Texte intégral
Monsieur le président,
Messieurs les rapporteurs,
Mesdames, Messieurs les députés,
Le projet de loi visant à la mise en œuvre du droit au logement auquel, vous le savez, Michel DELEBARRE et moi-même attachons la plus grande importance, vous est donc soumis, aujourd’hui, en deuxième lecture.
Avant de répondre à Messieurs les rapporteurs que je tiens à remercier très chaleureusement pour la qualité de leurs travaux, et aux différents intervenants, permettez-moi, Monsieur le président, de vous dire combien j’ai apprécié, lors de la première lecture, la qualité des débats, tant sur le fond que sur la forme et ce que je viens d’écouter avec beaucoup d’intérêt montre et confirme que cet excellent état d’esprit persiste. Je ne peux que m’en réjouir, et, cela je l’espère, présage bien de l’issue de votre discussion.
Je ne reviendrai pas, à ce stade de la procédure parlementaire, sur l’économie générale du texte. Je voudrais simplement vous faire part de l’état d’esprit dans lequel le Gouvernement engage cette discussion et tout d’abord rappeler sa volonté inébranlable de se doter des moyens permettant de lutter efficacement contre toutes les formes d’exclusion et contre toutes les inégalités sociales.
Des milliers de familles, et avec elles, le mouvement humanitaire qui les côtoie quotidiennement, et à qui je rends hommage, attendent de nous des mesures concrètes et efficaces.
Faisons en sorte qu’il en soit ainsi et que du débat qui s’engage jaillissent les bonnes solutions au problème posé. Je peux vous assurer de ma volonté d’aboutir à un consensus le plus large possible pour peu que l’économie générale du projet soit respectée.
La détermination du Gouvernement pour assurer à tous un revenu minimal, pour permettre l’apprentissage d’un métier, pour donner un toit, bref pour offrir à tous nos concitoyens de réelles possibilités de trouver ou de retrouver la plénitude de leurs droits et leur dignité, est, je peux vous l’assurer, sans faille.
Elle passe, en particulier et chacun en est bien conscient, par notre capacité à mettre en œuvre des solutions durables aux problèmes d’habitat.
J’ai bien noté, lors des débats en première lecture, comme dans les propos qui viennent d’être tenus, que cet objectif n’est pas sérieusement contesté et que tout le monde s’accorde à en reconnaitre le bien-fondé et j’allais dire l’impérieuse nécessité.
C’est sans doute ce gui a permis une très large adhésion à l’Assemblée nationale comme au Sénat sur l’essentiel des dispositions techniques du texte.
Ainsi en est-il de la nécessité de l’élaboration d’un plan départemental associant l’ensemble des partenaires, État, département, collectivités locales, mouvement HLM, bailleurs privés et associations humanitaires.
Ainsi encore, de la création d’un fonds solidarité-logement destiné à accorder des aides financières aux personnes et aux familles les plus défavorisées.
Ainsi, des différentes mesures fiscales en faveur des personnes qui louent dans certaines conditions un logement à des bénéficiaires du RMI, à des étudiants bénéficiant de bourse à caractère social, ou à des associations humanitaires, sous-louant à des personnes défavorisées.
Ainsi du bail à réhabilitation qui devrait, couplé avec les dispositions que je viens d’évoquer et avec les mesures budgétaires déjà prises, permettre d’accroître l’offre de logement pour ces populations notamment en mobilisant le parc privé et, dans ce parc, une partie des 1 800 000 logements aujourd’hui vacants dont plus de la moitié se situe dans les zones agglomérées.
Ainsi, enfin, de l’ensemble des mesures prévues concernant les aides personnelles au logement.
Nous ne pouvons que nous réjouir du large consensus qui s’est créé sur ces différents points.
Certes, des ajustements de détail sont encore nécessaires et je suis convaincu que l’analyse article par article permettra d’apporter les dernières améliorations utiles.
Mais outre cette convergence sur l’ensemble des dispositions techniques, j’ai noté aussi que notre volonté de démarche contractuelle sur l’ensemble du dossier était considérée par tous comme indispensable.
Au-delà du problème quantitatif – loger les 400 000 sans-abris et donner un logement décent aux 2 000 000 de personnes aujourd’hui considérées comme mal-logés –, se pose le problème plus global de la ville dans toutes ses dimensions spatiale, économique, sociale et culturelle.
L’actualité récente, tant dans des pays étrangers voisins que chez nous, nous rappelle, si besoin était, l’absolue nécessité de favoriser une politique d’intégration qui passe par le refus des ghettos et de ces concentrations de population fondées sur des critères sociaux, économiques ou ethniques.
Nous connaissons tous ces quartiers où règne le mal-vivre, parfois même l’angoisse et qui génèrent des difficultés pour ceux qui y vivent et pour ceux qui sont conduits à les gérer.
Nous connaissons aussi malheureusement les conséquences dramatiques engendrées par ces situations et peut-être avons-nous tendance parfois à les sous-estimer.
L’expérience nous a montré que là où les partenaires concernés par le devenir et la gestion de la ville le voulaient, là où ils ont travaillé ensemble, là où ils se sont mobilisés, des résultats tangibles et parfois spectaculaires ont été enregistrés.
D’où notre volonté déterminée de favoriser la démarche contractuelle avec les différents partenaires. L’affirmation de cette volonté constitue la philosophie fondamentale de notre projet de loi.
L’État ne peut et ne doit pas, en effet, s’occuper de tout. Il doit être, ainsi que le rappelait récemment Monsieur le Premier ministre, aux côtés des maires, des conseillers généraux, des acteurs économiques et sociaux, bref de tous ceux qui ont en charge, avec des compétences et des savoir-faire propres, le devenir de la cité.
C’est ce que nous faisons lorsque l’État passe contrat avec les collectivités territoriales dans le cadre du développement social des quartiers, ou pour des conventions villes-habitat.
C’est ce que nous faisons lorsque l’État contracte avec le mouvement HLM, avec l’UNIL ou
avec le mouvement associatif.
C’est précisément ce que nous voulons faire dans le cadre des protocoles d’occupation du patrimoine social ou de l’élaboration des plans départementaux en faveur des personnes les plus défavorisées.
Sur ces derniers points, la discussion en première lecture avait fait apparaître des désaccords.
Certains refusaient un copilotage préfet-président du Conseil général au profit d’une initiative du seul préfet. D’autres à l’inverse souhaitaient confier cette responsabilité au seul président du Conseil général.
J’observe que tant les commissions saisies au fond que votre Assemblée et le Sénat ont, après débat, souhaité en première lecture retenir la solution d’une responsabilité partagée, conformément à nos propositions.
Il nous paraît sage de nous en tenir à cette orientation.
Je suis convaincu que, dans l’immense majorité des cas, cette politique contractuelle, parce que largement souhaitée, aboutira.
Mais je sais aussi que nous serons parfois confrontés à des attitudes, à des pratiques et à des comportements – sans doute fort heureusement peu nombreux – qui aboutiront à des blocages au détriment de l’intérêt général et ainsi, une volonté et une priorité nationales risqueront d’être mises en échec.
Or, la solidarité ne peut être « à la carte ».
Je veux voir dans le fait que nous ayons pu trouver accord sur l’ensemble des dispositifs techniques, comme dans le fait que par ailleurs l’idée d’une démarche contractuelle soit souhaitée par tous un attachement commun à cette solidarité.
Dès lors celle-ci doit pouvoir exister partout, c’est-à-dire dans tous les départements, dans toutes les communes et au sein de tous les organismes.
C’est pourquoi nous souhaitons mettre en place, dans l’hypothèse où localement cette politique contractuelle échouerait, ce que l’on pourrait appeler un filet de sécurité avec 3 dispositions capitales : celle relative à l’élaboration généralisée des plans départementaux, celle qui concerne la politique d’attribution des logements sociaux, et celle qui vise à empêcher l’abus d’usage du droit de préemption, notre espoir étant d’ailleurs que leur seule existence empêche qu’il soit nécessaire de les utiliser.
Les divergences sur ce point constatées en première lecture tant dans cette enceinte qu’à la Haute assemblée me semblent devoir et pouvoir être levées.
Tout d’abord, en ce qui concerne la procédure d’appel en cas d’échec de la démarche contractuelle lors de l’élaboration du plan départemental en faveur des plus défavorisés, votre commission a souhaité réintroduire le dispositif que nous vous avions soumis.
Je pense qu’il s’agit d’une bonne disposition, le recours à un arbitrage ministériel me paraissant adapté car déconnecté des contingences locales qui risquent d’être la cause essentielle de l’échec de la démarche contractuelle.
De même, les amendements prenant en compte les inquiétudes qui se sont manifestées lors du débat en première lecture en encadrant les mesures d’autorité et en intégrant les réalités sociales de telle ou telle collectivité, me paraissent aller dans le bon sens, et être de nature à lever les malentendus qui ont pu exister entre nous. Je le répète notre objectif est bien de faire en sorte que l’ensemble des communes participe à l’effort de solidarité, d’éviter aussi bien les ghettos de riches que les ghettos de pauvres, de s’opposer aux interdictions de séjour sournoises qui peuvent exister ici ou là.
Les amendements présentés me paraissent de nature à lever toute ambiguïté.
Aussi ne puis-je que souhaiter vivement qu’un large consensus se dégage sur ce point et qu’ainsi un texte équilibré, respectant les compétences de chacun, nous permette de mettre en cohérence nos actes avec nos discours et de nous attaquer, de la manière la plus efficace possible, aux injustices qu’une société qui se veut de progrès ne peut pas tolérer.
Donner un toit aux plus humbles de nos compatriotes, c’est respecter leur dignité et enfin offrir une chance d’équilibre humain retrouvé à des personnes – enfants ou adultes – dont l’exclusion actuelle engage notre responsabilité.
Il n’est pas d’effort collectif plus justifié que celui qui aidera de manière aussi déterminante à l’épanouissement des personnes et des familles et je ne doute pas que votre Assemblée aura à cœur de le permettre et ainsi de s’y associer.
Je vous remercie.