Depuis la loi du 15 avril 1999 relative aux polices municipales, huit textes sont intervenus pour accroître les prérogatives et les moyens des policiers municipaux, dans l'objectif de renforcer leur complémentarité avec la police et la gendarmerie nationales.
Le projet de loi complète ce continuum de sécurité en proposant une réforme d’ensemble des polices municipales et des gardes champêtres. Il reprend les conclusions du Beauvau des polices municipales de 2024-2025, à l'issue duquel le gouvernement a considéré que l’évolution de la délinquance dite "de proximité" nécessite d’améliorer la complémentarité entre les services responsables de la sécurité et de la tranquillité publiques de proximité.
Compétences élargies pour les policiers municipaux
Le texte réaffirme, dans le code général des collectivités territoriales, le rôle des polices municipales et des gardes champêtres dans le maintien du bon ordre et de la tranquillité publique, sous l'autorité du maire. À l'échelon local, ces agents concourent également à la prévention de la délinquance, en coordination avec la police et la gendarmerie nationales.
Le projet de loi prévoit ensuite la possibilité d'étendre les pouvoirs des policiers municipaux. Les maires ou présidents d'intercommunalités volontaires pourront créer un "service de police municipale à compétence judiciaire élargie", sous certaines conditions : nombre suffisant de personnels encadrants qui seront habilités par le parquet et devront présenter des compétences professionnelles semblables et des garanties équivalentes à celles exigées des officiers de police judiciaire (OPJ), formation renforcée des agents...
Sur la commune, les agents appartenant à ces nouveaux services aux missions élargies pourront, sous la direction du procureur de la République, constater par procès-verbal neuf nouveaux délits de la police du quotidien dès lors qu'ils ne nécessitent pas d'actes d'enquête de leur part. À ce titre, ils pourront relever les identités des délinquants et délivrer des amendes forfaitaires. Parmi ces nouveaux délits figurent la conduite sans permis, les tags et graffitis, l'occupation de hall d’immeuble, les outrages sexistes, la consommation de drogue ou encore la vente d'alcool aux mineurs. L'action de ces futurs services de police municipale relèvera ainsi de deux régimes distincts : celui restreint existant et le cadre étendu proposé par le projet de loi.
Afin d'accompagner les agents dans ces nouvelles missions, les personnels encadrants (chefs de service ou directeurs de police municipale) disposeront, sous l'autorité du procureur de la République, de quatre compétences judiciaires nouvelles : immobilisation et mise en fourrière de véhicules, contrôles d'alcoolémie routiers...
Par ailleurs, certaines compétences des policiers municipaux et gardes champêtres sont étendues et harmonisées en matière de dépistage d’alcoolémie et de stupéfiants. Tous les agents pourront désormais prescrire la mise en fourrière d’un véhicule et restituer immédiatement des animaux trouvés errants. Ils pourront de même plus facilement constater les infractions aux règles d’urbanisme sur le territoire de la commune.
Le gouvernement est autorisé à prendre une ordonnance pour coordonner les dispositions du texte avec l'ordonnance de réécriture du code de procédure pénale, prévue prochainement.
Nouveaux moyens d'action : drones, LAPI
Le projet de loi confère de nouveaux moyens d'action aux services municipaux.
Les policiers municipaux pourront expérimenter l’utilisation des drones pendant 5 ans pour des finalités et dans des limites bien précises, par exemple pour protéger des bâtiments communaux et de leurs abords immédiats, "lorsqu'ils sont particulièrement exposés à des risques d'intrusion ou de dégradation". La loi du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés et celle du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure introduisaient déjà une telle expérimentation, qui a toutefois été censurée par le Conseil Constitutionnel faute d'encadrement suffisant.
La possibilité pour les gardes champêtre d'utiliser des caméras piétons est pérennisée. Le régime de l’armement des gardes champêtres est rapproché de celui des agents de police municipale.
Les policiers municipaux et gardes champêtres pourront dorénavant utiliser des dispositifs de lecture automatisée de plaques d’immatriculation (LAPI) pour toutes les infractions au code de la route. Aujourd'hui, ils n'ont ce droit que pour certaines d'entre elles. Cette extension est une demande de nombreux maires, qui soulignent l’incohérence de la situation qui permet aux agents municipaux de constater des infractions sans pouvoir identifier les auteurs.
Formation, mutualisation et déontologie des agents
Le texte contient plusieurs mesures sur la formation professionnelle des policiers municipaux et des gardes champêtres. Il permettra notamment au Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) de recruter directement ces agents pour participer à ses missions de formation (ingénierie, formateur, gestion des stands de tir et armurerie …). Le régime de la formation professionnelle des gardes champêtres est aligné sur le dispositif rénové des policiers municipaux.
La mutualisation des agents entre collectivités, de manière pérenne ou pour des événements exceptionnels, est facilitée. Le régime de mutualisation possible en prévision des grands événements est aligné sur celui prévu en cas de catastrophe naturelle ou technologique. Le recours aux assistants temporaires de police municipale est élargi aux communes concernées par les grands événements. Des policiers municipaux et des gardes champêtres pourront être mutualisés au sein d'une même intercommunalité.
Le texte renforce le contrôle et la déontologie des policiers municipaux et gardes champêtres du fait de l'extension de leurs prérogatives, compétences et moyens. En particulier, ces agents municipaux se verront attribuer un numéro individuel d’identification (RIO) enregistré sur une base nationale.
L'avis du Conseil d'État
Dans son avis du 23 octobre 2025 sur le projet de loi, le Conseil d'État formule plusieurs observations. Il considère que le "régime de procédure pénale à géométrie variable" applicable dans les communes qui créeraient un service de police municipale à compétence judiciaire élargie, puisque deux régimes seront "concomitamment applicables, celui de droit commun et le régime étendu, aux mêmes endroits, aux mêmes agents voire, au même moment, en fonction de la nature des infractions et des conditions de leur commission" sera complexe à mettre en œuvre compte tenu des risques de mésusage ou de confusion des compétences détenues ou non par les agents de police municipale, en fonction du contexte. C'est pourquoi, il insiste sur la nécessité de prévoir des formations adaptées pour l’ensemble des intervenants, élus comme agents, et menées en amont de la mise en œuvre volontaire du nouveau dispositif.
Sur le volet déontologie, le Conseil d’État estime que les différents ajustements prévus par le projet de loi ne suffisent pas à remédier aux carences observées par de nombreux rapports, notamment par les rapports de la Cour des comptes de 2011 et de 2020 consacrés à la police municipale. Il considère que, dans la mesure où l’intention du projet de loi est de renforcer un "continuum de sécurité" entre les polices municipales et les police et gendarmerie nationales, et alors que ces dernières font l’objet de contrôles déontologiques internes et externes renforcés, des mesures analogues doivent être prévues pour les polices municipales.
Cette page propose un résumé explicatif du texte pour le grand public. Elle ne remplace pas le texte officiel.