Discours de M. Gilles de Robien, ministre de l'Equipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, sur la politique du logement avec la modification de la loi SRU pour "remettre du foncier sur le marché", la sortie progressive de la loi de 1948, un dispositif fiscal plus incitatif d'investissement dans le logement, l'harmonisation des textes sur les diagnostics techniques, Deauville le 28 mai 2003.

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Circonstance : Congrès des notaires à Deauville le 28 mai 2003

Texte intégral

Monsieur le Président du Conseil Supérieur du Notariat,
Monsieur le Président du Congrès,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs,
C'est la première fois comme Ministre en charge du Logement que je me retrouve parmi vous. C'est un vrai plaisir pour moi de pouvoir vous présenter la politique du logement que le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin entend mettre en oeuvre dans les prochains mois. Aussi, je vous remercie très vivement de votre accueil aujourd'hui à Deauville.
Vous êtes, sans aucun doute, la profession immobilière la plus connue de tous les Français. Cela ne veut pas dire que l'importance de votre fonction et la diversité des rôles que vous jouez dans de multiples domaines, succession, immobilier, etc. soient suffisamment connues.
Monsieur le Président, je sais que vous avez présenté à mon collègue, Monsieur Dominique PERBEN ce qu'est l'office notarial d'aujourd'hui, ce qu'il représente comme masse de compétences, ce qu'il exige comme rigueur juridique.
Pour ma part, je sais que vous êtes, dans le domaine immobilier, le premier conseil vers lequel on se tourne naturellement avant de prendre une décision parfois difficile, toujours importante, ne serait-ce que par les enjeux financiers qu'elle représente. Vous êtes aussi ceux qui assurent la validité juridique des projets engagés par nos concitoyens. Bien sûr, vous connaissez l'adage : nul n'est censé ignorer la loi. Et pourtant, qui aujourd'hui peut se retrouver facilement dans le maquis des textes qui s'accumulent année après année, qui partent souvent de très bonnes intentions, mais qui parfois étouffent l'initiative. Eh bien ! Vous vous y retrouvez, mais vous voyez aussi les défauts de cette législation.
J'ai pu apprécier la somme de réflexions qu'ont nécessité les travaux préparatoires de votre congrès pour proposer à Monsieur PERBEN et à moi-même des réformes. J'en profite pour saluer Monsieur JAQUET, le président de votre congrès, que je connais bien.
Sachez que chacune de vos propositions sera étudiée avec le sérieux qu'elle mérite par les services de la Chancellerie et par les miens. Nous avons besoin d'écouter les praticiens, avant de proposer les réformes nécessaires au Parlement. Je prépare un projet de loi "Habitat pour tous" : ce sera une bonne occasion d'intégrer l'une ou l'autre de vos propositions.
Il m'appartient aujourd'hui de vous présenter, même rapidement, les grandes lignes de la politique du logement que je conduis au nom du gouvernement. Première évidence, il ne faut pas opposer le parc ancien au parc neuf, le secteur public au secteur privé, l'accession à la propriété à la location. Car tous ces chaînons qui forment ce que j'appelle la chaîne du logement contribuent à loger nos concitoyens, en fonction de leurs revenus ou de leurs attentes.
Mais d'abord, vous le savez bien, pas de logement, sans foncier. Dès mon arrivée, mon premier souci, pour répondre à l'attente des élus et à celle des professionnels, a été de libérer le foncier. La loi urbanisme et habitat qui va bientôt être votée par le Parlement, lève les contraintes inutiles introduites par la loi SRU. Je ne vous détaillerai pas les mesures. Un seul objectif : remettre du foncier sur le marché. Je signalerai seulement la disposition qui permet à des communes d'imposer sous certaines conditions une taille minimale de parcelles pour construire. Cette disposition souhaitée par les parlementaires redonne aux élus le pouvoir de décider, tout en simplifiant la vie des notaires puisque désormais le contrôle est limité à une période de dix ans.
Maintenant le locatif, le locatif dans toutes ses composantes.
Pour donner aux propriétaires les moyens financiers de rénover leurs biens, souvent laissés à l'abandon, il fallait sortir progressivement de la loi de 48. Mes services ont organisé la concertation avec tous les partenaires (propriétaires, locataires) avec les trois objectifs que je leur ai assignés :
- permettre aux propriétaires de rénover leur logement pour que les locataires bénéficie du confort moderne,
- protéger les locataires âgés en leur donnant un droit au maintien dans les lieux,
- protéger les locataires à ressources modestes qui paieront un loyer compatible avec leurs revenus.
Les charges locatives sont aussi un dossier sensible, et c'est pourquoi j'ai demandé à Monsieur Philippe PELLETIER dont je salue le rôle, d'engager une concertation avec toutes les parties prenantes et de me faire des propositions.
Il doit me remettre prochainement son rapport. Je lui fais confiance pour proposer la solution la plus consensuelle possible, la plus équilibrée.
Autre sujet qui pour le moins a été particulièrement mal traité par le précédent gouvernement, celui de la sécurisation des bailleurs. J'ai demandé au Conseil National de l'Habitat dont vous faites partie, de reprendre le travail engagé et de le reprendre sans a priori, pour déboucher sur une solution efficace et acceptée par tous.
Enfin, sur la location, je finirai par la fiscalité. C'est un thème qui mériterait à lui seul de longs développements. Le gouvernement a dû faire des choix.
Il est apparu urgent de mettre en place un nouveau dispositif plus simple et plus incitatif, pour que les particuliers investissent dans des logements, là où on en a le plus besoin. Mais, à la différence de mes prédécesseurs, je n'ai pas voulu limiter ce régime aux seuls logements neufs, mais l'ouvrir, sous certaines conditions, à l'ancien. En tant que notaires, vous aurez à jouer un rôle de conseil aux particuliers. Sans attendre, je compte sur vos suggestions pour la rédaction du décret en cours de préparation sur le régime dans l'ancien.
Plus généralement, je suis persuadé que la fiscalité immobilière est trop lourde pour les bailleurs.
C'est pourquoi la communication que je viens de faire au Conseil des ministres, prévoit explicitement que la contribution sur le revenu locatif, impôt qui, par définition ne s'applique qu'au placement immobilier, sera supprimée, bien sûr quand l'état des finances publiques le permettra.
J'ai aussi une grande ambition pour l'accession à la propriété. Pourquoi un pays comme le nôtre n'a pas plus de 56 % de propriétaires occupants ? C'est le moment d'encourager nos concitoyens de devenir propriétaires de leur logement. Les taux d'intérêt historiquement bas, le développement de prêts à durées plus longues facilitent l'accession à la propriété.
Rarement le niveau des transactions immobilières n'a été aussi élevé. Mais certains ménages, malgré leur désir, ne peuvent réaliser leur rêve s'ils ne bénéficient pas d'une aide publique.
Comme je l'ai annoncé, je proposerai dans les semaines qui viennent au Gouvernement un dispositif plus incitatif qui profite prioritairement aux ménages les plus modestes.
Il faut aussi favoriser les différentes formules innovantes d'accession, location-accession, acquisition différée du foncier, accession progressive, qui peuvent sécuriser et étaler les charges de ceux qui hésitent encore à s'engager dans une opération d'achat.
Je terminerai rapidement sur trois sujets qui, je l'ai compris, vous tiennent à coeur.
D'abord les diagnostics techniques qui ont donné lieu à une sédimentation législative et réglementaire. Au minimum pour les praticiens, il faut un lieu juridique unique dans lequel seront décrites toutes ces obligations.
L'acquéreur doit savoir exactement ce qu'il achète, connaître les travaux qu'il aura à réaliser à l'avenir.
Même si ces diagnostics obéissent à des objectifs différents, j'essaierai d'aller le plus loin possible dans l'harmonisation, à l'occasion de la préparation de la loi habitat pour tous.
Sur le délai de rétractation, vous me trouverez ouvert à modifier la rédaction actuelle telle qu'elle résulte de la loi SRU.
Enfin, le fameux article L 631-7 du code de la construction. Les professionnels attendent depuis longtemps qu'un Gouvernement se préoccupe des difficultés qu'ils rencontrent à appliquer ce monstre de rigidité et de complexité administrative.
Conformément à la volonté du gouvernement actuel, je vous proposerai dans le même projet de loi, une simplification réelle. La concertation est en cours et devrait bientôt se conclure.
Messieurs les présidents, Mesdames et Messieurs, une nouvelle politique du logement ne se construit ni en un mois, ni même en une année. Il faut savoir écouter, comprendre l'attente des Français, s'entourer de l'avis des experts, puis décider, et enfin et surtout s'assurer que les nouvelles dispositions sont bien appliquées. Cela peut vous paraître un processus long, mais c'est sans aucun doute la garantie d'une stabilité de nos régimes juridiques auxquels vous êtes par expérience particulièrement attachés.
Vous simplifier la vie, c'est vous permettre de mieux vous consacrer à votre rôle essentiel de conseil et ainsi favoriser l'ensemble du fonctionnement de l'immobilier.
Je vous remercie de votre attention.
(source http://www.equipement.gouv.fr, le 13 juin 2003)