Déclaration de M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'Industrie, sur la normalisation, la certification et la qualité des produits, les enjeux internationaux et sur les mesures de soutien du gouvernement, notamment le lancement de l'appel à propositions "AQCEN", Paris le 14 janvier 1998.

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Circonstance : Lancement du nouvel appel à propositions "AQCEN" (Accès à la Qualité, à la Certification, aux Essais et à la Normalisation), Paris le 14 janvier 1998

Texte intégral

Introduction : normalisation, certification et qualité sont des enjeux internationaux
Le commerce est désormais international. La majeure partie des entreprises affrontent la concurrence sur un marché mondialisé où l'harmonisation des références et des pratiques est loin d'être réalisée. En matière de conformité technique, cette diversité peut donner naissance à des cas extrêmes. On m'a cité l'exemple caricatural d'un embout de câble électrique, qui se présentait comme un petit cube d'un centimètre de côté et qui portait les symboles d'une quinzaine de marques nationales de certification ! Le coût du marquage de conformité sur ce produit représentait 50 % du prix de revient, sans compter le coût de l'évaluation correspondante.
Les exigences en matière de conformité technique peuvent être d'origine publique ou privée. Pour des motifs parfaitement légitimes de santé, de sécurité, de protection de l'environnement et d'ordre public, chaque État édicte des dispositions législatives, réglementaires ou administratives qui imposent aux produits commercialisés le respect de spécifications techniques et le passage obligé par des procédures d'essais ou d'homologation.
Par ailleurs, en dehors de tout contexte réglementaire, les acteurs économiques (consommateur industriel ou particulier, prescripteur, distributeur...), soucieux d'obtenir des garanties objectives sur la qualité des produits achetés, ont tendance à donner un avantage commercial aux produits qui portent un label national, tout simplement parce qu'ils le connaissent.
C'est pourquoi, ces 15 dernières années, les instances européennes et internationales se sont attachées, chacune à leur niveau, à élaborer un système qui permette d'assurer à la fois la libre circulation des produits et la sécurité des utilisateurs, dans le cadre d'une concurrence loyale. Deux méthodes ont été utilisées :
*harmonisation des normes et des réglementations techniques, avec les fameuses directives européennes "Nouvelle Approche" qui prévoient le marquage "CE",
*et reconnaissance mutuelle des règles, normes ou certificats, avec mise en place d'un système d'information préalable des projets de textes nationaux (la directive 83/189 et son équivalent niveau OMC).
Dès lors, la place prise par les normes, la certification et l'accréditation dans les échanges internationaux n'a fait que croître. Leur maîtrise est devenue indispensable pour accéder aux marchés. Les entreprises doivent faire plus encore.
Dans une économie où les clients sont toujours plus exigeants, il ne suffit plus de fabriquer des produits conformes pour vendre. Il faut aussi satisfaire les besoins des clients en leur offrant, au meilleur coût et avec un meilleur service, un produit meilleur par son esthétique, par sa fiabilité, par sa maintenance ... bref par sa qualité.
La norme est la reconnaissance d'une performance, la reconnaissance de la qualité, or la qualité est devenue un enjeu stratégique majeur pour les entreprises. Conquérir la compétitivité par la qualité, c'est tendre à s'affranchir des contraintes de la compétitivité par les coûts.
Je souhaite évoquer en premier lieu la situation actuelle des normes et de la qualité dans notre pays (1) , avant de vous présenter les axes d'action que je souhaite privilégier (2) .
1.- Quelle est la situation en France des normes et de la qualité ?
D'abord, quid de la Normalisation, de la certification, et des essais ?
Grâce à une forte mobilisation de l'industrie ces dernières années, les systèmes français de normalisation, de certification et d'essais n'ont pas à souffrir de la comparaison avec leurs homologues étrangers. Le Conseil Économique et Social soulignait récemment que "la participation française à la normalisation européenne et internationale correspond à notre place relative dans le concert des nations". Je tiens à saluer au passage l'élection d'un Français, Alain PERROY, directeur chez Rhône-Poulenc, comme nouveau Président du Comité Européen de Normalisation.
Cependant, selon d'autres enquêtes, il apparaît que les PMI-PME se sentent désorientées devant les nouvelles règles instituées par l'Union européenne pour assurer la libre circulation des produits. Insuffisamment diffusées, ces règles sont mal comprises.
Plus encore, la complexité du processus de normalisation (multiples acteurs et organismes), la charge financière qu'il représente pour les entreprises et l'interdépendance de plus en plus forte entre normes et réglementations sont à l'origine d'une multiplication des plaintes sur l'inflation des normes. Je ne citerai que la norme sur les bacs à sable des aires de jeu qui a fait couler beaucoup d'encre...
Je viens de recevoir le rapport du Commissariat Général au Plan sur l'évaluation du système de normalisation, où sont relevées, notamment, l'insuffisante représentation des acteurs sociaux et utilisateurs, et la difficile hiérarchisation des priorités.
Enfin, si le cadre réglementaire de la certification de produits et services a été assoupli afin de permettre aux organismes français, en premier lieu l'AFNOR et sa marque NF, de répondre plus rapidement aux demandes du marché, notre système d'essais souffre d'une dimension encore trop strictement hexagonale.
Par ailleurs, qu'en est-il de la démarche qualité dans notre pays ?
En matière de qualité, la situation est tout aussi contrastée. Sous l'impulsion des grands donneurs d'ordre, le développement de la certification des systèmes d'assurance qualité constitue aujourd'hui un moteur important de mobilisation des entreprises vers la qualité : plus de 9000 certificats ISO 9000 ont été délivrés en France par l'Association Française pour l'Assurance de la Qualité (AFAQ) et 6 autres organismes de certification ont été reconnus compétents par le Comité Français d'Accréditation (COFRAC), ce qui nous situe dans les premiers rangs au niveau mondial.
Cependant, des progrès restent à faire car en terme d'image qualité à l'étranger, la France occupe la cinquième place, derrière l'Allemagne, le Japon, les États-Unis et la Grande-Bretagne. Les critiques les plus fréquentes ne portent pas sur les produits eux-mêmes, jugés dans l'ensemble de bonne qualité, mais sur les services associés : marketing, service après vente, documentation technique...
2.- Quels sont les axes d'action du Secrétariat d'État à l'Industrie ?
C'est à partir de ces constatations qu'est organisée l'action de mon Département ministériel dont l'objectif est d'offrir aux entreprises un environnement favorable au développement de leurs activités et à la préservation de l'emploi.
Pour agir, le Secrétariat d'État à l'Industrie s'appuie principalement sur quelques grands partenaires : l'Afnor (Association Française pour la Normalisation) le LNE (Laboratoire National d'Essais), avec lesquels des contrats d'objectifs viennent d'être signés pour la période 1997-2000, le Mouvement Français pour la Qualité (MFQ), avec qui nous organisons chaque année le Prix Français de la Qualité et le Mois de la Qualité Française, et enfin le COFRAC dont j'ai déjà parlé.
Néanmoins, le dispositif ne serait pas complet si l'État ne se donnait pas les moyens de favoriser et de soutenir les initiatives locales ou sectorielles qui visent à promouvoir les normes, la certification et la qualité auprès des différents acteurs socio-économiques.
C'est dans cet esprit qu'a été créé, en 1988, l'appel à propositions "Partenariat 92 " qui a permis de soutenir en 9 ans près de 1100 actions collectives en faveur des normes, de la certification et de la qualité, portées par 490 entités distinctes relevant de tous les secteurs de l'économie. L'investissement ainsi consenti par les acteurs français s'est élevé à 1,8 milliard de francs avec un soutien du Ministère chargé de l'industrie à hauteur de 35 %, soit quelque 600 MF.
Au terme de neuf années d'existence de l'appel à propositions, devenu "Partenaires Pour l'Europe" en 1992, et pour tenir compte de la nécessaire adaptation de l'industrie française au nouveau contexte de mondialisation de l'économie, il est apparu nécessaire en 1997 de procéder à une évaluation, menée par le cabinet PLEIN SENS auprès de responsables de 850 PMI et de 140 organismes.
Cette évaluation montre que les besoins en matière de qualité, de certification et de normalisation restent conséquents et touchent surtout la partie fragile du tissu industriel : les petites entreprises industrielles.
Une autre enquête menée par mes services auprès de 10 000 entreprises conforte ce résultat : la "qualité et la certification" arrivent en 2ème place des besoins des entreprises en actions collectives sur une liste de 16 domaines, et la "normalisation" en 3ème place.
Par ailleurs, l'étude PLEIN SENS a montré l'adéquation de nos actions visant à faciliter l'accès de nos produits au marché européen, par un recours approprié à la normalisation, la certification, la qualité.
Au terme de cette évaluation, j'ai décidé de maintenir l'appel à propositions. En 1998, l'appel à propositions "Partenaires pour l'Europe" devient "AQCEN". Ce sont les initiales d'"Accès à la Qualité, Certification, Essais et Normalisation". J'ai souhaité que cet appel à propositions soit doté pour 1998 de 30 MF.
Il est indispensable de replacer ses objectifs dans le nouveau contexte économique international et les étoiles de l'Europe du logo sont symboliquement remplacées par une mappemonde.
La construction du marché unique européen, en matière de libre circulation des produits, sert aujourd'hui de modèle à l'Organisation Mondiale du Commerce. L'OMC oeuvre pour la création d'un système commercial mondial qui s'appuierait sur les normes internationales, la reconnaissance mutuelle des certificats et l'accréditation des organismes techniques impliqués. L'enjeu commercial est grand et les Américains cherchent à faire reconnaître leurs spécifications comme normes officielles internationales au même titre que les normes élaborées consensuellement au sein des organismes internationaux de normalisation ISO et CEI.
Afin d'encourager les acteurs français à s'impliquer dans un nouvel ordre mondial de l'évaluation de la conformité technique, sous l'égide de l'OMC et de la Commission européenne :
*tous les critères d'éligibilité existants d' AQCEN ont été revus pour afficher en 1998 cette perspective internationale ;
*des critères nouveaux ont été inscrits pour accompagner l'implication des acteurs français dans les instances internationales de normalisation, d'évaluation de la conformité ou dans la connaissance des règles d'accès au marché des pays tiers.
Outre l'ouverture à l'international, l'appel à propositions "AQCEN" permettra en 1998 de soutenir de nouveaux types d'actions pour un meilleur accompagnement des entreprises sur le chemin des normes et de la qualité. Je citerai :
*la mise en place du système de veille normative,
*l'amélioration de la qualité des normes ainsi que l'efficacité et la maîtrise du processus d'élaboration,
*la création de dispositifs opérationnels favorisant l'emploi à temps partagé de responsables qualité et/ou environnementaux,
*la diffusion dans les PME du diagnostic métrologie.
Sachez aussi que les formulaires de demande pour AQCEN vous sont disponibles à partir d'aujourd'hui sur INTERNET.
En conclusion, la nouvelle formule qui va vous être présentée dans un instant est le résultat d'une analyse approfondie des besoins et attentes de nos clients, c'est-à-dire vous, entreprises et organismes ici représentés. Cette réforme de l'appel à propositions constitue l'un des axes de ma politique pour 1998 en matière de normes et de qualité. D'autres temps forts suivront, parmi lesquels :
*la préparation d'un guide sur les 100 normes-clés pour l'industrie française, à l'image du guide " technos-clés",
*la refonte de la circulaire du Premier Ministre de 1984 qui encadre les références aux normes dans la réglementation,
*la publication d'un guide sur la qualité, à l'usage des responsables de PME,
*et la redéfinition de l'action régionale en matière de qualité, suite au rapport du Conseil général des mines qui vient de m'être remis.
Je suis persuadé qu'avec votre soutien nous parviendrons à relever les nouveaux défis apportés par la mondialisation des échanges, et c'est sur cette note optimiste que je vous présente mes meilleurs voeux pour cette nouvelle année.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 23 août 2002)