Déclaration de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, sur la modernisation de la ligne ferroviaire Béziers - Clermont-Ferrand, la remise en cause par le Parlement européen du compromis sur la constitution d'un réseau européen de transport de fret , Saint Chély d'Apcher, le 13 octobre 2000.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Inauguration du chantier de rénovation de la ligne ferroviaire de Béziers à Clermont-Ferrand à Saint-Chély d'Apcher, le 13 octobre 2000

Texte intégral

Messieurs les parlementaires,
Monsieur le président du Conseil régional,
Messieurs les élus,
Messieurs les présidents de RFF et de la SNCF,
Chers amis,
C'est avec une grande satisfaction que je participe à cette cérémonie qui marque l'achèvement des travaux du premier chantier de régénération de la ligne Clermont - Béziers.
Je ne reviendrais pas sur la période passée. De fortes inquiétudes sont apparues quant à la pérennité de cette ligne ferroviaire, vitale pour le désenclavement des régions traversées, et forte d'enjeux pour le développement du trafic fret.
Nombreux ont été les élus, les syndicalistes, les usagers de tous horizons qui se sont mobilisés pour refuser la fatalité. Mais ceci tous ici le savent et notamment ceux qui se sont réunis dans le Comité pluraliste de défense et de promotion de la ligne SNCF Béziers - Millau - Neussargues - Clermont-Ferrand - Paris et notamment son président M. Jacky TELLO.
Oui, je crois que tous partagent aujourd'hui ma satisfaction de voir s'inverser la logique du déclin et commencer la régénération et la modernisation de la ligne.
Je l'ai dit, et d'autres l'ont également dit avant moi, cette ligne constitue en elle-même une artère indispensable à l'équilibre et à l'aménagement du territoire. Décider et réaliser sa modernisation illustre l'amorce de la politique nouvelle en matière de chemins de fer, développée par le gouvernement de Lionel JOSPIN.
Outre la confirmation concrète du renouveau du rail, cet acte porte témoignage également de la fin d'une politique du " tout TGV ". Nous avons le souci de moderniser les lignes classiques et de redonner toutes leurs chances à des lignes qui ont pu un temps être laissées pour compte. Le renouveau du rail doit profiter à tous. Et, à ce propos, je me félicite de ce que les contrats de plan qui viennent d'être signés entre l'État et les régions s'inscrivent pleinement dans cette orientation.
Globalement, l'ensemble des crédits consacrés aux investissements ferroviaires y sont 10 fois supérieurs à ceux réellement mis en uvre lors du contrat de plan précédent. Dans chaque région, se retrouve le souhait de mieux utiliser le patrimoine ferroviaire, de mieux exploiter les potentialités qu'il recèle tant pour les grandes lignes que pour les lignes régionales.
Il existe, en effet, sur cette question un consensus très large dont je me félicite. Le chemin de fer est perçu, tant par les élus que par les décideurs socio-économiques, comme une réponse pertinente au besoin de développement durable.
A propos du contrat de plan Languedoc-Roussillon, Monsieur le Président de région, la ligne Nimes-La Bastide bénéficiera pleinement des gains de temps rendus possible par la suppression du rebroussement de Courbessac. Cette opération co-financée par l'État, la Région et RFF, d'un montant de 120 millions F, avait pris du retard puisqu'elle était prévue au plan précédent. Elle sera réalisée d'ici deux ans. De même, la ligne La Bastide-Mende a également bénéficié d'un renouvellement de voie, qui permet d'améliorer les temps de parcours entre Mende et Nimes.
Par ailleurs, les responsabilités nouvelles que la loi sur la solidarité et le renouvellement urbain va confier aux régions en matière d'organisation des transports ferroviaires régionaux de voyageurs, permettront de plus encore rapprocher les décisions des acteurs locaux.
Outre son intérêt au regard de l'aménagement durable, cette modernisation s'inscrit également dans une vision nouvelle quant à l'utilisation de notre patrimoine ferroviaire.
Comme l'ont relevé MM. MARTINAND et TELLO, l'inscription de cette ligne dans le réseau européen de transport de fret ferroviaire (le RTEFF) montre que des lignes que l'on a pu considérer comme condamnées au déclin peuvent constituer une remarquable réponse aux engorgements que connaissent certaines parties de notre réseau national. Je pense en particulier à la vallée du Rhône.
A ce propos, je ne peux m'empêcher de relever les tentatives des groupes de droite au Parlement Européen de remettre en cause des éléments essentiels du compromis obtenu en décembre 1999 en Conseil des ministres européens des transports qui, sur ma proposition, s'étaient mis d'accord sur la constitution d'un véritable réseau européen de transport de fret accessible à l'ensemble des entreprises ferroviaires.
Par son maximalisme ultralibéral, la majorité au Parlement européen peut faire échouer les efforts entrepris par l'ensemble des gouvernements pour assurer les conditions d'un développement du fret ferroviaire. Les amendements qu'elle a adoptés vont jusqu'à remettre en cause ce que j'avais obtenu auprès de mes collègues ministres européens, à savoir la possibilité de moduler le montant des péages d'infrastructure ferroviaire afin de faciliter le passage des trains sur des itinéraires de délestage comme la ligne Clermont-Béziers.
Une telle attitude va à l'encontre des objectifs prétendument affichés par les parlementaires, de développement du trafic ferroviaire. C'est même une menace pour l'équilibre des territoires. Je ne peux que m'insurger contre une telle attitude de la droite européenne qui montre bien là ce qu'elle pense des nécessités de cohésion territoriale. Et je sais que sont nombreux ici ceux qui partagent mon émotion.
S'il n'est pas question de faire de cette ligne un axe massif d'acheminement du fret ferroviaire, la réserve de capacité qu'elle possède lui confère une aptitude indéniable à soulager les autres lignes en voie de saturation. Cette ligne pourra ainsi participer à l'objectif de doublement du trafic fret dans les dix ans proposé par le gouvernement et repris tout à l'heure par le président GALLOIS.
Les liaisons par trains de nuit entre le Languedoc-Roussillon et Paris, sont fortement impactées par la mise en service du TGV Méditérannée en juin prochain qui mettra Béziers à 4 h 30 de Paris.
Je sais que des concertations ont lieu entre la SNCF et la région à propos des recompositions de dessertes grandes lignes. Personnellement, je considère qu'il serait souhaitable d'étudier dans ce cadre l'intérêt de mettre en place une liaison par train de nuit Perpignan - Narbonne - Béziers - Clermont - Paris.
Concernant le bouclage du financement de l'ensemble de la première phase de modernisation de la ligne, je peux vous dire qu'il est acquis et que nous pourrons très rapidement procéder à la signature de la convention spécifique de financement de ce programme.
Je vous rappelle que cette phase - qui représente un volume de travaux d'environ 685 millions F - comportera l'électrification de la ligne Clermont - Neussargues, de manière à assurer la continuité électrique entre le nord et le sud du Massif Central, c'est-à-dire entre la France du nord et la France du sud. Elle comportera également des travaux lourds de modernisation et de régénération de la voie sur plus de 80 kilomètres dans les trois régions Auvergne, Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, de manière à permettre le passage sans ralentissement des trains de fret chargés à 22,5 tonnes à l'essieu.
A côté de l'État et de RFF, je remercie les 3 régions de leur participation à ce programme ; elles ont accepté de jouer la carte de l'unité de la liaison nord-sud, l'effort fait par chaque région n'ayant de sens qu'au regard des efforts faits par les deux autres, au-delà de la seule proportionnalité kilométrique. Je ne doute pas que la région Languedoc-Roussillon, dans laquelle se sont déroulés les premiers travaux inaugurés aujourd'hui, tienne ainsi ses engagements vis-à-vis du comité pluraliste par une participation significative, dans la ligne de ce qui avait été annoncé dans le contrat de plan.
Dès la signature de la convention de financement -qui peut donc intervenir très rapidement- pourront être programmées les prochaines étapes des travaux de manière à ce que tout soit terminé avant la fin du plan et que le prochain chantier puisse commencer dès 2001.
Une fois cette programmation établie, je suis convaincu que RFF et la SNCF auront à cur de passer au plus vite au cur du programme de modernisation, notamment à l'électrification très attendue entre Clermont-Ferrand et Neussargues, seul tronçon non encore électrifié du parcours entre Paris et Béziers.
Ainsi se verra réalisé ce qui a longtemps constitué un objectif majeur pour beaucoup d'entre vous, fruit de votre acharnement à vouloir maintenir une liaison essentielle à l'équilibre des territoires.
Mesdames, Messieurs, je vous remercie.

(Source http://www.equipement.gouv.fr, le 17 octobre 2000)