Déclaration de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, notamment l'assainissement des comptes, la politique familiale, le système de retraite, l'indemnisation des victimes de maladies professionnelles et d'accidents du travail et le système de santé, au Sénat le 14 novembre 2000.

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Circonstance : Présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 au Sénat le 14 novembre 2000

Texte intégral

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale constitue un temps fort de l'action du gouvernement et de la discussion parlementaire, parce qu'il touche à la vie quotidienne des Français, et représente des enjeux sociaux, économiques et financiers de premier plan.
Son passage au Sénat, en première lecture, après son examen par l'Assemblée, va permettre des échanges approfondis sur les principales mesures qu'il contient. Et je sais combien la contribution des sénateurs est importante dans le travail parlementaire.
Jusqu'à une période récente, vous en conviendrez, les problèmes de sécurité sociale ont été traités dans l'urgence financière. La situation du régime général - le trop célèbre " trou " de la sécurité sociale - a conduit au fil des années les responsables publics à élaborer de nombreux plans de redressement.
Les déficits furent importants et trouvent leur origine d'abord dans le recul de la croissance dans la première moitié des années 90. Des décisions macro économiques inadaptées, entre 1993 et 1997, n'ont fait qu'approfondir la crise en croyant y porter remède : je veux parler des hausses massives et successives de prélèvements qui ont frappé les ménages, y compris les plus modestes, qui ont handicapé le pouvoir d'achat, freiné la consommation et accru le chômage.
Le Gouvernement a voulu dès 1997 inverser cette tendance. L'un des succès de ce gouvernement est d'avoir inversé cette spirale, d'avoir redonné confiance aux Français.
Depuis 1997, l'économie française est sur un rythme de croissance moyen de 3 % et vous le savez, les prévisions économiques du Gouvernement pour 2001 prévoient une croissance de 3,3 %. Depuis 1997, le chômage a reculé et 870 000 personnes ont retrouvé un emploi. Jamais un recul aussi important n'avait été observé.
Ce résultat essentiel pour nos concitoyens a été obtenu par le redémarrage de la croissance, mais aussi par la réduction négociée du temps de travail, je le souligne, ainsi que par les emplois-jeunes.
Nous sommes donc sortis de l'urgence financière. Après les lourds déficits de 1996 (54 MdsF) et de1997 (33 MdsF), nous avons renoué avec l'équilibre des comptes de la sécurité sociale dès 1999. Ce bon résultat, nous la consolidons en 2000 et davantage encore pour 2001.
Notre sécurité sociale sera en excédent de 16,2 MdsF en 2000 et de 18,9 MdsF en 2001, selon les prévisions du projet de loi qui vous est soumis. Pour l'ensemble des administrations sociales, l'excédent atteindra 0,5 % de la richesse nationale en 2001. Les comptes sociaux contribuent désormais à la maîtrise des déficits et au désendettement du pays.
Mais l'assainissement des comptes n'est pas une fin en soi. C'est un moyen permettant d'améliorer notre système de protection sociale au bénéfice de nos concitoyens.
Dans cet esprit, le projet de loi qui vous est proposé comporte des mesures favorables aux familles et aux retraités ; il améliore sur plusieurs points importants la couverture maladie.
Il approfondit aussi la réforme du financement de la sécurité sociale que nous avons conduite, à travers la diversification de ses ressources et la réforme de la CSG.
Enfin, plusieurs dispositions de ce projet de loi amplifient la politique de réformes structurelles qui a été engagée et qui commence à porter ses fruits.
Les choix que nous avons faits seront discutés et c'est bien normal ; il en va ainsi du jeu démocratique. Mais je pense que nous pourrons nous accorder sur les grandes priorités.
Nous ne pourrons pas aborder lors des prochains jours l'ensemble des questions qui nous intéressent, je pense notamment à la politique de santé : le débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale est enserré dans un cadre constitutionnel et organique déterminé en 1996.Nous pouvons en souligner les insuffisances ; le Gouvernement s'attache à corriger les plus évidentes.
C'est ainsi que nous prévoyons d'organiser un débat annuel au Parlement sur la politique de santé, disposition que nous vous présenterons dans le cadre du projet de loi de modernisation du système de santé.
Mais cette année encore, nous devons nous plier à l'exercice tel qu'il a été conçu par nos prédécesseurs.
Mieux répondre aux aspirations des Français, améliorer notre protection sociale, renforcer la qualité de notre système de santé, amplifier les réformes structurelles, tout en préservant l'équilibre, tels sont les principaux axes de la politique que je compte conduire à travers ce projet de loi et au-delà.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, que j'ai l'honneur de vous présenter, comporte de nouvelles avancées sociales au profit des familles et des retraités et des accidentés du travail, qui bénéficieront ainsi, grâce à la solidarité nationale, des fruits de la croissance retrouvée.
1 Nous vous proposons de mieux aider les familles en renforçant l'aide à la petite enfance et l'aide au logement
Les marges de manuvre retrouvées du fait de l'excèdent de la branche famille nous permettent de mener une politique familiale de grande ampleur. Cette politique repose sur trois principes : la concertation, l'identification des priorités et leur financement.
Car le Gouvernement entend bien faire porter l'effort sur des priorités fortes et dégager les financements appropriés. Cela n'a pas toujours été le cas.
Sans revenir sur les principales mesures prises par le Gouvernement ces dernières années, je voudrais souligner que les actions décidées en faveur des familles à la Conférence de la famille du 15 juin dernier montrent la volonté du Gouvernement d'accélérer la rénovation de la politique familiale et de mieux prendre en compte les préoccupations des familles.
Un effort financier de grande ampleur - plus de 10 MdsF - sera réalisé, en cherchant à apporter des réponses aux problèmes concrets que se posent souvent les familles.
Nous ne dispersons pas l'effort public, nous le concentrons bien au contraire là où sont les besoins. Deux axes principaux ont ainsi été privilégiés : les mesures en faveur de la petite enfance et les aides au logement.
Le projet de loi comprend ainsi plusieurs avancées important es. Je pense notamment à la création de l'allocation de présence parentale qui permettra aux parents d'enfants atteints de maladies très graves de demeurer à leurs côtés ; je pense à la création d'un fonds d'investissement pour les crèches, doté d'1,5 MdF, qui viendra soutenir les initiatives prises dans ce domaine, notamment par les collectivités locales. Je pense enfin à la réforme de l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée, qui améliore, dans un souci de justice sociale, l'aide apportée aux familles modestes.
Par ailleurs, les aides au logement, qui sont financées à la fois par l'Etat et par la Sécurité Sociale, seront réformées, simplifiées et améliorées, permettant ainsi de donner une portée pratique à ce droit au logement qui est une des priorités de l'action du Gouvernement.
2. Nous voulons associer les retraités aux fruits de la croissance et préparer l'avenir des régimes de retraite
Associer les retraités aux fruits de la croissance, en premier lieu.
Pour 2001, le Gouvernement vous propose de revaloriser les pensions de 2,2 %, alors que l'inflation prévisionnelle est de 1,2 %. Ce coup de pouce porte à 1,3 % le gain de pouvoir d'achat des retraités par rapport à l'inflation depuis 1997.
J'ai annoncé au cours du débat en première lecture à l'Assemblée Nationale que le minimum vieillesse serait revalorisé dans les mêmes proportions, c'est-à-dire 2,2 %.
Par ailleurs, pour les retraités les plus modestes qui ne sont pas imposables à l'impôt sur le revenu, le Gouvernement souhaite leur accorder un gain de pouvoir d'achat supplémentaire et à cette fin, de supprimer la contribution au remboursement de la dette sociale (0,5 %) frappant les petites retraites.Cette mesure devrait concerner près de 5 millions de retraités.
Préparer l'avenir de nos systèmes de retraite, en second lieu
Conformément à ce que le Premier ministre a annoncé en mars 1999 le présent projet de loi comporte plusieurs dispositions destinées à accroître les ressources du fonds de réserve des retraites qui doit permettre de mieux faire face aux conséquences des évolutions démographiques de long terme, afin de consolider les régimes de retraites par répartition qui seuls sont à même d'assurer la solidarité entre les générations.
Créé en 1998, le fonds de réserve s'est vu affecter des ressources nouvelles dès 1999 :
- les excédents de la CNAV et du fonds de solidarité vieillesse,
- la moitié du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine,
- les contributions des Caisses d'Epargne et de la Caisse des Dépôts et Consignations,
- auxquels s'ajoute la majeure partie du produit de la vente des licences de téléphonie mobile de troisième génération.
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- Fin 2001, le fonds de réserve disposera de plus de 50 milliards de francs. Les ressources du fonds s'accroissent donc conformément aux engagements pris par le Gouvernement.
Avec les sources de financement actuelles, le fonds de réserve devrait disposer de 1.000 milliards de francs en 2020, dont 300 milliards proviendront des intérêts financiers. Cette somme correspond à la moitié des déficits prévisionnels des régimes de retraite entre 2020 et 2040.
Il importe désormais que nous réfléchissions collectivement aux règles d'organisation et de placement du fonds de réserve. Le fonds est appelé à gérer l'argent de nos concitoyens ; il devra le faire dans la transparence en ayant le souci de la bonne utilisation des deniers publics.
Des dispositions en ce sens figureront dans le projet de loi de modernisation sociale. Sur ces questions essentielles, vos réflexions nous seront, j'en suis sûre, très précieuses.
Enfin, je voudrais souligner ici la qualité et l'intérêt des travaux que le Conseil d'orientation des retraites a engagés. Le conseil mène une concertation active avec les élus et les partenaires sociaux et explore avec eux différents scénarios et différentes perspectives financières, compte tenu de l'évolution, heureusement positive, de la croissance et de l'emploi.
Le Conseil d'orientation des retraites fera des propositions sur la base des consultations qu'il mène pour tous les régimes avec les partenaires sociaux et le Gouvernement prendra des décisions.
Notre volonté est de défendre les retraites des Français et, pour cela, de garantir les régimes par répartition, gages de la solidarité entre les générations. C'est dans cette perspective qu'il faut replacer l'abrogation de la loi Thomas à laquelle a procédé l'Assemblée en première lecture.
Préparer l'avenir, c'est aussi proposer une réforme de la prestation dépendance. Le Gouvernement s'est prononcé pour la création d'une prestation autonomie, qui corrige les défauts de la PSD. Cela permettra d'aborder dans les meilleures conditions cette autre question posée par le vieillissement.
Nous travaillons ainsi sur tous les aspects de la question posée par le vieillissement de la population : mieux prendre en charge les personnes âgées dépendantes, consolider les retraites par répartition et faire de la retraite un âge heureux de la vie.
3. Nous mettons en place une meilleure indemnisation des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles
Ce gouvernement a conduit un important travail pour améliorer la reconnaissance et la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles. Je pense au raccourcissement des délais de réponse des caisses, à la réforme du tableau des maladies professionnelles, aux garanties sur les délais de réponse aux victimes.
Nous connaissons tous les souffrances qu'endurent les victimes de l'amiante et le drame que vivent ceux qui leur sont proches. Nous avons déjà pris un certain nombre de mesures particulières en faveur de ces victimes, comme le dispositif de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante.
Cette année, le Gouvernement vous propose d'aller plus loin en adoptant une réforme décisive. Au nom de la solidarité nationale, il nous apparaît fondamental que la collectivité accorde aux victimes de l'amiante une juste réparation.
Le gouvernement a donc décidé et vous propose de créer un fonds d'indemnisation, financé par les employeurs, via la branche accidents du travail, et par le budget de l'Etat. Ce fonds sera doté de 2 MdsF dès 2001.
Mais le drame de l'amiante a également montré les limites de la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles en matière d'indemnisation ainsi que la lourdeur des procédures.
C'est pourquoi le Gouvernement a demandé au président de la commission spécialisée du Conseil supérieur de prévention des risques professionnels, en charge des maladies professionnelles, de lancer dans les plus brefs délais une réflexion large sur la réparation des risques professionnels, en concertation étroite avec l'ensemble des partenaires concernés.
4. Nous voulons améliorer encore la qualité de notre système de santé tout en maîtrisant correctement l'évolution des dépenses.
L'objectif pour 2001 qui vous est proposé a été fixé en ayant pour but de renforcer l'efficacité de notre système de santé, en tenant compte à la fois du cadre économique et financier de la Nation et de l'impact des politiques structurelles que nous avons lancées.
Le gouvernement a retenu un objectif national de dépenses d'assurance maladie 2001 de 693,3 MdsF, en progression de 3,5 % par rapport à 2000.
Cette progression autorisée est plus rapide que celle qui vous avait été proposée pour 2000. Elle est cohérente avec la situation économique et financière générale de notre pays et permet de financer de nouvelles avancées dans la qualité de notre système de santé et de la couverture maladie.
Quels sont les principaux objectifs pour 2001 que nous vous proposons ?
Tout d'abord, répondre aux priorités de santé publique. Je pense, notamment, au plan " cancer " et au plan " greffes ". Je souhaite, en particulier, que l'effort en faveur du dépistage systématique de certains cancers à risques soit amplifié.
Nous souhaitons également répondre efficacement aux progrès de la connaissance médicale, notamment en matière de réduction des risques sanitaires. Je pense en particulier à la maladie de Creutzfeld-Jacob et à son nouveau variant.
Un effort particulier sera fait, comme les années précédentes, en faveur des établissements médico-sociaux, pour accompagner le développement du nombre de places pour les personnes handicapées et la médicalisation des établissements pour personnes âgées dépendantes. Ce secteur verra ses crédits progresser de 5,8 %.
Les budgets hospitaliers progresseront de 3,3 % au lieu de 2 % en 2001. C'est ce même taux qui est retenu pour les cliniques privées, marquant en cela le souci du Gouvernement de répondre aux questions qui se pose aujourd'hui dans l'hospitalisation privée.
Les soins de ville, enfin, pourront progresser de 3 % au lieu de 2 % en 2000. Cet objectif, les caisses d'assurance maladie et les professionnels de santé devront le gérer de façon responsable, en s'inscrivant dans la volonté d'infléchir durablement les tendances en matière de dépenses de ville. Les outils structurels de maîtrise des dépenses et d'amélioration de la qualité des soins existent, Il faut qu'ils s'en saisissent.
Nous avons également fixé l'objectif pour 2001 en tenant compte de l'évolution des dépenses telle qu'elle est observée cette année.
En 2000, le dépassement de l'ONDAM devrait atteindre 1,6 % par rapport à l'objectif fixé de 658,3 MdsF, en prenant en compte les reports de dépenses de la fin 1999. Le dépassement pour 2000 s'élèvera donc à 11 MdsF.
Au total, les dépenses d'assurance maladie devraient évoluer cette année à un rythme un peu supérieur à 4 %.
Quelles sont les causes de ce dépassement ?
Ce sont les soins délivrés en ville qui sont, cette année encore, responsables du dépassement : le médicament à hauteur de 6,2 MdsF, les honoraires de certaines professions de ville pour 3,8 MdsF, les indemnités journalières pour 1,7 MdF et les divers produits médicaux, ceux inscrits au TIPS, pour 1,6 MdF.
Pour autant, je voudrais souligner que la part de nos dépenses de santé dans la richesse nationale est restée stable, depuis 1997 autour de 10 % du PIB, alors qu'elle continuait d'augmenter chez certains de nos partenaires, qu'il s'agisse des Etats-Unis, de l'Allemagne ou du Royaume-Uni.
Je suis attachée à ce que notre système de santé soit préservé et qu'il puisse se réformer dans la concertation. Parce qu'il conjugue une grande liberté laissée aux acteurs, une grande exigence de solidarité, une recherche permanente de la qualité des soins, c'est sans doute un des meilleurs systèmes au monde.
A la lueur des expériences étrangères, nous savons d'ailleurs qu'il n'existe pas de système permettant d'assurer une maîtrise parfaite des dépenses, à l'exception peut-être du système anglais, mais à quel prix ! Dans ce dernier pays, la maîtrise systématique des dépenses avait d'ailleurs conduit ces dernières années à de tels rationnements des soins que le Gouvernement travailliste de Tony BLAIR s'efforce à l'heure actuelle de moderniser en profondeur ce système.
Pour autant, la maîtrise des dépenses de santé est une nécessité et elle suppose la responsabilité de chacun des acteurs, qu'il s'agisse de l'Etat au premier chef, mais aussi des caisses d'assurance maladie, des praticiens libéraux et des malades eux-mêmes.
Il me paraît, à cet égard, plus que jamais nécessaire que les objectifs votés par le Parlement soient respectés. C'est en maîtrisant mieux les dépenses que nous trouverons les marges de manuvre permettant de couvrir de nouveaux besoins et d'améliorer le niveau de protection de nos concitoyens. Chaque franc dépensé doit l'être à bon escients Les dépenses qui ne répondent pas aux besoins réels, ce sont des cotisations en trop ou des dépenses justifiées en moins.
Il nous faut donc poursuivre l'effort de longue haleine entrepris en matière de réformes structurelles.
C'est tout d'abord le cas à l'hôpital, dans lequel nous menons une politique active de recomposition du tissu hospitalier autour de trois priorités : la réduction des inégalités dans l'accès aux soins, l'adaptation de l'offre de soins aux besoins de la population et la promotion de la qualité et la sécurité des soins.
En particulier, la réflexion pour fonder la tarification des établissements de santé sur les pathologies traitées est engagée, à la suite des dispositions que vous avez votées l'an dernier. Nous devons disposer de données d'activité hospitalière fiables et rapidement disponibles. A cette fin, nous vous proposons de créer une agence technique de l'information sur l'hospitalisation.
En matière de sécurité sanitaire, des mesures importantes seront prises en 2001 pour améliorer la qualité des procédures de désinfection et de stérilisation et développer l'utilisation de dispositifs médicaux à usage unique.
Le gouvernement accompagne de manière significative ce mouvement de recomposition de l'offre hospitalière par le fonds de modernisation sociale des établissements de santé (FMES) dont la création est proposée dans le projet de loi.
Les réformes structurelles doivent également s'appliquer à la dépense de médicaments.
Ces dépenses progressent de 6 à 7 % en 2000, soit une évolution très proche de celle de l'année précédente. La France ne constitue pas, dans ce domaine, une exception puisque la plupart des pays occidentaux connaissent une évolution encore plus rapide de ces dépenses, mais le niveau de notre consommation médicale est plus élevé que dans nombre de pays voisins.
Plusieurs réformes engagées porteront leurs fruits dès 2001 et plus encore les années suivantes.
Le développement des génériques s'amorce. Nous ferons dans les prochains jours avec les pharmaciens un bilan précis de la progression des médicaments génériques et des économies dont la sécurité sociale a bénéficié.
L'année 2000 marque une nouvelle étape, avec l'achèvement de la procédure de réévaluation des médicaments. La Commission de la transparence a examiné l'efficacité médicale de près de 2.663 spécialités, soit plus des deux tiers des spécialités pharmaceutiques françaises.
Nous avons, sans tarder, tiré les conséquences de ces travaux en ajustant le taux de remboursement de certaines spécialités. Parallèlement, le Comité économique a conduit avec les laboratoires concernés des négociations pour faire baisser les prix des spécialités dont le SMR a été jugé insuffisant.
Les spécialités dont le service médical rendu a été jugé insuffisant ne seront, à terme, plus remboursées. Ceci ne doit cependant pas se faire dans la précipitation. Il importe de donner aux patients, aux prescripteurs mais aussi aux laboratoires, le temps de s'adapter aux changements qui s'annoncent. A l'issue d'une période transitoire de trois ans (2000, 2001. 2002), les médicaments à SMR insuffisant sortiront du remboursement.
Certains articles du projet de loi accompagnent cette évolution, notamment en facilitant le recours à la publicité pour les médicaments qui ne seront plus pris en charge par l'assurance maladie.
Il faut aussi apporter aux médecins une autre information que celle dont ils disposent aujourd'hui et qui, nous le savons tous, est essentiellement diffusée par l'industrie pharmaceutique. Il suffit pour s'en convaincre, de rappeler que les dépenses de promotion pharmaceutique des laboratoires dépassent 12 MdsF.
Aujourd'hui nous souhaitons apporter non pas une information d'Etat, mais une information neutre, validée scientifiquement, sur le bon usage du médicament. Un groupe confraternel d'information des prescripteurs sera prochainement mis en place. Dès cette année, nous lui donnerons les moyens de fonctionner. A cette fin, nous vous proposons de créer un fonds de promotion de l'information médicale alimenté par une fraction de la taxe sur la promotion pharmaceutique.
Enfin, nous vous proposons de modifier la contribution de l'industrie pharmaceutique que l'on appelle la " clause de sauvegarde ". Son mode de calcul a aujourd'hui besoin d'être revu, car il comporte des effets de seuil peu lisibles. L'Assemblée Nationale a contribué à améliorer encore la lisibilité et l'efficacité de cette clause.
Comme les gestionnaires de la CNAM l'ont souhaité, la réalisation des dépenses des professionnels exerçant en ville repose depuis la LFSS 2000 sur une large délégation de gestion aux caisses d'assurance maladie. Elles doivent ainsi gérer, de façon concertée et négociée, les dépenses d'honoraires, de biologie et de transport sanitaire. Dans ces secteurs aussi, la maîtrise structurelle doit s'appliquer.
Un amendement adopté par l'Assemblée est venu améliorer la rédaction de la loi ; je ne peux que m'en féliciter. Il est normal que ce dispositif se rôde et que des modifications y soient apportées, lorsqu'elles se révèlent utiles.
Les professionnels demandaient la possibilité de s'engager avec les caisses sur des actions permettant de sortir d'une régulation qui serait purement financière. Nous leur avons donné de nombreux outils pour ce faire. Il faut maintenant que ces mécanismes fonctionnent pleinement.
Il en va ainsi des réseaux et plus largement des actions améliorant la qualité des soins. Le fonds d'aide à la qualité des soins de ville, créé à cet effet, a commencé à fonctionner.
Parallèlement à la concrétisation des réformes structurelles, nous voulons poursuivre une politique déterminée d'amélioration de la couverture maladie de nos concitoyens.
La couverture maladie universelle : d'ores et déjà, plus de 4,7 millions de personnes ont pu avoir accès à ce nouveau droit, soit beaucoup plus que les 2,8 millions de l'ancienne aide médicale. Je me félicite à ce propos de la mobilisation de l'ensemble des acteurs : professionnels de santé, caisses d'assurance maladie, collectivités locales, organismes de couverture complémentaire et associations humanitaires.
A l'Assemblée Nationale, j'ai annoncé le relèvement du seuil à 3 600 F et le prolongement des droits des anciens bénéficiaires de l'aide médicale jusqu'à la fin juin 2001 au lieu du 31 octobre 2000.
Cette disposition permettra d'étendre la CMU à 300 000 personnes supplémentaires et de permettre de gérer les sorties de l'ancienne aide médicale.
Nous avons dégagé 10 MdsF pour l'hôpital sur trois ans, dont 2 MdsF dès cette année pour répondre aux remplacements. Nous améliorons l'équipement sanitaire de la France en appareils d'imagerie à résonance magnétique (IRM).
Nous favorisons la vaccination des personnes âgées contre la grippe, nous facilitons l'accès des femmes à la contraception, nous développons la prise en charge des prothèses auditives pour les sourds et des lunettes (notamment pour les 16-18 ans).
Nous mettons en uvre un ambitieux programme de lutte contre le cancer qui propose pour la première fois une approche intégrée organisant la mobilisation de tous les acteurs, de la recherche à la prise en charge des personnes malades et de leurs familles. Ce plan représente un engagement de 1,8 MdsF.
Nous améliorons par ailleurs la nomenclature des actes des professionnels exerçant en ville : mieux adaptée aux évolutions de la pratique, elle autorise le remboursement de nouveaux actes. C'est ainsi que nous avons travaillé avec les infirmières dont la nomenclature a été revue à trois reprises.
L'introduction du PSI, voulu par les caisses et les organisations professionnelles, sous réserve de certaines modalités, constitue un progrès pour les personnes dépendantes en renforçant l'autonomie des professionnels. De même, pour les masseurs kinésithérapeutes, un grand pas a été franchi avec la publication de la nouvelle nomenclature, très attendue par la profession.
Sur les soins dentaires, dont l'attente des conclusions de Michel Yahiel, deux nouveaux actes vont être admis au remboursement anticipant sur la refonte complète de la prise en charge.
Enfin, les non salariés non agricoles bénéficient d'une amélioration de la couverture maladie. Il y a aura donc désormais un socle commun entre le régime général, les régimes des exploitants agricoles et des salariés agricoles et ceux des professions indépendantes.
5. Nous entendons franchir une nouvelle étape en matière de réforme du financement de la sécurité sociale.
Le projet de loi qui vous est soumis comporte une mesure importante d'allègement de la CSG et du CRDS pour les ménages modestes.
Le Gouvernement vous propose en effet d'instituer une ristourne dégressive de CSG et de CRDS, comprise en 1 et 1,3 fois le SMIC, ce dernier seuil ayant été porté à 1,4 fois par amendement.
Cette mesure se déploiera au cours des trois prochaines années et représentera, au terme de ces trois ans, l'équivalent d'un 13 ème mois pour les smicards.
A travers cette mesure le Gouvernement poursuit trois objectifs :
- Tout d'abord, réduire l'écart entre salaire brut et salaire net. C'est une préoccupation que partagent beaucoup d'entre vous et sans doute pas seulement dans la majorité. En 2003. Le SMIC net sera relevé de 540 F par mois.
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- Ensuite, accroître le pouvoir d'achat, beaucoup d'inexactitudes sont entendues sur ce sujet. Au total depuis 1997, le pouvoir d'achat par tête s'est accru de 1,1 % par an en moyenne. En particulier, la suppression des 4,8 points de cotisations maladies auxquels se sont substitué 4,1 points de CSG a permis de distribuer du pouvoir d'achat aux salariés. Au total, depuis 1997, le SMIC net s'est déjà accru de l'équivalent d'un 13 ème mois. Avec la mesure proposée ici, c'est donc un avantage du même ordre en terme de gain de pouvoir d'achat qui sera consentis aux smicards d'ici 2003.
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- Enfin, troisième objectif, lutter contre les " trappes à inactivité ". Cette mesure renforce en effet l'attrait du revenu d'activité par rapport aux minima sociaux et complète ainsi une série de mesures déjà prises par le Gouvernement pour rendre financièrement moins pénalisant le retour à l'emploi, qu'il S'agisse de la réforme des dégrèvements de taxe d'habitation, de la réforme des aides au logement ou de la mise en place de l'intéressement des Rmistes, qui permet le cumul d'un revenu d'activité et de l'allocation pendant 1 an.
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- En conclusion, à travers ces trois objectifs essentiels, cette mesure vise, vous l'aurez compris, un seul but : l'emploi.
Nous pouvons nous réjouir de la poursuite de l'assainissement financier de la Sécurité sociale. Le redressement des comptes est d'abord le fruit des réformes structurelles que nous avons patiemment engagées, et qui doivent se poursuivre. C'est ce qui nous permettra de continuer à faire progresser les acquis sociaux et, par la mise en réserve d'une partie de ces excédents, de garantir l'avenir de notre système de retraite et au-delà de notre protection sociale.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 16 novembre 2000)