Texte intégral
C'est avec un grand plaisir que je m'exprime pour la première fois devant vous, en tant que secrétaire d'Etat chargé des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et de la consommation.
Il était important que nous nous rencontrions, même si je n'ai pas attendu ce jour pour nouer des contacts fructueux avec le Président Griset, les membres du bureau de l'APCM et certains présidents que j'ai pu rencontrer au cours de mes premiers déplacements.
Je salue également les représentants de l'artisanat marocain, polonais et turc. Leur présence témoigne de l'action des chambres de métiers en matière de coopération.
Je vous remercie, Monsieur le Président, pour les mots aimables que vous avez eus et de la confiance que vous placez en moi. J'y vois le signe d'une volonté de travailler ensemble et je ne peux que m'en réjouir.
Mes nouvelles responsabilités ministérielles me confirment la place et le rôle des artisans dans l'économie locale et nationale et dans la vie quotidienne de nos concitoyens, contribution que mes fonctions d'élu m'ont permis depuis longtemps d'apprécier. Je mesure ainsi la responsabilité que le Premier ministre m'a confiée.
Avec une croissance de 3 %, une baisse continue du chômage, une reprise soutenue de la consommation, le contexte est favorable à vos entreprises. Pour autant, je connais vos préoccupations et j'entends y répondre. C'est pour cela que dès mon arrivée au 80 rue de Lille, j'ai proposé au Premier ministre qui l'a accepté, et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui l'a annoncé, de mener une vaste réflexion sur l'avenir de l'artisanat et, plus globalement, sur la petite entreprise.
Je constate avec satisfaction qu'avec le projet politique des chambres de métiers pour l'artisanat, nos chemins se rejoignent -ce n'est pas un hasard-, et je m'en félicite. Vos contributions enrichiront la réflexion sur le projet de loi d'orientation pour l'artisanat et la petite entreprise qui permettra de dégager les voies et moyens pour conforter vos entreprises et développer vos métiers.
L'idée force qui structure vos travaux est un renforcement de l'identité de l'artisanat.
Vous avez raison : lorsque l'on réussit, on en est fier et on peut le dire. On doit le dire : ce n'est pas rendre service à l'artisanat que de le présenter comme un secteur difficile.
Pour autant, et nous en sommes je crois également d'accord, cette identité artisanale doit être non pas l'expression d'une attitude passéiste mais la valorisation de spécificités de modes de production et de fabrication fondés sur des savoir-faire enrichis au fil du temps, et s'inscrivant de plain pied dans l'économie et la société d'aujourd'hui. Le secteur des métiers n'est pas une vitrine, ce sont des entreprises.
Vous êtes attaché à la transmission des savoir-faire par la voie de l'apprentissage, à des rapports de proximité avec le consommateur fondés sur la qualité, la confiance, et au rôle social que vous assurez dans les villes et les campagnes.
Vos atouts vous ont permis d'assurer la pérennité de vos 820 000 entreprises. Ce constat positif ne doit cependant pas conduire à méconnaître les difficultés que vous rencontrez.
La plus actuelle de vos préoccupations est le besoin de recrutement de la part de vos entreprises.
Je tiens à redire, devant vous, que la loi sur les 35 heures n'est pas à l'origine de la pénurie de recrutement que vous subissez notamment dans le secteur de l'alimentaire et du bâtiment. Cette pénurie de main d'uvre qualifiée est due à des facteurs multiples, au rang desquels sans doute une anticipation trop timide de la vigueur de la reprise qui a pour conséquence une insuffisance de l'offre de formation.
En faisant ce constat, je ne sous-estime pas votre investissement pour les formations initiale ou continue qui sont, vous l'avez compris depuis longtemps, un atout pour la création et la pérennité des entreprises.
Le développement de la filière de formation artisanale est clairement réaffirmé dans le projet politique que vous m'avez présenté. Il faut prendre en compte les exigences d'une société où la communication occupe une place de plus en plus importante : et pour cela, il faut faire connaître vos métiers et les rendre attractifs pour que les jeunes s'y engagent, comme vous l'avez fait. Je crois savoir à cet égard que le conseil d'administration du fonds national de promotion et de communication de l'artisanat a prévu de conduire une campagne nationale pour mieux faire connaître les potentialités qu'offre l'artisanat aux jeunes et aux demandeurs d'emplois.
L'UPA et l'APCM m'avaient alerté sur les risques liés à la suppression de la prime à l'embauche d'apprenti : les députés ont rétabli cette prime pour les entreprises de moins de 21 salariés. C'est une grande satisfaction. J'ai bien noté vos inquiétudes sur les dossiers relatifs à la formation, il ne m'est pas possible de vous répondre aujourd'hui mais je m'engage à regarder cela de très près et à " relayer " auprès de mes collègues du gouvernement vos préoccupations. Je souhaite que là aussi des solutions puissent être trouvées.
J'ai entendu vos inquiétudes concernant la taxe d'apprentissage : l'examen en janvier prochain du projet de loi de modernisation sociale sera l'occasion d'ouvrir un large débat sur la formation et la collecte de la taxe d'apprentissage. Là encore, vous pouvez compter sur moi : je serai vigilant à ce que les préoccupations des chambres de métiers soient prises en compte.
La deuxième préoccupation très actuelle et très sensible est l'application de la loi sur les 35 heures.
La loi a pris en compte la situation particulière des petites entreprises : possibilité d'application directe dans les entreprises d'accords négociés au niveau des branches, accès aux aides pour la RTT par étapes, délai supplémentaire jusqu'au 1er janvier 2002, c'est à dire demain. C'est maintenant qu'il nous faut regarder ensemble quelles sont les mesures d'accompagnement qui doivent être prises, pour que la réduction du temps de travail ne soit pas une source excessive de charges, sachant qu'il n'est pas souhaitable de reporter l'application de la loi, ce qui ne ferait qu'aggraver les difficultés d'embauche. Vous ne le demandez d'ailleurs pas.
Avec Elisabeth Guigou et Laurent Fabius, nous travaillons sur les implications de la loi, notamment sur les heures supplémentaires et leur coût et sur le développement de l'appui-conseil pour aider les entreprises qui le souhaiteront.
Le gouvernement poursuit sa politique d'allégement des charges pesant sur les entreprises. Après la réforme de la taxe professionnelle qui bénéficie directement aux entreprises dans lesquelles la main d'uvre est prépondérante, le projet de loi de finances pour 2001 prévoit de ramener le taux de l'impôt sur les sociétés à 25 % en 2001 et à 15 % en 2002 pour la part des bénéfices inférieure à 250 000 francs (l'impact est de 6,4 milliards sur trois ans).
Des allégements sont également prévus en matière d'impôt sur le revenu pour les entreprises individuelles (la baisse d'impôt porte sur toutes les tranches du barème et en montants cumulés sur trois ans, cette réduction est de 43,2 milliards de francs), et elles concernent tout le monde.
Ces mesures sont importantes, mais elles ne vous satisfont pas complètement car elles vous semblent désavantager les entreprises sous forme individuelle. Vos préoccupations ont été entendues : les incidences juridiques, fiscales, sociales et patrimoniales résultant du choix de la forme de l'entreprise vont faire l'objet d'un examen et de correctifs dans la mesure où un statut s'avérerait plus pénalisant qu'un autre pour le chef d'entreprise. C'est un des objectifs qui seront assignés aux deux parlementaires qui se verront confier prochainement par le Premier ministre, une mission ciblée sur vos entreprises.
Nous suivrons donc ensemble cette question et je souhaite vous associer, pleinement, à ce travail dont la complexité ne doit pas être sous-estimée.
Votre secteur doit poursuivre son développement, il a les atouts nécessaires.
Pour cela, j'attends vos propositions, car c'est d'abord de vous que la mise en évidence des priorités peut le mieux surgir.
Dans tous les cas, nous devrions être d'accord pour dire ou redire que l'accès au crédit est trop limité et que les partenaires doivent adopter une attitude volontariste qui favorise la création, le développement et la transmission d'entreprise.
Ainsi, il est important de souligner, que par une convention entre la BDPME, les sociétés de cautionnement mutuel et les réseaux bancaires, le dispositif d'aide au financement de l'artisanat a été réformé pour déléguer aux réseaux bancaires l'engagement de la garantie.
Le 10 octobre dernier, le prêt à la création d'entreprise (PCE), annoncé lors des états généraux de la création d'entreprises, a été lancé officiellement : il concerne toutes les entreprises, quel que soit le secteur d'activité, et toute personne qui n'a pas encore bénéficié d'un financement à moyen ou long terme au cours des trois dernières années qui suivent sa création.
Il faut, et je compte sur vous pour cela, que cet outil bénéficie pleinement à la petite entreprise, c'est-à-dire en premier lieu à l'artisanat. J'ai bien noté votre demande de bénéficier de l'appui financier : soyez assurés que j'examine ce dossier de très près car je sais la contribution des chambres consulaires à la création d'entreprise. Il m'avait pourtant semblé que vous aviez signé avec la BDPME sur ce point une convention récente qui alimente elle aussi ma réflexion.
Pour aller plus loin dans la facilitation de la création d'entreprises, le Premier ministre, comme il l'avait annoncé aux états généraux de la création d'entreprise le 11 avril, a confié une mission à Jean-Marie Bockel, Député du Haut-Rhin, afin de proposer de nouvelles mesures pour simplifier le démarrage de l'entreprise, la vie des chefs d'entreprise.
Les axes de propositions de Monsieur Bockel ont fait l'objet d'une présentation au Conseil National de la Création d'Entreprise et comprennent un volet social fort avec la création d'un chèque 1er salarié, sur le modèle du chèque emploi service et la simplification du recouvrement des cotisations sociales du créateur.
Cette mission m'amène tout naturellement à vous parler de la mise en uvre des simplifications administratives en faveur des entreprises.
Marylise Lebranchu avait arrêté deux programmes importants de simplifications administratives en novembre 97 (37 mesures) et décembre 98 (26 mesures). Dans leur grande majorité, ces mesures sont devenues effectives.
Il nous faut poursuivre. Tout ce qui touche à l'environnement des entreprises est plus que jamais à l'ordre du jour. C'est pourquoi dans la continuation des deux programmes que je viens de rappeler, un nouveau train de mesures sera proposé en tout début d'année prochaine à l'occasion de la prochaine réunion de la COSA (commission des simplifications administratives).
A ce titre, je vous demande de participer activement à ces actions de simplification, en proposant à la DEcas, des mesures sectorielles de simplification, je pense notamment à la réglementation relative à la sécurité dans le bâtiment, mais les exemples ne manquent pas, je vous invite à me faire part de vos besoins.
Dans chaque instance où le thème de la création d'entreprise est abordé, celui de la transmission - reprise est nécessairement évoqué. Ceci s'est encore vérifié récemment lors de la journée sur l'assistance technique des métiers, organisée par l'APCM, l'ACFCI et la DEcas, et vous venez, Monsieur le Président, de souligner l'importance de ce sujet. Je vous rejoins pleinement.
Le départ en retraite est un changement de vie que chacun doit réussir. L'artisan vivra d'autant mieux cette étape qu'il aura pu et su " passer la main ".
La transmission-reprise suscite de nombreuses réflexions et les initiatives ne manquent pas.
Ainsi, l'action de l'assemblée permanente des chambres de métiers qui a mis en place la bourse nationale des opportunités artisanales et j'en profite pour saluer aussi, l'excellent travail des chambres de métiers dans le fonctionnement de ce dispositif.
Le tour de France de la transmission d'entreprises, parrainé par le Secrétariat d'État aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation a permis de mobiliser de nombreux opérateurs sur le sujet et d'identifier les freins à la transmission-reprise.
Les conclusions de ces travaux ont conduit à la rédaction du livre blanc de la transmission-reprise d'entreprises qui m'a été présenté le 6 décembre et qui servira de base de réflexion pour des propositions qui trouveront un écho dans le projet de loi d'orientation pour l'artisanat et la petite entreprise.
Nous devons parvenir à favoriser des dispositifs qui permettent la rencontre et la contractualisation entre cédants et repreneurs car nous avons tous conscience que ce sujet prendra une importance croissante dans les années à venir, compte tenu de la pyramide des âges des chefs d'entreprises.
Cette année aura vu la mise en uvre du nouveau dispositif d'aide au financement du développement économique des entreprises qui distingue les actions pérennes relevant des programmes d'accompagnement des entreprises (titre I) et les actions innovantes (titre II). L'année 2000 a été une année de transition : je reconnais clairement que nous avons des progrès à accomplir pour améliorer la procédure d'instruction des dossiers, et réduire les délais. Nous allons le faire. Je crois que collectivement, nous pouvons nous féliciter des évolutions engagées, elles participent au renforcement de l'efficacité que nous appelons tous de nos vux. Les dotations et les instructions pour 2001 seront arrêtées dans les tout prochains jours. Sachez que mon intention n'est pas que l'État se désengage dans l'accompagnement des actions conduites par les chambres de métiers et les organisations professionnelles en faveur des entreprises artisanales.
Le développement des entreprises artisanales est un enjeu important pour les territoires.
Les conseils de développement auprès des agglomérations et des pays, dont la constitution n'est pas encore arrêtée, sont favorables au développement de l'entreprise artisanale et vous aurez, en tant que chambre de métiers, un rôle important à jouer dans la dynamisation de ces nouvelles entités servant de base au développement du territoire.
L'importance de l'artisanat dans le cadre de l'aménagement du territoire pour l'animation des zones rurales, des centres-bourgs, des quartiers plus sensibles n'est pas discutée. Vous êtes acteur de la solidarité sociale.
Tous les pays européens n'ont pas la même conception de l'artisanat. Pour autant, la prééminence dans l'Europe, des petites entreprises quel que soit leur secteur d'activité n'est pas contestée.
Aujourd'hui, l'UEAPME, qui représente 10 millions d'entreprises européennes et 50 millions de salariés, n'est pas reconnue par la commission comme un partenaire à part entière. J'ai demandé au ministre délégué chargé des affaires européennes, Monsieur Pierre Moscovici, que la France intervienne pour débloquer cette situation et je puis vous assurer que je serais particulièrement attentif à ce dossier.
Je serais également très vigilant sur la présence des petites entreprises dans le 4ème programme pluriannuel élaboré pour la période 2001-2005 par la commission européenne et qui a intégré la charte de Feira. Il faut qu'au niveau européen, aussi, on tienne compte de toutes les entreprises et notamment des plus petites avec leurs spécificités.
Chaque sujet abordé souligne l'importance du rôle des chambres de métiers que vous présidez.
Je connais la tâche qui est la vôtre, votre disponibilité, votre engagement pour le secteur artisanal, tout en poursuivant votre activité de chef d'entreprise.
La DEcas et l'APCM ont examiné la question des frais de mandats : ajustement des points d'indice de référence, majoration de l'indemnité du président de chambre départementale gérant un centre d'apprentis et relèvement du tarif de la vacation des élus. Je suis confiant, des points de convergence peuvent être trouvés.
Ce dossier n'est qu'un des nombreux volets de la collaboration entre nos services, comme vous l'avez rappelé Monsieur le Président. Vous avez également montré, m'a-t-il semblé, quelques signes d'impatience : je ne veux pas y voir autre chose qu'une marque d'intérêt et d'engagement.
Je vous confirme, si c'était nécessaire, que j'ai à cur également d'avancer rapidement, mais vous connaissez tout comme moi la complexité et la difficulté de certains dossiers. J'ai aussi conscience, parce que son directeur, Patrice Vermeulen, a appelé mon attention dès mon arrivée, de la nécessité de poursuivre le renforcement des effectifs de la direction des entreprises commerciales, artisanales et de services.
Des dossiers très délicats concernent également les agents des chambres de métiers : 35 heures, modification des statuts, revalorisation indiciaire. Permettez-moi de saluer celles et ceux qui sont dans cette salle, et de souligner l'importance de l'action des 10 000 salariés des chambres de métiers, car c'est eux qui au quotidien sont en relation directe avec les artisans, les collectivités territoriales et l'ensemble des partenaires des entreprises artisanales. Sur tous ces sujets, je vous engage à travailler ensemble, représentants des employeurs et des salariés, au sein des instances paritaires qui doivent donner toute leur place à la concertation et à la négociation, afin que des solutions soient trouvées. Je ne doute pas du sens des responsabilités des uns et des autres. Je prendrai les miennes.
Nous avons encore beaucoup à faire même si on se doit de souligner que la couverture sociale des artisans s'est améliorée : les délais de carence ont été réduits et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 prévoit d'aligner les prestations du régime maladie des travailleurs indépendants sur celui des salariés ; le statut du conjoint collaborateur est mieux défini même s'il demeure des progrès à accomplir.
Pour terminer, je voudrais souligner l'important sujet de l'Euro car vous avez, vous, chambres de métiers, un rôle de sensibilisation, de formation et d'information par la mise à disposition de guides professionnels. Vous êtes invitées à vous associer à la signature d'une chartre de mobilisation des TPE, artisans et commerçants, qui devrait être signée courant janvier 2001 entre le MINEFI et les principaux réseaux d'appui aux petites entreprises. En outre, le MINEFI lancera dès janvier une campagne de mobilisation nationale tournée spécifiquement vers le grand public et les TPE. Je compte donc sur vous et je sais pouvoir le faire, sur ce sujet comme sur tous les autres qui intéressent les chambres de métiers et l'artisanat.
(source http://www.pme-commerce-artisanat.gouv.fr, le 15 décembre 2000)