Texte intégral
Dans les services que vous dirigez, le A et le L de laménagement et du logement vous sont familiers. On ny trouve pas exprimé directement lobjectif dégalité des territoires. Je vais donc commencer par vous dire quelques mots de ce sujet déterminant pour les années qui viennent.
1. Légalité des territoires
La création du ministère de légalité des territoires et du logement répond à lambition de se doter dun objectif daménagement équilibré et durable des territoires.
La France, depuis une décennie, na pas énoncé dobjectif de développement équilibré et durable de son territoire. Lorsque lon regarde les choses depuis le terrain, laménagement du territoire sest, en fait, réduit à laddition de politiques segmentées sans cohérence densemble. Aucun discours stratégique concernant lensemble des territoires na été formulé.
La montée de lextrême-droite dans la France fragilisée, dans la France rurale, dans la France des villes petites et moyennes qui subissent la mondialisation, dans la France des quartiers, en est la résultante, et traduit la désespérance dun grand nombre de Français face aux effets très concrets de la réorganisation des services publics pris dans leur ensemble.
Dans le même temps, lexistence dune identité commune, dun sort commun entre les couches précarisées par la mondialisation et la désindustrialisation sest effrité, voire a disparu.
Le décret dattribution du ministère prévoit que soient traités dans le même mouvement avenir de la politique européenne de cohésion, organisation nationale de la programmation des fonds européens, politique en direction de la ville et en direction des zones rurales défavorisées, péréquation entre collectivités, aménagement, urbanisme, politique du logement et de rénovation thermique de lhabitat, implantation des effectifs des services publics, pôles de compétitivité et suivi des mutations économiques : autant doutils au service du retour dune vision globale, au service dun développement équilibré du territoire.
Je porte lambition de traiter conjointement et de façon unifiée les problématiques daménagement durable. Cest le sens du ministère de légalité des territoires.
Une telle démarche ne se décrète pas. Elle suppose dailleurs beaucoup plus quun effort de concertation. Elle commande de sappuyer sur des diagnostics partagés, sur une contractualisation rénovée.
Cet effort ne pourra pas être décrété depuis Paris. Il appelle une connaissance fine des territoires, une délibération associant toutes les parties prenantes. Il appelle une vision globale sur lavenir, une planification stratégique renouvelée et participative qui fasse des politiques sectorielles autant doutils et de leviers pour le développement durable.
Cet effort nécessitera une mise en cohérence des efforts de chacun : des Régions dont le rôle en matière de développement économique ou de formation professionnelle est indispensable pour agir pour le développement des territoires fragiles, des Départements dont la mission dinsertion sociale doit être articulée avec les autres acteurs, des groupements de communes et de leurs adhérents dont le rôle de proximité est chaque jour essentiel.
Cet effort appellera un rôle renouvelé de lEtat, comme animateur de la dynamique de contractualisation entre les parties prenantes et comme garant de leffectivité des engagements pris.
Il appellera enfin une participation de tous les habitants. Je veux que les premiers juges de lefficacité des mesures décidées soient les citoyens. Il faut faire confiance à lintelligence des territoires et leur redonner les moyens de reprendre en main la maîtrise de leur avenir.
Les grandes priorités seront les suivantes.
Au niveau national, je souhaite contribuer au désenclavement des territoires (par le ferroviaire, par la couverture numérique), et doter chaque territoire de leviers pour se développer, notamment en donnant un nouveau cadre à la géographie prioritaire.
Au niveau régional, je veux renforcer le pouvoir des régions en conférant une portée contraignante aux schémas régionaux rassemblés en un document unique (air-énergie-climat, aménagement du territoire, transport), ce qui suppose de prévoir la compatibilité des SCOT avec les documents régionaux.
Au niveau local, je souhaite le renforcement du pouvoir des intercommunalités, fusionner PDU-PLU dans un document intercommunal qui permette de réduire les émissions carbonées comme de rendre effectif larticle 55 de la loi SRU qui sera non seulement appliqué, mais aussi renforcé.
Là aussi le pragmatisme devra simposer : le partage des compétences doit en effet être adapté au territoire, en fonction de ses enjeux. Je souhaite par exemple que certaines compétences des EPCI puissent être exercées par le département en territoire rural.
Cet effort de synthèse ne se traduira pas par labandon des politiques spécifiques comme la politique de la ville. Je souhaite poursuivre la politique de renouvellement urbain. Mais cet effort sur le bâti doit désormais sarticuler mieux avec les moyens humains, comme avec les moyens de droit commun, de lécole, de lIntérieur ou de lEmploi. Cest le sens du contrat unique que le président de la République a annoncé.
Le ministère de légalité des territoires sappuiera sur les cohérences trouvées au niveau des DREAL, entre politique de transports, de lenvironnement, de lindustrie et de lhabitat, qui permettent de disposer dans chaque territoire dune structure capable de décliner les objectifs du Grenelle.
Il sagira daller plus loin pour entraîner derrière nous les collectivités territoriales. Jattends de chacun de vous une implication accrue dans la concertation rénovée, entre les directions, dans la contractualisation que le préfet de région sera chargé dorganiser.
2. Résoudre les crises du logement
En matière de logement, les attentes des Français envers le Gouvernement sont très fortes, et à juste titre. Je ne vous apprendrai rien sur le sérieux des crises du logement.
Dans les zones où les prix senvolent, laccès au logement est désormais inabordable pour un nombre de plus en plus grand de nos concitoyens. Les conséquences en sont directes : sur-occupation, reste à vivre réduit au minimum, liste dattente interminable pour accéder au parc social, et en parallèle exploitation de la situation par les marchands de sommeil, saturation des capacités dhébergement
Dans les territoires , les problèmes sont différents, assurément, mais il ne faut pas pour autant les oublier: dégradation du parc locatif faute dinvestissement, précarité énergétique, problématique de ladaptation des logements au vieillissement de la population Le problème du logement concerne donc 100% des Français. Lobjectif que je nous fixe est donc simple : améliorer significativement sous 5 ans les conditions de logement de tous les Français. Lobligation de résultats est là !
Cet objectif nest pas nouveau, et vous lavez déjà entendu à maintes reprises. Probablement dans la bouche de mes prédécesseurs. Ma conviction est que cette fois-ci la volonté politique est là et que nous pourrons faire bouger les lignes.
Pour y parvenir, jidentifie quatre défis majeurs que nous devons relever ensemble.
1. Le premier, le plus important, sans lequel aucune amélioration durable ne sera possible, est le défi de loffre. Nous devons créer les conditions dun développement massif de la construction de logements abordables là où sont les besoins. Lobjectif affirmé à plusieurs reprises par le président de la République est clair : il faut viser la réalisation de 500.000 logements par an. Cest un objectif ambitieux, mais nous pouvons latteindre si nous activons tous les leviers :
- Pour construire, il faut en premier lieu des terrains et je souhaite que soit mis en oeuvre un programme de mobilisation du foncier sans précédent. Il sagira bien sûr du foncier public, dont la mise à disposition sera facilitée et simplifiée, avec une forte décote pour la réalisation de logements sociaux. Mais il sagira aussi du foncier privé, et nous travaillons à linstauration dune fiscalité spécifique sur les terrains constructibles qui permettra de lutter contre la rétention foncière.
- Pour construire, il faut ensuite des élus volontaires et pour cela faire mentir ladage « maires bâtisseurs, maires battus ». A court terme, un dispositif incitatif fort pourrait permettre daider les élus qui construisent. Ce sera la carotte, mais il y aura aussi le bâton et nous renforcerons, comme je lai dit, la loi SRU pour contraindre toutes les collectivités à se mobiliser pour la construction des logements sociaux. A moyen terme, cest la question essentielle de léchelle pertinente pour élaborer et mettre en oeuvre les documents durbanisme qui doit être posée : il faudra aller vers des PLU intercommunaux et généraliser, comme le prévoit la loi, les SCoT.
- Pour construire, enfin, il faut des investisseurs intéressés par la pierre. Le fer de lance de la construction sera porté par les bailleurs sociaux. Ils devront réaliser 150.000 logements par an. Nous leur donnerons des moyens renforcés mais nous serons très exigeants. Les logements sociaux financés ne seront plus des acquisitions sans travaux, comme ceux dICADE, ils devront être majoritairement issus dopérations neuves et devront être adaptés aux besoins locaux. Nous devons également arrêter de construire massivement des T3 et des T4 alors que cest de petits ou de grands logements dont nous manquons. Cette responsabilité de veiller à ladéquation de loffre et des besoins est la vôtre. Je vous demande dy être particulièrement vigilants. En ce qui concerne linvestissement des particuliers, les contraintes budgétaires ne nous permettent plus la mise en place de dispositifs dispendieux comme le Scellier, coûteux et bien trop souvent inefficace pour résoudre la pénurie de logement. Nous devons faire revenir les investisseurs institutionnels sur le segment du logement intermédiaire.
2. Le deuxième défi est celui de lhabitat écologique. Le bâtiment constitue le premier secteur de consommation dénergie en France. Il présente cependant des gisements importants déconomie. Cest maintenant que nous devons agir, que nous devons inventer les savoir-faire artisanaux, industriels, capables de relever ce défi de la rénovation thermique. Lobjectif annoncé par le Président de la République de doter dune isolation thermique de qualité un million de logements par an, dont 600.000 logements anciens, nécessite que nous passions à la vitesse supérieure. Le programme Habiter Mieux, qui connait un démarrage timide, et cest un euphémisme, devra être revu en ce sens et je souhaite que vous qui êtes chargés au quotidien de le mettre en oeuvre me fassiez part des évolutions qui pourraient permettre cette accélération.
Mais je souhaite également quun chantier de grande ampleur soit ouvert sur la question des matériaux. Les hydrocarbures ne sont pas les seules ressources rares. Une vraie réflexion doit être menée pour mieux recycler, mieux réutiliser les matériaux de construction. Les filières déco-matériaux, notamment la filière bois, doivent être réellement structurées et mises en places. Les solutions pertinentes varieront dune région à lautre. On ne construit pas à Strasbourg comme on construit à Marseille. Il faudra donc une impulsion locale, par les collectivités et par lEtat en lien avec les entreprises, et je vous demande de vous impliquer sur ce sujet essentiel.
3. Le troisième défi, tout aussi important que les deux précédents, est celui de laccès au logement. Construire 500.000 logements par an est une absolue nécessité, mais encore faut-il que les Français aient les moyens daccéder à ces nouveaux logements ! Lorsque le marché perd ses repères, lorsque les loyers atteignent des niveaux qui étranglent le pouvoir dachat des Français, il est de notre devoir de les encadrer. Nous le ferons. Dans un premier temps, nous irons au bout de ce que nous permet la loi de 1989 sur les rapports locatifs. Un décret durgence sera pris et permettra de contenir la flambée des prix. Dans un deuxième temps, nous irons au bout de ce que nous permet notre Constitution et cest la loi elle-même qui sera revue en profondeur. Les rapports locatifs seront repensés et les loyers pourront être contrôlés par référence, éventuellement à la baisse. Pour rendre cette disposition effective, lun de mes premiers chantiers sera de permettre, en lien avec les collectivités, la mise en place dobservatoires des loyers dans la plupart des agglomérations. Je compte sur votre aide pour y parvenir.
Laccès au logement cest aussi rendre effectif le droit au logement opposable. Cela commence par prévenir les difficultés des ménages avant que leur situation ne devienne prioritaire et urgente.
- Cela signifie quil faut renforcer la prévention des expulsions. Je vous demande de me faire part de votre diagnostic et de vos préconisations sur le fonctionnement de ces commissions avant la fin du mois de juillet, afin dalimenter le projet de loi que je préparerais sur le logement et qui comportera un volet important sur ce sujet.
- Cela signifie également quil faut persévérer dans nos efforts de lutte contre lhabitat indigne. Nous ne pouvons pas accepter que des personnes risquent leur sécurité et leur santé en rentrant chez elles chaque jour. Je veillerai à ce que vous disposiez des moyens nécessaires pour y remédier : financiers, humains et juridiques.
- Cela signifie, enfin, quil faut mieux gérer larticulation entre hébergement et logement autonome. Comme vous le savez, jai décidé darrêter la fermeture des places hivernales car je veux remettre les choses dans lordre : on accompagne dabord les gens vers des logements et ensuite on ferme. Pas linverse ! On ne remet pas les gens à la rue en attendant lattribution hypothétique dun logement. Je vous demande, de vous mobiliser, en lien avec les DRJSCS, pour que toute personne en capacité dhabiter un logement autonome se voie proposer un logement avec, si nécessaire, un accompagnement social.
Laccès au logement, cest enfin la constitution dun véritable service public du logement. Il est inacceptable aujourdhui quun demandeur de logement social ait à suivre un véritable labyrinthe administratif pour obtenir gain de cause. Comme sy est engagé le Président de la République et comme je lai annoncé lors de lassemblée générale des ESH, je souhaite une réforme en profondeur des procédures dattribution des logements sociaux. Le dispositif refondu devra être plus simple, plus lisible et plus transparent, au service des usagers.
Jannoncerai dans les prochaines semaines les modalités de concertation sur ce chantier dont jai conscience quil sera compliqué. Je souhaite que les services déconcentrés y prennent toute leur part et que quelques uns dentre vous participent directement à cette concertation, en particulier bien sûr le directeur régional et interdépartemental de lhébergement et du logement dÎle-de-France, Jean-Martin DELORME, mais pas seulement. Jy associerai également les DDCS.
Construire plus et mieux, rénover et améliorer lexistant, rendre abordable ce bien de première nécessité quest le logement. Bâtir par ailleurs le chemin de légalité des territoires.
Voilà la feuille de route. Je compte sur vous pour y parvenir.
Je vous remercie.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 21 juin 2012
1. Légalité des territoires
La création du ministère de légalité des territoires et du logement répond à lambition de se doter dun objectif daménagement équilibré et durable des territoires.
La France, depuis une décennie, na pas énoncé dobjectif de développement équilibré et durable de son territoire. Lorsque lon regarde les choses depuis le terrain, laménagement du territoire sest, en fait, réduit à laddition de politiques segmentées sans cohérence densemble. Aucun discours stratégique concernant lensemble des territoires na été formulé.
La montée de lextrême-droite dans la France fragilisée, dans la France rurale, dans la France des villes petites et moyennes qui subissent la mondialisation, dans la France des quartiers, en est la résultante, et traduit la désespérance dun grand nombre de Français face aux effets très concrets de la réorganisation des services publics pris dans leur ensemble.
Dans le même temps, lexistence dune identité commune, dun sort commun entre les couches précarisées par la mondialisation et la désindustrialisation sest effrité, voire a disparu.
Le décret dattribution du ministère prévoit que soient traités dans le même mouvement avenir de la politique européenne de cohésion, organisation nationale de la programmation des fonds européens, politique en direction de la ville et en direction des zones rurales défavorisées, péréquation entre collectivités, aménagement, urbanisme, politique du logement et de rénovation thermique de lhabitat, implantation des effectifs des services publics, pôles de compétitivité et suivi des mutations économiques : autant doutils au service du retour dune vision globale, au service dun développement équilibré du territoire.
Je porte lambition de traiter conjointement et de façon unifiée les problématiques daménagement durable. Cest le sens du ministère de légalité des territoires.
Une telle démarche ne se décrète pas. Elle suppose dailleurs beaucoup plus quun effort de concertation. Elle commande de sappuyer sur des diagnostics partagés, sur une contractualisation rénovée.
Cet effort ne pourra pas être décrété depuis Paris. Il appelle une connaissance fine des territoires, une délibération associant toutes les parties prenantes. Il appelle une vision globale sur lavenir, une planification stratégique renouvelée et participative qui fasse des politiques sectorielles autant doutils et de leviers pour le développement durable.
Cet effort nécessitera une mise en cohérence des efforts de chacun : des Régions dont le rôle en matière de développement économique ou de formation professionnelle est indispensable pour agir pour le développement des territoires fragiles, des Départements dont la mission dinsertion sociale doit être articulée avec les autres acteurs, des groupements de communes et de leurs adhérents dont le rôle de proximité est chaque jour essentiel.
Cet effort appellera un rôle renouvelé de lEtat, comme animateur de la dynamique de contractualisation entre les parties prenantes et comme garant de leffectivité des engagements pris.
Il appellera enfin une participation de tous les habitants. Je veux que les premiers juges de lefficacité des mesures décidées soient les citoyens. Il faut faire confiance à lintelligence des territoires et leur redonner les moyens de reprendre en main la maîtrise de leur avenir.
Les grandes priorités seront les suivantes.
Au niveau national, je souhaite contribuer au désenclavement des territoires (par le ferroviaire, par la couverture numérique), et doter chaque territoire de leviers pour se développer, notamment en donnant un nouveau cadre à la géographie prioritaire.
Au niveau régional, je veux renforcer le pouvoir des régions en conférant une portée contraignante aux schémas régionaux rassemblés en un document unique (air-énergie-climat, aménagement du territoire, transport), ce qui suppose de prévoir la compatibilité des SCOT avec les documents régionaux.
Au niveau local, je souhaite le renforcement du pouvoir des intercommunalités, fusionner PDU-PLU dans un document intercommunal qui permette de réduire les émissions carbonées comme de rendre effectif larticle 55 de la loi SRU qui sera non seulement appliqué, mais aussi renforcé.
Là aussi le pragmatisme devra simposer : le partage des compétences doit en effet être adapté au territoire, en fonction de ses enjeux. Je souhaite par exemple que certaines compétences des EPCI puissent être exercées par le département en territoire rural.
Cet effort de synthèse ne se traduira pas par labandon des politiques spécifiques comme la politique de la ville. Je souhaite poursuivre la politique de renouvellement urbain. Mais cet effort sur le bâti doit désormais sarticuler mieux avec les moyens humains, comme avec les moyens de droit commun, de lécole, de lIntérieur ou de lEmploi. Cest le sens du contrat unique que le président de la République a annoncé.
Le ministère de légalité des territoires sappuiera sur les cohérences trouvées au niveau des DREAL, entre politique de transports, de lenvironnement, de lindustrie et de lhabitat, qui permettent de disposer dans chaque territoire dune structure capable de décliner les objectifs du Grenelle.
Il sagira daller plus loin pour entraîner derrière nous les collectivités territoriales. Jattends de chacun de vous une implication accrue dans la concertation rénovée, entre les directions, dans la contractualisation que le préfet de région sera chargé dorganiser.
2. Résoudre les crises du logement
En matière de logement, les attentes des Français envers le Gouvernement sont très fortes, et à juste titre. Je ne vous apprendrai rien sur le sérieux des crises du logement.
Dans les zones où les prix senvolent, laccès au logement est désormais inabordable pour un nombre de plus en plus grand de nos concitoyens. Les conséquences en sont directes : sur-occupation, reste à vivre réduit au minimum, liste dattente interminable pour accéder au parc social, et en parallèle exploitation de la situation par les marchands de sommeil, saturation des capacités dhébergement
Dans les territoires , les problèmes sont différents, assurément, mais il ne faut pas pour autant les oublier: dégradation du parc locatif faute dinvestissement, précarité énergétique, problématique de ladaptation des logements au vieillissement de la population Le problème du logement concerne donc 100% des Français. Lobjectif que je nous fixe est donc simple : améliorer significativement sous 5 ans les conditions de logement de tous les Français. Lobligation de résultats est là !
Cet objectif nest pas nouveau, et vous lavez déjà entendu à maintes reprises. Probablement dans la bouche de mes prédécesseurs. Ma conviction est que cette fois-ci la volonté politique est là et que nous pourrons faire bouger les lignes.
Pour y parvenir, jidentifie quatre défis majeurs que nous devons relever ensemble.
1. Le premier, le plus important, sans lequel aucune amélioration durable ne sera possible, est le défi de loffre. Nous devons créer les conditions dun développement massif de la construction de logements abordables là où sont les besoins. Lobjectif affirmé à plusieurs reprises par le président de la République est clair : il faut viser la réalisation de 500.000 logements par an. Cest un objectif ambitieux, mais nous pouvons latteindre si nous activons tous les leviers :
- Pour construire, il faut en premier lieu des terrains et je souhaite que soit mis en oeuvre un programme de mobilisation du foncier sans précédent. Il sagira bien sûr du foncier public, dont la mise à disposition sera facilitée et simplifiée, avec une forte décote pour la réalisation de logements sociaux. Mais il sagira aussi du foncier privé, et nous travaillons à linstauration dune fiscalité spécifique sur les terrains constructibles qui permettra de lutter contre la rétention foncière.
- Pour construire, il faut ensuite des élus volontaires et pour cela faire mentir ladage « maires bâtisseurs, maires battus ». A court terme, un dispositif incitatif fort pourrait permettre daider les élus qui construisent. Ce sera la carotte, mais il y aura aussi le bâton et nous renforcerons, comme je lai dit, la loi SRU pour contraindre toutes les collectivités à se mobiliser pour la construction des logements sociaux. A moyen terme, cest la question essentielle de léchelle pertinente pour élaborer et mettre en oeuvre les documents durbanisme qui doit être posée : il faudra aller vers des PLU intercommunaux et généraliser, comme le prévoit la loi, les SCoT.
- Pour construire, enfin, il faut des investisseurs intéressés par la pierre. Le fer de lance de la construction sera porté par les bailleurs sociaux. Ils devront réaliser 150.000 logements par an. Nous leur donnerons des moyens renforcés mais nous serons très exigeants. Les logements sociaux financés ne seront plus des acquisitions sans travaux, comme ceux dICADE, ils devront être majoritairement issus dopérations neuves et devront être adaptés aux besoins locaux. Nous devons également arrêter de construire massivement des T3 et des T4 alors que cest de petits ou de grands logements dont nous manquons. Cette responsabilité de veiller à ladéquation de loffre et des besoins est la vôtre. Je vous demande dy être particulièrement vigilants. En ce qui concerne linvestissement des particuliers, les contraintes budgétaires ne nous permettent plus la mise en place de dispositifs dispendieux comme le Scellier, coûteux et bien trop souvent inefficace pour résoudre la pénurie de logement. Nous devons faire revenir les investisseurs institutionnels sur le segment du logement intermédiaire.
2. Le deuxième défi est celui de lhabitat écologique. Le bâtiment constitue le premier secteur de consommation dénergie en France. Il présente cependant des gisements importants déconomie. Cest maintenant que nous devons agir, que nous devons inventer les savoir-faire artisanaux, industriels, capables de relever ce défi de la rénovation thermique. Lobjectif annoncé par le Président de la République de doter dune isolation thermique de qualité un million de logements par an, dont 600.000 logements anciens, nécessite que nous passions à la vitesse supérieure. Le programme Habiter Mieux, qui connait un démarrage timide, et cest un euphémisme, devra être revu en ce sens et je souhaite que vous qui êtes chargés au quotidien de le mettre en oeuvre me fassiez part des évolutions qui pourraient permettre cette accélération.
Mais je souhaite également quun chantier de grande ampleur soit ouvert sur la question des matériaux. Les hydrocarbures ne sont pas les seules ressources rares. Une vraie réflexion doit être menée pour mieux recycler, mieux réutiliser les matériaux de construction. Les filières déco-matériaux, notamment la filière bois, doivent être réellement structurées et mises en places. Les solutions pertinentes varieront dune région à lautre. On ne construit pas à Strasbourg comme on construit à Marseille. Il faudra donc une impulsion locale, par les collectivités et par lEtat en lien avec les entreprises, et je vous demande de vous impliquer sur ce sujet essentiel.
3. Le troisième défi, tout aussi important que les deux précédents, est celui de laccès au logement. Construire 500.000 logements par an est une absolue nécessité, mais encore faut-il que les Français aient les moyens daccéder à ces nouveaux logements ! Lorsque le marché perd ses repères, lorsque les loyers atteignent des niveaux qui étranglent le pouvoir dachat des Français, il est de notre devoir de les encadrer. Nous le ferons. Dans un premier temps, nous irons au bout de ce que nous permet la loi de 1989 sur les rapports locatifs. Un décret durgence sera pris et permettra de contenir la flambée des prix. Dans un deuxième temps, nous irons au bout de ce que nous permet notre Constitution et cest la loi elle-même qui sera revue en profondeur. Les rapports locatifs seront repensés et les loyers pourront être contrôlés par référence, éventuellement à la baisse. Pour rendre cette disposition effective, lun de mes premiers chantiers sera de permettre, en lien avec les collectivités, la mise en place dobservatoires des loyers dans la plupart des agglomérations. Je compte sur votre aide pour y parvenir.
Laccès au logement cest aussi rendre effectif le droit au logement opposable. Cela commence par prévenir les difficultés des ménages avant que leur situation ne devienne prioritaire et urgente.
- Cela signifie quil faut renforcer la prévention des expulsions. Je vous demande de me faire part de votre diagnostic et de vos préconisations sur le fonctionnement de ces commissions avant la fin du mois de juillet, afin dalimenter le projet de loi que je préparerais sur le logement et qui comportera un volet important sur ce sujet.
- Cela signifie également quil faut persévérer dans nos efforts de lutte contre lhabitat indigne. Nous ne pouvons pas accepter que des personnes risquent leur sécurité et leur santé en rentrant chez elles chaque jour. Je veillerai à ce que vous disposiez des moyens nécessaires pour y remédier : financiers, humains et juridiques.
- Cela signifie, enfin, quil faut mieux gérer larticulation entre hébergement et logement autonome. Comme vous le savez, jai décidé darrêter la fermeture des places hivernales car je veux remettre les choses dans lordre : on accompagne dabord les gens vers des logements et ensuite on ferme. Pas linverse ! On ne remet pas les gens à la rue en attendant lattribution hypothétique dun logement. Je vous demande, de vous mobiliser, en lien avec les DRJSCS, pour que toute personne en capacité dhabiter un logement autonome se voie proposer un logement avec, si nécessaire, un accompagnement social.
Laccès au logement, cest enfin la constitution dun véritable service public du logement. Il est inacceptable aujourdhui quun demandeur de logement social ait à suivre un véritable labyrinthe administratif pour obtenir gain de cause. Comme sy est engagé le Président de la République et comme je lai annoncé lors de lassemblée générale des ESH, je souhaite une réforme en profondeur des procédures dattribution des logements sociaux. Le dispositif refondu devra être plus simple, plus lisible et plus transparent, au service des usagers.
Jannoncerai dans les prochaines semaines les modalités de concertation sur ce chantier dont jai conscience quil sera compliqué. Je souhaite que les services déconcentrés y prennent toute leur part et que quelques uns dentre vous participent directement à cette concertation, en particulier bien sûr le directeur régional et interdépartemental de lhébergement et du logement dÎle-de-France, Jean-Martin DELORME, mais pas seulement. Jy associerai également les DDCS.
Construire plus et mieux, rénover et améliorer lexistant, rendre abordable ce bien de première nécessité quest le logement. Bâtir par ailleurs le chemin de légalité des territoires.
Voilà la feuille de route. Je compte sur vous pour y parvenir.
Je vous remercie.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 21 juin 2012