Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Le bilan de 2003 peut se résumer en un double constat :
- la perception d'une volonté réelle de réforme, moderniser, adapter notre secteur public
- mais aussi le sentiment d'une blessure des agents qui ne veulent plus apparaître comme des boucs émissaires, ni subir sous la contrainte, des réformes.
2003 fut aussi une année essentielle, celle de la réforme des retraites mais aussi celle de l'ouverture de nombreux chantiers.
2003 fut une année de confrontation.
2004 sera une année de concrétisation et d'aboutissement des chantiers ouverts et l'année d'un dialogue social nouveau tournant le dos à la logique de confrontation pour tendre vers celle de la responsabilisation.
Ceci nécessitera lisibilité des missions de service public, responsabilisation des agents, respect de l'usager.
Ceci nécessite d'uvrer pour la simplification dans un monde de plus en plus complexe. Avec Henri Plagnol nous poursuivrons l'uvre de simplification par ordonnances. Si, au début, beaucoup doutaient de la démarche, chacun convient qu'elle est pertinente et que nous avons d'ores et déjà matière pour deux ou trois Lois.
Je voudrais ainsi saluer les qualités, le bon sens, le pragmatisme affichés par Henri Plagnol et son équipe. Je voudrais aussi remercier les nombreuses propositions de simplification issues du local, plus d'ailleurs que du niveau central.
Longtemps l'Etat s'est protégé derrière une opacité qui le rendait parfois inaccessible voire incompréhensible ; le temps de l'Etat au quotidien, de l'Etat partenaire, de l'Etat plus réactif est venu - et de ce point de vue le travail que nous menons est indispensable. Il s'agit pour nous de concilier la simplification des accès, des services et la complexité du traitement. Concilier également une vision prospective et un accompagnement quotidien.
Par-delà l'aspect sévère, parfois austère, des sujets que nous traitons, nous avons reçu une mission exaltante : celle de réformer notre Etat. Les sujets qui touchent aux questions de personnel sont totalement stratégiques. Elles sont au cur de tout projet de changement qui ne peut se faire qu'en se fondant sur la mobilisation et la confiance des personnels impliqués.
Vous êtes, les uns et les autres, des observateurs attentifs de ce ministère, certains parmi vous suivent nos dossiers avec le recul de l'action de mes prédécesseurs, et je dois rendre hommage à votre capacité de rendre accessibles à vos lecteurs nos sujets.
2003 restera, je le crois, comme je le disais à l'instant, l'année où nous avons fait bouger les lignes. Cela veut dire quoi, " faire bouger les lignes " ?
Cela veut simplement dire qu'il n'y a pas eu de " grand soir " de la réforme mais plutôt une politique de petits pas qui, ajoutés les uns aux autres, nous ont permis, insensiblement, d'avancer vers nos objectifs de manière irréversible. Nous avons affirmé une volonté d'aboutir quels que soient les obstacles, recherché une lisibilité en ayant vis-à-vis des partenaires sociaux un discours responsable et clair et nous avons proposé un schéma de réforme qui repose sur trois piliers :
- responsabilisation des agents,
- optimisation des coûts,
- clarification des objectifs.
C'est une pratique réaliste de la politique; mais c'est surtout une pratique respectueuse des partenaires sociaux et à travers eux des fonctionnaires car le changement quel qu'il soit, s'il exige une clarté des objectifs, suscite comme premier mouvement inquiétude et résistance.
C'est pourquoi s'est installé dans notre pays le sentiment résigné de l'impossibilité de la réforme. Ce sentiment vient pour les uns de la crainte d'affronter les mécontentements et pour les autres d'une préférence pour le confort plutôt que pour le risque.
Personne ne peut imaginer que le service public puisse rester immobile quand les forces démographique, économiques, sociales et culturelles bousculent les attentes et les comportements.
C'est pourquoi le Gouvernement conduit sous la direction du Premier ministre, et en association avec le Parlement, un important programme de modernisation des structures, des méthodes, des pratiques de nos administrations. Le service public n'est pas un monde coupé de la société ; il est un corps social qui ne doit sa légitimité qu'à son efficacité et donc à sa capacité d'adaptation.
Je mesure bien que certains mots ont pu fâcher ! Celui " d'efficacité " ne fait aujourd'hui plus vraiment partie de ceux là.
D'autres mots sont apparus dans un monde ou les symboles ont souvent force de dogmes ; performance, salaire au mérite, productivité, contrats d'objectifs, mobilité, évaluation, décloisonnement, équité entre les français, expérimentations, formation continue, seconde carrière
Par-delà les mots, nous avons fini l'année 2003 en respectant notre calendrier de parution des décrets d'application de la réforme des retraites ; cette réforme a permis de sauver le régime par répartition ; je sais bien qu'un effort a été demandé aux fonctionnaires et que le sujet des retraites reste une véritable source d'inquiétudes pour eux à laquelle nous devrons répondre.
Nous allons achever la mise en place de la réforme de l'Ecole nationale d'administration, et traduire dans les faits les termes de ma communication du 22 octobre sur l'encadrement supérieur. Déjà, depuis le 1er janvier, les ministres doivent désigner auprès d'eux un responsable de la gestion des cadres supérieurs, qui est notamment chargé de leur proposer le contenu de la lettre de mission que recevront les directeurs nouvellement nommés.
Là encore, nous avons fait " bouger les lignes " avec une volonté politique de rupture ; nous sommes passés du temps de la résignation à celui du volontarisme.
Pour achever ce qui a été fait l'an dernier nous devrons assurer le suivi du relevé de conclusion du 15 mai et nous mettrons en place rapidement le régime additionnel de retraites sur les primes en concertation avec les organisations syndicales.
Pour commencer l'année 2004 je voudrai vous livrer une réflexion qui prolonge les actions que nous avons livrées en 2003 :
Je suis frappé par les difficultés que nos rencontrons dans l'information des fonctionnaires. Si je prends l'exemple des retraites j'ai constaté ces derniers temps que beaucoup de rumeurs circulaient et que des fonctionnaires de bonne foi avaient des difficultés pour accéder à une information juste. Nous avons assuré avec le concours de la CNRACL la diffusion d'une brochure de 48 pages à 4 millions d'exemplaires. Nous avons donné toutes les informations utiles sur les sites web des ministères et des différentes administrations.
Nous avons démarré la formation des fonctionnaires des services de pensions dès le mois de septembre. Malgré cela beaucoup de fonctionnaires sont encore désarmés et sous informés c'est pourquoi nous allons tester dans les prochaines semaines un nouveau moteur de calcul du montant de la pension que nous rendrons disponible sur Internet.
Plus globalement, je m'interroge sur les moyens dont dispose l'Etat employeur pour toucher individuellement chaque fonctionnaire et donner une information correcte aux agents sur les sujets les concernant. C'est un grand chantier que j'ouvre en ce début d'année.
Concernant l'aménagement du territoire ; nous avons tenu plusieurs CIADT - celui des contrats de site, celui du rural et celui des infrastructures.
Mon ambition dans ce domaine souvent partagée par d'autres ministères est de veiller au respect de trois exigences ; nous doter d'outils d'anticipation des mutations économiques, d'outils d'accompagnement de ces mutations, et construire à moyen et long terme l'égalité des territoires. Ces exigences nous les retrouvons de façon précise et avec ambition dans les trois CIADT.
- Celui de mai, consacré aux mutations économiques et à la définition des contrats de site.
- Celui de septembre qui a permis de mettre en avant les potentialités des campagnes qui ont cessé, nous l'avons démontré, d'être les oubliées de l'Etat. Ce CIADT fut également consacré à l'annonce du projet de loi sur le développement rural et je serai cet après-midi aux cotés d'Hervé Gaymard pour le soutenir.
- Celui de décembre, celui des grandes infrastructures dont notre pays a besoin notamment pour rompre l'isolement de nombreux territoires, les relier à l'Europe, leur donner toute leur place.
Nous avons très significativement avancé sur quelques sujets complémentaires ; la téléphonie mobile avec l'adoption du plan de couverture qui concerne plus de 3000 communes rurales ; l'extension du haut débit, nous avons sur ce sujet enfin réuni toutes les conditions juridiques, techniques et financières ; le niveau de consommation des crédits européens qui a prouvé que l'on peut concilier simplification et efficacité puisque nous sommes passé de 14% à 51% de programmation, que toutes les régions ont échappé au 31 décembre au dégagement d'office et qu'ainsi la réserve de performance pourrait apporter 273M supplémentaires de crédits européen.
Je pense aussi à la DATAR qui doit maintenant avancer rapidement elle aussi sur la voie de la réforme pour revenir à l'esprit originel d'une administration de mission.
Nous avons le devoir de traduire les orientations du Président de la République et du Premier ministre dans les travaux que nous conduisons. Mon ministère s'y emploiera en 2004.
Nous allons déboucher concrètement sur le sujet de la réforme de la Gestion des ressources humaines ; dans le respect du dialogue social, après une concertation approfondie, un projet de loi sera élaboré pour traduire cette rénovation en termes statutaires, notamment dans la fonction publique territoriale. Il devrait être prêt dans le courant du printemps et portera sur le recrutement, la formation, la mobilité, la déontologie, l'ouverture aux ressortissants communautaires, la situation des non-titulaires.
La semaine dernière je suis allé en Charente parce qu'en juillet 2003 j'avais réuni ici tous les Présidents des grands entreprises publiques, les responsables des services de l'Etat et les élus locaux pour leur demander, sous l'autorité du Préfet, de faire des propositions concrètes d'améliorations de l'offre de services publics.
Le rapport que m'a remis le préfet est à votre disposition; je ne citerai qu'un seul exemple celui du service postal auquel, vous le savez bien, nos concitoyens et leurs élus locaux sont tout particulièrement attachés ; en Charente, l'ouverture d'un point poste dans le café d'un village de 277 habitants a permis un accès au service pendant près de 65 heures hebdomadaires au lieu des 4 heures d'ouverture de l'ancien bureau.
Je réunirai donc d'ici la fin du mois de février tous ceux qui ont signé la convention du 21 juillet, les partenaires des quatre départements concernés par ces expériences, les élus locaux, les 19 présidents d'organismes publics (EDF, Poste, ANPE, services déconcentrés); nous ferons le bilan ; je proposerai au Premier Ministre d'étendre à d'autres départements volontaires ces expériences.
Cette évolution des structures implique évidemment une évolution forte des agents qui nécessite avec nos partenaires sociaux un travail confiant - plus confiant ; c'est, je crois, le gage d'efficacité nécessaire pour avancer dans le sens d'une réforme guidée par des diagnostics et des objectifs partagés. Le dialogue social reprend.
Je souhaite qu'il soit intense et productif, à partir des contributions de l'administration et de celles des partenaires sociaux.
Le calendrier des travaux du semestre fait actuellement l'objet de discussions entre mon cabinet et les syndicats ; je l'officialiserai dans quelques jours avec les partenaires sociaux au cours d'une nouvelle table ronde qui aura lieu le 27 janvier prochain et qui marquera le lancement de la rénovation du dialogue social.
Je souhaite que nous passions d'une logique de la confrontation à une logique de la responsabilisation mutuelle, tout en veillant à bien identifier les frontières du champ politique et du champ syndical.
Les syndicats sont une force de proposition et ils doivent pouvoir exercer dans les meilleures conditions leur pouvoir d'interpellation du politique ; mais il appartient au politique de prendre ses responsabilités, d'affirmer des choix qu'il estime conforme à l'intérêt général.
Toutefois, je ne crois pas à une réforme de l'Etat conduite sous la contrainte. Je ne dis pas ça pour des raisons tactiques, mais parce que le vrai changement s'inscrit dans la durée d'un travail collectif et partenarial.
Parmi les grandes actions que nous conduirons en 2004, il y a la réaffirmation du principe républicain de la neutralité du service public et de sa laïcité. Dans son discours du 17 décembre dernier, le Président de la République a demandé qu'un " code de la laïcité " réunisse tous les principes et les règles afférentes. Ce code sera remis à tous les fonctionnaires et agents publics le jour de leur prise de fonction et nous le rédigerons en liaison avec toutes les parties intéressées.
Je veux également évoquer devant vous quatre chantiers essentiels pour 2004 rappelés par le Président de la République à l'occasion de la cérémonie des vux aux corps constitués ; le deuxième projet de Loi d'habilitation à simplifier le droit ; la généralisation sur l'ensemble du territoire du numéro unique de renseignements administratifs, le 39 39 ; le lancement des chartes Marianne sur la qualité du service et enfin le plan pour l'administration électronique.
En conclusion je réaffirme ma conviction que la mondialisation nécessite plus que jamais de se battre pour notre modèle français de régulation publique, que ce soit dans le domaine social, économique, culturel et territorial. Défendre notre service public c'est l'adapter aux exigences du 21ème siècle.
Pour terminer je vous renouvelle mes meilleurs vux.
(source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 16 janvier 2004)