Texte intégral
La France aime bien la dépense publique. Mais cela ne date pas d'aujourd'hui. Georges Clémenceau disait : " La France est un pays extrêmement fertile. On y plante des fonctionnaires et il y pousse des impôts ". Aujourd'hui, alors que partout dans le monde, on baisse massivement les impôts, on réduit la dépense publique, la France, continue, seule, à contre courant, d'augmenter ses dépenses publiques et le nombre de ses fonctionnaires. A contre courant, oui, car ce n'est plus l'air du temps.
Regardez les présidentielles américaines. Ce soir je peux vous dire à coup sur qui va gagner ? Que ce soit Bush ou que ce soit Gore, c'est le contribuable américain qui sortira vainqueur. Le programme de George Bush c'est 10000 milliards de francs de baisse d'impôts. Quant à Al Gore c'est seulement, si j'ose dire, 4000 milliards de francs. Aux Etats-Unis, c'est-à-dire dans un pays ou les prélèvements obligatoires sont déjà de 19 points inférieurs à la France, ce qui correspondrait chez nous à 1800 milliards, c'est a dire cinq fois notre impôt sur le revenu de prélèvement en moins. Proportionnellement à notre population, c'est comme si aux prochaines élections présidentielles, les Français devaient avoir le choix entre deux candidats dont l'un proposerait 2000 milliards de baisse d'impôts et l'autre 800 milliards seulement.
Ce qui est sûr, au travers de cet exemple américain, suivi par le reste du monde, c'est qu'une époque se termine, une page se tourne. Le système du " Toujours plus ", " Toujours plus " de dépenses publiques, du " Toujours plus " de dépenses publiques, " Toujours plus " de lois et de réglementations, " Toujours plus " d'impôts, ce système appartient au passé et ne résiste pas au nouveau monde. Ce n'est plus une affaire de couleur politique, c'est une affaire de bon sens.
Et d'ailleurs même en France, ceux qui nous gouvernent aujourd'hui finissent par admettre qu'il faut bien maîtriser la dépenses publique, baisser les déficits et les impôts, même s'il y a encore, c'est vrai, bien loin entre les paroles et les actes.
Même en France, les contribuables semblent bien décidés à ne plus se laisser faire. Rendez l'argent, disent aujourd'hui les contribuables en colère lorsqu'ils voient la croissance remplir les caisses de l'Etat de super profits fiscaux. Oui, rendez l'argent. Permettez moi de saluer, dans cette prise de conscience, l'action des Contribuables Associés. Dans une démocratie moderne, il faut que les contribuables s'organisent, fassent entendre leur voix. Car il est trop facile, trop tentant pour ceux qui gouvernent -quelle que soit leur couleur politique- d'utiliser l'argent public pour distribuer les faveurs de l'Etat à des minorités bruyantes ou menaçantes, organisées, influentes ou reconnaissantes, quand la charge de ces faveurs est reportée sur les générations futures grâce aux déficits, quand elle est camouflée dans les impôts indirects, ou quand elle est supportée par toujours une même minorité de contribuables.
Les droits de l'homme sont aussi les droits du contribuable : " La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. " (Art 15, DDH). " Tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leur représentants, la nécessité de la contribution publique et de la consentir librement." (Art 14 ) Et il est bon aujourd'hui que les Contribuables Associés engagent le combat pour remettre les finances publiques à leur place. Car il n'y a pas de vraie baisse d'impôts sans une vraie baisse de nos dépenses publiques.
Réduire les déficits et les dépenses publiques, c'est la ligne qui a toujours été la mienne. Que n'ai-je pas entendu lorsque en 1986, comme Ministre, j'ai réduis de 20 % le budget de l'Industrie, supprimé cinq directions de ce ministère et une demi douzaine d'organismes budgétivores et inutiles ! Il est vrai qu'en 1995, dans un bref passage au Ministère des finances, j'ai eu à assumer un rôle ingrat qui a consisté, dans une situation de dépenses budgétaires non financées et de recettes fiscales en baisse, à donner un coup d'arrêt à la fuite en avant dans les déficits publics. Oh certes, beaucoup auraient bien aimé goûter aux charmes de la dépense en échappant à l'impôt et en augmentant une fois encore les déficits, ce qui inéluctablement aurait poussé nos taux d'intérêt à la hausse et étouffé toute perspective de retour de la croissance.
Réduire les déficits pour réduire les taux d'intérêt telle était alors la priorité et le chemin que j'ai tracés : 5, 4 , 3 , 2, 1, 0. 5 % de déficits en 1995, 4 % en 1996, 3 % en 1997, avec pour objectif l'équilibre budgétaire. C'est d'ailleurs cette politique qui nous a permis et de réussir l'Euro et de retrouver la croissance et l'emploi. Mais je voulais aussi, dans le même temps, engager une vaste réforme fiscale, avec, dans une première étape, un allégement de 20 à 25 % de toutes les tranches du barème de l'impôt sur les revenus de 1996, c'est-à-dire un impôt marginal abaissé à 45 % - en contrepartie il est vrai d'une remise à plat de toutes une série d'abattements et d'avantages fiscaux qui font la complexité de notre fiscalité françaiseet la joie de ses contrôleurs-. La suite vous la connaissez. Le premier ministre de l'époque a refusé cette réforme. J'ai quitté le gouvernement.
Oui répétons le, il ne peut y avoir de bonnes finances publiques quand l'Etat dépense plus qu'il ne prélève. Il ne peut y avoir de baisse d'impôts durable sans baisse des dépenses publiques. Et disons-le aussi, derrière les chiffres de nos dépenses publiques et de nos prélèvements obligatoires il y a un choix de société. Tout se passe comme si pendant un peu plus de la moitié de l'année les Français travaillaient pour l'Etat et les organismes publics sans avoir vraiment leur mot à dire avant de travailler vraiment pour eux-mêmes. Une date chaque année symbolise cette frontière, sorte de fête de l'indépendance personnelle que les contribuables associés célèbrent aujourd'hui et que j'avais moi-même proposé en 1985 de célébrer avec des fastes particulier puisque cette année là la fête de l'indépendance personnelle coïncidait avec la fête nationale du 14 juillet.
Au fil des ans, la feuille de paie a diminué au profit de la feuille d'impôts, des charges et des taxes de toutes sortes. Oui choisir la feuille de paie plutôt que la feuille d'impôt ou la feuille d'allocation, c'est un choix de société. C'est la priorité donnée à la responsabilité individuelle par rapport aux choix collectifs. En Allemagne, d'ailleurs, la Cour de Karlsrhue, l'équivalent de notre Conseil Constitutionnel, a décidé, pour des raisons de principe, que l'Allemagne étant un pays de liberté, l'Etat n'avait pas le droit de prélever plus de 50 % du revenu d'une personne, car si tel était le cas cela signifierait que l'Etat serait premier et la liberté seconde. Choix de société.
Une question se pose : pourquoi depuis si longtemps la machine à dépense publique tourne plus vite en France que la machine à produire des richesses ? Ce mal Français est à rapprocher d'un autre mal Français dénoncé depuis longtemps. Je veux parler de la concentration du pouvoir au sommet de l'Etat, concentration renforcée par les institutions de la Vème république et qui ont favorisé largement la confiscation du pouvoir par la haute fonction publique et qui ont fait de la France un pays de moins en moins gouverné et de plus en plus étatisé.
La preuve. La plus belle illustration en est l'actuel gouvernement. 32 ministres sur 33, c'est-à-dire 96 % sont issus de la fonction publique. Il en va de même de prêt de la moitié des députés dont plus d'un quart vient des rangs de l'éducation nationale. Sans que ni l'Etat, ni l'Education nationale n'en paraisse plus efficace pour autant. Puisque Monsieur Jospin aime les quotas, il me semble qu'il y a là une idée pour assurer à la société civile un minimum de représentation face à ce qui peut apparaître comme une vraie discrimination.
Si l'on veut demain baisser les dépenses publiques pour pouvoir baisser les impôts, il faut soigner ce mal Français à la racine, aérer la démocratie, redistribuer les pouvoirs vers les citoyens, les partenaires sociaux, les collectivités locales, retracer la frontière entre l'Etat et les citoyens, remettre l'Etat à sa place. Oui, l'Etat à sa place, quand le total des budget de la Justice et de la Police est inférieur à ce que le Budget accorde à la seule SNCF.
Chaque fois que nous laisserons les consommateurs, les familles, décider à la place des bureaux de ce qui est bon pour eux, nous ferons un pas dans la bonne direction. Chaque fois que nous prendrons un franc en moins dans le budget des familles françaises nous ferons un autre pas dans la bonne direction. Oui on doit baisser les dépenses publiques, c'est un problème de volonté.
Oui, on peut baisser les dépenses publiques, les exemples étrangers le montrent, c'est une question de méthode. Pour dépenser moins il faut dépenser autrement. Ce n'est pas par des coupes sombres dans les budgets que l'on dépensera moins, c'est en engageant la nécessaire réforme de l'Etat.
Privatiser, ouvrir, évaluer, alléger, simplifier, voilà quelques pistes : Privatiser, bien sûr, tout ce qui peut l'être. Ouvrir les services publics à la concurrence.
Partout l'ouverture à la concurrence stimule la croissance et l'innovation, provoque une offre de services nouveaux et fait baisser les prix. Tout le monde le voit bien avec les transports aériens ou les téléphones portables. L'Europe nous y pousse, mais la France rechigne. Hier elle proposait de mettre à l'abri les services publics à la Française dans notre Constitution. Aujourd'hui, en Europe, avec l'électricité, le gaz, les chemins de fer ou la Poste, la France défend ses monopoles.
La concurrence, répétons le, c'est le meilleur moyen de fournir le meilleur service au meilleur prix. Et ceci est tout aussi vrai, et il faudra bien s'y habituer, pour notre Mammouth national, je veux dire l'Education, ou pour le secteur de la Santé qui doit redevenir une assurance, certes obligatoire et sous condition, qui doit être libéré et non étatisé, qui doit favoriser la responsabilité personnelle et pas la sanction collective, bien sûr. Tout le monde en Europe s'engage dans cette voie. Je viens d'ailleurs de lire que les coûts de fonctionnement des hôpitaux suédois ont baissé de 10 à 30 % après qu'ils aient été régionalisé ou privatisé.
Alors, qu'on arrête de célébrer le service public à la Française. Le service public, ce n'est pas le droit d'exploiter un public captif, mais le devoir de servir un public au mieux. Le droit de grève c'est le droit d'arrêter son travail ce n'est pas le droit d'arrêter le travail des autres.
Alléger l'Etat, en diminuant d'abord le nombre de fonctionnaires. Quand je pense que nous avons le record des emplois publics, que tous les autres pays ont engagé depuis longtemps la décrue des effectifs de leur fonction publique, et que nous en France, à contre courant du monde, nous allons l'an prochain recruter 20000 fonctionnaires de plus. Qu'on me comprenne bien, il ne s'agit pas de licencier des fonctionnaires. Il s'agit simplement de ne pas remplacer tous les départ en retraite, comme par exemple l'Allemagne le fait depuis plus de 10 ans. Et nous en avons l'opportunité, car durant les départ en retraite vont s'accélérer dans les dix ans qui viennent : un fonctionnaire sur deux va partir en retraite. 4 % des effectifs de policiers sont sur le terrains aux heures ou se commettent 40 % des délits. Chaque jour, c'est Allègre qui le dit, " il y a 100 000 ou 200 000 élèves sans professeurs ". En 10 ans, " le budget de l'Education nationale a augmenté de 100 milliards ", c'est encore Allègre qui le dit, " quand le nombre d'élève diminuait de 400 000 ". Oui, à l'évidence on peut mieux faire.
On peut mieux gérer l'Etat et les fonctionnaires en redéployant les effectifs existant, en favorisant la mobilité entre les 1500 corporations de l'administration, en payant davantage ceux qui travaillent mieux ou plus. Permettez-moi d'ajouter que de telles réformes constituent une formidable opportunité pour les fonctionnaires. C'est respecter et valoriser les hommes que de les rémunérer en fonction de leur mérite et pas seulement en fonction de leur ancienneté. C'est leur offrir un beau projet que de réorganiser les administrations en donnant plus d'autonomie et de responsabilité dans la gestion de leur crédit, en intéressant ces services aux économies réalisées, en développant la participation et l'intéressement des fonctionnaires dans la réforme de l'Etat.
Evaluer l'action publique en donnant au parlement de vrais moyens d'évaluation et de contrôle indépendants de l'administration à l'instar de nombreuses démocraties. En dotant l'administration d'une comptabilité moderne. En développant les indicateurs de l'efficacité de la dépense publique et en sanctionnant sans faiblesse -on le fait pour les abus de biens sociaux dans les entreprises- les abus de biens publics.
Simplifier enfin. Il faut avoir le courage de remettre à plat l'ensemble constitué par les impôts, les charges sociales et les allocations de toutes sortes. On prélève beaucoup pour redistribuer beaucoup, et souvent aux mêmes, en nourrissant au passage une pléthore d'organismes sociaux qui fait qu'un tiers du budget social est absorbé par sa distribution.
Il faut encourager l'activité plutôt que l'assistance, remettre à plat l'ensemble de nos minimum sociaux (RMI, API, allocation logement) qui sont aujourd'hui illisibles, incohérents et qui emprisonnent des familles entières dans l'assistance et la dépendance. D'un côté nous avons deux à trois millions d'emplois notamment dans le secteur des services qui ne trouvent pas preneur parce que le coût du travail est trop élevé, et de l'autre plusieurs centaines de milliers de personnes enfermées dans la dépendance de minima sociaux aux mécanismes souvent peu incitatifs à la reprise du travail. Remplaçons tout ce maquis d'aide sociale par un mécanisme inspiré de l'impôt négatif. Voilà qui permettrait rétablir simultanément l'incitation au travail du chômeur indemnisé et l'incitation à l'embauche de l'employeur potentiel.
Simplifier, enfin, c'est avoir le courage de remettre en cause ces 8520 lois, 125 000 arrêtés ou décrêts, 380 000 règlements, les 20 000 nouvelles pages annuelles du journal officiel, ce harcèlement textuel qui étouffe l'initiative et étouffe la vie. Tailler, simplifier, recodifier notre Droit, oui comme à la fin de l'Ancien Régime. Déposer chaque année à l'Assemblée Nationale, un texte portant sur Diverses Dispositions de Simplification Administrative, ouvert à l'initiative des parlementaires et aux suggestions des contribuables et des citoyens. Il faut cesser de prétendre tout régler d'en haut par le décret ou par la loi, faire confiance davantage à la liberté et au contrat. Laisser vivre la vie. Oui cette société cadenacée, bloquée, étouffée, coincée, a besoin d'air frais.
Je m'arrête là même si j'ai d'autres idées, sur le chemin de ces quelques pistes, pour baisser vraiment les dépenses publiques.
Amis de contribuables associés, votre combat est le bon. Oui, la France devra nécessairement baisser ses dépenses publiques et ses impôts. C'est l'exigence du nouveau monde, la compétition fiscale nous y oblige. Car la France ne peut plus continuer longtemps à surtaxer sa matière grise et ses talents. Les Français en prennent conscience, parfois, au travers des absurdités fiscales qui ont la faveur des médias, la situation des footballeurs de l'équipe de France ou encore celle de Laetitia Casta. Mais nous sommes tous des Laetitia Casta. Nous sommes tous des footballeurs.
Il ne saurait y avoir d'exception médiatique. Votre démarche est la bonne. Ne croyez pas les hommes politiques qui vous diront qu'ils vont baisser les impôts s'ils ne vous disent pas d'abord qu'ils vont baisser les dépenses publiques. Alors continuez ce combat. Il faut qu'avec Contribuables associés, les partisans de la baisse des impôts et des dépenses publiques se fassent entendre, qu'ils soient de plus en plus nombreux, et alors permettez moi d'entrevoir le jour ou paraphrasant le Clémenceau du début de mon propos on pourra dire de la France qu'elle est un pays fertile. On y taille les dépenses publiques et on y récolte des baisses d'impôts.
(source http://www.demlib.com, le 8 juin 2001)
Regardez les présidentielles américaines. Ce soir je peux vous dire à coup sur qui va gagner ? Que ce soit Bush ou que ce soit Gore, c'est le contribuable américain qui sortira vainqueur. Le programme de George Bush c'est 10000 milliards de francs de baisse d'impôts. Quant à Al Gore c'est seulement, si j'ose dire, 4000 milliards de francs. Aux Etats-Unis, c'est-à-dire dans un pays ou les prélèvements obligatoires sont déjà de 19 points inférieurs à la France, ce qui correspondrait chez nous à 1800 milliards, c'est a dire cinq fois notre impôt sur le revenu de prélèvement en moins. Proportionnellement à notre population, c'est comme si aux prochaines élections présidentielles, les Français devaient avoir le choix entre deux candidats dont l'un proposerait 2000 milliards de baisse d'impôts et l'autre 800 milliards seulement.
Ce qui est sûr, au travers de cet exemple américain, suivi par le reste du monde, c'est qu'une époque se termine, une page se tourne. Le système du " Toujours plus ", " Toujours plus " de dépenses publiques, du " Toujours plus " de dépenses publiques, " Toujours plus " de lois et de réglementations, " Toujours plus " d'impôts, ce système appartient au passé et ne résiste pas au nouveau monde. Ce n'est plus une affaire de couleur politique, c'est une affaire de bon sens.
Et d'ailleurs même en France, ceux qui nous gouvernent aujourd'hui finissent par admettre qu'il faut bien maîtriser la dépenses publique, baisser les déficits et les impôts, même s'il y a encore, c'est vrai, bien loin entre les paroles et les actes.
Même en France, les contribuables semblent bien décidés à ne plus se laisser faire. Rendez l'argent, disent aujourd'hui les contribuables en colère lorsqu'ils voient la croissance remplir les caisses de l'Etat de super profits fiscaux. Oui, rendez l'argent. Permettez moi de saluer, dans cette prise de conscience, l'action des Contribuables Associés. Dans une démocratie moderne, il faut que les contribuables s'organisent, fassent entendre leur voix. Car il est trop facile, trop tentant pour ceux qui gouvernent -quelle que soit leur couleur politique- d'utiliser l'argent public pour distribuer les faveurs de l'Etat à des minorités bruyantes ou menaçantes, organisées, influentes ou reconnaissantes, quand la charge de ces faveurs est reportée sur les générations futures grâce aux déficits, quand elle est camouflée dans les impôts indirects, ou quand elle est supportée par toujours une même minorité de contribuables.
Les droits de l'homme sont aussi les droits du contribuable : " La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. " (Art 15, DDH). " Tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leur représentants, la nécessité de la contribution publique et de la consentir librement." (Art 14 ) Et il est bon aujourd'hui que les Contribuables Associés engagent le combat pour remettre les finances publiques à leur place. Car il n'y a pas de vraie baisse d'impôts sans une vraie baisse de nos dépenses publiques.
Réduire les déficits et les dépenses publiques, c'est la ligne qui a toujours été la mienne. Que n'ai-je pas entendu lorsque en 1986, comme Ministre, j'ai réduis de 20 % le budget de l'Industrie, supprimé cinq directions de ce ministère et une demi douzaine d'organismes budgétivores et inutiles ! Il est vrai qu'en 1995, dans un bref passage au Ministère des finances, j'ai eu à assumer un rôle ingrat qui a consisté, dans une situation de dépenses budgétaires non financées et de recettes fiscales en baisse, à donner un coup d'arrêt à la fuite en avant dans les déficits publics. Oh certes, beaucoup auraient bien aimé goûter aux charmes de la dépense en échappant à l'impôt et en augmentant une fois encore les déficits, ce qui inéluctablement aurait poussé nos taux d'intérêt à la hausse et étouffé toute perspective de retour de la croissance.
Réduire les déficits pour réduire les taux d'intérêt telle était alors la priorité et le chemin que j'ai tracés : 5, 4 , 3 , 2, 1, 0. 5 % de déficits en 1995, 4 % en 1996, 3 % en 1997, avec pour objectif l'équilibre budgétaire. C'est d'ailleurs cette politique qui nous a permis et de réussir l'Euro et de retrouver la croissance et l'emploi. Mais je voulais aussi, dans le même temps, engager une vaste réforme fiscale, avec, dans une première étape, un allégement de 20 à 25 % de toutes les tranches du barème de l'impôt sur les revenus de 1996, c'est-à-dire un impôt marginal abaissé à 45 % - en contrepartie il est vrai d'une remise à plat de toutes une série d'abattements et d'avantages fiscaux qui font la complexité de notre fiscalité françaiseet la joie de ses contrôleurs-. La suite vous la connaissez. Le premier ministre de l'époque a refusé cette réforme. J'ai quitté le gouvernement.
Oui répétons le, il ne peut y avoir de bonnes finances publiques quand l'Etat dépense plus qu'il ne prélève. Il ne peut y avoir de baisse d'impôts durable sans baisse des dépenses publiques. Et disons-le aussi, derrière les chiffres de nos dépenses publiques et de nos prélèvements obligatoires il y a un choix de société. Tout se passe comme si pendant un peu plus de la moitié de l'année les Français travaillaient pour l'Etat et les organismes publics sans avoir vraiment leur mot à dire avant de travailler vraiment pour eux-mêmes. Une date chaque année symbolise cette frontière, sorte de fête de l'indépendance personnelle que les contribuables associés célèbrent aujourd'hui et que j'avais moi-même proposé en 1985 de célébrer avec des fastes particulier puisque cette année là la fête de l'indépendance personnelle coïncidait avec la fête nationale du 14 juillet.
Au fil des ans, la feuille de paie a diminué au profit de la feuille d'impôts, des charges et des taxes de toutes sortes. Oui choisir la feuille de paie plutôt que la feuille d'impôt ou la feuille d'allocation, c'est un choix de société. C'est la priorité donnée à la responsabilité individuelle par rapport aux choix collectifs. En Allemagne, d'ailleurs, la Cour de Karlsrhue, l'équivalent de notre Conseil Constitutionnel, a décidé, pour des raisons de principe, que l'Allemagne étant un pays de liberté, l'Etat n'avait pas le droit de prélever plus de 50 % du revenu d'une personne, car si tel était le cas cela signifierait que l'Etat serait premier et la liberté seconde. Choix de société.
Une question se pose : pourquoi depuis si longtemps la machine à dépense publique tourne plus vite en France que la machine à produire des richesses ? Ce mal Français est à rapprocher d'un autre mal Français dénoncé depuis longtemps. Je veux parler de la concentration du pouvoir au sommet de l'Etat, concentration renforcée par les institutions de la Vème république et qui ont favorisé largement la confiscation du pouvoir par la haute fonction publique et qui ont fait de la France un pays de moins en moins gouverné et de plus en plus étatisé.
La preuve. La plus belle illustration en est l'actuel gouvernement. 32 ministres sur 33, c'est-à-dire 96 % sont issus de la fonction publique. Il en va de même de prêt de la moitié des députés dont plus d'un quart vient des rangs de l'éducation nationale. Sans que ni l'Etat, ni l'Education nationale n'en paraisse plus efficace pour autant. Puisque Monsieur Jospin aime les quotas, il me semble qu'il y a là une idée pour assurer à la société civile un minimum de représentation face à ce qui peut apparaître comme une vraie discrimination.
Si l'on veut demain baisser les dépenses publiques pour pouvoir baisser les impôts, il faut soigner ce mal Français à la racine, aérer la démocratie, redistribuer les pouvoirs vers les citoyens, les partenaires sociaux, les collectivités locales, retracer la frontière entre l'Etat et les citoyens, remettre l'Etat à sa place. Oui, l'Etat à sa place, quand le total des budget de la Justice et de la Police est inférieur à ce que le Budget accorde à la seule SNCF.
Chaque fois que nous laisserons les consommateurs, les familles, décider à la place des bureaux de ce qui est bon pour eux, nous ferons un pas dans la bonne direction. Chaque fois que nous prendrons un franc en moins dans le budget des familles françaises nous ferons un autre pas dans la bonne direction. Oui on doit baisser les dépenses publiques, c'est un problème de volonté.
Oui, on peut baisser les dépenses publiques, les exemples étrangers le montrent, c'est une question de méthode. Pour dépenser moins il faut dépenser autrement. Ce n'est pas par des coupes sombres dans les budgets que l'on dépensera moins, c'est en engageant la nécessaire réforme de l'Etat.
Privatiser, ouvrir, évaluer, alléger, simplifier, voilà quelques pistes : Privatiser, bien sûr, tout ce qui peut l'être. Ouvrir les services publics à la concurrence.
Partout l'ouverture à la concurrence stimule la croissance et l'innovation, provoque une offre de services nouveaux et fait baisser les prix. Tout le monde le voit bien avec les transports aériens ou les téléphones portables. L'Europe nous y pousse, mais la France rechigne. Hier elle proposait de mettre à l'abri les services publics à la Française dans notre Constitution. Aujourd'hui, en Europe, avec l'électricité, le gaz, les chemins de fer ou la Poste, la France défend ses monopoles.
La concurrence, répétons le, c'est le meilleur moyen de fournir le meilleur service au meilleur prix. Et ceci est tout aussi vrai, et il faudra bien s'y habituer, pour notre Mammouth national, je veux dire l'Education, ou pour le secteur de la Santé qui doit redevenir une assurance, certes obligatoire et sous condition, qui doit être libéré et non étatisé, qui doit favoriser la responsabilité personnelle et pas la sanction collective, bien sûr. Tout le monde en Europe s'engage dans cette voie. Je viens d'ailleurs de lire que les coûts de fonctionnement des hôpitaux suédois ont baissé de 10 à 30 % après qu'ils aient été régionalisé ou privatisé.
Alors, qu'on arrête de célébrer le service public à la Française. Le service public, ce n'est pas le droit d'exploiter un public captif, mais le devoir de servir un public au mieux. Le droit de grève c'est le droit d'arrêter son travail ce n'est pas le droit d'arrêter le travail des autres.
Alléger l'Etat, en diminuant d'abord le nombre de fonctionnaires. Quand je pense que nous avons le record des emplois publics, que tous les autres pays ont engagé depuis longtemps la décrue des effectifs de leur fonction publique, et que nous en France, à contre courant du monde, nous allons l'an prochain recruter 20000 fonctionnaires de plus. Qu'on me comprenne bien, il ne s'agit pas de licencier des fonctionnaires. Il s'agit simplement de ne pas remplacer tous les départ en retraite, comme par exemple l'Allemagne le fait depuis plus de 10 ans. Et nous en avons l'opportunité, car durant les départ en retraite vont s'accélérer dans les dix ans qui viennent : un fonctionnaire sur deux va partir en retraite. 4 % des effectifs de policiers sont sur le terrains aux heures ou se commettent 40 % des délits. Chaque jour, c'est Allègre qui le dit, " il y a 100 000 ou 200 000 élèves sans professeurs ". En 10 ans, " le budget de l'Education nationale a augmenté de 100 milliards ", c'est encore Allègre qui le dit, " quand le nombre d'élève diminuait de 400 000 ". Oui, à l'évidence on peut mieux faire.
On peut mieux gérer l'Etat et les fonctionnaires en redéployant les effectifs existant, en favorisant la mobilité entre les 1500 corporations de l'administration, en payant davantage ceux qui travaillent mieux ou plus. Permettez-moi d'ajouter que de telles réformes constituent une formidable opportunité pour les fonctionnaires. C'est respecter et valoriser les hommes que de les rémunérer en fonction de leur mérite et pas seulement en fonction de leur ancienneté. C'est leur offrir un beau projet que de réorganiser les administrations en donnant plus d'autonomie et de responsabilité dans la gestion de leur crédit, en intéressant ces services aux économies réalisées, en développant la participation et l'intéressement des fonctionnaires dans la réforme de l'Etat.
Evaluer l'action publique en donnant au parlement de vrais moyens d'évaluation et de contrôle indépendants de l'administration à l'instar de nombreuses démocraties. En dotant l'administration d'une comptabilité moderne. En développant les indicateurs de l'efficacité de la dépense publique et en sanctionnant sans faiblesse -on le fait pour les abus de biens sociaux dans les entreprises- les abus de biens publics.
Simplifier enfin. Il faut avoir le courage de remettre à plat l'ensemble constitué par les impôts, les charges sociales et les allocations de toutes sortes. On prélève beaucoup pour redistribuer beaucoup, et souvent aux mêmes, en nourrissant au passage une pléthore d'organismes sociaux qui fait qu'un tiers du budget social est absorbé par sa distribution.
Il faut encourager l'activité plutôt que l'assistance, remettre à plat l'ensemble de nos minimum sociaux (RMI, API, allocation logement) qui sont aujourd'hui illisibles, incohérents et qui emprisonnent des familles entières dans l'assistance et la dépendance. D'un côté nous avons deux à trois millions d'emplois notamment dans le secteur des services qui ne trouvent pas preneur parce que le coût du travail est trop élevé, et de l'autre plusieurs centaines de milliers de personnes enfermées dans la dépendance de minima sociaux aux mécanismes souvent peu incitatifs à la reprise du travail. Remplaçons tout ce maquis d'aide sociale par un mécanisme inspiré de l'impôt négatif. Voilà qui permettrait rétablir simultanément l'incitation au travail du chômeur indemnisé et l'incitation à l'embauche de l'employeur potentiel.
Simplifier, enfin, c'est avoir le courage de remettre en cause ces 8520 lois, 125 000 arrêtés ou décrêts, 380 000 règlements, les 20 000 nouvelles pages annuelles du journal officiel, ce harcèlement textuel qui étouffe l'initiative et étouffe la vie. Tailler, simplifier, recodifier notre Droit, oui comme à la fin de l'Ancien Régime. Déposer chaque année à l'Assemblée Nationale, un texte portant sur Diverses Dispositions de Simplification Administrative, ouvert à l'initiative des parlementaires et aux suggestions des contribuables et des citoyens. Il faut cesser de prétendre tout régler d'en haut par le décret ou par la loi, faire confiance davantage à la liberté et au contrat. Laisser vivre la vie. Oui cette société cadenacée, bloquée, étouffée, coincée, a besoin d'air frais.
Je m'arrête là même si j'ai d'autres idées, sur le chemin de ces quelques pistes, pour baisser vraiment les dépenses publiques.
Amis de contribuables associés, votre combat est le bon. Oui, la France devra nécessairement baisser ses dépenses publiques et ses impôts. C'est l'exigence du nouveau monde, la compétition fiscale nous y oblige. Car la France ne peut plus continuer longtemps à surtaxer sa matière grise et ses talents. Les Français en prennent conscience, parfois, au travers des absurdités fiscales qui ont la faveur des médias, la situation des footballeurs de l'équipe de France ou encore celle de Laetitia Casta. Mais nous sommes tous des Laetitia Casta. Nous sommes tous des footballeurs.
Il ne saurait y avoir d'exception médiatique. Votre démarche est la bonne. Ne croyez pas les hommes politiques qui vous diront qu'ils vont baisser les impôts s'ils ne vous disent pas d'abord qu'ils vont baisser les dépenses publiques. Alors continuez ce combat. Il faut qu'avec Contribuables associés, les partisans de la baisse des impôts et des dépenses publiques se fassent entendre, qu'ils soient de plus en plus nombreux, et alors permettez moi d'entrevoir le jour ou paraphrasant le Clémenceau du début de mon propos on pourra dire de la France qu'elle est un pays fertile. On y taille les dépenses publiques et on y récolte des baisses d'impôts.
(source http://www.demlib.com, le 8 juin 2001)