainsi sur un total de plus de 397 000 décisions rendues par les tribunaux correctionnels, la convocation immédiate du mis en cause à l'issue de la garde à vue, par un officier ou un agent de police judiciaire représente 177 000 affaires, soit 44%, reléguant au second rang la citation directe par le ministère public qui était le mode habituel de saisine des juridictions il y de cela 15 ans.
Cette évolution se traduit donc par une accélération des procédures lorsque des poursuites sont exercées mais également par une exécution effective et rapide des sanctions, spécialement des peines de substitution tel que le travail d'intérêt général.
L'efficacité et la lisibilité de l'action judiciaire sont ainsi améliorées tant à l'égard des victimes qu'à l'égard des auteurs d'infractions.
Le second intérêt majeur du traitement en temps réel est de favoriser le recours à des réponses alternatives aux poursuites.
La médiation pénale, le classement de la procédure assortie d'une condition par exemple de remboursement, le simple rappel à la loi ou l'avertissement constituent dans de nombreux cas des mesures beaucoup plus significatives que des poursuites, à la fois pour l'auteur et pour la victime, dès lors qu'elles sont mises en oeuvre dans un temps aussi proche que possible de l'infraction.
Ces modes non juridictionnels de traitement des affaires qui ne peuvent bien sûr s'appliquer à des faits d'une certaine gravité, comportent une dimension essentiellement éducative visant à modifier le comportement du mis en cause en l'incitant notamment à réparer les conséquences de l'infraction. Ils contribuent à la prévention de la récidive qui est un objectif primordial de la politique de sécurité. Je suis persuadée que l'utilisation de cette voie doit être encore développée, notamment grâce au soutien que vous apportez, Mesdames et Messieurs les élus, en particulier dans le cadre des travaux des conseils communaux de prévention de la délinquance, à l'action des bénévoles et des associations dans la mise en oeuvre des mesures alternatives décidées par les magistrats.
2 - La territorialisation
Si la Justice pénale est désormais plus rapide, elle doit aussi se rapprocher des citoyens en inscrivant son action sur un territoire plus précis, notamment dans les zones où les problèmes de délinquance et d'insécurité sont les plus sensibles.
Les contrats locaux de sécurité qui seront signés par les préfets, les Procureurs de la République et les maires, constitueront à cet égard, j'en suis convaincue, l'instrument privilégié d'une politique efficace de sécurité.
J'ai souhaité pour cette raison que les Parquets y soient pleinement associés.
Les Procureurs de la République et les magistrats du siège spécialement les juges des enfants et les juges d'application des peines, qui participeront à la mise en oeuvre de ces contrats pourront grâce aux partenariat local disposer d'informations utiles sur la réalité de la délinquance et le sentiment d'insécurité de la population et développer une coopération fructueuse entre les collectivités locales et l'institution judiciaire.
L'engagement de l'autorité judiciaire dans les contrats locaux de sécurité pourra se manifester par la mise en place dans certaines zones où la nécessité de réintroduire la loi et le droit s'impose particulièrement, de structures de justice de proximité.
J'en citerai deux qui constituent une réussite incontestable : les maisons de la justice et du droit et les groupes locaux de traitement de la délinquance.
- les maisons de justice et du droit qui sont actuellement au nombre de 50-dont 13 dans l'île de la Réunion où elles prolongent les modes traditionnels de règlement des conflits- constituent un lieu fédérateur idéal pour monter des projets.
J'ai pu constater, par exemple aux Mureaux, où j'ai inauguré la première maison de Justice du département des Yvelines lundi dernier, que ces lieux sont un support particulièrement propice pour un projet intercommunal qui rassemble sur un même objectif des maires de toutes tendances politiques, d'autant plus que ces élus avaient déjà créé conjointement un bassin d'emploi.
Les Maisons de Justice et du Droit ont aussi beaucoup développé l'aide apportée aux victimes d'infractions pénales. Je veux donner une nouvelle impulsion à ce secteur en développant le soutien aux associations dans le domaine de l'accompagnement personnalisé à la victime d'infraction pénale. En ce sens, je viens de conclure le principe d'un accord-cadre avec I'INAVEM, association nationale d'aide aux victimes, qui s'engage à embaucher 250 emplois-jeunes pour développer ses prestations.
Mais ce service doit être intégré parmi d'autres. Ainsi, il était intéressant de constater qu'aux Mureaux, dans le quartier où est implantée la maison de Justice, voilà plus de 10 ans qu'ont commencé à être tenues dans ce quartier des permanences du centre d'information des droits des femmes. Cette activité s'est étendue à des consultations d'aide aux victimes puis à la médiation pénale et à la gestion de postes de travail d'intérêt général.
- Les groupes locaux de traitement de la délinquance prolongent le souci de territorialisation de l'action de la justice. A Créteil, Nanterre et Bobigny ils ont pour vocation de prendre en compte la situation particulièrement difficile d'un quartier dans tous ses aspects et de la traiter aussi bien par la voie de la prévention que par celle de l'action judiciaire. Les procureurs de la République seront d'ailleurs appelés par la circulaire interministérielle sur les contrats locaux de sécurité à s'engager personnellement dans cette démarche.
3 - La délinquance des mineurs
La Protection Judiciaire de la Jeunesse est l'une des priorités de mon action qui se traduit par un effort budgétaire important se concrétisant par la reprise des recrutements d'éducateurs avec la création de 100 postes dans le projet de loi de finances pour 1998.
Même si la part de la délinquance des mineurs dont la délinquance générale est difficile à mesurer, son influence sur le sentiment d'insécurité est une réalité. L'aggravation des faits de violences commis par les mineurs est partout soulignée.
La rapidité de l'intervention de la Justice pénale concernant les actes de délinquance commis par les mineurs est indispensable pour éviter la récidive.
Une dizaine de Parquets, essentiellement ceux des grandes villes, comme ceux de BOBIGNY, MARSEILLE et LILLE s'efforcent dans cet esprit de mettre en oeuvre une réponse systématique à tous les actes de délinquance commis par les mineurs et spécialement par ceux qui n'ont pas d'antécédent judiciaire. Nous allons aujourd'hui étendre ces modalités de traitement à tous les parquets dans le cadre de directives de politique pénale générale.
Le but recherché est de prévenir les actes de délinquance par des réponses pénales immédiates ayant un effet de rappel à la loi à l'égard des mineurs primo-délinquants.
Les mesures d'aide et de réparation, par exemple la remise en état de locaux dégradés ou des excuses à la victime, constituent à cet égard une forme de médiation pénale particulièrement adaptée à la délinquance des mineurs.
Les solutions éducatives dont la primauté est inscrite dans l'ordonnance de 1945, sont autant que possible privilégiées par les juges des enfants, qui sont saisis de cas souvent très lourds et accomplissent en liaison avec les parents et les éducateurs un travail remarquable à l'égard des mineurs.
A l'égard des mineurs multi-réitérants des réponses nouvelles doivent être mises en oeuvre. J'ai souhaité une évaluation de l'expérience des unités à encadrement éducatif renforcé ( UEER ) qui est actuellement en cours. Ce bilan sans préjugé mené par les inspections générales de trois ministères qui portera également sur les solutions d'hébergement en foyer d'action éducative permettra d'opérer les choix définitifs.
J'entends que le rôle charnière des services éducatifs auprès des tribunaux ( S.E.A.T. ), dépendants de la protection judiciaire de la jeunesse soit valorisé, compte tenu de la qualité des prestations qu'ils offrent aux juridictions pour éclairer les réquisitions et les décisions des magistrats.
4- L'aide aux victimes:
Je veux promouvoir une politique pénale tournée vers les victimes, ces dernières doivent être accueillies, soutenues et indemnisées, c'est pour cette raison que j'ai proposé la création d'un véritable statut des victimes dans le projet de loi sur la délinquance sexuelle qui a été adopté en première lecture par l'assemblée nationale, et qui est en cours de discussion devant le sénat.
L'action des associations d'aide aux victimes sera encouragée non seulement par un soutien financier effectif du ministère de la justice, mais aussi par l'apport des emplois jeunes résultant de la loi récemment adoptée.
III - PARTICIPER PLEINEMENT À LA POLITIOUE DE LA VILLE
La justice est désormais totalement partie prenante de la politique de la Ville.
C'est à partir du rapport de Gilbert BONNEMAISON, de la création des conseils de prévention de la délinquance au début des années 1980, que la justice a commencé à s'ouvrir à ses partenaires extérieurs, à travailler en amont.
Quinze ans plus tard, nous disposons d'un véritable dispositif d'intervention dans les politiques locales que seule la politique de la ville a permis de faire naître puis vivre.
Cette ouverture a permis d'intégrer de nouvelles données dans la culture professionnelle des magistrats, ce qui explique la considérable évolution des pratiques professionnelles, dans le cadre de la politique de la Ville, depuis près de dix ans.
La Justice, en effet, ne peut pas se rendre uniquement dans les Palais et dans ses formes traditionnelles. Elle doit également évoluer dans ses modes de réponses et s'ouvrir vers sur de nouveaux territoires.
Ce lien entre l'économique, le social, le droit, le travail en partenariat dans le cadre de la politique de la ville permet d'intervenir de façon globale pour une plus grande efficacité. Voilà un mode d'approche exemplaire du traitement des lourdes questions de société que nous devons affronter tous ensemble, au lieu de disperser les efforts dans d'inutiles querelles de territoires, qu'ils soient géographiques, politiques ou administratifs.
La politique de la Ville ne peut se réduire à une manne financière ; elle doit constituer le support d'un travail interministériel et partenarial. Sans doute doit-elle connaître aujourd'hui une nouvelle étape, dans laquelle la réponse aux incivilités, la prévention de la délinquance, doivent retrouver une place aujourd'hui insuffisante ou mal identifiée. La DIV doit aider à l'animation de ce travail interministériel dont j'attends beaucoup.
Le rapport demandé à Jean-Pierre Sueur sera très utile pour aider à recaler ce dispositif qui a besoin d'un nouveau souffle.
Mais, en ce qui me concerne, je tiens à affirmer ici la nécessité pour la justice d'amplifier la participation de la justice à la politique de la ville.
Il existe une politique judiciaire de la ville pour intervenir de la façon la plus efficace possible sur les territoires qui ont connu de fortes évolutions démographiques, sociales, confrontés aux problèmes de délinquance, que connaissent tous les grands pôles urbains.
Je veux que les magistrats et fonctionnaires des greffes, de la protection judiciaire de la jeunesse et de l'administration pénitentiaire qui exercent sur les sites de la politique de la ville, confrontés aux difficultés les plus grandes d'exercice de leur métier, soient soutenus par leur administration centrale, que les postes vacants soient remplacés en priorité par rapport à d'autres juridictions moins exposées, qu'ils n'aient pas à réclamer un remplacement de poste, un véhicule pour se déplacer ou un télécopieur pour communiquer sur les sites de la politique de la ville, confrontés aux difficultés les plus grandes d'exercice de leur métier, soient soutenus par leur administration centrale, que les postes vacants soient remplacés en priorité par rapport à d'autres juridictions moins exposées, qu'ils n'aient pas à réclamer un remplacement de poste, un véhicule pour se déplacer ou un télécopieur pour communiquer.
Grâce au dégel des crédits pour l'année 1997 et au projet de budget du ministère de la justice en hausse de 4% pour 1998, j'ai pu donner les instructions nécessaires pour qu'une politique volontariste soit menée en ce sens et je veillerai à son application, même si je sais la réalité des pesanteurs et des délais d'effectivité en la matière.
La justice devient trop le "réceptacle" de tous les dysfonctionnements sociaux. Tout juge des enfants, tout juge de l'application des peines sait que la majeure partie des justiciables qu'il voit dans son cabinet est concernée par ces questions de pauvreté, d'exclusion, de violences subies pendant l'enfance...
La Justice doit aider à recréer le lien social en disant le droit, pas à aggraver l'exclusion. C'est pourquoi un volet essentiel de mon programme de lutte contre l'exclusion est centré sur l'accès au droit des personnes les plus en difficulté. .
Les juges ne se contentent pas de connaître des situations paroxystiques sans tenter de les comprendre, de répondre au symptôme sans traiter la cause. Où que l'on tourne ses yeux lorsque l'on parle de la Justice, on constate que cette institution est au cur des difficultés que connaît notre société et donc au cur de la politique de la ville.
Même au sein du ministère de la Justice, tout n'est pas affaire de loi et de réglementation, rien ne remplace l'engagement des hommes et des femmes. C'est pourquoi j'entends développer le dispositif départemental Justice Ville qui n'a pas encore répondu à toutes les espérances qu'on avait pu placer en lui lorsqu'il a été créé en 1992.
Ainsi, grâce aux échanges que permettent les maisons de Justice et du Droit, grâce aux services qu'elles rendent aux habitants, grâce à la présence des magistrats et leur participation aux actions menées dans les quartiers, l'action de la justice doit également aider à une meilleure perception de nos efforts par la population.
L'intervention d'un magistrat en Maison de Justice et du Droit, ce lieu d'échanges et de mise en commun de savoirs et de savoir-faire, sa participation à un conseil communal de prévention de la délinquance, doivent aussi être, d'une certaine manière, les exemples d'un fonctionnement transparent de la Justice, d'une justice proche et bien comprise, au service des citoyens.
Pour des villes plus sûres, la justice est prête a rencontrer les partenaires, à multiplier les lieux d'échanges et de mise en commun de savoir et de savoir faire.
D'une certaine manière les défis de la sécurité conduisent la justice à se transformer, et à évoluer vers un mode de fonctionnement plus transparent, mieux compris et au service des citoyens.
(Source : http://www.justice.gouv.fr, le 14 septembre 2001)