Texte intégral
A. Hausser On attend la décision du Conseil constitutionnel sur la Corse aujourd'hui, mais je voudrais que l'on revienne sur l'annulation de la disposition sur le droit de licenciement économique. Les communistes et les Verts réclament avec beaucoup d'impatience un nouveau texte ; L. Jospin leur réplique qu'il faudra agir dans la sérénité. Est-ce que finalement, cette annulation ne vous arrange pas ?
- "On oublie toujours une chose : on parle de l'annulation d'un article..."
Bien sûr, puisque c'est contre cet article que tout le monde protestait !
-"Qu'est-ce qui est important pour les Français ? C'est que cette loi soit votée. Il y a plus de 100 articles qui transformeront les choses pour beaucoup de gens et qui protègent davantage les salariés par rapport au licenciement. Tout cela est dans la loi qui a été validée. Il y a aussi tout ce qui concerne la formation professionnelle, la validation des acquis professionnels attendus par des millions de Français. Il y a la loi contre le harcèlement moral, il y a tout cela dedans et on n'en parle pas."
On en a beaucoup parlé pendant la discussion...
- "Ce qui m'intéresse, c'est ce que les Français vont vivre maintenant. Nous sommes là pour réformer, pour faire bouger les choses, et depuis cinq ans, nous avons voté beaucoup de lois et beaucoup de réformes. Il y en a une dans l'actualité : c'est l'Allocation personnalisée pour l'autonomie des personnes âgées, qui concernera des centaines de milliers de personnes et c'est aussi des créations d'emplois. Ce sont les lois que nous avons votées et qui, pour l'essentiel, ont été validées. Quelquefois, on polémique parce qu'un ou deux articles sont annulés par le Conseil constitutionnel, mais en cinq ans, aucune majorité n'aura autant réformé que nous et nous en sommes très fiers."
Vous parlez "réforme" et je vous parlais précisément du Conseil constitutionnel. La disposition invalidée était très contestée par le patronat et même par des patrons de gauche ; ma question n'était donc pas tout à fait infondée. Ne va-t-il pas falloir revenir sur cette considération ?
- "Vous l'avez dit vous-même : le Premier ministre a déjà répondu à cette question à l'Assemblée nationale. On ne peut pas improviser une rédaction. Appliquons déjà tout ce qu'il y a dans la loi ; je crois que beaucoup de dispositions sont d'ailleurs contestées par le Medef, mais appliquons les parce qu'elles protègent davantage les salariés. Ils ont besoin d'être protégés dans des périodes de grandes mutations. Il ne faut pas que la seule variable d'ajustement lorsqu'il y a des difficultés dans une entreprises, ce soit les salariés eux-mêmes, c'est-à-dire le licenciement comme une forme de facilité. Il faut à tout prix éviter le licenciement. Parfois, malheureusement, il est inéluctable, mais il faut alors accompagner les entreprises et les salariés pour que des solutions soient trouvées pour eux, mais aussi pour les sites concernés. C'est une approche équilibrée du développement économique ; il y a à la fois la liberté des entreprises, la liberté d'entreprendre, mais il y a aussi le droit et la défense des salariés."
On a entendu beaucoup de critiques contre le Medef et son irruption dans la campagne, puisque le Medef veut harceler, interpeller les candidats. Est-ce que ce n'est pas un peu facile de dire que le Medef est le porte-parole de la droite ?
- "Le Medef fait tomber les faux-nez de J. Chirac et des chiraquiens, car il dit tout haut ce que la droite n'ose pas. La droite a un programme, mais elle ne l'assume pas, et il se trouve que le Medef rend service parce que, quand il parle de "harcèlement des politiques", c'est surtout la droite qu'il veut harceler. Au fond, si J. Chirac est à la recherche d'un programme, E.-A. Seillière lui livre tout ficelé."
Vous pensez qu'il a besoin de lui ?
- "Pourquoi pas E.-A. Seillière, Premier ministre de J. Chirac - puisque A. Juppé ne veut plus l'être -, M. Kessler aux Affaires sociales ?! Au-delà de ça, je crois que le RPR a senti le danger, parce qu'ils sentent bien que les solutions ultralibérales proposées - il s'agit de réponses ultralibérales très dures -, si elles étaient appliquées, par exemple pour ce qui concerne la Sécurité sociale et sa privatisation partielle, les Français n'en veulent pas. Et comme ce sont les solutions auxquelles les représentants de la droite, que je rencontre à l'Assemblée nationale depuis cinq ans, font sans cesse référence - je pense par exemple aux fonds de pension -, les échéances approchant, ces gens-là ont peur de le dire tout haut. D'une certaine façon, E.-A. Seillière, lui qui ne s'embarrasse pas de précaution, le dit tout haut et c'est tout à fait intéressant dans le débat de la présidentielle."
Vous voyez en lui un futur Premier ministre ?
- "On a l'impression que c'est quelqu'un qui veut faire de la politique."
En tout cas, il ne le dit pas. Le dernier point fort de la session parlementaire qui sera assez courte, c'est ce que l'on appelle le "toilettage" de la loi sur la présomption d'innocence. Il n'y a pas unanimité dans vos rangs - on l'a vu pendant le débat en commission -, parce que certains disent que c'est le fondement même de la loi qui est remis en question avec les restrictions qui seront mises en place. Vous n'avez pas été un peu débordé par le côté sécuritaire ?
- "L'essentiel de la loi est une vraie avancée. Je pense par exemple à la présence de l'avocat à la première heure de la garde à vue, pour s'entretenir avec son client et l'informer de ses droits. Je pense que c'est un progrès et il n'est pas question d'y toucher. Il y a beaucoup d'autres choses du même type, qui protège la présomption d'innocence mais qui protège aussi le droit des victimes. C'est contenu dans cette loi, on n'en parle pas assez. Par contre, ce qui était important, et c'est tout à fait l'honneur du législateur, c'est de regarder s'il n'y a pas des dysfonctionnements dans l'application, si les objectifs principaux de la loi sont bien atteints, si ce n'est pas trop difficile à mettre en oeuvre. Le Premier ministre a confié une mission - une mission d'enquête en quelque sorte -, à J. Dray, sur le terrain."
Il y avait deux missions...
- "Oui. Il est allé écouter les policiers, les gendarmes, les procureurs et il est vrai qu'un certain nombre de points ne vont pas dans la mise en oeuvre de la loi. Non pas ses principes, mais la mise en oeuvre concrète. Ce que nous voulons, c'est que cette loi soit appliquée dans les meilleures conditions possibles, à la fois pour préserver la liberté, la présomption d'innocence mais aussi pour poursuivre les coupables et faire en sorte qu'ils soient condamnés. C'est l'objectif principal."
Oui, c'est l'objectif mais dans la mise en oeuvre, c'est compliqué quand même !
- "Nous apportons quelques modifications. Nous le faisons par réalisme parce que le sens de la responsabilité, c'est de voir la réalité en face et surtout d'agir sur cette réalité pour la transformer. Il ne faut pas décourager ceux qui se battent pour la liberté et la protection des citoyens."
On s'en est rendu compte un peu tard !
- "Mais pas du tout ! Je crois que ce Gouvernement et cette majorité n'ont jamais été égalés par d'autres gouvernements et d'autres majorités ..."
On a vu des manifestations de policiers, comme on n'en avait jamais vu non plus !
- "... par rapport à l'action menée en faveur de la police, de la gendarmerie, de la justice. Mais il y a un tel retard à rattraper, un telle crise de confiance par rapport à ces institutions, qu'il est bien normal que nous n'ayons pas tout de suite le résultat. Mais notre volonté est bien de faire en sorte que la sécurité des Français soit assurée par les moyens qui protègent en même temps la liberté des Français."
Sur un plan plus politique, vous êtes assurés d'avoir une majorité pour ce toilettage ?
- "Je suis convaincu que ceux qui aujourd'hui hésitent auront le sens des responsabilités. Je suis donc tout à fait confiant, parce qu'on nous attend sur des résultats concrets et je pense qu'au moment où les chiffres de la délinquance tombent, qu'ils sont en augmentation et très préoccupants, il ne faut pas avoir peur de prendre ses responsabilités sans se renier."
Etes-vous optimiste pour arriver à un accord avec les Verts ?
- "C'est le bon sens et le sens des responsabilités. Je ne pense pas un instant que les différentes composantes de l'actuelle majorité, qui auront chacune un candidat à la présidentielle, puissent, aux moments essentiels, faciliter la tâche de J. Chirac, qui ne souhaite qu'une chose, c'est être élu - on comprend pourquoi. L'intérêt de la France, c'est que L. Jospin soit élu président de la République, car les Français le connaissent, l'apprécient et savent qu'ils peuvent compter sur lui pour affronter de nouveaux défis"
(Source http://Sig.premier-ministre.gouv.fr, le 17 janvier 2002)
- "On oublie toujours une chose : on parle de l'annulation d'un article..."
Bien sûr, puisque c'est contre cet article que tout le monde protestait !
-"Qu'est-ce qui est important pour les Français ? C'est que cette loi soit votée. Il y a plus de 100 articles qui transformeront les choses pour beaucoup de gens et qui protègent davantage les salariés par rapport au licenciement. Tout cela est dans la loi qui a été validée. Il y a aussi tout ce qui concerne la formation professionnelle, la validation des acquis professionnels attendus par des millions de Français. Il y a la loi contre le harcèlement moral, il y a tout cela dedans et on n'en parle pas."
On en a beaucoup parlé pendant la discussion...
- "Ce qui m'intéresse, c'est ce que les Français vont vivre maintenant. Nous sommes là pour réformer, pour faire bouger les choses, et depuis cinq ans, nous avons voté beaucoup de lois et beaucoup de réformes. Il y en a une dans l'actualité : c'est l'Allocation personnalisée pour l'autonomie des personnes âgées, qui concernera des centaines de milliers de personnes et c'est aussi des créations d'emplois. Ce sont les lois que nous avons votées et qui, pour l'essentiel, ont été validées. Quelquefois, on polémique parce qu'un ou deux articles sont annulés par le Conseil constitutionnel, mais en cinq ans, aucune majorité n'aura autant réformé que nous et nous en sommes très fiers."
Vous parlez "réforme" et je vous parlais précisément du Conseil constitutionnel. La disposition invalidée était très contestée par le patronat et même par des patrons de gauche ; ma question n'était donc pas tout à fait infondée. Ne va-t-il pas falloir revenir sur cette considération ?
- "Vous l'avez dit vous-même : le Premier ministre a déjà répondu à cette question à l'Assemblée nationale. On ne peut pas improviser une rédaction. Appliquons déjà tout ce qu'il y a dans la loi ; je crois que beaucoup de dispositions sont d'ailleurs contestées par le Medef, mais appliquons les parce qu'elles protègent davantage les salariés. Ils ont besoin d'être protégés dans des périodes de grandes mutations. Il ne faut pas que la seule variable d'ajustement lorsqu'il y a des difficultés dans une entreprises, ce soit les salariés eux-mêmes, c'est-à-dire le licenciement comme une forme de facilité. Il faut à tout prix éviter le licenciement. Parfois, malheureusement, il est inéluctable, mais il faut alors accompagner les entreprises et les salariés pour que des solutions soient trouvées pour eux, mais aussi pour les sites concernés. C'est une approche équilibrée du développement économique ; il y a à la fois la liberté des entreprises, la liberté d'entreprendre, mais il y a aussi le droit et la défense des salariés."
On a entendu beaucoup de critiques contre le Medef et son irruption dans la campagne, puisque le Medef veut harceler, interpeller les candidats. Est-ce que ce n'est pas un peu facile de dire que le Medef est le porte-parole de la droite ?
- "Le Medef fait tomber les faux-nez de J. Chirac et des chiraquiens, car il dit tout haut ce que la droite n'ose pas. La droite a un programme, mais elle ne l'assume pas, et il se trouve que le Medef rend service parce que, quand il parle de "harcèlement des politiques", c'est surtout la droite qu'il veut harceler. Au fond, si J. Chirac est à la recherche d'un programme, E.-A. Seillière lui livre tout ficelé."
Vous pensez qu'il a besoin de lui ?
- "Pourquoi pas E.-A. Seillière, Premier ministre de J. Chirac - puisque A. Juppé ne veut plus l'être -, M. Kessler aux Affaires sociales ?! Au-delà de ça, je crois que le RPR a senti le danger, parce qu'ils sentent bien que les solutions ultralibérales proposées - il s'agit de réponses ultralibérales très dures -, si elles étaient appliquées, par exemple pour ce qui concerne la Sécurité sociale et sa privatisation partielle, les Français n'en veulent pas. Et comme ce sont les solutions auxquelles les représentants de la droite, que je rencontre à l'Assemblée nationale depuis cinq ans, font sans cesse référence - je pense par exemple aux fonds de pension -, les échéances approchant, ces gens-là ont peur de le dire tout haut. D'une certaine façon, E.-A. Seillière, lui qui ne s'embarrasse pas de précaution, le dit tout haut et c'est tout à fait intéressant dans le débat de la présidentielle."
Vous voyez en lui un futur Premier ministre ?
- "On a l'impression que c'est quelqu'un qui veut faire de la politique."
En tout cas, il ne le dit pas. Le dernier point fort de la session parlementaire qui sera assez courte, c'est ce que l'on appelle le "toilettage" de la loi sur la présomption d'innocence. Il n'y a pas unanimité dans vos rangs - on l'a vu pendant le débat en commission -, parce que certains disent que c'est le fondement même de la loi qui est remis en question avec les restrictions qui seront mises en place. Vous n'avez pas été un peu débordé par le côté sécuritaire ?
- "L'essentiel de la loi est une vraie avancée. Je pense par exemple à la présence de l'avocat à la première heure de la garde à vue, pour s'entretenir avec son client et l'informer de ses droits. Je pense que c'est un progrès et il n'est pas question d'y toucher. Il y a beaucoup d'autres choses du même type, qui protège la présomption d'innocence mais qui protège aussi le droit des victimes. C'est contenu dans cette loi, on n'en parle pas assez. Par contre, ce qui était important, et c'est tout à fait l'honneur du législateur, c'est de regarder s'il n'y a pas des dysfonctionnements dans l'application, si les objectifs principaux de la loi sont bien atteints, si ce n'est pas trop difficile à mettre en oeuvre. Le Premier ministre a confié une mission - une mission d'enquête en quelque sorte -, à J. Dray, sur le terrain."
Il y avait deux missions...
- "Oui. Il est allé écouter les policiers, les gendarmes, les procureurs et il est vrai qu'un certain nombre de points ne vont pas dans la mise en oeuvre de la loi. Non pas ses principes, mais la mise en oeuvre concrète. Ce que nous voulons, c'est que cette loi soit appliquée dans les meilleures conditions possibles, à la fois pour préserver la liberté, la présomption d'innocence mais aussi pour poursuivre les coupables et faire en sorte qu'ils soient condamnés. C'est l'objectif principal."
Oui, c'est l'objectif mais dans la mise en oeuvre, c'est compliqué quand même !
- "Nous apportons quelques modifications. Nous le faisons par réalisme parce que le sens de la responsabilité, c'est de voir la réalité en face et surtout d'agir sur cette réalité pour la transformer. Il ne faut pas décourager ceux qui se battent pour la liberté et la protection des citoyens."
On s'en est rendu compte un peu tard !
- "Mais pas du tout ! Je crois que ce Gouvernement et cette majorité n'ont jamais été égalés par d'autres gouvernements et d'autres majorités ..."
On a vu des manifestations de policiers, comme on n'en avait jamais vu non plus !
- "... par rapport à l'action menée en faveur de la police, de la gendarmerie, de la justice. Mais il y a un tel retard à rattraper, un telle crise de confiance par rapport à ces institutions, qu'il est bien normal que nous n'ayons pas tout de suite le résultat. Mais notre volonté est bien de faire en sorte que la sécurité des Français soit assurée par les moyens qui protègent en même temps la liberté des Français."
Sur un plan plus politique, vous êtes assurés d'avoir une majorité pour ce toilettage ?
- "Je suis convaincu que ceux qui aujourd'hui hésitent auront le sens des responsabilités. Je suis donc tout à fait confiant, parce qu'on nous attend sur des résultats concrets et je pense qu'au moment où les chiffres de la délinquance tombent, qu'ils sont en augmentation et très préoccupants, il ne faut pas avoir peur de prendre ses responsabilités sans se renier."
Etes-vous optimiste pour arriver à un accord avec les Verts ?
- "C'est le bon sens et le sens des responsabilités. Je ne pense pas un instant que les différentes composantes de l'actuelle majorité, qui auront chacune un candidat à la présidentielle, puissent, aux moments essentiels, faciliter la tâche de J. Chirac, qui ne souhaite qu'une chose, c'est être élu - on comprend pourquoi. L'intérêt de la France, c'est que L. Jospin soit élu président de la République, car les Français le connaissent, l'apprécient et savent qu'ils peuvent compter sur lui pour affronter de nouveaux défis"
(Source http://Sig.premier-ministre.gouv.fr, le 17 janvier 2002)