Interview de M. Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l'intérieur et aux collectivités territoriales, à Europe 1 le 17 septembre 2008, sur le projet de loi organique relative à l'élection des députés et les nouvelles règles concernant le redécoupage électoral.

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Média : Europe 1

Texte intégral

M.-O. Fogiel.- A. Marleix, bonjour. Vous êtes le secrétaire d'Etat à l'Intérieur et aux Collectivités territoriales, et c'est aujourd'hui que le paquet électoral est examiné en Conseil des ministres. On vous en parlé depuis lundi sur Europe 1 : des départements vont se voir attribuer plus de députés, d'autres vont en perdre, en fonction de la progression démographique. Le redécoupage sera opéré dans un tiers des départements et certains s'inquiètent, dont J.-M. Ayrault, le président du groupe socialiste à l'Assemblée, qui se demande si le Gouvernement ne pourrait pas être tenté par une forme de "charcutage" ?
 
Oui, alors, écoutez, J.-M. Ayrault a eu un langage beaucoup plus modéré hier chez le Premier ministre, où nous avions une réunion avec l'ensemble des chefs de l'opposition et de la majorité, et la réunion s'est passée dans une ambiance tout à fait courtoise et républicaine. "Charcutage" c'est un mot qu'on ne peut pas accepter. En fait, le Gouvernement ne fait qu'appliquer la loi. On va tout de même pas s'excuser d'appliquer la loi. Vous savez que...
 
Pour les infos qui nous reviennent, pour que les auditeurs comprennent bien, les départements plutôt à gauche - le Nord, le Pas-de-Calais, Paris - perdraient des députés...
 
Oui.
 
...et les départements historiquement à droite - le Gard, le Vaucluse, le Var, par exemple - en gagnent. Il a bon dos le recensement, non ?
 
Oui, oui. Mais l'Hérault qui est un département historiquement à gauche, en gagne aussi, la Haute-Garonne, qui est tout à fait à gauche, parce qu'il n'y a aucun député de droite, en gagne aussi ; la Marne, qui est un département de droite, perd des députés. Alors, on ne peut pas présenter les choses comme ça. Qu'est-ce que c'est finalement ? Ce n'est pas un redécoupage comme en 1986, avec une refonte totale de la carte électorale. C'est un réajustement de la carte qui a été voulu, qui est voulu par la loi. Après chaque recensement, la règle veut - c'est la loi qui l'exige, et le Conseil Constitutionnel qui le répète constamment - qu'on réadapte la carte électorale en créant ou supprimant des circonscriptions pour tenir compte des réalités démographiques. Alors, il y a eu des recensements...
 
Un mot quand même sur le recensement...
 
...Vous vous en souvenez, Monsieur Fogiel, en 1989... en 1999 ; il y avait des gouvernements qui étaient socialistes à l'époque. Ils n'ont pas fait, ils n'ont pas procédé à ces réajustements, parce que c'est vrai que c'est une opération qui est politiquement difficile et un peu dangereuse. Donc, il y a 23 ans qu'on n'a pas touché...
 
Et vous le faites, ça ?
 
...et qu'on n'a pas appliqué le recensement.
 
Il y a un autre sujet dans ce paquet électoral : un député, devenu ministre, va retrouver son siège de député automatiquement lorsqu'il perdra son portefeuille.
 
Oui.
 
Ministre, ça devient une assurance tous risques, un métier tout confort, quoi ?!
 
Ecoutez, d'abord, on ne va pas refaire le match. Je vous signale que ce débat a eu lieu avant le Congrès du 23 juillet, à Versailles, ce débat a eu lieu longuement à l'Assemblée nationale et au Sénat. Aujourd'hui...
 
Non, mais vous comprenez que ça n'encourage pas la prime aux résultats, modèle pourtant très en cours auprès de N. Sarkozy ?
 
Oui, mais aujourd'hui, c'est un principe constitutionnel, voilà, c'est dans la nouvelle Constitution telle qu'elle a été révisée. Donc, aujourd'hui, il s'agit tout simplement par ce projet de loi, de traduire, de transposer cette décision du Congrès. Le Congrès, je vous rappelle que c'est l'Assemblée nationale et le Sénat. Alors, je crois qu'on ne peut pas vouloir une chose et son contraire. Vous avez deux sortes de ministres : vous avez les ministres, et chaque ministre a ses mérites, vous avez des ministres qui sont un peu issus de la technocratie, de l'administration, et qui n'ont pas effectivement de mandats locaux. Et puis, vous avez des ministres qui sont issus aussi du suffrage universel direct, qui sont des députés, ou qui sont sénateurs.
 
Je comprends bien, mais, par exemple, H. Gaymard, après l'histoire de son appartement, aurait retrouvé son siège à l'Assemblée grâce à ce projet de révision ?
 
Oui. De toute façon, il l'a retrouvé, il n'y avait pas eu ce projet de révision, il l'a retrouvé quand même, parce qu'il y a eu une élection partielle. Je trouve qu'il y a beaucoup d'hypocrisie dans l'ancienne situation, et que, finalement, la France ne fait qu'appliquer que ce qui se passe ailleurs dans les pays européens comparables. Quand le député est élu, il est élu pour cinq ans. S'il a la chance de pouvoir rentrer au Gouvernement... vous savez, la durée de vie moyenne au Gouvernement, c'est deux ans, deux et demi maximum. Donc, il lui reste un mandat à faire...
 
C'est un CDD, on a bien compris.
 
Voilà. Il a eu la confiance pour cinq ans, il a un remplacement momentané par son suppléant ; qu'il retrouve son siège, vous savez, ça ne choque personne là où ça existe.
 
On verra ce qu'en pensent nos auditeurs de la possibilité pour les ministres de retrouver leur siège de député. Merci beaucoup.
 
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 18 septembre 2008