Déclaration de M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, sur les dispositions de la loi d'orientation pour les DOM en matière de logement social et sur l'aide au logement social dans les DOM, Paris le 15 juin 2000.

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Circonstance : Rencontre ave les organismes HLM d'outre-mer sur le thême "Les évolutions de la politique sociale du logement outre-mer" à Paris le 15 juin 2000

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Le logement social constitue une des priorités du développement de l'outre-mer, ce qui n'est pas surprenant quand on sait que près de 80 % de la population de ces départements disposent de revenus les rendant éligibles aux logements sociaux.
A ce titre, je me félicite du rôle important que jouent les organismes d'HLM d'outre-mer dans le domaine du logement social. Il convient notamment de souligner qu'ils gèrent plus de 40 % du parc locatif social existant dans les départements d'outre-mer.
Cette réunion, qui aurait dû avoir pour cadre le congrès HLM, se tient à un moment particulier de l'évolution des départements d'outre-mer. En effet, vous n'êtes pas sans savoir que la loi d'orientation pour l'outre-mer est actuellement en discussion au Sénat. Elle devrait être promulguée d'ici la fin de l'année.
Cette loi marque une nouvelle étape pour les départements d'outre-mer, sans précédent depuis la loi de départementalisation de 1946.
Elle est le fruit d'une réflexion qui a été menée pendant plusieurs mois avec les élus et les responsables socio-économiques, et à laquelle ont participé les représentants des sociétés HLM d'outre-mer.
La loi d'orientation traduit un effort financier de l'Etat pour les DOM à hauteur de 4 milliards de francs par an qui viennent s'ajouter aux moyens dégagés par les contrats de plan Etat-région et apportés par les fonds structurels de l'Union Européenne. Cet ensemble représente une masse financière de 37 milliards de francs sur sept ans (2000-2006), ce qui représente un quasi-doublement par rapport à la période précédente (1994-1999).
Les grandes lignes de cette loi, qui modifiera sensiblement le contexte économique dans lequel s'exerce votre activité, sont les suivantes :
-l'abaissement du coût du travail, grâce à une exonération des cotisations patronales, qui devraient concerner plus de 170 000 salariés et travailleurs indépendants. Cette mesure touche en particulier le secteur du BTP ;
-l'emploi des jeunes, grâce au projet initiative jeune et au congé solidarité ;
-la réinsertion des exclus sur le marché du travail ;
-l'alignement en trois ans du RMI, qui se fera avec maintien des crédits en faveur du logement et de l'insertion, jusqu'ici assurés par la créance de proratisation ;
-un transfert de compétences en faveur des collectivités départementale et régionale se fera en matière de coopération régionale ;
-d'autres compétences pourront être transférées, en matière de routes nationales, de gestion de l'eau, d'exploitation des ressources de la mer et d'énergies renouvelables ;
-enfin, comme vous le savez, la loi d'orientation ouvre la porte à de possibles évolutions statutaires dans les départements des Antilles-Guyane, sur proposition du Congrès et après consultation des populations. La création de deux départements à la Réunion est également prévue.
Pour ce qui a trait plus spécifiquement à la politique du logement dans les DOM, la loi d'orientation prévoit une unification des barèmes de l'allocation logement dans le secteur locatif à hauteur de celui applicable pour les logements construits à compter du 1er juillet 1995. Cette unification des barèmes sera totale d'ici au 1er juillet 2001. Une première étape sera d'ailleurs atteinte dès le 1er juillet 2000, date à laquelle le nombre de barèmes passera de 3 à 2.
Cette unification permettra d'effacer les inégalités qui existent entre les allocataires dont les situations familiales, de ressources et de loyers sont identiques. Son bénéfice sera étendu aux agents de la fonction publique, sous conditions de ressources, bien entendu. Elle favorisera le financement des réhabilitations des logements locatifs sociaux anciens.
Par ailleurs , dans les DOM, la mise en oeuvre des programmes de logements sociaux souffre de nombreux facteurs qui entravent leur bon déroulement : retards en matière de viabilisation, (tant dans le domaine de l'assainissement, de l'épuration que celui de l'adduction d'eau), rareté des terrains, hausse des coûts du foncier. La loi d'orientation va créer le Fonds régional d'aménagement foncier urbain (FRAFU), outil de financement de l'aménagement .
Le FRAFU coordonnera les interventions financières de l'Etat, des collectivités territoriales et de l'Union Européenne en vue d'assurer la constitution de réserves foncières et la réalisation des équipements nécessaires à l'aménagement d'espaces déjà urbanisés. Conformément au souhait des parlementaires, les bailleurs sociaux seront consultés sur la gestion et l'évaluation de ces fonds.
La loi d'orientation prévoit d'autre part que les conseils général et régional soient consultés pour avis sur la programmation des aides de l'Etat. Les conseils départementaux de l'habitat seront désormais présidés par les présidents des conseils généraux. Ainsi sera prise en compte l'aspiration légitime des collectivités à plus de responsabilités dans l'élaboration de la politique du logement social.
Je souhaiterais au cours de cette intervention, évoquer deux points concernant des projets à l'étude ou en cours au sein du secrétariat d'Etat à l'outre-mer.
En premier lieu, le logement social étant par nature destiné à répondre aux besoins des ménages, il me paraît particulièrement important de réfléchir de manière approfondie à l'adaptation de la gamme des dispositifs.
C'est pourquoi, sur ma proposition, le Premier Ministre a décidé, après avis du Conseil National d'Evaluation, d'inscrire le thème des aides au logement social dans les DOM dans le programme annuel d'évaluation interministérielle des politiques publiques.
Cette évaluation devra donc permettre de mieux adapter la gamme des dispositifs d'aide au logement social à la réalité des situations des départements d'outre-mer. Je pense notamment aux modes d'habiter spécifiques, à l'importance des situations de précarité, aux coûts majorés de construction liés à l'ultra périphéricité et l'insularité et l'importance de l'habitat insalubre.
Les dérogations que j'ai obtenues concernant l'allocation logement en secteur accession pour les LES et les LTS est un exemple de cette nécessité d'adaptation des règles métropolitaines au contexte spécifique des DOM.
L'élaboration du nouveau produit que constitue le LAD (logement en accession différée) reste une de mes préoccupations et je compte bien le voir aboutir à une réglementation.
Il s'agit là d'offrir à des ménages disposant de revenus modestes l'opportunité d'accéder à la propriété dans de bonnes conditions, ce grâce à une période locative préalable de 12 à 15 ans environ qui permet à la fois aux ménages et aux bailleurs sociaux de juger de la viabilité du projet d'accession avant que la vente ne soit définitive.
Il a d'ailleurs été fait appel aux compétences du CREPAH pour effectuer une évaluation des expériences menées en Guadeloupe.
Et enfin, j'aimerais insister sur la nécessité de préserver le rythme de construction dont vous connaissez les retentissements positifs sur l'emploi dans les départements d'outre-mer. L'Etat y consacre des sommes très importantes, puisque, en 2000, plus de 1,7 milliards de francs seront consacrés à la politique du logement social dans les DOM, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Le gouvernement s'est également attaché à mettre en uvre des mesures positives telles que l'intégration de la baisse du taux du livret A dans les prêts aidés au logement social, la baisse de la TVA sur les travaux d'entretien et de grosses réparations, l'extension des dispositifs de renouvellement urbain.
Je constate que près de 10 000 logements neufs sociaux et intermédiaires ont pu être aidés en 1999. Ce chiffre se situe en hausse de 11,5 % par rapport à l'année précédente, mais reste en deçà des besoins des populations. Je compte sur votre capacité à vous mobiliser pour que les efforts financiers du gouvernement trouvent leur application concrète dans la réalisation effective de logements.
Je ne prétends pas, bien sûr, avoir couvert l'ensemble de vos préoccupations quotidienne. Je sais qu'elles sont nombreuses, et je ne doute pas que la suite de cette réunion me permettra d'y revenir. Sachez en tous cas que je suis très attaché à la concertation entre les services du secrétariat à l'outre-mer et votre Union. Je sais qu'elle a jusqu'à présent été très fructueuse, et je ne doute pas qu'elle le restera.
(source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 19 juin 2000)