Texte intégral
Editorial de Christine Bonnefon
Nous avons, avec la résolution générale, voté une orientation pour trois ans à venir.
Ce texte doit être pour les militants que nous sommes, le texte de base de l’activité fédérale.
A travers les lignes de force qui le traversent, il doit aussi être le moteur de notre vie syndicale.
Nous devons, nous, faire vivre cette orientation traduire le vote du Congrès de Rennes sur le terrain de l’action.
Syndicalistes, nous avons fait, à Rennes, un choix qui est d’abord le choix d’une société solidaire.
Solidaires, nous le sommes,
Dans la défense des droits de la personne humaine,
Dans le soutien aux peuples du monde,
mais aussi, pour l’emploi, les services publics et particulièrement le service public d’éducation.
Nous entrons dans une période difficile, avec un gouvernement qui ne cesse de donner des gages aux milieux financiers, pratique une politique plus qu’ambiguë vis-à-vis de l’extrême droite, bloque depuis des mois la politique contractuelle dans la fonction publique quand il ne renie pas, carrément, sa propre signature !
Nous avons notre projet, à nous de le concrétiser, par la négociation si c’est possible, par l’action s’il le faut !
Intervention de Jean-Paul Roux, Jeudi 13 mars 1997
Le conseil fédéral vient d’élire une équipe.
Au-delà des qualités et des défauts de chacune de ses militantes et de chacune de ses militants ce qui fera sa force tient à la fois de la confiance que vous venez de lui témoigner et de sa cohérence.
Cette équipe conjugue renouveau et continuité. C’est une équipe qui, avec vous, a l’ambition de changer, de faire évoluer pratiques et comportements.
C’est une condition indispensable à la reconquête.
C’est une équipe qui, avec vous, tient à faire de l’adhérent sa priorité pour, qu’en permanence, chaque collègue puisse se reconnaître, s’identifier à une organisation dont l’essence et la finalité sont de les représenter et de les défendre.
Enfin, c’est une équipe diverse, déterminée :
- image de cette FEN qui réaffirme sa volonté de promouvoir un projet global d’éducation, de recherche, de culture, de justice.
- image de cette FEN, présente partout, car elle en représente tous les personnels.
C’est dans sa diversité que la Fédération trouve ses militantes et ses militants, qu’ils enseignent ou qu’ils n’enseignent ou qu’ils n’enseignent pas, attachés aux taches éducatives au sein d’une équipe solidaire qui les rassemble tous. C’est ainsi que vous avez élu secrétaire général un militant issu des métiers d’administration et de gestion.
Ceux qui hors de la FEN seraient surpris – ou feraient mine d’être surpris – n’étaient sans doute pas attentifs à notre précédent congrès ou, sur proposition de Guy, vous aviez en quelque sorte pris une option. Dans la confirmation d’aujourd’hui, je vois un symbole, celui de notre projet éducatif, l’Ecole de l’an 2000 et aussi notre volonté d’affirmer une conception globale de l’école et de son devenir portée par une multiplicité de compétences rassemblées autour de l’acte éducatif.
Nous allons donc construire ensemble.
Nous allons donc nous y coller mais vous allez aussi vous y coller car nous sans vous, cela n’a pas de signification, d’issue et de légitimité.
Notre force aujourd’hui réside à la fois dans notre capacité à changer et dans la fidélité à nos sources, à nos racines.
C’est le signe d’une organisation vivante qui a su, qui sait, qui saura dans ce congrès, et surtout au-delà, évoluer, changer, assumer les mutations de la société, du service public d’éducation, de recherche, de culture, de justice, les mutations du syndicalisme aussi et en assumer avec courage et lucidité les enjeux.
A nous d’en décider dès aujourd’hui. Ainsi se dessine, au travers de notre histoire une continuité.
Depuis Adrien Lavergne, Georges Laure et James Marange et aussi, près de nous, présents dans cette salle, André Henry, Jacques Pommatau, Yannick Simbron. A des époques différentes, dans des circonstances historiques différentes ils ont porté le même idéal, les mêmes valeurs, la même conception du syndicalisme.
C’est le même relais qui a été transmis à Guy et qu’il me transmet à son tour.
C’est maintenant pour moi un moment difficile et pourtant cette responsabilité me revient.
Je veux parler de Guy et la langue syndicale n’est que peu adaptée à dire l’amitié.
Je vais donc commencer par là et mêlerai, pour le lien qui m’unit à Guy, militantisme et amitié. J’y ajouterai la note d’humour qui m’évitera de tomber dans l’émotion.
Guy et moi nous nous sommes connus bien avant de nous rencontrer.
C’était en 1962. Je venais de quitter, dans des circonstances difficiles, mon pays natal. Et dans ce même pays, à quelques mois près, dans cette même ville et quasiment dans le même quartier, arrivaient deux jeunes instituteurs, Marie-Paule et Guy Le Neouannic.
Ils venaient essuyer les premiers plâtres de la coopération en Algérie.
Mais cela nous ne l’avons su que bien plus tard !
Car la vie militante de Guy, c’est d’abord dans ce pays qu’elle a pris naissance, qu’elle s’est développée, jusqu’au secrétariat de la section FEN-Algérie.
La FEN ! Pouvait-il en être autrement, pour ce breton tombé tout petit dans le bénitier de la laïcité et qui ne s’en est jamais remis. A sa décharge disons tout de suite que la très mauvaise influence de son département, la Loire Atlantique, n’a pas arrangé les choses, n’est-ce pas Jean-Pierre Gilet ? N’est-ce pas Pascal Priou ?
C’est ainsi qu’en 1975 il est comme on dit « monté » à Paris, à la FEN Nationale, à la demande d’André Henry.
Il avait à l’époque la rouflaquette avantageuse et déjà ce caractère plein de douceur qui fait toujours son charme !
Je sévissais alors dans ma section FEN du Var. Nous nous sommes rencontrés et très vite pris d’amitié. Le mal depuis, n’a fait qu’empirer…
Ainsi Guy, en tant que secrétaire national, - touche à tout de talent -, assume plusieurs secteurs : Jeunesse, Hors de France, Presse, Enseignement Supérieur, Départements et Territoires d’Outre –Mer. Mais, c’est bien entendu le dossier des Droits et libertés, et celui de la laïcité où il va donner toute sa mesure. Ce sera désormais « son » dossier identitaire en phase avec ce sens aigu des valeurs qui est le sien, en phase aussi avec sa rigueur intellectuelle. Ce dossier laïque, il en a d’ailleurs conservé la charge jusqu’à ce jour dans le cadre du secrétariat général.
Secrétaire général, il aurait pu l’être à d’autres périodes. Il a dû assumer cette responsabilité en 1991, dans des circonstances difficiles, parce que c’était difficile, parce que cela allait devenir terriblement difficile.
Je sais, mieux que personne ce que furent alors ses hésitations, les scrupules que lui dictait son sens de l’amitié. Il a accepté lucidement, les yeux ouverts sur les responsabilités terribles qui l’attendaient. Je veux témoigner qu’à cette époque, il n’y avait pas grand monde pour lui contester la place.
Nous en avons parlé ensemble et pensé ensemble qu’il fallait que ce soit lui. Il a ainsi conduit notre organisation au travers de la crise de clarification, - qui fut aussi un déchirement -, que nous avons vécue en 1992 et qui a refondé le pacte fédéral.
Cette responsabilité, écrasante, assumée parce que la survie de la FEN était à ce prix, c’est tout Guy : une volonté, une exigence sans faille au service de notre idéal.
Alors même que la FEN arrivait au terme d’une étape de sa mission historique, il a su ouvrir la voie à une seconde étape historique de cette mission au travers de la création de l’UNSA. Cette étape dont nous avons dans ce congrès à tracer la route est fidèle à l’ambition de nos origines.
Alors que nous parlions du congrès, la semaine dernière Guy me rappelait, de mémoire, une phrase de Denis Forestier, c’était lors de sa dernière AG de la MGEN le 7 juillet 1977 à Nancy. Denis disait : « J’ai toujours soutenu et j’atteste encore que dans la dette réciproque, militant-organisation, c’est le militant qui est débiteur ». Je sais que Guy partage profondément cette idée.
Mais je sais aussi qu’une organisation doit savoir reconnaître et dire le rôle et la place tenus à un temps décisif de l’histoire, par un de ses militants.
C’est cette reconnaissance que lui témoigne aujourd’hui le congrès.
Refonder notre syndicalisme
Fidèle à ses valeurs et à son histoire, la FEN continuera à œuvrer pour la reconstruction du mouvement syndical.
Nous voulons, nous ferons un syndicalisme qui intéresse les salariés et les implique dans la vie syndicale et professionnelle, et qui permette d’établir le rapport de forces sur le terrain du métier. Nous voulons, nous ferons un syndicalisme proche des salariés, à leur écoute. Un syndicalisme qui développe et renforce le militantisme sur les lieux de travail.
La FEN se donne une année pour mettre en œuvre le processus de refondation qui relève de sa responsabilité. Placée sous le contrôle permanent du CFN, cette démarche progressive devra être amorcée dès le lendemain du congrès.
Une FEN déterminée et rassemblée sur son identité…
Pour faire aboutir notre projet syndical, nous avons besoin d’une FEN qui concentre son activité et son expression sur les questions d’éducation, et de formation, de recherche, de culture, de justice, par l’affirmation de son projet « l’Ecole de l’An 2000 » pour lesquelles elle est le lieu irremplaçable de mise en synergie et de renforcement de ses syndicats. Ainsi rassemblée sur son identité, la FEN sera renforcée et gagnera en efficacité, en combativité. La vie syndicale, l’action syndicale doivent s’organiser sur tous les lieux de travail. Une vie syndicale riche, démocratique, représentative des différentes composantes de la FEN, à l’écoute des métiers, doit être développée. Les évolutions de la société et des attentes des personnels doivent nous conforter dans notre volonté de poursuivre de façon active l’approfondissement de notre projet syndical et la rénovation de nos pratiques militantes et de notre fonctionnement. La FEN doit non seulement développer la coordination de ses syndicats mais aussi mettre en perspective l’action de chacun d’eux avec le souci de défendre avec plus d’efficacité l’intérêt des personnels et l’intérêt général.
Il faut mettre tous nos moyens au service de nos priorités, c’est-à-dire permettre aux syndicats nationaux de mieux répondre sur le terrain aux attentes des personnels et à l’UNSA de se développer. Pour cela, il est indispensable de revoir notamment les modalités de répartition des décharges de service entre les syndicats et la fédération. Il faut aussi poursuivre la modernisation de notre image, rendre notre communication plus efficace et développer la formation syndicale des militants.
La FEN a vocation à accueillir en son sein de nouveaux syndicats.
Conscients des enjeux et des perspectives ouvertes par la décentralisation, nous nous engageons à poursuivre et à renforcer notre action dans la fonction publique territoriale en nous appuyant sur les positions acquises lors des dernières élections professionnelles sous l’égide de l’UNSA.
…Pour développer l’UNSA
Le développement de l’UNSA est une priorité. Le partage des compétences entre fédérations et UNSA doit être clair. Ainsi, en matière d’éducation, de recherche, de culture, de justice, la FEN s’exprime en pleine responsabilité.
L’UNSA doit évoluer et se transformer pour couvrir l’ensemble des champs interprofessionnels : social, économie, formation professionnelle, libertés, questions de société, fonction publique et relations interconfédérales. La FEN doit lui apporter son expérience, sa réflexion, ses propositions et ses capacités militantes et d’expression.
Nous demandons à l’UNSA que les URUNSA organisent la structuration de l’union dans les départements, les territoires, les bassins, et qu’elle se dote d’une presse spécifique.
L’UNSA doit être structurée en fédérations. Il faut amplifier l’émergence de l’UNSA-fonctionnaires. L’implication des militants de la FEN dans l’UNSA doit conduire notre fédération à porter remède à la complexité de nos structures actuelles tant nationales que régionales et départementales pour les rendre plus compréhensibles par les adhérents et à supprimer les formalismes pesants.
La nature, la composition et le rythme des réunions de l’exécutif fédéral national, du bureau fédéral national, du conseil fédéral national et du congrès doivent être revus et s’adapter aux évolutions de l’UNSA.
Les structures délibératives régionales et départementales de la FEN doivent être simplifiées et allégées.
Au sein de l’UNSA, la FEN conservera son identité. Nous engagerons le débat afin que les syndicats des différentes fédérations constitutives de l’UNSA n’entrent pas en conflit sur des champs de syndicalisation communs pour les élections professionnelles. Nous proposons de donner à l’UNSA la capacité d’être une organisation syndicale à part entière, forte, efficace et reconnue.
Cette ambitieuse démarche exige des adhérents de la FEN qu’ils soient de plus en plus nombreux à s’impliquer dans un militantisme actif et renouvelé.
Refonder notre syndicalisme
…Afin de construire un pôle de rassemblement du syndicalisme revendicatif, responsable et laïque
Le syndicalisme doit jouer un rôle essentiel de contre-pouvoir.
Pour nous, en toute indépendance, il doit contester et reposer, agir et négocier, contracter et s’appuyer sur les acquis pour en revendiquer d’autres. Il organise des cohérences, recherche les synthèses, inscrit les revendications dans les perspectives du projet syndical de transformation sociale. C’est en ce sens qu’il est un syndicalisme réformiste.
Nous avons contribué à construire l’UNSA, pôle de regroupement ouvert, outil pour une dynamique de rassemblement plus large sur les valeurs qui fondent notre engagement. Cette initiative s’inscrivait dans notre démarche de dialogue et de coopération avec les fédérations de fonctionnaires et avec les confédérations. L’émiettement syndicale qui s’amplifie, la multiplication d’organisations autonomes, dont certaines sombrent dans le corporatisme, va à contre courant du profond désir d’unité qu’expriment les salariés.
Nous ne pouvons nous satisfaire d’un mouvement syndical faible, divisé, en difficulté pour répondre aux exigences des salariés, de moins en moins en mesure de créer le rapport de force. Nous devons imposer la mise en œuvre d’un véritable projet de transformation sociale fondée sur la justice, l’égalité, la solidarité e bâtir, sur ces objectifs claires, une force syndicale porteuse d’unité et d’espoir pour les salariés, les chômeurs, les exclus. Cette volonté nous conduit à poursuivre le dialogue et la coopération avec l’ensemble des organisations syndicales qui la partagent. Nous entendons resserrer notre relation avec les organisations et confédérations qui y sont prêtes, dans l’esprit de préparer la voie d’une unité organique la plus large possible, sur la base des valeurs dont nous sommes porteurs.
Parce que notre objectif est la transformation sociale, nous réaffirmons aujourd’hui notre volonté de prendre notre part à la reconstruction du syndicalisme français.
L’élargissement de l’UNSA en un mouvement syndical de nature confédérale, est pour nous l’étape d’un processus.
Cet objectif nous conduit à proposer et à agir pour que l’UNSA évolue, qu’elle soit très vite en mesure de participer à la construction de ce pôle de rassemblement. Il faut donc des évolutions structurelles qui renforcent sa cohérence et facilitent les adhésions syndicales à tous les niveaux.
Nous voulons rassembler les forces syndicales, mais aussi les femmes et les hommes, salariés des secteurs publics et privés, désireux de construire ce mouvement syndical de masse.
Le congrès appelle ses militantes et ses militants à s’engager dans ce vaste mouvement autour des valeurs qui sont depuis toujours celles de la FEN. Il lance un appel aux organisations syndicales, à toutes celles et à tous ceux qui croient en la nécessité de cette reconstruction pour qu’ils contribuent à cette démarche.
C’est parce que nous sommes convaincus de la richesse de nos valeurs, de leur originalité et de leur pertinence que nous voulons les faire vivre aujourd’hui dans l’UNSA et demain dans un grand mouvement syndical rassemblé sur ces valeurs commues.
Résolution générale - Intervention de Christine Bonnefon
Mes camarades,
Nous arrivons avec ce texte au terme d’un long, très long travail de plusieurs mois ;
La méthode, nous l’utilisons pour la 2ème fois, elle a une nouvelle fois montré son intérêt et ses faiblesses.
Conçue pour intégrer au débat l’ensemble des adhérents, la Résolution Générale n’a de fait, reçu les contributions que des militants des syndicats nationaux ou des sections régionales ou départementales.
En effet, l’avant projet de Résolution Générale, publié en septembre 96 dans Fen actu, s’adressait à tous les adhérents et a vu remonter 312 amendements de 9 Syndicats nationaux, 16 Sections départementales et 3 Sections régionales…
Mais pas un seul amendement d’adhérents.
Le projet ainsi établis, qui a été publié ensuite dans FEN hebdo en janvier 97, a suscité : 162 amendements, provenant de 8 Syndicats nationaux, 3 Sections régionales et 22 Sections départementales.
La méthode permet donc aux militants qui le souhaitent de s’exprimer très largement sur notre projet syndical et c’est une bonne chose.
Je vous épargnerai le compte des heures de réunions de la commission des résolutions, je préfère, moi-même ne pas savoir.
Je remercie tous ceux qui y ont participé et tout particulièrement Angel Termini qui a décrypté tous les amendements que vous avez envoyés, je remercie Angela, donc, pour le travail accompli et aussi pour nous avoir tous supporté aussi longtemps.
Quant aux débats, tous ceux qui y ont participé peuvent témoigner de leur intérêt, souvent, de leur vacuité quelquefois aussi.
Reste que, malgré l’intérêt des débats et les intentions de très large ouverture portées par cette méthode, nous avons d’abord créé une usine à gaz
Nous avons raté notre 1er objectif qui était de faire participer les adhérents et nous n’avons réussi que partiellement la participation des militants puisque seuls 11 Syndicats nationaux, 3 Sections régionales et 27 Sections départementales ont rédigé des amendements.
Et nous nous sommes usés des heures dans la mise en œuvre.
J’hésite un peu à dire qu’il faut donc changer de méthode puisqu’il y a 3 ans Alain Olive dans les mêmes circonstances et à la place qui est la mienne aujourd’hui avait affirmé la même nécessité à la tribune du Congrès du Tours.
Changer de méthode n’est pas facile. Ce texte, complet, détaillé et qui fait l’accord dans la FEN, nous en avons besoin, nous, militants pour faire vivre notre fédération pendant les 3 ans à venir et je ne pense pas qu’il serait très démocratique de ne laisser aux camarades que vous venez d’élire que quelques grandes indications générales et puis confiance sur le reste. Il faut donc garder un document sérieux. Nous avons envisagé de ne poser aux adhérents que quelques grandes questions… mais poser les questions, n’est-ce pas déjà orienter le débat ? et qui ferait les choix du questionnement. Tout cela reste à réfléchir pour dans 3 ans.
Mais ce qui est certain c’est que l’on ne peut pas recommencer « ça ».
Un autre problème se pose, de nombreux congrès départementaux l’ont dit, à l’issue du congrès national, nous avons un texte trop touffu, illisible, un texte qui tombe des mains de l’adhérent le mieux intentionné à son égard,
La question est déjà plus facile à résoudre, nous pensions l’avoir fait il y a trois ans en réalisant une brochure de huit pages reprenant l’essentiel de la résolution générale.
Ce texte, vous l’avez, vous, assez peu diffusé… à vous, donc, de nous dire quels outils vous souhaitez pour discuter entre nous des orientations… et pour les populariser ensuite, mais, je crois d’ores et déjà que l’on peut plus continuer comme ça sans aucune participation des adhérents et avec une participation des militants limitée à 1/3.
Je dois maintenant vous présenter cette résolution.
De cette résolution, je ne pendrais que quelques lignes qui me paraissent les plus importants, compte rendu de ce que j’ai dit précédemment sur les choix, il est entendu que je suis prête à assumer toutes les critiques.
Si je devais répondre en seulement quelques mots sur ce qu’est vraiment la résolution générale de la FEN, je dirais qu’au-delà du contenu réel de ce texte,
ce qui fait sa force, ce qui fait aussi sa différence, c’est que tout le projet est soutenu par une idée de l’homme, de la femme, par une idée de la société et par la volonté de transformer la société que sans cela, sans ces valeurs qui fondent notre résolution, il n’y a pas de véritable projet, il n’y a pas de syndicalisme.
Ce congrès, plus que tout autre a été placé sous le thème des droits et libertés,
d’abord parce que nous aurions dû le tenir à Toulon, si le FN n’y avait pris le pouvoir,
ensuite parce que nos derniers mois ont été très marqué à la fois par la lutte des sans papiers et la lutte contre le projet de la loi Debré,
enfin, parce que les atteintes contre les libertés touchent de plus en plus nos métiers, la culture et les bibliothèques, nous avons eu cela bien en tête, notamment avec l’intervention de Gérard Paquet, lundi, la santé, avec les commandos anti IVG et aussi l’éducation.
Nous nous sommes beaucoup interrogés sur la montée des thèses d’extrême droite,
nous avons accusé la situation économique, à juste titre, le chômage, à juste titre également, …
Avons-nous cru, vraiment, que lutter pour l‘emploi, suffirait ?
Nous avons accusé la droite au pouvoir de renforcer la xénophobie par électoralisme, de monter à l’assaut des églises quand il s’agissait de travailleurs immigrés et de laisser d’autres églises occupées par l’extrême droite et les intégristes, sans états d’âme, sans honneur, nous avons rappelé la conduite des communistes dans les années 70, les bulldozers de Vitry contre les foyers de travailleurs étrangers et les quotas d’enfants d’immigrés dans les colonies de vacances… un peu plus discrètement peut-être, nous nous sommes souvenu aussi des charters d’Edith Cresson…
Bref, nous avons avant tout analysé une situation extérieure, une situation sur laquelle nous n’avions qu’une possibilité d’action limitée, et nous nous sommes peut-être sentis quittes … trop vite.
Car, nous avons, nous aussi, personnels de l’éducation, de la recherche, de la culture, de la justice notre part de responsabilité dans ce qui arrive,
- parce que nous avons laissé monter ces idées réactionnaires, sans les prendre au sérieux.
- parce que nous avons parfois adopté le vocabulaire de l’extrême droite – je pense au terme « seuil de tolérance » par exemple, comme si au-delà d’un certain chiffre, l’intolérance devenait la norme.
- parce que nous avons hésité, parfois, sur la conduite à tenir et laissé ainsi apparaître des contradictions – sur le foulard, par exemple – voire des fractures entre nous sur ce qui faisait autrefois notre ciment : la laïcité, la citoyenneté qui est devenue une notion dont on perçoit toute l’importance mais qui est, en même temps, si délicate à définir, tant elle a été pendant des années de notre histoire fondée sur l’idée de nation.
Mais, plus que toute autre raison, nous avons surtout oublié le militantisme de terrain, « de proximité » comme on dit maintenant,… le militantisme, tout simplement, qui faisait que nous étions là, présents et disponibles pour les collègues quand ils avaient besoin de nous, pour les élèves aussi, et les usagers des services publics. On trouve de plus en plus d’écrivains publics dans nos villes, avec plaques et tarif… n’est-ce pas l’instituteur qui jouait autrefois ce rôle ?
Tout cela nous devons le retrouver, et nous le pouvons, parce que c’est cela qui fait la FEN dont nous nous revendiquons.
Cette FEN qui a une idée de l’Homme, qui a aussi une idée de l’éducation.
Et, là, aussi, qu’avons-nous fait ? Nous avons demandé que l’école et plus particulièrement le collègue, qui nous avaient si bien réussi à nous, soient ouverts à tous et nous nous sommes rendu compte que le système était fait pour ceux qui en avait le moins besoin et excluait ceux qui en avaient le plus besoin.
Nous avons revendiqué et nous sommes prêts d’obtenir 80 % d’une classe d’âge au bac, mais le moindre concours qui n’exige aucun diplôme est inaccessible en dessous d’un bac + 2 !
A nouveau, sur ce dossier, ce qui fait notre force et notre différence, c’est que nous ne demandons pas aux élèves de s’adapter au système, mais nous pensons que le système doit s’adapter aux élèves et être fait d’abord pour ceux qui en ont le plus besoin.
C’est aussi que l’éducation n’est pas une étape obligée de l’enfance, mais un processus qui doit se poursuivre tout au long de la vie, en cela, nous sommes, nous, révolutionnaires.
Le pouvoir actuel, du reste, ne s’y trompe pas, qui préfère choisir le camp de l’immobilisme, du « surtout ne touchons à rien ».
Enfin, nous avons fait une priorité de la lutte pour l’emploi et nous, syndicaliste, si nous pouvons analyser les différents moyens de cette lutte, il en est un qui nous est particulièrement accessible : la réduction de travail et le refus des heures supplémentaires.
Nous retrouvons ce thème plusieurs fois dans la résolution générale mais, quand on discute entre nous, on perçoit des adaptations très différentes d’une même affirmation selon nos secteurs d’activité.
Je pense donc qu’il faut y réfléchir davantage en partant de la notion même de travail.
Dans notre société, le travail est la valeur absolue, le moyen d’intégration sociale. Pas de travail, pas d’intégration.
Or, voit-on, alors qu’il faut de moins en moins de travail humain pour créer de plus en plus de richesse, ceux qui ont du travail, travaillent de plus en plus, le travailleur américain, par exemple travaille en moyenne 260 heures de plus par an qu’il y a 20 ans… 260 heures, c’est un mois de travail, tandis qu’une majorité de plus en plus grande de la population est exclue du travail.
On ne peut pas continuer comme ça !
Nous avons plusieurs terrains sur lesquels agir.
D’abord l’idéologie, l’idéologie du tout travail, nous y participons nous, syndicalismes de la FEN, très largement. Sinon, comment supporterions-nous ici des journées de plus de 10 heures, des nuits de débats.
Le travail bien sûr est émancipateur mais attention si cela est vrai pour nous tous ici, je pense.
Pour combien d’hommes, de femmes et d’enfants de par le monde est-il aussi soumission, exploitation ?
Sur le plan social, nous devons réfléchir à toutes formes d’intégration sociale fondées sur autre chose que le travail, d’une part, d’autre part à une forme de redistribution des richesses qui ne soit pas « à chacun selon son travail ».
Sur le plan syndical, nous devons lutter pour une réduction générale et massive du temps de travail.
Alors mes camarades, au terme de ce congrès, ne regardons plus en arrière, ne regardons plus les autres, nous avons les idées, nous avons l’outil syndical, nous avons la volonté, nous avons les militants, alors, demain, le 23 mars dans la rue et tous les jours dans nos syndicats, nos sections, auprès de nos collègues…
Nous avons eu des années difficiles, nous avons vécu quelques crises,
Et alors, au terme de ce congrès nous n’avons
Qu’une seule possibilité – gagner
Qu’une seule obligation – gagner
Qu’une seule volonté –gagner
Résolution Générale
1. Notre syndicalisme pour les droits de l’homme et du citoyen pour les droits fondamentaux des femmes et des hommes
L’interdépendance économique des états, les formidables moyens de communication imposent plus que jamais l’élaboration de projets des sociétés qui dépassent largement le cadre des nations, la recherche de voies nouvelles de développement économique et social. Aujourd’hui, le dogme libéral apparaît clairement et s’impose comme modèle dominant, voire hégémonique. Ce modèle a une logique, des acteurs, des mécanismes repérables, en particulier les recommandations édictées par des organismes supranationaux (FMI, BM, OCDE), doctrinaires du libéralisme. Les méfaits sociaux qu’elles entraînent sont observables dans tous les pays les plus engagés dans cette logique économique libérale : détérioration de la santé, de l’Education, des Libertés.
Cette politique économique n’est pas consensuelle, elle suscite clivage entre ceux qui s’empressent d’y recourir et ceux qui proposent un autre modèle.
Le terrain est libre pour de grandes avancées si nous savons défendre notre idéal en nous appuyant sur un bilan critique et équilibré de l’histoire récente, si nous savons ne pas confondre idéal et illusion.
Dénoncer les erreurs, les illusions et les perversions de la politique est nécessaire, mais jeter le discrédit sur tout engagement politique, c’est faire le lit des partisans de l’aventure fascinante. Le syndicalisme quant à lui, doit inscrire ses propositions dans le cadre d’un projet de transformation sociale, prenant en compte l’évolution du monde et les aspirations à l’émancipation de la personne humaine, à la laïcité, au progrès social, à la justice, à la liberté, à la paix et au développement durable.
1.1 Promouvoir la valeur universelle des « Droits de l’Homme et du Citoyen »
Les bouleversements intervenus au cours des deux dernières décennies ont substitué le doute aux utopies mobilisatrices d’hier, estompé les repères, déstabilisé les systèmes de valeurs. Aucune société ne peut vivre sans repères, sans valeurs et sans idéal. Il faut organiser les solidarités et particulièrement la solidarité syndicale dans un monde qui se divise de plus en plus entre riches et pauvres. Cette division existe à l’intérieur de tous les Etats. Les inégalités s’aggravent dans tous les domaines (santé, éducation, libertés, communication…) et menacent la cohésion sociale. Cette situation est contraire à tous les principes qui fondent les Droits de l’Homme et dont la valeur universelle doit être réaffirmée conformément à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Elle constitue un facteur de tension internationale, un terrain favorable au développement des dictatures, du racisme, de la xénophobie et des fanatismes qui se nourrissent du sous-développement et de l’ignorance.
1.2 Faire appliquer les droits fondamentaux des travailleurs
Le syndicalisme doit affirmer une exigence de progrès et de solidarité pour renforcer la démocratie partout dans le monde. La mondialisation de l’économie impose une internationalisation du syndicalisme. Elle lui impose également un devoir de solidarité en direction des pays les moins avancés. Les salariés des nations développées ne peuvent envisager de défendre leurs intérêts indépendamment de ceux des trois quarts des habitants de la planète. Ma coopération syndicale internationale doit s’attacher à faire appliquer les droits fondamentaux des travailleurs tels qu’ils sont exprimés dans les conventions de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) : la liberté syndicale et la protection du droit syndical, le droit d’organisation et de négociation collective, la protection contre le travail forcé ou obligatoire, la protection des enfants, l’égalité de rémunération entre femmes et hommes et la protection contre la discrimination en matière d’emploi.
1.3 Promouvoir la laïcité et les droits de la personne humaine, renforcer l’éducation à la citoyenneté, facteurs essentiels de cohésion sociale
1.3.1 Restaurer la citoyenneté
Nous réaffirmons que dans une authentique démocratie, le pouvoir appartient au citoyen. Dans un monde en pleine mutation, il est décisif pour l’avenir de redéfinir une notion moderne de la citoyenneté fondée sur les valeurs républicaines. La laïcité reste la référence majeure de notre conception de la citoyenneté ; elle est une éthique de la vie sociale fondée sur les exigences d’égalité, de fraternité, de la solidarité de responsabilité, de liberté de conscience, de respect des libertés publiques. C’est un principe constitutionnel. La laïcité est le fondement des libertés.
Nous rappelons que la République ne connaît que des citoyens libres et égaux en droit, quels que soient leur origine, leur sexe, leurs choix idéologiques, religieux, philosophiques, tout être humain possède des droits inaliénables. C’est pour cette raison que nous rejetons deux conceptions de l’Etat : celle de l’uniformisation des individus que veulent imposer les états totalitaires ou la fragmentation entre communautés antagonistes qui emprisonnent l’individu dans un groupe, une croyance, un espace. Nous rappelons, à cet effet, le rôle déterminant du service public d’éducation pour l’apprentissage et le développement de la citoyenneté et nous nous prononçons pour un renforcement, en son sein, de l’éducation aux Droits de l’Homme et du Citoyen. En ce sens, nous rejetons toute forme de prosélytisme qui constitue une atteinte à la laïcité.
Notre objectif est de lutter contre toutes les formes d’exclusion et de ségrégation. Nous estimons prioritaire d’assurer l’intégration de tous à égalité de droits et de devoirs. Nous réaffirmons notre attachement aux principes républicains de la citoyenneté notamment en ce qui concerne le code de la nationalité fondé sur le droit du sol et la garantie du droit d’asile défini par la convention de Genève. Nous militons pour l’intégration des étrangers régulièrement installés dans notre pays. Ils doivent pouvoir jouir de tous leurs droits et ne pas subir des tracasseries administratives qui les fragilisent et favorisent la montée du racisme. Nous réaffirmons aussi notre volonté de voir accorder aux étrangers le droit de vote aux élections locales, nous souhaitons que soient prises toutes dispositions destinées à favoriser l’accès à la nationalité française.
Dans le cadre des principes républicains et dans notre combat général contre toutes les formes d’exclusion et de discrimination, nous rejetons toute forme d’intégrisme et d’intolérance, nous luttons contre le racisme et la xénophobie dont nous rappelons le caractère délictueux.
1.3.2 Pour le respect des droits de l’enfant
Nous réaffirmons notre attachement à une société respectueuse des droits de l’enfant dans leurs différents aspects. Alors que dans le monde, des millions d’enfants sont exploités et asservis, au travail, sexuellement, nous réclamons un engagement de la communauté internationale pour que la convention internationale des droits de l’enfant soit partout ratifiée, appliquée et enseignée.
1.3.3 Poursuivre la lutte pour les droits des femmes
L’égalité entre les citoyens est inscrite dans la constitution. Des inégalités persistent au détriment des femmes et certains de leurs acquis sont contestés.
1.3.3.1 Assurer l’égalité devant l’emploi
Bien que l’écart diminue, le taux de chômage féminin reste plus élevé que le taux masculin. A qualification égale, les femmes restent victimes de discriminations sur le marché du travail. L’inégalité des salaires demeure. Compte tenu de l’évolution technologique et de métiers, il est indispensable, au travers de la formation initiale et continue, de diversifier l’orientation des filles et de leur permettre d’acquérir une qualification qui débouche sur l’insertion professionnelle. Dans cette période de fort chômage où certains préconisent des solutions passéistes, nous réaffirmons le droit au travail pour les femmes.
Si l’égalité devant l’emploi est pratiquement acquise en droit, i reste à l’inscrire dans la réalité des faits, en combattant fermement tous les blocages et comportements qui empêchent l’accès des femmes à certains emplois. Nous souhaitons des mesures permettant aux femmes et aux hommes de concilier vie professionnelle, vie familiale, vie militante.
Dans la fonction publique, nous constatons qu’il demeure un fort déséquilibre dans la répartition entre femmes et hommes, au niveau de l’auxiliariat, des situations hiérarchiques et de l’exercice des responsabilités. Exigeons ensemble des mesures visant à corriger ce déséquilibre. Dans le domaine de la formation continue, nous réclamons la mise en place des formules diversifiées et déconcentrées ouvrant largement aux femmes les possibilités de promotion.
1.3.3.2 Accroître la participation des femmes dans les instances syndicales
L’accès des femmes aux responsabilités syndicales reste insuffisant. Nous devons poursuivre notre effort pour permettre aux femmes de militer et d’assumer des responsabilités à tous les niveaux de l’organisation. Cela implique une réflexion commune des adhérents hommes et femmes et entre autres une gestion plus rigoureuse du temps, du partage des tâches, du travail en équipe, un changement des pratiques dans la vie syndicale, des solutions d’accueil pour les enfants. Sur ces bases, nous engageons les syndicats nationaux ainsi que toutes les instances de la fédération à assurer leur réelle et équitable représentation à tous les niveaux, pour atteindre la parité hommes-femmes.
1.3.3.3 Militer en faveur de la dignité des femmes
Les militantes et les militants de la FEN doivent s’engager à développer l’éducation et l’information sexuelles, à assurer par l’éducation les actions de prévention contre les abus sexuels et à aider au changement des mentalités et des attitudes en luttant contre les stéréotypes sexistes.
Nous condamnons les manifestations du sexisme sous toutes ses formes : violence conjugale, violence dans la rue, harcèlement sexuel sur les lieux du travail ainsi que toute atteinte à l’intégrité physique et morale de la femme.
Alors que dans plusieurs pays dont la France, des groupes de pression, que nous condamnons, tentent de remettre en cause le droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) et à la maîtrise de la procréation, nous réaffirmons le droit fondamental de la femme à disposer de son corps et de sa vie. Nous réaffirmons également notre volonté de voir l’IVG et les moyens contraceptifs pris en charge à 100 % par la sécurité sociale. Il faut combattre le retour de l’ordre moral auquel on assiste et dont les femmes sont les premières victimes.
1.4. Pour un meilleur service public de la justice
Au pays des Droits de l’Homme, pour la majorité des Français, la justice ne remplit pas son rôle : elle est lente difficile d’accès, trop coûteuse ; elle n’est ni équitable ni indépendante et peu efficace. Ces critiques traduisent une véritable crise de confiance et, paradoxalement, le recours à la justice ne cesse de croître.
De leur côté les professionnels dénoncent le manque de moyens et de définition quant à leurs missions. Nous ne pouvons nous satisfaire d’une telle situation.
En effet, grâce au contrat social, l’Etat de Droit tourne définitivement le dos aux formes de sociétés fondées sur des règlements de comptes individuels, la défense et la préservation des intérêts des plus forts au détriment des plus faibles.
1.4.1 Justice et citoyenneté
La justice se rend au nom du peuple français et il est impératif de réconcilier les français avec leur justice, élément essentiel d’un régime démocratique.
Il est évident que l’institution judiciaire ne peut répondre seule aux maux de notre société. En ce sens, la réflexion sur son rôle institutionnel et ses missions sociales doit être permanente afin de doter la France d’une justice garante du respect de l’Etat de droit et des libertés publiques. Ainsi, l’autorité judiciaire doit être indépendante et assurer un procès juste et équitable, conduit par des magistrats professionnels et siégeant en formation collégiale et ce dans des délais raisonnables. Nous revendiquons une réforme du conseil supérieur de la magistrature. De même de la justice doit être transparente, plus ouverte et plus accessible pour nos concitoyens et son organisation revue afin de l’adapter aux évolutions actuelles de la société. Nous nous prononçons pour la réforme de la carte judiciaire et son adaptation aux structures territoriale existantes (régions et départements de la République Française). La persistance d’un découpage et d’un fonctionnement obsolètes ne facilitent pas l’application d’une justice égale pour tous les citoyens en tout point du territoire.
En outre toutes les expériences et pratiques qui permettent un rapprochement entre le citoyen et le système judiciaire sont à développer à partir du bilan des expérimentations en cours (maisons de justice et du droit, médiation pénale, réparation travail d’intérêts générale, …).
1.4.2. Politique pénal et insertion
Au sein de la politique pénale une grande place doit être évolue à la prévention, l’insertion et à la réinsertion, seuls moteurs réels de la lutte contre la récidive.
Les réponses judiciaires doivent prendre en compte la personnalité et la capacité d’évolution du délinquant qu’il soit mineur ou majeur.
Pour les mineurs délinquants, le délit ne peut être occulté mais les réponses judiciaires doivent prendre en compte la personnalité des jeunes et leurs capacité d’évolution : leur éducation doit rester la priorité conformément à l’esprit de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante. L’Education doit devenir la priorité de la politique pénale conduite à l’égard des majeurs. Afin de favoriser l’insertion, l’enfermement ne doit plus être la sanction de référence. Cela étant, en cas de recours à la détention, celle-ci doit permettre la mise en place d’un suivi éducatif e thérapeutique.
La détention provisoire doit être limitée. Une réflexion de fond doit porter sur les alternatives à l’incarcération, en développant, par exemple, les centres de semi-liberté, rattachés au milieu ouvert. Nous demandons la départementalisation des services socio-éducatifs pénitentiaires avec de réels moyens de fonctionnement et le retour au service public de toutes les prisons à gestion privée. Nous nous opposons à out ce qui conduit au tout carcéral. Nous dénonçons toute politique qui réinstaurerait les quartiers de sécurité renforcée (OSR), les quartiers de plus grande sécurité (QPGS), la peine de mort, l’incarcération à vie… Nous demandons qu’ait lieu une réflexion de fond sur les longues peines. Nous demandons également que les conditions carcérales soient dans tous les cas respectueuses des droits de l’Homme.
Enfin, la présomption d’innocence est un principe qui doit être restauré dans son application
1.4.3 Des moyens pour la justice
L’amélioration de son fonctionnement notamment dans l’exécution de ses tâches exige que l’Etat lui attribue des moyens conséquents. L’effort entrepris doit être poursuivi et amplifié tant la part du budget de l’Etat qui lui est consacré reste insuffisante.
Pour le moins, nous demandons que le programme pluriannuel justice soit pleinement appliqué tant en terme de création d’emplois qu’en moyens matériels au plus tard en 1999 conformément à l’engagement initial.
1.5 Défendre la paix
1.5.1 Un droit international reconnu
La fin de la guerre froide a éloigné les risques d’affrontement direct entre les eux superpuissances. Elle a également mis fin à leur affrontement indirect dans les conflits locaux de nombreux pays d’Amérique Latine, d’Afrique, d’Asie… Mais la paix est toujours aussi menacée, sinon plus. Nous militons pour que les instances internationales, en particulier l’Organisation des Nations Unies (ONU), jouent pleinement le rôle pour lequel elles ont été créées. Le respect des décisions prises par ces instances doit reposer sur une droit international reconnu et accepté par tous les pays du monde mais aussi sur des moyens financiers et logistiques suffisants.
Il est indispensable d’améliorer le fonctionnement de l’ONU, de faire en sorte que tous les Etats soient plus largement impliqués dans ses prises de décisions et, que lui soient donnés véritablement les moyens indispensables à leur application.
Profondément attachés à la paix, nous rappelons notre condamnation absolue du terrorisme en France et dans le monde, et de ceux qui bafouent les droits de la personne humaine partout dans le monde. Nous soutenons tous les peuples qui luttent pour la démocratie.
1.5.2 Un niveau de défense nécessaire et suffisant
Si la logique entre les deux blocs a disparue, pour l’instant, la paix est toujours menacée : conflits ethniques ou intercommunautaires qui révèlent des nationalistes exacerbés et constituent des menaces plus diffuses et spontanées, risques de dissémination nucléaire, terrorisme, dérives mafieuses et menaces économiques. Un système de défense élargi à la sécurité globale nous semble donc encore nécessaire. Les opérations extérieures de maintien ou de rétablissement de la paix vont désormais nécessiter l’intervention simultanée de plusieurs pays mais une défense européenne n’aura de sens que s’il existe une diplomatie commune et une identité européenne au sein de l’OTAN.
L’abandon du principe de conscription a été décidé sans débat national alors que tout citoyen était à même de donner son avis sur ce sujet important de sécurité collective.
Le service militaire légitimait les formes civiles. Nous nous étions prononcés pour leur extension afin de maintenir l’équité devant les obligations du service national à condition qu’elles n’empêchent pas la création d’emplois dans les ministères et collectivités concernés et qu’elles fassent appel à l’ensemble des niveaux de qualification. Ceci reste d’actualité pour les volontariats engagés.
Le « Rendez-vous citoyen » n’aura de sens que s’il concerne tous les jeunes et leur apporte un complément de formation utile, ce qui nécessite l’implication de différents ministères.
2. Notre syndicalisme solidaire des peuples du monde
Le syndicalisme international est un espoir et une base solide pour la défense de la paix et des intérêts des travailleurs partout dans le monde. Il doit redonner espoir dans un avenir meilleur pour tous, un monde de plus grande justice et d’équité. Il doit peser sur les choix politiques, économiques, sociaux et culturels.
C’est en particulier le rôle assigné à la Confédération Internationale des Syndicats Libres (CISL) dont l’Internationale de l’Education (IE) fait partie qui doit s’attacher à infléchir les orientations politiques du FMI et la Banque Mondiale afin que la priorité soit donnée au développement social.
2.1 Notre syndicalisme présent partout dans le monde
La FEN et ses syndicats nationaux, en raison des métiers de leurs adhérents ont des responsabilités particulières en matière de solidarité internationale.
Nous nous sentons particulièrement concernés quand des intellectuels, des personnels d’éducation, des chercheurs, des militants d’associations qui se battent pour la liberté d’expression en dénonçant l’oppression et font l’objet de mesures d’interdiction, sont emprisonnés ou contraints à l’exil. Nous devons manifester complètement notre solidarité en veillant à ce que le droit d’asile ou la mobilité professionnelle vient atténuer leurs difficultés. La consolidation, le renforcement de l’I.E. sont des objectifs majeurs que nous nous emploierons à atteindre par tous les moyens que nous confèrent notre audience et notre engagement notamment en multipliant les relations bilatérales.
Elle doit défendre la paix dans le monde en travaillant activement à une meilleure compréhension meilleure coopération entre les peuples, notamment par la promotion des valeurs laïques. Elle doit également poursuivre son combat pour faire de l’éducation une priorité, exiger que tous les pays de mobilisent pour garantir le droit à l’éducation publique pour tous, garantir un accès égal des filles et des garçons à l’éducation à tous les niveaux, combattre le travail des enfants.
2.2 La coopération et le développement
Les inégalités Nord-Sud se creusent. Entre l’Est et l’Ouest elles ne sont pas résorbées par les seuls changements de régime politique. Les jeunes démocraties sont fragiles et menacées par les pressions nationalistes. L’allégement du poids de la dette, voire son annulation pour les pays les plus pauvres, doit s’accompagner de nouvelles relations avec le Sud : politiques, économiques et sociales. Il faut fonder la coopération sur des bases qui favorisent la démocratie et le développement au bénéfice des peuples. L’accroissement de l’aide au Pays en Voie de Développement (PVD) s’impose et doit régulièrement dépasser 0,7 % du Produit Intérieur Brut (PIB). Mais, on ne peut plus se satisfaire d’un indicateur purement économique tel le PIB, il faut lui substituer l’Indice de Développement Humain (IDH), plus apte à apprécier l’état de progression des droits de la personne humaine, le développement de la démocratie et l’application des principes fondamentaux qui permettent la citoyenneté.
Nous continuerons à développer nos relations avec les syndicats de ces pays auxquels nous attachent des liens anciens et une tradition de lutte commune pour la démocratie et les libertés.
Nous renforcerons également nos coopérations avec les syndicats des pays de l’Est de l’Europe pour les aider, notamment, à s’imposer comme un élément essentiel de la construction ou de la reconstruction démocratique.
Nous soutenons et travaillons avec Solidarité Laïque qui doit devenir une organisation capable d’œuvrer au renforcement de la coopération internationale.
2.3 La francophonie
Avec les organisations francophones, des pays développés d’Europe et d’Amérique du Nord, regroupées au sein du Comité Syndical Francophone pour l’Education et la Formation (CSFEF), il nous faut accroître nos actions d’aide, de soutien et d’échanges en direction des pays d’Afrique, de la Caraïbe, notamment Haïti mais aussi du Sud-Est asiatique.
A cet égard, la 5ème rencontre du CSFEF, qui s’est tenue à Tunis en mars 1996 a consolidé des projets concrets déjà engagés : éducation aux droits de la personne, bibliothèques en Afrique francophone, forum international relatif à l’environnement et au développement durable. D’autres projet sont à bâtir.
Autre progrès notable : l’Internationale de l’Education (IE) a été associée aux travaux de la rencontre syndicale francophone, ainsi que l’Agence de Coopération Culturelle et Technique, l’UNESCO et la Conférences des Ministres de l’Education. Les revendications qui se sont dégagées des précédentes rencontres et que cette dernière a confirmées, concernent l’école pour tous, le développement de l’enseignement du français, la promotion des cultures, le soutien à la production audiovisuelle francophone, la valorisation des réseaux francophones d’information et de communication.
Il nous appartient de mieux faire prendre en compte par les sommets des chefs d’Etat et de gouvernement l’éducation et la formation dans leurs multiples aspects ;
Nos sections des départements français d’Amérique ont délégation pour développer toutes les formes de coopération avec les organisations de leurs régions, en liaison avec la fédération.
2.4 La construction européenne
Pendant deux décennies l’Europe s’est construite essentiellement par les outils économiques et monétaires. Il est urgent, aujourd’hui, de construire une union démocratique politique forte.
Il est urgent maintenant de lui donner une dimension sociale et politique, seule capable de mobiliser les femmes et les hommes et leurs énergies. Nous exigerons que l’Europe soit autre chose qu’une zone de libre échange où s’affrontent les multinationales. Elle doit être un espace où s’épanouissent les travailleurs et les citoyens. Sans ce projet de société et de citoyenneté, toute technocratie est sans intérêts voire dangereuse.
2.4.1 L’Europe sociale
L’Europe sociale ne doit pas être seulement un slogan, elle doit être une volonté et devenir une réalité. Nous estimons que les critères de convergence de Maastricht ne suffisent pas à faire l’Europe et qu’importe de créer des critères de convergence sociaux qui permettraient à l’Union de mener une véritable politique économique coordonnée et de renforcer la stratégie de cohésion sociale, contribuant notamment à la création d’emplois.
A cet égard, nous estimons indispensable qu’il existe des mécanismes contraignants de coordination favorisant l’emploi afin de lui donne le même poids et la même importance que la politique économique et monétaire.
On ne peut gagner l’adhésion des travailleurs à l’Europe en laissant subsister le fossé énorme qui existe entre la dimension économique et la dimension sociale. Il est urgent de mettre la solidarité au cœur de l’Europe, et pour cela de tout mettre en œuvre pour que soit protégé, promu et développé un modèle social européen, notamment au niveau de la protection sociale.
L’Union doit se donner les moyens de garantir et de contrôler l’exercice effectif des droits sociaux : droits de libre circulation des personnes, droits transnationaux de s’organiser, de négocier et d’agir syndicalement, y compris en avant recours à la grève. Ces droits doivent être reconnus à tous les citoyens européens.
2.4.2 L’Europe politique pour bâtir une Union démocratique
La seule façon de combattre la dérive de l’Europe vers une zone de libre échange, c’est de bâtir une Union démocratique politiquement forte.
Cela signifie pour nous, et nous militons pour cela :
- la création d’institutions européennes fortes (suppression du droit de veto) fonctionnant sur le principe de la majorité qualifiée. Il importe pour améliorer son fonctionnement de reconnaître le poids relatif de chacun des pays de la communauté.
- refuser toute pérennité d’une Europe à plusieurs vitesses.
- application d’un véritable principe de subsidiarité : c’est à l’Europe de fixer le cadre et à chaque Etat de s’organiser dans ce cadre dans l’autonomie de sa société civile. Doit-on poser des limites au principe de subsidiarité afin de permettre à l’Union et aux organisations syndicales européennes de contrôler l’exercice effectif des droits sociaux. Enfin, nous estimons qu’un débat sans passion, au fond, doit s’instaurer dans notre pays pour savoir quel type d’Europe nous voulons.
L’évolution vers le fédéralisme est nécessaire au renforcement de l’Europe et à l’affirmation d’une identité européenne.
2.4.3 L’Europe et la monnaie unique
Les divergences actuelles entre les pays sont trop importantes pour qu’un système monétaire international stable puisse émerger rapidement, il demeure donc fondamental de mesurer les opportunités offertes par l’Union économique et monétaire européenne. Cependant, la zone « euro » devra composer avec le reste du monde. Elle devra passer comme les autres devises, par le crible des appréciations et des anticipations de marché. Cela peut impliquer le maintien de taux d’intérêts relativement élevés pour retenir les capitaux. L’Union pourrait alors jouer à la fois sur une politique budgétaire au plan européen et sur les taux d’intérêts. Le niveau des taux d’intérêts, nécessaire au maintien de la partie de l’Euro, serait en partie compensé par un accroissement de la demande adressée aux entreprises qui depuis un certain temps déjà, fait cruellement défaut un peu partout en Europe. Ce serait, pour le moins, aussi incitatif pour les anticipations des entreprises que la seule baisse des taux d’intérêts en l’absence de débouchés. Les leçons de la réunification allemande montrent qu’un dosage entre la politique budgétaire et la politique monétaire permet l’absorption de zones même très en retard sans qu’il y ait d’attaques monétaires.
Par contre, l’instauration de la monnaie unique avec la participation de quelques états membres poserait problème. En effet, la parité future de l’Euro dépend de la crédibilité qu’acquerront les participants. Il pourrait donc paraître opportun de ne réunir que les partenaires les plus « vertueux ». Cependant, le traité de l’Acte unique ne se trouve pas caduque par l’application du Traité de Maastricht. Cette coexistence ferait que la zone où la discipline économique et monétaire sera très contraignante, demeurera totalement ouverte aux pays de l’Union qui n’auront pas à s’y astreindre. N’y aurait-il pas dans ce cas une incitation forte à pratiquer des dévaluations compétitives plutôt que de s’efforcer à une discipline plus rigoureuse pour rejoindre le bataillon de la monnaie unique ?
L’Europe doit donc s’efforcer de devenir une zone équilibrée dans toutes ses composantes économiques et sociales. Cela implique que les efforts de coordination des politiques monétaires et budgétaires s’accompagnent d’un renforcement des investissements de moyen-long terme pour favoriser le rééquilibrage mais aussi pour créer les conditions futures du développement.
Notre position en faveur de l’Europe politique et démocratique ne saurait s’accommoder de l’indépendance de la Banque Européenne dès lors que serait institué un gouvernement européen placé sous le contrôle démocratique du Parlement.
2.4.4 Les services publics une chance pour l’Europe
Le service public est l’un des messages majeurs que notre pays doit délivrer à l’Europe en construction.
Il n’est pas question de nous laisser imposer des évolutions qui mettraient à mal les services publics de notre pays alors qu’ils répondent à une aspiration forte des citoyens ; il n’est pas question non plus d’imposer notre propre conception à d’autres pays dont la culture et les structures sont fondamentalement différentes des nôtres. Nous rejetons l’idée vague, imprécise, minimaliste, donc dangereuse de « service universel ».
Notre démarche prend appui sur la notion de « missions d’intérêts général ».
Nous militons donc pour une révision du Traité de l’Union Européenne afin de garantir la pérennité de nos services publics. Nous militons aussi pour que, dans la perspective de faire vivre et de développer les droits inaliénables, le niveau de protection sociale qui sont le patrimoine commun des pays de l’union européenne, s’élabore une charte européenne des services publics fondement d’une conception européenne des services publics. Dans cet objectif, il faut qu’une instance d’évaluation soit créée et placée auprès du parlement européen qui serait chargée de contrôler les activités d’intérêts générales et les conditions de leur mise en œuvre (concurrence, cahier des charges…)
2.4.5 Le syndicalisme européen
Dans le contexte européen, la FEN continuera de travailler dans le cadre général de l’Internationale de l’Education Europe, secteur régional de l’IE apte à favoriser la solidarité européenne syndicale.
De même, la FEN continuera de s’investir dans le Comité Syndical Européen de l’Education 5CSEE) où se retrouvent les organisations syndicales de l’Union Européenne qui, ensemble, avec la Confédération Européenne des Syndicats (CES), devront imposer une meilleure prise en compte des questions éducatives et sociales. Nous continuerons à favoriser la meilleure coordination et les convergences entre l’IEE et le CSEE pour l’efficacité des interventions au plan européen.
La FEN regrette que la situation syndicale française actuelle ne permette pas de peser véritablement sur les enjeux européens.
Elle s’efforcera de promouvoir les démarches et initiatives permettant de dépasser ce constat et de favoriser l’émergence d’une véritable solidarité européenne du monde du travail en particulier dans le secteur des services publics.
Plus largement la vocation du syndicalisme est de coordonner les revendications des salariés des différents pays, d’organiser les actions communes dans la perspective de l’Europe sociale.
3. Notre syndicalisme pour une économie au service de la personne humaine
3.1 Un développement économique créateur d’emplois
Depuis la fin des années 80, la croissance économique mondiale a été marquée par le ralentissement de son rythme, une plus grande instabilité, une aggravation du chômage et de la pauvreté.
3.1.1 Le poids excessif des opérateurs monétaires et financiers
Les causes de cette évolution structurelle de l’économie mondiale sont aujourd’hui clairement identifiées.
En l’absence d’instruments de régulation à l’échelle mondiale, les critères d’ordre financier ou monétaire pèsent d’un poids excessif sur la politique économique de l’Etat et la gestion des entreprises et par conséquent sur les activités productives elles-mêmes. L’extrême fluidifié des mouvements de capitaux, la sous-évaluation du dollar, les dévaluations compétitives, l’instabilité des marchés financiers, la spéculation financière ont des conséquences négatives sur l’économie : aggravation du chômage, financements plus difficiles, délocalisations, déconnexion entre la Bourse et l’état réel de l’économie. La volonté d’attirer les capitaux pour le financement interne des économies contraint alors de maintenir des taux d’intérêts réels élevés tandis que la dépense publique est considérée comme concurrente au financement privé pour la monopolisation de ressources financières internes devenues rares. La pression au désengagement de l’Etat conduit à laisser aux marchés l’essentiel de la régulation malgré les inégalités et les déséquilibres qu’ils génèrent dans tous les pays.
Les effets de cette globalisation financière rendent plus chaotique le rythme de l’activité : l’Europe n’échappe pas à cette règle, compte tenu du degré élevé d’interdépendance des économies nationales qui la constituent et de l’absence d’institutions et de règles permettant d’en assure la coordination effective et de faire prévaloir, au niveau de l’Union, une logique coopérative s’imposant à chacun des états-membres.
3.1.2. Les politiques économiques contre la cohésion sociale
Le modèle libéral de développement actuellement dominant est essentiellement tourné vers la conquête des marchés extérieurs. Cette orientation a eu pour conséquence de contenir au maximum les coûts, en particulier de main-d’œuvre et de dépenses publiques, au nom de la recherche systématique de la compétitivité pour maintenir ou accroître les profits. Ceci a eu pour conséquence principale d’étouffer le potentiel de la demande intérieure considérée comme secondaire par rapport aux grands groupes agissant à l’échelle mondiale. Cette politique applique les recommandations des grands organismes internationaux et s’étend jusqu’aux pays en développement.
Afin d’obtenir sur des marchés mondialisés, des prix compétitifs compatibles avec le maintien vire la restauration des profits du capital, ces politiques ont peu à peu modifié les termes du partage de la valeur ajoutée à l’avantage des profits et au détriment des salaires. Elles ont transformé les modes de gestion de la main d’œuvre, tout en réduisant son coût par le développement des différentes formes de flexibilité.
Ces évolutions se font au détriment des pays les moins avancés, des pays de l’ancien bloc de l’Est, mais aussi de certaines régions européennes fragilisées qui ne parviennent pas à capter les flux de capitaux nécessaires à leur développement.
Elles accroissent le risque de rupture de la cohésion sociale dans la plupart des pays développés en y entretenant un niveau élevé de chômage ou en y favorisant l’émergence d’un salariat pauvre et de nouveaux développements de formes d’exploitation d’un autre âge.
En France, comme dans la plupart des pays d’Europe, les politiques restrictives ont conduit à corseter les différentes composantes de la demande globale (consommation des ménages et dépenses publics, investissements et dépenses publics, investissement productifs des entreprises). Ainsi, la persistance des déficits publics doit dès lors s’interpréter comme la conséquence de l’insuffisance de la dynamique de la croissance et non comme sa cause.
Dans ces conditions, c’est-à-dire une mise en cause de la logique sous-tendant les politiques économiques qu’il faut procéder et lui substituer une stratégie qui, dans le cadre de l’Union européenne, permette de relever le rythme tendanciel de notre croissance et d’en atténuer les fluctuations.
L’économie sociale, parce qu’elle est fondée sur une logique de regroupements de personnes et non de capitaux, peut notamment jouer un rôle éminent dans la mise en œuvre d’une autre logique de développement. Nous continuerons à soutenir les organisations de l’économie et sociale et les coordinations dont elles se sont dotées.
3.1.3 Des politiques européennes pour l’emploi
En l’absence de régulation monétaire à l’échelle mondiale, l’union économique et monétaire européenne est une chance pour les états membres.
Son contenu constitue un enjeu stratégique pour notre société. La construction européenne doit tendre à l’affirmation d’une identité où s’articulent étroitement développement économique et renforcement de la cohésion sociale.
Dès lors, la perspective de l’instauration de la monnaie unique ne saurait constituer une fin en soi à laquelle seraient subordonnés les autres instruments de la politique économique. Aussi, les institutions européennes doivent évoluer afin de permettre la mise en œuvre, au niveau de l’Union, d’une coordination effective des politiques nationales au service du développement économique et de l’emploi. C’est ainsi que notamment, les moyens de la politique budgétaire européenne devront être renforcés et faire l’objet d’un contrôle démocratique réel permettant d’équilibrer le poids des futures institutions monétaires européennes.
3.1.4 Pour l’emploi, contre le chômage
Créer des emplois nécessite de stimuler la demande intérieure et l’activité :
- stimuler la demande par la mise en œuvre d’un nouveau partage de la richesse produite en faveur des salaires,
- stimuler l’activité en développant l’effort public d’investissements matériels immatériels.
L’accentuation de la politique de rigueur en matière salariale et budgétaire est à l’origine de l’essoufflement prématuré du cycle de croissance amorcé en 1994.
Il faut en effet tirer les conséquences de l’inefficacité des politiques de l’emploi, qui axées depuis plusieurs années sur la réduction du coût du travail ont davantage contribué à restructurer la population des demandeurs d’emploi qu’à en réduire le nombre. La lutte pour l’emploi et contre le chômage suppose donc que l’on agisse essentiellement dans trois directions :
- engager une politique de relance de la croissance tant au niveau interne qu’au niveau européen,
- mettre en place les financements adéquats afin de rendre solvable la demande de services en tous genres qui existe dans ce pays,
- réduire de façon massive la durée du temps de travail pour que les conséquences sur les créations d’emplois soient visibles et immédiates.
Une telle réduction du temps de travail conduira à terme à une nouvelle répartition du temps de vie avec des alternances entre temps de travail, temps de loisirs et de formation.
3.1.5 Pour un état régulateur
Nous revendiquons une loi cadre fixant l’objectif de la semaine de 32 heures et définissant une durée maximale pour les négociations conventionnelles. Au terme de ce délai, et en cas d’échec de ces négociations, l’Etat devra prendre ses responsabilités et instituer la réduction du temps de travail par voie législative.
La réduction du temps de travail doit par ailleurs s’inscrire dans le cadre d’une réorganisation du temps et des méthodes de travail dans l’entreprise et dans les services publics.
Cette réduction ne doit pas s’accompagner d’une baisse des salaires, mais il faudra étudier toutes les modalités qui permettront aux entreprises de ne pas supporter seules ce surcoût au moyen d’une politique de redistribution des revenus.
Cette réduction massive doit s’accompagner de mesures complémentaires :
- forte limitation du recours aux heures supplémentaires,
- strict respect des maxima hebdomadaires et quotidiens,
- développement du temps partiel choisi,
- développement du droit individuel de formation.
Pour initier et encadrer ces innovations économiques et sociales, nous réaffirmons comme un principe que les Etats doivent conserver leur rôle de régulateur, d’incitateur et de correcteur des inégalités sociales par des politiques adaptées.
En ce sens, nous entendons que l’Etat, en France, mobilise tous les moyens dont il dispose et notamment une planification cohérente en démocratique, fixant des objectifs à moyen terme qui trouvent leur traduction dans les choix budgétaires.
Cette stratégie doit nécessairement s’articuler avec la construction de l’Europe sociale.
3.1.6 Pour une réforme des prélèvements obligatoires
Nous revendiquons une réforme e la fiscalité véritablement équitable, fondée sur la recherche d’une plus grande transparence des revenus, salariaux et non salariaux. Les moyens affectés à la lutte contre la fraude fiscale doivent être renforcés.
Pour plus de justice sociale, cette réforme doit instituer une priorité aux impôts directs, inclure la fiscalité locale, instaurer une imposition progressive de tous les revenus, en accentuant notamment la part des prélèvements sur les revenus des capitaux.
Nous condamnons les hausses successives de la TVA qui pèsent plus lourdement sur les bas revenus et constituent un frein à la consommation.
3.2 Un service public de la recherche
La recherche conduite dans les universités et dans les établissements publics scientifiques est indispensable au développement économique, social et culturel du pays.
Il ne peut y avoir de recherche appliquée ni de transferts de technologie sans une recherche fondamentale dynamique.
Particulièrement sensible aux effets de l’incertitude des financements, la recherche a besoin de financements réguliers qui dépassent l’annualité budgétaire afin de mener à bien les programmes et de renouveler les équipements.
Le budget de la recherche doit figurer au premier plan des priorités retenues par l’Etat.
Les modes d’évaluation des activités scientifiques, des personnes, des équipes et des formations à la recherche doivent être revus avec le souci de les rendre plus cohérentes, plu équitables et moins lourdes.
Nous ne pouvons concevoir le service public de la recherche sans des liens étroits avec l’enseignement supérieur. Sans perdre leur caractère national et interdisciplinaire, les grands organismes de recherche doivent renforcer leur contribution au développement régional.
3.3 Un environnement préservé
Tout développement économique solidaire, durable, doit être un développement qui préserve l’environnement. Sauvegarder l’environnement que nous laisserons à nos descendants est un défi essentiel que notre société se doit de relever. Il concerne la vie, le travail, et l’avenir de tous. Il implique que l’engagement permanent du citoyen. Il nécessite donc éducation et formation à cette nouvelle responsabilité qui constitue un nouveau devoir. Il nécessite aussi la prise en compte de tous les aspects de l’environnement dans l’étude des équipements, dans toutes les constructions et dans les conditions de travail et de transport. Des risques certains existent concernant l’énergie nucléaire aux plans international et national.
Nous revendiquons que la clarté totale soit faite sur les dangers encourus et qu’un véritable débat existe dans notre pays sur le choix des énergies et leur conséquence sur l’environnement.
Ces exigences s’imposent également à l’égard de la gestion des déchets nucléaires.
Nous développons notre activité pour impulser de nouvelles politiques économiques, sociales, éducatives et culturelles incluant l’environnement, pour défendre résolument un environnement sain, pour améliorer les conditions de travail de tous par un environnement professionnel favorable, développer la recherche en ce domaine, favoriser une meilleure déontologie de l’information, former les personnels d’éducation, dont les enseignants, à cette nouvelle réalité, faire passer dans les faits, au sein du système éducatif, l’acquisition des savoirs, des savoir-faire et des comportements en ce domaine.
4. Notre syndicalisme pour la cohésion sociale par l’aménagement du territoire
4.1 Cohésion sociale et aménagement du territoire
L‘aménagement du territoire doit avoir pour objectif une politique corrective des inégalités et des disparités de développement. IL doit contribuer à l’amélioration de la cohésion sociale et au développement durable des territoires.
Cette politique doit être le garant territorial d’une croissance équilibrée et d’une nécessaire cohésion sociale s’inscrivant dans une dynamique européenne.
Elle doit assurer sur la totalité du territoire une réelle égalité d’accès aux services publics.
Pour garantir l’intérêt général et l’intérêt de la Nation et jouer pleinement son rôle de coordination, de régulation et d’impulsion, l’Etat doit assurer la cohérence entre les contrats de plan État-régions, les contrats de villes et la loi d’orientation sur l’aménagement du territoire.
L’intégration économique et sociale fondée sur la solidarité des régions les plus riches envers les plus pauvres est une idée forte à mettre en œuvre. L’aménagement du territoire ne peut être dissocié du développement de l’économie locale, en particulier en matière d’infrastructures de communication. Un effort accru de l’Etat dans les dotations budgétaires en faveur des régions les moins favorisées, dans le cadre de programmes planifiés d’équipements et d’aides financières doit être accompli. Cela passe par la mise en place de projet visant, par un traitement différencié, à rétablir l’égalité sociale. L’aménagement du territoire doit viser entre autres à une meilleure répartition territoriale des services publics et des activités économiques pour un meilleur équilibre.
La décentralisation et l’aménagement du territoire doivent être complémentaires et assurer conjointement une véritable égalité d’accès aux services publics tout en préparant un développement économique et social harmonieux et solidaire soutenu par une planification démocratique.
4.2 Rôle de l’Etat – Décentralisation – Déconcentration
4.2.1 L’Etat premier garant de l’intérêt général et de la cohésion sociale.
En ces années de crise, la cohésion de notre société importe plus que jamais. L’Etat, au travers de l’action des services publics, a un rôle majeur à assumer. Il faut que soient affirmés son rôle et sa place dans notre société. Il doit assurer toutes ses responsabilités de garant de l’intérêt général, de l’intérêt de la Nation et jouer pleinement son rôle, non seulement de coordination et de régulation, mais aussi d’impulsion.
La notion même de service public est inséparable de la conception républicaine de le l’Etat. Elle est indispensable à la mise en œuvre des principes de liberté, d’égalité, de fraternité, de solidarités. C’est un garant essentiel de l’unité nationale. Elle procède des fondements mêmes de la conception laïque de l’Etat républicain.
4.2.2 Réformer l’Etat
Notre pays a construit son unité au travers de l’Etat. Celui-ci s’identifie à la République. Outre son rôle de garant de la cohésion sociale, il permet aussi l’égal accès aux services publics, le respect du droit, la défense des intérêts de la France dans le monde. La Constitution doit être l’expression de ces valeurs et de ces principes démocratiques.
Nous défendons l’idée « d’unité nationale, » en ce sens, nous condamnons toutes dérives de la déconcentration qui couvriraient des pratiques discriminatoires, tant à l’encontre des personnes privées que des établissements publics.
L’Etat en peut demeurer immobile dans un monde qui bouge autour de lui. Sa réforme est donc une nécessité. Pour autant, nous refuserions une négociation dont l’objectif viserait à diminuer les moyens de l’Etat et à remettre en cause son rôle et les principes d’Egalité d’accès, de continuité territoriale, de neutralité, de laïcité, fondements républicains de l’Etat et de ses services publics. De même la modernisation de l’Etat ne peut se concevoir si elle s’accompagne d’une régression des droits sociaux et statutaires de la fonction publique.
Nous voulons placer les usagers au cœur des services publics et nous voulons que l’Etat leur garantisse des voies de recours. Il faut rénover la gestion des ressources humaines pour mieux valoriser les compétences, déléguer les responsabilités en particulier au travers de la déconcentration, mieux décider et mieux gérer. La réalisation de cet objectif ambitieux demande la mise en place d’une politique et de moyens à la hauteur de celui-ci :
- soit par la création d’un fonds de développement des services publics, soit par une péréquation permettant ce développement,
- par la mise en place d’instances paritaires d’évaluation des politiques publiques à tous les niveaux de décision,
- par l’élaboration de cahiers des charges en matière de délégation de responsabilités ou de missions précisant les objectifs, les critères d’évaluation et les outils mis à disposition des autorités bénéficiaires de cette délégation.
4.2.3 Pour une décentralisation équilibrée
Les lois de décentralisation ont entraîné un bouleversement des structures de notre pays. L’enjeu de cette transformation profonde était de rapprocher effectivement les citoyens des pouvoirs de décisions et de renforcer la démocratie. Force est de constater que la décentralisation a entraîné de graves dérives, conduisant ici et là à un renforcement de potentats locaux et de leur attributaire. Un bilan et une évaluation de la décentralisation sont aujourd’hui nécessaires en concertation avec les partenaires sociaux, surtout si des modifications sur les niveaux de compétences devaient intervenir.
La décentralisation doit être équilibrée par une déconcentration fondée sur des pouvoirs renforcés des services déconcentrés de l’Etat. La déconcentration devra veiller à maintenir hors du champ de compétences des préfets le domaine de l’action éducative qui est assurée par les ministères de l’Education national de la jeunesse et des sports. D’autre part, le respect du principe de la séparation des pouvoirs implique que la direction de la protection judiciaire de la jeunesse et ses services déconcentrés restent placés sous l’autorité du Garde des Sceaux, ministre de la Justice. Les services déconcentrés doivent être dotés de moyens humains et financiers de nature à assurer un véritable partenariat avec les collectivités territoriales, ou avec certains établissements publics, et à leur permettre réellement d’assurer leurs missions. Pour améliorer la participation des citoyens et leur contrôle sur les délibérations des collectivités territoriales, une plus large publicité devrait être donnée aux réunions et aux décisions de ces assemblées. L’accès des citoyens aux documents administratifs des collectivités devrait être facilité de même que les procédures de recours. L’Etat doit être en mesure d’exercer les missions de contrôle de légalité qui lui incombent.
D’autre part, toute délocalisation doit s’inscrire dans le cadre d’une politique globale d’aménagement du territoire conduite nationalement et recherchant complémentarités et synergie à tous les niveaux. Elle doit s’accompagner de mesures sociales négociées pour faciliter l’installation des personnels concernés et de leur famille. Nous condamnons les délocalisations autoritaires effectuées en l’absence de toute concertation. Nous désapprouvons également le déséquilibre constamment renforcé au profit de l’Ile de France et au détriment des autres régions.
4.2.4 Aménagement du territoire et services publics
L’Etat républicain doit mettre en œuvre une politique qui assure l’égalité d’accès aux services publics comme aux emplois publics. Nous voulons promouvoir la modernisation et la rénovation des Services publics. Les usagers et les personnels doivent être associés à cette démarche.
Une réponse globale et cohérente est apportée par les Services publics qui, seuls, garantissent l’égalité d’accès pour tous aux besoins collectifs de la Nation.
4.2.5 Le service public d’éducation
Nous affirmons que l’éducation nationale doit être le premier vecteur d’intégration et de réduction des inégalités. Elle a donc une place centrale dans une politique d’aménagement du territoire visant à la correction des déséquilibres constatés tant au plan local que régional où les axes de développement passent aussi par l’égalité d’accès au service public d’éducation et à sa qualité assurant à tous une réelle égalité des chances.
Nous revendiquons en conséquence la création d’établissements scolaires pour répondre à la demande sociale de formation et assurer la proximité de l’offre de formation. Une politique volontariste de scolarisation en zones rurales est donc une nécessité, autrement que par le moratoire actuel dont nous condamnons les dérives.
Nous proposons que l’école, le collège et le lycée soient considérés comme des pôles culturels, des centres de ressources de la zone à habitat dispersé, dotés des moyens nécessaires.
Nous considérons que des moyens particuliers sont indispensables pour la prise en compte de situations spécifiques liées à la surconcentration urbaine ou à la désertification profonde sur la base d’une contractualisation entre l’Etat et les collectivités territoriales sans remettre en cause le statut des personnels. Nous pensons d’autre part que la formation professionnelle des jeunes doit être qualifiante, validée par un diplôme national et leur permettre une insertion rapide et une adaptabilité aux évolutions de leur(s) métier(s) tout au long de leur vie professionnelle par la formation continue. Dans le cadre d’une politique nationale de formation professionnelle, le niveau régional est un lieu géographique pertinent de partenariat entre les différents acteurs (Etat, régions, partenaires sociaux et économiques). Il doit permettre d’assurer la cohérence entre l’ensemble des dispositifs de formation tout en répondant aux besoins économiques et sociaux locaux.
Les inégalités des chances subsistent entre les régions et entre les zones urbaines et rurales dans les taux de réussite au baccalauréat ou l’accès à l’enseignement post baccalauréat ou supérieur long. Il convient de diversifier les structures post baccalauréat ainsi que leur répartition géographique et en particulier de mettre en place des filières de métier complètes et cohérentes entre elles. La spécialisation et la professionnalisation doivent être mises en œuvre dans l’ensemble des filières technologiques ce qui suppose des passerelles entre le système des formations technologiques et professionnalisées et les formations fondamentales.
Le souci de répartition harmonieuse ses structures d’enseignement supérieur et de recherche doit conduire à la création d’unités d’enseignement pluridisciplinaires de taille intermédiaire. La mobilité des étudiants est un facteur d’enrichissement de leur cursus, il convient donc de favoriser leur parcours au sein d’un réseau national mais aussi européen, tout en conservant l’avantage de diplômes reconnus au plan national. La notion de pôle spécialisé est à bannir d’autant plus s’il s’agit de ne répondre qu’à des besoins spécifiques à une entreprise ou une seule activité. Les chances de mobilité et de reconversion des jeunes ne sont favorisées que s’ils reçoivent une formation générale et polyvalente. La spécialisation dans un souci d’adéquation à l’environnement économique devrait surtout concerner les troisièmes cycles.
La recherche apporte des contributions importantes à la sphère socio-économique et participe de façon importante aux transferts de technologie. Il n’en demeure pas moins que si l’on veut se préoccuper de recherche appliquée, il importe de développer au préalable la recherche fondamentale et d’une manière plus générale les travaux destinés à faire progresser les connaissances.
4.3. Aménagement du territoire, politique de la ville et désertification du monde rural
La surconcentration urbaine et la désertification rurale nécessitent la mise en œuvre d’une politique volontariste, harmonieuse et ambitieuse d’aménagement du territoire.
Le zonage, mis en place en application de la loi du 4 février 1995, tant dans les zones urbaines sensibles que dans les zones de revitalisation rurale, impose une évaluation sérieuse permettant de mesurer la pertinence des critères retenus et l’efficacité en termes de politiques de l’emploi, de lutte contre l’exclusion et de revitalisation du tissu social notamment par le maintien, le développement, voire la réimplantation des services publics de proximité adaptés à des zones d’habitats dispersés.
4.3.1 Pour une politique de la ville ambitieuse
La volonté de restaurer le principe de citoyenneté et d’en favoriser l’exercice, oblige l’Etat à engager une politique de la ville ambitieuse.
Notre pays est aujourd’hui urbanisé à 70 %. Or, les villes, et particulièrement certaines banlieues, sont des lieux symptômes du « mal vivre » de notre société. Le tissu social se délite, la citoyenneté perd son sens.
S’appuyant sur une politique équilibrée d’aménagement du territoire, la politique de la ville nécessite une ambition forte, des moyens financiers spécifiques, des procédures de mise en œuvre simplifiées.
Pour être efficace, cette politique doit s’inscrire dans la durée et agir sur tous les aspects de la vie quotidienne des habitants : emploi, santé, logement, éducation, culture, justice, loisirs, transports… Pour ce faire, elle doit s’appuyer sur les acteurs de terrain et associer les habitants à la démocratisation de la vie locale. Les services publics doivent être proches des usagers. Il est impératif que les administrations à tous les niveaux œuvrent ensemble et en partenariat. Nous demandons un effort de clarification, de cohérence et d’harmonisation entre les interventions de l’Etat et des collectivités territoriales, notamment dans le cadre des contrats e plan et des contrats de ville. L’émiettement de celles-ci est sans doute un frein à cette exigence.
Les pratiques du travail social doivent également s’harmoniser. Il s’agit de favoriser la coordination de tous les acteurs dans le respect de leur fonction et de leur métier, de leur permettre de conduire à la fois des actions individualisées et des actions collectives dans le cadre de projets plus globaux, avec l’objectif d’une intégration réelle de tous les citoyens.
Lutter contre la ségrégation par l’habitat, le cadre de vie, l’éducation, la justice, par l’accès à l’emploi et à la santé… c’est traiter de façon différenciée les quartiers et communes défavorisés par une discrimination positive se traduisant notamment par des moyens supplémentaires en personnels et en fonctionnement. C’est aussi prendre en considération les sujétions particulières des personnels qui y exercent.
C’est en ce sens que nous n’avons pas été hostiles au principe de « zones franches » susceptibles de favoriser l’activité économique et la relance de l’emploi.
Nous exigeons cependant qu’elles ne constituent pas une atteinte au principe d’égalité et de continuité sur l’ensemble du territoire, qu’elles ne permettent pas d’entorse au code du travail, que les conditions d’implantation d’entreprises soient précisées et évitent le nomadisme industriel. Nous exigeons en outre que les critères de désignation de ces zones soient clarifiés et que les évaluations qualitatives et quantitatives soient réelles et publiques, notamment dans le cadre de conseil national d’aménagement du territoire.
L’analyse que nous faisons des événements qui éclatent parfois dans certaines zones urbaines n’est pas coupée de notre analyse générale de la crise sociale et politique. Si cette crise se manifeste de façon violente dans certaines banlieues, c’est que s’y concentrent avec une ampleur accrue toutes les difficultés de la situation économique et sociale.
Nous refuserons de cautionner des opérations médiatiques su quelques sites emblématiques. Nous revendiquons pour tous ceux qui vivent sur le territoire français de vrais emplois, des conditions de vie décente et le droit à la dignité.
En même temps que la défense des services publics sur tout le territoire, nous affirmons le nécessaire retour de l’Etat et de ses principes républicains, particulièrement là où le déficit d’identification est le plus criant, où le sens de l’appartenance citoyenne à la communauté nationale devient de plus en plus vague.
4.3.2 Pour une politique pertinente de développement rural
La politique de développement rural doit faire partie intégrante d’un projet de territoire. Le premier objectif est d’assurer la revitalisation du bassin de vie, notamment en renforçant l’action des services publics. Au-delà d’une redistribution de moyens, il est important d’initier des projet et actions innovants (intercommunalité, bassin d’emploi, Centre Régional d’Innovation et de Transfert Technologique (CRITT). Une recherche constante doit s’effectuer dans la mise en synergie des moyens existants et la distribution de moyens supplémentaires. La contractualisation est une nécessité pour pérenniser les projets. Les zones touchées par la désertification, les zones de montagnes, les zones posant des problèmes économiques et sociaux particuliers, les zones frontalières doivent être considérées spécifiquement.
En milieu rural, l’implantation des services publics est essentielle pour la cohésion nationale et l’égalité des droits de citoyens. L’attachement à ce principe est un impératif qui prime sur toute autre considération, en particulier de rentabilité. D’autant plus que la disparition de services publics en milieu rural est un facteur aggravant de la désertification, du vieillissement de la population et de l’exclusion.
Le souci d’un aménagement du territoire équilibré doit conduire à la mise en place, par l’Etat et les collectivités territoriales, d’un vaste plan de développement des services publics de proximité en milieu rural.
Ces services publics de proximité peuvent être multivalents mais doivent offrir à l’usager la garantie de qualité : assurance d’avoir accès à l’ensemble des services et des compétences, assurance de bénéficier des progrès technologiques.
Le statut de fonctionnaire des personnels de ces services publics de proximité est la première garantie de qualité. Cette garantie de qualité peut conduire à aménager la forme du service public afin de compenser un déficit d’équipement. Le service public, facteur d’égalité doit donc être maintenu y compris dans les zones rurales désertifiées sous des formes diverses : polyvalence, multivalence.
4.4 Aménagement du territoire pour une politique spécifique des DOM-TOM
Compte tenu des déséquilibres économiques et sociaux des DOM-TOM, le développement devra être autocentré pour être durable.
Concernant spécifiquement les départements d’Outre-mer, nous rappelons que par leurs retards structurels, ils sont définis « Régions d’objectif n° 1 » par l’Union Européenne.
Nous affirmons qu’au plan national, la priorité dans la politique d’aménagement du territoire de ces départements doit être la mise en œuvre rapide d’une loi de programmation permettant de combler leurs retards structurels tant en terme d’équipements qu’en terme de créations d’emplois et de formation des femmes et des hommes.
Il faut tenir compte de leur éloignement, de l’insuffisance et de l’inadéquation des structures universitaires générales et professionnelles. Une nouvelle vision de la mobilité en terme de formation prévoyant le retour et l’insertion au pays doit se faire en particulier en partenariat avec les régions avoisinantes ou métropolitaines.
La coopération régionale doit, d’une manière générale, tenir compte de ces impératifs.
Pa ailleurs, pour ce qui est de La Réunion, une réflexion doit se mener afin de rapprocher les centres de décisions territoriaux des citoyens par le biais d’un découpage cantonal et communal mieux approprié.
L’aménagement du territoire doit prendre en compte :
- le désenclavement, la valorisation et la création de pôles de développement avec une véritable gestion des ressources humaines et naturelles,
- l’adaptation des structures de formation,
- la lutte contre l’exclusion et la marginalisation de certains groupes sociaux.
La mise en place de rectorats doit être totale dans les meilleurs délais. Dans le cadre de l’aménagement du territoire, nous demandons à l’Etat de prendre en compte les besoins en matière de formation universitaire dans ces régions.
En conséquence, nous affirmons la nécessité qu’une démarche s’engage pour aboutir à terme à la création des Universités de la Guyane et de la Guadeloupe.
C’est répondre à notre exigence de voir définie une mission régionale aux services publics.
4.5 Pour une évaluation performante
La loi d’orientation pour l’aménagement et le développement u territoire du 4 février 1995 est une loi cadre. Il est nécessaire de lui donner un contenu plus précis : la loi sur le schéma national qui devait être votée à la fin de l’année 1996 devrait en être l’occasion.
Nous revendiquons que soit réellement pris en compte pour l’élaboration de celle-ci le débat dans les régions, les prises de position des conseils économiques et sociaux régionaux (CESR), le contenu des travaux des commissions thématiques et des groupes transversaux.
Enfin, aussi bien en ce qui concerne le zonage que l’expérimentation sur les pays nous demandons qu’une évaluation précise soit effectuée afin d’évaluer la pertinence des critères retenus et d’en tirer toutes les conséquences : ce n’est qu’à ce prix que sera mesurée l’efficacité de la loi. Pour ce faire, la mise en place du groupement d’intérêt public (GIP) prévu à l’article 9 de la loi du 4 février 1995 doit être un instrument permettant cette évaluation. Nous serons particulièrement attentifs à sa mise en place et à son rôle.
5. Notre syndicalisme pour la solidarité sociale
Réduire les inégalités passe la redistribution du revenu national pour répondre aux besoins concernant : la formation, l’emploi, la santé, la famille, la vieillesse.
Alors que le chômage et la précarité ne cessent de croître et que les formes d’exclusion se multiplient, il est impératif que l’Etat et l’ensemble des collectivités territoriales, mais aussi les citoyens, fassent de la solidarité un des axes majeurs de leur action.
Bien que le travail demeure un élément essentiel de la vie sociale, tant par les revenus qu’il procure que par l’insertion qu’il assure à l’individu dans la société, des millions de personnes en sont aujourd’hui privées. Si une réduction du temps de travail peut assurer une meilleure répartition de celui-ci, il est indispensable de garantir sans délai à chacun, par d’autres dispositions, les conditions matérielles de son existence.
Ceci passe notamment, en application de la Constitution, par la mise en place, pour tout individu privé des moyens de subvenir à ses besoins, d’un revenu social lui permettant de vivre dignement.
Face aux difficultés de la sécurité sociale, le gouvernement a présenté, en novembre 1995, un plan de réforme de celle-ci. La FEN s’est opposée à la remise en cause des régimes spéciaux et du code des pensions civiles t militaires, aux prélèvement supplémentaires (contribution au remboursement de la dette sociale – RDS) et à l’augmentation du forfait hospitalier journalier.
Elle a, en revanche, approuvé le principe de l’instauration d’un régime universel d’assurance maladie, l’intention de réformer le financement de celle-ci, la volonté de maîtriser l’évolution des dépenses de santé.
Différents textes législatifs et réglementaires ont concrétisé pour partie, la réforme envisagée. Mais la lenteur de la mise en œuvre est excessive et des problèmes demeurent.
Ainsi, nous condamnons la rigueur budgétaire frappant les hôpitaux publics.
Nous réaffirmons notre détermination à peser pour que soit effectivement conduite à ce [Illisible] une réforme de l’assurance maladie [Illisible] une véritable politique de santé publique et assurant à tous l’égalité d’accès aux soins.
5.1 Réformer le financement de la protection sociale
Essentiellement fondé sur les salaires, le financement de la protection sociale est aujourd’hui inadapté. Sa réforme est une nécessité absolue pour répondre à l’accroissement des besoins tout en assurant à moyen et long terme l’équilibre des comptes. Cette réforme doit s’appuyer sur les principes suivants :
- distinguer ce qui relève essentiellement de la solidarité nationale (santé, famille) de ce qui relève essentiellement de la solidarité professionnelle (indemnisation du chômage ; retraites de manière générale, indépendamment du caractère spécifique du Code des Pensions civiles et militaires),
- pour ce qui concerne la solidarité nationale, le financement doit reposer soit sur les revenus de tous les acteurs économiques, soit sur le budget de l’Etat et autres collectivités publiques,
- la contribution des entreprises doit être maintenue au moins au même niveau. En revanche, son assiette doit évoluer et ne plus reposer uniquement sur la masse salariale. La prise en compte d’une notion telle que la valeur ajoutée peut d’ailleurs avoir des effets bénéfiques sur l’emploi en ne pénalisant pas les industries de main-d’œuvre,
- la participation des ménages doit s’effectuer au moyen d’une contribution sociale généralisée assise sur l’ensemble des revenus : revenus d’activité professionnelle, revenus d’activité professionnelle, revenus de remplacement, revenus des capitaux mobiliers et immobiliers. Nous demandons que la contribution sociale généralisée (CSG) soit déductible du revenu imposable quand elle est assise sur les salaires et les revenus de remplacement et qu’elle reste non déductible quand elle est assise sur les revenus de capitaux.
Ces principes posés, nous exigeons une étape significative de transfert des cotisations sociales actuelles vers une CSG élargie et rénovée. La réforme de la CSG devra s’inscrire dans le cadre d’une réforme des prélèvements obligatoires fiscaux et sociaux qui ne se limite pas à une réforme de l’impôt sur le revenu des personnes physiques.
5.2 Répondre aux besoins
5.2.1 La sécurité sociale
La sécurité sociale demeure une conquête essentielle qui protège contre les aléas de la vie, met en œuvre le principe de solidarité entre générations, entre malades et bien portants, et reste un facteur primordial de cohésion nationale.
Nous réaffirmons notre attachement à cette institution, condamnons et combattons toute tentative susceptible de remettre en cause le rôle indispensable et irremplaçable qu’elle joue dans notre société.
La sécurité sociale doit demeurer un droit constitutionnel et son organisation être fondée sur le principe de la solidarité nationale. Il ne peut exister de sécurité sociale privée.
5.2.1 La santé
Les dépenses de santé ont connu une croissance importante ces dernières années, sans que pour autant les résultats sanitaires aient été à la hauteur des dépenses engagées. Contrainte de rembourser des dépenses croissantes alors que ses ressources s’amenuisaient, du fait du chômage pour l’essentiel, l’assurance-maladie a connu des déficits importants. Les gouvernements ont tenté de remédier à cette situation par l’augmentation du ticket modérateur, du forfait hospitalier et en imposant des prélèvements supplémentaires (hausse de la CSG, du remboursement de la dette sociale RDS).
Dans ce contexte, les assurés sociaux ont supporté la majeure partie de ces mesures injustes, dont l’inefficacité a été patente. Pour les plus modestes, l’accès aux soins primaires a été, de fait, remis en cause en contradiction avec les principes de solidarité fondateurs de la sécurité sociale.
Au cours du premier semestre 1996, des textes législatifs importants ont été promulgué : loi constitutionnelle ; ordonnances sur l’organisation de la sécurité sociale, la maîtrise des dépenses de médecine ambulatoire, l’hôpital. Ils sont venus tenter de corriger la dérive des dépenses en réorganisant l’assurance-maladie. Nous approuvons l’orientation générale de ces dispositions, dès lors qu’elles se refusent au rationnement des soins, et resterons vigilants sur leur application effective. Nous considérons en particulier que la lutte contre les abus, fraudes et gaspillages doit être un souci permanent des caisses pour viser une meilleure qualité des soins à moindre coût.
Cependant, nous déplorons :
- l’absence de définition d’une politique de santé publique, associant, prévention, éducation et recherche, dont l’assurance-maladie n’est qu’un des éléments ;
- l’absence d’ambition forte concernant la mise en place de véritables filières de soins faisant du généraliste le pivot du système de santé publique ;
- l’absence de volonté réelle de réforme des modalités de rémunération des professions de santé, même si les textes autorisent des expérimentations intéressantes ;
- la non remise en cause du secteur à honoraires libre (secteur II) ;
- l’absence de transparence sur la qualité et l’efficacité thérapeutiques des médicaments mis sur le marché ;
- la non-habilitation de la sécurité sociale à négocier les prix des médicaments avec les industries pharmaceutiques ;
- la limitation du rôle des administrateurs, gestionnaires de l’assurance-maladie, à la seule maîtrise des dépenses de médecine ambulatoire ;
- le renforcement de la tutelle de l’Etat sur la politique hospitalière, la non transparence dans l’attribution des enveloppes régionales 1997, l’approche purement comptable et non sanitaire qui a présidé à la détermination du montant de ces enveloppes.
Nous condamnons la politique de rigueur qui limite l’accroissement des crédits des hôpitaux à 0,88 %. Cette rigueur aura des conséquences sur l’emploi (en particulier pour les personnels contractuels), les regroupements ou fusions autoritaires d’établissements, sans prise en compte des besoins de la population, sans évaluation scientifique.
Par ailleurs, nous estimons que ces textes ne constituent qu’une étape dans la réforme du système. Nous continuons de revendiquer l’instauration du régime universel qui consacre à chaque résident le droit à l’accès aux soins, indépendamment de sa condition sociale ou professionnelle. Nous nous engageons à rechercher toutes les coopérations pour faire pression sur les pouvoirs publics et prendre les initiatives nécessaires pour que les aspects positifs de la réforme ne soient pas dénaturés ou abandonnés.
5.2.1.2 La famille
Dans le cadre d’une politique de redistribution, des moyens doivent être engagés pour aider les familles en compensant dès la première naissance les charges créées et pour mettre en place des services aux familles (garderies, crèches…) sur tout le territoire national. En ce sens, considérant que les allocations familiales sont une aide à l’enfant, nous nous opposerions à toute tentative visant à conditionner leur versement au niveau de ressources des familles. Dans le même ordre d’idées, nous condamnons la mise sous condition de ressources de l’allocation pour jeunes enfants (APJE) et réclamons le retour à la réglementation antérieure.
En revanche, les allocations familiales venant compléter le revenu de la famille, nous ne rejetons pas le principe de leur imposition, dès lors qu’elles s’inscriraient dans le cadre d’une réforme fiscale et que ses effets seraient neutralisés pour les familles à revenus faibles ou moyens. Une telle disposition implique nécessairement que les allocations familiales soient versées dès le premier enfant.
Nous revendiquons, dans chaque département, la mise en place de Commissions de Recours Amiables (CRA) pour régler les litiges de prestations familiales concernant les fonctionnaires.
Nous demandons la possibilité d’opter pour un congé parental rémunéré dès le premier enfant.
Aucune politique familiale ne saurait se concevoir sans respect du droit fondamental de l’être humain à disposer de son corps et de sa vie. Ceci passe par la maîtrise de la procréation qui implique :
- une large information du public ;
- la prise en charge à 100 % des moyens de contraception.
Nous demandons que l’information sur la contraception et notamment celle gratuite pour les mineurs, soit réelle et généralisée, que les centres soient développés et conforté dans leurs missions d’information, d’éducation et de prévention.
Nous dénonçons les restrictions budgétaires visant à réduire les capacités d’accueil et de fonctionnement des centres IVG et des centres de planification et d’éducation familiale. Nous exigeons du ministère de tutelle qu’il mette tout en œuvre pour le respect du droit à l’IVG, en particulier en le reconnaissant en tant qu’acte médical pris en charge à 100 %.
5.2.1.3 La vieillesse
Un système de protection social de solidaire fonde les régimes de retraite sur la répartition et non sur la capitalisation. Cette dernière doit être réservée aux compléments-retraite auxquels il est souscrit individuellement donc volontairement ou aux dispositions collectifs de prévoyance résultant d’accords d’entreprise ou de branche. Nous condamnons le système des fonds de pension instauré par le Parlement pour permettre aux entreprises de capter l’épargne salariale. Ces fonds par ailleurs ne profiteront qu’aux revenus les plus élevés.
L’allongement de la durée de vie, l’entrée plus tardive dans la vie active et l’abaissement de l’âge de la retraite nécessitent que soit revu le financement des retraites, que soient conforté le régime de base et les régimes complémentaires.
Nous condamnons la « réforme » de 1993 qui a porté de 37,5 à 40 ans la durée exigible pour bénéficier d’une pension de sécurité sociale à taux plein. Quand il existe plus de six millions de victimes de la précarisation (chômeurs, Rmistes, CES…), quand, sur dix salariés faisant liquider leur pension, six sont en inactivité, le retour à la situation antérieure s’impose. La solidarité, notamment entre actifs et retraités, doit permettre de faire évoluer le pouvoir d’achat des retraites en indexant celles-ci sur les salaires.
5.2.2 Les domaines spécifiques
5.2.2.1 La prévention et l’éducation
Toute politique humaniste de santé publique pour être cohérente et efficace doit s’appuyer sur la prévention et l’éducation, afin de changer les comportements individuels, de limiter les risques et réduire les dépenses de santé.
La prévention et l’éducation à la santé physique et mentale doivent aussi se faire à l’Ecole et tout au long du cursus scolaire et universitaires comme tout au long de la vie. Le système éducatif doit participer au développement de la notion de santé globale. Il doit collaborer avec les familles, les jeunes, les collectivités locales pour proposer les programmes de prévention les mieux adaptés. La participation active des jeunes est une condition de leur efficacité. Prévention et éducation sont notamment prioritaires dans le domaine de la lutte contre les toxicomanies. Celle-ci doit faire l’objet d’une politique de prévention à l’égard des toxicomanies sera d’autant plus efficace si parallèlement l’Etat s’engage dans la lutte contre le blanchiment de l’argent de la drogue.
Face au SIDA, toute attitude moralisatrice est à bannir et la plus grande attention doit être apportée pour le respect de la dignité de malades. La prévention du SIDA, dans l’attente de solutions médicales pour lesquelles doivent être accordés d’importants moyens de recherche, doit faire l’objet d’une politiqué volontaire d’information et de diffusion des moyens de prévention existant actuellement. L’usage du préservatif doit être facilité notamment après des jeunes. A l’égard des usagers de drogues, une politique volontariste visant à leur insertion doit l’emporter sur la tentation répressive, ce qui suppose le réexamen de la loi du 31 décembre 1970 relative à la pénalisation de l’usage des drogues. Nous demandons au ministère de la santé d’institutionnaliser la distribution gratuite de seringues dans les pharmacies et dans les institutions concernées par ce problème.
L’Ecole doit participer à la protection de l’enfance, dénoncer les maltraitances physiques et psychologiques, les abus et les mutilations sexuels, développer des programmes d’éducation au respect de soi et des autres et mettre en œuvre des actions de formation initiale et continue des personnels.
Une politique dynamique de recherche doit encore être développée pour prévenir l’apparition des handicaps, favoriser l’intégration des personnes handicapées, améliorer leurs conditions de vie, permettre de les accompagner et de les soutenir, d’apporter une aide à leur famille.
5.2.2.2 La prise en charge du handicap
La société doit être organisée, à tous les niveaux territoriaux, afin de lutter contre tous les facteurs de ségrégation, de marginalisation et d’exclusion qui peuvent la menacer dans ses fondements et dans sa cohésion.
Aussi l’intégration pleine et entière des personnes handicapées doit-elle demeurer une ambition, une préoccupation et une construction constante pour tous les secteurs de notre société. Les propositions de la charte nationale pour l’intégration des personnes handicapées élaborée à l’initiative de la FEN, en partenariat avec plusieurs associations laïques et la FNATH, constituent un ensemble cohérent dont nous demandons la mise en œuvre et le suivi.
5.2.2.3 La dépendance
Les problèmes de dépendance ne se posent pas seulement pour les personnes âgées. Toutefois, ce problème nécessite un examen tout particulier pour celles-ci.
Nous considérons que la solidarité nationale en faveur des personnes dépendantes doit s’affirmer comme un droit fondamental de la personne humaine et non comme une simple assistance.
Compte tenu de la modification de la structure familiale et de l’allongement de la durée de vie, le problème de la dépendance des personnes âgées se pose en termes nouveaux. Les degrés de dépendance, allant de la perte d’autonomie à la dépendance absolue, génèrent besoins et charges nouvelles.
Il convient de développer les solutions alternatives à l’hospitalisation notamment par les services d’aide et de soins à domicile y compris en cas d‘accueil par les familles. Des emplois de proximité peuvent être créés pour assurer sécurité, transport, mobilité à ces personnes.
C’est pourquoi nous revendiquons une prestation autonomie pour les personnes âgées dépendantes qui soit une prestation légale de sécurité sociale.
5.3 Gérer la sécurité sociale
La solidarité ne saurait faire l’objet d’une partition au sein d’un même régime et sa gestion être fractionnée en sériant les risques. Nous réaffirmons notre attachement aux principes fondateurs de la sécurité sociale en 1945 : unicité, universalité, solidarité.
La nouvelle organisation de la sécurité sociale qui se met en place doit être l’occasion de renforcer effectivement la responsabilité des administrateurs, dans le respect des relations contractuelles entre l’Etat et les caisses nationales, d’une part, les caisses nationales et les causses locales, d’autre part. Dans le cadre des objectifs négociés au plan national avec l’Etat, les conseils d’administration des caisses doivent pouvoir négocier avec les professionnels de santé et les industries pharmaceutiques sans que l’Etat intervienne dans le cours de la négociation.
Concernant les régimes spéciaux d’assurance maladie et le régime local d’Alsace-Moselle, nous demandons leur maintien dans l’attente de l’instauration, au niveau national, d’un régime universel assurant des garanties équivalentes.
6. Notre syndicalisme pour l’accès de tous à la connaissance et aux pratiques culturelles et sportives
Afin de faire prévaloir la logique de service public, il y a nécessité de clarifier les rôles respectifs de l’Etat et des collectivités territoriales et d’identifier la nature, l’origine, la destination des financements.
Il appartient à l’Etat d’assumer et d’impulser une politique d’éducation populaire sur l’ensemble du territoire et auprès de l’ensemble de la population, notamment par le développement de l’éducation permanente, des réseaux d’information, pour le développement de pratiques participatives : pratiques et expressions culturelles, sportives, civiques, de solidarité qui constituent des espaces d’éducation et de socialisation. Pour l’exercice de cette responsabilité, l’Etat doit prendre appui sur ses services déconcentrés et ses établissements, structures qu’il a le devoir de conforter tant sur le plan du patrimoine immobilier que des moyens humains, matériels et financiers.
Par l’apprentissage de l’environnement social et institutionnel, ces pratiques contribuent à ce que nous considérons comme une priorité : l’émergence d’une citoyenneté active pour une démocratie participative. En ce sens, l’Etat se doit, en premier lieu, de favoriser l’exercice du droit constitutionnel d’association et non de créer ou encourager des pseudo-associations para-administratives qui introduisent la confusion.
Il doit aussi soutenir les associations quand elles participent à une mission de service public au travers du partenariat et encourager et valoriser l’action des bénévoles en facilitant l’accès à des formations adaptées et en favorisant leur disponibilité par l’octroi d’un congé associatif.
La volonté politique de couvrir l’ensemble des champs de l’éducation à la citoyenneté doit se traduire par une loi-cadre sur l’éducation populaire et par une loi-cadre sur le sport.
Pour mener à bien les différentes missions en matière d’accès à la culture, aux activités physiques et sportives, à l‘éducation populaire, il faut une ambition politique forte s’appuyant sur des structures ministérielles spécifiques, des services déconcentrés renforcés, des personnels (fonctionnaires de l’Etat, des collectivités territoriales, des personnels associatifs) mieux formés et valorisés , des associations et organismes laïques, partenaires de l’Etat et des collectivité territoriales, des budgets dotés de moyens adéquats en fonctionnement et en interventions publiques.
Nous nous opposons à tout éclatement des services déconcentrés du ministère de la jeunesse et des ports ainsi qu’à leur dilution dans des entités au contour flou et à vocation plus sociale qu’éducative.
6.1 La culture
L’Etat républicain doit exercer sa pleine vigilance et mettre tous les moyens en son pouvoir pour s’opposer à toute volonté d’où qu’elle vienne de contrôle et d’assujettissement de la culture.
L’Etat et les pouvoirs publics ont des obligations à remplir en matière culturelle qui leur sont fixées par les lois et les règlements. En particulier, ils doivent veiller à la conservation et à la diffusion du patrimoine artistique et culturel de la nation. L’Etat doit garantir à tous l’accès aux savoirs et à la Culture, sources indispensables de la formation et du développement de l’individu et de sa personnalité. Les moyens affectés par l’Etat à la Culture permettent de mesure sa volonté de mettre en œuvre une politique culturelle digne de ce nom. Assurer l’égalité d’accès à la culture sous toutes ses formes, tant patrimoniales (musées, monuments…) que de création (arts plastiques spectacles…) et d’accès au savoir (bibliothèques, médiathèques,…) doit être l’axe prioritaire de toute politique culturelle. La réduction des inégalités passe aussi par la culture vivante et ouverte aux pratiques contemporaines. La production des biens culturels (livres, disques, films, vidéos) et leur diffusion ne peuvent obéir aux seules lois du marché et ne doivent pas être traitées comme de simples produits de consommation. La participation des hommes et des femmes, et en particulier des jeunes aux arts et aux pratiques culturels doivent être un objectif prioritaire de toute politique culturelle. La télévision peut aussi y contribuer, particulièrement les chaînes du service public, par la création de programmes éducatifs disposant de moyens financiers leur permettant d’être attractifs.
L’Etat et les collectivités doivent mettre à la disposition de tous un réseau d’institutions culturelles qui obéissent à une logique de service public, en garantissant, e particulier, l’accès du plus grand nombre. Ces institutions ne doivent pas avoir une forme juridique de type « industriel et commercial », incompatible avec les objectifs d’une politique culturelle de service public. En matière de lecture, la loi sur les bibliothèques annoncées par le ministre, doit être activement mise en chantier dans la plus large concertation. Elle devra garantir une égalité d’accès de tous à la lecture par un maillage cohérent du territoire et par la sanction de toute forme de censure. Les questions d’horaires d’ouverture, de tarification, de services disponibles, de programmation sont des éléments facilitant.
Il convient de mieux protéger les œuvres de l’esprit, de mieux garantir les droits de diffusion, de mieux favoriser la création pour mieux se prémunir d’une standardisation des industries culturelles.
L’éducation artistique et culturelle doit être dispensée à tous et ce, dès l’école qui a un rôle primordial à jouer dans la formation culturelle et artistique, et dans l’accès de tous à la culture. Le partenariat doit être recherché avec les établissements et services culturels dans le cadre de projets éducatifs. Les pratiques culturelles sont des éléments fondamentaux du développement de l’individu et de sa personnalité. Elles doivent concerner le plus large public. Elles constituent aussi des moyens d’action et de formation pour des jeunes et des adultes en difficulté d’insertion. L’insertion sociale et professionnelle par la culture (théâtre, musique, peinture, atelier d’écriture…) doit être une réalité.
6.2 Les activités physiques et sportives
La pratique des activités physiques et sportives pour tous – y compris les handicapés – est facteur de santé, de développement personnel, d’éducation à la citoyenneté et aussi d’insertion. Elle est un droit et relève d’une mission de service public.
Elle s’appuie tout particulièrement sur l’éducation physique et sportive (EPS) qui, de l’école à l’université, concourt au développement global du jeune :
- en développant les conduites motrices et aptitudes et capacité qu’elles impliquent ;
- en ouvrant l’accès au domaine de la culture que constitue la pratique des APS ;
- en apportant les connaissances et les savoirs nécessaires à l’organisation et à la conduite de la vie physique à tous les âges.
Les pratiques sportives, de loisirs ou compétitives, du niveau le plus modeste au plus haut niveau, ont des caractéristiques communes tout en étant différenciées par les conditions et exigences de l’entraînement, l’environnement psychologique et économique et les performances. Toutefois, entre le sport de masse et le sport de haut niveau, la continuité n’est non seulement plus effective mais un fossé tend à se creuser. Le poids de l’argent prend une part croissante et exagérée dans certains sports de compétitions, d’où des dérives et des perversions que nous condamnons. Il y a lieu notamment de dénoncer la pratique intensive d’un sport à un âge trop précoce, compte tenu des risques physiques, physiologiques, psychologiques découlant d’une recherche excessive de la performance en pleine période de croissance.
Le sport de haut niveau a valeur d’exemple dès lors que les principes de l’éthique sportive sont respectés. Il reste un puissant facteur de réalisation personnelle, de dimension esthétiques et culturelle, de progrès technique. Son accès doit être encouragé. L’Etat, en évitant le chauvinisme, doit y contribuer par les structures et les moyens mis en place. Les cadres techniques, personnels qualifiés de l’Etat dont les compétences peuvent être mises au service du mouvement sportif, restent un élément indispensable de ce dispositif, un garant de la qualité et du respect de l’éthique.
Les sportifs de haut niveau, compte tenu des contraintes imposées par la compétition, doivent pouvoir suivre une scolarité qui concilie entraînement sportif et réussite scolaire. Au-delà des études, un plan de formation doit leur permettre de bénéficier d’une réelle insertion professionnelle.
Le sport professionnel, géré de manière spécifique, doit mieux assumer lui-même son fonctionnement et son devenir au sein du mouvement sportif. Les financements publics qui lui sont consacrés doivent être considérablement réduits.
L’enseignement, l’encadrement, l’animation, l’accompagnement, la gestion des activités physiques et sportives pour tous les publics et tout au long de la vie, constituent un gisement d’emplois publics et privés. Une véritable politique de formation professionnelle, conduite dans le cadre et selon les critères du service public doit permettre l’accès aux métiers de champ.
Quant à la pratique sportive, elle est porteuse de valeur éducatives dans la seule mesure où elle repose sur une éthique exigeant le respect de soi et d’autrui. Enseignants, éducateurs, formateurs, arbitres, ont, au travers de leurs missions respectives, à promouvoir ces valeurs et à veiller au respect de l‘éthique avec l’aide de l’Etat.
6.3 L’éducation populaire
Le rôle que nous accordons à la mission éducatrice de l’Etat pour développer la citoyenneté et garantir l’égalité sociale ne se limite pas à l’enseignement dans sa fonction de transmission des connaissances. Cette mission éducatrice s’entend dans la diversité des interventions et des méthodes utilisées.
L’éducation populaire a pour fonction d’assurer l’accès de tous aux savoirs sociaux, aux pratiques sociales et culturelles, indispensables à la maîtrise de son environnement.
Son champ d’intervention est le temps libéré.
Pour les enfants et les jeunes scolarisés c’est le temps non scolaire. Pour les adultes et les jeunes actifs, il est le temps libéré par la réduction du temps de travail, résultat de 150 ans de luttes sociales. Il est aussi la partie inemployée du temps contraint du chômage.
La fonction de l’éducation populaire est de faire de ce temps libre, gagné ou subi, un temps d’épanouissement et de création de liens sociaux à travers notamment, une politique du loisir protégé des enjeux marchands et un développement de l’éducation permanente.
Proposer un sens au temps libéré, au travers d’une politique du loisir, des vacances éducatives pour les jeunes, de l’engagement associatif, voilà un des enjeux de cette fin de siècle.
L’éducation populaire est aussi un temps de formation personnelle et une ouverture sur le monde contemporain. Pour ce faire, il faut multiplier les offres de formation de qualité, les populariser et en faciliter l’accès, en particulier, aux plus défavorisés.
Une loi cadre pour l’Education Populaire doit assurer l’unité et la cohérence du champ de l’éducation populaire dans la complémentarité de toutes ses composantes, publiques et privées.
Traduction d’une volonté politique, elle dit être le moyen d’impulsion des politiques et de régulation entre les différentes structures appelées à intervenir dans cette mission d’intérêt général.
Elle doit notamment :
- définir la répartition des compétences et les responsabilités respectives des différentes collectivités : Etat, régions, départements, communes,
- définir les critères et les modalités des délégations de services publics à des associations,
- garantir les cadres réglementaires des métiers de l’éducation populaire.
7. Notre syndicalisme pour les services publics, des personnels reconnus au service de la nation
7.1 Moderniser, rénover, démocratiser
7.1.1 Le développement des services publics, une idée d’avenir
L’Etat républicain doit mettre en œuvre une politique qui assure l’égalité d’accès aux services publics comme aux emplois publics. Nous voulons promouvoir, poursuivre, généraliser la modernisation et la rénovation des services publics qui ont déjà fait la preuve de leur capacité d’évolution et d’innovation. Les usagers et les personnels doivent être associés à cette démarche.
Une réponse globale et cohérente est apportée par les services publics qui seuls, garantissent l’égalité d’accès pour tous aux besoins collectifs de la Nation.
C’est pourquoi toute politique de privatisation des services publics – même accompagnée du maintien provisoire des statuts des personnels – est à proscrire. Toute décentralisation mal maîtrisée, toute régionalisation remettant en cause le rôle nécessaire de régulation de l’Etat sont également à rejeter.
Nous dénonçons cette idée socialement injuste, économiquement fausse que les services publics seraient la cause des déficits publics alors que leur part dans le produit intérieur brut (PIB) du pays n’a cessé de décroître depuis des années.
En France, comme dans la plupart des Etats européens, la persistance des déficits publics doit s’interpréter comme la conséquence de l’insuffisance de la dynamique de croissance et non comme sa cause.
7.1.2 Promouvoir le statut général et les droits et garanties des fonctionnaires
Le statut général est l’instrument unificateur et le fondement essentiel de nos fonctions publiques.
Il est une condition de leur efficacité au service des usagers. Le syndicalisme, qui a été partie prenante de sa création, reste aujourd’hui le garant de sa promotion.
7.1.2.1 Toutes les potentialités du statut général
Il faut que le statut général s’applique dans tous les domaines de la vie professionnelle des fonctionnaires en liaison étroite avec les évolutions de la fonction publique, sa modernisation, sa rénovation :
- poursuite de la politique de lutte contre les discriminations sexistes dans les fonctions publiques,
- développement des droits sociaux, du droit syndical, notamment, des moyens de remplacement qui permettent leur mise en œuvre,
- respect des règles du paritarisme et leur évolution vers plus de transparence et de démocratie,
- respect et renforcement de la comparabilité entre les statuts des personnels des trois fonctions publiques, afin de permettre une mobilité effective appuyée sur une large information disponible pour tous et le rétablissement et l’extension des congés mobilités,
- utilisation des nouvelles possibilités d’emplois offertes aux handicapés par les recrutements par voie contractuelle, et, dans le même temps, augmentation du nombre des emplois de réadaptation, amélioration des procédures de reclassement pour toutes les catégories de personnels devenus handicapés en cours de carrière,
- développement de l’hygiène et de la sécurité pour tous. Nous demandons à l’Etat la mise en œuvre rapide des améliorations du décret de 1982 obtenues par l’action syndicale en 1995,
- application des nouvelles dispositions relatives à la médecine du travail pour les fonctionnaires. Cela passe par le recrutement de médecins de prévention en nombre suffisant, bénéficiant d’un statut attractif. La médecine du travail pour les personnels des trois fonctions publiques pourrait aussi être organisée dans un cadre décentralisé par conventions signées avec les établissements publics ou mutualistes hospitaliers et les structures existantes de médecine du travail.
Pour les agents de l’Etat et des collectivités territoriales, victimes d’un handicap au cours de leur carrière, leur réadaptation, leur réemploi, leur reclassement dans un autre emploi doivent être assurés notamment par la création de postes et d’équipements spécifiques qui font cruellement défaut. Nous revendiquons l’application par l’Etat et les collectivités territoriales de la législation et de la réglementation existantes.
7.1.2.2 Fonction publique territoriale
Dans la fonction publique territoriale nous œuvrons à l’achèvement de la construction statutaire (notamment la filière animation), nous demandons que l’ensemble des concours prévus par les statuts particuliers soit assuré et qu’une formation de qualité, y compris post-recrutement, soit apportée aux agents.
Nous veillerons à imposer le respect des garanties du statut notamment en matière de recrutement, afin de créer les conditions d’une véritable mobilité au sein de la fonction publique territoriale et entre les fonctions publiques.
Nous avons assuré notre présence syndicale dans la fonction publique territoriale en tenant toute notre place dans les élections professionnelles de novembre 1995 sous l’égide de l’UNSA. Notre représentativité désormais reconnue nous permet de développer notre présence dans les filières culturelle, animation, sanitaire et sociale, sportive et de nous fixer cet objectif dans le cadre d’emploi des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM) ;
7.1.2.3 Fonction publique hospitalière
Nous sommes également présents dans la fonction publique hospitalière à travers nos syndicats nationaux. Il nous appartient de prendre en charge leurs préoccupations en exigeant une fonction publique hospitalière de qualité et d’avenir. Nos collègues y rencontrent à bien des égards les mêmes aspirations que ceux relevant de la fonction publique de l’Etat.
Nous revendiquons que les éducateurs soient intégrés à la liste des personnels visés par l’arrêté du 12 novembre 1969 (classement relatif au service actif).
Nous devons au sein de la FEN et de l’UNSA nous donner les moyens de la représentation syndicale de ces personnels.
7.1.2.4 Les non-titulaires
Il faut que cette pratique scandaleuse cesse ! Nous demandons que soient appliqués les principes qui fondent le statut général et qui impliquent que tous les emplois permanents soient occupés par des personnels titulaires. Nous exigeons donc, par une meilleure gestion prévisionnelle des emplois et des recrutements, par l’utilisation rationnelle des listes complémentaires, par la création d’emplois de titulaires-remplaçants, que soit limité aux stricts cas prévus par la loi le recours aux non-titulaires.
Tout recrutement de nouveaux non-titulaires qui s’avérerait indispensable doit être accompagné de perspective de formation et de titularisation. Il faut en finir avec la pratique du recrutement de « contractuels 10 mois ». Tous les postes vacants doivent être mis aux concours sans délai. Tous les postes mis au concours doivent être pourvus et les heures supplémentaires d’enseignement transformées en emploi. Tous les rompus de temps partiel également.
Dans le cadre de l’application du protocole d’accord du 14 mai 1996 sur la résorption de la précarité – dont nous demandons l’élargissement des critères en vue de son extension –nous veillerons à ce que les procédures de titularisation soient effectivement et immédiatement mises en œuvre et élargies. Il faut que cessent définitivement les recrutements de non-titulaires et que l’emploi de ceux qui sont en poste soit préservé dans la perspective de la titularisation.
7.1.2.5 Les contrats emploi-solidarité
Alors qu’il s’agissait à l’origine d’une mesure à caractère social qui devait permettre l’insertion professionnelle des personnes concernées, nous constations une dérive dans l’utilisation qui est faite des Contrats-Emploi-Solidarité (CES). Nous dénonçons l’exploitation des personnes et l’utilisation abusive voire frauduleuse des contrats en particulier dans la fonction publique de l’Etat par le biais d’association-écran. Les collègues en CES ne doivent en aucun cas pallier l’insuffisance d’emplois permanents, empêchant ainsi le recrutement de personnels titulaires. Les élus aux conseils d’administration des Etablissements Publics Locaux d’enseignement (EPLE) doivent s’y opposer. Nous exigeons pour les collègues employés sous contrat emploi-solidarité que leur soit effectivement donnée la formation à laquelle ils ont droit, et qu’ils bénéficient du tutorat prévu par les textes afin de faciliter leur insertion professionnelle. Ils doivent pouvoir, e particulier, avoir accès aux préparations aux concours des fonctions publiques.
Sur ce dossier, le contrôle paritaire doit s’exercer à tous les niveaux. Le protocole d’accord du 14 mai 1996 doit s’appliquer dans son intégralité.
7.1.3 Rénover les services publics et les moderniser
Faire que les services publics soient, en permanence, en phase avec les évolutions de la société, de l’organisation du travail et des techniques, qu’ils répondent aux besoins collectifs nouveaux qui s’expriment, c’est l’objectif de la modernisation. Cette exigence s’impose également aux organismes et établissements ayant reçu délégation de services publics.
Cette modernisation passe par :
- l’information qui implique la consultation des personnels, en particulier, au travers de leurs organisations syndicales représentatives et des instances paritaires, leur association à la mise en œuvre de la modernisation au niveau déconcentré,
- le développement des nouvelles technologies et leur introduction à tous les niveaux des services publics. Leur utilisation doit être compensée par une plus grande humanisation des services. En particulier, l’intervention des personnels dans un rôle de médiateur s’impose entre les utilisateurs et les moyens technologiques mis à leur service,
- une réduction généralisée du temps de travail qui doit permettre de créer des emplois et s’accompagner de l’aménagement de l’organisation du temps de travail pour répondre aux besoins des usagers vis-à-vis des services publics ainsi qu’à la nécessaire amélioration des conditions de travail des personnels. Pour développer le temps chois, une importante réorganisation du fonctionnement des services s’impose. Le temps partiel et la cessation progressive d’activité doivent devenir un droit, et le mi-temps doit être rendu plus attractif,
- la généralisation d’une formation professionnelle initiale à tous les agents publics,
- un investissement important dans la formation continue, afin que ce droit ouvert par le statut général entre dans les faits pour tous et que dans cette perspective, il soit pris en compte dans les carrières. Les accords signés dans la fonction publique de l’Etat et dans les différents ministères vont dans ce sens. Le suivi des accords, pour qu’il soit effectif passe par la mise en place d’une évaluation régulière et par la création de structures de concertation ministérielles et locales, là où elles n’existent pas. Nous n’acceptons pas que les moyens humains et financiers de la formation continue soient les premiers à souffrir des restrictions budgétaires,
- la décentralisation qui doit rapprocher les services publics des usagers et équilibrer, au plan territorial, les pouvoirs décentralisés des collectivités,
- l’évaluation permanente de l’efficacité des services publics. C’est l’un des enjeux de la modernisation. Elle est essentielle pour la promotion et la défense des services publics. Elle se distingue de la notion de contrôle qui se réfère à des normes préétablies. Elle s’inscrit dans le cadre d’un projet avec des objectifs précis dont elle doit assurer la régulation pour améliorer la qualité et l’efficacité sociale du service ou du projet considéré. Elle doit être le fait de tout acteur du système et pas seulement celui d’évaluateurs extérieurs. Elle doit faire l’objet d’une négociation entre pouvoirs publics, personnels et usagers,
- l’évaluation individuelle des personnels. Les formes actuelles de notation ont vécu ! Leurs modalités sont à rebours de la modernisation des services publics, de l’intérêt, de la motivation et de la responsabilisation des personnels. Nous voulons changer les choses. L’évaluation individuelle ne peut être dissociée de l’évaluation de l’équipe travaillant dans le cadre d’un projet d’établissement ou de service qu’elle a négocié. Cette évaluation deviendra alors formatrice. Elle sera à prendre en compte dans la gestion de la carrière, dans le cursus de formation continue du fonctionnaire, elle lui permettra de mieux s’investir dans la mission qui lui est confiée et d’améliorer ainsi la qualité des services publics. La réflexion syndicale sur l’évaluation des personnels doit être poursuivie et approfondie. Elle doit tenir compte des modifications intervenues ans la pratique de nos métiers.
7.1.4 Les personnels de l’éducation à l’étranger
Les établissements français d’enseignement, les établissements culturels, la coopération linguistique et éducative, la francophonie concourent à la solidarité et au rayonnement de la culture française.
Mais rien ne saurait possible sans l’action des principaux acteurs que sont les personnels.
Il convient de consolider l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) – prolongement à l’étranger du système éducatif – de conforter son indépendance, de la doter d’un budget conforme à ses objectifs et de respecter le paritarisme et les principes fondamentaux du décret 90 et de mettre fin aux dysfonctionnements actuels. La FEN demande que les établissements en gestion directe aient un statut d’établissements publics et que les personnels non-titulaires soient donc reconnus en qualité d’agent de l’Etat.
Les établissements de l’AEFE doivent – lorsque les conditions sont réunies – être associés à l’action des établissements culturels et aux actions de coopération.
Les centres et instituts culturels et les alliances françaises doivent œuvrer en complémentarité mais sans concurrence et sans préjudice pour le service public et toujours dans le cadre d’une politique culturelle claire et cohérente. Nous rappelons que l’engagement de l’Etat est indispensable pour les coordonner et les financer dans l’esprit du service public.
Dans tous les domaines, la solidarité est également nécessaire entre les personnels.
Nous réaffirmons la nécessité de rendre aux titulaires recrutés locaux de ces établissements leur dignité de fonctionnaires par une réforme analogue celle de l’enseignement français à l’étranger et de lutter par des moyens conséquents contre la précarisation des personnels des centres et instituts.
Nous agirons plus particulièrement pour la titularisation, afin que les mesures de la fonction publique bénéficient, au même titre et dans les mêmes délais, aux collègues exerçant à l’étranger, pour plus de justice dans les rémunérations et pour le respect des droits professionnels et syndicaux.
Pour les personnels non titulaires de nationalité française exerçant dans un établissement culturel ou de l’AEFE, nous demandons que l’Etat recherche, avec ses partenaires étrangers, les moyens d’améliorer leur couverture sociale.
Tout personnel de l’AEFE, dans un institut français ou une alliance française ou en coopération doit pouvoir bénéficier d’une aide à la scolarité dans les établissements de notre réseau afin de conserver un niveau de vie décent.
7.1.5 Répondre aux attentes des personnels de droit privé
Notre responsabilité syndicale s’étend également aux personnels de droit privé.
Certains d’entre eux exercent des missions de service public. Pour ces derniers nous revendiquons l’intégration dans les fonctions publiques, pour ceux qui le souhaitent.
Néanmoins, en attendant que ce but soit atteint, nous apporterons notre soutien à l’ensemble de nos syndicats du secteur privé dans leur bataille pour la représentativité. Notre soutien se manifestera pour que nos syndicats soient présents aux différentes élections professionnelles. Nous nous engagerons avec nos syndicats nationaux, résolument dans la bataille des élections prud’homales de décembre 1997 qui seront un des éléments de la représentativité de l’UNSA. Cette reconnaissance a également pour but, à l’avenir, de permettre, entre autres, la négociation et la signature des différentes conventions collectives, en particulier dans les organismes de gestion des fonds de la formation professionnelle. Nous revendiquons l’habitation du centre de formation de l’UNSA, nécessaire pour dispenser les formations économiques, sociales et syndicales et pour permettre à tous nos mandants du secteur privé de bénéficier légalement de ses prestations. Les moyens de fonctionnement des services et établissements ayant délégation de services publics doivent être à la hauteur des ambitions affichées par les pouvoirs publics. Dans ce contexte, les personnels doivent se voir garantir un déroulement de carrière attractif, des formations de qualité, respectueuses des individus. Il faut doter les établissements de budgets de fonctionnement et d’investissement suffisants.
De façon générale nous apporterons aide et soutien à nos syndicats du secteur privé tant au plan technique qu’au plan moral et politique.
7.2 Rémunérations : poursuivre et amplifier les revalorisations, défendre le pouvoir d’achat de tous,
7.2.1 Revalorisation de nos carrières : s’appuyer sur les acquis pour de nouvelles revendications.
Depuis le congrès de La Rochelle en 1988, nous nous sommes fixés un objectif et une ambition : fonder dans un même projet la rénovation des services publics et la revalorisation de ses personnels. Notre action syndicale a eu pour résultat les protocoles d’accord sur la rénovation de la grille de la fonction publique et sur la revalorisation des enseignants. Ces protocoles ont ouvert la voie à de vastes plans pluriannuels de revalorisation qui améliorent concrètement la situation matérielle de l’ensemble des fonctionnaires. Ils engagent de façon irréversible une démarche fondée sur une dynamisation de l’ensemble des missions de la fonction publique par la formation professionnelle des fonctionnaires, par la reconnaissance des nouvelles qualifications qu’elle implique, par la mise en cohérence et le développement des carrières des personnels.
Nous devons aujourd’hui agir pour :
- corriger les insuffisances et remédier aux difficultés liées à l’application des revalorisations obtenues,
- améliorer les dispositifs de revalorisation en cours et accélérer leur mise en œuvre,
- revaloriser les corps qui n’ont pas été concernés par le protocole « Durafour » et améliorer, en particulier, les carrières des corps de catégories A supérieur de l’éducation et de la recherche.
- augmenter les possibilités effectives des promotions de classe et de grade, en imposant dans un premier temps l’application des pyramidages statutaires.
- créer de véritables corps de débouché en catégorie A type pour toutes les professions recrutées au classement indiciaire intermédiaire dans l’attente de la reconnaissance de leur diplôme ou de qualification au niveau II,
- réduire le nombre des corps par filière de métiers, notamment en catégorie C ; dans la filière administrative et de bibliothèque, en particulier, l’objectif st de parvenir à un seul corps en catégorie C,
- compléter les constructions statutaires en harmonisant les filières de métiers comparables,
- mener à son terme la réflexion sur la notion de catégories.
Enfin, face au développement anarchique, incontrôlé, opaque des primes et indemnités, nous voulons obtenir la clarté dans ce domaine. Nous pourrons alors progressivement imposer une remise en cohérence pour réduire les disparités existantes et, chaque fois que cela est possible et souhaitable, l’utilisation de la Nouvelle Bonification Indiciaire (NBI) dans le respect des principes qui la fondent.
7.2.2 Préserver une véritable politique de négociations salariales
Conquête syndicale essentielle de la FEN en 1968, la négociation salariale annuelle n’est entrée dans le droit que depuis la promulgation du nouveau statut général. Cette conquête doit être préservée.
Le droit à la négociation du pouvoir d’achat individuel est indissociable d’une véritable politique de « redistribution sociale » fondée sur la contribution équitable de tous et d’une véritable politique de modernisation de la fonction publique.
L’évaluation du pouvoir d’achat ne peut donc inclure ni le « Glissement-Vieillissement-Technicité » (GVT) lié à l’évolution de la carrière du fonctionnaire, ni les mesures de revalorisation liées à l’évolution des missions, à la modernisation de la fonction publique et à la requalification des emplois.
Nous exigeons qu’aucun traitement indiciaire ne soit inférieur au SMIC et que des mesures spécifiques soient prises pour favoriser les bas salaires. Nous considérons qu’un accord salarial ne peut être que global.
7.2.3 Le droit à pension
Nous confirmons notre attachement à la conception de la pension de retraite des fonctionnaires définie par le Code des pensions « une allocation pécuniaire, personnelle et viagère, accordée aux fonctionnaires… en rémunération des services qu’ils ont accomplis jusqu’à la cessation régulière de leurs fonctions ». Sa spécificité, qui ne permet de l’assimiler à aucun autre système et qui découle directement de la situation statutaire du fonctionnaire et de la notion de carrière dans la fonction publique, ne peut être remise en cause. En liaison avec la Fédération Générale des Retraités (FGR), nous poursuivrons l’action pour défendre ces principes essentiels, en particulier ceux de péréquation et d’assimilation. Nous agirons aussi pour le relèvement de l’indice minimum de pension et de réversion.
Il faut sans relâche prendre appui sur les personnels et l’opinion publique pour poursuivre le travail d’explication sur la logique statutaire qui fonde nos pensions qui ont un traitement continué, défendre cet acquis inaliénable pour une fonction publique de carrière et confirmer ainsi définitivement le recul du gouvernement en décembre 1995.
Par ailleurs, nous revendiquons :
- la possibilité d’obtenir la jouissance de la pension dès lors que l’on compte 37,5 annuités au sens de l’article L5 du Code des pensions ;
- la possibilité de faire valider les services auxiliaires accomplis à temps incomplet,
- la possibilité de faire prendre en compte les périodes d congé parental ou de disponibilité pour élever une enfant et en totalité les périodes de mi-temps familial et de temps partiel pour élever un enfant.
Nous nous félicitons de la création pour L’année 1997 du congé de fin d’activité (CFA) et nous en demandons la pérennisation.
7.2.4 L’action sociale en faveur des fonctionnaires
7.2.4.1 Des droits à respecter :
La participation à la définition et à la gestion de l’action cultuelle sportive et de loisirs prévue par le statut général doit être effectivement mise en œuvre et les compétences du Comité Interministériel d’Action Sociale (CIAS) renforcées. La situation actuelle est insatisfaisante.
L’action sociale dans la fonction publique joue en principe un triple rôle :
- elle est un élément de la politique de gestion des personnels permettant de prendre en compte les contraintes spécifiques liées au statut général, aux statuts des corps ou aux besoins du service public,
- elle est censée jouer le rôle des Caisses d’Allocation Familiale (CAF) en matière de prestations extralégales,
- elle devrait servir de substitut à l’absence de comités d’entreprise dans la fonction publique.
Le transfert de la gestion des fonctionnaires aux CAF est actuellement envisagé. Il ne saurait justifier la suppression ou la réduction des crédits de l’action sociale dans la fonction publique, même si les fonctionnaires avaient accès aux prestations extralégales des caisses.
7.2.4.2 Fonctionnement à améliorer :
La transformation du Comité interministériel des Services Sociaux (CISS) en Comité Interministériel d’Action Sociale (CIAS) et la création de Sections Régionales Interministérielles d’Action Sociale (SRIAS) n’ont pas, à ce jour, faute de volonté politique et de moyens supplémentaires, apporté d’amélioration significative de l’action sociale. Nous regrettons que des instances départementales dotées de moyens humains et financiers n’aient pas été créés. Nous demandons que les structures et les instances interministérielles décentralisées soient dotées des moyens humains, matériels et financiers qui répondent aux besoins sociaux.
7.2.4.3 Des crédits à augmenter :
L’augmentation programmée et garantie d’une part de la masse salariale consacrée à l’action sociale permettra seule d’assurer plus d’égalité entre les fonctionnaires, de développer les prestations existantes (aide au logement, à la restauration, à la famille, aux vacances…) et d’en créer de nouvelles. Nous demandons que soient corrigées, par des dotations accrues, les disparités importantes qui existent dans les crédits engagés par les différents ministères au titre de l’action sociale.
Nous exigeons une politique programmée d’amélioration des moyens.
8. Notre syndicalisme pour la démocratisation du service public d’éducation
L’éducation est une dimension de la vie : on s’éduque à tout moment et tout au long de la vie.
Le service public d’éducation nationale est l’instrument structurant de l’éducation initiale. Il doit être conçu pour s’adresser à tous, sans discrimination, avec une égale efficacité pour tous. Il doit concourir à l’éducation permanente. Il doit avoir une mission d’instruction, de transmission du patrimoine culturel et de préparation à l’avenir, (formation professionnelle, initiations aux techniques les plus récentes en usage dans la société) de socialisation et de formation civique, de culture générale. Le développement des capacités intellectuelles, physiques et sensorielles, esthétiques, techniques et le développement de la créativité dans ces domaines constituent la culture générale. Sa finalité doit être de concourir à former des hommes et des femmes libres, autonomes, solidaires, engagés dans la construction de leur destin collectif. De cette conception de l’éducation et du service public d’éducation, nous tirons les conséquences en termes de propositions et de revendications.
8.1 Un service public laïque
8.1.1 Une éducation nationale
En France, l’histoire a créé un lien étroit entre l’Ecole publique et la Nation. L’Ecole publique doit concourir à la cohésion nationale fondée sur les valeurs et les pratiques républicaines. Cette fonction la distingue fondamentalement des écoles d’initiative privée, séparatistes par nature parce qu’elles s’adressent à des publics particuliers et/ou se caractérisent par des « caractères propres » religieux ou idéologiques.
Là où un établissement privé sous contrat est en situation de monopole de fait, les pouvoirs publics doivent imposer la création d’un établissement satisfasse intégralement à toutes les obligations du service public et perde son caractère confessionnel, ou de négocier son intégration dans le service public.
L’Etat a l’obligation constitutionnelle d’organiser et de garantir la continuité territoriale, y compris dans les DOM, du service public d’éducation nationale. L’aménagement du territoire doit assurer sa mise en réseau pour une distribution qui permette l’égalité des citoyens dans l’usage de ce service public.
L’Etat doit demeurer le responsable du recrutement et de la gestion des personnels, le garant du caractère national des programmes et des diplômes. Nous refusons le transfert au ministère du travail de tout ou partie des compétences dévolues en la matière au service public d’éducation. L’Etat doit définir une politique éducative construite sur la réalisation d’objectifs à la définition desquels doivent être associés les acteurs et les partenaires du service public d’éducation. La loi d’orientation de 1989 donne un cadre qu’il convient de confirmer, de préciser et au moins de mettre en pratique au moyen d’une loi de programmation.
8.1.2 Une éducation laïque
L’éducation nationale a une obligation de laïcité. Ses contenus et ses modes d’enseignement doivent garantir la liberté de conscience, rejeter tout dogmatisme, former les esprits, à penser librement, de manière autonome. L’enseignement public accueille tous les élèves, sans distinction d’origine et de croyance. L’avenir d’une nation ne peut se fonder sur des éducations dans des systèmes séparés ou dans des isolements communautaires.
Le port de tout signe d’appartenance religieuse ou politique altère la laïcité de l’Ecole. La FEN rappelle que dans l’enseignement public tout acte de propagande ou de prosélytisme, toute tentative d’intimidation ou de pression doivent être proscrits. Le dialogue sans concession et l’affirmation de ces principes doivent guider l‘action des équipes éducatives.
L’éducation nationale a le devoir de former des citoyens engagés solidairement dans la construction de leur destin collectif. Cela passe par une pédagogie fondée sur la coopération et non la compétition, le respect des singularités, le dialogue des différences et le refus d’en faire des enfermements, un fonctionnement des établissements organisé sur un modèle démocratique, les élèves et les étudiants étant en situation, non de sujets, mais d’apprentis-citoyens éclairés et participant aux décisions qui les concernent. L’éducation aux médias, l’existence de journaux lycées sont des éléments de cette formation.
8.2 Un service public adapté à ses publics dans leurs diversités
8.2.1 Objectifs nationaux et réalités locales
L’école publique est une, ceux qui la fréquentent sont divers : avoir la même finalité pour tous implique donc des traitements différenciés. Il faut compenser les disparités, tenir compte des spécificités, qu’il s’agisse de chacun des élèves, des établissements, des communes, des régions. Unicité n’est pas monolithisme.
Dès lors que les objectifs nationaux sont précis, qu’interviendra systématiquement une évaluation nationale a posteriori, il faut laisser une large marge d’initiative aux établissements dans tous les aspects de l’acte éducatif.
Il faut donner vraiment plus de moyens pour faire mieux et travailler autrement aux établissements dont les élèves ont le plus de besoins. Ce qui s’imagine dans les « établissements sensibles ou difficiles » et les Zones d’Education Prioritaires (ZEP) constitue une première réponse incomplète et imparfaite. La carte des ZEP doit être révisée en fonction de considérations sociales et non pas politiques.
8.2.2 Prise en compte des élèves tels qu’ils sont
Les enfants, les jeunes ne sont élèves que quelques heures par jour ; ils sont enfant et jeunes toute la journée. L’école doit connaître et se préoccuper des conditions de leur vie à l’extérieur et des influences qu’elle a nécessairement sur leur vie au sein de l’école. Les enseignants doivent pouvoir travailler avec les médecins scolaires, les infirmiers scolaires, les assistants de service social en milieu scolaire, les psychologues scolaires, les conseillers d’orientation psychologues, membres de l’équipe éducative, et en collaboration avec les structures de prévention u des soins extérieurs à l’éducation nationale.
A côté des actions de dépistage, rééducation, aide à l’intégration des élèves et des étudiants handicapés ou atteints de maladie chroniques, de soutien et de suivi des jeunes et des familles en difficulté, de prévention des mauvais traitements, il faut développer l’éducation à la santé et l’éducation à la citoyenneté pour rendre les jeunes acteurs et responsables vis-à-vis des autres et vis-à-vis d’eux-mêmes.
Il faut exiger que les services concernés aient les moyens matériels et en personnel pour assurer leurs missions. Cela passe par le recrutement de personnels supplémentaires, un plan de transformation des emplois précaires, le développement de moyens en matériel et en frais de fonctionnement (frais de déplacement), qui sont nécessaires au fonctionnement normal de ces services.
8.2.3 L’intégration des élèves d’origine étrangère ou non francophone
Elle s’inscrit dans une politique globale qui implique un partenariat de l’éducation nationale avec les différents ministères concernés, les associations et les collectivités locales. Il faut offrir à tous les élèves non francophones, un accueil dans des classes prévues à cet effet afin de leur permettre d’acquérir les bases du français. A ceux qui le souhaitent, il faut offrir la possibilité de conserver en dehors du temps scolaire, le contact avec la culture et la langue de leur famille dans le respect de la laïcité. Les conventions bilatérales doivent être renégociées (certains cours de cette nature donnant lieu à des dérapages très éloignés, de la laïcité).
8.2.4 L’intégration des handicapés
Tout enfant ou adolescent, quels que soient son handicap ou ses difficultés a droit à l’éducation et à la formation. Il est de la responsabilité du service public d’éducation de prendre en charge tous les enfants et adolescents. Cette mission s’inscrit dans la logique d’«Eduquer pour vivre ensemble».
L’intégration scolaire et universitaire des jeunes handicapés est une priorité.
Elle constitue la dimension première de l’intégration des personnes handicapées dans notre société. Les structures publiques d’enseignement, d’éducation et de soins des différents départements ministériels concernés doivent y contribuer. Dans cet objectif, les infrastructures doivent être aménagées, une aide personnalisée doit être apportée par la mise à disposition éventuelle d’outils appropriés, voire de tierces personnes. Les personnels de ces structures doivent être préparés par une formation spécifique.
L’intégration peut revêtir des formes multiples. Elle peut être individuelle ou collective, à temps partiel ou à temps plein, dans une classe ordinaire ou dans une classe spécialisée. Intégrer ne consiste pas à faire disparaître toutes les structures spécialisées mais à mettre, au service du jeune handicapé, toutes les synergies, soit à l’intérieur d’une même structure, soit entre des structures différenciées, en particulier par la pratique d’activités communes.
Pour ce faire, il est souhaitable que chaque action d’intégration réponde à une réelle volonté de l’ensemble des acteurs professionnels sur le terrain, avec le souci de demeurer en adéquation avec le projet individuel, défini avec chaque personne.
8.2.5 Une formation globale
L’enseignement français est trop précocement centré sur l’abstrait. Dans le socle de formation initiale, la démarche expérimentale des sciences est négligée. La dimension technique et pratique de la culture est dévalorisée. Le développement des aptitudes esthétiques, sensorielles et physiques de la personne sont réduites à la portion congrue. C’est une infirmité pour tous (à moins de compensations extérieures à l’initiative et aux frais des familles). C’est une source supplémentaire d’inégalités. Il faut, d’urgence, renforcer ces dimensions, au travers de la formation initiale et continue des enseignants. L’appel à des concours extérieurs aux personnels des établissements pouvant être fait à condition que ces intervenants soient qualifiés et qu’ils offrent des garanties établies de laïcité et que cette participation s’inscrive dans le projet d’établissement étable par l’équipe éducative.
8.3 Un service public ouvert
8.3.1 Ouverture sur le monde
Parce que l’école publique a une fonction sociale, elle ne peut pas être un sanctuaire retiré du monde. D’ailleurs, elle est traversée par toutes les évolutions, toutes les contradictions, tous les conflits de la société que les élèves transportent avec eux.
Ayant pour mission de les préparer à s’insérer dans une société en mouvement, elle doit les rendre aptes aux adaptations qu’ils auront à vivre. Elle doit les former à maîtriser les outils de la connaissance de notre temps, les savoirs et savoir-faire les plus actuels. La mutation en cours vers la société de l’information lui lance un défi vital : qu’elle reste en arrière et la Nation s’interrogera sur sa pertinence comme système global de formation. Elle doit organiser les savoirs qu’elle enseigne, surmonter leur hyperdisciplinarité afin de former les jeunes à contextualiser, à inscrire leurs connaissances dans une problématique qui ouvre à la complexité des phénomènes réels. Elle doit structurer les connaissances qu’offrent les ressources extérieures. C’est une manière, en outre, de redonner du sens, pour les élèves, à la « culture scolaire ».
L’ouverture au monde est aussi la circulation dans le monde. La France et son école publique doivent apporter un concours plus décisif aux programmes de l’union européenne pour développer l’enseignement des langues et les échanges entre élèves, étudiants et enseignants afin d’améliorer leur connaissance des différentes cultures européennes. La libre circulation des personnes au sein de l’Europe serait facilitée par la reconnaissance entre les pays des équivalences des qualifications et des diplômes. Ce dossier évolue trop lentement.
8.3.2 L’école et ses partenaires
Au cœur du processus éducatif, l’école publique n’en a pas l’exclusivité. Elle a besoin de partenaires. Les parents d’abord. Mais aussi tous ceux qui concourent à l’éducation (professionnels des autres administrations et de la Fonction publique territoriale, associations périscolaires, collectivités territoriales, branches professionnelles). Ces partenaires doivent travailler en cohérence pour prendre en charge efficacement la globalité du jeune. Cette cohérence passe par des conventions, des cahiers des charges, qui s’organisent autour de projets d’école et d’établissements afin que soient garanties la laïcité et la finalité citoyenne du service public d’éducation. De tels projets impliquent le travail en équipes éducatives associant tous les personnels.
Ces concours multiples doivent contribuer à ce que l’élève soit l’acteur de sa formation et de son orientation. Celui-ci doit être le pivot autour duquel l’éducation s’organise.
8.3.3 Encourager la mise en réseau
Chaque établissement est singulier. Pour autant il ne saurait devenir un isolat car il participe d’un ensemble qui lui donne son sens : le service public national. Il faut encourager le fonctionnement en réseau par convention entre établissements ou services. Mutualisation des moyens, complémentarité, décloisonnement donnent de la souplesse. Le service public gagne en efficacité. Cela ne peut fonctionner que si les personnels conservent toutes leurs garanties statutaires et gagent en capacité d’initiative.
8.3.4 Le rôle de l’enseignement à distance
Les établissements peuvent s’épauler l’un l’autre ; l’enseignement à distance peut y pourvoir aussi. Les innovations technologiques en démultiplient les performances. Il est particulièrement adapté à des publics adultes, isolés, aux horaires irréguliers.
Pour les élèves des familles le plus aisées, il est déjà utilisé comme un complément de formation initiale. Par souci de justice et d’efficacité, l’enseignement « présentiel », indispensable à l’appropriation initiale du savoir, doit s’interroger sur les capacité supplémentaires (et non de substitution) que peut lui apporter l’enseignement à distance. Les enseignements à distance supérieurs sont déjà engagés dans ce mouvement. Mais cette collaboration nécessite que l’enseignement à distance se garde d’une logique de marché.
8.4 Un service public organisant la continuité éducative
8.4.1 Rythmes de vie
Pour que les jeunes tirent le meilleur profit de l’enseignement de la formation et de l’éducation qu’on leur propose, ceux-ci doivent prendre en considération leurs rythmes de vie et de développement dans l’articulation des temps scolaire et périscolaires et dans l’organisation des cursus scolaires.
Il faut traiter globalement la question de la journée, de la semaine et de l’année scolaire : alléger la journée, trop lourde pour tous ; aménager la journée et la semaine en conciliant les nécessités biologiques des jeunes, les aspirations des familles et les contraintes sociales (les besoins du jeune sont la préoccupation principale) ; restructurer l’année scolaire pour rééquilibrer temps de travail et temps de repos en fonction des connaissances scientifiques.
Pour chacun de ces aspects, l’Etat doit s’engager à ce que les temps libérés offrent à tous des activités proposées et apporter les compensations financières nécessaires pour que les inégalités des ressources de collectivités territoriales n’introduisent pas des inégalités dans le système éducatif. C’est pourquoi ces aménagements de rythmes de vie des jeunes feront partie du projet éducatif de l’établissement, en liaison avec les autres partenaires concernés (parents, collectivités locales, responsables et animateurs des mouvements associatifs, culturels et sportifs). Aménager les rythmes scolaires sans aménager les rythmes péri et extrascolaires accentuerait les différences et les inégalités entre les jeunes et casserait la nécessaire continuité éducative.
La dissociation ouverte par les initiatives du ministre de la jeunesse et des sports entre « disciplines fondamentales à finalité d’apprentissage » et « activités sportives et artistiques » est inacceptable.
Toutes les expériences actuellement en cours doivent être vraiment évaluées, dans tous leurs aspects, y compris financier, avant de proposer des harmonisations fonctionnelles au niveau d’une commune ou d’un secteur.
8.4.2 Rythmes de développement
Au cours de son développement intellectuel, psychologie et physiologique, le jeune devra passer d’une structure à une autre. Nous demandons que ces passages soient aménagés au mieux de ses intérêts.
Il faut que cessent les ruptures brutales entre les différents niveaux scolaires, ruptures fondées uniquement sur la quantité de savoirs disciplinaires oubliant totalement que les jeunes acquièrent aussi des savoir-faire et des savoir-être. Le rythme d’acquisition des connaissances, comme le degré de maturité des jeunes étant variables pour chacun, nous refusons l’évaluation annuelle et uniforme des progressions individuelles, accompagné du redoublement-sanction. Il faut fixer des objectifs et des évaluations par cycle et améliorer la continuité éducative.
Mettre le jeune au cœur du système éducatif comme nous le revendiquons, c’est respecter sa progression sans lui imposer des à-coups pour se confronter à des structures imaginées idéales. Dans cette perspective, nous jugeons nécessaire, pour assurer la continuité éducative, la mise en œuvre concrète des cycles (objectifs, évaluation) à l’école, au collège, au lycée et dans l’enseignement supérieur. Il faut que les cycles dans le second degré et le supérieur ne soient plus étanches.
Mais réaliser la continuité éducative et la progressivité des apprentissages exige qu’on prenne en compte les réalités du système éducatif et qu’on favorise les capacités d’initiative des équipes pédagogiques.
Davantage de temps dégagé pour la concertation, une plus grande liberté laissée aux enseignants pour faire des choix et fixer des étapes, une formation appropriée à ces tâches, des outils pédagogiques plus nombreux, des contenus appropriés sont nécessaires pour faciliter l’adaptation des réponses à la variété des rythmes d’acquisition des jeunes. La mise en place difficile des cycles à l’école primaire est l’illustration de ces besoins.
A l’école, au collège, au lycée, à l’université, les cycles doivent être déterminés en fonction d’objectifs qui prennent en compte les niveaux de connaissances disciplinaires et les aptitudes physiques – psychologiques – sociologiques créatives, … Les contenus ne peuvent être conçus en dehors de ces objectifs intermédiaires et terminaux.
Ce sont les jeunes qui subissent directement l’incapacité de l’éducation nationale à gérer les transitions d’une structure à une autre. La multiplicité des passerelles doit rendre possibles et effectives les réorientations. A l’université, le maintien du passage d’un cycle à l’autre après la validation de 80 % des enseignements requis ne doit pas être systématiquement remise en cause, il évite aux étudiants des redoublements inutiles. Cette formule pourrait être envisagée dans le second degré.
8.4.3 Orientation
Une véritable orientation des élèves et des étudiants n’est pas possible dans l’organisation rigide du système actuel. C’est pourquoi elle n’est que parcellaire et marginale et se borne le plus souvent à une sélection par l’échec. Avec les assouplissements que nous demandons, elle pourrait devenir un élément structurant des apprentissages, de leur progression et de leur individualisation : orientation scolaire d’abord puis professionnelle à mesure que l’élève s’achemine vers la préparation plus précise de son insertion dans la vie active (pour certains, dès après 16 ans, pour d’autres au niveau de l‘enseignement supérieur).
Cette orientation doit être le fait de l’élève lui-même sur la base d’une information et d’une évaluation régulière de ses performances, à laquelle il est associé, assortie de remédiations appropriées. On doit lui donner la capacité de circuler, en terrain connu, dans sa scolarité puis dans l’univers professionnel. Une telle orientation prend du temps. C’est un acte pédagogique essentiel auquel doivent concourir conjointement les professeurs, les conseillers d’orientation – psychologues, les familles et les milieux professionnels. Une attention toute particulière doit être portée à l’orientation des filles.
8.4.4 L’éducation tout au long de la vie
L’éducation tout au long de la vie, nécessité de notre monde en évolution de plus en plus rapide, implique que soient articulées formation initiale et formation continue, la première constituant le socle de la seconde.
Les certifications (diplômes ou qualifications) de formation initiale doivent être construites pour pouvoir être complétées par celles acquises en formation continue. Les acquis scolaires et les acquis professionnels doivent pouvoir se compléter. Les formateurs doivent pouvoir circuler d’une formation à l’autre.
Les textes instaurant la formation continue doivent être complétés pour ouvrir ce droit à tous et ne pas le réduire à sa composante professionnelle mais l’étendre à la formation culturelle. En conséquence, l’Etat doit relancer sa participation à l’éducation permanente qui est devenue une mission normale du service public d’éducation, reconnue par la loi d’orientation de 1989.
Les établissements publics d’éducation (GRETA, universités, lycées et centres de formation permanente agricole) prennent une part majeure à la formation continue. L’Etat, par ses initiatives et des financements adaptés en leur direction doit leur permettre d’accentuer leur action contre l’illettrisme et l’exclusion, pour la promotion sociale. En effet, il n’y a pas de développement culturel, de réduction des inégalités sociales, de possibilité d’insertion dans la vie professionnelle et sociale sans priorité accordé à la lutte contre l’illettrisme.
8.5 Mettre l’enseignement supérieur à l’heure de l’enseignement de masse
Les enseignements supérieurs se trouvent à un tournant décisif de leur développement. Leur démocratisation doit être poursuivie afin que tous les jeunes bacheliers qui le désirent accèdent à une formation diplômante de qualité.
Les structures actuelles peuvent permettre la réussite des étudiants sous réserve d’une orientation progressive et d’un meilleur accueil. A la fin de chaque cycle, l’étudiant doit pouvoir s’orienter vers une formation complémentaire lui permettant soit un approfondissement de ses connaissances, soit l’acquisition de compétences professionnelles. Cet aménagement de parcours diversifiés doit faciliter les passages des études courtes aux études longues, des filières générales aux filières technologiques et professionnelles.
La qualité de l’enseignement supérieur dépend de son étroite interaction avec les activités de recherche et la formation par la recherche à tous les niveaux. Tout aménagement du fonctionnement pédagogique et institutionnel des Universités et des Ecoles, toute implantation universitaire doivent prendre en compte l’importance de la recherche universitaire pour un enseignement efficace du point de vue de la formation et des débouchés.
L’égalité des chances dans l’enseignement supérieur doit être garantie par des aides financières adaptées à la situation réelle de l’étudiant et à sa nécessaire autonomie par rapport à son milieu familial. Des services sociaux et médicaux universitaires doivent être installés au plus près des lieux de vie et de travail des étudiants. Quel que soit le site, ceux-ci doivent trouver les équipements scientifiques, les centres documentaires et les bibliothèques indispensables à la qualité de leur formation.
8.6 Le rôle du service public dans la formation et l’insertion professionnelles
« La Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’Etat. Chacun a le droit d’obtenir un emploi ». C’est une garantie constitutionnelle.
Dans le cadre de l’Education permanente, la formation professionnelle initiale et continue est une des missions essentielles de l’Etat. Elle ne peut être valablement assumée que par un développement des enseignements professionnel et technologique du service public d’éducation et le renforcement de son action en direction des adultes et des jeunes en recherche d’insertion professionnelle. Nous dénonçons fortement la campagne d’intoxication qui consiste à faire croire que la formation professionnelle en alternance sous contrat de travail et particulièrement l’apprentissage, est l’unique solution à l’emploi des jeunes.
L’évolution des sciences et des techniques, la mutation des métiers, la transformation de l’organisation du travail, nécessitent de la part des salariés une capacité d’adaptation permanente. La formation initiale ne peut à elle seule satisfaire cette exigence. Elle doit être le socle permettant l’accès à l’éducation et à la qualification tout au long de la vie, par la formation continue.
8.6.1 Le partenariat pour développer l’action du service public
La formation professionnelle est liée à l’évolution des qualifications et des emplois. Mais la relation éducation-économie est au cœur des incertitudes et des complexités qui rendent utopique toute adéquation parfaire entre les flux de formés et les besoins des entreprises.
A condition qu’il respecte le rôle et les prérogatives de chacun des acteurs et qu’il favorise les concertations nécessaires, le partenariat entre le service public d’éducation et les professions doit permettre de concilier au mieux cette contradiction.
Ce partenariat doit permettre notamment d’adapter les contenus de formation aux besoins de qualification, d’améliorer la connaissance des métiers au moment de l’orientation des jeunes, de développer l’alternance sous statut scolaire, de diversifier les modes de validation et de certification des connaissances.
La loi du 20 décembre 1993 confie aux conseils régionaux de nouvelles compétences en matière de formation professionnelle des jeunes. Nous ne contestions pas la pertinence de l’espace régional pour construire une offre de formation lisible et cohérente, à condition qu’elle soit de qualité et élaborée dans un partenariat effectif États-régions-partenaires sociaux. La planification régionale doit favoriser et non entraver l’action du serve public d’éducation en direction des jeunes et des adultes. Celui-ci doit être associé aux décisions et non seulement prestataire de service. Les plans régionaux de développement de la formation professionnelle des jeunes (PRDF) doivent prendre en compte tous ces paramètres. Les représentants de l’UNSA et de la FEN doivent être étroitement associés à leur élaboration. Les PRDF doivent être actualisés et soumis dans les meilleurs délais aux instances compétentes comme le prévoit la loi. Au niveau national l’Etat doit assumer l’évaluation et la régulation des politiques de formation décentralisées. Il est le garant de l’égalité d’accès de tous les publics à la formation sur tout le territoire.
8.6.2 L’alternance sous statut scolaire pour favoriser la formation et l’insertion
La formation professionnelle initiale doit délirer des savoir-faire et des savoirs pour permettre les futures adaptations. Elle ne peut être déconnectée des conditions réelles de l’exercice des métiers, sans risque pour la qualification et l’insertion. Ni le service public d’éducation, ni les branches professionnelles ne peuvent aujourd’hui donner isolément une formation professionnelle reconnue. Outil pour faciliter l’accès à la qualification et non concept idéologique, l’alternance École-entreprise doit être favorisée. Elle doit s’articuler autour d’une véritable cohérence pédagogique entre les deux sites de formation et non une simple juxtaposition comme dans les formations sous contrat de travail. Le service public d’éducation démontre chaque jour sa capacité à travailler dans ce sens.
Sur la base des périodes de formation mises en œuvre pour les baccalauréats professionnels, l’alternance sous statut scolaire doit s’étendre réellement à toutes les formations professionnelles et technologiques. La loi d’orientation du 10 juillet 1989 en fait une obligation.
Les entreprises doivent être aidées financièrement pour accueillir les jeunes sous statut scolaire au même titre que les formations sous contrat de travail. Une meilleure cohérence ente l’ensemble des dispositifs de formation en alternance doit être recherchée. Pour éviter que le choix des jeunes entre les différentes formations alternées soit dicté par des motifs pécuniaires, un statut social et économique du jeune en formation doit être défini.
Le rôle des diplômes professionnels et technologiques est irremplaçable pour garantir une insertion professionnelle durable.
8.6.3 Une réponse cohérente aux besoins de qualification : le lycée polytechnique
La diversité des parcours de formation professionnelle s’accroît. Le service public d’éducation doit proposer aux jeunes et aux adultes l’ensemble de ces parcours pour faciliter leur accès à la qualification et à l’insertion professionnelles.
Construit à partir de lycée polytechnique doit offrir aux jeunes l’ensemble des niveaux de qualification (V à III), associer les formations sous statut scolaire et celles sous contrat de travail et favoriser l’articulation entre la formation initiale et la formation continue. Le fonctionnement de ces établissements sera organisé pour favoriser le partenariat éducation-profession, particulièrement dans le cadre du conseil d’administration.
L’apprentissage apporte traditionnellement des réponses à des jeunes qui rencontrent des difficultés scolaires. Il peut être un outil de diversification des modes d’accès à la qualification sous condition d’une amélioration de la qualité de la formation, d’un renforcement du droit des apprentis et d’une réalité de leur insertion dans l’emploi.
Afin d’éviter une concurrence réductrice, le service public d’éducation doit assurer la complémentarité entre l’alternance sous statut scolaire et l’apprentissage. Cela dans le cadre d’un développement global des différentes voies de formation professionnelle.
8.6.4 La formation professionnelle tout au long de la vie
L’éducation tout au long de la vie a une dimension globale. Elle participe au développement personnel sous toutes ses formes. L’Etat doit y concourir. Il doit garantir à tous l’égalité d’accès à la formation professionnelle tout au long de la vie. Celle–ci est une composante de l’éducation permanente. Pour cela la mission d’éducation permanente du service public doit être renforcée.
Le service public doit disposer des moyens nécessaires pour un exercice effectif de l’ensemble de ses missions. En ce qui concerne la formation continue il faut qu’au-delà de la participation légale des employeurs à son financement, l’Etat et les collectivités territoriales assument leurs responsabilités en terme de locaux, de moyens et d’organisation.
Dans le cadre de l’Education permanente, le service public, par son réseau d’établissements, apporte une réponse éducative et formatrice globale qui participe au développement économique et social des territoires. Pour cela, les recteurs ont à mettre en œuvre une politique concertée qui articule formation initiale et formation continue. L’action des groupements d’établissements (GRETA) doit s’intégrer dans cette politique académique d’une façon lisible par tous les acteurs et favoriser la mutualisation des ressources financières et humaines, permettant d’assurer sur l’ensemble du territoire l’accès à la formation pour tous.
Sans remettre en cause l’action de proximité des GRETA, leur structure doit évoluer pour favoriser la mutualisation de la gestion administrative et financière au sein du réseau académique et au niveau le plus pertinent.
Les actions de formation continue des établissements secondaires, supérieurs, agricoles, doivent être coordonnés et complémentaires. Dans le second degré, les lycées polytechniques associeront plus harmonieusement les formations initiales, les dispositifs d’insertion postscolaire et la formation initiale-formation continue doit créer des synergies en matière de pratique pédagogique, de mode d’évaluation et de validation des acquis.
Les personnels du service public d’éducation doivent être formés à l’intervention devant des publics jeunes et adultes. Au-delà de service mixte (formation initiale-formation continue), les fonctions spécifiques à la formation continue doivent être identifiées par des postes à contraintes particulières et/ou des postes gagés. La professionnalité et les charges particulières qu’impliquent ces fonctions spécifiques pour les personnels qui les exercent doivent être reconnue concrètement.
8.7 Former et soutenir les personnels
8.7.1 Tirer les conséquences de l’unité professionnelle des enseignants
Face aux défis que représente pour l’ensemble du système éducatif la prise en compte de tous les élèves dans leur diversité et depuis que nous avons conquis l’égalité professionnelle entre tous les enseignants des écoles, des collèges et des lycées (à l’exception des agrégés), nous parvenons plus facilement à faire admettre qu’enseigner est un métier avec ses techniques, ses pratiques auxquelles on doit être formé.
Les Instituts Universitaires de Formation des Maîtres ne sont plus menacés dans leur existence mais leur identité, leur rôle et les moyens qui leur sont dévolus doivent être renforcés. En particulier, la part consacrée à la formation professionnelle y demeure insuffisante. L’actuelle place des concours, située en milieu de formation, génère trop d’iniquités entre les candidats et ne laisse pas assez de temps pour préparer les futurs enseignants aux situations auxquelles ils vont devoir faire face et aux diversifications pédagogiques qu’ils devront mettre en œuvre. Les IUFM doivent en outre participer activement à la formation continue des enseignants du premier et du second degré et développer la recherche en éducation.
8.7.2 Former à travailler autrement et en équipe
Ce qui se passe dans les établissements sensibles qui doivent affronter de grosses difficultés montre que l’efficacité éducative passe par la cohérence des intervenants travaillant en équipe. Il faut donc, dès la formation initiale, préparer toutes les catégories de personnels (enseignants et ATOSS) à l’esprit et aux méthodes du travail collectif, condition non suffisante mais nécessaire à l’existence d’une équipe. Ceux qui sont actuellement en exercice doivent pouvoir bénéficier d’un temps de formation continue pour cela. Des remplacements doivent être prévus, afin d’assurer la continuité du service public.
8.7.3 Soutien des personnels face à la violence
L’ensemble des personnels des établissements doit être formé et soutenu afin de prévenir et de pouvoir faire face aux conduites violentes. Pour cela, au-delà des dispositifs de prévention, des connaissances spécifiques sur la psychologie de l’enfant et la psychologie de l’adolescent, sur le travail en équipe doivent être introduites dans les formations initiales et continues. Des structures de soutien aux personnels en difficulté doivent être mises en place en collaboration des psychologues de l’Education Nationale et en liaison avec les services de proximité. Un suivi psychologique doit être proposé aux victimes de comportements agressifs à l’intérieur ou à l’extérieur de ces structures.
8.8 L’évaluation : indispensable instrument de régulation
L’équipe ne peut se constituer qu’autour d’un projet visant des objectifs précisément déterminés. Ce projet doit être régulièrement évalué et ajusté pour corriger les dérives inévitables de l’action au jour le jour. Cette régulation est nécessaire pour ne pas agir en aveugle. Elle doit être le fait de membres de l’équipe avec le concours de personnes extérieures au projet.
Indispensable pour une équipe, un établissement ou un service l’évaluation l’est tout autant à tous les niveaux d’initiative de l’éducation nationale. Cela suppose qu’à chacun de ces niveaux des objectifs soient clairement définis et, pour ce qui concerne l’Etat qu’il dise enfin clairement ce qu’il attend véritablement de l’Ecole publique, quelle fonction réelle il lui assigne.
A tous les niveaux, cette évaluation doit être transparente aux usagers (bénéficiaires) et aux pouvoirs publics (financeurs). Ils doivent y être associés. Une vigilance particulière doit être accordée à l’évaluation dans le secteur privé.
8.9 Les financements de l’éducation
Il est légitime de rendre compte de l’usage et de l’efficacité de l’investissement que fait la collectivité nationale dans l’éducation.
Selon la comptabilité nationale, en 1994, la dépense intérieure d’éducation (toutes catégories de dépenses de toutes formes d’éducation regroupées) représentait 7,3 % du PIB (9 300 F par habitant). Le « coût de l’élève » va croissant de l’école au lycée. Si la France se situe dans une position moyenne pour les dépenses d’éducation au niveau scolaire, la part qu’elle consacre, par étudiant, est plus faible que dans la plupart des pays comparables. Cela situe la France dans une position moyenne par rapport aux pays de l’OCDE. L’Etat y participe pour 65 % mais la part que reçoit le service public n’est pas transparente. Les collectivités territoriales concourent pour 20 %, les ménages pour 7 %, les entreprises pour 5 % (y compris la formation continue). Le budget de l’Education nationale, composante de cette dépense, représente 4 % du PIB.
8.9.1 Le financement du service public d’éducation nationale
Non seulement le financement public ne va pas qu’au service public d’éducation nationale mais encore la part que celui-ci reçoit n’est pas transparente. On peut estimer à 13 ou 14 % la part du budget de l’Etat attribuée au fonctionnement de l’enseignement privé sous contrat. Ce que lui attribuent en outre les collectivités territoriales, en crédits de fonctionnement et crédits d’équipement est plus difficile à mesurer et à totaliser. Cette opacité entrevue favorise l’enseignement privé.
Sur l’ensemble des premier et second degrés, la dépense que l’Etat (essentiellement le ministère de l’éducation nationale) consent, en moyenne, pour un élève varie d’un tiers entre régions extrêmes. Ces disparités, à quoi s’ajoutent les contributions variables des collectivités territoriales, s’expliquent en partie pour la diversité des tissus scolaires, des environnements sociaux, des attributions de bourses… Elles nécessitent une évaluation et une régulation au titre de l’aménagement du territoire.
8.9.2 Financement de la formation professionnelle
Le budget de l’Etat est assez bien connu et contrôlé. Mais la maîtrise des financements secteur par secteur reste opaque.
Ainsi, le financement de la formation professionnelle est complexe et peu lisible. La pluralité des tutelles et la diversité des financeurs (Etat – collectivités décentralisées – entreprises – organismes collecteurs) ne permettent pas toujours de distinguer la finalité des financements. Une clarification est nécessaire dans les circuits de financement et le contrôle de l’utilisation des fonds doit être renforcé.
La décentralisation et le rôle croissant des entreprises ne doivent pas transformer la formation professionnelle des jeunes en marché ouvert aux offreurs de formation professionnelle des jeunes en marché ouvert aux offreurs de formation. Pour cela l’Etat doit assurer pleinement son rôle en dotant le service public d’éducation des moyens nécessaires au développement des enseignements professionnels et technologiques, seuls garants de l’égalité d’accès de tous les jeunes à une formation de qualité et reconnue.
Ressource non négligeable pour les établissements d’enseignement public, la taxe d’apprentissage tend à se réduire. La réforme du financement de l’apprentissage ne fait qu’accroître cette situation. Assis sur la masse salariale, le montant de la taxe d’apprentissage (0,5 %) doit être relevé et une partie significative réservée au financement des formations du service public d’éducation. La FEN revendique une réforme des mécanismes de la taxe d’apprentissage qui favorise la clarté dans la collecte et l’équité dans la répartition. Au niveau régional, les pouvoirs publics doivent assurer la transparence sur l’utilisation de la taxe et plus largement sur les fonds de la formation professionnelle.
L’activité de formation continue du service public d’éducation s’opère sur un marché concurrentiel. Pour que la mission de service public soit possible, notamment en direction des populations les plus défavorisées, l’Etat doit conserver ses prérogatives de prescripteur et de financeur et doit recourir en priorité à ses propres dispositifs et organismes de formation. La transformation et le développement de l’action du service public d’éducation ne peuvent s’inscrire que dans la durée, d’où la nécessité d’une loi de programmation ambitieuse et respectée pour l’éducation et la formation.
8.9.3 Rationaliser
A cette compétition pour des « parts de marché » de la formation professionnelle, s’ajoute la concurrence de réseaux scolaires privés sous contrat, encouragée et entretenue par la puissance publique. Ces concurrences engendrent des gaspillages. L’effort de la collectivité nationale pour l’éducation est important (7 3 % du PIB) et pourtant il faudra le renforcer pour améliorer l’efficacité de l’éducation au bénéfice de tous et instaurer l’éducation tout au long de la vie. L’Ecole publique et l’éducation doivent bénéficier d’une réelle priorité budgétaire. On ne pourra indéfiniment accroître le budget de l’Education nationale. Il faut donc rationaliser les dépenses en supprimant les gaspillages dus aux concurrences en imaginant des synergies de financements et des partenariats. L’Etat, principal financeur, et de loin, doit garder la haute main sur le système et garantir la dimension du service public de l’Education qui ne doit pas devenir une marchandise.
Intervention de clôture du congrès de Rennes 1997 - 14 mars 1997
Jean-Paul Roux
Nous allons avancer.
L’histoire ne connaît pas la marche arrière.
Changer ! Avancer ! Construire !
Nous avons un projet, bâti pas à pas. Il faut aujourd’hui le porter. Porter un projet c’est agir sur le terrain pour le faire avancer.
Si l’école va mal, c’est parce qu’elle s’use de tant d’immobilisme, de tant de régression.
Elle fonctionne plutôt mieux pour le plus grand nombre. Le niveau monte. Et en même temps, le nombre de jeunes en voie de marginalisation augmente.
Aujourd’hui, une grande majorité des jeunes arrivent à l’Université et pourtant il y en a toujours autant qui sortent sans qualification.
Face à cette dérive, Monsieur Bayrou parie, il discourt pour éviter d’agir, il discourt et les postes tombent.
Monsieur Arthuis pendant ce temps poursuit ses comptes boutiquiers.
L’économisme est roi, la Bourse danse au Palais Brognart et les jeunes explosent dans les banlieues.
Ils explosent de misère, de chômage, de désœuvrement d’un avenir aveugle.
Suis-je pessimiste ?
Non, cette réalité nous la voyons tous les jours en Seine-St-Denis, aux « Minguettes » ou au « Val-Fourré », je la vois à Toulon, aux « Œillets », à la « Grande Plaine » ou au « Jonquet ».
Ainsi, entre ces deux France, notre société se fracture, s’écartèle, elle n’a plus de repères, elle s’enferme dans le chacun pour soi ou dans les communautarismes. Où est cette nation dont nous aimons les valeurs, dont celle première de laïcité, et qui nous rassemblait tous parce qu’elle s’incarnait dans la République ?
Pendant ce temps, Le Pen tricote de Toulon à Orange, de Marignane à Vitrolle, il trace son petit bonhomme de chemin et un gouvernement tétanisé cherche désespérément à lui donner des gages.
Ainsi, lorsqu’on s’attaque aux immigrés ! En jetant un os à Le Pen, ils croient ainsi le rassasier. Pauvres innocents qui ne font que le mettre en appétit !
Au prétexte de traquer l’immigration irrégulière, on voudrait soumettre au régime de la suspicion illégitime des millions d’étrangers qui n’aspirent, par profession ou par passion, qu’à venir dans ce qui fut une patrie des Droits de l’Homme et finira si nous n’y mettons pas le holà, recroquevillée derrière d’illusoires frontières. Un pays qui se ferme est toujours un pays qui meurt.
Que les Partis Républicains réhabilitent d’abord le débat politique contradictoire, conflictuel, qu’ils proposent aux citoyens des choix clairs, des alternatives crédibles, des alternances possibles, qu’ils réhabilitent la fonction du politique dans sa dignité, dans sa noblesse, dans sa probité.
Que le syndicalisme cesse de se réfugier dans les délices de la division, qu’il cesse de faire du « tous ensemble » le cache sexe de ces divisions, de ses contradictions et qu’ils proposent des choix syndicaux clairs.
Alors certains de nos compatriotes cesseront de chercher une solution à leurs problèmes dans cet « autre choix » que leur propose le Front National et abandonneront Le Pen à ses fantasmes nauséabonds.
La FEN agit avec sa centrale l’UNSA. Le 1er mai à Paris et peut-être ailleurs en France car le mouvement doit s’étendre à notre initiative, il doit prendre de l’ampleur…
C’est notre façon à nous de développer cette solidarité inter professionnelle qui est fondamentale à notre orientation…
Cette initiative sur Paris émane du syndicalisme responsable UNSA, FO, CFDT. Voilà le bon chemin. Elle est en phase avec l’appel à l’unité qui part de ce congrès.
Sur le terrain, agissons, coopérons, travaillons ensemble alors, loin des démarches d’appareils, les salariés retrouveront le goût du syndicalisme et l’espoir de l’action.
Ce pays a besoin d’un pôle syndical fort, responsable, porteur des valeurs de la République, et, sur ces bases, ouvert à tous. Dans l’UNSA nous voulons prendre ce chemin.
Alain, ton organisation aujourd’hui te lance cet appel.
Notre ambition pour l’UNSA, tu la portes, tu as la confiance de ton organisation, l’accueil que t’a fait le congrès lundi, la confiance massive que tu as recueillie dans ton élection sont autant de points d’appui.
Pour avancer, tu auras le secrétaire général de ta fédération à tes côtés. Face aux drames du monde, à la désespérance qui s’empare de notre pays, notre devoir de syndicaliste est de témoigner et d’agir.
Dans un monde où il n’y a plus de certitude, il faut avoir des convictions.
Notre congrès témoigne ! Il est aux côtés des peuples qui luttent pour la liberté, et la démocratie, en Iran, en Algérie, en Bosnie, aujourd’hui en Albanie et hélas ailleurs. Dans cette lutte des éducateurs sont toujours en première ligne, les cibles de la première balle, les déportés des premiers camps.
Car éducation et culture sont par essence porteuses de liberté. Gérard Paquet l’a dit. L’accueil du congrès a été une réponse forte à son appel. Et aussi un engagement à agir.
Agir dans notre métier d’éducateur, porteur des valeurs républicaines.
Nous serons donc à Toulon le 22 mars pour mettre en œuvre ensemble, une initiative d’’Hervé Baro « les éducateurs face à la monté de l’extrême droite ». Merci Hervé d’avoir pris cette initiative, dans ma ville, de ma permettre de porter avec toi ce bon combat.
Agir dans notre engagement de syndicalistes.
Nous serons à Strasbourg le 29 mars avec nos camarades de la FEN du Bas-Rhin, pour dénoncer ce congrès de l’ignominie qu’est le congrès du Front National.
Notre congrès a agi - hier – ensemble dans les rue de Rennes et le 23 mars – demain – à Paris avec nos collègues par milliers et milliers. Pour l’emploi des jeunes, ce devoir sacré de la Nation, pour la transformation du système éducatif et les moyens de cette transformation.
Nous allons dire, en mots simples et forts, ce qui nous paraît juste, et appeler les collègues à partager cet engagement c’est celui de la dignité de nos métiers, de la responsabilité citoyenne et plus simplement l’intérêt de l’école, des jeunes qui nous sont confiés, donc l’intérêt de l’ensemble des personnels du système éducatif.
Nous allons nous battre, sur le terrain, porter notre projet.
La reconquête commence.
En avril, nos syndicats affrontent les élections professionnelles.
Toute la FEN est mobilisée.
Administration et Intendance, SNIES, SNMSU portent le 3 avril les couleurs de la FEN de cette tribune. J’appelle tous mes collègues agents administratifs, adjoints administratifs, infirmières et infirmiers, médecins à voter pour les syndicats de la FEN, le SNAPS et le SEP seront aussi aux urnes. J’appelle tous nos collègues de la jeunesse et des sports à voter pour les syndicats de la FEN.
Un congrès c’est une vitrine.
Vous avez dit vos doutes, vos craintes, vos inquiétudes, vous avez fait entendre vos critiques.
C’est bien, car à partir de la critique, on construit.
Vous avez dit aussi vos espoirs, votre volonté, vos exigences et vous avez construit, pas à pas un projet, celui qui émerge de ce congrès.
Ce message est une dynamique, ne la laissons pas retomber.
Elle doit demain, partout dans les syndicats, dans les sections servir de moteur à notre action syndicale.
Le message est clair, sans le syndicat nul ne peut avancer. Sans la responsabilité, nul ne peut construire.
Notre syndicalisme est proposition, il est action.
Notre syndicalisme est un optimisme.
Au 23 mars à Paris.