Déclaration de M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, sur le projet de loi portant sur la réforme des dispositions d'urbanisme issues de la loi SRU et sur la sécurité des ascenseurs, Paris, 28 janvier 2003.

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  • Gilles de Robien - Ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer

Circonstance : Présentation devant l'Assemblée Nationale du Projet de Loi DDUHC (diverses dispositions dans le domaine de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction) à Paris le 28 janvier 2003

Texte intégral


Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,

Le titre de la loi que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui ne doit pas prêter à confusion. Si ce projet comprend bien "diverses dispositions dans le domaine de l'urbanisme de l'habitat et de la construction", il porte pour l'essentiel sur deux sujets d'une grande importance :

  • la réforme de dispositions d'urbanisme issues de la loi SRU d'une part,
  • la sécurité des ascenseurs d'autre part.

Parmi les très nombreux articles de la loi SRU, plusieurs étaient venus modifier le code de l'urbanisme. L'objectif du Gouvernement n'est pas de remettre en cause radicalement les objectifs poursuivis en 2000 par cette réforme Il s'agit plutôt de tirer les conséquences des difficultés rencontrées, sur le terrain, dans la mise en oeuvre de ces dispositions. Difficultés dont de très nombreux élus locaux, et vous me permettrez d'ajouter, de tous bords, se sont fait l'écho auprès de moi.
Ces difficultés sont très largement le fruit d'un manque de pragmatisme dans la démarche retenue par le précédent gouvernement et par l'ancienne majorité Et peut-être plus encore d'une insuffisante campagne d'explication sur le terrain.
Les objectifs, disais-je, sont largement partagés !
Qui pourrait, en effet, être favorable à l'étalement urbain anarchique?
Qui pourrait dire qu'un règlement d'urbanisme ne doit pas se fonder sur un projet ?
Mais de ces objectifs louables à la réalité, ...
Que constatons nous en effet ? Que les élus se perdent dans des règles trop rigides, ou trop alambiquées. Et que des projets sont bloqués. Je prendrai seulement quelques exemples.
La règle dite des 15 km était destinée à inciter à la création d'un SCOT. En pratique, elle bloque des projets d'urbanisation prévus de longue date, prêts à démarrer et nécessaires au logement de nos concitoyens et au développement de notre pays..
La fameuse participation pour voie nouvelle et réseau, PVNR, devait offrir aux communes un cadre transparent et juridiquement fiable leur permettant de financer leurs extensions urbaines. Quitte à vous surprendre, je crois que le mécanisme est plutôt un progrès. Mais des rédactions trop elliptiques, des explications insuffisantes ... et loin de simplifier, la PVNR bloque des projets.
La conclusion est malheureusement simple : des dispositions rédigées trop vite puis mal comprises, appliquées parfois d'une façon encore plus rigide par les services de l'État, et surtout un blocage du foncier qui devient très préoccupant.
Certes, si je lis les derniers chiffres disponibles de la construction de logements fin décembre, les mises en chantier sont restées stables entre 2002 et 2001. En revanche, les permis de construire ont régressé de près de 1%. Sans dramatiser cette situation, je crois que nous devons agir rapidement.
Vous savez que je suis en train d'élaborer, à la demande du Premier Ministre, une nouvelle politique du logement qui permette non seulement de relancer la construction de logements privés en location là où l'offre est manifestement insuffisante, mais aussi d'amplifier l'accession à la propriété qui est une aspiration constante de la plupart des ménages, y compris de ceux qui ont les revenus les plus modestes.
Mais, pour construire, il faut d'abord disposer d'une offre foncière. Or, actuellement, elle est souvent chère, mais aussi parfois inexistante.
Il faut agir et vite.
C'est pourquoi, le Gouvernement, sur ma proposition, a souhaité que vous soient présentées, le plus rapidement possible, des dispositions qui permettent de répondre aux préoccupations de tous les élus soucieux du développement de leurs territoires et de la qualité de vie de leurs concitoyens.

Sans entrer à ce stade dans les détails techniques, je souhaite vous présenter les quatre principales modifications concernant l'urbanisme :

  • la règle dite des 15 km
  • le projet d'aménagement et de développement durable
  • les règles de modification des plans locaux d'urbanisme
  • la participation pour voie nouvelle et réseaux

Pour les communes soumises à la règle des 15 km, le projet prévoit que l'ensemble des zones d'urbanisation future délimitées avant l'entrée en vigueur de cette règle, pourront librement être ouvertes à l'urbanisation sans attendre la délimitation d'un périmètre de SCOT. Cette modification rend disponible immédiatement des terrains dont l'urbanisation était prévue, parfois de longue date.
De plus, elle favorisera la constitution de SCOT de qualité. N'y voyez pas un paradoxe. La rigidité actuelle de la règle oblige de fait les communes à délimiter des périmètres dans la précipitation et oppose les agglomérations à leur périphérie. Le projet qui vous est présenté leur donnera le temps de la concertation.
Pour autant, cette évolution ne remet pas en cause la nécessité d'éviter l'étalement urbain anarchique.
J'en viens au projet d'aménagement et de développement durable.
Le PADD est l'exposé non technique du ou des projets que traduit le plan local d'urbanisme. Il est, si vous me permettez cette comparaison, l'équivalent du débat d'orientation budgétaire.
La loi actuelle prévoit son opposabilité directe aux autorisations individuelles, ce qui constitue un véritable nid à contentieux. Le projet du Gouvernement revient sur cette disposition.
Toujours, pour les PLU, la procédure de modification deviendrait la règle de droit commun, celle de la révision, plus lourde, l'exception. Cette évolution apparemment modeste constitue une simplification considérable des procédures.
J'ajoute que, par ce biais, la place du projet urbain - du PADD - sera renforcée. En effet, c'est le respect du PADD qui fera la différence entre modification et révision. En d'autres termes : si une commune veut, sans changer son projet politique, faire évoluer la déclinaison technique de ce projet, une simple modification suffira.
Concernant la Participation pour Voie nouvelle et réseau, le projet du Gouvernement prévoit simplement de lever une ambiguïté afin qu'elle puisse être instituée pour financer des réseaux même sur une voie existante. Pour éviter toute confusion, il faudra désormais parler de Participation pour Voirie et réseau.
Je sais que le Rapporteur, M. Proriol, et le Président Ollier, avec tous les membres de la commission, ont fait un travail de fond considérable pour améliorer le texte du Gouvernement. Nous en verrons le détail lors de l'examen des amendements mais je tiens ici à les en remercier très chaleureusement.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, les lois de la République ne sont pas là pour faire obstacle à l'exercice par les élus de leurs compétences en matière d'urbanisme, encore pour moins décréter des règles conduisant à une uniformisation de notre territoire alors que c'est sa diversité même qui fait sa richesse. Elles doivent permettre aux communes et à leurs groupements de prendre en main leur destin tout en assurant l'égalité de traitement des citoyens, en tenant compte des solidarités entre communes sur un même espace de développement, et en prenant en compte les principes du développement durable auxquels le Gouvernement et le Président de la République sont particulièrement attentifs.
Enfin, j'en terminerai sur l'urbanisme, en vous indiquant que, sans attendre le vote de ce texte, j'ai adressé une circulaire aux Préfets pour leur demander d'avoir, bien entendu dans les limites de la loi actuelle, une application qui n'en soit pas restrictive.
Quelques mots, si vous le permettez, concernant les Pays. Je sais que, grâce à un amendement adopté par la commission, des simplifications majeures seront apportées aux textes qui les régissent.
C'est Monsieur Jean-Paul DELEVOYE qui représentera le Gouvernement pour l'examen de cet amendement.
Mais je tiens, d'ores et déjà, au nom du Gouvernement à remercier le Président Patrick OLLIER et le Rapporteur Jean PRORIOL d'avoir traité, avec un grand souci de simplification, ce sujet.
J'en viens maintenant à la sécurité des ascenseurs. Vous vous rappelez les accidents dramatiques qui ont récemment ému l'opinion. Ce fut l'occasion pour beaucoup de découvrir que ce moyen de transport qui est le plus courant, le plus quotidien pour des millions de personnes est fondé sur des appareils anciens, voire très anciens, qui ne peuvent évidemment pas répondre aux normes européennes qui s'appliquent depuis quelques années aux nouvelles installations.
La dangerosité du parc qui, pour les deux tiers, a plus de vingt ans d'âge, risque d'augmenter dans les prochaines années. Le renouvellement de ce parc reste faible, même s'il existe une incitation fiscale. Vous avez, en effet, adopté, lors du vote de la loi de finances pour 2003, un article reconduisant jusqu'au 31 décembre 2005 le crédit d'impôt pour les dépenses de gros équipements dont font partie les ascenseurs neufs.
Mais, en attendant ce nécessaire renouvellement d'ascenseurs qui seront bientôt obsolescents techniquement, il est apparu primordial pour le Gouvernement de rendre obligatoire pour les ascenseurs anciens certaines normes, en les sélectionnant en fonction de la fréquence et de la gravité des risques encourus par les usagers mais aussi les professionnels comme les employés d'entretien ou les pompiers qui ont à intervenir sur les ascenseurs. Certaines de ces normes, comme le réglage de la précision de l'arrêt de l'ascenseur au niveau du palier, sont aussi indispensables pour assurer l'accessibilité de l'ascenseur aux personnes à mobilité réduite.
Je sais, car certains l'ont souligné, que le coût total est élevé, mais j'ai tenu à ce que la charge soit répartie sur quinze ans, en prévoyant un phasage des obligations de travaux qui privilégie les mises aux normes les plus impératives dans les cinq premières années.
Quant à ceux qui pensent que, la sécurité n'ayant pas de prix, il faut aller encore plus vite, je leur répondrai qu'il faut aussi tenir compte des capacités de production des entreprises d'ascenseurs qui devront recruter et former de nouveaux techniciens
Ce que je vous propose me semble donc équilibrée. Bien sûr, les aides de l'État ou de l'ANAH à l'amélioration du parc public ou du parc privé interviendront pour alléger la charge des propriétaires.
Mais une mise aux normes ne serait pas suffisante pour prévenir de futurs accidents, si des dispositions complémentaires n'étaient pas prises pour assurer que les ascenseurs fonctionnent et sont entretenus correctement.
Aussi, le projet de loi prévoit d'abord que le contrat d'entretien sera obligatoire et il reviendra au décret d'application d'en préciser le contenu en ayant un équilibre entre les responsabilités qui incombent à chacune des parties, les maîtres d'ouvrage, propriétaire de l'ascenseur d'une part, les ascensoristes d'autre part. La sécurité suppose que chacun prenne ses responsabilités.
Le projet de loi prévoit aussi l'obligation de faire réaliser périodiquement un contrôle technique par une personne indépendante.
Le décret d'application prévoira la possibilité, pour toute personne ayant intérêt à agir, de saisir le juge des référés s'il elle juge que les nouvelles dispositions n'ont pas été bien mises en oeuvre.
Ces dispositions ne peuvent répondre aux problèmes provoqués par des actes de malveillance, car cela relève à l'évidence d'un autre traitement. Mais elles pourront en prévenir un certain nombre et constitueront, si vous les adoptez, un progrès sensible dans la qualité de l'habitat de notre pays.

J'évoquerai plus brièvement les autres dispositions du projet de loi.
Le contrôle technique sur la construction des bâtiments présentant un risque particulier sera étendu aux bâtiments situés dans des zones soumises particulièrement à des risques naturels ou technologiques. Il s'agit principalement de permettre une meilleure prise en compte des règles parasismiques dans les zones soumises à des risques de tremblement de terre.
Des articles précisent les conditions du contrôle sur certains organismes bénéficiant des fonds du 1% logement, les pouvoirs de l'Union d'économie sociale pour le logement qui réunit les partenaires du 1% logement. Un amendement du Gouvernement corrigera une erreur de rédaction.
D'autres articles concernent les organismes d'HLM et les sociétés d'économie mixte et corrigent certaines imprécisions de la loi SRU.
Le Gouvernement présentera un amendement de suppression du dernier article relatif à la création d'une société de garantie des organismes d'HLM pour leurs opérations d'accession sociale à la propriété. Ce problème a été en effet réglé par un amendement parlementaire à la loi de finances pour 2003. Les organismes HLM pourront ainsi continuer à participer, avec les conditions de garantie nécessaire, à la promotion de l'accession dont, je le répète, j'attends beaucoup dans les prochaines années pour améliorer le logement des Français.
A l'issue de cette rapide présentation, vous pouvez vous rendre compte que ce projet de loi n'a pas vocation à trouver une solution à tous les problèmes que rencontre aujourd'hui le logement. Je vous proposerai d'ici la fin de l'année d'autres mesures dans le cadre d'un projet de loi sur l'habitat que prépare le Gouvernement.
Soyez, toutefois, persuadés que je serai très attentif, tout au cours de la discussion, aux amendements que proposerez, qu'ils puissent recevoir dès maintenant un avis favorable du Gouvernement ou qu'ils nécessitent une expertise complémentaire ou une étude d'impact que mes services pourront mener dans le cadre de la préparation du futur projet de loi.

(Source http://www.logement.gouv.fr, le 4 février 2003)