Déclaration de Mme Marylise Lebranchu, ministre de la justice, sur la justice de proximité, notamment sur le rôle des maisons de justice et du droit pour faciliter l'accès au droit et à la justice, Paris le 7 janvier 2002.

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Circonstance : Inauguration de la Maison de justice et du droit de Paris Nord-Ouest à Paris le 7 janvier 2002.

Texte intégral

Monsieur le Président du Conseil Régional,
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs les Députés et Sénateurs,
Mesdames et Messieurs les Elus,
Monsieur le Premier Président,
Monsieur le Procureur Général,
Messieurs les Préfets,
Monsieur le Président,
Monsieur le Procureur,
Mesdames et Messieurs les Magistrats,
Monsieur le Bâtonnier,
Mesdames, Messieurs,
Je tiens à vous exprimer ma satisfaction de me retrouver parmi vous pour inaugurer la Maison de Justice et du Droit de Paris Nord-Ouest.
C'est la troisième à Paris, après celles de Paris Sud et de Paris Nord-Est.
Deux ans après leur création leur fréquentation a triplé, plus de 20.000 personnes y ont été reçues.
L'ouverture de cette nouvelle Maison de Justice et du Droit correspond à une véritable attente de nos concitoyens.
Aujourd'hui, le service public de la justice doit être accessible, accueillant, ouvert et attentif aux demandes concrètes de nos concitoyens, donc proche des justiciables.
La mission fondamentale de la justice, qui lui est confiée par la Nation, est de réguler les rapports sociaux en contribuant à la paix publique, à la sécurité et à un développement plus harmonieux des rapports humains.
La demande de droit est en constante augmentation : plus que jamais, dans les cités complexes et les univers variés où vivent, travaillent et circulent nos concitoyens, des normes doivent être édictées pour assurer aussi la sécurité juridique ; elles doivent être connues par tous. Pour se voir reconnaître un droit, encore faut-il qu'il soit connu.
L'accès au juge, quand il est nécessaire, doit être facilité et accéléré. Mais il ne peut être la seule réponse au besoin de régulation par le droit.
Il ne s'agit pas seulement de trancher les litiges et de punir quand cela est indispensable, mais aussi de prévenir les conflits et de faciliter leurs résolutions, par une gamme de moyens adaptés.
Il est nécessaire de traiter, par des voies rapides, sûres et gratuites, les petits litiges civils et les infractions pénales légères.
Le traitement de ces désordres de la vie sociale, qui trop souvent nuisent à la vie quotidienne de nos concitoyens, est aussi noble et socialement nécessaire que le traitement des conflits ou des infractions plus graves : c'est affaire de justice.
Aujourd'hui l'accès au juge, c'est aussi l'accès aux collaborateurs du juge que sont les conciliateurs de justice, les médiateurs.
L'accès à la justice, ce n'est plus seulement l'accès au procès, mais aussi l'accès à ces voies différentes, plus souples, que sont la conciliation civile, la médiation en matière pénale, les alternatives aux poursuites.
Les Maisons de Justice et du Droit symbolisent parfaitement l'émergence de ces nouveaux métiers et de ces nouvelles procédures, indispensables à une justice modernisée, en prise avec la réalité des villes d'aujourd'hui et les aspirations de leurs habitants.
Au fond, nous cherchons par ces moyens, à réconcilier nos concitoyens avec leur justice, avec le droit.
C'est bien dans cet objectif que s'inscrivent les trois Maisons de Justice et du Droit de Paris.
La justice de proximité n'est plus seulement une idée mais une démarche : la mise en uvre d'une politique judiciaire de la ville qui fait désormais partie des démarches de notre institution.
Je voudrais simplement évoquer quelques chiffres : 14 Maisons de Justice et du Droit fonctionnaient en juin 1997, dans une dizaine de départements.
On en compte aujourd'hui 78, dans quarante et un départements. Il faut y ajouter 63 antennes de justice.
L'ensemble des professionnels de la justice consultés lors des Entretiens de Vendôme a mis l'accent sur cette nécessité de rendre la justice plus accessible, et de pouvoir disposer de lieux de droit et de justice moins solennels que les Palais de Justice, comme les Maisons de Justice et du Droit.
J'ai donc décidé de programmer pour 2002-2003 la création de 50 nouvelles Maisons de Justice et du Droit.
L'affectation d'un greffier dans chaque structure sera complètement finalisée courant 2002.
Je constate que deux greffières vont travailler au sein de la Maison de Justice et du Droit de Paris Nord-Ouest. Elles seront chargées de la coordination, du secrétariat, et de l'accueil. Des agents de justice les assisteront dans leurs tâches quotidiennes. Il s'agit là d'une efficace complémentarité.
J'ai également décidé de créer, dès janvier 2002, 30 postes de magistrats chargés à mi-temps de la politique judiciaire de la ville.
En effet, il est important que la justice de proximité soit complètement reconnue comme étant un élément essentiel concourant à l'efficacité de l'institution judiciaire.
Elle n'est ni un " gadget ", ni une " justice au rabais ". Elle est une réponse de qualité, rendue pour tous, au plus près de chacun.
Les sondages effectués auprès des usagers des Maisons de Justice et du Droit confirment d'ailleurs cette approche. 80 % d'entre eux s'estiment très satisfaits des services rendus par ces nouveaux dispositifs et soulignent la qualité de l'accueil et de l'écoute qui y sont donnés.
La qualité de la justice de proximité est également très liée à la qualité du partenariat développé localement.
Je constate avec satisfaction que celui-ci est très bien organisé autour de cette Maison de Justice et du Droit.
J'apprécie tout d'abord, et cela mérité d'être souligné, que la Justice et la Police se soient concertées en faisant correspondre les secteurs de compétence de la Maison de Justice et du Droit et ceux du Parquet, avec ceux de la police de proximité et de la police judiciaire.
C'est bien là l'expression d'un souci conjoint de cohérence de l'action publique, à l'échelon d'un territoire donné.
Seule cette cohérence permet de lutter efficacement contre la délinquance. Grâce aux Maisons de Justice et du Droit, un nombre important d'infractions auraient été auparavant classées sans suite. Elles sont aujourd'hui traitées et reçoivent des réponses.
Avec l'appui des délégués du Procureur (5 à Paris) et le soutien d'associations habilitées à assurer des médiations pénales et des mesures de réparation pour les mineurs, le Parquet de Paris a pu ainsi mettre en uvre une réelle politique d'alternative aux poursuites, des plus pertinentes : plus de 90 % des auteurs des petits délits répondent aux convocations des délégués du Procureur, ce qui a une réelle influence sur les taux de récidive.
Mais le partenariat s'est aussi très largement organisé ici autour de l'accès au droit.
Des avocats et des huissiers de justice, mais aussi des conciliateurs, un délégué du médiateur de la République, et des consultants d'accès au droit assurent des permanences juridiques gratuites et confidentielles.
Des questions de logement, de droit de la famille, de droit du travail mais aussi de droit des étrangers ou de droit des majeurs vulnérables peuvent être abordées. Des informations sont données, et des orientations peuvent être proposées.
J'apprécie également l'orientation donnée par cette Maison de Justice et du Droit vers l'accueil des victimes d'infractions pénales. Des juristes et une psychologue de l'association Paris aide aux victimes sont présents et rassurent, écoutent, soutiennent toutes celles et tous ceux qui ont été victimes d'un vol, d'une agression, ou d'une atteinte à la personne et à la dignité qui provoque toujours un grand traumatisme.
Je suis très attachée à l'aide apportée aux victimes et je souligne avec satisfaction que dans toutes les Maisons de Justice et du Droit une permanence d'au moins une association d'aide aux victimes est aujourd'hui assurée. C'est là une avancée importante de la politique judiciaire et pénale : celle de ne plus seulement considérer le délinquant, mais de se préoccuper aussi de la victime, tant sur le plan juridique que sur celui du soutien psychologique et moral.
La diversité de tous les partenaires représentés ici montre combien les Maisons de Justice et du Droit ne sont pas seulement des structures judiciaires mais bien de réelles " maisons " ouvertes à tous pour un Droit plus accessible, et grâce à tous : institutions, élus, associations.
C'est ensemble avec vous tous que nous pouvons démontrer que notre justice peut sans trahir les grands principes, être aussi une justice de proximité et de solidarité.
(source http://www.justice.gouv.fr, le 18 janvier 2002)