Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Je me présente aujourd'hui devant vous avec un projet de loi que le Sénat a enrichi et adopté à l'unanimité des groupes.
J'avais dit à l'époque que je n'étais pas fermé à aucune proposition constructive et j'ai tenu parole. Je dois vous dire que je suis aujourd'hui dans la même état d'esprit.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je tiens à rendre ici publiquement hommage au travail de Monsieur Lucien LANIER qui fut rapporteur de la commission des lois du Sénat et qui est pour beaucoup dans la qualité et l'équilibre du projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter maintenant.
J'aurais bien évidemment souhaité que l'Assemblée nationale soit saisie plus tôt de ce projet de loi adopté par le Sénat le 7 avril dernier, mais l'encombrement de ses travaux en mai et juin et la place importante que tient le débat budgétaire à l'automne ne me l'ont pas permis. Croyez bien que je le regrette et que le Gouvernement est fermement décidé à avancer rapidement dans la programmation des prochaines étapes parlementaires de ce texte.
Depuis le 7 avril, plus de 5 000 personnes ont été tuées sur les routes et plus de 90 000 personnes ont été blessées dont une grande proportion grièvement.
Le bilan de l'insécurité routière s'alourdit chaque jour davantage : 8 282 tués d'octobre 1997 à septembre 1998, et je crois que personne ne peut rester insensible à ces chiffres.
Vous le savez, c'est beaucoup plus que dans d'autres pays européens. Le risque d'être tué sur nos routes est en effet deux fois plus élevé qu'au Royaume-Uni ou dans les pays scandinaves.
Chaque jour, plus de 22 personnes trouvent la mort sur nos routes, près de 460 sont blessées dont une centaine gravement atteintes voire handicapées pour le restant de leurs jours. Mesure-t-on toute la souffrance qu'il y a derrière la sécheresse de ces chiffres ? Tout à l'heure, j'ai rencontre la Ligue contre la violence routière. Une question est venue : celles des droits de l'homme, et c'est dans ces termes que la question se pose.
Il est vrai que depuis 1972, grâce à toutes les mesures qui ont été prises pour renforcer la sécurité routière, le nombre de morts sur les routes est passé de 16 000 environ à 8 000 par an alors que le trafic doublait dans le même temps. Mais constatons que depuis quelques années, les chiffres ne baissent plus et se stabilisent autour de 8 000 tués par an et auraient même tendance à remonter à nouveau.
Face à cette situation, on constate qu'une certaine résignation s'installe. Comment l'accepter !
L'insécurité routière n'est pas une fatalité et je pense que bon nombre des accidents de la route peuvent être évités. Avec ce projet de loi qui s'inscrit dans les décisions du dernier comité interministériel de la sécurité routière, le Gouvernement souhaite provoquer le sursaut nécessaire.
Vous rappellerai-je que ce sont les jeunes de 18 à 24 ans, qui sont les principales victimes ? Ils représentent 10 % de la population française mais plus de 20 % des morts sur la route. L'insécurité routière est la première cause de mortalité des jeunes.
Dès son entrée en fonction, le gouvernement a pris la mesure de ce véritable fléau national et le conseil des ministres du 25 juin 1997 a décidé à ma demande de réunir un comité interministériel de la sécurité routière qui, le 26 novembre 1997, a fixé comme objectif de diviser par deux le nombre de tués au terme des cinq années à venir. C'est un objectif très ambitieux. Il ne sera atteint que si tout l'ensemble, nous conjuguons nos efforts. L'État, seul est impuissant, il faut la mobilisation des communes, des départements, des entreprises et chaque citoyen pour relever ce défi.
Les associations de familles des victimes, aux premiers rangs d'un combat juste et digne, sont aujourd'hui relayées par l'opinion publique dans son ensemble qui n'admet plus la fatalité des accidents. Chacun connaît, dans sa famille ou son entourage, les souffrances terribles qu'ils génèrent. A nous de montrer que chacun, en faisant un peu pour la sécurité routière, peut beaucoup contre l'insécurité routière constatée aujourd'hui. La mobilisation de l'opinion publique peut être d'autant plus forte que la plupart des accidents se produisent tout près du domicile des victimes, sur des trajets familiers souvent empruntés.
Chaque catégorie d'usagers exprime d'ailleurs des préoccupations propres en matière de sécurité routière :
- les chauffeurs routiers demandent un respect plus rigoureux des conditions de travail et de circulation qui sont essentielles pour leur sécurité et celle des autres usagers ;
- les automobilistes prennent progressivement conscience que la pratique de la conduite automobile n'est pas innée, qu'elle exige non seulement un apprentissage sérieux, mais aussi une formation permanente. Certaines entreprises et administrations commencent d'ailleurs à mettre en place des plans de prévention spécifique aux risques routiers. Car plus de la moitié des tués par accident du travail sont des victimes d'accidents de la route, lors des trajets domicile-travail ou lors de missions dans le cadre des activités professionnelles ;
- les utilisateurs de deux roues, motorisés ou non, soucieux de la qualité de la vie dans nos villes et de la sécurité des déplacements, sont devenus des partenaires des pouvoirs publics, notamment dans l'établissement des plans de déplacements urbains. Ils exigent de plus en plus une « conduite apaisée » et la « cohabitation » harmonieuse des différentes catégories d'usagers ;
- enfin, il ne faut pas oublier les piétons, que nous sommes tous à un moment ou à un autre, qui sont des usagers vulnérables, et aspirent à une approche renouvelée des politiques de circulation en ville, prenant en compte un meilleur équilibre entre les différents modes de déplacement.
L'État régulateur de la vie sociale se doit de répondre à toutes ces attentes, et il ne peut le faire qu'en développant une politique novatrice, dynamique et audacieuse.
Il nous faut également solliciter l'ensemble des acteurs sociaux, les services de l'État, bien sûr, mais aussi les entreprises, les associations, les collectivités territoriales, les sociétés d'assurance, les constructeurs automobiles pour qu'ils s'engagent, chacun dans leur secteur, pour faire progresser la sécurité de tous.
La conduite est un acte individuel, privé, mais c'est aussi un acte social. Le respect de l'autre et la liberté d'aller et venir en sécurité impliquent des règles simples, claires. Elles doivent être expliquées, partagées et appliquées.
C'est pourquoi la démarche du gouvernement est d'abord et avant tout une démarche de prévention et d'action sur les comportements. La quasi-totalité des mesures décidées au dernier comité interministériel de la sécurité routière sont d'ailleurs des mesures destinées à développer la prévention tout comme la plupart de celles contenues dans le texte que je vous présente. Ce texte comporte également des sanctions, des sanctions qui se doivent d'être dissuasives, car il faut en effet dissuader les automobilistes des comportements à risques pour eux et pour les autres usagers de la route.
Le projet de loi que j'ai l'honneur de soumettre à votre approbation regroupe six mesures, d'ordre législatif, nécessaires pour lutter efficacement contre l'insécurité routière. Avant de les détailler, je souhaite rappeler que ces six mesures d'ordre législatif s'inscrivent dans un dispositif plus global de 25 mesures décidées par le comité interministériel de la sécurité routière du 26 novembre 1997qui se mettent progressivement en place.
La première priorité du gouvernement est de sensibiliser et de former tout au long de la vie. Pour cela, il faut s'adresser d'abord aux plus jeunes dès le début de l'apprentissage de la vie.
Des actions de formation sont actuellement préparées en étroite concertation avec mes collègues Claude ALLEGRE, Ségolène ROYAL et Michèle DEMESSINE.
Nous avons la volonté que la sécurité routière soit systématiquement prise en compte dans l'éducation des enfants et nous veillons à ce que des outils appropriés soient mis à disposition des enseignants. L'école primaire et le collège doivent être un lieu naturel de formation à un bon usage de la route. Des enseignants le font d'ailleurs déjà remarquablement, il convient de généraliser leurs pratiques.
Le gouvernement travaille aussi à mieux former les nouveaux conducteurs. Des rendez-vous d'évaluation et de formation commencent à se mettre en place pour les conducteurs novices volontaires.
Pour tous les conducteurs expérimentés volontaires, un rendez-vous de perfectionnement, qui s'inscrit dans le cadre d'une formation continue, 10 ans après l'obtention du permis de conduire, sera proposé dans plusieurs départements dès le début 1999.
En parallèle à toutes ces actions de formation, des mesures spécifiques aux deux roues sont entreprises. Les cyclomoteurs seront progressivement immatriculés. Cette mesure permettra de lutter plus efficacement contre les vols et les infractions, et plus particulièrement contre les manipulations des moteurs, autrement dit, le débridage.
La sécurité des cyclistes, fait l'objet d'une réflexion des acteurs concernés au sein d'un comité national, qui a donné lieu à une première série de mesures figurant dans un décret récent, signé le 14 septembre dernier. Citons en particulier, l'instauration d'un sas pour les vélos avant les feux de signalisation et l'augmentation de la distance minimum autorisée entre un véhicule et un cycliste sur route de rase campagne qui est passée de 1 mètre à 1,50 mètre.
Un concours a été lancé pour mettre au point de nouvelles glissières de sécurité moins dangereuses pour les motards en cas de chute. Les résultats seront disponibles avant l'été prochain. Ils permettront de lancer un programme d'équipements d'abord pour les sections les plus dangereuses.
Concernant maintenant les infrastructures, il a été décidé qu'un audit de sécurité des projets routiers devait être mis en place sur les futurs projets routiers. J'ai pris les dispositions nécessaires pour que l'État engage rapidement cette démarche sur le réseau national. Dès la seconde moitié de 1999, le contrôle de sécurité sur les projets routiers de l'État sera systématisé à chaque visite avant mise en service.
Mesdames et Messieurs les députés, je compte également beaucoup sur les actions locales de sécurité routière, qui sont très importantes pour atteindre les objectifs que le gouvernement s'est fixés.
J'ai décidé de relancer cette dynamique de partenariat et de travailler étroitement avec les départements qui se sont portés volontaires pour associer davantage l'ensemble des acteurs, à partir d'analyses précises des caractéristiques de l'accidentologie locale, chacun s'engageant plus précisément dans son propre champ de compétence.
Je suis convaincu que les exemples qui naîtront de cette démarche vont représenter, très vite, une source de motivation pour tous et dans tous les départements.
Ces mesures de nature réglementaires décidées par le CISR de novembre 1997 se mettent progressivement en place. Je tiens à préciser d'ailleurs que j'ai demandé qu'un nouveau CISR se tienne au printemps 1999 pour faire le point sur l'avancement de ces mesures et en activer, en tant que de besoin, leur mise en oeuvre. Ce grand effort pour la sécurité routière, cet appel à la responsabilité de chacun suppose également des mesures législatives fortes. C'est l'objet du présent projet de loi.
Je vous les présenterai donc succinctement avant d'y revenir en détail tout à l'heure dans le cadre de la discussion des articles.
L'article 1er propose d'instaurer l'obligation de suivre le stage de sensibilisation aux causes et conséquences des accidents de la route pour les conducteurs novices - c'est-à-dire ceux qui sont titulaires du permis de conduire depuis moins de deux ans - qui ont commis des infractions graves.
Leur probabilité d'être tués dans un accident de la route est en effet trois fois plus élevée que celle de la moyenne des conducteurs.
Plusieurs pays ont instauré un suivi administratif des conducteurs novices sous la forme d'un « permis probatoire ». Notre proposition se distingue de cette formule par la dominante pédagogique et éducative de son contenu.
Cette formule a été fortement préconisée lors de la table ronde sur la formation des usagers de la route et la formation des conducteurs dont le président, Monsieur VERRE, m'a remis son rapport le 20 juin 1997.
Elle concerne l'ensemble des conducteurs novices. Je rappelle que chaque année près d'un million de permis sont délivrés et que 15 000 à 20 000 conducteurs novices commettent une infraction sanctionnée par un retrait d'au moins 4 points sur le permis de conduire. Ce sont des infractions graves : il s'agit des blessures involontaires, de non respect de la priorité, d'un feu rouge, d'un stop, d'un dépassement de 40 km/h et plus de la vitesse autorisée, d'une marche arrière sur une autoroute, de la circulation en sens interdit ainsi que des délits routiers.
La mesure qui vous est proposée suggère donc d'agir vite afin d'éviter autant que faire se peut la prise de mauvaises habitudes de conduite.
La deuxième partie du projet de loi vise à assainir le fonctionnement des établissements d'enseignement de la conduite et à améliorer la qualité de leurs prestations. Elle reprend l'essentiel du dispositif préparé par mon prédécesseur, Monsieur Bernard PONS, et qui est attendue par la profession comme par les associations de consommateurs. Nous sommes ici en effet tous convaincus de l'intérêt pour tous d'une formation à la conduite de qualité.
Le secteur des auto-écoles se caractérise par la multiplication des créations d'établissement à l'existence souvent éphémère, dans un marché globalement en récession. Il en résulte une concurrence très vive, marquée par une guerre tarifaire et l'apparition d'offres parfois anormalement basses, au détriment de la qualité de la formation du futur conducteur.
Plusieurs affaires d'escroquerie ou de corruption ont entamé la crédibilité des établissements et leur capital de confiance indispensable à toute activité d'enseignement.
Dans ce contexte et à la demande insistante à la fois des représentants de la profession et des associations de consommateurs, des mesures fortes de moralisation et d'assainissement s'avèrent indispensables. Il est de surcroît nécessaire de mettre en place des incitations de nature à améliorer la qualité des prestations offertes.
Le texte qui vous est proposé inscrit dans la loi plusieurs règles existantes.
Il est ainsi précisé que les enseignants de la conduite doivent être titulaires du brevet pour l'exercice de la profession d'enseignant de la conduite automobile de la sécurité routière (BEPECASER) ou d'un diplôme dont l'équivalence est reconnue.
Il sera confirmé dans la loi que l'enseignement dispensé doit être conforme au programme national de formation (PNF) et qu'il ne peut être dispensé que dans le cadre d'un établissement dont l'exploitation est subordonnée à un agrément délivré par le préfet, après avis de la commission départementale de la sécurité routière.
Trois éléments nouveaux particulièrement importants auront également valeur législative :
L'élaboration d'un contrat écrit entre le candidat et l'établissement portant sur les conditions et modalités de l'enseignement, la mise en place d'un contrôle d'application du programme de formation, et un renforcement sensible des sanctions en cas de non respect des dispositions légales.
Je vous rappelle que les dispositions concernant les auto-écoles ont fait l'objet d'une concertation, depuis plusieurs années, avec l'ensemble de la profession et la table ronde que j'ai déjà citée tout à l'heure, a demandé sa mise en oeuvre rapide.
Le gouvernement n'a pas souhaité traiter dans ce projet de loi la question des associations qui oeuvrent pour la sécurité routière et dispensent des enseignements y participant. Ce projet concerne les auto-écoles dont l'activité est éducative par nature et commerciale dans son organisation. Il a toutefois accepté l'amendement adopté au Sénat visant à reconnaître la possibilité pour les associations d'insertion d'enseigner la conduite sous réserve que cet enseignement soit dispensé par des moniteurs ayant obtenu le BEPECASER (le brevet pour l'exercice de la profession d'enseignant de la conduite automobile et de la sécurité routière).
La troisième partie du projet de loi vise à mieux garantir l'efficacité des sanctions en cas d'infraction constatée, en instaurant une responsabilité pécuniaire des propriétaires de véhicules.
En effet, je l'ai déjà dit, le respect de la réglementation est indispensable pour lutter contre l'insécurité routière. Notre système de contrôle et de sanction souffre de dysfonctionnements, aujourd'hui bien identifiés, qui en altèrent la crédibilité.
Il faut citer au premier rang la faible efficacité des contrôles automatiques sans interception. Il est facile de relever l'infraction. Il est difficile parfois d'identifier le conducteur.
La portée des actions de contrôle est ainsi affaiblie de manière notable et l'égalité des citoyens devant la loi n'est plus respectée. Avec le principe du « propriétaire payeur », je souhaite assurer une égalité de tous devant la loi. Aujourd'hui, une majorité paye, ce qui est aussi une façon de reconnaître son erreur, et de pouvoir changer ensuite de comportement. Une minorité essaie d'échapper à la règle. Cela laisse entendre que mettre en danger la vie d'autrui n'est pas grave, que l'on peut fuir ses responsabilités et le faire en toute impunité. C'est cette situation que je veux changer.
La mise en oeuvre de dispositions impliquant la responsabilité du propriétaire du véhicule est en vigueur dans plusieurs pays européens (Autriche, Espagne, Italie, Royaume-Uni, Pays-Bas) sous des formes diverses parfois beaucoup sévères que celle contenue dans le projet de loi. Il vous est donc proposé d'étendre les dispositions qui existent déjà pour le stationnement depuis 1972, à d'autres infractions en nombre strictement limité : excès de vitesse, franchissement de feux rouges et d'arrêt « stop ».
Cette mise en responsabilité du propriétaire se fera sans arbitraire et sans atteinte aux droits de la défense. Si le conducteur n'est pas identifié, le propriétaire ne sera pas condamné pénalement, rien ne sera inscrit à son casier judiciaire, et il ne perdra pas de points. Il pourra, mais c'est son affaire, se faire rembourser par celui auquel il a prêté sa voiture et cela l'encourage à lui dire.
Certains pays, l'Espagne, l'Italie, le Royaume-Uni, ont instauré une obligation de dénoncer le conducteur. Rien de tel dans le présent projet. Les critiques qui en font un texte invitant à la délation, n'ont donc pas de fondement et d'ailleurs, je sais qu'un amendement de votre commission des lois lève, s'il en était besoin, toute ambiguïté sur cette question. Mais bien entendu, je suis prêt à accueillir favorablement tout amendement améliorant le texte.
La quatrième partie du projet de loi instaure un délit en cas de récidive dans l'année pour dépassement de 50 km/h ou plus des vitesses maximales autorisées.
La vitesse excessive ou inappropriée est en cause dans près d'un accident mortel sur deux.
Les vitesses moyennes pratiquées sur les différents réseaux routiers sont très élevées et souvent supérieures aux limites autorisées.
Il est donc essentiel de mettre fin à cette dérive des comportements en ville comme en rase campagne.
A la suite des travaux réalisés sous l'impulsion de M. NAMIAS, l'un de mes prédécesseurs, M. BOSSON avait envisagé de créer un délit de grand excès de vitesse. Nous pensons, quant à nous après avoir beaucoup consulté, qu'il est préférable d'amener les conducteurs à réfléchir à leurs actes. Les grands excès de vitesse sont d'ores et déjà passibles d'une contravention qui a été alourdie par le décret du 26 mars 1998.
Le projet de loi prévoit que la récidive de grand excès de vitesse dans l'année deviendra un délit. Ce dispositif a un caractère avant tout pédagogique. Il s'inscrit dans la logique des propositions de M. NAMIAS et répond sans démagogie, à une attente forte des associations de victimes de la route. Il devrait s'avérer efficace pour inciter à la baisse de l'ensemble des vitesses pratiquées et au respect des maxima autorisés.
Les respect des vitesses maximales autorisées nécessite aussi un effort sans précédent de la part des différents maîtres d'ouvrage de la voirie pour améliorer la pertinence de la signalisation. En ce qui concerne la voirie nationale, j'ai demandé à mes services de fournir un effort particulier pour que la signalisation correspondant à la police de la route soit plus lisible et compréhensible pour tous.
Il ne s'agit pas pour le gouvernement de piéger les automobilistes, ce n'est pas la démarche, mais de favoriser une conduite apaisée tenant réellement compte de l'environnement.
La cinquième partie du projet de loi instaure un dépistage systématique des stupéfiants pour les conducteurs impliqués dans les accidents mortels.
La conduite automobile du conducteur est une activité complexe qui exige une vigilance de tous les instants, incompatible avec l'usage des stupéfiants, bien entendu, mais aussi avec l'usage de certains médicaments.
La relation entre la drogue ou les médicaments et la sécurité routière a fait l'objet en 1995 d'un rapport, établi sous la présidence du professeur LAGIER.
Concernant l'usage de médicaments, la prévention, l'éducation, la formation et l'information sont primordiales. Je tiens à rappeler ici la mesure décidée lors du dernier CISR : un pictogramme spécifique sera imprimé sur toutes les boîtes de médicaments contenant des substances susceptibles d'altérer la conduite automobile. Des actions de communication et de sensibilisation du public, d'information et de formation des médecins et pharmaciens seront engagées.
Concernant l'usager des stupéfiants, j'ai fait un choix pragmatique : en l'absence de données statistiques permettant d'apprécier le phénomène, le texte permettra de procéder à un dépistage systématique lors de tous les accidents mortels.
Ainsi, dans les deux ou trois ans qui viennent seront recueillies des indications épidémiologiques précises, permettant d'établir scientifiquement l'influence de la consommation de drogue sur le comportement au volant, ce qui est un préalable à toute législation spécifique.
À ce stade, il n'y a pas lieu de prévoir dans le code de la route une sanction spécifique en cas de dépistage positif. S'agissant d'homicides, une instruction est obligatoirement ouverte, et le juge pourra tenir compte du résultat des analyses dans l'établissement des responsabilités et le choix de la sanction. Il dispose pour cela de tout l'arsenal juridique nécessaire.
La sixième partie du projet de loi autorise la suspension judiciaire du permis de conduire en cas de condamnation pour absence ou modification du dispositif de limitation de vitesse par construction. Cette disposition ne s'applique aujourd'hui qu'en cas d'alcoolémie, d'entrave ou de gène à la circulation, de fausse immatriculation, de conduite sans permis. Cette disposition nouvelle complète la sanction de manipulation de l'appareil et elle crée un délit en cas d'absence d'appareil.
La loi prévoit également l'extension au transport routier de personnes des sanctions administratives applicables au transport routier de marchandise, instaurée par la loi du 1er février 1995.
Ce projet de loi, avec ses six volets différents, constitue la partie législative de la politique ambitieuse et globale du gouvernement de lutte contre l'insécurité routière.
Le Sénat, après avoir apporté d'utiles améliorations au texte du gouvernement, l'a adopté à l'unanimité.
La commission des lois de l'Assemblée nationale, et son rapporteur Monsieur DOSIERES, ont fait un travail très utile qui doit nous permettre d'avancer encore. Le gouvernement sera attentif et ouvert aux différentes propositions émanant de tous les bancs. Je ne doute pas que vos travaux permettront d'améliorer et d'adopter dans la sérénité un texte qui permettra des progrès importants pour faire reculer le fléau de l'insécurité routière, contre lequel nous devons, tous ensemble, nous mobiliser.