Synthèse d'une conférence de presse de M. Marc Vilbenoît, président de la CFE CGC, sur l'emploi, la réduction du temps de travail et sur les enjeux pour le syndicalisme de l'encadrement, Paris le 20 février 1996, accompagnée d'un dossier de presse en annexe.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral

Au cours d'une conférence de presse parisienne (20/02/1996), Marc Vilbenoît s'est fait le porte-parole du personnel d'encadrement aujourd'hui « exaspéré » par les politiques gouvernementales et patronales. « Patrons, qu'avez-vous fait de l'emploi », a-t-il lancé, mis à part de « tendre la sébile pour avoir des aides » ? « Que faites-vous pour que nos jeunes rentrent de manière convenable dans la vie professionnelle, dans la vie active ? ». L'encadrement, lui, a fait des efforts et a, en retour,toujours moins de salaires, moins de considération, moins de régime social et davantage de travail »... ce qui explique aussi un retour du cadre vers le syndicalisme. Il ne faut pas le « décevoir ».

Stratégie de rupture

L'heure est au choix entre « dialogue social ou explosion sociale », le mois de décembre dernier l'a suffisamment démontré et la CFE-CGC propose « une stratégie de rupture par rapport aux quinze années passées ». Celle-ci consiste, tout d'abord, en un changement de politique économique, en un « pari positif » dont l'objectif est de « réamorcer la pompe » : « décrétons un abattement sur le paiement des impôts 1996 » ; « appliquons une politique salariale active ». « Nous ne demandons pas de folies, nous ne demandons pas d'envolées. Nous demandons des signes qui permettent aux Français, aux salariés, de se dire on me donne un peu plus de revenu disponible, j'ai un début de confiance ».

Interdire l'exclusion

Mais, ajoute Marc Vilbenoît, cette confiance ne reviendra qu'à la condition de mesures en faveur de l'emploi, en particulier chez les jeunes. Là aussi, la CFE-CGC avance des solutions qui commencent par un devoir : « le contrôle accru des plans sociaux », y compris par la voie administrative si nécessaire, parce que « l'interdiction de l'exclusion est aussi importante que le devoir d'insertion ». La Confédération demande, de plus, qu'il n'y ait plus d'aides accordées aux entreprises sans contreparties d'emplois. Il y a de quoi faire en la matière, souligne Marc Vilbenoît, avec les cinquante milliards d'aides programmes dans la loi de finances. Le contrat de générations proposé par la CFE-CGC s'y prête tout à fait puisqu'il coûterait « une vingtaine de milliards » – déjà prévus au titre des aides aux entreprises – et rapporterait deux cent mille emplois pour les jeunes. À cela doivent s'ajouter des mesures « d'aménagement-réduction du temps de travail » qui privilégient la négociation : la CFE-CGC va se battre « bec et ongles » pour ce qui permettra de « déclencher une reprise économique ». Le président confédéral fait cette mise en garde : si les négociations sur l'aménagement du temps de travail n'avancent pas, si le patronat « traîne les pieds », la CFE-CGC se montrerait favorable à un dispositif de contrainte législative : « À bon entendeur, salut » ! Sur Europe 1 (20/02/1996), et sur « Radio classique » (20/02/1996) il a vigoureusement dénoncé la « floraison de plans sociaux » dans les entreprises en bonne santé : « en fait d'entreprise citoyenne, merci ! Je crois que là, si raison ne peut pas être gardée, c'est l'interdiction administrative qu'il faudra mettre en oeuvre ».

Des perspectives à long terme

Ces questions sont du domaine de l'urgence, de « la visibilité à six mois », mais Marc Vilbenoît raisonne à plus long terme, dans le cadre des évolutions de notre société : « il faudra bien que nous soyons capables de rebâtir un contrat national de répartition des richesses de la valeur ajoutée ». Il s'agit, enfin, d'être « au service de l'homme et non pas d'être soumis aux aléas conjoncturels de l'économie ».

Il faudra bien, aussi, s'atteler à « une vraie réflexion sur le temps de travail et la réorganisation de la vie au travail ». Marc Vilbenoît croit plus aux « trente-deux années payées quarante », qu'au slogan des trente-cinq heures. À notre époque, considère-t-il, on ne peut plus raisonner à la semaine, mais « à l'année, à la vie ». Le président de la CFE-CGC exhorte également à d'autres « chantiers » : celui qui concrétiserait enfin « la participation institutionnelle des salariés au pouvoir de surveillance et d'orientation des entreprises », « le fil rouge de cette fin de millénaire » ; celui, aussi, qui permettrait « le rapprochement entre les secteurs public et privé », parce qu'on ne peut pas voir durablement coexister « un secteur surprotégé » avec un « secteur de plus en plus précarisé ».

Il s'agit enfin, pour le syndicalisme de l'encadrement, de « s'ouvrir à de nouveaux enjeux et à une nouvelle démocratie sociale ». Marc Vilbenoît prédit une nouvelle vision des entreprises qui seront « éclatées, en réseaux, diversifiées… », une nouvelle vision de l'encadrement avec le « multisalariat, le travail indépendant, les salariés libéraux, de nouveaux statuts... » Il faut, selon lui, s'y préparer, anticiper, c'est un « enjeu pour une organisation comme la note », une ouverture « à conduire », et aussi vers les jeunes, « le junior encadrement », faut « mieux intégrer et mieux accepter ». Le président confédéral parle de « refonder l'encadrement sur les valeurs de compétence, de responsabilité, d'autonomie, de savoir, de savoir-faire et de savoir- être », cela passe par une « redéfinition d'un corps de règles, de droits et de devoirs, qui disent ce qu'est l'encadrement car la valorisation par la promotion sociale est un élément fondamental de la vie d'une société ». Il propose « le développement d'un institut de l'encadrement » et l'instauration de « règles protégeant convenablement les militants qui s'engagent dans l'action syndicale ». Atteindre ces objectifs à long terme se fera par « la conquête » et la première des conquêtes est de réussir les élections prud'homales de 1997 : la CFE-CGC s'y emploie. Marc Vilbenoît a profité de l'occasion pour annoncer officiellement le renouvellement de sa candidature à la présidence de la CFE-CGC, en juin prochain.

UNE CRISE DE LA DEMANDE

Il y a, à la fois, une grande convergence des économistes et de l'INSEE pour déceler, à l'origine de la stagnation actuelle de la croissance et de la consommation, le ralentissement de l'évolution des salaires et du pouvoir d'achat et une grande obstination de la part du gouvernement et des entreprises pour refuser de le reconnaître.

Compte tenu de l'état des comptes publics, on comprend bien la position du gouvernement bien qu'à notre avis elle parte d'une fausse analyse : ce n'est pas en étranglant l'économie avec une politique restrictive et cent milliards de prélèvements supplémentaires en 1996 qu'on relancera l'activité et qu'on assurera le rééquilibrage des comptes publics et sociaux.

Du côté du patronat, le discours est aussi simple qu'erroné : toute augmentation de salaire hypothéquerait la compétitivité de l'entreprise France. Un raisonnement qui ne tient pas, comme le démontre la dernière étude de REXECODE sur les coûts salariaux : les différences, en la matière, proviennent essentiellement des évolutions de parités, les politiques salariales ne jouant qu'un rôle marginal.

En outre, il sera difficile de démontrer que la déformation continue depuis douze ans du partage de la valeur ajoutée au détriment des salaires s'est produite en faveur de l'emploi. Bien au contraire, le taux d'autofinancement des entreprises, tous secteurs confondus, dépasse depuis deux ans les 100 %, ce qui signifie :

– un, que les entreprises, grâce à leur captation d'une part toujours plus grande de la valeur ajoutée, ont les moyens d'investir ; 
– deux, qu'elles ne le font pas, ce qui ne risque pas de créer des emplois ! En revanche, l'inverse pourrait bien être vrai.

Les entreprises britanniques l'ont reconnu, qui prônent des hausses de rémunérations. L'enchaînement est connu : la part de revenu qui est consommée et qui – tous les économistes le disent – ne sera pas modifiée par les incitations de l'État à la désépargne, n'augmentera que si le revenu global s'accroît. Dans ce cas, la croissance, qui repose à 60 % sur la consommation, augmentera également et, avec elle, les perspectives de débouchés, donc les investissements et l'emploi. Faut-il réclamer aujourd'hui des patrons britanniques pour les entreprises françaises ?

Quelle réforme fiscale ?

Disons-le tout net : l'évolution des prélèvements obligatoires depuis six mois ne va pas du tout dans le sens que nous avions souhaité. Si l'augmentation de la TVA, qui doit rester temporaire, rappelons-le, avait une justification dans le cadre de la politique en faveur de l'emploi, on peut néanmoins considérer qu'elle a joué un rôle dans l'affaiblissement de la consommation des ménages. En revanche la suppression de certains avantages liés à l'épargne sera, comme les économistes le savent, sans effet sur l'arbitrage consommation-épargne du revenu des ménages. Au plus influera-t-il sur les choix d'épargne, en privilégiant certaines formes plutôt que d'autres. Enfin la hausse de la taxe sur l'essence et la création du RDS aboutissent, en tenant compte des éléments qui précèdent, à quelque 100 milliards de francs supplémentaires prélevés sur une activité déjà forte peu dynamique.

Mais s'il est un message susceptible de rassurer les Français sur leur avenir et de les encourager à travailler et à consommer, c'est bien celui d'une réforme des prélèvements allant dans le sens de l'équité fiscale et de l'allégement du fardeau des impôts pour ceux qui le portent. C'est aussi un facteur clé de la relance de l'activité, d'où naîtront des recettes fiscales spontanées, donc le rééquilibrage des comptes publics et sociaux.

Trois points sont essentiels dans cette réforme que la CFE-CGC appelle de ses voeux :

– alléger, simplifier le barème des impôts et en élargir l'assiette, même avec un taux très faible pour les bas revenus, afin de recréer le lien social entre le citoyen et la Nation ;
– transformer la CSG en cotisation, déductible et perçue sur tous les revenus, y compris ceux des entreprises, quitte à transférer sur son assiette une partie des cotisations qui pèsent aujourd'hui sur la masse salariale ;
– se servir de la fiscalité pour mener une véritable politique en faveur de la famille : déplafonnement du quotient familial, augmentation sans fiscalisation ni conditions de ressources des prestations familiales, aide au logement par l'exonération de l'impôt de solidarité sur la fortune de la première résidence familiale, l'amélioration des conditions de réduction d'impôt pour emprunt...

Une telle réforme, annoncée aujourd'hui, avec un calendrier d'exécution engageant les pouvoirs publics, est susceptible de faire beaucoup plus pour la croissance en 1996 que vingt plans de relance.

Oui à l'Europe de la croissance et de l'emploi

La polémique autour du respect du calendrier et des critères de Maastricht n'a d'intérêt que si elle permet à la France de préciser ses priorités en matière d'intégration monétaire. La CFE-CGC s'est prononcée en faveur de la monnaie unique. Mais cette position n'est pas une incantation en la toute-puissance de la monnaie pour résoudre nos problèmes, essentiellement liés à la faiblesse de la croissance et à l'importance du chômage en France et en Europe. En effet, la réalisation d'une monnaie unique en Europe n'a de sens que si elle crée l'instrument qui autorisera la baisse des taux d'intérêt à court et long terme et interdira les mouvements de parité déstabilisateurs à l'intérieur de l'Europe. Ainsi faut-il rappeler que nous perdons, dans le seul secteur textile-habillement, 1 % des effectifs chaque mois à cause de la dévaluation de la lire italienne, qui a créé un avantage que l'on peut qualifier de déloyal en faveur de l'industrie italienne.

La monnaie unique doit donc, pour créer les conditions d'une concurrence saine fondée sur les efforts de chacun en matière de compétitivité, être vraiment unique, c'est-à-dire intégrer tous les pays participant au marché unique sur la base de parités reflétant les pouvoirs d'achat respectifs. À défaut, elle faussera un peu plus les règles de concurrence au détriment de nos exportateurs, donc des emplois en France.

En outre on ne saurait accepter une intensification ou une accélération des effets récessionnistes d'une politique économique privilégiant le respect des critères financiers sur celui des indicateurs de l'économie réelle au prétexte du calendrier de l'intégration monétaire.

Le rétablissement de l'équilibre de nos comptes publics et sociaux est nécessaire car il garantit la pérennité de notre cohésion sociale et de nos régimes de protection sociale, et non parce qu'il favorise l'Europe monétaire et financière, l'Europe des marchés. Il doit donc être recherché par une action de moyen terme soucieuse de combler les déficits sans déstabiliser le fonctionnement de l'économie.

Enfin, la monnaie unique doit demeurer un instrument au service de l'Europe économique et de l'Europe sociale, celle qui cite des emplois en se souciant des conditions de travail et de vie des hommes et des femmes qui la composent. Et le marché unique qu'elle parachève ne doit pas devenir l'unique forme de l'organisation des marchés. Dans ce domaine, la subsidiarité doit être respectée : si certains États membres jugent préférable d'organiser les secteurs stratégiques de l'énergie, des transports ou des télécommunications sous la forme du service public, de quel droit l'Europe prétendrait-elle leur imposer un modèle qui n'est pas le leur ?

L'organisation de la sécurité sociale

Pour une clarification du rôle des différents acteurs Parlement, gouvernement, partenaires sociaux

Depuis longtemps la CFE-CGC réclame que soient repensés le mode de décision et le mode de gestion de la sécurité sociale. Aucun des acteurs n'est actuellement en mesure d'assumer pleinement son rôle, que ce soit le Parlement, le gouvernement ou les partenaires sociaux. Ces derniers n'ont jamais été en mesure malgré les ordonnances de 1967 d'être mis en capacité d'assumer leurs responsabilités de gestionnaires des organismes de sécurité sociale.

C'est pourquoi nous avions proposé, en son temps, que :

– les élus de la Nation déterminent ce que doit être une politique de la protection sociale dans toutes ses composantes : santé, retraite, famille, solidarité ;
– les partenaires sociaux, via les conseils d'administration des caisses de sécurité sociale, sur la base de conventions d'objectifs passés avec le gouvernement, assurent la gestion des différentes branches.

C'est pourquoi le Plan Juppé basé sur une revalorisation du rôle du Parlement et une clarification des relations entre l'État et les partenaires sociaux, ne pouvait que nous donner une satisfaction de principe, sous réserve que les mesures d'application s'inscrivent bien dans cette logique.

Renforcement du rôle du Parlement

La réforme constitutionnelle engagée par le gouvernement pour permettre au Parlement d'émettre un vote annuel sur l'équilibre prévisionnel des recettes et des dépenses de la sécurité sociale a été empreinte d'une certaine ambiguïté.

Si, au départ, notre organisation a reconnu au Parlement le droit de fixer des objectifs de dépenses en relation avec les données économiques, sociales, démographiques, familiales, de santé publique du pays, nous ne pouvons accepter que l'on s'achemine vers une étatisation totale de la sécurité sociale.

Une clarification des responsabilités est indispensable pour sortir de faux-semblants et du système actuel qui ne donnent aux partenaires sociaux que la dangereuse apparence du pouvoir.

Ce n'est pas pour autant qu'il convient de passer d'un extrême à l'autre en donnant au Parlement, une véritable compétence budgétaire qui l'amènerait tout au long de l'année à légiférer sur les dépenses mais aussi sur les recettes.

Pour la CFE-CGC, seule la méthode de conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens impliquant des processus de régulation peut assurer une maîtrise collective et concertée des dépenses, ce qui nécessite une implication forte de toutes les parties prenantes.

Conforter les partenaires sociaux dans la gestion des organismes sociaux

Les partenaires sociaux ont fait la preuve, dans les régimes conventionnels (chômage, retraite complémentaire, formation) de leurs compétences dès lors qu'ils sont en pleine capacité de gestion.

C'est pourquoi, notre organisation approuve les grandes lignes du Plan Juppé qui visent :

– à contractualiser les rapports entre l'État et les caisses nationales ;
– à créer des conseils de surveillance charges du suivi de la bonne application des conventions d'objectifs.

La CFE-CGC considère que la composition actuelle des conseils d'administration des caisses de sécurité sociale (nationales et locales) ne doit pas être sensiblement modifiée. En particulier, puisque le gouvernement a décidé de remplacer les élections par la désignation, la composition des conseils ne doit pas se référer à d'autres éléments que la représentativité sociale.

Des lors que l'État a confié un mandat de gestion par le biais de conventions d'objectifs, c'est aux partenaires sociaux (organisations syndicales et patronale) d'assumer cette responsabilité.

En revanche, il est tout à fait légitime que soit assuré un suivi, un contrôle des conventions d'objectifs dans le cadre de structures que le Plan JUPPÉ a qualifiées de conseils de surveillance qui associeraient les parlementaires, les associations, les personnes qualifiées.

Nécessité d'une réforme du financement de la sécurité sociale

Ce sont les problèmes de financement de la sécurité sociale qui ont conduit le gouvernement à engager une réforme d'ensemble de notre système de protection sociale en novembre 1995.

Le Plan JUPPÉ en ce domaine s'articule sur 4 propositions :

– transfert progressif d'une partie de la cotisation maladie des salariés sur une CSG élargie ;
– réforme des cotisations patronales dont l'assiette sera modifiée pour intégrer notamment la notion de valeur ajoutée ;
– augmentation de la cotisation maladie sur les revenus de remplacement ;
– apurement de la dette du régime général avec la création d'une contribution, le RDS, prélevée sur l'ensemble des revenus.

La CFE-CGC a approuvé la philosophie de ces mesures des lors qu'elles ont pour objectif de favoriser l'emploi, de faire participer tous les revenus dans un souci de justice et de garantie de ressources stables à rendement élevé.

Il est normal également qu'en fonction de la nature des dépenses, le financement soit totalement contributif (retraites), totalement fiscalisé (famille) ou réparti entre ces deux sources (maladie). Il est important de conserver la référence aux salaires sur les risques contributifs car cela affiche la volonté de ne pas se satisfaire de la situation actuelle de l'emploi. Un transfert total reviendrait estimer que l'on entérine le fait que l'emploi, et donc les salaires, ne reviendra plus à un niveau satisfaisant pour financer la protection sociale.

Réforme des cotisations patronales

En ce qui concerne la part patronale des cotisations, bien que le discours sur les coûts salariaux et les comparaisons internationales soit pour le moins sujet à caution, la CFE-CGC prône le transfert vers des éléments du style valeur ajoutée ou excédent brut d'exploitation, transfert qui aura au moins le mérite de mettre le patronat devant ses responsabilités en matière d'emploi et de rétablir un équilibre entre entreprises de main-d'oeuvre et entreprises capitalistiques pour le financement de la protection sociale.

Vers une CSG élargie et déductible

Le transfert progressif d'une partie des cotisations sociales vers une CSG élargie doit, pour la CFE-CGC, s'accompagner d'une déductibilité fiscale. En effet, la contribution pour le remboursement de la dette sociale (RDS) comme la CSG ont la même philosophie que les cotisations : elles servent à financer des dépenses de protection sociale.

La CFE-CGC souhaite, en outre, que l'on retienne une assiette plus large pour la CSG : il faut à terme harmoniser les différents champs d'application des différents prélèvements (tels que le RDS ou la CSG). Une seule référence simplifierait l'ensemble du dispositif, le rendrait plus lisible et plus acceptable.

En ce qui concerne le transfert des cotisations, et dans la mesure où la cotisation maladie sur les revenus de remplacement aura été significativement majorée, la CFE-CGC souhaite que ce transfert s'applique également aux revenus de remplacement. On ne peut pas dire aux retraités et aux chômeurs « vous allez payer plus de cotisations maladie et vous allez en plus payer un alourdissement de la CSG pour réduire les cotisations des actifs ».

Assurance maladie : le devoir de maîtrise

La réforme de l'assurance maladie est un des volets majeurs du Plan Juppé. La CFE-CGC s'est félicitée, dès le départ, de l'objectif ambitieux qui sous-tendait la réforme ambitieuse de notre système de santé : la poursuite de la maîtrise médicalisée grâce au renforcement des outils de connaissance de l'activité médicale (codage des actes et des pathologies, carnet médical, références médicales opposables,...), à l'informatisation des cabinets médicaux et à la généralisation de la carte santé.

Participation de la CFE-CGC au comité de vigilance

La CFE-CGC participe aux travaux du comité de vigilance dont les objectifs sont à la fois de veiller à l'application des réformes notamment en matière d'assurance maladie et de faire des propositions permettant de respecter les principes de solidarité, de justice et de qualité des soins médicaux.

La CFE-CGC réaffirme son attachement à la mise en place d'un régime universel d'assurance maladie afin de permettre l'égal accès de toute la population aux soins.

Nécessité d'une maîtrise médicalisée de l'évolution des dépenses de santé

Les dépenses de médecine ambulatoire ont augmenté de 4,7 % en 1995, contre 3,2 % en 1994. Le dérapage observé par rapport à l'objectif contractuel fixé à 3 % par la convention médicale doit nous conduire à plus de vigilance et de fermeté envers les prescripteurs de soins. En effet, l'échec des négociations entre les syndicats de médecins et les caisses nationales d'assurance maladie prouve le refus manifeste des professions de santé de prendre leurs responsabilités.

Il revient désormais à l'État, d'après l'ordonnance portant mesures urgentes, de fixer le taux d'évolution des dépenses pour 1995, soit certainement 2,1 %.

La CFE-CGC demande que ce taux soit opposable aux médecins et que des sanctions soient prévues en cas de non-respect des objectifs. La CFE-CGC souhaite, que le plus rapidement possible, soit mises en place des filières de soins dont l'objectif est d'éviter le nomadisme médical et la redondance des actes.

Réforme de l'hôpital

Mais la maîtrise médicalisée ne doit pas s'arrêter, pour la CFE-CGC, à la seule médecine de ville. Elle doit se propager au secteur hospitalier.

Depuis de nombreuses années, la CFE-CGC dénonce les dysfonctionnements de l'hôpital public.

Pour que l'assurance maladie devienne un acheteur avisé de soins de qualité au meilleur coût, la CFE-CGC souhaite une vraie réforme du budget global. Ce dernier a montré ses faiblesses et son impuissance à maîtriser la dérive des dépenses hospitalières.

Seul un financement, calculé en fonction de l'activité réelle des établissements, est de nature à maîtriser les dépenses. À cette fin, des contrats d'objectifs pluriannuels devront être passés entre l'assurance maladie et l'État, après avoir été négociés au niveau régional entre l'établissement concerne, la DRASS et la CRAM. Pour que ces contrats résultent d'une concertation entre les acteurs impliqués dans le système de soins, il faudra renforcer le rôle des CROSS et leur laisser une place à part entière dans la définition des objectifs prévisionnels et de régulation.

Pour la CFE-CGC, il est indispensable que les acteurs de terrain, équipes soignantes, personnel médical ou non, soient associés à cette démarche d'évaluation tant qualitative que quantitative des besoins.

La sécurité sociale doit rembourser des prescriptions et des actes, elle ne doit pas simplement financer des structures.

En parallèle, il faudra intégrer le secteur hospitalier dans un réseau de soins cohérent qui inclut tant le secteur ambulatoire que le secteur hospitalier privé.

Pour une politique familiale ambitieuse

Dans notre société, la cellule familiale a un rôle fondamental à jouer, tant dans le domaine social comme facteur de cohésion et de lien intergénérationnel, que dans le domaine économique comme facteur d'emploi, de consommation et de niveau de revenu.

Notre société, en pleine évolution, doit créer un environnement favorable à l'enfant, tenir compte des aspirations des jeunes parents et des besoins nouveaux qui s'expriment par l'apparition de nouvelles formes de vie familiale.

Le Plan Juppé prévoyait :

– la non-revalorisation des prestations familiales en 1996 ;
– la mise sous conditions de ressources de l'allocation pour jeune enfant entre le 5e mois de grossesse et les 3 mois de l'enfant.

Pour la CFE-CGC, ces mesures, appliquées par ordonnance, sont totalement inacceptables et symbolisent la mise en place d'une politique familiale restrictive et qui manque cruellement d'ambition. De surcroît, l'application rétroactive des conditions de ressources pour l'APJE est juridiquement contestable.

Ces décisions seront néfastes pour l'économie : en effet, en grevant le budget des familles, c'est la consommation que l'on freine et la confiance en l'avenir que l'on malmène. La CFE-CGC prône la mise en place d'une politique familiale ambitieuse, au service de l'ensemble des familles, sans distinction de revenu ou de statut familial.

Simplification des prestations familiales

À cette fin, la CFE-CGC propose le remplacement des prestations familiales existantes par :

– une prestation de garde pour les enfants de 3 ans, dès le premier enfant ;
– une prestation d'éducation pour les familles ayant au moins deux enfants de plus de 3 ans.

Financer autrement la politique familiale

La CFE-CGC accepterait une fiscalisation des prestations familiales si les principes suivants sont respectés :

– suppression des plafonds de ressources actuels subordonnant l'octroi des prestations familiales ;
– réforme de la fiscalité : déplafonnement du quotient familial, remise à plat de la notion de foyers fiscaux ;
– réforme de la fiscalité locale (notamment abattements de la taxe d'habitation).

L'imposition des seules allocations familiales des 1997, mesure prévue par le Plan Juppé, n'est pas acceptable tant que les points ci-dessus n'auront pas été réglés.

Le droit prioritaire au logement

L'accès au logement doit être un droit prioritaire pour les familles, une des conditions du bien-être de la cellule familiale. C'est pourquoi, la CFE-CGC privilégie la création d'une aide unique au logement qui rejoint la volonté d'une simplification des aides et prestations actuelles.

Le congé parental

Le congé parental dans sa forme actuelle connaît des limites. Il ne s'adresse de fait qu'aux femmes ayant un faible niveau de qualification. Ce dispositif peut donc, au pire, être un facteur d'exclusion des femmes du marché du travail et, au mieux, freiner leurs perspectives de carrière.

La CFE-CGC entend profiter de la conférence sur la famille pour formuler des propositions s'inspirant notamment du modèle nordique qui met à égalité de droit mais aussi de fait, les hommes et les femmes.

L'objectif est d'aboutir à une meilleure gestion des temps sociaux : la prise de responsabilités familiales doit s'inscrire dans une gestion plus souple de la carrière professionnelle.

Retraite

Retraites complémentaires : les voies de la consolidation

Les négociations en cours sur les régimes de retraite complémentaire des cadres (AGIRC) et des non-cadres (ARRCO) doivent aboutir à une pérennisation sur le long terme de ces régimes. Cet objectif relevé de la seule responsabilité des partenaires sociaux gestionnaires. Il ne peut être atteint par une action centrée uniquement sur les charges ou l'ébauche à partir d'hypothèses pessimistes entraînant un effort des seuls salariés et allocataires.

En effet, la CFE-CGC ne saurait admettre les prévisions du CNPF qui aboutissent, d'ici 10 années, à une recrudescence du chômage et à la dégradation inexorable du pouvoir d'achat tant des actifs que des retraites.

Pour la CFE-CGC, la consolidation des régimes de retraite complémentaire passe obligatoirement par la remise en cause des politiques actuelles des effectifs et des salaires des entreprises dont les répercussions lèsent l'AGIRC et l'ARRCO. Se baser sur le seul facteur démographique pour expliquer les difficultés actuelles et à venir de nos régimes est un leurre.

L'argument du CNPF de limiter à 25 % l'ensemble des prélèvements pour la retraite et la conclusion qu'il en tire sur la non-participation des entreprises n'est pas d'actualité dans la mesure où ce taux n'est pas atteint actuellement et ne le sera pas davantage en 2003 pour une large partie de la population.

À la derrière réunion de négociation qui s'est tenue le 6 février, la CFE-CGC a formulé des propositions visant à garantir la pérennité de nos régimes. Pour chacune d'entre elles, la CFE-CGC a demandé à l'AGIRC et à l'ARRCO d'en chiffrer les incidences financières en terme de recettes nouvelles.

L'impact du chômage

Le coût du chômage et les pertes de ressources qui s'ensuivent déstabilisent les régimes de retraite complémentaire. Le seul fait que l'UNEDIC ne finance que partiellement les points de chômage entraîne une charge financière de 78 milliards sur 10 ans pour l'AGIRC et l'ARRCO.

La CFE-CGC propose par conséquent que l'UNEDIC augmente sa contribution et qu'une participation financière correspondant à l'équivalent d'une armée de cotisation soit versée aux régimes AGIRC et ARRCO par les entreprises qui procèdent à des licenciements économiques.

Érosion de l'assiette des cotisations

La différence entre les taux de cotisation, sur la tranche B du salaire entre l'ARRCO et l'AGIRC, conduit les entreprises à ne plus proposer à leurs salariés la classification de cadre afin d'économiser la différence et par conséquent à payer moins de charges.

La CFE-CGC souhaite donc que l'on atteigne le taux de 16 % sur la tranche B à l'ARRCO pour neutraliser les pratiques de non-affiliation des salariés à l'AGIRC. Une telle disposition procurerait sur les 10 ans à venir 39,7 milliards de recettes supplémentaires pour nos régimes. L'autre disposition permettant de remédier à la baisse de l'assiette de cotisation réside dans l'assujettissement des avantages annexes au salaire. Cela rapporterait quelque 33,4 milliards de francs d'ici à 2005 et mettrait un frein aux politiques des entreprises visant à s'exonérer de toute responsabilité vis-à-vis des régimes complémentaires.

Revoir le principe du 1,5 % à l'AGIRC

La convention collective du 14 mars 1947 relative au régime de retraite des cadres, a créé une cotisation obligatoire de 1,5 % sur la tranche A du salaire, à la seule charge de l'employeur, et destinée à garantir un capital décès complémentaire. Or, rallongement de l'espérance de vie fait qu'aujourd'hui il est possible d'avoir la même garantie pour un prix inférieur.

La CFE-CGC propose un transfert de la moitié de cette cotisation vers la retraite, ce qui procurera à l'AGIRC 41,2 milliards de francs sur 10 ans.

Un rendement aligné sur l'espérance de vie

L'espérance de vie s'accroissant d'un trimestre par an environ, les régimes de retraite sont amenés à verser plus longtemps les retraites. Pour atténuer les conséquences sur nos régimes, la CFE-CGC souhaite que le rendement actuel de l'AGIRC et de l'ARRCO diminue progressivement en fonction de l'augmentation de l'espérance de vie.

L'accroissement du chômage et ses conséquences sur l'équilibre des régimes AGIRC et ARRCO

Le CNPF a bâti ses prévisions pour justifier un déficit cumulé sur la période 1196-2005 de 37 milliards à l'ARRCO et 130 milliards à l'AGIRC sur les hypothèses suivantes :

– à l'AGIRC, augmentation des effectifs de 1 % par an de 1997 à 2000 et de 0,75 % par an de 2001 à 2020, augmentation du salaire médian des cadres de 0,5 % par an associé à une croissance du plafond de 1 % ;
– à l'ARRCO, augmentation des effectifs de 0,5 par an de 1996 à 2020. Le salaire moyen des cotisants progresse de 1 %.

La CFE-CGC a cherché à mesurer les conséquences de ces hypothèses sur le taux d'activité de la population.

Quelles conséquences sur le chômage ?

En 1995, la population active (salariés, chômeurs, préretraités) s'élève à 26,7 millions de personnes. En retenant pour hypothèse une évolution annuelle des effectifs cotisants à l'AGIRC et à l'ARRCO de 0,5 % par an, cela signifie qu'au cours des 10 prochaines années, le différentiel entre ceux qui arrivent sur le marché du travail et ceux qui partent à la retraite sera de 550.000 personnes.

Cela signifie que le chômage qui touche aujourd'hui un peu plus de 3 millions de personnes non seulement ne diminuera pas mais toucherait plus d'un demi-million de personnes supplémentaire.

L'analyse de l'étude réalisée par l'ARRCO donne les chiffres suivants :

1996 : + 116 000 chômeurs ou inactifs (préretraites, ...)
1997 : + 97 000
1998 : + 89 000
1999 : + 90 000
2000 : + 101 000
2001 : + 64 000
2002 : + 18.000
2003 : 0
2004 : – 10.000
2005 : – 9.000
1996-2005 : + 555 000 chômeurs (Source AGIRC-ARRCO)

Le coût du chômage pour les régimes de retraite

À l'ARRCO, le financement des points de chômage est assuré par l'UNEDIC :

– prise en charge à hauteur de 70 % des droits correspondants ;
– validation par I'ARRCO des opérations supplémentaires.

À l'AGIRC, l'UNEDIC rembourse au régime les surcoûts dans ses charges des points attribués au moment de la retraite sur la base des taux de 8 % (entreprises créées avant 1981) et de 12 % pour les entreprises nouvellement créées soit une moyenne en 1994/1995 de 8,16 %. En ce qui concerne la validation des périodes de préretraite et de chômage de solidarité, l'État s'était engagé à financer la perte de ressources pour l'AGIRC et I'ARRCO. Au 1er janvier 1996, l'État n'a toujours pas rempli ses engagements. La dette s'élève à 1,9 milliard pour l'ARRCO et 660 millions pour l'AGIRC.

L'AGIRC et l'ARRCO devront valider un total de points de retraite pour un montant de 196,4 milliards de francs sur la décennie 1996-2005.

Sur ce total de 196,4 milliards :

96,4 milliards seront pris en charge par l'UNEDIC (soit 49 %) ;
22,1 milliards seront pris en charge par l'ÉTAT (soit 11 %) en théorie car ce dernier n'a pour l'instant jamais payé malgré ses engagements formels ;
77,9 milliards ne sont pas financés (40 %).

Intégration des éléments annexes du salaire dans le champ des cotisations AGIRC et ARRCO

Actuellement, un certain nombre d'éléments annexes du contrat de travail n'est ni soumis à cotisation ni à l'impôt sur le revenu, mais est sous certaines conditions soumis à la CSG.

Ces éléments sont les suivants :

– avantages en nature (voiture ou logement de fonction) ;
– l'épargne salariale dont : la participation, celle-ci représentait un montant de 15 milliards de francs pour une population couverte de 4,4 millions de salariés ;
– les stock-options ;
– les plans d'intéressement. Les sommes versées au titre de l'exercice 1992 ont atteint 8 milliards de francs pour 2,7 millions de salariés ;
– les plans d'épargne d'entreprise (PEE) ;
– les avantages sociaux (plans de retraite par capitalisation).

Dans le rapport du commissariat au Plan, Monsieur de FOUCAULD évaluait le préjudice pour la sécurité sociale, pour ce qui concerne l'intéressement et la participation, à 10 milliards de francs environ.

Jusqu'à présent, la CFE-CGC avait été hostile à ce que ces éléments soient soumis à l'assiette fiscale et sociale au motif notamment que l'intéressement ne fait pas partie du salaire. En effet, le salaire est fonction de la qualification du poste de travail occupé et de la façon dont le travail est effectué. L'intéressement est fonction de la réalisation d'objectifs variables, donc ne comportant pas d'éléments de stabilité.

Mais en 1993, notre organisation constatait que dans les entreprises « l'intéressement tenait lieu d'unique politique salariale, créant un effet de confusion entre ces deux formes de rémunération voulues distinctes par le législateur.

Cette dérive ne peut être ignorée, puisque parfois explicitement mentionnée dans la négociation d'accords d'intéressement ou dans les négociations salariales.

Par son importance, elle entraîne alors une fluctuation des salaires fort mal perçue par les salariés dès lors qu'elle se situe à la baisse. Elle crée un appauvrissement de l'assiette des cotisations liée aux régimes de retraite ou d'indemnisation du chômage, que l'on ne saurait négliger.

Cette dérive que nous constations se trouve confirmée par une méthode mise au point par des cabinets de conseil aux États-Unis : le « Comp and Ben » (Compensation and Beneficits Consultant).

L'idée centrale de la fonction « Comp and Ben » est de permettre aux DRH et responsables d'entreprises de mettre en place des rémunérations complémentaires et indirectes qui viennent s'ajouter au salaire. Le but de l'opération est de trouver des formules qui échappent à l'impôt et aux cotisations sociales.

Ce qui pouvait être un plus pour les salariés et notamment pour le personnel d'encadrement hier risque de remettre en cause son existence aujourd'hui.

Les difficultés que connaît le régime de retraite des cadres s'expliquent par le fait que l'accroissement du taux d'encadrement dans les entreprises ne s'accompagne pas d'une augmentation parallèle des rémunérations. L'assiette du régime a tendance à évoluer moins vite que celui de l'ensemble des salariés en raison notamment de ce phénomène.

[TABLEAU NON REPRODUIT]

Vouloir assurer la pérennité de l'AGIRC et du régime de retraite des cadres, et par conséquent affirmer la spécificité et l'identité de l'encadrement en France, nécessite de revoir l'assiette de cotisation de nos régimes de retraite en reprenant l'assiette de la CSG ou du RDS.

Une réglementation qui privilégie le statut non-cadre et lèse le statut cadre.

La réglementation actuelle en matière de taux de cotisation obligatoires pour les seuls régimes de retraite des salariés (assurance vieillesse, ARRCO et AGIRC) favorise les statuts non-cadre. En effet, les entreprises ne sont pas incitées à accorder à des salariés le statut de cadre, même si ces derniers devraient, de par leurs fonctions et responsabilités, être affiliés à l'AGIRC.

Ce déséquilibre qui désavantage le régime AGIRC tient essentiellement aux différences de taux de cotisation.

Actuellement (au 1er janvier 1996), pour la tranche A des salaires, l'écart est de 1,50 point pour la part patronale entre l'AGIRC et l'ARRCO. Cette différence tient à la cotisation prévoyance obligatoire de 1,5 % à la seule charge des entreprises, cotisation qui n'existe qu'à l'AGIRC.

Pour la tranche B, l'écart est de 10,62 points à la faveur de l'ARRCO dont 7,25 points pour la part patronale.

Au 1er janvier 1999, on retrouve la même différence qu'au 1er janvier 1996 pour la tranche A, et l'on atteint 10 points pour la tranche B à raison de 6,75 points pour la part patronale.

Au 1er janvier 2003, le différentiel entre les taux de cotisation obligatoires de l'ARRCO et de l'AGIRC est de 12,5 points sur la tranche B dont 8 points pour la seule part patronale.

Quelles solutions ?

II faut harmoniser les taux de cotisation sur la tranche B entre l'AGIRC et l'ARRCO.

À cette fin, il est nécessaire d'accéder au taux obligatoire de 16 % à l'ARRCO au plus tard au 1er janvier 1999.

Taux de cotisation obligatoires au 1er janvier 1996 pour les non cadres

[TABLEAU NON REPRODUIT]

Prise de conscience sur le gâchis en termes d'emplois des mesures d'exonération de charges sociales mieux vaut tard que jamais !

L'année 1996 a été proclamée « Année du dialogue social ». Mais elle s'annonce également comme celle de la remise à plat de toutes les exonérations de charges sociales en faveur des entreprises. Il y a des signes qui ne trompent pas et la CFE-CGC saura les suivre et les rappeler en cas d'oubli…

Le premier semestre 1996 verra la rédaction du rapport d'évaluation de la loi quinquennale, évaluation effectuée notamment sur la base d'une étude relative aux effets de l'allègement des charges sociales patronales sur les bas salaires. Les conclusions sont attendues !

La loi de finances pour 1996 a mis en place un début de fusion entre deux dispositifs d'allégement du coin du travail : la ristourne dégressive et l'abattement famille. Il y aura à nouveau une modification pour le deuxième semestre. Ces modalités technico-financières révèlent la complexité des dispositifs et le manque absolu de contrôle en termes d'effet sur les emplois.

La cerise sur le gâteau concerne l'annonce du groupe RPR à l'Assemblée nationale de créer une commission d'enquête sur les mécanismes d'aide à l'emploi afin de comprendre « comment certaines aides et exonérations diverses se chevauchent et permettent un effet d'aubaine sans toujours conduire à la création d'emplois durables ».

La CFE-CGC sera là pour aider les parlementaires dans cette démarche car la confédération connaît bien la question.

Depuis plus de trois ans maintenant, la CFE-CGC combat toutes les mesures d'exonérations de charges en faveur des entreprises sans contrepartie claire en termes d'emplois. Il est temps que le patronat comprenne qu'il ne peut prendre sans s'engager en retour.

La CFE-CGC propose que les dizaines de milliards consacrés chaque année dans les budgets du ministère du travail et des charges communes aux exonérations de charges sociales patronales, soient entièrement versés au fonds d'intervention en faveur de l'emploi. Les aides ne seront alors octroyées que si des objectifs clairs sur l'emploi sont fixés, notamment en faveur de l'insertion des jeunes et le développement du travail à temps partiel.

Le dialogue social doit rester dynamique

Le 28 février 1995, les partenaires sociaux, au niveau national interprofessionnel, engageaient une négociation sur l'emploi. En un an, des accords majeurs tendant à favoriser les embauches en entreprise ont été signés.

Deux textes notamment retiennent une nouvelle utilisation des fonds du régime d'assurance chômage, dans une optique de reprise d'emploi et non plus seulement d'indemnisation de la perte d'un travail.

Le premier concerne la création du fonds paritaire d'intervention en faveur de l'emploi, idée forte que la CFE-CGC a réussi à faire aboutir, avec la première mesure qu'il finance : l'allocation de remplacement pour l'emploi, l'ARPE. Le succès est en train de se confirmer auprès des salariés et des entreprises puisque 4 200 embauches ont été recensées à ce jour. Le Parlement vient d'ailleurs d'entériner la loi instituant le fonds. Les entreprises n'ont plus aucune raison de retarder leur entrée dans le dispositif.

La seconde mesure d'utilisation des fonds du régime de l'assurance-chômage en faveur de l'emploi, vise le développement des conventions de coopération. Le dispositif simplifié depuis l'été avec le concours de la CFE-CGC, a vu sa montée en charge s'accélérer et offre un avenir prometteur grâce à la campagne de presse qui est actuellement menée auprès des employeurs.

Sur ces points, le dialogue social dans le domaine de l'emploi a montré sa vigueur et sa capacité trouver des marges d'actions dans la lutte contre le chômage.

La dernière étape réside dans la négociation sur le temps de travail. Plus que jamais, avec la nouvelle dégradation du marché du travail, les partenaires sociaux se doivent d'être à la hauteur de l'enjeu de l'emploi.

Or, à quoi assiste-t-on ?

Les interlocuteurs patronaux, tant au niveau national qu'au niveau des branches, s'interrogent, hésitent, tergiversent.

Le temps n'est plus aux discours mais au travail ! L'avertissement que les parlementaires viennent de donner aux partenaires sociaux, en adoptant une proposition de loi relative à la réduction du temps de travail, est clair.

La CFE-CGC s'est investie à tout niveau dans la négociation sur le temps de travail. L'aboutissement a des accords significatifs prenant en compte les préoccupations de la confédération doit être effectif. Il en va de la crédibilité des acteurs sociaux. La dynamique insufflée depuis un an n'a pas le droit de fléchir.

Apprentissage : à quand la réforme ?

Le projet de loi portant réforme de l'apprentissage, en cours de discussion, reste bien en deçà des attentes, même s'il s'inspire, pour partie, de l'accord des partenaires sociaux de juillet 1994.

La clarification du financement ? Aucune avancée sérieuse.

Comme l'ont souligné les débats parlementaires, il existe plus de 1 000 collecteurs pour la taxe d'apprentissage contre moins de 70 pour les fonds de l'alternance pour une somme équivalente.

Les organismes formateurs continueront d'assurer la collecte de la taxe d'apprentissage.

Il est pour le moins surprenant que la volonté exprimée fortement de clarification des circuits de financement de la formation professionnelle se préoccupe si peu de l'apprentissage.

La qualité de l'apprentissage ? Absente du projet.

À ce sujet, la CFE-CGC rappelle son attachement à la mise en oeuvre d'un véritable statut du tuteur et du maître d'apprentissage. Ce statut se justifie doublement. Du fait de la suppression de l'agrément préalable, il n'existe plus, aujourd'hui, de garanties formelles sur la qualité de l'accueil dans l'entreprise. La réussite du principe pédagogique de l'alternance nécessite l'existence d'un véritable lien entre le CFA et l'entreprise.

Ce statut, dont les modalités de reconnaissance devraient être négociées au niveau de la branche professionnelle, se traduirait pour les tuteurs et les maîtres d'apprentissage, notamment, par une formation à l'exécution de cette mission et un aménagement de leur charge de travail, afin d'encadrer et de former réellement le ou les apprentis dont ils ont la responsabilité.

L'articulation de l'apprentissage et des autres voies de formation professionnelle ? Pas un mot.

Le développement quantitatif et qualitatif de l'apprentissage, auquel la CFE-CGC souscrit, ne peut être envisagé sans que parallèlement la place et le rôle des formations sous statut scolaire et des contrats de qualification soient clairement définis. En s'abstenant de l'évoquer, le projet de loi transfère, dans les faits, la réponse à cette question aux régions, sans que le débat national qu'elle aurait mérité ait lieu.

À la suite de la mission confiée à M. de VIRVILLE par M. BARROT, un projet de loi mettant à plat l'ensemble du système de formation professionnelle devrait être déposé et discuté cette année. La CFE-CGC espère donc que ce projet de loi sera l'objet d'un véritable débat approfondi sur la formation des jeunes où les questions soulevées par le financement de l'apprentissage seront véritablement abordées.

La violence à l'école

La violence en milieu scolaire ne touche qu'une minorité d'établissements. Toutefois, cela ne doit pas conduire à minorer le problème. Si l'on peut penser qu'il ne pourra être vraiment résolu que dans le cadre plus global de la diminution de l'échec scolaire et de l'amélioration de l'insertion professionnelle, certaines mesures pourraient contribuer à le rendre moins aigu.

La CFE-CGC propose ainsi le renforcement de l'encadrement, notamment au travers d'un accroissement du nombre de surveillants. Cette mesure présenterait également l'avantage d'offrir aux étudiants une possibilité de revenus.

Un effort particulier devrait être fait au niveau des établissements, principalement du secondaire, afin d'en diminuer la taille ou de lutter contre la surpopulation scolaire. Afin de soutenir les collectivités territoriales dans cet effort et d'accélérer les mises en chantier, une aide de l'État, sous forme de prêts par exemple, pourrait être envisagée.

La question des rythmes scolaires ne vise pas uniquement le problème de la violence en milieu scolaire, même si elle peut contribuer à le résoudre. La CFE-CGC approuve les initiatives prises même si elles donnent parfois l'impression d'une certaine cacophonie au sein du gouvernement. Outre les problèmes de financement que la généralisation de telles mesures ne manquerait pas de soulever, cette démarche – que la CFE-CGC soutient – nécessitera à terme une réflexion sur les programmes.

Ce sujet, qui est central quand on s'interroge sur l'avenir de notre système éducatif, a fait l'objet de la première réunion publique de la Commission présidée par M. FAUROUX. Si cette audition n'a pas correspondu aux attentes, le contenu d'une note interne montre, en revanche, que la Commission a bien conscience de l'enjeu que constitue la question des programmes, particulièrement dans le primaire. La CFE-CGC demande depuis longtemps que l'on aille à la redéfinition des acquis nécessaires. Il ne s'agit pas de réduire les exigences au plus petit dénominateur commun, mais de s'interroger sur les acquisitions que doivent maîtriser tous les élèves à la fin de la scolarité obligatoire.

L'idée d'obligation de résultat s'agissant de l'école peut apparaître provocatrice, mais former tous les élèves, n'est-ce pas la mission première de notre système éducatif ?

Europe et politique sociale

L'engagement européen de la CFE-CGC est ancien et constant. Ses préoccupations actuelles se concentrent sur le dialogue social européen, l'application de la directive 94/45/CEE concernant les comités d'entreprise européens et sur la Conférence intergouvernementale qui doit améliorer le Traité de l'Union.

Au plan syndical européen, conformément à sa vocation, et après qu'elle a puissamment poussé à sa création, la CFE-CGC a choisi d'être représentée par la Confédération européenne des cadres (CEC). À ce titre, elle participe à la consultation des partenaires sociaux par la Commission européenne pour ce qui concerne les affaires sociales. Il s'agit là de l'application partielle du protocole social du Traité de l'Union organisant le dialogue social européen. La Commission s'en tient en effet à la consultation des organisations patronales et syndicales, dont une enquête communautaire a reconnu la représentativité.

Pour ce qui est de la négociation d'accords, elle n'ose aller contre la volonté hégémonique de trois organisations patronales et syndicales dites « à vocation générale » et qui ne représentent qu'une partie des entreprises et des salariés européens.

Ainsi, la récente mise en avant de l'accord sur le congé parental doit être très relativisée. Comment pourrait-on imposer à tous un accord négocié par quelques-uns ? Une décision du Conseil en ce sens pourrait être lourde de conséquences juridiques. La CFE-CGC attire l'attention du gouvernement français sur ce point.

La mise en place de comités d'entreprise européens requiert actuellement tous nos soins. La CFE-CGC a soutenu le projet de directive dès sa première élaboration en maintenant que la spécificité des cadres devait pouvoir être représentée comme les autres catégories de salariés. Ceci fait l'objet d'un considérant (représentation de toutes les catégories).

La prochaine entrée en vigueur de la directive (22 septembre 1996) accélère les projets d'accords volontaires en France comme ailleurs. À ce jour, seule ou avec la CEC, la CFE-CGC a déjà signé les 18 accords conclus en France, les procédures adoptées par DANONE et ACCOR ne relevant pas d'accords véritables, mais de lettres d'engagement avec une organisation internationale. Par ailleurs, des négociations sont en cours dans une quinzaine d'entreprises françaises ou filiales françaises de groupes étrangers.

À la veille de l'ouverture de la Conférence intergouvernementale, la CFE-CGC rappelle qu'elle a toujours considéré que politique sociale et politique économique étaient indissociables. La CIG est l'occasion pour l'Union d'être mieux comprise et plus proche des préoccupations du citoyen européen. Le problème de l'emploi est sans conteste le souci le plus important dans tous les pays de l'Union ou le chômage dépasse les 10 %. Le projet du groupe de réflexion sur la CIG, relatif à l'introduction d'objectifs en matière de politique de l'emploi, ne peut être que soutenu. Reste à finaliser les mécanismes de coordination des actions nationales et de suivi.

Il importe également de poursuivre les réalisations en matière de politique sociale. Celle-ci ne peut cependant être équitable si tous les partenaires sociaux ne sont pas partis au dialogue social et si un État membre persiste à se soustraire aux contraintes et obligations acceptées par les autres États.