Interview de M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, porte-parole du gouvernement, à BFM le 9 février 2005, sur le calendrier des privatisations d'entreprises publiques, la fiscalité des donations et la modernisation des douanes.

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Média : BFM

Texte intégral

Q- Je voudrais que l'on démarre avec vous avec le programme de privatisations. Hier, H. Gaymard a présenté le calendrier : la Sanef, Gaz de France, Areva, EDF. Un mot sur ADP : il y a une polémique sur l'ouverture du capital. F. Goulard, le secrétaire d'Etat aux Transports, dit que le projet n'est pas retardé par l'accident du 2E, P. Devedjian dit que cela n'aura pas lieu cette année, justement, à cause de cet effondrement. Le Figaro Economie, ce matin, croit savoir que le débat prévu aujourd'hui à l'Assemblée a été reporté au 10 mars, à cause du texte sur les 35 heures ; qu'en est-il exactement ?
R- Oui, hélas ! C'est plutôt une question de calendrier de travail. Vous avez vu, qu'effectivement, le projet de texte sur 35 heures a été retardé par l'obstruction socialiste au Parlement et c'est vrai que tout cela a un peu désorganisé le calendrier parlementaire mais il n'y a pas de lien entre les deux.
Q- Ce serait donc le 10 mars que l'on commencera à examiner ADP ?
R- En tout état de cause, c'était compliqué aujourd'hui, compte tenu du décalage lié au texte des 35 heures. Je sais qu'il est reporté de quelques jours, je ne peux pas vous en dire plus sur la date, je ne la connais pas.
Q- La Sanef, Gaz de France, Areva, EDF, autant de privatisations... Est-ce que le marché peut accueillir autant de titres ? Il y en aura quand même pour 20 milliards d'euros !
R- C'est la raison pour laquelle, nous l'avons rappelé hier avec H. Gaymard, c'est un sujet sur lequel il faut voir les conditions du marché. C'est un calendrier indicatif mais qui semble en cohérence avec le développement de ces entreprises. Il ne faut jamais perdre de vue que les projets d'ouverture du capital qui sont faits à propos des entreprises publiques, sont d'abord dans l'intérêt de l'entreprise et des salariés. Et bien sûr, il faut que toutes les conditions puissent être réunies pour qu'elles puissent être faites.
Q- Calendrier indicatif... Mais est-ce que ce n'est pas trop ambitieux, notamment pour EDF, avant 2006 ? Parce que le problème ce sera surtout EDF qui a de gros problèmes de structure financière à régler avant d'aller en Bourse ?
R- Ce calendrier, encore une fois, est indicatif. Je crois que sur ce point, nous allons voir comment tout cela se déroule durant l'année. Et il y a aussi, pour cette entreprise comme pour les deux autres des potentiels formidables et les ouvertures de capital sont en parfaite cohérence avec leur structure, leur organisation et le projet d'entreprise de chacune de ces grandes maisons.
Q- Parmi les mesures annoncées hier par vous-même et par H. Gaymard, la poursuite de la franchise de droits sur les donations, avec une révision à la hausse du plafond. Le PS vous accuse de favoriser la promotion par l'héritage, que répondez-vous notamment à E. Besson ?
R- Je réponds que les temps ont changé et que l'heure n'est plus à mélanger sans arrêt l'idéologie et l'économie. Il y a dans notre programme, notamment dans le domaine fiscal, de quoi répondre aux attentes de tous les Français, qu'il s'agisse de ce que j'ai proposé pour la prime pour l'emploi, de l'impôt sur le revenu ou encore pour ce qui concerne les donations. Nous avons tous pu constater que la mesure avait connu un très bon succès et il nous a semblé que si l'on portait ce plafond de 20 à 30 000 euros, il y avait de quoi aller chercher d'autres stimulations pour l'économie, puisque c'est cela l'intérêt, c'est d'encourager un certain nombre de nos concitoyens dans le domaine des donations pour que cela soit recyclé dans l'économie au profit des jeunes générations. Et le fait de le reconduire jusqu'au 31 décembre 2005, est aussi une opportunité pour les Français qui le souhaitent de mieux organiser les donations. Je crois donc que tout cela va dans le bon sens, surtout dans un contexte qui est celui d'aller stimuler la croissance et d'aller la chercher dixième après dixième. Je crois qu'il y a d'un côté les gens qui font de la polémique et de l'idéologie, de l'autre, ceux qui essaient tout simplement d'aller chercher la croissance de manière très pragmatique. C'est dans cet esprit que nous sommes avec H. Gaymard.
Q- Les douaniers sont appelés à la grève aujourd'hui ; vous êtes le ministre des douaniers en tant que ministre du Budget. Les agents protestent contre le démantèlement de leur mission, les manques de moyens. Qu'allez-vous leur apporter ?
R- Je veux d'abord les rassurer sur le fait que la Direction générale des Douanes qui es une direction absolument majeure pour assurer une mission prioritaire pour le Gouvernement qui est celui du contrôle des marchandises, bien sûr, mais aussi de la lutte contre la drogue, contre les stupéfiants. Les Français ne savent pas toujours que c'est grâce aux douanes que l'on arrive à saisir plus des trois quarts du cannabis par exemple. Donc, ce qui est en place aujourd'hui, c'est un projet qui vise à une modernisation en profondeur, de telle sorte que nos douaniers puissent avoir des moyens supplémentaires. Le problème, c'est que pendant toutes ces dernières années, l'Etat qui n'amortissait pas ses investissements n'avait pas assuré le renouvellement, dans de bonnes conditions, du matériel. Une partie de ce matériel est obsolète, voire dangereux dans son utilisation. Il faut donc le renouveler, le moderniser. C'est dans cet esprit que nous travaillons et je veux à la fois, de ce point de vue, leur adresser un message d'apaisement et aussi leur dire combien nous sommes, les uns et les autres, très engagés pour que la Douane puisse accomplir le mieux possible ses missions.
Q- Le camp du oui à la Constitution européenne se réduit - l'écart se resserre à 60-40 environ, selon les derniers sondages - il y a les manifs anti-Gouvernement, il y a la crise à la CGT, et puis il y a le voyage de J.-L. Debré en Turquie. Au sein de l'UMP, nombreux sarkozystes l'accusent d'avoir desservi le oui au référendum. Le président de l'Assemblée nationale devait-il mener cette mission ? Etait-ce vraiment utile ?
R- Je n'ai pas de commentaire à faire. Je crois que le président de l'Assemblée nationale a mené une mission comme il s'en fait souvent à l'Assemblée nationale à l'étranger. Il y a, effectivement, de ce point de vue, cette mission parlementaire en Turquie...
Q- ...Un peu particulière cette fois !
R- Oui, mais je crois que l'heure, de ce point de vue, ne doit pas être à la polémique et doit être à la mobilisation, parce que l'essentiel pour nous est de faire campagne en montrant et en convainquant nos concitoyens que le rendez-vous historique avec l'Europe, à travers cette Constitution, c'est une manière de répondre aux grandes inquiétudes exprimées par ceux qui seraient tentés de voter non dans tous les domaines. Vous en avons eu une bonne illustration samedi à l'occasion de la manifestation : beaucoup de banderoles étaient un appel à voter non au référendum pour des raisons sociales. Je veux rappeler que dans le traité constitutionnel européen, il y a des réponses très concrètes sur le plan social aux inquiétudes de beaucoup de nos concitoyens, car grâce au traité européen, sont désormais consacrés au niveau européen les droits des partenaires sociaux, la protection des salariés, la protection des services publics. Tout ça, c'est dans le traité européen. Si ce traité n'est pas voté, cela signifierait qu'il n'y aurait pas, au niveau européen, la consécration de ces grands principes. C'est un exemple parmi d'autres de raisons pour voter oui à ce traité, il y en aurait bien d'autres.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 9 février 2005)