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© Annette Riedl - DPA Picture-Alliance/AFP

Ingérences étrangères : une ampleur nouvelle

Temps de lecture  4 minutes

Par : La Rédaction

La délégation parlementaire au renseignement estime que les décideurs publics, les entreprises et les milieux académiques doivent être davantage sensibilisés aux questions de sécurité, surtout dans le contexte actuel d’une nouvelle "ère froide".

La délégation parlementaire au renseignement a publié son rapport annuel. Une large part du rapport est consacrée à la politique du renseignement face aux ingérences étrangères. Selon les parlementaires, la question des ingérences étrangères prend une ampleur nouvelle avec le changement radical de contexte géopolitique (confrontation entre régimes autoritaires et démocraties occidentales...) et la révolution numérique (émergence du cyberespace).

Quelles sont les menaces identifiées ?

Selon la délégation parlementaire au renseignement , le niveau de menaces d'ingérences étrangères se situe à un stade élevé. "Les ingérences étrangères s'opèrent de façon de plus en plus décomplexée et concernent tous les secteurs d'activité, de la vie démocratique à la vie économique, du monde de la recherche aux espaces numériques. Elles prennent des formes multiples : opérations de désinformation, cyberattaques, espionnage, opportunités juridiques liées à l'extraterritorialité, corruption, trahison, etc."

Les ingérences étrangères peuvent prendre plusieurs formes :

  • classiques : telles que l'espionnage économique ou les manoeuvres d'approche des élites politiques ;
  • modernes : telles que l’utilisation de l’espace cyber ou l’espionnage par satellites ;
  • hybrides : qui s’apparentent de plus en plus à des opérations d’influence et de manipulation de l’information dans le but d’infléchir les prises de position politiques d’un pays.

Ces menaces proviennent principalement de Russie, de Chine, de Turquie, d’Iran mais aussi des alliés de la France dont les intérêts sont parfois divergents.

Quelles réponses face aux menaces ?

Le rapport souligne des vulnérabilités persistantes face à ces menaces. "La première des vulnérabilités, c'est la naïveté qui provient d'une méconnaissance du danger. Elle concerne aussi bien les décideurs publics (élus et hauts fonctionnaires) que les entreprises et les milieux académiques". Le niveau de sécurité des systèmes d'information, publics et privés, est également pointé par le rapport.

Parmi les mesures nouvelles proposées par la délégation parlementaire au renseignement figurent notamment :

  • des mesures de sensibilisation plus systématiques aux risques d'ingérences et la remise chaque année au Parlement d'un rapport sur l'état des menaces qui pèsent sur la sécurité nationale. Ce rapport pourrait faire l'objet d'un débat (sans vote) en séance publique ;
  • l'instauration d'un dispositif législatif ad hoc de prévention des ingérences étrangères, sur le modèle de la loi américaine (FARA). Il s'agirait de rendre obligatoire l'enregistrement des acteurs influant sur la vie publique française pour le compte d'une puissance étrangère et de les soumettre à une série d'obligations déontologiques ;
  • l'utilisation de la technique de l'algorithme, aujourd'hui réservée exclusivement à la prévention du terrorisme ;
  • le recours à la procédure des gels d'avoirs à toute personne ou structure se livrant à des actions préjudiciables au maintien de la cohésion nationale ou destinée à favoriser les intérêts d'une puissance étrangère ;
  • une réponse européenne fondée notamment sur une convergence des dispositifs nationaux de lutte contre les ingérences étrangères.

Ces différentes mesures pourraient être regroupées dans un projet de loi dédié à la lutte contre les ingérences étrangères afin de provoquer un débat public global sur ce sujet.

Par ailleurs, la loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030 confirme la priorité donnée au renseignement avec cinq milliards d’euros supplémentaires consacrés aux moyens humains des services de renseignement.