Les prévisions de recettes des prélèvements obligatoires

Remis le :

Auteur(s) : Hippolyte d'Albis ; Émilie Maysonnave ; Paul-Armand Veillon

Auteur(s) moral(aux) : Inspection générale des finances

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À la demande des ministres chargés de l'économie et des comptes publics, l'inspection générale des finances a conduit une mission relative aux prévisions de recettes des prélèvements obligatoires, avec deux objectifs : analyser les prévisions de recettes et leur processus opérationnel pour l'année 2023 et en tirer des pistes d'amélioration pour l'avenir.

Cette mission s'inscrit dans un contexte de dégradation de 0,6 point de PIB du déficit public pour l'année 2023, estimé par l'Insee à 5,5 % du PIB en mars 2024 par rapport aux prévisions du projet de loi de finances pour 2024 et du projet de loi de fin de gestion (PLFG) pour 2023. Cette dégradation du déficit est essentiellement due à un écart de prévision pour les recettes de prélèvements obligatoires, à hauteur de 21 Md€, entre l'exécution et la dernière prévision du PLFG 2023. La mission analyse les prévisions de recettes des prélèvements obligatoires et leur processus opérationnel pour l'année 2023. L'écart de prévision de recettes de 2023, replacé dans une série longue, apparaît substantiel mais pas exceptionnel. L'analyse des prévisions des principaux impôts permet de conclure que l'écart de prévision provient essentiellement de facteurs extérieurs (environ 80 % de l'écart de prévision), c'est-à-dire en lien avec la situation macroéconomique ou encore le comportement des acteurs.

La mission tire de cette analyse plusieurs recommandations, relevant de :

  • l'amélioration des méthodes et outils de prévision, avec notamment une proposition de mener un chantier sur la quantification de l'incertitude ;
  • la communication interne et externe, en particulier sur l'examen ex-post des écarts de prévision ;
  • le processus opérationnel de prévision et de suivi des remontées comptables.

SYNTHESE
PROPOSITIONS
INTRODUCTION

1. PLUSIEURS EXERCICES DE PRÉVISION DE RECETTES DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES SONT CONDUITS CHAQUE ANNÉE, DONT LE RÉALISME EST APPRÉCIÉ PAR LE HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES

1.1. Les recettes de prélèvements obligatoires s'élèvent à 1 218 Md€ en 2023 
1.2. Le calendrier annuel de prévision des recettes est rythmé par deux exercices internes complets de prévision par la DG Trésor et deux échéances majeures : la publication du programme de stabilité et le projet de loi de finances 
1.3. L'élaboration des prévisions de recettes et la communication afférente relèvent de plusieurs directions 
1.3.1. Si l'élaboration et la révision des prévisions de recettes relèvent de la responsabilité de la DG Trésor en premier lieu, d'autres directions contribuent à l'exercice 
1.3.2. L'information des ministres sur les prévisions, sur la prise en compte des remontées comptables et sur l'analyse ex-post de l'écart de prévision est assurée par des notes régulières des services 
1.3.3. L'information du public sur les prévisions, sur l'exécution des recettes et sur l'analyse ex-post de l'écart de prévision est assurée par des vecteurs dédiés

1.4. Les recettes de prélèvements obligatoires sont prévues impôt par impôt, puis un contrôle macroéconomique à l'échelle de l'ensemble des prélèvements obligatoires (PO) est effectué sur la base de l'indicateur de l'élasticité des PO au PIB 
1.4.1. Les recettes de prélèvements obligatoires font l'objet d'une prévision impôt par impôt en premier lieu 
1.4.2. En deuxième lieu, un contrôle macroéconomique à l'échelle de l'ensemble des prélèvements obligatoires (PO) est effectué sur la base de l'indicateur de l'élasticité des PO au PIB 

1.5. Le Haut Conseil des finances publiques, organisme indépendant, formule un avis sur le réalisme des prévisions de recettes

2. L'ANALYSE DE L'EXERCICE 2023 RÉVÈLE QUE L'ÉCART DE PRÉVISION PROVIENT ESSENTIELLEMENT DE FACTEURS EXTÉRIEURS À LA PRÉVISION

2.1. L'écart de prévision pour 2023, année présentant une élasticité des prélèvements obligatoires au PIB historiquement faible, peut être mis en perspective par la difficulté à prévoir les épisodes extrêmes 
2.1.1. La dégradation du déficit public de 2023 entre la prévision associée au PLF 2024 et l'exécution 2023 est essentiellement due à une moins-value sur les prélèvements obligatoires 
2.1.2. L'écart de prévision de recettes de 2023, replacé dans une série longue, apparaît substantiel mais pas exceptionnel 
2.1.3. Une tendance au retour à la moyenne de l'élasticité prévue est mise en évidence, ce qui éclaire l'écart de prévision pour 2023 
2.1.4. La méthode de prévision de l'évolution spontanée des PO mise en œuvre par la DG Trésor améliore de 39 % l'écart de prévision par rapport à une méthode « naïve » 
2.1.5. Lors de son examen en amont, le HCFP a jugé les prévisions de recettes du PLF 2024 et PLFG 2023 plausibles et n'a pas déclenché en aval le mécanisme de correction 

2.2. L'analyse détaillée impôt par impôt fournit des enseignements sur la prévision de l'impôt sur les sociétés, sur le suivi des cotisations et prélèvements sociaux et sur le chiffrage des mesures nouvelles pour la contribution sur les rentes inframarginales 
2.2.1. Dans l'ensemble, le scénario macroéconomique prévu par le gouvernement pour 2023 est proche de l'exécution 
2.2.2. L'écart de prévision par rapport au PLFG 2023, s'élevant à 21 Md€, est principalement dû à des moins-values sur les cotisations et prélèvements sociaux, sur l'impôt sur les sociétés et sur la taxe sur la valeur ajoutée 
2.2.3. Les analyses détaillées des principaux écarts soulèvent des enjeux de prévision du cinquième acompte de l'impôt sur les sociétés et de suivi de la masse salariale 

2.3. Si l'écart de prévision s'explique essentiellement par des facteurs externes, il aurait pu être plus faible 
2.3.1. Environ 20 % de l'écart de prévision par rapport au PLFG 2023 relève de facteurs internes à la prévision 
2.3.2. Les écarts signalés par les administrations en novembre puis en décembre 2023 ne justifiaient pas le dépôt d'un amendement et la révision du scénario de finances publiques pour 2023 et 2024, l'ampleur de ces écarts était toutefois sous-estimée 

2.4. Le processus opérationnel entre l'administration et les cabinets ministériels pour retenir les prévisions de recettes pourrait être optimisé

3. LES MÉTHODES ET OUTILS, LA COMMUNICATION ET LE PROCESSUS OPÉRATIONNEL DU SYSTÈME DE PRÉVISION PEUVENT FAIRE L'OBJET D'AMÉLIORATIONS

3.1. La mission identifie deux priorités pour améliorer les méthodes et outils de prévision : la quantification de l'incertitude et l'amélioration de la prévision de l'élasticité des PO au PIB 
3.2. L'organisation et la mise à disposition des données de prévision des prélèvements obligatoires (PO) pourrait être améliorée par la mise en place d'une base de données sur l'ensemble des PO 
3.3. La communication sur les prévisions et sur leur analyse ex-post pourrait évoluer, par la présentation d'un tableau de bord aux ministres et l'adoption d'une méthode permanente d'analyse des écarts de prévision 
3.4. La réalisation de deux prévisions de recettes espacées d'un mois pour le PLF et le PLFG pose un problème majeur, qui pourrait être résolu en actant que la prévision en PLFG est celle du PLF

ANNEXES ET PIECE JOINTE

  • Type de document : Rapport d'inspection
  • Pagination : 82 pages
  • Édité par : Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique