Texte intégral
Monsieur le Président de l'Association des Maires de France, cher Daniel HOEFFEL,
Monsieur le Vice-président de l'Association des Maires de France, cher Jacques PÉLISSARD,
Monsieur le Maire, cher Philippe LAURENT,
Mes chers collègues,
Mesdames et Messieurs les Maires de France métropolitaine et d'Outre-mer,
Chers amis,
Permettez-moi de vous dire combien je suis heureux de vous retrouver tous réunis, à Paris, pour la traditionnelle " fête des maires " qui constitue un moment fort d'échanges, de débats, de dialogue, mais aussi de convivialité et d'amitié.
Je me présente devant vous cette année, avec une palette de sentiments où se mêlent le bonheur, l'émotion et l'espérance.
- Bonheur d'abord pour le Président du Sénat, pour le Président réélu d'un Sénat rajeuni, d'un Sénat féminisé, d'un Sénat diversifié, pour le Président d'un Sénat qui est l'incarnation des communes et des territoires, de se retrouver, ici, en famille, parmi les siens.
Comme vous, je partage ces valeurs d'abnégation, de courage et d'opiniâtreté qui caractérisent les maires de France.
Comme vous, je sais combien l'exercice des fonctions de maire peut se révéler parfois difficile, ou ingrat, et souvent mal compris.
Le maire est à mes yeux bien plus qu'un rouage essentiel au bon fonctionnement de nos institutions républicaines.
Il forme l'indispensable soubassement, l'irremplaçable socle, l'indéfectible lien qui unit la République à ses concitoyens.
Alors, je voudrais vous adresser à toutes et à tous mes amicales salutations et vous dire combien la République s'honore de votre dévouement sans faille, " vaille que vaille ", " coûte que coûte ", pour faire vivre vos communes et faire battre le cur de la démocratie locale.
- Émotion ensuite car, comme vous le savez, votre Président, Daniel HOEFFEL, a décidé de ne pas se porter candidat à sa propre succession.
Cher Daniel, ce choix vous appartient.
A chaque équipe son capitaine. Vous êtes celui qui, depuis deux années, présidait avec brio aux destinées de l'Association des Maires de France.
A l'heure où vous passez le relais, où vous transmettez le témoin, je veux, tout simplement et très sincèrement, vous dire : merci, merci du fond du cur.
Merci, car vous avez contribué à conforter l'AMF dans son rôle de force de proposition et d'instance de représentation et de défense de l'institution communale.
Je ne doute pas que votre successeur saura porter, toujours plus haut, les couleurs des maires de France et de la décentralisation, cette réforme bénéfique qui devrait libérer les énergies locales et améliorer l'efficience de l'action publique à un moment où le " tout État " a atteint ses limites.
- Espérance enfin, car malgré des vents contraires, nous avons tenu le cap.
La France décentralisée est désormais sur les rails.
Nos efforts n'ont pas été vains !
Je plaide, en effet, depuis longtemps, pour une décentralisation ambitieuse, une décentralisation généreuse, une décentralisation comme facteur de cohésion, de solidarité et d'efficacité.
En ma qualité de Président du Sénat, assemblée parlementaire à part entière, et en plus, -c'est un bonus-, représentant constitutionnel des collectivités territoriales de la République, j'ai ardemment milité pour la promotion de la décentralisation, de cette décentralisation initiée par Pierre MAUROY et Gaston DEFFERRE, qui fait désormais partie intégrante et vivante de notre patrimoine républicain.
Aujourd'hui, j'ai le sentiment du devoir accompli.
Néanmoins, je ne pêcherai pas par un optimisme béat. " Chat échaudé craint l'eau froide "...
La réforme constitutionnelle de mars 2003, la loi organique relative à " l'autonomie financière des collectivités locales " puis la loi du 13 août 2004 relative " aux libertés et responsabilités locales " n'ont pas dissipé toutes les craintes, tous les malentendus, toutes les appréhensions. Loin s'en faut !
De nombreuses interrogations, souvent légitimes, subsistent.
Parmi celles-ci, il est une question qui inquiète tous les maires de France : quels moyens pour l'acte deux de la décentralisation ?
La réponse à cette question est essentielle car elle conditionne, à l'évidence, le succès même de la décentralisation.
Deux exigences doivent, à mon sens, être satisfaites pour que la décentralisation produise pleinement tous ses effets bénéfiques.
- Première exigence : l'État doit compenser intégralement les nouvelles compétences transférées ou étendues.
Ce préalable est indispensable car la réussite de la décentralisation repose sur l'établissement de relations financières saines, sûres et sereines entre l'Etat et les collectivités locales.
C'est pourquoi, je me suis battu pour que soient gravés dans le marbre de notre Constitution des principes forts, car protecteurs de l'autonomie locale et garants de relations apaisées entre l'État et les collectivités locales.
C'est ainsi qu'ont désormais droit de cité dans notre Constitution, le principe de l'autonomie financière des collectivités locales, celui de la compensation financière des transferts de compétences ou encore l'objectif de la péréquation.
Ces principes constituent autant de garanties, de verrous et de garde-fous qui doivent nous permettre d'envisager l'avenir avec davantage de sérénité.
Afin de veiller au respect de ces garanties, j'ai, en outre, souhaité créer, au Sénat, un "Observatoire de la décentralisation", au sein duquel seront représentés tous les groupes politiques du Sénat.
L'objectif de cette instance, qui travaillera en réseau, notamment avec les grandes associations d'élus locaux, est simple : procéder à une évaluation précise, transparente et contradictoire des transferts de charges, évaluer les politiques publiques locales et formuler des propositions. Il s'agit, en effet, d'éviter les dérives financières qui avaient pu pénaliser les collectivités locales lors du premier acte de la décentralisation.
L'observatoire a vocation à devenir le "shérif" de la décentralisation.
- Seconde exigence : il faut engager, sans délai, la réforme des finances et de la fiscalité locales, pour redonner du sens, de la consistance et de l'efficience à un système de dotations "à bout de souffle" et, surtout, à une fiscalité locale archaïque, injuste et obsolète.
En ce sens, la refonte annoncée des concours financiers de l'État, en définissant de nouveaux indicateurs de richesse fiscale, en rénovant les critères d'attribution et en renforçant leur effet péréquateur, va dans le bon sens, même si elle demeure perfectible...
Il nous faut persévérer dans cette voie pour une meilleure compréhension, et pour davantage de lisibilité, d'efficacité et de solidarité des dotations.
En effet, la solidarité entre les territoires, à laquelle nous sommes très attachés, passe par une péréquation ambitieuse.
Or aujourd'hui, la péréquation, qui a désormais rang constitutionnel, demeure insuffisante, insignifiante pour ne pas dire inexistante.
Les réformes, dores et déjà engagées, de la dotation de solidarité urbaine (DSU) et surtout de la dotation de solidarité rurale (DSR) concourent, bien évidemment, à la concrétisation de cette nouvelle ambition.
Mais le chemin qu'il nous reste à parcourir est encore long !
J'en veux pour preuve la difficile genèse de la réforme de la fiscalité locale, dont on peine toujours à distinguer les contours.
En matière fiscale, nous avons besoin de courage, de détermination et d'imagination.
Mais nous avons besoin aussi, j'en suis convaincu, de revenir à l'origine, à la source, à la racine même de la notion d'imposition.
Au-delà des incantations, nous devons surtout réhabiliter la philosophie de l'impôt.
Car il ne faut pas s'y méprendre, le pouvoir de lever l'impôt ne correspond pas à l'exercice d'un pouvoir " arbitraire ".
Il constitue, au contraire, une prérogative politiquement justifiée, juridiquement encadrée et socialement acceptée si l'impôt est juste et la prestation servie à la hauteur des attentes...
L'impôt n'est autre que la contrepartie d'un service rendu, et non pas offert, à nos concitoyens et aux usagers des services publics.
C'est tout le sens de l'article 13 de la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, dont je voudrais ici rappeler la teneur : " pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens en raison de leurs facultés ".
D'ailleurs, les Français ne s'y trompent pas. Dans une récente étude, nos concitoyens citent le recours à l'impôt comme mode premier de financement des services publics locaux.
Vous l'avez compris, la fiscalité locale n'est pas un sujet tabou pour nos concitoyens.
Alors pourquoi le serait-elle pour leurs représentants ?
Si les maires de France comprennent l'utilité des réformes engagées et adhèrent à l'objectif de modernisation des impôts locaux, ils exigent également que leur pouvoir fiscal soit maintenu.
Je reconnais bien là le sens des responsabilités qui anime les gestionnaires de proximité !
D'ailleurs, sans vos qualités de gestionnaires, la France n'aurait pas été en mesure de satisfaire aux critères de Maastricht !
Alors, de grâce, rendons à César ce qui lui appartient !
La décentralisation c'est, au pire, un meilleur service pour le même coût. Au mieux, c'est un meilleur service pour un moindre coût.
La décentralisation, c'est du gagnant gagnant !
Dès lors, je vais vous faire une confidence : au nom de quel principe devrait-on sanctionner les plus vertueux ?
Cessons de diaboliser les élus locaux !
En ce sens, la perspective de la suppression de la taxe professionnelle et de l'exonération de taxe sur les propriétés non bâties pour les exploitants agricoles soulève interrogations, inquiétudes et attentes de la part des élus locaux, et notamment des maires de communes rurales.
Pour autant, je ne capitulerai pas devant ceux qui, " contre vents et marées ", sont toujours les partisans du " NON " et qui, au fond, sont surtout pour que rien ne change.
Alors saisissons cette chance historique pour remettre à plat l'ensemble de la fiscalité locale !
Mais nous ne pourrons pas y parvenir si la défense d'intérêts catégoriels prend le pas sur la promotion de l'intérêt général.
La réhabilitation de l'intérêt général constitue, à mon sens, un préalable indispensable à toute réforme fiscale d'envergure.
La restauration des notions d'équité, de partage, de solidarité entre citoyens d'une part, entre contribuables - entreprises et ménages - d'autre part, s'impose également comme une "absolue nécessité" et une ardente obligation.
Car si pour les entreprises, la suppression de la taxe professionnelle peut s'apparenter à la disparition d'un frein à l'investissement, elle correspond, pour les collectivités locales, à la perte d'une recette qui représente près de la moitié de leurs ressources fiscales, soit environ 23 milliards d'euros.
A mon sens, et nous en sommes, je le crois, tous d'accord, la taxe professionnelle doit obligatoirement être remplacée par un autre impôt local dont les collectivités locales maîtriseront l'assiette et les taux.
La réforme de la fiscalité locale ne saurait passer par la seule suppression d'impôts et leur remplacement par des " dotations à la merci de Bercy ". C'est une solution de facilité, j'allais dire de " paresse intellectuelle "...
Ce nouvel impôt devra, à mon sens, satisfaire un triple objectif :
- préserver un lien entre les collectivités territoriales et leur environnement économique,
- inciter au développement de l'intercommunalité,
- renforcer la péréquation qui constitue une " ardente obligation ".
J'espère que la " commission Fouquet ", chargée de réfléchir au remplacement de la taxe professionnelle, saura donner, dans les meilleurs délais, une consistance à ces objectifs.
Je ne doute pas que le gouvernement saura traduire notre attente d'une réforme d'ensemble de la fiscalité locale afin de doter nos collectivités locales d'impôts modernes, dynamiques et équitables, dans le respect du principe constitutionnel d'autonomie fiscale.
Mesdames et Messieurs les maires, vous l'avez compris, les espérances sont grandes !
Ne ménageons pas notre peine pour gagner le pari exaltant du local afin d'inscrire résolument notre pays dans l' " ère territoriale ".
Je compte sur vous pour faire vivre cette France décentralisée.
Je compte sur vous pour continuer à faire battre le cur de nos communes.
Vous pouvez compter sur moi pour rester à l'écoute de vos préoccupations, de vos doléances et de vos propositions.
Vous pouvez compter sur moi pour défendre avec force, vigueur et détermination vos légitimes revendications.
Émanation des collectivités territoriales, le Sénat, fort de sa diversité et riche de son expérience, contribuera pleinement, - soyez-en sûrs -, à la réussite de ce " projet de société ", au service de nos concitoyens, pour bâtir une France moderne, une France dynamique, une France solidaire.
(Source http://www.senat.fr, le 22 novembre 2004)
Monsieur le Vice-président de l'Association des Maires de France, cher Jacques PÉLISSARD,
Monsieur le Maire, cher Philippe LAURENT,
Mes chers collègues,
Mesdames et Messieurs les Maires de France métropolitaine et d'Outre-mer,
Chers amis,
Permettez-moi de vous dire combien je suis heureux de vous retrouver tous réunis, à Paris, pour la traditionnelle " fête des maires " qui constitue un moment fort d'échanges, de débats, de dialogue, mais aussi de convivialité et d'amitié.
Je me présente devant vous cette année, avec une palette de sentiments où se mêlent le bonheur, l'émotion et l'espérance.
- Bonheur d'abord pour le Président du Sénat, pour le Président réélu d'un Sénat rajeuni, d'un Sénat féminisé, d'un Sénat diversifié, pour le Président d'un Sénat qui est l'incarnation des communes et des territoires, de se retrouver, ici, en famille, parmi les siens.
Comme vous, je partage ces valeurs d'abnégation, de courage et d'opiniâtreté qui caractérisent les maires de France.
Comme vous, je sais combien l'exercice des fonctions de maire peut se révéler parfois difficile, ou ingrat, et souvent mal compris.
Le maire est à mes yeux bien plus qu'un rouage essentiel au bon fonctionnement de nos institutions républicaines.
Il forme l'indispensable soubassement, l'irremplaçable socle, l'indéfectible lien qui unit la République à ses concitoyens.
Alors, je voudrais vous adresser à toutes et à tous mes amicales salutations et vous dire combien la République s'honore de votre dévouement sans faille, " vaille que vaille ", " coûte que coûte ", pour faire vivre vos communes et faire battre le cur de la démocratie locale.
- Émotion ensuite car, comme vous le savez, votre Président, Daniel HOEFFEL, a décidé de ne pas se porter candidat à sa propre succession.
Cher Daniel, ce choix vous appartient.
A chaque équipe son capitaine. Vous êtes celui qui, depuis deux années, présidait avec brio aux destinées de l'Association des Maires de France.
A l'heure où vous passez le relais, où vous transmettez le témoin, je veux, tout simplement et très sincèrement, vous dire : merci, merci du fond du cur.
Merci, car vous avez contribué à conforter l'AMF dans son rôle de force de proposition et d'instance de représentation et de défense de l'institution communale.
Je ne doute pas que votre successeur saura porter, toujours plus haut, les couleurs des maires de France et de la décentralisation, cette réforme bénéfique qui devrait libérer les énergies locales et améliorer l'efficience de l'action publique à un moment où le " tout État " a atteint ses limites.
- Espérance enfin, car malgré des vents contraires, nous avons tenu le cap.
La France décentralisée est désormais sur les rails.
Nos efforts n'ont pas été vains !
Je plaide, en effet, depuis longtemps, pour une décentralisation ambitieuse, une décentralisation généreuse, une décentralisation comme facteur de cohésion, de solidarité et d'efficacité.
En ma qualité de Président du Sénat, assemblée parlementaire à part entière, et en plus, -c'est un bonus-, représentant constitutionnel des collectivités territoriales de la République, j'ai ardemment milité pour la promotion de la décentralisation, de cette décentralisation initiée par Pierre MAUROY et Gaston DEFFERRE, qui fait désormais partie intégrante et vivante de notre patrimoine républicain.
Aujourd'hui, j'ai le sentiment du devoir accompli.
Néanmoins, je ne pêcherai pas par un optimisme béat. " Chat échaudé craint l'eau froide "...
La réforme constitutionnelle de mars 2003, la loi organique relative à " l'autonomie financière des collectivités locales " puis la loi du 13 août 2004 relative " aux libertés et responsabilités locales " n'ont pas dissipé toutes les craintes, tous les malentendus, toutes les appréhensions. Loin s'en faut !
De nombreuses interrogations, souvent légitimes, subsistent.
Parmi celles-ci, il est une question qui inquiète tous les maires de France : quels moyens pour l'acte deux de la décentralisation ?
La réponse à cette question est essentielle car elle conditionne, à l'évidence, le succès même de la décentralisation.
Deux exigences doivent, à mon sens, être satisfaites pour que la décentralisation produise pleinement tous ses effets bénéfiques.
- Première exigence : l'État doit compenser intégralement les nouvelles compétences transférées ou étendues.
Ce préalable est indispensable car la réussite de la décentralisation repose sur l'établissement de relations financières saines, sûres et sereines entre l'Etat et les collectivités locales.
C'est pourquoi, je me suis battu pour que soient gravés dans le marbre de notre Constitution des principes forts, car protecteurs de l'autonomie locale et garants de relations apaisées entre l'État et les collectivités locales.
C'est ainsi qu'ont désormais droit de cité dans notre Constitution, le principe de l'autonomie financière des collectivités locales, celui de la compensation financière des transferts de compétences ou encore l'objectif de la péréquation.
Ces principes constituent autant de garanties, de verrous et de garde-fous qui doivent nous permettre d'envisager l'avenir avec davantage de sérénité.
Afin de veiller au respect de ces garanties, j'ai, en outre, souhaité créer, au Sénat, un "Observatoire de la décentralisation", au sein duquel seront représentés tous les groupes politiques du Sénat.
L'objectif de cette instance, qui travaillera en réseau, notamment avec les grandes associations d'élus locaux, est simple : procéder à une évaluation précise, transparente et contradictoire des transferts de charges, évaluer les politiques publiques locales et formuler des propositions. Il s'agit, en effet, d'éviter les dérives financières qui avaient pu pénaliser les collectivités locales lors du premier acte de la décentralisation.
L'observatoire a vocation à devenir le "shérif" de la décentralisation.
- Seconde exigence : il faut engager, sans délai, la réforme des finances et de la fiscalité locales, pour redonner du sens, de la consistance et de l'efficience à un système de dotations "à bout de souffle" et, surtout, à une fiscalité locale archaïque, injuste et obsolète.
En ce sens, la refonte annoncée des concours financiers de l'État, en définissant de nouveaux indicateurs de richesse fiscale, en rénovant les critères d'attribution et en renforçant leur effet péréquateur, va dans le bon sens, même si elle demeure perfectible...
Il nous faut persévérer dans cette voie pour une meilleure compréhension, et pour davantage de lisibilité, d'efficacité et de solidarité des dotations.
En effet, la solidarité entre les territoires, à laquelle nous sommes très attachés, passe par une péréquation ambitieuse.
Or aujourd'hui, la péréquation, qui a désormais rang constitutionnel, demeure insuffisante, insignifiante pour ne pas dire inexistante.
Les réformes, dores et déjà engagées, de la dotation de solidarité urbaine (DSU) et surtout de la dotation de solidarité rurale (DSR) concourent, bien évidemment, à la concrétisation de cette nouvelle ambition.
Mais le chemin qu'il nous reste à parcourir est encore long !
J'en veux pour preuve la difficile genèse de la réforme de la fiscalité locale, dont on peine toujours à distinguer les contours.
En matière fiscale, nous avons besoin de courage, de détermination et d'imagination.
Mais nous avons besoin aussi, j'en suis convaincu, de revenir à l'origine, à la source, à la racine même de la notion d'imposition.
Au-delà des incantations, nous devons surtout réhabiliter la philosophie de l'impôt.
Car il ne faut pas s'y méprendre, le pouvoir de lever l'impôt ne correspond pas à l'exercice d'un pouvoir " arbitraire ".
Il constitue, au contraire, une prérogative politiquement justifiée, juridiquement encadrée et socialement acceptée si l'impôt est juste et la prestation servie à la hauteur des attentes...
L'impôt n'est autre que la contrepartie d'un service rendu, et non pas offert, à nos concitoyens et aux usagers des services publics.
C'est tout le sens de l'article 13 de la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, dont je voudrais ici rappeler la teneur : " pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens en raison de leurs facultés ".
D'ailleurs, les Français ne s'y trompent pas. Dans une récente étude, nos concitoyens citent le recours à l'impôt comme mode premier de financement des services publics locaux.
Vous l'avez compris, la fiscalité locale n'est pas un sujet tabou pour nos concitoyens.
Alors pourquoi le serait-elle pour leurs représentants ?
Si les maires de France comprennent l'utilité des réformes engagées et adhèrent à l'objectif de modernisation des impôts locaux, ils exigent également que leur pouvoir fiscal soit maintenu.
Je reconnais bien là le sens des responsabilités qui anime les gestionnaires de proximité !
D'ailleurs, sans vos qualités de gestionnaires, la France n'aurait pas été en mesure de satisfaire aux critères de Maastricht !
Alors, de grâce, rendons à César ce qui lui appartient !
La décentralisation c'est, au pire, un meilleur service pour le même coût. Au mieux, c'est un meilleur service pour un moindre coût.
La décentralisation, c'est du gagnant gagnant !
Dès lors, je vais vous faire une confidence : au nom de quel principe devrait-on sanctionner les plus vertueux ?
Cessons de diaboliser les élus locaux !
En ce sens, la perspective de la suppression de la taxe professionnelle et de l'exonération de taxe sur les propriétés non bâties pour les exploitants agricoles soulève interrogations, inquiétudes et attentes de la part des élus locaux, et notamment des maires de communes rurales.
Pour autant, je ne capitulerai pas devant ceux qui, " contre vents et marées ", sont toujours les partisans du " NON " et qui, au fond, sont surtout pour que rien ne change.
Alors saisissons cette chance historique pour remettre à plat l'ensemble de la fiscalité locale !
Mais nous ne pourrons pas y parvenir si la défense d'intérêts catégoriels prend le pas sur la promotion de l'intérêt général.
La réhabilitation de l'intérêt général constitue, à mon sens, un préalable indispensable à toute réforme fiscale d'envergure.
La restauration des notions d'équité, de partage, de solidarité entre citoyens d'une part, entre contribuables - entreprises et ménages - d'autre part, s'impose également comme une "absolue nécessité" et une ardente obligation.
Car si pour les entreprises, la suppression de la taxe professionnelle peut s'apparenter à la disparition d'un frein à l'investissement, elle correspond, pour les collectivités locales, à la perte d'une recette qui représente près de la moitié de leurs ressources fiscales, soit environ 23 milliards d'euros.
A mon sens, et nous en sommes, je le crois, tous d'accord, la taxe professionnelle doit obligatoirement être remplacée par un autre impôt local dont les collectivités locales maîtriseront l'assiette et les taux.
La réforme de la fiscalité locale ne saurait passer par la seule suppression d'impôts et leur remplacement par des " dotations à la merci de Bercy ". C'est une solution de facilité, j'allais dire de " paresse intellectuelle "...
Ce nouvel impôt devra, à mon sens, satisfaire un triple objectif :
- préserver un lien entre les collectivités territoriales et leur environnement économique,
- inciter au développement de l'intercommunalité,
- renforcer la péréquation qui constitue une " ardente obligation ".
J'espère que la " commission Fouquet ", chargée de réfléchir au remplacement de la taxe professionnelle, saura donner, dans les meilleurs délais, une consistance à ces objectifs.
Je ne doute pas que le gouvernement saura traduire notre attente d'une réforme d'ensemble de la fiscalité locale afin de doter nos collectivités locales d'impôts modernes, dynamiques et équitables, dans le respect du principe constitutionnel d'autonomie fiscale.
Mesdames et Messieurs les maires, vous l'avez compris, les espérances sont grandes !
Ne ménageons pas notre peine pour gagner le pari exaltant du local afin d'inscrire résolument notre pays dans l' " ère territoriale ".
Je compte sur vous pour faire vivre cette France décentralisée.
Je compte sur vous pour continuer à faire battre le cur de nos communes.
Vous pouvez compter sur moi pour rester à l'écoute de vos préoccupations, de vos doléances et de vos propositions.
Vous pouvez compter sur moi pour défendre avec force, vigueur et détermination vos légitimes revendications.
Émanation des collectivités territoriales, le Sénat, fort de sa diversité et riche de son expérience, contribuera pleinement, - soyez-en sûrs -, à la réussite de ce " projet de société ", au service de nos concitoyens, pour bâtir une France moderne, une France dynamique, une France solidaire.
(Source http://www.senat.fr, le 22 novembre 2004)