Déclaration de M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, sur la police de proximité, les relations entre la police et la gendarmerie, les polices municipales, la sécurité civile, l'intercommunalité et le climat social dans les préfectures, Paris le 7 juin 1999.

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Circonstance : Réunion des préfets le 7 juin 1999 à Paris

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les préfets,
J'évoquerai aujourd'hui les sujets suivants :
· la police de proximité,
· les relations entre la police et la gendarmerie,
· les polices municipales,
· la sécurité civile,
· l'intercommunalité,
· le climat social dans les préfectures.
Auparavant, je tiens à renouveler mes félicitations à la police nationale pour avoir, à lissue dune enquête longue et minutieuse, interpellé, confondu et mis à la disposition de la justice les auteurs et complices de lassassinat du Préfet Claude ERIGNAC. Tous les moyens ont été mobilisés dès le départ, ceux de la DNAT et ceux de la DCRG particulièrement. L'élucidation de cette affaire je l'ai dit - était une "cause sacrée" et pour ce qui me concerne, j'ai toujours incité à la patience et à la confiance dans le succès de l'enquête, par delà toutes les turbulences. Nous devions cette élucidation à la mémoire de votre collègue et à sa famille. La police nationale tout entière peut être fière de ce résultat, témoignage de son professionnalisme et de sa rigueur.
I- La police de proximité:
A loccasion de ma communication en Conseil des Ministres le 19 mai, jai rappelé que pour répondre à sa vocation, la police nationale doit aujourdhui évoluer en profondeur et transformer ses modes dintervention. A une police chargée principalement du maintien de lordre public doit progressivement se substituer une police qui, sans négliger ses missions traditionnelles, ait comme objectif premier la sécurité quotidienne de nos concitoyens, la lutte contre la délinquance de masse. Cette démarche a d'ores et déjà été entreprise par la préfecture de police avec la création en son sein d'une direction de la police urbaine de proximité.
Il faut maintenant créer la police de proximité dans les circonscriptions de sécurité publique, de manière volontariste, méthodique, progressive et concertée, en trois ans et en trois étapes.
1- une phase expérimentale:
Dans un premier temps, cinq circonscriptions-pilotes ont été retenues pour expérimenter la police de proximité: Nîmes, Châteauroux, les Ulis, Garges-les-Gonesse et Beauvais. Après une période d'élaboration des projets, j'ai donné, il y a quelques jours, mon accord à leur mise en uvre dans chacune de ces circonscriptions.
Au début de cette année, les expérimentations ont été étendues à 59 sites choisis dans autant de circonscriptions de 33 départements très sensibles ou sensibles, concernant 1,8 million dhabitants. Cette seconde série dexpérimentations est à la fois dune grande ampleur, et ciblée sur un certain nombre de zones ou quartiers sensibles.
Le 17 avril dernier, jai adressé aux préfets de ces 33 départements un courrier leur demandant de transmettre pour le 15 juin un projet qui sera soumis à validation, accompagné d'un dossier méthodologique daide à lélaboration du projet.
Après concertation préalable avec les syndicats et les personnels, vous veillerez à réunir en septembre prochain le comité technique paritaire départemental pour lui communiquer le projet validé avant sa mise en uvre, le 1er octobre, au plus tard.
2- une phase de préparation à la généralisation :
Parallèlement à cette démarche déconcentrée, un travail en profondeur a été entrepris à la direction centrale de la sécurité publique afin d'élaborer des instruments de pilotage et de conduire une concertation approfondie avec les syndicats.
Ces travaux seront enrichis par les observations et suggestions que vous ferez dans l'établissement des premiers bilans des expérimentations, à lautomne et au début de l'an prochain.
3- une troisième phase de généralisation:
La généralisation interviendra à partir de mars 2000 au lendemain des assises de la police de proximité que j'organiserai à ce moment-là. Elle sera conduite au plan national en trois vagues successives de mars à décembre 2000, de janvier à octobre 2001, d'octobre 2001 à juin 2002. Au niveau départemental, la généralisation de la police de proximité sera conduite sous votre autorité, selon des modalités qui vous seront communiquées en temps utile.
Je sais pouvoir compter, à chaque étape de la mise en oeuvre de la police de proximité, sur votre mobilisation et votre engagement personnels. Je devine également vos interrogations relatives aux moyens qui seront prévus pour favoriser la mise en uvre de cette réforme. Jy réponds par avance. Des mesures daccompagnement importantes ont été décidées pour assurer la réussite des expériences et de la généralisation de la police de proximité.
a) Il sagit tout dabord dun plan de formation élaboré dans le cadre du schéma directeur de la formation de la police nationale. Il sera prochainement mis au point et soumis à lavis du conseil national de la formation de la police nationale que je présiderai le 14 juin prochain, et à celui du comité technique paritaire central du 8 juillet.
b) Le développement des missions de proximité nécessite également un redéploiement des personnels. En application des décisions du Conseil de sécurité intérieure du 27 janvier dernier, 1.200 policiers et 700 gendarmes seront redéployés dès cette année dans les 26 départements très sensibles. Cet effort sera poursuivi à même hauteur pour ce qui concerne la police nationale en 2000 et 2001. Il devra être complété par des redéploiements internes au sein des services territoriaux de sécurité publique, au profit de la police de proximité. Jai demandé de surcroît le recrutement de 700 personnels administratifs en 2000 et 2001. Par ailleurs, les adjoints de sécurité verront leurs missions élargies à des tâches de garde et de logistique, afin de favoriser le retour à des missions de voie publique des personnels titulaires des corps actifs. Je vais signer une circulaire en ce sens. Le Conseil de sécurité intérieure du 12 juillet prochain examinera également la question des tâches indues qui grèvent lourdement la disponibilité des effectifs de police et la façon d'y répondre progressivement.
c) Par ailleurs, 3000 gardiens de CRS et gendarmes mobiles, soit le dixième de la réserve générale de maintien de l'ordre seront fidélisés pour une durée d'au moins six mois, dans les agglomérations les plus importantes. J'y reviendrai.
d) Enfin, des moyens de fonctionnement adaptés en véhicules légers, cycles et équipements radio et informatiques seront dégagés et affectés dans les sites dexpérimentation dès 1999. La police de proximité sera une priorité budgétaire en 2000, comme lindique clairement la lettre de cadrage du Premier ministre. Elle l'est d'ores et déjà pour ce qui concerne l'implantation de nouveaux commissariats ou bureaux de police.
II- Les relations entre la police et la gendarmerie:
Les policiers et les gendarmes sont des serviteurs solidaires de lEtat républicain. Tout ce qui les divise affaiblit la République; tout ce qui organise leur complémentarité la consolide. Dans vos départements, vous êtes les garants de cette complémentarité.
Le ministre de la défense a justement rappelé récemment que son ministère et la direction générale de la gendarmerie nationale sont des "fournisseurs de moyens". Mais l'emploi et la mise en uvre de ces moyens relèvent de vous, et de vous seuls, sous mon autorité. Il vous revient d'appliquer strictement les textes qui régissent les moyens de la gendarmerie comme ceux de la police, en matière de sécurité publique et de renseignement, et d'exercer pleinement les prérogatives et la responsabilité exclusives du ministre de l'intérieur dans ce domaine.
Le décret du 20 mai 1903, portant règlement sur l'organisation et le service de la gendarmerie, est, sur ce point, explicite. Son article 59 énonce: "La police administrative a pour objet la tranquillité du pays, le maintien de l'ordre et l'exécution des lois et règlements d'administration publique; les mesures prescrites pour l'assurer émanent du ministre de l'intérieur. Il appartient au ministre de l'intérieur de donner des ordres pour la police générale, pour la sûreté de l'Etat, et en en donnant avis au ministre des armées, pour le rassemblement des brigades en cas de service extraordinaire."
Je voudrais revenir sur la fidélisation territoriale dunités mobiles de police et de gendarmerie nationales. Celle-ci a été décidée par le conseil de sécurité intérieure du 19 avril dernier. Il sagit dune nouvelle forme demploi de ces forces, en vue dassurer le développement de la police de proximité et de dégager des moyens nouveaux dans les départements où la délinquance et les violences urbaines sont les plus préoccupantes.
Elles seront mises à la disposition de certains dentre vous pour être utilisées dans des missions de sécurité publique. La réserve gouvernementale sera préservée pour le maintien de lordre public. En effet les unités fidélisées conserveront une capacité opérationnelle.
La contribution des unités de forces mobiles est prévue à hauteur de 3.000 fonctionnaires et militaires, à parité entre la police et la gendarmerie nationales. Leffort sera étalé sur trois années, à partir du 1er octobre 1999. Lintégralité des unités ou détachements de CRS fidélisés sera employée dans les zones fortement urbanisées des départements sensibles. Les effectifs de gendarmes mobiles serviront, pour ce qui les concerne, pour moitié en zone urbaine et pour moitié en zone périurbaine en 1999. Dès le début du dernier trimestre de lannée 1999, 900 fonctionnaires des CRS et 750 gendarmes mobiles seront employés à ces missions.
Les unités seront utilisées six mois sur douze dans ces nouvelles missions, puis seront relevées. Leur capacité dintervention en matière dordre public sur lensemble du territoire national sera donc maintenue.
Si une modification du décret du 19 septembre 1996, relatif à la répartition des attributions et à lorganisation de la coopération entre la police nationale et la gendarmerie nationale, apparaît nécessaire, nous y procéderons. J'étudie cette question avec monsieur Alain Richard. Les conditions demploi des unités mobiles fidélisées mises à votre disposition seront précisées par ailleurs le moment venu.
Ce dispositif permettra aux responsables opérationnels de disposer en permanence deffectifs aptes à effectuer principalement des missions de patrouille et de surveillance, de service dordre, de prévention de troubles à lordre public ou de lutte contre les violences urbaines ou, le cas échéant, de renfort et dappui
Il vous reviendra ensuite détudier, en liaison avec la direction centrale de la sécurité publique, la déflation progressive des effectifs des compagnies ou sections dintervention de la police nationale dans les départements concernés par cette fidélisation territoriale des unités mobiles, en respectant naturellement les procédures paritaires de concertation. Les effectifs ainsi dégagés renforceront la police de proximité.
Quant à la réorganisation territoriale des forces de police et de gendarmerie, elle se poursuivra, conformément aux décisions du conseil de sécurité intérieure. La méthode que j'ai retenue tiendra le plus grand compte du vif souhait de concertation exprimé à l'automne dernier, ainsi que du souci de préserver les intérêts familiaux des fonctionnaires.
III - Application de la loi sur les polices municipales
La loi du 15 avril 1999 sur les polices municipales a d'ores et déjà fait l'objet d'une circulaire qui vous a été adressée. Plusieurs décrets d'application seront publiés dans les deux mois qui viennent.
La loi impose une coordination entre les polices municipales et la police ou la gendarmerie nationales, dès lors qu'une commune dispose de cinq agents de police municipale au moins. Cette coordination prendra la forme d'une convention, que vous négocierez avec les maires. L'un des décrets en fixera le cadre. D'ores et déjà, vous voudrez bien noter qu'au-delà d'un délai de six mois après la publication de ce décret, l'absence de convention de coordination entraînera l'interdiction du travail de nuit des polices municipales et l'impossibilité pour leurs agents d'être armés. Je vous invite à un dialogue constructif avec les élus, de sorte que les conventions soient signées.
La loi prévoit que les agents de police municipale sont agréés par le préfet et par le procureur de la République, et non plus seulement par ce dernier. Vous serez conduits à agréer les agents en fonction, déjà agréés par le procureur de la République. La loi fixe un délai de six mois, à compter de sa publication, pour l'agrément de ces agents. Je me suis engagé devant la représentation nationale à ce que cet agrément soit donné rapidement. Cela implique que vous ayez informé tous les maires disposant d'une police municipale de la nécessité pour eux de vous présenter dans les meilleurs délais les demandes d'agrément et que vous fassiez instruire rapidement ces demandes.
En règle générale, je pense qu'un délai de deux mois entre la demande et la décision est raisonnable. D'ailleurs, les agents en fonction ayant déjà été agréés par le procureur de la République, il sera exceptionnel que vous ayez à refuser l'agrément sollicité. Je vous précise à ce propos que votre silence, au bout de six mois vaudra refus, et donc interdiction d'exercer. Il est donc fondamental que vous preniez les décisions en temps utile.
Le régime de l'armement des agents de police municipale sera enfin clarifié. Il vous appartiendra d'autoriser, si vous l'estimez fondé compte tenu de leurs missions, l'armement des agents de police municipale.
Seules certaines missions et certaines circonstances, qui seront précisées par décret, peuvent justifier le port d'armes. Je vous demande d'être vigilants sur les demandes qui vous seront présentées. Tout est question d'appréciation au cas par cas. Quant aux armes qui pourront être portées par les agents de police municipale, elles seront précisées par décret. Conformément à ce que j'ai indiqué au Parlement, il s'agira d'armes de 4ème ou de 6ème catégorie. Il conviendra d'appeler sur ce point l'attention des maires qui vous présenteraient aujourd'hui des demandes d'armement.
Sur ces trois aspects, donc les conventions de coordination, l'agrément, l'armement la qualité de la contribution des polices municipales à l'effort global de sécurité dépend de la justesse de vos interventions. Nous disposons désormais d'un cadre clair de coopération entre police nationale et polices municipales, dont la création, je le rappelle, est facultative. Je vous demande de veiller à ce que cette coopération contribue à l'amélioration de la sécurité de nos concitoyens.
IV - Sécurité civile et services départementaux d'incendie et de secours
Les événements qui ont endeuillé le premier trimestre 1999, lavalanche de Montroc et lincendie du tunnel du Mont-Blanc, nous ont rappelé que le combat pour la sécurité des populations doit être mené d'abord sur le terrain de la prévention.
Comme vous le savez, un travail de diagnostic et dexpertise est conduit avec le ministère de léquipement, des transports et du logement sur 37 tunnels routiers et 31 tunnels ferroviaires. Mais dautres types de douvrages à risque pourraient utilement faire l'objet d'un tel examen, comme les ports ou les gares de triage.
A cet égard, je vous rappelle que l'élaboration des schémas départementaux danalyse et de couverture des risques doit vous permettre d'apprécier l'ensemble des situations à risques de vos départements et d'engager une démarche interministérielle et partenariale pour déterminer des priorités d'analyse, de prévention et de planification. Or, à ce jour, seuls 38 départements sont effectivement dotés d'un schéma. Cest naturellement très insuffisant et je vous invite à relancer cet exercice essentiel.
Toujours sur le terrain de la prévention, j'évoque pour mémoire la préparation du passage à l'an 2000, qui sera abordée plus longuement cet après-midi.
Sagissant des services dincendie et de secours, la départementalisation est maintenant engagée dans la plupart des départements, non cependant sans quelques tensions localisées.
Jai reçu, il y a quelques jours, les représentants des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires pour faire le point sur les problèmes soulevés.
Dans un certain nombre de départements, les sapeurs-pompiers professionnels avancent vis-à-vis des nouveaux CASDIS des revendications principalement orientées sur les indemnités et le temps de travail. Sur ces deux sujets, l'Etat n'est pas en première ligne. Je vous rappelle le calendrier prévu par la loi de mai 1996: le nouveau régime indemnitaire doit être négocié pour prendre effet en juin 1999, conformément au décret de juin 1998; pour le temps de travail, lharmonisation doit se faire au rythme dintégration des corps communaux ou intercommunaux dans le corps départemental.
Ces deux questions je le souligne - relèvent essentiellement des négociations entre les présidents de conseil dadministration et les organisations syndicales.
Pour le régime indemnitaire, le décret de juin 1998 dessine un cadre clair et laisse des possibilités dadaptation à lappréciation des partenaires locaux. Il en est de même pour lintégration des avantages antérieurement acquis. Ce cadre juridique national a fait l'objet d'une circulaire, au mois de février dernier.
Quant au temps de travail, il relève, comme dans lensemble de la fonction publique territoriale, de la libre administration des collectivités locales. Le conseil supérieur de la fonction publique territoriale, saisi en février 1998, dun projet de décret reprenant les conclusions du rapport rédigé par votre collègue monsieur Gosselin, a rejeté ce projet par une majorité nette des représentants des élus et des organisations syndicales.
Au niveau national, comme je my étais engagé en novembre 1997, des discussions ont été conduites sous légide de la direction de la défense et de la sécurité civiles avec les partenaires sociaux, pour les fonctionnaires des catégories B et C comme pour l'encadrement.
Pour les agents de catégorie C, conformément au communiqué diffusé par le ministère de lintérieur le 10 mars, des mesures dapplication rapide, visant à la reconnaissance des responsabilités exercées par les caporaux-chefs dagrès et à un accès élargi au grade de sergent, sont en cours dexamen interministériel. J'espère un aboutissement prochain.
Compte tenu des conditions difficiles dexercice du métier, des discussions ont été également ouvertes sur la situation des sapeurs-pompiers de 50 à 55 ans, pour répondre à la revendication d'un départ anticipé à la retraite qui permettrait aussi un rajeunissement du corps. Un projet a été élaboré mais doit être encore soumis à concertation interministérielle. Dès maintenant, je m'efforce de promouvoir un rôle accru pour les commissions d'aptitude.
Enfin, nous avons engagé le débat sur l'organisation de lensemble de la filière, notamment pour préciser les conditions de carrière des sous-officiers et des adjudants et le niveau de recrutement des officiers.
Votre action doit également porter sur le développement du volontariat.
Le Premier ministre a signé une circulaire, le 19 avril, tendant à favoriser lactivité du sapeur-pompier volontaire dans les administrations dEtat.
Dès maintenant, je vous demande de réunir les observatoires départementaux pour le développement du volontariat, et dinciter les employeurs à promouvoir, à travers les conventions signées avec les services départementaux dincendie et de secours, la disponibilité des sapeurs-pompiers volontaires.
Par ailleurs, la loi du 23 février 1999 assouplit les conditions de mise en uvre de lallocation de vétérance et répond à la forte demande des associations représentatives. Le décret dapplication sera prochainement publié, ainsi que celui sur lincapacité permanente des volontaires, qui prendra mieux en compte des situations sociales difficiles.
V - Le projet de loi sur le renforcement et la simplification de la coopération intercommunale.
Si un accord intervient en commission mixte paritaire entre l'Assemblée nationale et le Sénat, le texte pourra être promulgué au début du mois de juillet. Cet accord, s'il se fait, devrait faciliter l'application de la loi et les initiatives locales. Et les quelques mois gagnés sur le calendrier initial seront utiles aux simulations et à l'élaboration des projets.
Je souhaite en effet qu'au 1er janvier 2000, des communautés d'agglomération et, en milieu rural, des communautés de communes à taxe professionnelle unique et fort niveau d'intégration puissent être créées, soit ex nihilo, soit par la transformation de communautés de communes et de districts existants. Elles serviront d'exemple, notamment dans les grandes aires urbaines, là où les enjeux sociaux sont importants, là où la politique de la ville doit passer à la vitesse supérieure.
Je sais qu'avec le volet territorial du contrat de plan, la négociation des contrats de ville, vous pouvez craindre le trop-plein de procédures. Mais votre tâche est précisément d'acquérir et de faire partager une vue d'ensemble des enjeux, au-delà des procédures.
En matière d'intercommunalité, je vous demande de vous attacher avant tout à la qualité des projets. La loi vous confie des pouvoirs d'appréciation et d'initiative, mais elle respecte les principes de la décentralisation. Il vous faut donc prendre le temps nécessaire à un dialogue fécond avec les élus locaux. J'aurai l'occasion de revenir sur le projet de loi auquel j'attache une très grande importance.
Ce texte est d'apparence modeste; mais si ses dispositions sont bien comprises par les élus locaux, il peut durablement donner aux agglomérations l'outil institutionnel et financier qui manquait pour repenser l'organisation urbaine et lutter efficacement contre l'apartheid spatial, c'est-à-dire la ségrégation sociale. En même temps, il permettra aussi d'organiser l'espace rural et d'en assurer ainsi la sauvegarde.
VI - Le climat social dans les préfectures
Quelques mouvements sociaux ont récemment affecté des préfectures ou des sous-préfectures. Jy suis bien sûr extrêmement attentif.
Certes les missions confiées aux préfectures ne diminuent pas. Parfois ce sont les conditions de travail, dans des locaux inadaptés, qui laissent à désirer.
Mais ces difficultés bien réelles sont ressenties avec dautant plus dacuité que le dialogue social na pas toujours la régularité et lintensité qui conviendraient. Les agents du cadre national des préfectures ont besoin de se sentir pleinement associés aux actions de modernisation que vous conduisez.
Je vous invite donc à veiller à ce que les instances paritaires de concertation ne soient pas seulement le lieu déchanges formels ou convenus. L'organisation des services, la préparation des budgets, la programmation des travaux immobiliers doivent donner lieu à de véritables séances de travail, sur la base d'informations détaillées.
Je souhaite également que vous multipliiez les occasions de contacts personnels et directs avec les cadres des préfectures et des sous-préfectures. Une telle pratique aura pour eux valeur dexemple à légard de leurs propres collaborateurs. Nous avons besoin de la motivation de tous pour mener à bien la modernisation des préfectures, qui conditionne le succès de l'ambitieuse réforme de l'Etat. Cest une tâche de longue haleine qui implique une meilleure définition et une conception mieux coordonnée de laction de lEtat à travers le territoire, une déconcentration de la gestion, une globalisation accrue des crédits de fonctionnement et de personnel.
Toutes ces mesures vont dans le même sens: resserrer l'action de l'Etat, rendre ladministration territoriale plus efficace en accroissant votre marge de manuvre dans la gestion quotidienne et votre capacité dadaptation aux situations locales et aux problèmes que vous avez à résoudre.
En ce qui concerne les effectifs, les contraintes budgétaires ne laissent pas lespérance de les voir saccroître dans les prochaines années. Cette réalité impose une meilleure répartition des ressources humaines disponibles. Or lactuel effectif de référence, vieux de dix ans, na plus de réelle signification puisquil se situe en moyenne à 16 % au-dessous de la norme pour les agents de catégorie A, à 12 % pour la catégorie B, à 7 % pour la catégorie C. On pourrait discuter longuement sur la pertinence de cet indicateur.
Cest pourquoi la direction générale de ladministration entreprend une refonte de ce système, à partir dune étude sur les tâches des préfectures, leur évolution, leur quantification, leur modernisation. Cet exercice permettra didentifier la charge réelle de chaque préfecture et dapprécier, par comparaison, la qualité de lorganisation de chacun de ses services.
Il faudra en tirer les conséquences sur lorganisation: la DGA, avec laide de linspection générale de l'administration et de la direction de la programmation des affaires financières et immobilières, mettra à votre disposition un service de
conseil en organisation.
(Source http://www.interieur.gouv.fr, le 9 juin 1999)