Texte intégral
Monsieur le Secrétaire général des Nations unies,
Monsieur le Secrétaire dÉtat,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais dabord vous dire à quel point je suis honoré de participer à ce sommet international, qui me donne loccasion, après les attentats dont mon pays a été victime, de vous adresser les remerciements chaleureux de la France et des Français pour les marques de solidarité que vous nous avez adressées dans cette épreuve. Je salue bien sûr nos hôtes américains et tout particulièrement John KERRY pour leur soutien indéfectible.
Nous sommes tous concernés par la menace. Cest la raison pour laquelle nous devons être plus unis que jamais pour y faire face, comme nous y invitent la stratégie anti-terroriste globale des Nations Unies et la résolution 2178 du Conseil de Sécurité.
Comment caractériser la menace à laquelle nous sommes confrontés ? Que faire face au phénomène de radicalisation violente ?
Malgré la barbarie de leurs crimes et les récents revers quelles ont connus, les organisations terroristes présentes en Syrie et en Irak, telles que DAESH et le Jabhat al-Nosra, continuent de recruter en Europe, et notamment en France. Cette menace terroriste est protéiforme et dune nature largement inédite. Aujourdhui, le terrorisme est diffus et en « accès libre ». Il implique des personnes qui sont nées ou qui ont grandi parmi nous, et qui un jour basculent, au terme dun processus plus ou moins rapide, dans le fanatisme terroriste. Par là même, le profil des terroristes et des terroristes potentiels sest diversifié. Nombreux sont ceux qui se radicalisent sur Internet. Certains partent pour la Syrie ou lIrak, avant de revenir en Europe, endoctrinés et entraînés à tuer. Dautres encore passent progressivement de la délinquance au terrorisme, au cours dun séjour en prison ou au contact dislamistes aguerris.
Même si les actions de prévention que nous avons mises en place dès le mois davril 2014 ont permis dempêcher bien des départs, plus de 400 jeunes Français sont aujourdhui présents dans la zone irako-syrienne. On estime que près de 1 400 Français sont impliqués, dune façon ou dune autre, dans les filières combattantes.
Pour nos services de sécurité et de renseignement, ces différents processus de radicalisation sont autant de défis. Le Gouvernement français a pris des mesures de fermeté pour renforcer notre arsenal antiterroriste, dans le respect du droit et des libertés fondamentales. Tous nos services sont mobilisés pour démanteler les filières terroristes, et empêcher tout risque dattentat.
1. Tout dabord, nous renforçons laction de nos services de sécurité et de renseignement intérieur :
- En leur donnant des moyens humains et matériels supplémentaires ;
- En réformant leur organisation et larticulation de leur action : pour mieux prendre en compte les phénomènes de porosité entre délinquance et terrorisme, les services doivent en finir avec la culture du cloisonnement et systématiser leurs échanges dinformations ;
- En densifiant leur implantation territoriale pour mieux détecter en amont les signes de radicalisation.
2. Ensuite, pour entraver laction et la propagande des terroristes, nous nous dotons doutils juridiques nouveaux. La loi du 13 novembre 2014, dont lessentiel est déjà appliqué avec la plus grande fermeté, a ainsi introduit dans notre législation quatre innovations majeures : linterdiction de sortie du territoire ; linterdiction dentrée et de séjour sur le territoire national pour les étrangers qui ne résident pas en France et représentent un danger pour la sécurité nationale ; le blocage administratif des sites Internet qui appellent au terrorisme ou en font lapologie ; enfin, nous avons renforcé le délit dapologie et de provocation au terrorisme.
Par ailleurs, nous élaborons un cadre légal moderne pour lactivité de nos services de renseignement. Dans les semaines qui viennent, le Gouvernement français déposera un projet de loi qui leur donnera des moyens juridiques adaptés aux nouveaux risques terroristes, aux mutations technologiques et aux évolutions du droit national et international.
3. Enfin, notre action comporte un volet de prévention de la radicalisation, qui mobilise tous les services de lÉtat. Nous avons mis en place une plateforme téléphonique nationale qui permet aux familles de signaler les risques de départ et de bénéficier dun soutien. Plus dun millier de signalements pertinents ont déjà été recensés. Par ailleurs, partout en France, les préfets qui représentent lÉtat ont pour mission de piloter une « cellule de suivi », composée de représentants de la Justice, du renseignement territorial, des collectivités locales, de lÉducation nationale et des services sociaux. Ces cellules prennent en charge les personnes en cours de radicalisation. Nous pouvons ainsi mener plusieurs types dactions, adaptées aux différents profils rencontrés : délinquants ; jeunes en situation déchec social et/ou de fragilité psychologique ; jeunes apparemment « sans problème », mais « en quête de sens ».
Cette action globale doit trouver un prolongement à léchelle européenne et internationale. La France prône ainsi dune part la pleine application de la résolution 2178 du Conseil de sécurité. Pour que nos efforts soient efficaces dans la durée, nous devons agir ensemble et coordonner notre riposte. Cest la raison pour laquelle nous avons dautre part proposé une stratégie globale aux membres de lUnion européenne. Le 11 janvier, jai réuni les ministres de lIntérieur du G10 (des Etats membres de lUE qui sont en première ligne sur le sujet) avec la présidence du Conseil de lUE et le commissaire européen aux Affaires de sécurité. Eric HOLDER et Alejandro MAYORKAS étaient également présents, ainsi que le ministre canadien de la Sécurité publique, Steven BLANEY. La semaine dernière, un sommet européen a confirmé les orientations que nous avons définies ensemble le 11 janvier.
Nous avons trois priorités :
1. létablissement dun PNR (Passenger Name Record) européen ;
2. le recours accru au Système dinformation Schengen (SIS) afin de tracer, signaler et arrêter les combattants étrangers. Il passe par un renforcement des contrôles effectués aux frontières de lUE, notamment pour les ressortissants européens ;
3. enfin, une meilleure coordination dans la lutte contre la propagande et le recrutement terroristes sur Internet, en pesant collectivement sur les opérateurs (dont je rencontrerai les principaux demain à San Francisco), en harmonisant nos législations en matière de retrait des contenus illégaux, et en adaptant au fonctionnement de linformation mondialisée le cadre juridique de la coopération internationale.
La coopération avec les pays du Proche et du Moyen-Orient, particulièrement touchés par le phénomène terroriste, est enfin une nécessité absolue.
Voilà ce que je voulais vous dire aujourdhui. Je suis convaincu que, face au terrorisme, notre force réside dans notre unité et notre solidarité. Cest ainsi que nous triompherons de la menace. Je vous remercie.
Source http://www.interieur.gouv.fr, le 20 février 2015
Monsieur le Secrétaire dÉtat,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais dabord vous dire à quel point je suis honoré de participer à ce sommet international, qui me donne loccasion, après les attentats dont mon pays a été victime, de vous adresser les remerciements chaleureux de la France et des Français pour les marques de solidarité que vous nous avez adressées dans cette épreuve. Je salue bien sûr nos hôtes américains et tout particulièrement John KERRY pour leur soutien indéfectible.
Nous sommes tous concernés par la menace. Cest la raison pour laquelle nous devons être plus unis que jamais pour y faire face, comme nous y invitent la stratégie anti-terroriste globale des Nations Unies et la résolution 2178 du Conseil de Sécurité.
Comment caractériser la menace à laquelle nous sommes confrontés ? Que faire face au phénomène de radicalisation violente ?
Malgré la barbarie de leurs crimes et les récents revers quelles ont connus, les organisations terroristes présentes en Syrie et en Irak, telles que DAESH et le Jabhat al-Nosra, continuent de recruter en Europe, et notamment en France. Cette menace terroriste est protéiforme et dune nature largement inédite. Aujourdhui, le terrorisme est diffus et en « accès libre ». Il implique des personnes qui sont nées ou qui ont grandi parmi nous, et qui un jour basculent, au terme dun processus plus ou moins rapide, dans le fanatisme terroriste. Par là même, le profil des terroristes et des terroristes potentiels sest diversifié. Nombreux sont ceux qui se radicalisent sur Internet. Certains partent pour la Syrie ou lIrak, avant de revenir en Europe, endoctrinés et entraînés à tuer. Dautres encore passent progressivement de la délinquance au terrorisme, au cours dun séjour en prison ou au contact dislamistes aguerris.
Même si les actions de prévention que nous avons mises en place dès le mois davril 2014 ont permis dempêcher bien des départs, plus de 400 jeunes Français sont aujourdhui présents dans la zone irako-syrienne. On estime que près de 1 400 Français sont impliqués, dune façon ou dune autre, dans les filières combattantes.
Pour nos services de sécurité et de renseignement, ces différents processus de radicalisation sont autant de défis. Le Gouvernement français a pris des mesures de fermeté pour renforcer notre arsenal antiterroriste, dans le respect du droit et des libertés fondamentales. Tous nos services sont mobilisés pour démanteler les filières terroristes, et empêcher tout risque dattentat.
1. Tout dabord, nous renforçons laction de nos services de sécurité et de renseignement intérieur :
- En leur donnant des moyens humains et matériels supplémentaires ;
- En réformant leur organisation et larticulation de leur action : pour mieux prendre en compte les phénomènes de porosité entre délinquance et terrorisme, les services doivent en finir avec la culture du cloisonnement et systématiser leurs échanges dinformations ;
- En densifiant leur implantation territoriale pour mieux détecter en amont les signes de radicalisation.
2. Ensuite, pour entraver laction et la propagande des terroristes, nous nous dotons doutils juridiques nouveaux. La loi du 13 novembre 2014, dont lessentiel est déjà appliqué avec la plus grande fermeté, a ainsi introduit dans notre législation quatre innovations majeures : linterdiction de sortie du territoire ; linterdiction dentrée et de séjour sur le territoire national pour les étrangers qui ne résident pas en France et représentent un danger pour la sécurité nationale ; le blocage administratif des sites Internet qui appellent au terrorisme ou en font lapologie ; enfin, nous avons renforcé le délit dapologie et de provocation au terrorisme.
Par ailleurs, nous élaborons un cadre légal moderne pour lactivité de nos services de renseignement. Dans les semaines qui viennent, le Gouvernement français déposera un projet de loi qui leur donnera des moyens juridiques adaptés aux nouveaux risques terroristes, aux mutations technologiques et aux évolutions du droit national et international.
3. Enfin, notre action comporte un volet de prévention de la radicalisation, qui mobilise tous les services de lÉtat. Nous avons mis en place une plateforme téléphonique nationale qui permet aux familles de signaler les risques de départ et de bénéficier dun soutien. Plus dun millier de signalements pertinents ont déjà été recensés. Par ailleurs, partout en France, les préfets qui représentent lÉtat ont pour mission de piloter une « cellule de suivi », composée de représentants de la Justice, du renseignement territorial, des collectivités locales, de lÉducation nationale et des services sociaux. Ces cellules prennent en charge les personnes en cours de radicalisation. Nous pouvons ainsi mener plusieurs types dactions, adaptées aux différents profils rencontrés : délinquants ; jeunes en situation déchec social et/ou de fragilité psychologique ; jeunes apparemment « sans problème », mais « en quête de sens ».
Cette action globale doit trouver un prolongement à léchelle européenne et internationale. La France prône ainsi dune part la pleine application de la résolution 2178 du Conseil de sécurité. Pour que nos efforts soient efficaces dans la durée, nous devons agir ensemble et coordonner notre riposte. Cest la raison pour laquelle nous avons dautre part proposé une stratégie globale aux membres de lUnion européenne. Le 11 janvier, jai réuni les ministres de lIntérieur du G10 (des Etats membres de lUE qui sont en première ligne sur le sujet) avec la présidence du Conseil de lUE et le commissaire européen aux Affaires de sécurité. Eric HOLDER et Alejandro MAYORKAS étaient également présents, ainsi que le ministre canadien de la Sécurité publique, Steven BLANEY. La semaine dernière, un sommet européen a confirmé les orientations que nous avons définies ensemble le 11 janvier.
Nous avons trois priorités :
1. létablissement dun PNR (Passenger Name Record) européen ;
2. le recours accru au Système dinformation Schengen (SIS) afin de tracer, signaler et arrêter les combattants étrangers. Il passe par un renforcement des contrôles effectués aux frontières de lUE, notamment pour les ressortissants européens ;
3. enfin, une meilleure coordination dans la lutte contre la propagande et le recrutement terroristes sur Internet, en pesant collectivement sur les opérateurs (dont je rencontrerai les principaux demain à San Francisco), en harmonisant nos législations en matière de retrait des contenus illégaux, et en adaptant au fonctionnement de linformation mondialisée le cadre juridique de la coopération internationale.
La coopération avec les pays du Proche et du Moyen-Orient, particulièrement touchés par le phénomène terroriste, est enfin une nécessité absolue.
Voilà ce que je voulais vous dire aujourdhui. Je suis convaincu que, face au terrorisme, notre force réside dans notre unité et notre solidarité. Cest ainsi que nous triompherons de la menace. Je vous remercie.
Source http://www.interieur.gouv.fr, le 20 février 2015