Des objectifs qui "demeurent à ce jour incertains" et "mal compris par le grand public", un coût "largement sous-estimé", une généralisation "non préparée à ce stade" : tels sont les principaux constats d'un rapport de la Cour des comptes publié le 13 septembre 2024 sur le SNU.
Des objectifs incertains
Le SNU se déploie en trois phases :
- un "séjour de cohésion" de 12 jours, avec port de l'uniforme et levée des couleurs ;
- une mission d'intérêt général (84 heures) ;
- un engagement volontaire de 3 à 12 mois.
C'est principalement la première qui a fait l'objet des efforts déployés depuis 2019.
"Initialement annoncé, dans une période encore fortement marquée par les attentats de 2015, comme un service national obligatoire destiné à succéder au service militaire", le SNU concerne des jeunes gens de 15 à 17 ans, sur la base du volontariat. En 2024, le nombre de jeunes réalisant le séjour de cohésion (40 135) a représenté 63% de l'objectif cible (64 000).
Les objectifs fixés au SNU sont nombreux même si évaluer et mesurer leur atteinte est complexe. La "volonté assumée" d’inscrire le SNU dans une "triple culture" (armées, éducation nationale, éducation populaire), ne va pas sans difficulté, pour les pouvoirs publics, à "mettre en pratique ce concept."
En outre, selon la Cour, "en matière de mixité sociale comme d’engagement, les ambitions du dispositif ne sont pas atteintes."
Une diversité d'acteurs impliqués
L'absence de "portage interministériel" fragilise le pilotage administratif du SNU, souligne la Cour. Les associations, notamment d’éducation populaire, s'avèrent "des relais essentiels." Enfin, le recours aux établissements d’enseignement pour l’organisation des séjours de cohésion varie suivant les régions, faute de stratégie nationale pour encourager l'implication des collectivités.
Des coûts à réévaluer
Le coût du dispositif concerne principalement le séjour de cohésion (hébergement, restauration, encadrement). Il est estimé à 2 300 euros par jeune par le ministère de l'éducation nationale, mais la Cour souligne la non-prise en compte des coûts supportés par d'autres ministères ou les collectivités territoriales.
Le rapport parle de "montée en charge à marche forcée", source de "fortes contraintes" pour les acteurs impliqués : identification des lieux d'hébergement, recrutement et rémunération des encadrants, transports, gestion des uniformes et du matériel… relèvent d'une gestion dans l'urgence voire d'une "désorganisation" perturbant l'organisation de la commande publique. Ces difficultés posent question au regard d'une éventuelle généralisation du SNU.
Selon la Cour, les estimations du ministère de l'éducation nationale du coût d'une telle généralisation, à hauteur de 2,5 milliards d'euros, ne concernent que la phase 1 du SNU : elles doivent être réévaluées entre 3,5 et 5 milliards d'euros pour l'ensemble des trois phases. L'actuel "contexte de restriction budgétaire" rend par ailleurs "impératif" d'affiner ce chiffrage de la généralisation, envisagée à l'horizon 2026-2027, du SNU.
L'ampleur des moyens budgétaires requis, "s’agissant de surcroît d’un dispositif structurant pour l’avenir de la jeunesse", requiert à tout le moins que le SNU, note la Cour, fasse l'objet d'un débat parlementaire, absent depuis 2019.