Texte intégral
H. Lauret-. Bonjour M. le garde des Sceaux.
- "Bonjour."
Q- Et l'actualité étant ce qu'elle est, je voudrais d'abord vous interroger sur l'Irak, si vous le permettez. Alors, au mépris de toutes les règles et toutes les conventions de la morale, des soldats américains, et parfois même britanniques, pratiquent des sévices et des tortures d'un autre âge sur des prisonniers quand d'ailleurs, ce n'est pas sur la population. Question, D. Perben : les chefs militaires, les chefs politiques, de G. Bush, qui sont censés d'ailleurs incarner l'axe du bien, ce que l'on a peut-être un peu oublié, peuvent-ils être traduits un jour devant un tribunal international ?
R - "Ce qui s'est passé est une abomination, et la France l'a condamné. Je crois que la justice américaine sera inévitablement saisie, et je pense qu'il appartiendra à ceux qui ont exécuté, à ceux qui ont décidé, à ceux qui ont donné les instructions, de s'expliquer devant la justice."
Q- Mais cette barbarie, que l'on constate de part et d'autre, évidemment, cette horreur - je pense à l'exécution filmée en vidéo de l'Américain N. Berg -, tout cela provoque un peu le vertige et la nausée. Est-ce que cette escalade, j'allais dire cette confusion mentale, autorise encore aujourd'hui à critiquer la politique du président américain en Irak, tout en condamnant d'ailleurs, avec la plus grande détermination, la lutte contre le terrorisme, bien entendu ?
R - "Ce qui est très préoccupant, sur le plan politique, dans cette affaire, c'est que la force des images, la force de ces informations, ne peut être que porteuse de tensions supplémentaires et on voit bien que l'on est, là, dans un phénomène comparable à l'effet de choc que provoque, régulièrement, quotidiennement, par exemple, le conflit israélo-palestinien. Là, on est sur un autre terrain, mais dont les effets peuvent être au moins de même convention"
Q- De même nature.
R - " à la fois dans l'ensemble de l'opinion publique mondiale et plus spécifiquement, bien entendu, dans l'ensemble de l'opinion publique arabo-musulmane. Et je pense que ça c'est un facteur de tensions internationales supplémentaires, voire de tensions dans un certain nombre de pays y compris dans le nôtre."
Q- Tout ceci est inquiétant, bien entendu.
R - "Tout ceci est très inquiétant et tout ceci est, évidemment, condamnable."
Q- Quelles garanties avez-vous, D. Perben, car vous revenez d'Amérique, que les prisonniers de la base de Guantanamo sont mieux traités que ceux des prisons d'Abou Gharib ?
R - "Des visites ont été effectuées aussi bien par la Croix-Rouge que par un certain nombre de représentants des pays concernés par la nationalité des prisonniers, et, en particulier, des visites réalisées par la France ont été effectuées. S'agissant des prisonniers de Guantanamo, ce que je souhaite simplement dire, c'est que j'en ai parlé une nouvelle fois à mon collègue l'Attorney général, M. J. Ashcroft, comme j'avais eu l'occasion de le faire dans les mois passés. Aujourd'hui, où en sommes-nous ? Les Etats-Unis nous ont fait passer une note d'orientation sur laquelle nous discutons actuellement, et j'ai tout lieu de penser que d'ici à quelques mois, au moins une partie des prisonniers actuels pourraient être transférés en France."
Q- Sept Français, n'est-ce pas ?
R - "Il y a sept Français. Nous avons des discussions actuellement sur une partie d'entre eux, et peut-être sur la totalité qui pourrait être transférée en France."
Q- Est-il vrai que la justice américaine vous demande des garanties sur la suite ?
R - "Elle nous pose un certain nombre de questions sur lesquelles nous serons amenés à"
Q- Des questions ou des conditions, M. le ministre ?
R - "Il y a une volonté manifeste, aujourd'hui, de trouver une solution, ce qui est un changement par rapport aux positions d'il y a six mois, ou d'il y a un an."
Q- Sans doute lié aussi à l'évolution de l'actualité.
R - "Oui, et au fait que la Cour Suprême des Etats-Unis se préoccupe aujourd'hui du dossier."
Q- Alors, parmi les dossiers du moment - changeons un peu de registre - votre projet de loi de sauvegarde des entreprises. Il s'agit - vous l'avez dit, nous avons abondamment parlé, sur cette antenne, de ce projet de loi - de prévenir les faillites, trop nombreuses, et surtout peut-être de les traiter en amont, en quelque sorte, du dépôt de bilan. Et puis c'est un projet, ce qui est intéressant, qui suscite un vrai consensus. En tout cas pas d'aigreur, par exemple, dans la classe politique parce qu'il va clairement dans le sens de l'intérêt général. Alors, un mot, peut-être, si vous le voulez bien, sur la philosophie, et un autre sur cette innovation que constitue le comité de créanciers, d'ailleurs l'idée est venue d'Amérique, je crois.
R - "Alors, la philosophie, il y a deux mots clef : emploi et participation. Emploi pourquoi ? Parce que cette loi s'intègre, évidemment, dans la stratégie de défense de l'emploi que développe le Gouvernement. Parce que nous constatons quoi ? En 2003, il y a eu près de 60 000 entreprises qui ont connues des difficultés, qui les ont amenées à aller vers les procédures collectives. Ces 60 000 entreprises correspondaient à environ 300 000 salariés, et sur ces 300 000 salariés, du fait du déroulé des procédures, 140 000 ont perdu leur emploi. Donc il y a, là, une vraie matière et donc si on peut améliorer la situation, ce seront autant d'emplois, d'activités, de capacité de création de richesses, qui seront sauvegardés. Alors quelle est la philosophie du texte ? Anticiper. Qu'est-ce que l'on constate, en fait ? Neuf fois sur dix, lorsqu'une entreprise va vers les procédures collectives, en réalité elle va jusqu'à la liquidation, il n'y a que 10 % d'entreprises qui sont sauvées. Donc il faut améliorer les choses car la raison principale, c'est ce que disent tous les spécialistes, tous ceux qui également ont malheureusement pu connaître ce processus, disent : on ne réagit pas suffisamment tôt. Donc toute l'idée du texte, c'est de faire en sorte que le chef d'entreprise, je dis bien le chef d'entreprise, quand il sent qu'il va avoir une difficulté qui résulte de l'évolution du marché, qui résulte d'une erreur de stratégie d'investissement, et que sais-je encore, lorsqu'il sent qu'il va avoir des problèmes, puisse réagir et rentrer en discussions efficaces avec ses créanciers. Donc, c'est l'idée d'anticiper. Alors, les comités de créanciers dont vous parlez, c'est effectivement un des éléments clefs de la procédure nouvelle qui est proposée par ce texte, qui est la " procédure dite de sauvegarde ", qui permet donc aux chefs d'entreprises de prendre l'initiative d'une négociation avec les créanciers, et de mettre en place deux comités de créanciers, l'un pour les banquiers, l'autre pour les fournisseurs. Et de discuter, avec eux, avec des règles de majorité dans ces comités, d'un plan de redressement de l'entreprise auquel ces créanciers pourraient apporter leur accord, dans un intérêt bien compris et partagé. Et cela, bien sûr, avant toute cessation de paiement classique, comme on le connaissait jusqu'à maintenant. Donc voilà quelle est effectivement l'innovation centrale, étant précisé que deux autres procédures amiables avec l'administrateur ad hoc, d'une part, et avec la conciliation, d'autre part, sont également maintenues et développées, améliorées dans le texte. Et j'espère que ce texte nous permettra, effectivement, de sauver un grand nombre d'emplois dans les années qui viennent, et de moderniser ainsi notre droit. Il faut se souvenir que la loi actuelle sur les entreprises en difficultés remonte à 84/85, une période très différente de celle d'aujourd'hui, puisque, souvenons-nous, à cette époque, le secteur bancaire était entièrement nationalisé"
Q- Bien entendu.
R - "La plupart des grandes entreprises industrielles étaient des entreprises d'Etat, donc on était dans un tout autre contexte. Et aujourd'hui, il s'agit de mettre en place un texte qui corresponde à l'économie libérale dans laquelle nous sommes aujourd'hui."
Q- De vivre avec son temps, en effet.
R - "Voilà."
Q- M. le ministre, un brûlot dans la classe politique aujourd'hui, c'est ce projet de célébration d'un mariage gay, par N. Mamère, dans sa mairie de Bègles, prochainement. C'est contraire à la loi. Lui prétend que c'est aux juges qu'il appartiendra de trancher. Alors qu'en dit le garde des Sceaux, d'autant que depuis, D. Strauss-Kahn, au Parti socialiste, a carrément mis les pieds dans le plat. Lui, là, considère d'ailleurs que c'est bien la preuve que cette droite que vous incarnez, M. Perben, est " ringarde, n'a rien compris ", un peu comme à l'époque du Pacs.
R - "Alors, d'abord, mon rôle c'est de rappeler la loi. Le garde des Sceaux, c'est bien la moindre des choses. Ce que j'ai d'abord voulu dire, c'est très clairement que, lorsque M. Mamère indique que la loi est floue et que l'on verra bien ce que diront les juges, il dit quelque chose d'inexact, puisque la loi est parfaitement claire. Le code civil et tous ceux qui, comme maires ou adjoints au maire, ont pu marier des gens, savent que le texte prévoit que l'officier d'Etat civil doit demander au " mari et à la femme, je cite, s'ils consentent à s'épouser". Donc "mari et femme", ça a un sens, me semble-t-il, suffisamment clair pour qu'il n'y ait pas de doutes là-dessus. Ça veut dire quoi. Ça veut dire que tout officier d'Etat civil qui doit respecter la loi, doit refuser de marier des personnes du même sexe, dans l'état actuel du texte. Donc M. Mamère sait très bien que le projet de mariage qu'il a prévu, qui sera sans doute un coup médiatique - mais ça, c'est sa responsabilité de faire cela - sera de toute façon un acte nul puisque le juste sera amené à annuler ce mariage. Ça c'est un point de droit par rapport à aujourd'hui. Alors, que doit-on faire ? Est-ce que d'abord le débat doit être ouvert ? Peut-être. En tout cas tout débat est légitime. Personnellement, je crois que c'est une erreur, c'est une erreur d'autant plus que"
Q- Vous êtes contre le mariage gay.
R - "Je suis contre le mariage gay, d'autant plus qu'il y a un contrat qui a été mis en place il y a quelques années, qui est le Pacs, sur lequel nous pouvons peut-être apporter des améliorations"
Q- Le Premier ministre l'a dit.
R- "Le Premier ministre l'a dit, il m'a demandé d'engager des discussions là-dessus. Mes collaborateurs ont commencé à recevoir les associations concernées, et nous pouvons, effectivement, soit en matière fiscale, soit en matière d'obligations réciproques, peut-être améliorer ce dispositif contractuel qui permet, pour des personnes homosexuelles ou hétérosexuelles, d'avoir une autre forme de vie commune, je dirais, gérée par un texte de loi."
Merci M. le ministre.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 14mai 2004)
- "Bonjour."
Q- Et l'actualité étant ce qu'elle est, je voudrais d'abord vous interroger sur l'Irak, si vous le permettez. Alors, au mépris de toutes les règles et toutes les conventions de la morale, des soldats américains, et parfois même britanniques, pratiquent des sévices et des tortures d'un autre âge sur des prisonniers quand d'ailleurs, ce n'est pas sur la population. Question, D. Perben : les chefs militaires, les chefs politiques, de G. Bush, qui sont censés d'ailleurs incarner l'axe du bien, ce que l'on a peut-être un peu oublié, peuvent-ils être traduits un jour devant un tribunal international ?
R - "Ce qui s'est passé est une abomination, et la France l'a condamné. Je crois que la justice américaine sera inévitablement saisie, et je pense qu'il appartiendra à ceux qui ont exécuté, à ceux qui ont décidé, à ceux qui ont donné les instructions, de s'expliquer devant la justice."
Q- Mais cette barbarie, que l'on constate de part et d'autre, évidemment, cette horreur - je pense à l'exécution filmée en vidéo de l'Américain N. Berg -, tout cela provoque un peu le vertige et la nausée. Est-ce que cette escalade, j'allais dire cette confusion mentale, autorise encore aujourd'hui à critiquer la politique du président américain en Irak, tout en condamnant d'ailleurs, avec la plus grande détermination, la lutte contre le terrorisme, bien entendu ?
R - "Ce qui est très préoccupant, sur le plan politique, dans cette affaire, c'est que la force des images, la force de ces informations, ne peut être que porteuse de tensions supplémentaires et on voit bien que l'on est, là, dans un phénomène comparable à l'effet de choc que provoque, régulièrement, quotidiennement, par exemple, le conflit israélo-palestinien. Là, on est sur un autre terrain, mais dont les effets peuvent être au moins de même convention"
Q- De même nature.
R - " à la fois dans l'ensemble de l'opinion publique mondiale et plus spécifiquement, bien entendu, dans l'ensemble de l'opinion publique arabo-musulmane. Et je pense que ça c'est un facteur de tensions internationales supplémentaires, voire de tensions dans un certain nombre de pays y compris dans le nôtre."
Q- Tout ceci est inquiétant, bien entendu.
R - "Tout ceci est très inquiétant et tout ceci est, évidemment, condamnable."
Q- Quelles garanties avez-vous, D. Perben, car vous revenez d'Amérique, que les prisonniers de la base de Guantanamo sont mieux traités que ceux des prisons d'Abou Gharib ?
R - "Des visites ont été effectuées aussi bien par la Croix-Rouge que par un certain nombre de représentants des pays concernés par la nationalité des prisonniers, et, en particulier, des visites réalisées par la France ont été effectuées. S'agissant des prisonniers de Guantanamo, ce que je souhaite simplement dire, c'est que j'en ai parlé une nouvelle fois à mon collègue l'Attorney général, M. J. Ashcroft, comme j'avais eu l'occasion de le faire dans les mois passés. Aujourd'hui, où en sommes-nous ? Les Etats-Unis nous ont fait passer une note d'orientation sur laquelle nous discutons actuellement, et j'ai tout lieu de penser que d'ici à quelques mois, au moins une partie des prisonniers actuels pourraient être transférés en France."
Q- Sept Français, n'est-ce pas ?
R - "Il y a sept Français. Nous avons des discussions actuellement sur une partie d'entre eux, et peut-être sur la totalité qui pourrait être transférée en France."
Q- Est-il vrai que la justice américaine vous demande des garanties sur la suite ?
R - "Elle nous pose un certain nombre de questions sur lesquelles nous serons amenés à"
Q- Des questions ou des conditions, M. le ministre ?
R - "Il y a une volonté manifeste, aujourd'hui, de trouver une solution, ce qui est un changement par rapport aux positions d'il y a six mois, ou d'il y a un an."
Q- Sans doute lié aussi à l'évolution de l'actualité.
R - "Oui, et au fait que la Cour Suprême des Etats-Unis se préoccupe aujourd'hui du dossier."
Q- Alors, parmi les dossiers du moment - changeons un peu de registre - votre projet de loi de sauvegarde des entreprises. Il s'agit - vous l'avez dit, nous avons abondamment parlé, sur cette antenne, de ce projet de loi - de prévenir les faillites, trop nombreuses, et surtout peut-être de les traiter en amont, en quelque sorte, du dépôt de bilan. Et puis c'est un projet, ce qui est intéressant, qui suscite un vrai consensus. En tout cas pas d'aigreur, par exemple, dans la classe politique parce qu'il va clairement dans le sens de l'intérêt général. Alors, un mot, peut-être, si vous le voulez bien, sur la philosophie, et un autre sur cette innovation que constitue le comité de créanciers, d'ailleurs l'idée est venue d'Amérique, je crois.
R - "Alors, la philosophie, il y a deux mots clef : emploi et participation. Emploi pourquoi ? Parce que cette loi s'intègre, évidemment, dans la stratégie de défense de l'emploi que développe le Gouvernement. Parce que nous constatons quoi ? En 2003, il y a eu près de 60 000 entreprises qui ont connues des difficultés, qui les ont amenées à aller vers les procédures collectives. Ces 60 000 entreprises correspondaient à environ 300 000 salariés, et sur ces 300 000 salariés, du fait du déroulé des procédures, 140 000 ont perdu leur emploi. Donc il y a, là, une vraie matière et donc si on peut améliorer la situation, ce seront autant d'emplois, d'activités, de capacité de création de richesses, qui seront sauvegardés. Alors quelle est la philosophie du texte ? Anticiper. Qu'est-ce que l'on constate, en fait ? Neuf fois sur dix, lorsqu'une entreprise va vers les procédures collectives, en réalité elle va jusqu'à la liquidation, il n'y a que 10 % d'entreprises qui sont sauvées. Donc il faut améliorer les choses car la raison principale, c'est ce que disent tous les spécialistes, tous ceux qui également ont malheureusement pu connaître ce processus, disent : on ne réagit pas suffisamment tôt. Donc toute l'idée du texte, c'est de faire en sorte que le chef d'entreprise, je dis bien le chef d'entreprise, quand il sent qu'il va avoir une difficulté qui résulte de l'évolution du marché, qui résulte d'une erreur de stratégie d'investissement, et que sais-je encore, lorsqu'il sent qu'il va avoir des problèmes, puisse réagir et rentrer en discussions efficaces avec ses créanciers. Donc, c'est l'idée d'anticiper. Alors, les comités de créanciers dont vous parlez, c'est effectivement un des éléments clefs de la procédure nouvelle qui est proposée par ce texte, qui est la " procédure dite de sauvegarde ", qui permet donc aux chefs d'entreprises de prendre l'initiative d'une négociation avec les créanciers, et de mettre en place deux comités de créanciers, l'un pour les banquiers, l'autre pour les fournisseurs. Et de discuter, avec eux, avec des règles de majorité dans ces comités, d'un plan de redressement de l'entreprise auquel ces créanciers pourraient apporter leur accord, dans un intérêt bien compris et partagé. Et cela, bien sûr, avant toute cessation de paiement classique, comme on le connaissait jusqu'à maintenant. Donc voilà quelle est effectivement l'innovation centrale, étant précisé que deux autres procédures amiables avec l'administrateur ad hoc, d'une part, et avec la conciliation, d'autre part, sont également maintenues et développées, améliorées dans le texte. Et j'espère que ce texte nous permettra, effectivement, de sauver un grand nombre d'emplois dans les années qui viennent, et de moderniser ainsi notre droit. Il faut se souvenir que la loi actuelle sur les entreprises en difficultés remonte à 84/85, une période très différente de celle d'aujourd'hui, puisque, souvenons-nous, à cette époque, le secteur bancaire était entièrement nationalisé"
Q- Bien entendu.
R - "La plupart des grandes entreprises industrielles étaient des entreprises d'Etat, donc on était dans un tout autre contexte. Et aujourd'hui, il s'agit de mettre en place un texte qui corresponde à l'économie libérale dans laquelle nous sommes aujourd'hui."
Q- De vivre avec son temps, en effet.
R - "Voilà."
Q- M. le ministre, un brûlot dans la classe politique aujourd'hui, c'est ce projet de célébration d'un mariage gay, par N. Mamère, dans sa mairie de Bègles, prochainement. C'est contraire à la loi. Lui prétend que c'est aux juges qu'il appartiendra de trancher. Alors qu'en dit le garde des Sceaux, d'autant que depuis, D. Strauss-Kahn, au Parti socialiste, a carrément mis les pieds dans le plat. Lui, là, considère d'ailleurs que c'est bien la preuve que cette droite que vous incarnez, M. Perben, est " ringarde, n'a rien compris ", un peu comme à l'époque du Pacs.
R - "Alors, d'abord, mon rôle c'est de rappeler la loi. Le garde des Sceaux, c'est bien la moindre des choses. Ce que j'ai d'abord voulu dire, c'est très clairement que, lorsque M. Mamère indique que la loi est floue et que l'on verra bien ce que diront les juges, il dit quelque chose d'inexact, puisque la loi est parfaitement claire. Le code civil et tous ceux qui, comme maires ou adjoints au maire, ont pu marier des gens, savent que le texte prévoit que l'officier d'Etat civil doit demander au " mari et à la femme, je cite, s'ils consentent à s'épouser". Donc "mari et femme", ça a un sens, me semble-t-il, suffisamment clair pour qu'il n'y ait pas de doutes là-dessus. Ça veut dire quoi. Ça veut dire que tout officier d'Etat civil qui doit respecter la loi, doit refuser de marier des personnes du même sexe, dans l'état actuel du texte. Donc M. Mamère sait très bien que le projet de mariage qu'il a prévu, qui sera sans doute un coup médiatique - mais ça, c'est sa responsabilité de faire cela - sera de toute façon un acte nul puisque le juste sera amené à annuler ce mariage. Ça c'est un point de droit par rapport à aujourd'hui. Alors, que doit-on faire ? Est-ce que d'abord le débat doit être ouvert ? Peut-être. En tout cas tout débat est légitime. Personnellement, je crois que c'est une erreur, c'est une erreur d'autant plus que"
Q- Vous êtes contre le mariage gay.
R - "Je suis contre le mariage gay, d'autant plus qu'il y a un contrat qui a été mis en place il y a quelques années, qui est le Pacs, sur lequel nous pouvons peut-être apporter des améliorations"
Q- Le Premier ministre l'a dit.
R- "Le Premier ministre l'a dit, il m'a demandé d'engager des discussions là-dessus. Mes collaborateurs ont commencé à recevoir les associations concernées, et nous pouvons, effectivement, soit en matière fiscale, soit en matière d'obligations réciproques, peut-être améliorer ce dispositif contractuel qui permet, pour des personnes homosexuelles ou hétérosexuelles, d'avoir une autre forme de vie commune, je dirais, gérée par un texte de loi."
Merci M. le ministre.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 14mai 2004)