Les centres de données ou data centers sont des bâtiments contenant des serveurs dans lesquels sont stockées et traitées les données. Selon l'Agence de la transition écologique (Ademe), ces data centers sont des structures dédiées à l’hébergement, à l’interconnexion et à l’exploitation centralisés des équipements de télécommunication des technologies de l’information et des réseaux fournissant des services de stockage, de traitement et de transport de données.
Les data centers doivent répondre à trois niveaux d'exigence :
- la résilience pour permettre un fonctionnement continu et sans interruption ;
- la sécurité physique pour garantir l'intégrité des équipements ;
- la performance énergétique et environnementale.
Les data centers constituent l'outil physique qui permet au cloud de fonctionner. Le cloud, ou nuage en français, est le terme employé pour désigner l’hébergement des données, ses applications, ses calculs dans un data center externe, et d’y avoir accès partout grâce à Internet. Les centres de données permettent notamment aux usagers de ne pas avoir à stocker leurs données sur leur ordinateur et d'accéder à un espace de stockage plus important et accessible en tout point du globe.
Il existe deux grandes catégories de data centers :
- les data centers d'exploitation dans lesquels les entreprises ou les administrations hébergent leurs propres serveurs ;
- les data centers d'infrastructure ou de colocation gérés par des fournisseurs de service qui proposent l'hébergement des équipements numériques des entreprises clientes ou la mise à disposition de serveurs. Ces structures sont gérées par des acteurs du cloud ou par les grandes entreprises du numérique (GAFAM).
L'intelligence artificielle (IA) mobilise de grandes capacités de calcul et demande une puissance de traitement qui nécessite d'utiliser de nombreux serveurs installés dans les centres de données. Le développement des data centers est appelé à suivre la croissance de l’IA dans le monde.
Dans son discours de clôture du Sommet de l'IA, Emmanuel Macron a annoncé des investissements en France à hauteur de 109 milliards d'euros, notamment pour l'installation de nouveaux data centers. Le président de la République a mis en avant la production, grâce au nucléaire, d'une énergie bas carbone et pilotable. En outre, le volume de production d'électricité est supérieur aux besoins nationaux ce qui laisse entrevoir la possibilité de créer des data centers sans devoir augmenter la production d'électricité.
Les data centers représentent, selon les chiffres de l'Ademe et de l'Arcep, 46% de l'empreinte carbone liée au numérique. L'ensemble du numérique représente 4,4% de l'empreinte carbone en France.
Ces centres sont pointés pour leur consommation d'eau, nécessaire au refroidissement des serveurs. La consommation d’eau pour le refroidissement des data centers peut s’avérer critique en période de forte chaleur et de stress hydrique. Les data centers peuvent en outre avoir un effet d'ilot de chaleur (amplification de la température à proximité) si la chaleur des condenseurs est rejetée dans l'atmosphère.
Certains équipements des data centers sont classés au titre de la réglementation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) :
- les groupes de secours constitués de groupes électrogènes à moteur thermique et les cuves de carburant (fioul) nécessaires à leur fonctionnement ;
- les équipements de production de froid (groupes froid, tours aéro-régriférantes) dans lesquels des fuites peuvent laisser échapper des fluides potentiellement dangereux (gaz fluoré) ;
- les salles de stockage d'électricité qui abritent des batteries électriques au plomb ou au lithium.
Les data centers produisent aussi du bruit (groupes froids).
Des dispositions européennes et françaises sont prises pour réduire leur impact environnemental. La directive européenne sur l’efficacité énergétique de 2023 oblige les centres de données les plus énergivores à valoriser la chaleur qu'ils produisent (la "chaleur fatale"), par exemple, en l'utilisant pour chauffer des locaux.
En France, le dispositif éco-énergie tertiaire impose aux data centers de plus de 1000 m2 une baisse de 40% de leur consommation d'électricité à l'horizon 2030. La loi du 15 novembre 2021 sur l'empreinte environnementale du numérique prévoit une taxation réduite sur l'électricité pour les data centers qui valorisent leur chaleur fatale et respectent un objectif de limitation d'utilisation de l'eau.
Autre impact, les data centers consomment des terrains. Pour respecter les objectifs de zéro artificialisation nette (ZAN), les nouvelles implantations devraient, par exemple, privilégier les friches urbaines.
En 2020, les data centers situés en France consommaient 11,9 Térawatts/heure (Twh).
L'avis d'experts sur les data centers publié par l'Ademe cite les prévisions de consommation réalisées par le gestionnaire du réseau électrique RTE. Selon RTE, la consommation électrique des data centers pourrait atteindre 28 TWh en 2035. En 2050, les data centers pourraient représenter 6% de la consommation d'électricité en France.
De son côté, la Commission européenne prévoit une hausse 28% de la demande en électricité des data centers entre 2018 et 2030.
Pour préparer le réseau à l’électrification à l’arrivée des data centers, RTE construit de nouvelles infrastructures de forte capacité capables d’accueillir plusieurs industriels : ce sont les "zones d'accueil mutualisées". Depuis la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) peut autoriser RTE à dimensionner les ouvrages de raccordement afin de permettre le raccordement concomitant ou ultérieur de plusieurs installations et à en répartir équitablement le coût entre les bénéficiaires par l’application d’une quote-part.
Les data centers sont localisés selon deux éléments structurants :
- la proximité d'un réseau internet de fibre optique. Par exemple, Marseille qui est un point d'arrivée de nombreux câbles sous-marins de télécommunications (6e hub Internet mondial), est une place de choix pour l'installation de centres de données. La société américaine Digital Realty, notamment, y exploite quatre centres et un cinquième est en construction ;
- la présence d'une puissance électrique suffisante. Les gros data centers ont besoin d'un raccordement direct sur le réseau de transport RTE.
En France, plus de 300 data centers sont en exploitation, majoritairement localisés en Île-de-France, dans la métropole de Marseille et dans les Hauts-de-France.
Le projet de loi de simplification de la vie économique, actuellement débattu au Parlement, prévoit, dans son article 15, d'octroyer aux projets de construction de gros data centers le label de projet d'intérêt national majeur : "Un centre de données qui revêt, eu égard à son objet et à son envergure, notamment en termes d’investissement et de puissance installée, une importance particulière pour la transition numérique, la transition écologique ou la souveraineté nationale, peut également être qualifié par décret de projet d’intérêt national majeur."
Ce statut introduit par la loi sur l'industrie verte de 2023 permet d'accélérer et de simplifier les procédures administratives nécessaires pour l'implantation de ces projets industriels sur le territoire :
- mise en compatibilité des documents d’urbanisme par l’État (en lieu et place de la commune) et délivrance directe du permis de construire par le préfet ;
- reconnaissance anticipée de la raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM). Cette reconnaissance facilite l'obtention d’une dérogation à l’obligation de protection de certaines espèces protégées ;
- raccordement accéléré au réseau d'électricité et simplification des consultations publiques nécessaires pour ce raccordement.
Des associations (comme la Quadrature du Net) qualifient ces dispositions de "dérégulation des data centers" puisque les autorités et populations locales ne pourraient pas s'opposer à l'installation de centres de données. Elles proposent, en revanche, un moratoire sur la création de nouveaux data centers.
Le projet de loi prévoit, en outre, la pérennisation de la réduction dont bénéficient les data centers sur l'accise payée sur l'électricité consommée. Le manque à gagner pour l'État serait compensé par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs.