Déclaration de M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, sur la concertation locative et la lutte contre l'insalubrité dans le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbain, Paris, le 20 janvier 2000.

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Circonstance : Accueil du nouveau président de la Commission nationale de concertation, Paris, le 20 janvier 2000

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
La réunion d'aujourd'hui revêt une importance particulière; tout d'abord parce qu'il s'agit d'accueillir le nouveau Président de notre Commission et ensuite parce que l'ordre du jour vous invite à donner votre avis sur des sujets qui sont au cur des préoccupations de cette instance : la concertation locative et la lutte contre l'insalubrité dans le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbain.
A la suite de la démission pour convenance personnelle de Pierre Zémor, conseiller d'Etat, qui a présidé cette instance avec beaucoup de disponibilité et de convictions pendant 7 années, il fallait trouver un Président qui connaisse le secteur des rapports locatifs et dont les qualités personnelles permettent un dialogue constructif entre les partenaires qui le composent.
Je tiens donc à vous remercier vivement, François GEINDRE, d'avoir accepté d'assumer cette fonction. Votre qualité d'Inspecteur Général de l'Equipement mais aussi votre expérience d'élu local autant que vos connaissances d'expert sur les questions du logement, alliées à vos qualités de dialogue, vous permettront -j'en suis certain- de mener dans la plus grande sérénité possible les discussions au sein de cette instance.
L'actualité immédiate vous offre des champs de réflexion et de discussion importants.
*Les élections des représentants des locataires aux conseils d'administration des organismes HLM se sont déroulées du 15 novembre au 15 décembre dernier. Un bilan de leur déroulement pourrait être dressé au sein du secteur 1 afin qu'un accord sur un protocole électoral national puisse être élaboré avant les prochaines élections notamment dans le but de chercher à améliorer le taux de participation...
*Des accords ont été conclus au sein de votre commission : celui relatif aux congés vente et celui du 17 décembre 1997 relatif aux mesures d'accompagnement de la baisse de la TVA dans le secteur HLM ; un bilan de ces accords me paraîtrait utile.
*Mais dès aujourd'hui, votre avis est sollicité sur les dispositions du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains qui traitent des rapports locatifs.
Je ne reprendrai pas le cadre général de ce projet que j'ai déjà eu l'occasion de développer à de multiples reprises, en particulier devant le CNH, où vous êtes, pour la plupart représentés. Je m'attacherai en revanche à approfondir la présentation des dispositions ayant trait à la concertation locative et à la résorption de l'habitat insalubre.
Renforcer la concertation avec les habitants, pour améliorer la démocratie locale par une pratique participative dans un domaine clé de la vie quotidienne telle est une des ambitions de ce projet de loi.
Les lois successives sur les rapports locatifs de juin 1982, à juillet 1989 ont mis en place différents outils et procédures afin de favoriser le développement de la concertation entre les bailleurs et les locataires.
Cependant comme le suggérait le rapport de Pierre ZEMOR sur l'état et l'avenir de la concertation locative élaboré au sein de votre commission, la réactivation de celle-ci passe nécessairement par une nouvelle étape pour développer au plus près du terrain l'organisation des locataires, en mettant en place de nouveaux outils d'information et de discussion.
Un premier volet du projet de loi concerne l'ensemble du parc locatif.
Il est proposé de mettre en place au niveau de chaque département une instance pour le règlement des litiges individuels et pour une meilleur application des accords collectifs.
Les compétences des commissions départementales de conciliation où sont représentées les organisations de bailleurs et les associations de locataires seraient étendues au règlement des petits litiges nés de l'application de la loi du 6 juillet 1989, quel que soit le secteur locatif.
Pour éviter l'encombrement des commissions, la nature des litiges individuels pouvant leur être soumis, serait limitée aux conflits portant sur les états des lieux, les dépôts de garantie, les charges locatives, les réparations, ainsi que l'application des accords de location collectif.
Un tel dispositif devrait permettre d'améliorer les rapports locatifs en réglant à l'amiable de nombreux litiges qui "empoisonnent" les relations bailleurs locataires et qui ne sont pas toujours portés devant les tribunaux même si les conditions de saisine des tribunaux d'instance ont été simplifiées.
Cette commission départementale de conciliation verrait également son champ d'intervention étendu aux difficultés nées de l'application des accords collectifs nationaux ou locaux.
Ensuite est proposé, afin de faciliter la représentation du locataire, d'ouvrir la possibilité à tout groupement de locataires, non constitué en association mais affilié à une organisation siégeant à la Commission nationale de concertation, de représenter les locataires.
Dans les immeubles en copropriété, les locataires seront informés par voie d'affichage, sur les travaux envisagés et sur l'entretien de l'immeuble.
L'autre volet du projet de loi dans ce domaine vise à améliorer la concertation avec les habitants dans le parc social (le secteur I et le secteur II).
Dans le parc social, l'élaboration d'un plan de concertation locative, deviendrait obligatoire, pour l'ensemble du patrimoine d'un bailleur. Elaboré conjointement par le bailleur et les représentants des locataires il formaliserait pour l'ensemble du patrimoine de l'organisme les relations locatives locales. Il devrait déterminer le cadre géographique des conseils de concertation locative ainsi que les moyens tant matériels que financiers que le bailleur mettrait à la disposition des représentants des locataires pour mener à bien leur mission. Le conseil de concertation locative, serait consulté sur toutes les mesures présentant un intérêt collectif afin de favoriser l'échange d'informations et le dialogue entre bailleur et locataires.
En ce qui concerne les opérations d'amélioration ou de construction-démolition, la concertation avec les locataires serait rendue obligatoire.
La concertation porterait sur la consistance et le coût des travaux, leur répercussion prévisible sur les loyers, les modalités de leur réalisation, sur l'opportunité de créer un local collectif résidentiel ainsi que, le cas échéant, sur les conditions de relogement des locataires notamment pour les opérations de construction-démolition.
Dans le cas d'une opération d'amélioration, à l'issue de la concertation, le bailleur en dresserait un bilan dont il informerait les locataires.
Par ces mesures nous espérons améliorer sensiblement les relations bailleurs locataires et permettre aux habitants d'être mieux entendus sur toutes les questions qui relèvent de leur cadre de vie.
J'ai souhaité également recueillir votre avis sur le dispositif de lutte contre les immeubles insalubres.
En matière d'habitat insalubre, l'objectif est tout autant de protéger les occupants souvent très démunis de ces immeubles que de permettre une intervention publique efficace visant à démolir ou réhabiliter ce parc.
Dans tous les cas, lorsqu'un immeuble constitue un danger pour la santé ou la sécurité des personnes, il est prévu que le Préfet, à son initiative ou à celle du maire, prenne un arrêté d'insalubrité. Cet arrêté ordonne la réalisation de travaux dans un délai précis : réhabilitation, démolition, ou le cas échéant, mesures destinées à rendre les lieux inhabitables et donc inhabités.
Compte tenu de l'importance des dangers encourus et du caractère irrémédiable ou non de l'insalubrité, l'arrêté se prononce sur l'impossibilité temporaire ou définitive d'occuper les lieux à partir d'une date précise.
Les modalités d'information des propriétaires sont revues pour assurer le caractère contradictoire de la procédure tout en évitant les blocages qui existent lorsque l'adresse des propriétaires est inconnue.
Les propriétaires disposent des voies de recours habituelles devant les tribunaux administratifs contre tout arrêté qui leur paraîtrait illégal.
A défaut pour les propriétaires d'exécuter les travaux prescrits, le Préfet peut se substituer, et dans ce cas le remboursement du coût des travaux est garanti par l'inscription d'une hypothèque légale sur le bien.
Les propriétaires impécunieux peuvent également se dégager de toutes les obligations mises à leur charge par l'arrêté, en concluant un bail à réhabilitation.
Lorsque l'état de l'immeuble nécessite le départ temporaire ou définitif des habitants, les occupants de bonne foi disposent de mesures de protection puisqu'une obligation d'hébergement en cas d'interdiction temporaire d'habiter, ou de relogement en cas d'interdiction définitive, est mis à la charge du propriétaire.
En cas de manquement à cette obligation d'hébergement ou de relogement : le préfet assurerait cette obligation par l'hébergement provisoire en cas d'interdiction temporaire d'habiter et le maire, ou à défaut le préfet, pour les relogements définitifs. Les frais d'hébergement ou de relogement assumés par la collectivité publique seront à imputer au propriétaire mis en cause pour sa défaillance.
L'ensemble de ces dispositions est accompagné d'une mesure forte fondée sur le principe selon lequel il ne peut y avoir de contrepartie financière, donc de paiement de loyer, dans un immeuble qui porte atteinte à la santé des occupants.
La suspension du loyer à compter du premier mois du jour qui suit la notification de l'arrêté d'insalubrité ou de péril est donc prévue en cas d'interdiction temporaire d'habiter, la suspension s'applique jusqu'à la date d'achèvement des travaux constatée par l'arrêté prononçant la main levée.
L'absence légale de paiement des loyers entraînera automatiquement la suppression des aides au logement. Par cette mesure, il s'agit tout autant d'accélérer le processus de réalisation des travaux que de prévenir le développement d'un marché du taudis.
Voilà donc, brièvement présentée, les dispositions sur lesquelles l'avis de votre commission est sollicité.

(source http://www.equipement.gouv.fr, le 27 juin 2000)