Texte intégral
Je suis particulièrement heureux d'ouvrir vos travaux dans cette belle ville de Villefranche-de-Rouergue, qui nous fait l'amitié de nous accueillir aujourd'hui et dont je salue le maire Serge ROQUES.
J'avais eu le plaisir de me rendre en Roumanie au mois de mai dernier pour participer au forum de Sinaia et j'avais pu apprécier l'accueil de nos amis roumains.
C'est donc une grande satisfaction pour la France de les recevoir à son tour au cur de son territoire, dans ce département de l'Aveyron, que préside Jean PUECH, dont chacun connaît le très fort engagement dans la coopération décentralisée Franco-Roumaine et dans la réussite de ces rencontres tant en Roumanie au mois de mai qu'en France aujourd'hui.
Je veux saluer la présence parmi nous, d'éminentes personnalités roumaines, dont les représentants du gouvernement roumain. Cette présence souligne une nouvelle fois la profondeur des liens qui unissent la France et la Roumanie et la volonté partagée de renforcer davantage encore notre coopération.
Lors de mon récent déplacement en Roumanie, j'ai eu l'occasion de rappeler à mes interlocuteurs et en tout premier lieu à votre Premier Ministre, M. Adrien NASTASE, le soutien de la France aux efforts entrepris par la Roumanie en vue de son adhésion à l'Union européenne à l'échéance de 2007.
Ce soutien se manifeste concrètement et sous différentes formes, notamment par la coopération active entre nos administrations dans le cadre du programme PHARE.
La coopération décentralisée tient naturellement une place éminente dans notre coopération bilatérale. Elle s'appuie sur un acquis incontestable, sur un engagement réciproque des collectivités locales dans nos deux pays ainsi que sur des méthodes de travail qui ont été élaborées et perfectionnées au fil du temps. Le Gouvernement français dresse donc un bilan très positif de cette coopération entre nos collectivités locales, qui ont su mettre leur capacité d'initiative et leur expérience au service de projets ambitieux.
La coopération décentralisée exprime également une idée simple qui est chère au Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, à savoir que les territoires, parce qu'ils peuvent le mieux répondre à l'exigence de proximité exprimée par les citoyens, doivent être au cur de l'action publique tout en s'inscrivant dans un cadre juridique qui veille à assurer la nécessaire cohérence.
Lors de notre précédente rencontre à Sinaia, j'avais eu l'occasion de vous présenter l'expérience française de décentralisation telle qu'elle a été entreprise depuis 1982 et de vous exposer les principales dispositions envisagées par le gouvernement français en vue de renforcer la place des collectivités locales dans l'action publique.
Avant de revenir sur le thème de la coopération décentralisée, je voudrais vous indiquer où en est le processus en cours :
I. L'examen par le Parlement, à l'automne, d'un projet de loi de décentralisation permettra de confier aux collectivités locales françaises des responsabilités importantes dans de nombreux domaines.
La décentralisation est, aux yeux du Gouvernement, l'aiguillon nécessaire à la modernisation de notre pays et de l'évolution de ses structures administratives. Rapprochant la décision publique du citoyen, il la rendra plus simple, plus efficace et plus démocratique. Clarifiant la répartition des compétences, il permettra aux citoyens de mieux identifier les responsables des politiques publiques.
La réforme en cours sera en mise en uvre dans un nouveau cadre constitutionnel qui a été fixée par la loi du 28 mars 2003. Des principes nouveaux ont été insérés dans la Constitution française. Outils d'une modernisation de notre République, ils sont destinés à produire leurs effets dans le temps : l'organisation décentralisée de la République inscrite à l'article premier de la Constitution à côté des principes fondateurs que sont l'indivisibilité de la République et l'égalité des citoyens devant la loi ; l'expérimentation ; l'objectif constitutionnel de subsidiarité ; le pouvoir réglementaire des collectivités territoriales ; l'absence de tutelle d'une collectivité sur l'autre, qui devra se combiner avec la notion de collectivité chef de file.
La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 a en outre, apporté aux collectivités territoriales de nouvelles et importantes garanties financières, qui leur permettront de mettre en uvre leurs compétences dans des conditions plus sûres : libre disposition des ressources des ressources ; faculté pour la loi d'autoriser les collectivités territoriales à fixer l'assiette et le taux des impôts qu'elles reçoivent ; garantie de la part des ressources fiscales dans l'ensemble des ressources ; garantie aussi de la compensation des transferts de compétences ; obligation pour la loi de déterminer des ressources en cas de création ou d'extension de compétences ayant pour conséquences d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales ; obligation de mettre en place des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales.
En parallèle, le Gouvernement a décidé d'engager une grande concertation dans tous les territoires, pour que soient définis au plus près des réalités les besoins et les projets : tel fut l'objet des Assises des libertés locales qui se sont déroulées dans les 26 régions de métropole et d'outre-mer entre le mois d'octobre 2002 et le mois de janvier 2003. Ces assises ont connu un vif succès : au total, 55 000 personnes y ont participé ; précédées d'ateliers thématiques sur les sujets les plus divers, elles ont donné lieu à des débats très intenses. Elles ont témoigné d'une forte demande de décentralisation, faisant, émerger plus de 600 propositions de nouveaux transferts de compétences ou d'expérimentations. Ainsi, le projet de loi de décentralisation se fonde directement sur les attentes exprimées par les collectivités locales et les citoyens.
La synthèse des Assises des Libertés locales a été faite, le 28 février dernier, à Rouen. A cette occasion, le Premier Ministre a fixé les grandes orientations qui ont servi de base à l'élaboration du projet de loi de décentralisation.
Par ce projet de loi, l'Etat va transférer aux collectivités territoriales les compétences qu'elles paraissent le mieux à même de prendre en charge. Sans faire une liste exhaustive des compétences qui seront confiées aux collectivités territoriales, je voudrais en énoncer quelques-unes parmi les plus significatives.
En ce qui concerne le soutien au développement économique, la région exercera une mission de coordination des interventions économiques sur le territoire régional et recevra les moyens financiers que l'Etat y consacre.
L'état ne conservera qu'un rôle institutionnel vis à vis des institutions communautaires et un devoir d'alerte, voire d'intervention subsidiaire, en cas de difficultés particulières des entreprises. Le rôle de la région sera également renforcé en matière de formation professionnelle et bénéficiera du transfert dans la quasi totalité des outils financiers qui y concourent.
Dans le domaine des infrastructures, les départements bénéficieront d'un transfert des routes qui, par leurs caractéristiques, peuvent ne pas relever de la voirie nationale, soit 20 000 km. Le projet de loi transfère également aux collectivités territoriales les aérodromes, à l'exception des grandes plates-formes d'intérêt national ou encore des ports qui dépendent actuellement de l'Etat.
Pour faciliter l'utilisation des fonds structurels européens, l'Etat pourra confier, à titre expérimental, aux collectivités territoriales qui le demanderont, en priorité les régions, la responsabilité de la gestion de ces fonds.
Le projet de loi conforte par ailleurs le rôle du département en matière d'action sociale et permet une délégation de compétences aux structures intercommunales et aux départements en matière de logement social. Les régions pourront participer aux instances de décision en matière d'organisation de l'offre de soins et participer au financement d'équipements sanitaires.
Dans le domaine de l'éducation, les collectivités territoriales seront mieux associées au processus de décision tant au plan national qu'au plan local et bénéficieront de nouvelles mesures favorisant leur implication dans la gestion des moyens correspondant aux compétences déjà décentralisées en matière de gestion immobilière. Enfin en matière de gestion du patrimoine, les collectivités territoriales pourront s'investir davantage en se voyant transférer la propriété et l'entretien de certains monuments historiques.
Conformément aux principes fixés par la Constitution, ces transferts de compétences seront accompagnés des transferts des moyens humains et financiers correspondants. Les fonctionnaires de l'Etat, qui seront affectés dans des collectivités territoriales auront vocation à devenir des fonctionnaires territoriaux mais pourront conserver, s'ils le souhaitent, leur statut de fonctionnaires d'Etat. Les compensations financières résulteront essentiellement, afin de préserver l'autonomie financière des collectivités territoriales, de transferts de ressources fiscales jusque là attribuées à l'Etat, en particulier une part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP).
Loin de remettre en cause le rôle de l'Etat, l'approfondissement de la décentralisation lui permettra de mieux exercer ses missions essentielles, non seulement ses missions régaliennes traditionnelles mais aussi ses missions qui concourent à la cohésion nationale en veillant à la solidarité entre les citoyens et entre les territoires. Il revient en particulier à l'Etat de veiller au respect de la loi : le contrôle de légalité sera prochainement modernisé pour le rendre plus efficace.
Enfin, le Gouvernement proposera au Parlement d'adopter un dispositif d'évaluation des politiques locales. Il est aussi attentif aux missions des chambres régionales des comptes dans le contrôle financier des collectivités territoriales.
II. Renforcées dans leurs missions au plan interne, les collectivités territoriales françaises seront mieux armées dans leurs actions de coopération avec les collectivités locales roumaines.
Au fil du temps, un grand nombre de communes, d'agglomérations, de départements et de régions françaises ont mené des actions exemplaires. Nous pensons que la coopération décentralisée doit permettre d'engager des initiatives nouvelles, que ce soit pour la paix, pour le développement ou encore la culture. Il faut que nos collectivités locales, en France comme en Roumanie, soient ambitieuses, aient des programmes et des projets qu'elles peuvent développer ensemble.
De ce point de vue, la coopération franco-roumaine apparaît active et diversifiée. Si elle s'est véritablement développée à partir des années 90, je veux rappeler que des jumelages existaient auparavant, tels que Poitiers avec Iasi depuis 1969 ou Argenteuil avec Hunedoara depuis 1973. On dénombre au total environ 600 collectivités locales françaises intervenant plus ou moins régulièrement en Roumanie. Aujourd'hui, environ 200 partenariats existent : la Roumanie a ainsi une place privilégiée dans la coopération décentralisée française en Europe centrale. Il est remarquable de constater que les petites communes françaises qui s'étaient lancées dès 1989, dans le sillage d'opérations villages Roumains, dans des relations avec des villages roumains sont aujourd'hui relayées par les grandes villes, les départements et les régions français.
Je citerai notamment l'action du Conseil général de l'Aveyron, présidé par Jean Puech, qui met en uvre l'un des plus importants programmes menés par une collectivité territoriale en Roumanie, lequel a débuté en 1992 à travers l'association de coopération Aveyron-Tulcea.
Ne pouvant évoquer les très nombreux projets en cours, je me bornerais à mentionner quelques autres exemples significatifs de l'action des collectivités territoriales françaises. Le Conseil général de la Marne est engagé depuis 1992 avec le judet de Neamt. Le Conseil général de Savoie intervient depuis 1994 auprès du département d'Arges. Le Conseil général de Charente Maritime conduit depuis 1992 un partenariat avec le judet de Calarasi pour la formation des élus et des cadres. La ville de Mulhouse est jumelée avec la ville de Timisoara depuis 1991 et ses actions de coopération concernant les services municipaux et la mise en place d'un contrat social d'insertion, la coopération médicale et les échanges entre lycées. La communauté urbaine de Brest est engagée dans un partenariat avec la ville de Constantza dans des domaines variés tels que la formation professionnelle, la gestion urbaine, le tourisme ainsi que les échanges scolaires et culturels.
Le forum de Sinaia a mis en évidence les très nombreux autres projets qui font la richesse de cette coopération décentralisée entre la France et la Roumanie.
Outre nos liens historiques, plusieurs facteurs contribuent à cette coopération active : l'élan de solidarité spontanée des collectivités locales françaises au lendemain de la révolution roumaine, la proximité géographique mais aussi la francophonie.
Je crois qu'il n'est pas inutile de relever qu'après être intervenues massivement dans le domaine humanitaire au début des années 90, les collectivités territoriales françaises ont su faire varier le champ de leurs interventions. Celles-ci se déploient désormais dans plusieurs domaines : le secteur médico-social, l'enseignement, la culture et la jeunesse, l'aide aux communes.
Je veux aussi relever l'investissement des associations de collectivités locales dans nos deux pays en faveur de la coopération : leurs initiatives sont de nature à faire augmenter le nombre des collectivités locales françaises moyennes ou grandes présentes en Roumanie. Leur décision d'exprimer, au cours de ces assises, leur volonté commune de renforcer davantage encore leur coopération doit être soulignée.
Avant le forum de Sinaia, deux forums de la coopération décentralisée ont été organisés avec l'appui de l'ambassade de France à Bucarest : l'un à Timisoara et l'autre à Iasi respectivement en juillet et en septembre 2002. Ces manifestations auxquelles ont participé des collectivités territoriales françaises et roumaines, ainsi que des entreprises et des représentants des milieux associatifs, ont permis de confirmer les liens existants et de déterminer des axes de coopération pour l'avenir.
En octobre 2002, à Paris, les Premiers Ministres roumains et français ont décidé que des assises de la coopération décentralisée franco-roumaine seraient organisées en France en 2003. Je veux saluer la part très importante prise par l'Assemblée des départements de France, présidée par Jean Puech, et par l'Union nationale des Conseils de Judets de Roumanie, que préside Mircea COSMA, dans son organisation. Un comité de pilotage a été placée sous la présidence de François FORTASSIN, Président du Conseil général des Hautes Pyrénées et président de la commission de la coopération décentralisée de l'Assemblée des départements de France.
Le forum de Sinaia a bien auguré des travaux qui vont se tenir à Villefranche de Rouergue. Il a, en effet, rencontré un plein succès avec la présence de plus de 350 participants français et roumains, élus locaux et cadres territoriaux. Il a permis d'aborder les thématiques les plus diverses qui sont au cur des préoccupations de nos collectivités, comme le développement rural, la protection de l'enfance, le développement économique local ou encore l'environnement et l'efficacité énergétique.
Les ateliers organisés dans le cadre du forum de Sinaia ont ainsi mis en évidence les différents besoins pouvant faire l'objet d'un investissement utile au titre de la coopération décentralisée franco-roumaine. Certains thèmes, déjà débattus à Sinaia, comme le développement local ou la protection de l'enfance, pourront être approfondis au cours de ces deux journées. D'autres thèmes essentiels, comme celui de l'Europe et les fonds structurels seront abordés.
A travers ces discussions, nos partenaires roumains pourront mieux prendre la mesure des formes de coopération susceptibles d'être apportées par des collectivités locales françaises. Il s'agit, en effet, de parvenir à une meilleure adéquation entre d'une part les besoins et les priorités exprimées par les collectivités locales roumaines et, d'autre part, les disponibilités et l'expérience des collectivités locales françaises dans certains domaines.
Je forme le vu que les débats qui vont se dérouler maintenant, contribuent à mobiliser mieux encore les collectivités locales roumaines et françaises dans leur ambitieuse démarche de coopération.
(source http://www.departement.com, le 24 mars 2004)
J'avais eu le plaisir de me rendre en Roumanie au mois de mai dernier pour participer au forum de Sinaia et j'avais pu apprécier l'accueil de nos amis roumains.
C'est donc une grande satisfaction pour la France de les recevoir à son tour au cur de son territoire, dans ce département de l'Aveyron, que préside Jean PUECH, dont chacun connaît le très fort engagement dans la coopération décentralisée Franco-Roumaine et dans la réussite de ces rencontres tant en Roumanie au mois de mai qu'en France aujourd'hui.
Je veux saluer la présence parmi nous, d'éminentes personnalités roumaines, dont les représentants du gouvernement roumain. Cette présence souligne une nouvelle fois la profondeur des liens qui unissent la France et la Roumanie et la volonté partagée de renforcer davantage encore notre coopération.
Lors de mon récent déplacement en Roumanie, j'ai eu l'occasion de rappeler à mes interlocuteurs et en tout premier lieu à votre Premier Ministre, M. Adrien NASTASE, le soutien de la France aux efforts entrepris par la Roumanie en vue de son adhésion à l'Union européenne à l'échéance de 2007.
Ce soutien se manifeste concrètement et sous différentes formes, notamment par la coopération active entre nos administrations dans le cadre du programme PHARE.
La coopération décentralisée tient naturellement une place éminente dans notre coopération bilatérale. Elle s'appuie sur un acquis incontestable, sur un engagement réciproque des collectivités locales dans nos deux pays ainsi que sur des méthodes de travail qui ont été élaborées et perfectionnées au fil du temps. Le Gouvernement français dresse donc un bilan très positif de cette coopération entre nos collectivités locales, qui ont su mettre leur capacité d'initiative et leur expérience au service de projets ambitieux.
La coopération décentralisée exprime également une idée simple qui est chère au Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, à savoir que les territoires, parce qu'ils peuvent le mieux répondre à l'exigence de proximité exprimée par les citoyens, doivent être au cur de l'action publique tout en s'inscrivant dans un cadre juridique qui veille à assurer la nécessaire cohérence.
Lors de notre précédente rencontre à Sinaia, j'avais eu l'occasion de vous présenter l'expérience française de décentralisation telle qu'elle a été entreprise depuis 1982 et de vous exposer les principales dispositions envisagées par le gouvernement français en vue de renforcer la place des collectivités locales dans l'action publique.
Avant de revenir sur le thème de la coopération décentralisée, je voudrais vous indiquer où en est le processus en cours :
I. L'examen par le Parlement, à l'automne, d'un projet de loi de décentralisation permettra de confier aux collectivités locales françaises des responsabilités importantes dans de nombreux domaines.
La décentralisation est, aux yeux du Gouvernement, l'aiguillon nécessaire à la modernisation de notre pays et de l'évolution de ses structures administratives. Rapprochant la décision publique du citoyen, il la rendra plus simple, plus efficace et plus démocratique. Clarifiant la répartition des compétences, il permettra aux citoyens de mieux identifier les responsables des politiques publiques.
La réforme en cours sera en mise en uvre dans un nouveau cadre constitutionnel qui a été fixée par la loi du 28 mars 2003. Des principes nouveaux ont été insérés dans la Constitution française. Outils d'une modernisation de notre République, ils sont destinés à produire leurs effets dans le temps : l'organisation décentralisée de la République inscrite à l'article premier de la Constitution à côté des principes fondateurs que sont l'indivisibilité de la République et l'égalité des citoyens devant la loi ; l'expérimentation ; l'objectif constitutionnel de subsidiarité ; le pouvoir réglementaire des collectivités territoriales ; l'absence de tutelle d'une collectivité sur l'autre, qui devra se combiner avec la notion de collectivité chef de file.
La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 a en outre, apporté aux collectivités territoriales de nouvelles et importantes garanties financières, qui leur permettront de mettre en uvre leurs compétences dans des conditions plus sûres : libre disposition des ressources des ressources ; faculté pour la loi d'autoriser les collectivités territoriales à fixer l'assiette et le taux des impôts qu'elles reçoivent ; garantie de la part des ressources fiscales dans l'ensemble des ressources ; garantie aussi de la compensation des transferts de compétences ; obligation pour la loi de déterminer des ressources en cas de création ou d'extension de compétences ayant pour conséquences d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales ; obligation de mettre en place des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales.
En parallèle, le Gouvernement a décidé d'engager une grande concertation dans tous les territoires, pour que soient définis au plus près des réalités les besoins et les projets : tel fut l'objet des Assises des libertés locales qui se sont déroulées dans les 26 régions de métropole et d'outre-mer entre le mois d'octobre 2002 et le mois de janvier 2003. Ces assises ont connu un vif succès : au total, 55 000 personnes y ont participé ; précédées d'ateliers thématiques sur les sujets les plus divers, elles ont donné lieu à des débats très intenses. Elles ont témoigné d'une forte demande de décentralisation, faisant, émerger plus de 600 propositions de nouveaux transferts de compétences ou d'expérimentations. Ainsi, le projet de loi de décentralisation se fonde directement sur les attentes exprimées par les collectivités locales et les citoyens.
La synthèse des Assises des Libertés locales a été faite, le 28 février dernier, à Rouen. A cette occasion, le Premier Ministre a fixé les grandes orientations qui ont servi de base à l'élaboration du projet de loi de décentralisation.
Par ce projet de loi, l'Etat va transférer aux collectivités territoriales les compétences qu'elles paraissent le mieux à même de prendre en charge. Sans faire une liste exhaustive des compétences qui seront confiées aux collectivités territoriales, je voudrais en énoncer quelques-unes parmi les plus significatives.
En ce qui concerne le soutien au développement économique, la région exercera une mission de coordination des interventions économiques sur le territoire régional et recevra les moyens financiers que l'Etat y consacre.
L'état ne conservera qu'un rôle institutionnel vis à vis des institutions communautaires et un devoir d'alerte, voire d'intervention subsidiaire, en cas de difficultés particulières des entreprises. Le rôle de la région sera également renforcé en matière de formation professionnelle et bénéficiera du transfert dans la quasi totalité des outils financiers qui y concourent.
Dans le domaine des infrastructures, les départements bénéficieront d'un transfert des routes qui, par leurs caractéristiques, peuvent ne pas relever de la voirie nationale, soit 20 000 km. Le projet de loi transfère également aux collectivités territoriales les aérodromes, à l'exception des grandes plates-formes d'intérêt national ou encore des ports qui dépendent actuellement de l'Etat.
Pour faciliter l'utilisation des fonds structurels européens, l'Etat pourra confier, à titre expérimental, aux collectivités territoriales qui le demanderont, en priorité les régions, la responsabilité de la gestion de ces fonds.
Le projet de loi conforte par ailleurs le rôle du département en matière d'action sociale et permet une délégation de compétences aux structures intercommunales et aux départements en matière de logement social. Les régions pourront participer aux instances de décision en matière d'organisation de l'offre de soins et participer au financement d'équipements sanitaires.
Dans le domaine de l'éducation, les collectivités territoriales seront mieux associées au processus de décision tant au plan national qu'au plan local et bénéficieront de nouvelles mesures favorisant leur implication dans la gestion des moyens correspondant aux compétences déjà décentralisées en matière de gestion immobilière. Enfin en matière de gestion du patrimoine, les collectivités territoriales pourront s'investir davantage en se voyant transférer la propriété et l'entretien de certains monuments historiques.
Conformément aux principes fixés par la Constitution, ces transferts de compétences seront accompagnés des transferts des moyens humains et financiers correspondants. Les fonctionnaires de l'Etat, qui seront affectés dans des collectivités territoriales auront vocation à devenir des fonctionnaires territoriaux mais pourront conserver, s'ils le souhaitent, leur statut de fonctionnaires d'Etat. Les compensations financières résulteront essentiellement, afin de préserver l'autonomie financière des collectivités territoriales, de transferts de ressources fiscales jusque là attribuées à l'Etat, en particulier une part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP).
Loin de remettre en cause le rôle de l'Etat, l'approfondissement de la décentralisation lui permettra de mieux exercer ses missions essentielles, non seulement ses missions régaliennes traditionnelles mais aussi ses missions qui concourent à la cohésion nationale en veillant à la solidarité entre les citoyens et entre les territoires. Il revient en particulier à l'Etat de veiller au respect de la loi : le contrôle de légalité sera prochainement modernisé pour le rendre plus efficace.
Enfin, le Gouvernement proposera au Parlement d'adopter un dispositif d'évaluation des politiques locales. Il est aussi attentif aux missions des chambres régionales des comptes dans le contrôle financier des collectivités territoriales.
II. Renforcées dans leurs missions au plan interne, les collectivités territoriales françaises seront mieux armées dans leurs actions de coopération avec les collectivités locales roumaines.
Au fil du temps, un grand nombre de communes, d'agglomérations, de départements et de régions françaises ont mené des actions exemplaires. Nous pensons que la coopération décentralisée doit permettre d'engager des initiatives nouvelles, que ce soit pour la paix, pour le développement ou encore la culture. Il faut que nos collectivités locales, en France comme en Roumanie, soient ambitieuses, aient des programmes et des projets qu'elles peuvent développer ensemble.
De ce point de vue, la coopération franco-roumaine apparaît active et diversifiée. Si elle s'est véritablement développée à partir des années 90, je veux rappeler que des jumelages existaient auparavant, tels que Poitiers avec Iasi depuis 1969 ou Argenteuil avec Hunedoara depuis 1973. On dénombre au total environ 600 collectivités locales françaises intervenant plus ou moins régulièrement en Roumanie. Aujourd'hui, environ 200 partenariats existent : la Roumanie a ainsi une place privilégiée dans la coopération décentralisée française en Europe centrale. Il est remarquable de constater que les petites communes françaises qui s'étaient lancées dès 1989, dans le sillage d'opérations villages Roumains, dans des relations avec des villages roumains sont aujourd'hui relayées par les grandes villes, les départements et les régions français.
Je citerai notamment l'action du Conseil général de l'Aveyron, présidé par Jean Puech, qui met en uvre l'un des plus importants programmes menés par une collectivité territoriale en Roumanie, lequel a débuté en 1992 à travers l'association de coopération Aveyron-Tulcea.
Ne pouvant évoquer les très nombreux projets en cours, je me bornerais à mentionner quelques autres exemples significatifs de l'action des collectivités territoriales françaises. Le Conseil général de la Marne est engagé depuis 1992 avec le judet de Neamt. Le Conseil général de Savoie intervient depuis 1994 auprès du département d'Arges. Le Conseil général de Charente Maritime conduit depuis 1992 un partenariat avec le judet de Calarasi pour la formation des élus et des cadres. La ville de Mulhouse est jumelée avec la ville de Timisoara depuis 1991 et ses actions de coopération concernant les services municipaux et la mise en place d'un contrat social d'insertion, la coopération médicale et les échanges entre lycées. La communauté urbaine de Brest est engagée dans un partenariat avec la ville de Constantza dans des domaines variés tels que la formation professionnelle, la gestion urbaine, le tourisme ainsi que les échanges scolaires et culturels.
Le forum de Sinaia a mis en évidence les très nombreux autres projets qui font la richesse de cette coopération décentralisée entre la France et la Roumanie.
Outre nos liens historiques, plusieurs facteurs contribuent à cette coopération active : l'élan de solidarité spontanée des collectivités locales françaises au lendemain de la révolution roumaine, la proximité géographique mais aussi la francophonie.
Je crois qu'il n'est pas inutile de relever qu'après être intervenues massivement dans le domaine humanitaire au début des années 90, les collectivités territoriales françaises ont su faire varier le champ de leurs interventions. Celles-ci se déploient désormais dans plusieurs domaines : le secteur médico-social, l'enseignement, la culture et la jeunesse, l'aide aux communes.
Je veux aussi relever l'investissement des associations de collectivités locales dans nos deux pays en faveur de la coopération : leurs initiatives sont de nature à faire augmenter le nombre des collectivités locales françaises moyennes ou grandes présentes en Roumanie. Leur décision d'exprimer, au cours de ces assises, leur volonté commune de renforcer davantage encore leur coopération doit être soulignée.
Avant le forum de Sinaia, deux forums de la coopération décentralisée ont été organisés avec l'appui de l'ambassade de France à Bucarest : l'un à Timisoara et l'autre à Iasi respectivement en juillet et en septembre 2002. Ces manifestations auxquelles ont participé des collectivités territoriales françaises et roumaines, ainsi que des entreprises et des représentants des milieux associatifs, ont permis de confirmer les liens existants et de déterminer des axes de coopération pour l'avenir.
En octobre 2002, à Paris, les Premiers Ministres roumains et français ont décidé que des assises de la coopération décentralisée franco-roumaine seraient organisées en France en 2003. Je veux saluer la part très importante prise par l'Assemblée des départements de France, présidée par Jean Puech, et par l'Union nationale des Conseils de Judets de Roumanie, que préside Mircea COSMA, dans son organisation. Un comité de pilotage a été placée sous la présidence de François FORTASSIN, Président du Conseil général des Hautes Pyrénées et président de la commission de la coopération décentralisée de l'Assemblée des départements de France.
Le forum de Sinaia a bien auguré des travaux qui vont se tenir à Villefranche de Rouergue. Il a, en effet, rencontré un plein succès avec la présence de plus de 350 participants français et roumains, élus locaux et cadres territoriaux. Il a permis d'aborder les thématiques les plus diverses qui sont au cur des préoccupations de nos collectivités, comme le développement rural, la protection de l'enfance, le développement économique local ou encore l'environnement et l'efficacité énergétique.
Les ateliers organisés dans le cadre du forum de Sinaia ont ainsi mis en évidence les différents besoins pouvant faire l'objet d'un investissement utile au titre de la coopération décentralisée franco-roumaine. Certains thèmes, déjà débattus à Sinaia, comme le développement local ou la protection de l'enfance, pourront être approfondis au cours de ces deux journées. D'autres thèmes essentiels, comme celui de l'Europe et les fonds structurels seront abordés.
A travers ces discussions, nos partenaires roumains pourront mieux prendre la mesure des formes de coopération susceptibles d'être apportées par des collectivités locales françaises. Il s'agit, en effet, de parvenir à une meilleure adéquation entre d'une part les besoins et les priorités exprimées par les collectivités locales roumaines et, d'autre part, les disponibilités et l'expérience des collectivités locales françaises dans certains domaines.
Je forme le vu que les débats qui vont se dérouler maintenant, contribuent à mobiliser mieux encore les collectivités locales roumaines et françaises dans leur ambitieuse démarche de coopération.
(source http://www.departement.com, le 24 mars 2004)