Message de Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer, sur le besoin de logements sociaux en outre-mer et sur l'accession à la propriété, le 18 juin 2003.

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Circonstance : Congrès de l'Union nationale des HLM à Lille (Nord) le 18 juin 2003

Texte intégral

Mesdames et messieurs les présidents et élus,
Mesdames et messieurs les élus
Mesdames et messieurs,
C'est avec un grand plaisir que je réponds à l'invitation de votre président, tout en regrettant de ne pouvoir être avec vous aujourd'hui à Lille. Chaque année, vous consacrez un temps de votre congrès au logement outre-mer et je vous en remercie.
Le ministère de l'Outre-Mer a la charge de cette politique dans les DOM, à Saint-Pierre et Miquelon et à Mayotte depuis 1996, date à laquelle lui ont été transférés l'ensemble des crédits logement avec la création de la ligne budgétaire unique sur le budget du ministère de l'Outre-Mer. Il s'agit d'une évolution majeure de la politique du logement outre-mer.
Je rappelle qu'en Polynésie française, à Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie, la compétence est exercée par les collectivités concernés. L'appui de l'Etat se concrétise alors au niveau des conventions de développement et les mécanismes de financement sont mis en uvre au travers d'un partenariat étroit entre ces collectivités et les établissements de crédits nationaux.
Je voudrais donc saisir l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour vous présenter rapidement les caractéristiques du logement outre-mer et vous préciser ma politique en la matière, notamment dans les DOM.
Ce qui caractéristise l'outre-mer, c'est un très fort besoin de logement sociaux. C'est la conséquence d'une situation économique difficile: le revenu moyen est égal à 50 % du revenu moyen européen ; le taux de chômage atteint en moyenne 25 % de la population active, 3 fois plus qu'en métropole.
Par ailleurs, la croissance démographique reste forte : + 3% par an à La Réunion, + 4% en Guyane, alors qu'elle est inférieure à 1 % en métropole.
Tous ces facteurs contribuent à accentuer la demande en logements sociaux, et, en l'absence d'offre suffisante, nombre de familles ont recours à des solutions de logements précaires et peu conformes avec les caractéristiques d'un logement décent.
En dépit de la dynamique de la construction dans les DOM, reflétée par l'importance du nombre de logements récents construits, les besoins ne sont pas entièrement satisfaits malgré des moyens financiers adaptés : les besoins sont estimés à 11 000 logements neufs par an pour les 4 DOM ; or, seulement 8 000 logements sociaux neufs sont construits chaque année. Par ailleurs, l'effort de mise aux normes de confort des logements existants concerne environ 5 000 logements par an.
De ce fait, la ligne budgétaire unique fait l'objet de reports importants.
Compte tenu des difficultés budgétaires de cette année, j'ai demandé aux préfets d'améliorer le suivi et la gestion de la LBU. Il est indispensable que le rythme de consommation s'améliore.
Aussi, je souhaite axer la politique du logement outre-mer sur 3 grandes priorités : le développement de l'accession sociale, l'amélioration des outils nécessaires à l'aménagement foncier et la résorption de l'habitat insalubre :
- - Le développement de l'accession sociale à la propriété est une réponse aux attentes de nos concitoyens qui souhaitent avoir accès à un vrai parcours résidentiel, lequel leur permettra d'accéder à la propriété après une période en logement locatif. C'est également une réponse à la volonté des élus locaux de ne pas saturer certains quartiers par trop de logements sociaux.
La défiscalisation dans le domaine du logement permet de favoriser l'investissement privé et la loi programme pour l'outre-mer qui vient d'être examinée par le Parlement, apportera une nouvelle impulsion. Les taux de défiscalisation pourront atteindre 50 % pour le locatif intermédiaire et seront majorés de 10 points dans les Zones urbaines sensibles.
Nous avons également engagé une réflexion sur des produits spécifiques tels que le LAD, en accession intermédiaire, ou le LES en accession très sociale. Ce dernier bénéficiera désormais du taux de TVA réduit. Il doit également bénéficier d'un plus grand intérêt de la part de vos organismes.
Par ailleurs, je suis attachée à examiner les propositions innovantes de votre Union en matière de produit d'accession. Je sais que la loi Habitat que prépare Gilles de Robien abordera ce sujet.
- - Le deuxième axe est celui de la mise à disposition du foncier. Le développement important de l'urbanisation, et le caractère limité des espaces disponibles suscitent une forte pression foncière. Il n'est pas rare que les prix des terrains dépassent 70 par m².
J'attire votre attention sur le fait qu'il faut produire plus de logement mais aussi les construire "au bon endroit". Il est inquiétant de continuer à produire au gré des opportunités foncières, souvent en périphérie des villes. Ce processus entraîne une spéculation toujours plus forte et des surcoûts en terme d'aménagement qui rendent fragile l'équilibre financier des opérations.
Je souhaite donc travailler dans plusieurs directions pour améliorer la disponibilité du foncier :
Il convient tout d'abord d'améliorer les outils de financement. Le FRAFU est aujourd'hui essentiellement utilisé en équipement primaire des terrains. Les dispositions contenues dans la loi de programme pour l'outre-mer et notamment celles introduites par le Sénat à l'initiative de Lucette Michaux-Chevry visent à simplifier ce dispositif et à le rendre plus efficace, afin d'aider à la mise en uvre de nouvelles opérations d'aménagement.
Ensuite, je veux susciter des investissements dans les centre-ville, souvent délaissés. La défiscalisation de la réhabilitation des logements anciens, introduite dans la loi de programme pour l'outre-mer, constitue une réponse novatrice. Il importe également d'inscrire la construction de logements sociaux dans les centre-ville parmi vos priorités d'actions. Je sais que ce sont des opérations parfois difficiles, mais elles répondent à un réel besoin.
Enfin, il s'agit d'utiliser les espaces rendus disponibles par les opérations de RHI.
- - Ce qui m'amène à ma 3ème priorité qui est d'éradiquer l'habitat insalubre dans les dix prochaines années. J'ai eu l'occasion de le rappeler dans la stratégie nationale de développement durable. Par son ampleur outre-mer, ce problème doit être traité avec détermination. C'est une question de dignité. Je vous rappelle que l'Etat finance 80 % du déficit des opérations de RHI, ce qui constitue un levier majeur. Nous allons moderniser le dispositif actuel notamment en déconcentrant les décisions, afin que ces opérations soient menées au plus près du terrain.
A ce titre, je salue les initiatives locales comme la création d'un guichet unique en Guadeloupe ou l'organisation de la semaine du logement en mars dernier à La Réunion, qui a permis la rencontre de la population, des élus et des professionnels. Il est essentiel que la politique du logement soit relayée sur le terrain par l'ensemble des décideurs publics.
Je voudrais enfin vous dire combien je considère que le logement outre-mer est un élément d'égalité et de dignité pour nos concitoyens ; c'est en outre, vous le savez, un secteur économique de premier plan, source d'activité et d'emplois essentiel à l'équilibre de nos départements d'outre-mer.
Je tiens à vous assurer que mon ministère est à votre écoute, ainsi qu'à celle des élus de l'outre-mer et de l'ensemble des partenaires du logement et de l'aménagement pour que nous puissions, avec le ministère chargé de l'urbanisme et de celui en charge de la ville, réussir le développement durable du logement en outre-mer.
L'enjeu est important. Nous n'avons pas le droit d'échouer.
Je vous remercie de votre attention.
Brigitte GIRARDIN
(Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 19 juin 2003)