Ce rapport du 18 novembre 2024 s'inscrit dans la continuité de précédentes études sur les violences sexistes et sexuelles. Il observe plus spécifiquement les mécanismes de domination sociale, par abus de position d'autorité ou de pouvoir, qui peuvent s'exercer dans le monde du travail et au-delà (associations, milieu politique, milieu sportif et culturel...).
Parmi les facteurs pouvant favoriser ce type de violences sous relation d'autorité ou de pouvoir, le rapport évoque la persistance des inégalités entre les femmes et les hommes. Au-delà du constat, les rapporteurs formulent une série de recommandations dont 15 "prioritaires" dans le domaine du travail qui sont axées sur la prévention, le repérage des situations à risque, les formes de sanctions, l'accompagnement juridique des victimes et leur prise en charge.
Doublement du nombre de victimes déclarées entre 2016 et 2023
La mission évalue à plus d'1,4 million le nombre de femmes victimes de violences sexistes et sexuelles hors cadre familial en 2021. Dans seulement 2% des cas, ces violences aboutissent à une plainte (6% lorsqu’il s’agit de violences sexuelles physiques).
En 2023, les services de police et de gendarmerie font état de 83 500 victimes de violences sexistes ou sexuelles hors contexte familial (dont 85% sont des femmes), soit un quasi doublement par rapport à 2016. La forte médiatisation de l’affaire Weinstein en 2017 qui a eu pour effet de libérer la parole des victimes et l'amélioration des conditions d’accueil des victimes par les services de sécurité peuvent expliquer en partie cette hausse.
Le rapport s'appuie sur l'enquête Genese (genre et sécurité) de 2021, menée par le service statistique ministériel de la sécurité intérieure, selon lequel les femmes subissent trois fois plus que les hommes un comportement sexiste ou sexuel dans un contexte professionnel (regards déplacés ou insistants, transmissions d'images ou de messages sexuellement explicites, plaisanteries ou remarques sexistes...).
La même enquête identifie les situations à risque et les profils de victimes les plus récurrents : des salariés en statut précaire (CDD, intérim, contrat d'apprentissage...), plutôt jeunes (entre 18 et 29 ans), en travail de nuit ou en situation d'hébergement hors du domicile.
Une situation qui s'aggrave dans certains secteurs professionnels
Si une amélioration est observée dans la prise de conscience des entreprises et des salariés grâce à une plus grande sensibilisation aux violences sexistes et sexuelles, une aggravation du phénomène est malgré tout constatée dans certains secteurs professionnels :
- la santé (39% de femmes médecins se déclarant victimes de comportements sexistes ou sexuels, 30% chez les étudiants en pharmacie, 25% à l’hôpital) ;
- la culture (932 appels à la cellule d’écoute psychologique et juridique en 2023 contre 500 en 2022) ;
- le sport (1 300 personnes mises en cause depuis la création de la cellule Signal-sports fin 2019) ;
- les secteurs du service à la personne et du nettoyage où une enquête du Défenseur des droits rapporte qu'une personne sur cinq s'est plainte de contacts physiques inappropriés.
En cause : les mécanismes de liens de subordination, d'autorité, de pouvoir qui continuent d'opérer dans certains milieux professionnels. Parmi eux : le sexisme ambiant, la position dominante des hommes dans la hiérarchie et surtout les inégalités persistantes entre les femmes et les hommes dans le monde du travail.