Croissance peu dynamique, endettement record, inflation… La France est sous pression depuis la sortie de la crise Covid et le pouvoir d'achat s'érode. Cette analyse est-elle robuste à plus long terme ? On peut constater que, depuis 1999, la France a vu son pouvoir d'achat par habitant augmenter en moyenne de 26%, contre 17% seulement dans la zone euro. Dans une tribune publiée le 29 juillet 2024, Agnès Bénassy-Quéré, seconde sous-gouverneure de la Banque de France, tente de faire le lien entre cette performance et l'action de la Banque centrale européenne (BCE).
La politique monétaire commune, un véritable défi
La BCE est chargée de la définition et de la conduite de la politique monétaire commune de la zone euro. Son objectif est la stabilité des prix, définie sous la forme d'un objectif d'inflation (2%). Pour l'atteindre, elle fait varier les trois taux d'intérêt à sa disposition.
La difficulté de la BCE est qu'elle doit fixer une seule politique pour l'ensemble de la zone euro. Les pays membres ont pourtant des économies très hétérogènes (degré d'ouverture, niveau d'industrialisation, phase du cycle économique...), les politiques fiscales et budgétaires relèvent de la souveraineté des États. Le seul cadre commun est donné par le traité de Maastricht et le Pacte de stabilité et de croissance. Augmenter (ou baisser) les taux directeurs peut ainsi être adapté pour certains pays, et moins pour d'autres. L'action sur les taux pour lutter contre l'inflation, la déflation ou pour relancer l'économie doit également composer avec les politiques fiscales et budgétaires qui poursuivent parfois d'autres objectifs au plan national.
Une politique monétaire bien calibrée pour les pays médians de la zone euro
La politique monétaire unique de la BCE, décidée au sein du conseil des gouverneurs, est conçue en fonction des "besoins agrégés" de la zone euro. L'économie française a la particularité de ressembler beaucoup à celle de la zone euro dans son ensemble, aussi bien en matière d'inflation que de cycle économique. La politique de la BCE a donc toutes les chances de convenir à l'économie française.
L'euro est "plus crédible, plus solide, plus reconnu internationalement" que le franc. Mais même si la monnaie unique ne peut être tenue pour seule responsable des gains obtenus sur le terrain du pouvoir d'achat et sur celui de la désinflation depuis 2000, "il a bien servi les besoins de l'économie française depuis l'unification monétaire, à la fois en moyenne (avec des taux d'intérêt beaucoup plus bas qu'avant l'euro) et en variation (avec une politique monétaire particulièrement adaptée à l'économie française). La France bénéficie d'être un pays ‘médian' parmi ses pairs."