Texte intégral
Monsieur le Chef du service de l’Inspection Générale,
Messieurs les Vice-Présidents,
Messieurs les Ingénieurs et Contrôleurs Généraux,
Messieurs les Présidents,
Messieurs les Directeurs d’administration centrale,
Madame la Directrice et Messieurs les Directeurs,
Mesdames, Messieurs,
Je suis tout particulièrement heureux, en cette dernière semaine de mars, d’ouvrir ce séminaire des Directeurs départementaux et régionaux et de vous retrouver, à cette occasion, pour la deuxième fois.
Nous allons avoir à conduire ensemble des chantiers de grande envergure, passionnants mais parfois difficiles. Vous êtes, tous ensemble, les porteurs de la richesse des missions de notre ministère et les représentants de la territorialité de l’agriculture et je sais pouvoir compter sur chacun d’entre vous et sur vos collaborateurs pour accompagner et mettre en œuvre la politique du Ministre.
Le premier de ces chantiers, tout à la fois immense et exaltant, doit nous permettre de construire de façon cohérente une nouvelle politique agricole, nationale et européenne.
Ce chantier lie donc très étroitement la mise en œuvre de ce qu’il est convenu d’appeler la réforme de la politique agricole commune et le projet de loi d’orientation agricole.
Je voudrais en premier lieu vous donner quelques indications concernant le calendrier retenu, puisque ces échéances vont rythmer votre travail comme le mien dans les mois à venir.
Concernant le calendrier communautaire, les propositions de règlements d’application des orientations présentées dans le Paquet Santer viennent d’être adoptées par le collège des Commissaires, en même temps que les propositions relatives aux fonds structurels et au cadre de financement de l’Union pour la période 2000-2006, période où devraient se réaliser les premiers élargissements.
Un très important Conseil des ministres de l’Agriculture se réunira, à Bruxelles, le 31 mars, pour prendre connaissance de l’ensemble des propositions. J’y ferai part de la position officielle de la France.
Ensuite, de longues négociations nous attendent. À vrai dire, contrairement aux fonds structurels ou au cadrage financier, qui arriveront à échéance le 31 décembre 1999, aucune échéance précise n’est fixée à la durée de vie des règlements relatifs à la PAC. Cependant, vous devrons avoir achevé cette négociation au plus tard à la fin de 1999, et, si possible, plus tôt. En effet, il nous faut être en mesure d’aborder dans les meilleures conditions la négociation commerciale agricole qui débutera, au titre de l’OMC, au début de l’an 2000, et faire en sorte que la PAC trouve, à travers la ligne directrice agricole, la place qui lui revient au sein des perspectives financières de l’Union.
Toutefois, il va de soi que les négociations n’entreront dans le vif du sujet qu’après les élections législatives allemandes, prévues en septembre prochain.
Voilà pour le calendrier communautaire. S’agissant du calendrier national, c’est précisément parce que la loi d’orientation agricole entend définir une politique agricole communautaire, et non pas simplement nationale, qu’il importe de tout faire pour que le Parlement puisse examiner ce texte une première fois avant l’été. C’est pourquoi nous allons actuellement de réunion interministérielle en réunion interministérielle pour tenir ce calendrier.
Je souhaite maintenant vous indiquer les orientations que j’entends proposer pour la politique agricole. Vous devrez, sur le terrain, vous en faire, les porte-paroles et les relais.
Nous entrons dans une période complexe, qui nous oblige à renouveler notre vision de l’agriculture et des politiques publiques qui y sont liées. Le temps est venu de redéfinir la place de l’agriculture dans notre société, et de reformuler les objectifs de la politique agricole en prenant en compte explicitement ses fonctions économiques mais aussi territoriales et sociales.
Concernant la fonction économique, les agriculteurs seront, bien entendu, demain comme aujourd’hui, des producteurs de denrées alimentaires et de matières premières pour les industries de transformation, mais cette activité économique doit générer d’autres richesses, qui ne sont pas marchandes, telle la préservation des ressources naturelles, des paysages.
Au titre de la fonction territoriale, les politiques publiques à l’agriculture doivent permettre de maintenir des exploitations agricoles viables sur tout le territoire national. Pour cela, il faut conduire une politique volontariste. La seule logique productiviste aboutirait inéluctablement à concentrer la production sur une part de plus en plus restreinte du territoire.
Enfin, la fonction sociale de l’agriculture doit naturellement nous conduire à prendre en compte la question de l’emploi et du travail et ceci pour deux raisons :
– la première, parce que l’exclusion du monde du travail mine chaque jour les fondements de la cohésion sociale,
– la seconde, parce qu’une agriculture française ne comptant plus que 100 000 exploitations représenterait pour notre société un appauvrissement économique, culturel, social et politique, que nous refusons.
Telles sont les raisons pour lesquelles je souhaite que soient reconnues les fonctions multiples de l’agriculture.
C’est en fonction de cette analyse et des objectifs auxquels elle me conduit, que je suis opposé au contenu des mesures actuellement proposées par la Commission européenne.
En effet, la réforme qui nous est présentée n’est, en fait, qu’un simple « aménagement » des règles en vigueur depuis 1992, elle ne fait qu’accentuer des recettes prétendues infaillibles : baisse des prix et aides compensatoires, mais cette fois, dans tous les secteurs, sans assurer la pérennité de la PAC.
Cette opinion est partagée par l’ensemble du Gouvernement, et c’est également le sentiment du président de la République.
Je souhaite assigner des ambitions bien plus grandes à notre agriculture, et d’abord celle de préparer l’avenir.
Cet avenir est dicté, en premier lieu, par le regard que l’opinion publique, française et européenne, porte sur les aides à l’agriculture. Qui peut croire que l’opinion acceptera indéfiniment que des aides, qui occupent une part prépondérante du budget communautaire, soient accordées, sans que soient prises en compte les préoccupations exprimées quant à l’équité dans la distribution des soutiens, l’équilibre des territoires, la qualité des aliments, la préservation de l’environnement et de l’emploi ?
Cet impératif de relégitimisation des politiques agricoles, qui inspire également le projet de loi d’orientation, converge avec un autre enjeu pour l’avenir : les négociations à l’OMC, à compter de l’an 2000.
Je souhaite également plus de pragmatisme dans l’approche de la réforme.
Le manque de pragmatisme se déduit de l’application systématique, à tous les secteurs de production, de la baisse des prix garantis : -20 % pour les grandes cultures, - 30 % pour la viande bovine, - 15 % pour le lait.
On peut concevoir la baisse des prix pour le blé, à des niveaux à déterminer. Mais à quels niveaux faudrait-il descendre pour exporter la plupart des céréales secondaires sans restitutions ?
Comment concevoir une baisse des prix de 30 % pour la viande bovine, pour exporter, sans restitution, certaines viandes sur les marchés d’Asie du Sud-est ? Cela n’est pas acceptable.
Comment, enfin, peut-on entamer le démantèlement des quotas laitiers en prônant une baisse des prix du lait pour quelques 10 % de la production exportés sur le marché mondial ?
La baisse généralisée et systématique des prix n’est pas la réponse à toutes les questions posées. Il ne saurait y avoir de solution unique à des problèmes fondamentalement différents. Les Chefs d’État et de Gouvernement des Quinze en ont d’ailleurs convenu en décembre dernier à Luxembourg. Ils n’ont pas été entendus.
Je vois également un mangue évident de pragmatisme dans la mise en œuvre d’une idée qui, dans son principe, est bonne, celle de la flexibilité. Il s’agit de permettre à la PAC de répondre aux besoins spécifiques de chaque État membre, sans remettre en cause la première des politiques communes, ni créer des distorsions de concurrence.
À cette fin, trois outils nous sont simultanément proposés. Les deux premiers, à savoir des enveloppes nationales de flexibilité et un mécanisme d’écrêtement institué au niveau communautaire, sont inadaptés ou symboliques. Le troisième outil qui réside dans la mise en place d’une modulation des aides entre OCM sur la base de deux critères : agri-environnement et emploi, est plus adapté mais son application est encore trop rigide.
Le découplage des aides, une meilleure prise en compte de la multifonctionnalité de l’agriculture, une flexibilité qui permet une distribution des aides plus équitable me semblent être des objectifs indissociables qui doivent être à tout prix retenus dans le cadre des négociations à venir.
Cette réorientation ne sera pas obtenue en élaborant un illusoire contre-projet alternatif à celui de la Commission. Ce serait voué à l’échec.
Elle ne résultera pas non plus d’une simple discussion technique. Pour réorienter ce texte, j’entends mettre à profit tout l’espace de la négociation à Quinze, sur la base d’une concertation régulière avec les organisations professionnelles agricoles, en favorisant les nombreuses convergences avec nos partenaires.
Et c’est parce que la France doit peser au maximum dans cette négociation communautaire, qu’il lui faut préalablement, et donc rapidement, mettre en place les moyens d’une agriculture vivante, sur tout le territoire, créatrice d’emplois et soucieuse de l’environnement.
C’est pourquoi le projet de loi d’orientation prévoit la création d’un outil, le contrat territorial d’exploitation, qui sera proposé à tous et qui consacrera la triple fonction de l’exploitation agricole, à savoir, économique, territoriale et sociale, dans le cadre d’objectifs nationaux, locaux et individuels.
Vous devez, sur le terrain, persuader vos interlocuteurs que les objectifs proposés, ne vont pas à l’encontre des intérêts des agriculteurs mais qu’ils visent, bien au contraire, à assurer la viabilité des exploitations agricoles sur l’ensemble du territoire, à les rendre plus fortes face à la concurrence internationale, à conforter le tissu rural et à légitimer ainsi la place de l’agriculture au sein de la Nation.
Sachez, dans tous les cas, dire à vos interlocuteurs que la concertation sur le projet de loi d’orientation agricole a été permanente. Il ne s’est en effet pas écoulé une seule semaine, depuis le mois de septembre, sans qu’une réunion de concertation avec les différentes parties prenantes, une rencontre avec mon Cabinet, se soit tenue.
Je vais m’arrêter là sur ce sujet passionnant parce que porteur d’avenir, Jean-François Collin, en effet, jusqu’à la fin de la matinée, instaurera le dialogue avec vous, sur ces orientations et leur déclinaison.
J’ajouterai simplement que ces orientations impliquent la mise en œuvre du pluralisme dans l’ensemble des instances consultatives et exécutives.
Le deuxième grand chantier ouvert par le Gouvernement concerne la sécurité alimentaire.
Vous le savez, c’est sur le fondement de la proposition de loi du Sénateur Huriet, amendée par le Gouvernement, que sera créée une Agence de sécurité alimentaire.
Cette agence, sous la triple tutelle de la Santé, des Finances et de l’Agriculture, permettra de conforter la qualité et l’indépendance de l’expertise scientifique concernant la sécurité sanitaire des aliments.
Une séparation claire entre l’évaluation des risques, confiée à cette agence, et la gestion de ces risques, qui restera de la compétence de chacun des ministères concernés, devrait permettre d’assurer une plus grande transparence des décisions et donc une plus grande efficacité des services de l’État. Le CNEVA rejoint l’agence, vous en êtes informés, il en constituera le noyau dur. La proposition de loi correspondante sera soumise à l’Assemblée Nationale, en deuxième lecture, le 8 avril prochain. Elle devra faire sans aucun doute l’objet d’une commission mixte, entre les deux Assemblées.
Concernant le projet de loi relatif à la qualité et à la salubrité des aliments préparé sous l’ancien gouvernement, celui-ci ne devrait pas être repris dans son état actuel. Une proposition de loi, soutenue par le Gouvernement, devrait permettre de réorienter son contenu en privilégiant les aspects « traçabilité et biovigilance ».
Vous en avez été également informés : un troisième texte législatif a été préparé, après concertation avec les organismes professionnels et les associations concernés. Il permettra la mise en place de mesures de lutte contre les animaux dangereux et errants. Ce texte prévoit, dans le même temps, des mesures de protection animale. Il rénove notamment le cadre juridique des mises en fourrière et en refuge et moralise le commerce des animaux.
Le troisième grand chantier que j’ai ouvert concerne le secteur de la forêt et du bois.
C’est un secteur auquel j’attache beaucoup d’intérêt, même si je ne peux lui consacrer autant de temps que je le souhaiterais. Il est bien au cœur de nos préoccupations de production, de développement des activités et d’utilisation harmonieuse et respectueuse du territoire.
J’ai ainsi décidé de proposer au Gouvernement en 1999 une loi spécifique qui s’attache à la modernisation de la filière forêt-bois. Afin d’en préparer les orientations dans les meilleurs conditions, le Premier ministre a nommé un parlementaire en mission. Comme vous le savez, c’est Monsieur Jean-Louis BIANCO, député des Alpes-de-Haute-Provence, qui a été choisi.
Le secteur forêt-bois doit relever deux défis majeurs : ceux de la compétitivité économique et de la gestion durable, dans un contexte de mondialisation de son marché et de forte pression des opinions publiques en faveur de la protection de l’environnement. Monsieur BIANCO est invité à analyser notamment l’ensemble des financements du secteur forestier et les questions touchant les différentes conditions de la compétitivité. Il est chargé de faire des propositions en vue de l’adaptation des outils et des dispositifs garantissant la gestion durable des forêts et permettant une bonne articulation de la politique forestière avec les autres grandes politiques publiques auxquelles elle contribue fortement, telles les politiques de l’eau, de la prévention des risques, de l’environnement et de l’aménagement du territoire, sans oublier celle de l’emploi.
Ce champ, déjà large, n’est cependant pas limité aux seules préoccupations législatives et j’accueillerai très volontiers les réflexions ou les propositions que Monsieur BIANCO voudra bien faire, au-delà de loi forestière, en faveur de la rénovation et du développement de ce secteur.
Nous aurons donc au cours de l’été matière à réflexion et à travail pour la modernisation de notre code forestier, à l’instar des pays grands producteurs de bois de l’Amérique du nord et de l’Europe du nord qui ont, ces dernières années, modifié leur loi forestière. C’est un chantier auquel je tiens beaucoup et qui devra aboutir au tout début de l’année prochaine.
Ce projet ne doit pas pour autant retarder la révision des orientations régionales forestières que vous conduisez en ce moment au sein des Commissions régionales de la forêt et des produits forestiers.
Étant donné les attentes multiples dont la forêt est l’objet, la pertinence de nos orientations dépend de notre capacité à organiser le débat entre tous les acteurs concernés : c’est le rôle que vous, directeurs régionaux, vous devez tenir dans l’animation des commissions régionales de la forêt et des produits forestiers.
Tels sont les grands chantiers dont l’aboutissement relève du domaine législatif.
Mais d’autres travaux nous attendent.
Dans le domaine communautaire, parallèlement au Paquet Santer, nous aurons à mener à bien la réforme de l’OCM viti-vinicole. La Commission devrait rendre publiques ses propositions dans les prochaines semaines. Il s’agira d’un dossier très important pour l’avenir de notre viticulture. Vous le savez, la France a déposé, il y a quelques mois, un mémorandum sur le sujet, qui fixe les orientations et définit les mesures que nous entendons faire valoir dans cette négociation.
S’agissant du Paquet prix, les propositions de la Commission s’inscrivent, pour l’essentiel, dans une logique de reconduction. Deux éléments importants font défaut :
– La proposition d’un contingent de droits de plantations de vigne, pour accompagner le légitime développement des vignobles dont les débouchés sont en expansion.
– Une proposition en matière de jachère. La France est très attachée à ce que le taux de jachère soit connu des agriculteurs assez tôt pour qu’ils puissent gérer leur assolement. Bien entendu, ce taux devra être maintenu au niveau le plus bas possible et il conviendra aussi, pour cette année, d’obtenir la non application du gel extraordinaire.
J’aborderai maintenant quelques dossiers d’actualité intéressant directement les exploitations et leur environnement.
J’ai eu l’occasion d’indiquer de nombreuses fois que l’installation des jeunes en agriculture était ma première priorité. Vous aurez, demain, l’occasion d’examiner les deux nouveaux outils créés en 1998 pour favoriser l’installation de jeunes qui, en l’absence d’encouragement spécifique, ne pourraient pas réaliser leur projet. Le décret correspondant a été publié le 8 mars dernier et les enveloppes financières vont vous être notifiées.
Vous avez déjà noté, pour l’aide à la transmission de l’exploitation et, plus généralement, pour l’ensemble du fonds pour l’installation en agriculture, une nouvelle étape dans la déconcentration de ce dispositif. C’est ce que vous souhaitiez. Le préfet de région définira les actions ; le préfet de département fixera le détail des règles de l’aide à la transmission.
À vous donc de tenir le cap et de mettre en valeur les résultats obtenus en matière d’installations supplémentaires, en étant attentifs à l’accueil des nouvelles catégories de candidats au métier d’agriculteur !
S’agissant, maintenant, de la prime au maintien des systèmes d’élevage extensifs, sa reconduction a fait l’objet de négociations difficiles avec la Commission Européenne.
Pour nous, l’intérêt agri-environnemental de cette mesure est évident : la disparition accélérée des pâturages a été enrayée et l’entretien des prairies s’est amélioré. Cependant, les instances européennes n’en étaient pas convaincues. Nous devons donc, à l’avenir, mieux mettre en valeur l’intérêt agri-environnemental de cette prime.
Tel est le sens des instructions que j’ai transmises aux préfets le 10 février dernier, après une concertation approfondie avec les organisations professionnelles.
Vous savez que le calendrier est très serré pour le paiement de cette prime avant le 15 octobre. Il faut en particulier que les éleveurs soient bien informés des nouvelles dispositions afin d’éviter les conséquences de dossiers erronés ou incomplets. Je vous demande donc de veiller, avec vos relais locaux, à la bonne information des éleveurs. Je compte aussi sur vous pour que vos services puissent procéder à des vérifications préalables dès la saisie des déclarations de surfaces afin qu’un maximum de dossiers soient susceptibles d’être payés le 15 octobre.
Les mesures agri-environnementales doivent reprendre toute leur importance. Expérimentées à partir de 1990, elles concernent maintenant plus de 50 000 agriculteurs volontaires et couvrent un million d’hectares. Après deux années de suspension des nouveaux programmes, une relance était indispensable et le budget pour 1998 la permet. Une circulaire de gestion vous a été envoyée et des séances d’information ont été effectuées.
Dans ce cadre, je souhaite appeler votre attention sur un point. La conversion à l’agriculture biologique va être poursuivie et amplifiée, dans le cadre d’un plan pluriannuel de développement de l’agriculture biologique sur cinq ans (1998-2002). La demande de produits biologiques explose tant en France qu’en Europe. L’agriculture biologique répond en effet à de fortes attentes : sécurité alimentaire, strict respect de l’environnement, bien-être des animaux… Or, la France a accumulé ces dernières années un retard considérable dans ce type de production : elle est passée du 1er au 14e rang européen entre 1985 et 1995. C’est pourquoi, dès 1998, l’enveloppe budgétaire globale consacrée à la conversion à l’agriculture biologique est multipliée par quatre, l’objectif étant d’intéresser à terme 25 000 agriculteurs, contre 4 000 aujourd’hui, couvrant un million d’hectares, contre 120 000 aujourd’hui.
Le programme de Maîtrise des Pollutions d’Origine Agricole, quant à lui, est entré dans sa 4e année de mise en œuvre.
L’année 1998 sera, en fait, une année de démarrage, après une certaine pause en 1997, qui a vu à la fois l’aménagement dans le temps de ce programme et un quasi triplement, par rapport aux années précédentes, des moyens financiers mis à disposition par l’État, les collectivités territoriales et les agences de l’eau.
L’importance de ce programme ne se mesure pas seulement aux moyens financiers qui lui sont consacrés : la mobilisation des agriculteurs et de leurs organisations professionnelles est à la hauteur de la demande sociale qui correspond à ce programme de restauration de la qualité de la ressource en eau.
1998 sera aussi l’année où des efforts accrus et spécifiques seront demandés à tous les partenaires de ce programme pour remédier aux situations les plus critiques : je veux parler de celles observées dans les zones dites d’excédents structurels.
Il y a dans ces zones, et tout particulièrement en Bretagne, une impérieuse et double nécessité : celle de la reconquête de la qualité des eaux et celle de la préservation, des pans entiers de l’économie que représentent les productions animales et leurs filières.
Le constat a été fait en 1997 : les programmes élaborés pour résorber les excédents d’azote se sont avérés insuffisants.
Les mesures contenues dans l’instruction adressée aux préfets concernés étaient donc indispensables.
Je les rappelle brièvement : limitation des plans d’épandage, obligation de traitement ou de transfert des effluents hors de ces zones pour les élevages les plus importants, réduction programmée d’effectifs pour certains élevages en situation irrégulière.
Vous m’avez fait part, ainsi qu’à Dominique VOYNET, des premières difficultés, d’application, et des réponses vous ont été apportées.
D’autres difficultés, très certainement, surgiront au fur et à mesure, mais je ne doute pas que nous les surmonterons.
Je demande, dans tous les cas, aux directeurs régionaux et départementaux concernés, de continuer, bien sûr, à nous informer des obstacles qu’ils rencontreront, mais aussi d’appliquer ces mesures avec la diligence qu’il convient.
Face à des professionnels parfois divisés sur ce sujet, et on peut le comprendre, des efforts de conviction doivent être menés parallèlement pour bien faire mesurer les enjeux.
Sachons qu’un échec conduirait inéluctablement et très vite à remettre en cause la partie positive pour le monde agricole de ces mesures, à savoir la possibilité pour les jeunes éleveurs de dimension économique insuffisante de se développer.
On voit bien, à ce simple énoncé, que nous sommes en quelque sorte condamnés à réussir.
Je vous rappelle, enfin, que les enveloppes de prêts bonifiés agricoles viennent d’être arrêtées pour 1998. Elle s’élèvent à 11 milliards de francs, dont 10,1 milliards de francs en prêts bonifiés d’investissement. Cette enveloppe est supérieure à la demande exprimée en 1997, et pourra donc couvrir les besoins sans difficulté.
En particulier, la réaffirmation de la priorité accordée par le Gouvernement aux jeunes agriculteurs se traduit par une sous-enveloppe de 5 milliards de francs, qui permettra de donner suite à toutes les demande éligibles de prêts bonifiés d’installation.
Par ailleurs, des améliorations significatives de la réglementation ont été décidées et seront mises en œuvre par des textes réglementaires qui viendront dans les prochaines semaines.
La direction des affaires financières et économiques vous dira tout sur ce sujet cet après-midi.
Au titre de la rubrique des dossiers d’actualité, je pourrais traiter bien d’autres sujets. Mais je ne peux pas, bien sûr, être exhaustif.
Je dirai toutefois que j’ai été informe de la mise en œuvre imminente du nouveau dispositif informatique de gestion des aides de la PAC PACAGE, puisque c’est son nom, serait enfin au rendez-vous.
***
Il me reste à traiter d’un secteur d’activité essentiel : il s’agit de l’enseignement agricole qui, comme je l’ai indiqué lors de notre rencontre de septembre 1997, constitue une des priorités au sein du budget de notre département ministériel.
Je ne reviendrai pas dans le détail sur le déroulement de l’année scolaire. Une préparation minutieuse ajoutée à une forte implication des directeurs régionaux, des chefs d’établissement et de l’ensemble des personnels permet, aujourd’hui, à nos élèves, étudiants, apprentis et stagiaires de bénéficier de bonnes conditions de travail.
Je vous indique que j’ai tenu à ce que soit clairement affirmé dans le projet de loi d’orientation agricole, le rôle d’autorité académique des directeurs régionaux de l’Agriculture et de la Forêt. Ceci vous ouvre des pouvoirs de négociation, au nom du Ministre, avec les partenaires régionaux mais aussi vous place dans l’impérieuse nécessité de faire appliquer, avec toute la rigueur nécessaire, les instructions ministérielles.
Les organisations syndicales me relatent des faits précis dans certaines régions concernant le non-respect de la réglementation relative à la gestion des personnels. Vous devez personnellement veiller à sa stricte application.
D’autres dossiers me paraissent devoir retenir plus particulièrement votre attention.
Tout d’abord, le dossier « Emplois - Jeunes ». La mobilisation des établissements d’enseignement a été exemplaire. Ainsi, sur les 1 000 emplois annoncés, 700 sont d’ores et déjà en place.
Ces emplois viennent en complément des 3 000 emplois prévus dans les dix accords cadres que j’ai signés lors du Salon de l’Agriculture avec mes collègues, Martine AUBRY et Dominique VOYNET, et des 1 400 emplois résultant de deux premiers accords signés à la fin de l’année dernière.
J’attends de vous tous une participation très active à la mise en œuvre de l’ensemble des accords cadres et à la concrétisation des projets locaux.
Le deuxième point que je souhaite évoquer avec vous concerne les orientations que j’entends donner à l’enseignement agricole dans les prochaines années.
Le troisième schéma national prévisionnel des formations, élaboré après une large concertation avec l’ensemble des partenaires, pour les années 1998 à 2002 fixe les axes stratégiques qu’il convient de mettre en œuvre.
Je souhaite une large diffusion de ce schéma auprès des partenaires régionaux pour qu’une réelle articulation soit recherchée entre ce schéma national et les plans et schémas régionaux.
Il me faut évoquer deux éléments importants de prospective. En premier lieu, l’Observatoire National de l’Enseignement agricole, présidé par le professeur René REMOND, vient de publier son premier rapport. Il s’agit d’un document qui devrait devenir progressivement une référence et un outil d’information et de communication interne et externe. Il permettra de suivre l’évolution de l’enseignement agricole dans le temps, dans l’espace et par rapport aux autres systèmes de formation. Une place particulière sera réservée à l’insertion professionnelle dans le souci prioritaire du développement de l’emploi en agriculture et dans les secteurs connexes.
En deuxième lieu, je vais prochainement installer un groupe de réflexion placé sous la présidence du Recteur Armand FREMONT, groupe qui aura la délicate tâche de faire l’analyse quantitative et qualitative des besoins de recrutement, pour les dix prochaines années, de formateurs et de cadres tant dans l’enseignement technique que supérieur. Il s’agit là d’un sujet particulièrement important, compte tenu de la pyramide des âges des agents concernés, qui nous laisse présager un renouvellement de près de 40 % de l’effectif sur une très courte période.
Je terminerai mon intervention sur l’enseignement agricole par deux incitations.
J’invite les directeurs régionaux de l’Agriculture et de la Forêt à suivre de très près, en liaison avec les Préfets, la préparation des prochains contrats de plan, notamment pour l’enseignement supérieur, ainsi que les débats qui vont avoir lieu dans le cadre de la préparation du plan « Université du troisième millénaire ».
Je vous invite, directeurs régionaux et directeurs départementaux, à vous rapprocher des Chambres d’agriculture, à l’occasion de l’élaboration des programmes départementaux et régionaux de développement. Il convient en effet, d’assurer le maximum de cohérence entre les actions conduites par les Instituts et celles conduites par les établissements d’enseignement agricole.
Je viens de vous entretenir des domaines d’interventions politiques du Ministère. Je souhaite aussi vous parler de l’organisation et de la vie des services, chargés de mettre en œuvre ces politiques.
La vie des agents de ce Ministère est, bien entendu, au cœur de mes préoccupations.
Les orientations du Gouvernement concernant la réforme de l’État sont désormais connues. J’entends contribuer, très étroitement, aux réflexions qui sont menées avec l’ensemble du Gouvernement, sur la modernisation du service public et sur la réforme des services de l’État et j’ai demandé aux directeurs d’administration centrale de s’y impliquer personnellement. C’est une demande que je vous adresse également, à cette occasion.
Vous avez pu le noter, la méthode et les objectifs retenus n’ont rien à voir avec ceux du précédent Gouvernement. En effet, il ne s’agit plus de bouleverser, au regard d’objectifs purement quantitatifs, sans concertation avec les personnels, la structure des services de l’État. Mais il s’agit, au contraire, d’adapter l’organisation des administrations publiques aux évolutions de la société, en tenant compte des réalités locales et en associant étroitement à la réflexion les agents concernés.
Vous devez entrer, sans état d’âme, dans l’exercice qui nous est demandé. Il convient en effet de réfléchir sans a priori à l’évolution des missions et des organisations actuelles. Toutefois, je vous le dis clairement : j’ai besoin de services déconcentrés qui, sous l’autorité des Préfets, mettent en œuvre les politiques publiques de ce ministère. J’ajoute que les nouvelles orientations que je souhaite donner à la politique agricole justifient davantage encore la présence de services de l’État capables d’intégrer les différentes composantes de cette nouvelle politique : l’économie, les préoccupations environnementales, l’emploi, l’aménagement territorial et la qualité des produits.
Par ailleurs, dans le cadre des réflexions qui sont conduites au niveau interministériel, nous devons montrer sans ambiguïté notre engagement déterminé pour la déconcentration et l’amélioration du service rendu aux usagers.
Pour animer la réflexion au sein de notre Administration, j’ai désigné Monsieur de LAVERNEE, comme haut fonctionnaire chargé de la modernisation et de la déconcentration.
J’ai également désigné Monsieur DEMANGE, comme suppléant, pour l’assister dans ces fonctions.
Je tiens à ce que vous soyez étroitement associés à l’ensemble des travaux qui seront conduits.
Je viens de l’indiquer : nous devons être partants pour tout ce qui va dans le sens d’une modernisation de notre administration.
Je me réjouis donc que le dossier relatif à la déconcentration des décisions individuelles soit désormais bien avancé, puisque vous avez récemment été les destinataires des instructions vous permettant désormais de mettre en œuvre les décisions qui étaient prises à PARIS.
Nous devrons également préparer ensemble le programme pluriannuel de modernisation du ministère.
Pour montrer notre capacité d’évolution, j’ai tenu à faire-part à mes collègues concernés, notamment ceux de l’équipement, de l’aménagement du territoire et de l’environnement et de l’intérieur, des propositions sur l’évolution des missions d’appui aux collectivités locales.
Dans ce domaine, nous avons la volonté de faire émerger un consensus sur le positionnement adéquat de l’action des services de l’État, pour que soient mieux pris en compte l’évolution de la demande des collectivités et les changements intervenus depuis la décentralisation.
J’estime, pour ma part, que la budgétisation des indemnités qui sont versées aux agents en liaison avec ces activités est une condition nécessaire à ces évolutions.
Je vous demande d’explorer, en concertation avec vos agents, les modalités possibles de mise en œuvre des orientations exprimées dans ce document, afin d’être prêts, le moment venu, à en tirer les conséquences dans la conduite de votre action.
Parallèlement aux travaux interministériels sur la réforme de l’État, j’ai engagé des réflexions ministérielles sur l’organisation de l’administration centrale, l’organisation des missions de l’État dans le domaine du cheval et des activités hippiques et sur la place des services vétérinaires et de la protection des végétaux au sein des services déconcentrés. Sur ce dernier dossier, j’ai confié au COPERCI, plus précisément aux trois vice-présidents des conseils généraux et au chef de service de l’inspection générale, une importante mission visant à définir les conditions d’un fonctionnement des activités de contrôle de la sécurité sanitaire conforme aux normes internationales admises en la matière et à identifier les domaines dans lesquels les synergies et les complémentarités existant entre les services d’inspection et les autres composantes des services déconcentrés pourraient être exploitées. Un rapport doit m’être remis dans les toutes prochaines semaines. C’est un sujet sensible, mais il faudra bien trouver des solutions opérationnelles.
J’attache, vous le savez, une attention toute particulière à la qualité des relations humaines et sociales au sein de la communauté de travail et au respect des engagements pris à l’égard des personnels.
J’ai signé, le 16 décembre dernier, avec les représentants du personnel, un accord triennal sur la formation continue. Je souhaite que vous utilisiez pleinement cet outil d’évolution des compétences.
Les organisations syndicales se sont inquiétées de la diminution des crédits consacrés à la formation continue dans certains services déconcentrés.
Je souhaite que les engagements pris au niveau national soient respectés à tous les échelons.
La situation des agents non titulaires est également au cœur de mes préoccupations. À ma demande, un groupe de travail a été constitué en vue d’examiner les conditions d’emploi de l’ensemble des agents non titulaires et de proposer des solutions susceptibles d’améliorer leur gestion et d’harmoniser l’ensemble des situations rencontrées.
Pour ce qui concerne les recrutements à venir, je vous engage de vous conformer désormais, à la législation et à la réglementation en vigueur.
Je ne voudrais pas abandonner le domaine de l’organisation et du fonctionnement du ministère sans vous informer du passage devant le Conseil d’État, avant-hier, du projet de décret portant statut d’emploi des directeurs régionaux et des directeurs départementaux de l’Agriculture et de la Forêt. La publication de ce texte, sans aucun doute fort attendue, est donc maintenant proche.
Enfin, je terminerai sur la place que le Ministère doit prendre dans le plan d’action gouvernemental pour la société de l’information.
J’ai demandé au service de la communication et à la direction générale de l’administration de s’engager résolument dans la mise en œuvre du site internet du ministère et de lancer, dans ce cadre, plusieurs chantiers. Je souhaite, à cet égard, qu’une attention particulière soit portée à la mise en ligne des notes de service éditées par l’administration centrale qui représentent, comme vous le savez, chaque année un volume considérable d’informations. Par ailleurs, je souhaite que la mise à disposition des citoyens de versions électroniques des formulaires du ministère soit effective pour le 31 décembre 1998.
Je dirai enfin un mot au sujet du devoir d’information qui doit être le vôtre auprès du grand public car vous constituez à mes yeux les relais de proximité les plus efficaces auprès de nos usagers et vous devez impérativement saisir cette opportunité, même si cela nécessite de réfléchir à une nouvelle organisation des services et à de nouveaux modes de management des équipes.
La longueur de mon intervention a été à la mesure de l’ampleur et du nombre des travaux qui nous attendent. Sachons, tel le « héros mythologique », les mener à leur terme avec conviction, détermination et imagination.