Interview de M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire, dans "Service public" de juin 2002, sur la modernisation de l'organisation territoriale des services publics et sur le projet de modification du statut de la fonction publique, concernant notamment la gestions paritaire des personnels.

Prononcé le 1er juin 2002

Intervenant(s) : 

Média : Service public

Texte intégral

Service Public : Monsieur le ministre, le secteur de la fonction publique occupe, au sens large, près d'un quart des effectifs en France. Qu'est-ce qui, dans votre parcours antérieur, vous rend particulièrement sensible aux enjeux de ce secteur ?

Jean-Paul Delevoye : J'ai été élu local pendant plusieurs années. En tant que maire, puis en tant que président de l'Association des maires de France, j'ai eu l'occasion de m'intéresser aux questions touchant à la fonction publique territoriale et de rencontrer des fonctionnaires des trois fonctions publiques. Je suis particulièrement convaincu que la richesse d'une institution provient des femmes et des hommes qui la composent. Je connais l'attachement des fonctionnaires et des agents publics à leur métier, au service public ; je connais leur dévouement et leur désir profond de faire bouger les choses dans le bon sens pour améliorer encore, par delà ce qui a été déjà fait, la qualité et l'efficacité du service public.

Service Public : Vous venez d'être nommé ministre de la Fonction publique, de la Réforme de l'Etat et de l'Aménagement du Territoire. Votre périmètre d'intervention s'est donc élargi à l'aménagement du territoire. Quels sont, selon vous, les enjeux de ce nouveau champ d'attributions ?

J.-P.D.: En me confiant la charge de ministre de la Fonction publique, ainsi que de la Réforme de l'Etat et de l'Aménagement du Territoire, le Président de la République et le Premier ministre ont voulu souligner l'importance de la conduite des ressources humaines dans l'administration, et la replacer dans un ensemble, certes inédit, mais cohérent. Le lien qui est tracé entre la Fonction publique et l'Aménagement du Territoire est celui de la présence des services publics et de leur qualité. Pour la première fois dans l'organisation gouvernementale, c'est le même ministère qui traite les questions relatives à la répartition territoriale des services publics, à leur modernisation, à la conduite du changement dans les méthodes de gestion.
L'autre fil conducteur du ministère qui m'est confié est bien sûr la Réforme de l'Etat : inscrite au centre des préoccupations du Gouvernement, elle est attendue par nos concitoyens et représente un enjeu majeur pour les années à venir. En plaçant au même endroit le pilotage des politiques de personnels et celui des politiques territoriales, la nouvelle organisation gouvernementale a fait le choix de la nouveauté mais aussi de la cohérence en mettant au service de la réforme deux piliers complémentaires et nécessaires l'un envers l'autre.


Service Public : Les grands chantiers en cours dans la fonction publique sont nombreux : défi démographique, connaissance de l'emploi public, recrutement, mobilité, retraites. Comment entendez-vous les aborder ?

J.-P.D.: Aucun sujet ne sera laissé à l'écart. Au cours de la séance plénière que le Conseil supérieur de la Fonction publique de l'Etat a tenue le 12 juillet 2002, j'ai indiqué aux partenaires sociaux que je souhaitais les aborder en toute franchise, sans faux-fuyant et dans la clarté.
Pour cela, il est indispensable de bien poser les problèmes, de procéder à des constats avec les organisations syndicales et de définir des champs de négociation avec elles. La Réforme de l'Etat ne sera pas faite contre les agents, mais avec eux.
Nous allons ouvrir à la rentrée, dès septembre, des discussions sur l'action sociale, l'attractivité et sur la mobilité des fonctionnaires. Les autres sujets seront ouverts peu après, à chaque fois selon la méthode qui convient. Pour prendre l'exemple des retraites, une fois engagé le débat interprofessionnel que le Premier ministre a demandé au ministre des Affaires sociales d'établir, je conduirai en parallèle, dans le cadre approprié, des discussions avec les syndicats de la fonction publique, dans le respect de la spécificité de celle-ci. Comme vous le voyez, nous allons tenir compte à chaque fois du rythme, des pratiques, et des textes qui s'appliquent dans la fonction publique pour la faire évoluer dans le respect de ce qui fait sa force et sa valeur, qui est le principe statutaire.

Service Public : La décentralisation et ses conséquences sur l'organisation territoriale de l'Etat, ainsi que la simplification des démarches et procédures afin d'améliorer les relations entre les pouvoirs publics et les citoyens usagers représentent un autre grand dossier. Comment comptez-vous le gérer ?

J.-P.D.: La Réforme de l'Etat repose sur trois principes : la simplicité, l'efficacité, la proximité. Simplicité dans l'organisation administrative, pour une meilleure compréhension par tous de la carte administrative, des compétences des différents niveaux, des responsabilités de chacun. Simplicité aussi dans les relations des services publics avec les usagers et dans les démarches que ceux-ci doivent accomplir. Efficacité dans le traitement des dossiers, diminution des délais, amélioration des techniques de gestion, sont autant d'exigences pour assurer une qualité du service public qui est aujourd'hui incontournable dans un pays au niveau de développement de la France. Proximité, enfin, dans la relation avec les citoyens et les utilisateurs du service public. Là encore, nous allons nous concerter avec les partenaires, expliquer le sens de la réforme aux agents, notamment dans les déplacements que le secrétaire d'Etat Henri Plagnol et moi-même avons commencé à effectuer, et qui sont autant d'occasions d'ouvrir le dialogue, directement avec les agents.

Service Public : Une réflexion est en cours sur une rénovation du dialogue social au sein des administrations. Quel est votre point de vue à ce sujet et comment comptez-vous mener ce dialogue ?

J.-P.D.: J'ai l'intention de mener avec les partenaires sociaux un dialogue intensif et utile. Comme je l'ai dit devant le Conseil supérieur, la relance du dialogue est souhaitée par le Gouvernement, dans la fonction publique comme dans les autres professions. Parallèlement, nous allons explorer avec les organisations syndicales des pistes pour rénover le cadre des discussions et moderniser les organismes paritaires. La réforme ne se fera pas contre les agents, ni sans eux, mais avec eux.
(source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 3 septembre 2002)