Dans une décision du 1er août 2025, le Défenseur des droits fait état des difficultés observées à Mayotte dans l'accès et le fonctionnement des services en charge de l'état civil et de la nationalité française. La décision met en évidence les défaillances des services publics mahorais et les conséquences qui en résultent pour les administrés.
Des obstacles à l'obtention des actes d'état civil
Plusieurs défaillances sont relevées par le Défenseur des droits s'agissant des services en charge de l'état civil à Mayotte :
- la délivrance des copies d'actes de naissance, l'enregistrement des déclarations de naissance ainsi que la délivrance d'un titre d'identité français sont souvent conditionnés à la présentation d'un titre d'identité du demandeur ou de son représentant légal (selon les démarches). Le Défenseur des droits rappelle que le demandeur peut justifier de son identité par tout moyen, les officiers d'état civil ne pouvant exiger un seul type de document. Par ailleurs, concernant les copies d'acte de naissance, la vérification de l'identité du demandeur ne saurait être systématique : elle ne doit intervenir qu'en cas de doute sur son identité ;
- l'impossibilité d'obtenir la copie d'un acte de naissance a des répercussions concrètes : elle empêche l'obtention d'un titre d'identité français ou d'un titre de séjour, d'un logement, d'un emploi, ou encore de prestations sociales. Cette pratique porte atteinte à plusieurs principes fondamentaux (droit au respect de la vie privée et familiale, liberté d'aller et venir, intérêt supérieur de l'enfant...) ;
- lorsque le demandeur est de nationalité étrangère, l'exigence de la production d'un titre d'identité officiel s'avère encore plus contraignante. La plupart d'entre eux ne peuvent pas l'obtenir de leur pays d'origine, et les bénéficiaires de la protection internationale n'ont pas le droit de l'utiliser, au risque de perdre leur protection.
Le Défenseur des droits recommande de mieux informer les usagers sur leurs droits et les recours qu'ils peuvent exercer.
L'accès à la nationalité : un régime dérogatoire et des délais préoccupants
À Mayotte, les conditions d'accès à la nationalité diffèrent de celles applicables sur le territoire français.
Depuis la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, des restrictions supplémentaires au droit du sol (attribution de la nationalité française en raison de la naissance en France) sont appliquées à Mayotte. Une loi du 12 mai 2025 a encore durci les conditions requises sur ce territoire uniquement. Le droit du sol n'y est désormais possible que lorsque les parents d'un enfant né à Mayotte y ont résidé de manière régulière (titre de séjour) et continue depuis plus d'un an. Dans le reste de la France, aucune condition de séjour régulier des parents n'est imposée.
Les ressortissants étrangers résidant à Mayotte font face à des difficultés multiples pour obtenir un titre de séjour, régulièrement relevées par le Défenseur des droits. Lorsqu'ils sont titulaires d'un titre de séjour, ils rencontrent également des obstacles pour faire porter en marge de l'acte de naissance de l'enfant la mention de la régularité de leur séjour et de leur résidence à Mayotte. Le Défenseur des droits recommande ainsi de veiller à ce que les officiers d'état civil apposent cette mention, nécessaire à l'obtention de la nationalité française par le droit du sol.
Le Défenseur met également en lumière le manque de moyens humains au sein du service de la nationalité du tribunal judiciaire de Mamoudzou. Plus de 4 600 dossiers y sont en attente, parmi lesquels certains sont sans réponse depuis leur dépôt en 2021. Les récépissés, qui permettent d'attester du dépôt d'une demande de nationalité, ne sont souvent pas délivrés, ou sont remis seulement au terme de l'instruction de la demande. Le Défenseur des droits rappelle qu'un récépissé doit être délivré au demandeur dès que celui-ci a remis l'ensemble des pièces requises, et non après examen du fond de sa demande (article 26 du code civil).