Le phénomène de non-recours aux systèmes de solidarité (minima sociaux, aides sociales diverses) n’est pas une spécificité française. Il s’observe également dans d’autres pays d’Europe qui disposent d’un système de solidarité répondant aux mêmes principes de solidarité, même si les modalités peuvent être différentes.
Si le non-recours reste difficile à quantifier dans chaque pays, certaines méthodes d’évaluation peuvent converger, note la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) dans une étude sur le non-recours aux minima sociaux parue le 15 mars 2022.
Une notion commune mais avec des systèmes de protection spécifiques
Revenu d’intégration sociale, allocation sociale de base, Income-based Jobseeker’s Allowance… ces termes désignent les minima sociaux propres aux cinq pays observés dans l’étude de la Drees avec le concours de l'Observatoire des non-recours aux droits et services (Odenore).
L’étude précise les trois types de données sur lesquelles repose l’estimation du non-recours :
- des données d’enquêtes spécifiques et ponctuelles (complexes et coûteuses à mettre en œuvre) ;
- des données d’enquête en population générale sur les revenus et conditions de vie (données les plus répandues dans les cinq pays) ;
- des données issues d’appariements de bases de données administratives (uniquement aux Pays-Bas).
Chaque pays appliquant, pour l’accès aux revenus de solidarité, des critères d’éligibilité spécifiques, l’estimation du non-recours n’est pas nécessairement comparable, signale l'étude. Par ailleurs, ces observations ne sont pas portées avec la même attention, ni la même urgence dans chacun des pays. Cependant, des problématiques communes ont émergé lors des débats sur la réforme des systèmes de protection sociale :
- simplification de l’accès aux prestations de solidarité ;
- dématérialisation des démarches administratives ;
- amélioration de la lisibilité du système de protection sociale (notamment avec la fusion des prestations).
Le constat d'un phénomène d'ampleur
Pour faciliter la comparaison entre les différents systèmes statistiques, l’estimation du non-recours a été cadrée essentiellement dans le champ de la pauvreté (accès au revenu minimum de solidarité).
Les études menées montrent un phénomène à la fois d’ampleur et durable dans les cinq pays, bien qu'il ne soit pas traité au même plan et suscite des réactions diverses selon les pays. Si les méthodes statistiques diffèrent et s'il est important de préciser les méthodologies adoptées, elles donnent un ordre de grandeur du non-recours à même d’orienter des politiques publiques.
Au-delà du recueil des statistiques par pays et par types de non-recours, l'étude préconise certaines mesures afin d’améliorer l’exercice de comparaison :
- élargir le champ d’investigation des estimations du non-recours (montants non dépensés, non-recours cumulatifs, profil des personnes concernées, causes…) ;
- développer des approches territoriales et locales ;
- intégrer d’autres acteurs dans la production de données (par exemple les associations) ;
- développer quantitativement et qualitativement les approches économiques et sociologiques pour mieux déterminer les causes du non-recours.