Texte intégral
Monsieur le Président,
Messieurs les Ministres,
Messieurs les Rapporteurs,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Hervé GAYMARD vient d'exprimer, avec le talent et la conviction que chacun lui connaît, les ambitions et le contenu du projet de loi relatif au développement des territoires, dont nous entamons la discussion. Je ne reviendrai évidemment pas sur les mesures présentées, mais je voudrais développer devant vous une partie essentielle de notre projet, qui touche chaque citoyen, chaque acteur économique présent sur notre territoire : l'action résolue en faveur de l'emploi et le maintien d'une large offre de services dans le monde rural, qu'il nous faut conduire.
Ce projet traduit la confiance que nous portons au monde rural. Et c'est autour de la volonté, clairement affichée, de rendre leur attractivité aux territoires ruraux -attractivité économique, sociale, ou encore en termes de qualité de vie- que s'articulent en effet ces deux volets. C'est un signal fort qu'entend donner le gouvernement, un signal politique pour un monde rural vivant, attirant et durable. Je sais que cette détermination est partagée sur tous les bancs de votre assemblée.
Un projet qui s'inscrit dans une démarche globale.
Dans son discours d'Ussel en avril 2002, le Président de la République avait souligné que " la vérité du monde rural reste mal connue " : c'est particulièrement vrai aujourd'hui, dans une société qui connaît un rythme accéléré. Cette vérité est là. Elle n'appartient pas aux images du passé mais bien à une dynamique actuelle, moderne, diverse. Je vous le dis avec toute la conviction sincère de mon engagement pour le monde rural et pour le Berry depuis des années. C'est cette force que notre projet de loi veut faire émerger : celle née d'une grande diversité de situations, d'activités, d'emplois ; celle qui fait aller de l'avant le monde rural.
Hervé GAYMARD l'a dit : à la pluralité de nos territoires répond la large palette d'outils que nous avons voulu mettre à leur disposition dans ce texte. Il l'a souligné également, cette loi s'inscrit dans une démarche globale et cohérente, qui entend donner au monde rural les clés de son futur. Les mesures adoptées lors de précédents CIADT, les dispositions de la loi sur l'initiative économique, celles des lois de finances, le soutien à l'exportation pour les PME, les efforts très importants engagés par le gouvernement pour assurer rapidement l'accès du monde rural aux nouvelles technologies de l'information et de la communication (téléphonie mobile, Internet haut débit...). Tout cela va dans la même direction : aider le monde rural à réussir sa mutation, à se projeter dans l'avenir.
Cette mutation est déjà bien engagée. C'est une nouvelle ruralité qui s'esquisse, avec des entreprises performantes, avec la multiplication des partenariats de développement local entre les collectivités territoriales, les intercommunalités et l'Etat, et notamment l'utilisation efficace du levier des fonds européens, ou encore avec un réseau d'établissements d'enseignement agricole qui sont et doivent demeurer de véritables filières de réussite -j'ai pu encore récemment le constater lors d'un déplacement à Angoulême la semaine dernière.
La future loi de modernisation agricole, qui viendra devant le Parlement l'année prochaine, complètera ce travail de revitalisation des territoires ruraux. Il en ira de même du Plan national pour l'Agro-alimentaire, que je prépare et qui doit permettre un nouveau partenariat entre tous les acteurs économiques concernés, producteurs et industriels, pour conforter leur compétitivité et celle du monde rural dans un environnement mondialisé.
Un effort sans précédent, qui va se poursuivre dans le temps
C'est donc un effort sans précédent qui a été engagé et qui se poursuivra, et le projet de loi y contribue largement. Mon rôle, aux côtés d'Hervé GAYMARD, qui a souhaité qu'un Secrétaire d'Etat vienne pour la première fois, depuis bien longtemps, renforcer l'action du ministère de l'Agriculture, sera notamment de veiller à la mise en oeuvre de ce texte, de le faire connaître et de le faire vivre. Je veux vous dire ici que j'y mettrai toute mon énergie. Je suis et je resterai donc à votre disposition pour, qu'ensemble, nous puissions donner au monde rural les clés et les moyens de son avenir. Cette loi est une " boîte à outils ". Elle ouvre des perspectives aux acteurs ruraux, qu'elles soient réglementaires, législatives ou financières. A eux de les utiliser ou de les mobiliser pour innover, pour concevoir et mener à bien des projets.
Ne nous y trompons pas : c'est donc un vaste chantier, sur le moyen terme, que nous ouvrons. Mon rôle est d'être à votre écoute. Pour avoir été parlementaire, de longue date, je sais vos besoins et vos attentes ! Je souhaite ainsi que nous puissions nous rencontrer régulièrement, pour faire le point ensemble sur les problématiques, comme sur les réussites, de nos territoires. Je pense par exemple à cette idée intéressante d'une conférence annuelle sur la ruralité, dont les modalités seront à définir. Nous pourrons ainsi poursuivre ensemble cette réflexion, à laquelle s'associent bien évidemment tous les ministres concernés. Car c'est une démarche transversale qui s'est engagée.
Ce texte s'inscrit pleinement dans les priorités tracées par le Président de la République et mises en oeuvre par le gouvernement de Jean-Pierre RAFFARIN, en mettant l'emploi au coeur du développement des territoires ruraux.
L'avenir des territoires ruraux implique et concerne, j'en suis convaincu, tous les Français, qui aspirent d'ailleurs de plus en plus à y retrouver un équilibre qu'ils ont souvent perdu au coeur des villes. En travaillant à garantir des conditions de vie égales en tous points du territoire et permettant une diversité d'emplois, mais aussi en recherchant une présence des services - notamment publics - indispensable mais adaptée, nous voulons apporter une véritable réponse à ces attentes légitimes.
" Il n'est de richesse que d'hommes " [Jean Bodin] : l'affirmation demeure plus juste que jamais. Sans agriculteurs, sans entreprises, sans artisans ou commerçants, sans professionnels libéraux, pas de vitalité, pas d'avenir pour un territoire. Ils forment le maillage du dynamisme et de l'innovation. Le projet de loi prévoit donc plusieurs mesures d'importance, afin de favoriser le développement des activités dans nos territoires ruraux. Ce que nous voulons, c'est désenclaver nos terroirs, leur redonner des moyens d'agir. Plusieurs de ces dispositions ont été enrichies par les débats à l'Assemblée ; je sais qu'elles le seront à nouveau par vos travaux.
Ainsi, le texte propose une meilleure reconnaissance de la pluri-activité, à travers notamment la simplification des règles de rattachement des pluri-actifs non salariés aux régimes sociaux. Il clarifie également la notion d'activité principale. Enfin, les récents débats ont permis de retenir les propositions du gouvernement relatives au rattachement social de leur conjoint collaborateur.
Le projet de loi favorise également la mutualisation de l'emploi entre plusieurs employeurs. Il élargit les possibilités de cumul d'un emploi public et d'un emploi privé, pour les agents de la fonction publique territoriale travaillant dans des communes de moins de 3500 habitants. C'est un lien vivant entre entreprises et collectivités : une commune pourra par exemple partager un emploi de conducteur d'engins avec une entreprise de travaux agricoles.
En encourageant les groupements d'employeurs, notamment par des incitations fiscales, notre texte va faciliter l'accès ou le retour à l'emploi, notamment pour les travailleurs saisonniers, susceptibles d'apporter leurs compétences à différents entrepreneurs. Nous avons veillé à cet égard à permettre aux groupements de constituer une réserve défiscalisée, afin de répondre au risque d'impayé des salaires et charges sociales. Hervé Gaymard me parlait récemment d'un emploi partagé entre la collecte de lait pour une coopérative et le transport de bois d'oeuvre pour un charpentier, en Bretagne. C'est un exemple significatif.
Mais nous avons voulu aller plus loin en faveur des travailleurs saisonniers, et rompre avec une situation de précarité trop courante. Des mesures en faveur de l'hébergement des saisonniers permettront ainsi de limiter le coût ou l'absence de logement. L'amortissement des gros travaux d'amélioration des habitations sera accéléré, la taxe d'habitation et la taxe foncière sur les propriétés bâties seront aménagées. Enfin, les conditions de scolarisation des enfants de travailleurs saisonniers vont être améliorées.
Et parce que notre gouvernement est particulièrement attaché à la formation professionnelle des salariés, les secteurs agricole ou du tourisme pourront désormais adapter les conditions d'accès au congé individuel de formation des salariés en contrat à durée déterminée. En outre, nous avons proposé de créer un CDD Formation, permettant aux saisonniers de se former entre deux contrats de travail tout en restant liés à l'entreprise.
J'ajoute que le projet de loi comporte des mesures favorisant la conclusion de contrats de travail hors ateliers protégés, pour les personnes souffrant de handicap.
J'évoquerai un dernier élément, dans la palette d'outils prévue par le texte, c'est le maintien et la rénovation du patrimoine immobilier et, par là même, l'accès au logement. Au-delà de la préservation de notre histoire, nous ne pouvons en effet chercher à attirer les entreprises, surtout les plus petites d'entre elles, à faciliter l'implantation ou la reprise d'exploitations, si nous ne veillons pas aussi à assurer une offre de logements suffisante en milieu rural.
Car nous sommes confrontés à un paradoxe, récent, mais réel : la crise du logement dans les zones rurales. Maisons ou fermes à l'abandon d'un côté, concentration dans les villes de l'autre : cette situation n'est pas tolérable. Le texte qui vous est proposé introduit donc une disposition favorable à la rénovation du patrimoine bâti, ainsi qu'à l'acquisition de logements en ZRR (zones de revitalisation rurale) : dans ce dernier cas, la location en résidence principale d'un logement rénové génèrera un taux de déduction forfaitaire des loyers de 40 %, au lieu de 6 % actuellement. De même, il sera possible pour un propriétaire, en fin de bail, de reprendre le bâtiment devenu inutile à son fermier, pour le rénover et le louer. Il s'agit là de mesures très importantes, tant du point de vue économique et social que pour la valorisation du patrimoine et des paysages, ainsi que de l'attractivité touristique.
Mais l'attractivité d'un territoire passe aussi par ses infrastructures et les services offerts aux populations concernées.
- Au-delà de la nécessaire qualité de vie à laquelle chaque citoyen aspire, c'est l'avenir du monde rural qui est ici en jeu. Réussir à attirer des hommes ou des entreprises dépend des conditions même de leur implantation.
Sur ce point, la concertation est nécessaire : concertation avec les élus, les citoyens, les administrations. Sachant qu'elle ne peut et ne doit pas être synonyme de lenteurs ou d'excessives complexités administratives. L'essentiel est de susciter des projets, d'innover, au-delà de positions qui ne seraient que défensives sur la question de l'adaptation des services en zone rurale. Ce qui est essentiel, c'est que la mission de service public soit assurée, en fonction des besoins. En milieu rural, il faut certainement être encore plus innovant qu'ailleurs, anticiper ! Il est, à cet égard, plus que jamais nécessaire que l'information des élus locaux soit claire et complète. Et je souhaite que ce soit le cas avec ce texte.
L'enrichissement de nos pays passe donc aussi par cet esprit de projet, cette capacité d'adaptation des services. Et c'est la voie choisie par le projet de loi. Ainsi, il propose de simplifier le régime juridique des Maisons de service public, afin qu'elles accueillent des services privés, ceci bien sûr dans le respect des règles de concurrence. L'Office National des Forêts, de son côté, pourra par exemple apporter son concours technique.
- J'en viens maintenant aux services en matière de santé ; c'est évidemment primordial. Pour cela, le texte propose d'instaurer une véritable coordination des aides accordées aux professions médicales, tant par les collectivités locales que par les organismes d'assurance maladie. Notre objectif est de favoriser la constitution de pôles de soins et ainsi d'assurer une présence médicale sur l'ensemble des territoires. Il nous apparaît, en effet, évident et essentiel de veiller à ce que perdure dans notre pays l'installation des médecins en zone rurale.
A cette fin, le projet de loi prévoit qu'un étudiant en médecine puisse bénéficier d'une indemnité d'étude s'il s'engage à exercer comme généraliste, au moins 5 ans, dans un territoire en déficit de soins. De plus, une collectivité locale pourra accorder des indemnités de logement et de déplacement à des étudiants de 3ème cycle de médecine générale qui effectuent des stages dans des zones déficitaires.
J'ajoute que dans les Zones de revitalisation rurale, médecins mais également vétérinaires pourront, toujours à l'initiative d'une collectivité, bénéficier de 2 à 5 ans d'exonération de taxe professionnelle pour leur installation ou leur regroupement. Cette disposition est d'ailleurs étendue au delà des ZRR pour les médecins s'installant dans des petites communes.
En conclusion, je dirais que le gouvernement a cherché, à travers ce projet de loi, à apporter des réponses au plus près du terrain, pragmatiques mais aussi des réponses ambitieuses afin d'offrir de véritables perspectives aux territoires ruraux et à tous ceux qui y vivent et y travaillent. Ce texte a pour objectif d'intégrer la diversité des territoires et leur dynamisme ; il a donc vocation à évoluer au fil du temps. J'entends y consacrer mon énergie. A plus court terme, il faudra également veiller à ce que les décrets d'application traduisent fidèlement l'esprit de la loi.
Je sais que vous aurez à coeur de permettre à ce " bouquet rural " de s'ouvrir encore davantage, par vos remarques et vos amendements. Il contient, nous en sommes sincèrement convaincus, les outils pour façonner l'avenir de nos terroirs, l'avenir de nos jeunes, l'avenir de nos emplois.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 29 avril 2004)
Messieurs les Ministres,
Messieurs les Rapporteurs,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Hervé GAYMARD vient d'exprimer, avec le talent et la conviction que chacun lui connaît, les ambitions et le contenu du projet de loi relatif au développement des territoires, dont nous entamons la discussion. Je ne reviendrai évidemment pas sur les mesures présentées, mais je voudrais développer devant vous une partie essentielle de notre projet, qui touche chaque citoyen, chaque acteur économique présent sur notre territoire : l'action résolue en faveur de l'emploi et le maintien d'une large offre de services dans le monde rural, qu'il nous faut conduire.
Ce projet traduit la confiance que nous portons au monde rural. Et c'est autour de la volonté, clairement affichée, de rendre leur attractivité aux territoires ruraux -attractivité économique, sociale, ou encore en termes de qualité de vie- que s'articulent en effet ces deux volets. C'est un signal fort qu'entend donner le gouvernement, un signal politique pour un monde rural vivant, attirant et durable. Je sais que cette détermination est partagée sur tous les bancs de votre assemblée.
Un projet qui s'inscrit dans une démarche globale.
Dans son discours d'Ussel en avril 2002, le Président de la République avait souligné que " la vérité du monde rural reste mal connue " : c'est particulièrement vrai aujourd'hui, dans une société qui connaît un rythme accéléré. Cette vérité est là. Elle n'appartient pas aux images du passé mais bien à une dynamique actuelle, moderne, diverse. Je vous le dis avec toute la conviction sincère de mon engagement pour le monde rural et pour le Berry depuis des années. C'est cette force que notre projet de loi veut faire émerger : celle née d'une grande diversité de situations, d'activités, d'emplois ; celle qui fait aller de l'avant le monde rural.
Hervé GAYMARD l'a dit : à la pluralité de nos territoires répond la large palette d'outils que nous avons voulu mettre à leur disposition dans ce texte. Il l'a souligné également, cette loi s'inscrit dans une démarche globale et cohérente, qui entend donner au monde rural les clés de son futur. Les mesures adoptées lors de précédents CIADT, les dispositions de la loi sur l'initiative économique, celles des lois de finances, le soutien à l'exportation pour les PME, les efforts très importants engagés par le gouvernement pour assurer rapidement l'accès du monde rural aux nouvelles technologies de l'information et de la communication (téléphonie mobile, Internet haut débit...). Tout cela va dans la même direction : aider le monde rural à réussir sa mutation, à se projeter dans l'avenir.
Cette mutation est déjà bien engagée. C'est une nouvelle ruralité qui s'esquisse, avec des entreprises performantes, avec la multiplication des partenariats de développement local entre les collectivités territoriales, les intercommunalités et l'Etat, et notamment l'utilisation efficace du levier des fonds européens, ou encore avec un réseau d'établissements d'enseignement agricole qui sont et doivent demeurer de véritables filières de réussite -j'ai pu encore récemment le constater lors d'un déplacement à Angoulême la semaine dernière.
La future loi de modernisation agricole, qui viendra devant le Parlement l'année prochaine, complètera ce travail de revitalisation des territoires ruraux. Il en ira de même du Plan national pour l'Agro-alimentaire, que je prépare et qui doit permettre un nouveau partenariat entre tous les acteurs économiques concernés, producteurs et industriels, pour conforter leur compétitivité et celle du monde rural dans un environnement mondialisé.
Un effort sans précédent, qui va se poursuivre dans le temps
C'est donc un effort sans précédent qui a été engagé et qui se poursuivra, et le projet de loi y contribue largement. Mon rôle, aux côtés d'Hervé GAYMARD, qui a souhaité qu'un Secrétaire d'Etat vienne pour la première fois, depuis bien longtemps, renforcer l'action du ministère de l'Agriculture, sera notamment de veiller à la mise en oeuvre de ce texte, de le faire connaître et de le faire vivre. Je veux vous dire ici que j'y mettrai toute mon énergie. Je suis et je resterai donc à votre disposition pour, qu'ensemble, nous puissions donner au monde rural les clés et les moyens de son avenir. Cette loi est une " boîte à outils ". Elle ouvre des perspectives aux acteurs ruraux, qu'elles soient réglementaires, législatives ou financières. A eux de les utiliser ou de les mobiliser pour innover, pour concevoir et mener à bien des projets.
Ne nous y trompons pas : c'est donc un vaste chantier, sur le moyen terme, que nous ouvrons. Mon rôle est d'être à votre écoute. Pour avoir été parlementaire, de longue date, je sais vos besoins et vos attentes ! Je souhaite ainsi que nous puissions nous rencontrer régulièrement, pour faire le point ensemble sur les problématiques, comme sur les réussites, de nos territoires. Je pense par exemple à cette idée intéressante d'une conférence annuelle sur la ruralité, dont les modalités seront à définir. Nous pourrons ainsi poursuivre ensemble cette réflexion, à laquelle s'associent bien évidemment tous les ministres concernés. Car c'est une démarche transversale qui s'est engagée.
Ce texte s'inscrit pleinement dans les priorités tracées par le Président de la République et mises en oeuvre par le gouvernement de Jean-Pierre RAFFARIN, en mettant l'emploi au coeur du développement des territoires ruraux.
L'avenir des territoires ruraux implique et concerne, j'en suis convaincu, tous les Français, qui aspirent d'ailleurs de plus en plus à y retrouver un équilibre qu'ils ont souvent perdu au coeur des villes. En travaillant à garantir des conditions de vie égales en tous points du territoire et permettant une diversité d'emplois, mais aussi en recherchant une présence des services - notamment publics - indispensable mais adaptée, nous voulons apporter une véritable réponse à ces attentes légitimes.
" Il n'est de richesse que d'hommes " [Jean Bodin] : l'affirmation demeure plus juste que jamais. Sans agriculteurs, sans entreprises, sans artisans ou commerçants, sans professionnels libéraux, pas de vitalité, pas d'avenir pour un territoire. Ils forment le maillage du dynamisme et de l'innovation. Le projet de loi prévoit donc plusieurs mesures d'importance, afin de favoriser le développement des activités dans nos territoires ruraux. Ce que nous voulons, c'est désenclaver nos terroirs, leur redonner des moyens d'agir. Plusieurs de ces dispositions ont été enrichies par les débats à l'Assemblée ; je sais qu'elles le seront à nouveau par vos travaux.
Ainsi, le texte propose une meilleure reconnaissance de la pluri-activité, à travers notamment la simplification des règles de rattachement des pluri-actifs non salariés aux régimes sociaux. Il clarifie également la notion d'activité principale. Enfin, les récents débats ont permis de retenir les propositions du gouvernement relatives au rattachement social de leur conjoint collaborateur.
Le projet de loi favorise également la mutualisation de l'emploi entre plusieurs employeurs. Il élargit les possibilités de cumul d'un emploi public et d'un emploi privé, pour les agents de la fonction publique territoriale travaillant dans des communes de moins de 3500 habitants. C'est un lien vivant entre entreprises et collectivités : une commune pourra par exemple partager un emploi de conducteur d'engins avec une entreprise de travaux agricoles.
En encourageant les groupements d'employeurs, notamment par des incitations fiscales, notre texte va faciliter l'accès ou le retour à l'emploi, notamment pour les travailleurs saisonniers, susceptibles d'apporter leurs compétences à différents entrepreneurs. Nous avons veillé à cet égard à permettre aux groupements de constituer une réserve défiscalisée, afin de répondre au risque d'impayé des salaires et charges sociales. Hervé Gaymard me parlait récemment d'un emploi partagé entre la collecte de lait pour une coopérative et le transport de bois d'oeuvre pour un charpentier, en Bretagne. C'est un exemple significatif.
Mais nous avons voulu aller plus loin en faveur des travailleurs saisonniers, et rompre avec une situation de précarité trop courante. Des mesures en faveur de l'hébergement des saisonniers permettront ainsi de limiter le coût ou l'absence de logement. L'amortissement des gros travaux d'amélioration des habitations sera accéléré, la taxe d'habitation et la taxe foncière sur les propriétés bâties seront aménagées. Enfin, les conditions de scolarisation des enfants de travailleurs saisonniers vont être améliorées.
Et parce que notre gouvernement est particulièrement attaché à la formation professionnelle des salariés, les secteurs agricole ou du tourisme pourront désormais adapter les conditions d'accès au congé individuel de formation des salariés en contrat à durée déterminée. En outre, nous avons proposé de créer un CDD Formation, permettant aux saisonniers de se former entre deux contrats de travail tout en restant liés à l'entreprise.
J'ajoute que le projet de loi comporte des mesures favorisant la conclusion de contrats de travail hors ateliers protégés, pour les personnes souffrant de handicap.
J'évoquerai un dernier élément, dans la palette d'outils prévue par le texte, c'est le maintien et la rénovation du patrimoine immobilier et, par là même, l'accès au logement. Au-delà de la préservation de notre histoire, nous ne pouvons en effet chercher à attirer les entreprises, surtout les plus petites d'entre elles, à faciliter l'implantation ou la reprise d'exploitations, si nous ne veillons pas aussi à assurer une offre de logements suffisante en milieu rural.
Car nous sommes confrontés à un paradoxe, récent, mais réel : la crise du logement dans les zones rurales. Maisons ou fermes à l'abandon d'un côté, concentration dans les villes de l'autre : cette situation n'est pas tolérable. Le texte qui vous est proposé introduit donc une disposition favorable à la rénovation du patrimoine bâti, ainsi qu'à l'acquisition de logements en ZRR (zones de revitalisation rurale) : dans ce dernier cas, la location en résidence principale d'un logement rénové génèrera un taux de déduction forfaitaire des loyers de 40 %, au lieu de 6 % actuellement. De même, il sera possible pour un propriétaire, en fin de bail, de reprendre le bâtiment devenu inutile à son fermier, pour le rénover et le louer. Il s'agit là de mesures très importantes, tant du point de vue économique et social que pour la valorisation du patrimoine et des paysages, ainsi que de l'attractivité touristique.
Mais l'attractivité d'un territoire passe aussi par ses infrastructures et les services offerts aux populations concernées.
- Au-delà de la nécessaire qualité de vie à laquelle chaque citoyen aspire, c'est l'avenir du monde rural qui est ici en jeu. Réussir à attirer des hommes ou des entreprises dépend des conditions même de leur implantation.
Sur ce point, la concertation est nécessaire : concertation avec les élus, les citoyens, les administrations. Sachant qu'elle ne peut et ne doit pas être synonyme de lenteurs ou d'excessives complexités administratives. L'essentiel est de susciter des projets, d'innover, au-delà de positions qui ne seraient que défensives sur la question de l'adaptation des services en zone rurale. Ce qui est essentiel, c'est que la mission de service public soit assurée, en fonction des besoins. En milieu rural, il faut certainement être encore plus innovant qu'ailleurs, anticiper ! Il est, à cet égard, plus que jamais nécessaire que l'information des élus locaux soit claire et complète. Et je souhaite que ce soit le cas avec ce texte.
L'enrichissement de nos pays passe donc aussi par cet esprit de projet, cette capacité d'adaptation des services. Et c'est la voie choisie par le projet de loi. Ainsi, il propose de simplifier le régime juridique des Maisons de service public, afin qu'elles accueillent des services privés, ceci bien sûr dans le respect des règles de concurrence. L'Office National des Forêts, de son côté, pourra par exemple apporter son concours technique.
- J'en viens maintenant aux services en matière de santé ; c'est évidemment primordial. Pour cela, le texte propose d'instaurer une véritable coordination des aides accordées aux professions médicales, tant par les collectivités locales que par les organismes d'assurance maladie. Notre objectif est de favoriser la constitution de pôles de soins et ainsi d'assurer une présence médicale sur l'ensemble des territoires. Il nous apparaît, en effet, évident et essentiel de veiller à ce que perdure dans notre pays l'installation des médecins en zone rurale.
A cette fin, le projet de loi prévoit qu'un étudiant en médecine puisse bénéficier d'une indemnité d'étude s'il s'engage à exercer comme généraliste, au moins 5 ans, dans un territoire en déficit de soins. De plus, une collectivité locale pourra accorder des indemnités de logement et de déplacement à des étudiants de 3ème cycle de médecine générale qui effectuent des stages dans des zones déficitaires.
J'ajoute que dans les Zones de revitalisation rurale, médecins mais également vétérinaires pourront, toujours à l'initiative d'une collectivité, bénéficier de 2 à 5 ans d'exonération de taxe professionnelle pour leur installation ou leur regroupement. Cette disposition est d'ailleurs étendue au delà des ZRR pour les médecins s'installant dans des petites communes.
En conclusion, je dirais que le gouvernement a cherché, à travers ce projet de loi, à apporter des réponses au plus près du terrain, pragmatiques mais aussi des réponses ambitieuses afin d'offrir de véritables perspectives aux territoires ruraux et à tous ceux qui y vivent et y travaillent. Ce texte a pour objectif d'intégrer la diversité des territoires et leur dynamisme ; il a donc vocation à évoluer au fil du temps. J'entends y consacrer mon énergie. A plus court terme, il faudra également veiller à ce que les décrets d'application traduisent fidèlement l'esprit de la loi.
Je sais que vous aurez à coeur de permettre à ce " bouquet rural " de s'ouvrir encore davantage, par vos remarques et vos amendements. Il contient, nous en sommes sincèrement convaincus, les outils pour façonner l'avenir de nos terroirs, l'avenir de nos jeunes, l'avenir de nos emplois.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 29 avril 2004)