Texte intégral
Mes chers amis,
Voici donc que s'achèvent mes premières universités d'été en tant que président de l'UMP. L'an passé, à la même époque, je n'étais que candidat. J'avais des projets. Aujourd'hui je suis votre président, je dois en assumer les responsabilités, justifier d'une action, fixer des perspectives. C'est une tâche exaltante. J'y ai consacré, depuis 9 mois, le meilleur de moi-même.
Les 19 mois qui viennent vont nous conduire aux échéances présidentielles et législatives de 2007. Mon ambition est claire : que nous gagnions. Mon rôle est simple, vous conduire à la victoire. Mon travail doit tout entier être tourné vers cet objectif unique, celui de notre succès collectif.
Que personne n'en doute, je sais d'expérience que nous gagnerons tous ensemble ou que nous perdrons tous ensemble. Je veux mettre mon énergie au service de notre famille, de toute notre famille. Il ne s'agit pas pour moi d'une aventure individuelle, mais bien d'une responsabilité que vous m'avez confiée, que j'assume au nom de tous et pour tous : la victoire de l'UMP aux législatives et présidentielles de 2007.
Pour cela, je voudrais vous proposer une première orientation, celle qui consiste pour chacun de nous, délibérément, à choisir " de faire de la politique ". Je ne m'inscris pas dans cette mode qui fait dire à tant d'observateurs que la politique ne sert à rien, que les politiques ne peuvent plus rien, que la gauche et la droite, c'est pareil - comprenez qu'elles seraient devenues également impuissantes - que les difficultés de la France et du monde sont si grandes, qu'il n'y aurait rien à faire.
Eh bien, je conteste frontalement ce fatalisme qui n'est rien d'autre qu'une forme de démission. Dans mon esprit la politique, c'est justement l'art de trouver et de créer des marges de manuvre, là où tous les techniciens restent interdits et incapables d'imaginer la voie étroite qui permettra de surmonter les difficultés.
Il ne faut pas s'excuser de faire de la politique, il faut revendiquer ce choix car faire de la politique, c'est le choix de la démocratie et de l'efficacité. La politique, c'est noble, c'est utile, c'est exigeant et difficile.
Ce n'est pas de trop de débats politiques que souffre la France, c'est au contraire le fait qu'il n'y en ait plus assez et même parfois plus du tout qui cause les problèmes et les fractures de notre démocratie française.
J'affirme qu'en France on ne débat pas assez, les techniciens ont trop la parole et les politiques ont renoncé à porter les choix fondateurs pour notre pays.
La politique, cela consiste à dire la vérité, à être lucide et, par-dessus tout, à donner une cohérence aux aspirations souvent contradictoires de nos compatriotes. Parler au nom du peuple, comprendre ses attentes, interpréter ses besoins, réaliser ses aspirations : c'est bien ce qu'il y a de plus difficile à faire. Mais c'est justement le premier devoir des responsables politiques que nous sommes. Et les Français, contrairement à ce qu'on peut souvent entendre, restent " passionnés " par cette façon de faire de la politique.
Sans doute, y a-t-il aussi peu de pays comme la France, où l'on est autant intéressé par la vraie politique, la grande politique, la politique la plus noble.
Qu'ont voulu dire les Français en portant Jean-Marie Le Pen au 2e tour de la présidentielle en 2002 ? Qu'ont-ils voulu dire ces mêmes Français, le 29 mai, en répondant massivement non au référendum sur l'Europe ? Quel était le sens profond de leur message lorsqu'ils nous ont sanctionnés dans 20 régions sur 22, au printemps 2004 ?
Que personne ne compte sur moi pour minimiser la gravité de la crise politique, que connaît notre pays depuis trois ans. Quand les Français s'expriment, je ne serai pas à la hauteur de mes responsabilités si je ne tentais pas de regarder leur message tel qu'il est et non pas tel que j'aurais souhaité qu'il fut.
Ces questions ne sont pas anecdotiques. J'ai le sentiment qu'on n'y a pas répondu, ou alors imparfaitement, ou en tout cas insuffisamment. Les problèmes restent posés, et il faudra bien s'y atteler. Cela sera même l'enjeu majeur de la présidentielle de 2007.
Vous le savez, je suis intimement convaincu que les Français attendent de nous que nous préparions, non une alternance classique à laquelle ils ne croient plus, mais la rupture avec les habitudes, les conformismes et les insuffisances de la vie politique traditionnelle. Je vous le demande, je souhaite que l'UMP incarne le changement le plus profond et le plus rapide. Nous devons tirer les conséquences de ces trois crises majeures en proposant une stratégie de rupture avec les trente dernières années de la vie politique classique, dans notre pays.
SI nous faisons de la politique comme les autres, nous serons balayés comme les autres et nous serons battus à notre tour. On n'attend pas de nous de faire de la politique comme les autres.
À mes yeux, la grande question que se posent les Français, commune à toutes ces crises que nous avons connues, est celle de savoir si l'avenir peut être source d'espérance, alors qu'il est perçu dans tant de familles comme une menace. C'est bien là que se trouve le changement le plus considérable depuis des décennies. Les générations qui nous ont précédées voyaient l'avenir comme une formidable opportunité de progrès. Qui ici se risquerait à dire aujourd'hui qu'il voit l'avenir comme une opportunité de progrès dans les familles de France ?
Il nous faut inventer un nouveau modèle français, dont l'ambition première sera de rendre la réussite accessible pour chaque Français, d'où qu'il vienne, pour peu qu'il s'en donne les moyens et qu'il la mérite.
Attention ! Il ne s'agit pas pour moi de promettre, tels les démagogues, la réussite à tout le monde. Il s'agit de la garantir à tous ceux qui, par leur travail, leurs efforts, leurs mérites, l'auront gagnée en récompense.
La réussite et la promotion sociale ne sont pas un dû, que chacun peut réclamer en faisant la queue au guichet, c'est mieux que cela : c'est un droit, un droit que l'on mérite à la sueur de son front. Voilà le message républicain.
Elle est là, la clef du nouveau modèle français que j'appelle de mes vux. Un modèle, ce nouveau modèle français, où le nivellement, l'égalitarisme, le saupoudrage n'auront plus leur place. Un modèle où le travail sera la base de tout, en étant récompensé, encouragé, favorisé. Un modèle où l'on n'éprouvera plus aucun complexe à rémunérer davantage celui qui travaille le plus et, en même temps, à aider davantage celui qui cumule le plus de handicaps. Un modèle où la promotion sociale sera redevenue un objectif accessible à tous. Un modèle enfin où chaque famille de France se dira que ses enfants peuvent regarder l'avenir avec confiance car ils auront l'opportunité de s'y faire une place.
Au final, il ne s'agit rien de moins que de rendre l'espérance aux Français et à la France.
Oui, la France ! Voici un mot que l'on ne prononce pas assez souvent. La France, ce n'est pas qu'une histoire, un passé, un souvenir, ou même une nostalgie. La France, c'est une nation, qui a souvent montré le chemin au monde mais qui donne le sentiment parfois de se reposer sur des lauriers glanés, il y a bien des années.
La France ne peut pas compter sur le seul prestige de sa glorieuse histoire pour demeurer dans le peloton des grandes nations du monde. La France ne doit pas considérer que les efforts pour mériter son statut ne sont que pour les autres pays et qu'elle peut s'en abstraire.
Chaque pays dans le monde a le statut qu'il mérite, par son travail et par ses efforts. Rien n'est gravé dans le marbre.
La France ne peut plus affirmer avoir le meilleur modèle social alors que nous comptons encore tant de chômeurs, tant de pauvres et tant d'exclus. La France doit redevenir accueillante à ceux qui veulent réussir, innover, proposer, inventer, créer.
La France peut pas être accueillante que pour ceux dont personne ne veut dans le monde. Nous voulons les meilleurs en France.
La France doit se doter d'une nouvelle ambition européenne, car l'Europe, à ce point de son histoire, a besoin d'un nouveau leadership, pour construire un espace qui protège et non pas qui inquiète, pour bâtir un ensemble où les chefs d'Etat et de gouvernement, c'est-à-dire les responsables politiques reprendront le pouvoir qu'ils ont laissé aux eurocrates pour répondre aux défis de la mondialisation, de la désindustrialisation et des délocalisations. C'est cela le nouveau leadership européen.
La France doit rester cette nation aux composantes multiples, où chacun pourra se voir reconnaître les mêmes droits mais aussi les mêmes devoirs, pas les uns sans les autres. On entend beaucoup parler des droits, sans doute est-ce notre mission de dire que dans la France républicaine que nous aimons, il n'y a pas de droit sans la contrepartie de devoir.
La France dont je parle a un visage, celui de la tolérance.
Elle a une âme : celle de la liberté qu'elle a chevillée au corps.
Elle a une ambition : celle de montrer au monde un chemin original.
C'est cette France pour laquelle nous avons tous un jour vibré, espéré et parfois pleuré.
Oui, mes chers amis, les Français doivent être fiers de leur pays, mais un pays pour lequel nous voulons la première place, pour lequel nous nourrissons de grandes ambitions, qui ne doit pas être écrasé par son histoire et qui doit se projeter vers son avenir.
Tout au long de ces 19 prochains mois, je souhaite qu'ensemble nous construisions la formation politique la plus moderne, la plus démocratique, et, la plus nombreuse de France. C'est un enjeu considérable. Il s'agit, ni plus ni moins, que de réconcilier les Français avec la politique.
Je ne veux plus que se reproduisent les conditions qui ont permis au leader de l'extrême droite d'être présent au 2e tour de la présidentielle. Je ne veux pas davantage que de tous les pays européens, la France compte l'extrême gauche la plus forte d'Europe.
Le débat démocratique français vaut mieux que le tête-à-tête stérile entre Arlette Laguiller et Le Pen, et je dirais la même chose s'il s'agissait de Bové ou de Besancenot.
Je ne peux me satisfaire que les grands partis démocratiques et républicains stagnent depuis des années autour de 20 % des suffrages. Notre objectif doit être de porter l'UMP au niveau de 30 %.
Nous devons devenir une formation politique de masse, dans laquelle les Français de tous âges, de toutes origines, de toutes conditions pourront se rassembler, débattre, proposer, compter, décider. Nous ne devons à aucun prix nous laisser enfermer dans la représentation d'une catégorie socioprofessionnelle. Que les chefs d'entreprise, les professions libérales, les commerçants croient en nous c'est bien, mais c'est insuffisant.
Je vous demande de vous ouvrir à la France du travail dans toute sa diversité. Je vous demande de faire une place aux salariés, aux classes moyennes, aux fonctionnaires, aux Français d'origines plus récentes, aux jeunes- qu'ils soient étudiants ou qu'ils soient engagés dans la vie active- aux artistes, que nous avons trop négligés dans le passé, aux femmes à qui il nous faut donner un rôle sans précédent. En bref, je vous demande de faire de l'UMP le parti de la France et de tous les Français, sans exception.
Pour relever ce défi immense, il y a 3 mots dont je vous propose qu'ils servent de cadre à toutes nos actions, qu'ils soient la référence systématique de toutes nos démarches, qu'ils rythment tous nos rendez-vous.
Je veux que nous soyons les plus créatifs, les plus libres et les plus unis.
La créativité d'abord.
Il s'agit sans doute du déficit le plus criant de la vie politique française. Que de formules creuses, que d'idées convenues, que de consensus hypocrites, dont le seul but est d'éviter à toute force la résolution de problèmes qui pourtant ne peuvent plus attendre ! Je le dis parce que je le pense au plus profond de moi-même. Je n'ai pas la vision d'une France qui serait soudainement devenue immobile, rétive à tout changement et frileuse face à toutes les réformes.
Les Français ne sont pas des conservateurs et la France n'est pas réactionnaire. Voilà la vérité que je pense au plus profond de moi-même.
Nos compatriotes ont parfaitement compris qu'on ne résoudra pas les problèmes de demain avec les recettes d'avant-hier. Ils n'ont pas peur du changement, ils l'espèrent, l'attendent et l'exigent.
Quand les vieux chemins ne mènent plus nulle part, alors il faut avoir le courage d'en emprunter de nouveaux. Il faut imaginer de nouvelles voies, être innovant, créatif, imaginatif. Il ne faut pas avoir peur de changer nos habitudes.
Je souhaite que l'UMP tourne le dos à toutes formes de conservatisme, que nous fassions de l'immobilisme notre premier adversaire et que nous relevions le flambeau du changement pour nous l'approprier. Jamais une formation politique n'a gagné une présidentielle ou une campagne législative en incarnant le conservatisme, l'immobilisme et la peur du changement.
Alors je vous propose de dire aux Français que les choix sont clairs et qu'ils seront notre ligne politique tout au long de ces 19 mois.
D'un côté, il y aura ces nouveaux conservateurs immobiles, que sont devenus les socialistes, qui veulent que rien ne bouge, qui ne sont porteurs d'aucun changement et qui isoleront la France dans un repliement caricatural et hautain. La France socialiste, c'est la France de la glaciation et nous n'en voulons à aucun prix.
De l'autre côté, l'UMP doit être la formation qui regarde tout ce qui réussit dans le vaste monde et qu'il n'hésite pas à s'en inspirer. Il ne s'agit pas de copier un modèle, quel qu'il soit. Il ne s'agit nullement de tourner le dos à nos valeurs et à nos traditions. Mais enfin, si nos traditions, c'est de garder le chômage le plus élevé, je suis prêt à tourner le dos à cette tradition.
Il s'agit de refuser une vision exclusivement hexagonale de l'avenir et de l'évolution de notre pays.
Pourquoi interdire aux Français d'essayer ce qui a réussi ailleurs. Le nouveau modèle français, que j'appelle de mes vux, ne peut faire abstraction de tout ce qui se passe dans le monde, sauf à se couper des réalités et de toute chance d'être efficace.
Ainsi, lorsque j'affirme que le modèle social français n'est plus le meilleur, je ne cherche pas à provoquer, je ne veux pas blesser, mais je n'accepte pas que mon pays reste avec deux fois plus de chômeurs que les autres grandes nations démocratiques et que tant de Français restent condamnés à l'exclusion, au nivellement et à l'assistanat. Voilà le défi engagé.
On le sait bien, les recettes traditionnelles servent à gérer le chômage, nous, nous voulons le combattre le chômage. Voilà la différence entre l'UMP et les socialistes.
J'observe, partout dans le monde, que la contrepartie de la solidarité nationale, c'est l'obligation d'exercer une activité en échange d'un minimum social, c'est l'obligation d'accepter un emploi après un certain nombre de refus.
La France qui se lève tôt le matin ne peut accepter que le produit de ses impôts ne soit pas utilisé avec une efficacité maximale.
Je vais le dire comme je le pense : ne pas imposer une activité minimale et ne pas limiter le nombre de refus de propositions d'emploi, ce n'est pas un acquis social, c'est une erreur doublée d'une lâcheté. Il faut y mettre un terme et le plus tôt sera le mieux.
Ne pas le faire, c'est prendre le risque de révolter les classes moyennes, de désespérer ceux qui travaillent, de tourner le dos aux valeurs républicaines les plus sacrées, qui veulent qu'il n'y ait pas de droit sans la contrepartie d'un devoir.
Plutôt que de considérer notre droit du travail comme une vache sacrée, intouchable, devant lequel publiquement chacun s'incline et devant lequel, en secret, chacun considère qu'il est sans doute responsable d'une partie du chômage.
On serait bien inspiré de se demander pourquoi, la question mérite d'être posée, jamais les salariés français ne se sont sentis dans un tel état de précarité, alors que les entrepreneurs ne se sont jamais autant sentis soumis à un carcan aussi rigide. C'est le système magique où tout le monde est perdant. Voilà ce dont nous devons sortir.
N'attendons pas des organisations syndicales qu'elles proposent les changements que nous souhaitons, elles ne le feront pas. Ce n'est d'ailleurs pas leur rôle. C'est à nous qu'il revient d'être innovant, d'entraîner et d'expliquer. Défendons une nouvelle méthode de gouvernement qui accepte l'expérimentation et qui organise l'évaluation.
Sur les sujets qui suscitent l'hésitation, au lieu de réformes prétendument définitives et totales, choisissons de faire des expériences, dont nous présenterons les résultats évalués, en toute transparence, à l'opinion publique.
Oui, il faut en finir avec la division artificielle entre CDI et CDD. Il faut innover avec le contrat unique, c'est une urgente priorité. Ainsi, nous pourrons changer la France, progressivement, en nous donnant tous les moyens de réussir.
La question du pouvoir d'achat est centrale les Français. Nous devons trouver les moyens d'augmenter celui des Français pour soutenir la consommation. Pour cela, je ne connais qu'un seul moyen, compatible avec nos déficits, celui qui consiste à permettre aux Français de travailler davantage pour gagner davantage. Il n'y a pas d'autres solutions.
L'exemple des 5 millions de fonctionnaires est particulièrement caricatural. Il y a beaucoup de petits salaires dans la fonction publique, pourquoi empêcher les fonctionnaires qui le souhaitent de s'affranchir des 35 heures, en cumulant des heures supplémentaires qui augmenteraient d'autant leur pouvoir d'achat ? Il n'y a aucune raison de refuser à la fonction publique ce que l'on a autorisé au secteur privé, sauf à expliquer aux Français que les mêmes règles ne sont pas les mêmes pour tout le monde, ce serait le contraire de la République !
Dans le même esprit, la France ne peut faire l'économie d'un important mouvement de réduction de ses dépenses publiques. Elle passe, j'ose le mot et je l'assume, par le non remplacement de tous les départs à la retraite des fonctionnaires. Il faut cesser de le dire, il faut le faire.
J'ai la conviction que nous devons proposer aux fonctionnaires de France un système gagnant-gagnant, en leur rendant, sous la forme d'augmentation des rémunérations, la moitié des économies réalisées par le biais des réductions d'effectifs. Moins de fonctionnaires mieux payés, voilà le système gagnant-gagnant.
Nous devons permettre à tous les Français de réaliser ce rêve naturel d'être propriétaire de leur logement. Qui n'a jamais pensé, surtout parmi les jeunes, à accéder à la propriété ? Or, force est de reconnaître que ce rêve n'est accessible qu'aux plus fortunés ou à ceux qui sont cautionnés par quelqu'un de fortuné.
Je souhaite que l'on bouleverse ce système, qui fait trop de place aux relations et aux privilèges et qui pousse les banques à prêter surtout à ceux qui n'en ont pas besoin. La mise en place du crédit hypothécaire permettra de donner la chance de la propriété à tous, en garantissant l'emprunt par le bien immobilier que l'on acquiert.
Je veux que l'on innove dans le dialogue social. Nos syndicats sont, en France, trop petits, trop émiettés et ne sont pas assez représentatifs du monde des salariés. Je souhaiterais qu'ils le soient davantage. Je le dis comme je le pense et tant pis si cela choque : je ne comprends pas le maintien de la règle archaïque qui donne le monopole de la présentation des candidats au premier tour des élections aux 5 grandes centrales syndicales issues de la guerre.
Si l'on veut revivifier la démocratie sociale, il faut alors rendre à chacun le droit imprescriptible de se présenter librement à une élection. À qui viendrait-il l'idée d'obliger aux élections législatives les Français à voter pour la démocratie chrétienne ou la SFIO ?
Je veux que l'UMP innove dans la recherche d'une plus grande justice ou d'une meilleure équité. Je ne vous cache pas mon exaspération devant ces discours interminables qui évoquent invariablement les mots justice sociale, progrès social, politique sociale. Ces mots, à force d'être scandés, sont devenus vides de sens aux yeux des Français qui voient que, dans la réalité, notre système d'intégration est totalement en panne, que notre ascenseur social est totalement grippé, notre modèle éducatif est chancelant et que les inégalités, loin de régresser, progressent. Voilà la réalité que nous devons regarder en face.
Comment renverser la vapeur ? Je ne vois qu'un moyen : avoir le courage de faire, ce que l'on déteste le plus en France, des choix. Il faut arrêter de promettre à tout le monde, car la France n'en a ni les moyens financiers, ni la latitude politique. Le résultat de notre absence de courage est qu'en donnant à tout le monde, on saupoudre des moyens par définition limités. À l'arrivée, tout le monde est perdant.
Je vous propose une autre logique, celle que je n'hésite pas à appeler discrimination positive à la française. Le principe est simple : ceux qui cumulent le plus de handicaps, on va les aider massivement, pour leur donner le maximum de chances de s'en sortir.
La République, ce n'est pas donner à chacun la même chose, c'est, pour l'Etat, donner à chacun selon ses handicaps et selon ses mérites. C'est par l'équité que l'on arrive à l'égalité.
L'UMP doit devenir la formation qui incarne la volonté de réduire les injustices dans notre pays. De les réduire dans les faits, concrètement et pas dans les discours ou les slogans. Et s'il m'arrive de plaider pour cette discrimination positive à la française, ce n'est pas par fascination pour le système américain, c'est encore moins pour promouvoir un communautarisme que je combats, mais je veux mettre chacun d'entre vous devant ses responsabilités.
Je suis convaincu que l'on ne peut pas continuer à commenter les inégalités, il faut les réduire si l'on ne veut pas créer les conditions d'un drame pour la France dans les 20 ou 30 années qui viennent. Voilà ma conviction la plus profonde.
Cette égalité des chances que nous voulons pour chaque Français, nous l'aurons en donnant plus aux territoires qui en ont moins, en aidant davantage les Français qui ont le plus de handicaps, en tournant le dos au saupoudrage, au nivellement et à l'assistanat. Voilà le nouveau modèle social français que j'appelle de mes vux.
La liberté ensuite. La liberté, ce ne doit pas seulement être le mot magique pour lequel tant d'hommes, à travers le monde, ont payé le prix le plus cher. La liberté, à l'UMP, ce ne doit pas être un slogan, ce doit devenir une réalité. Au plus profond de moi-même, je crois que rien d'utile ne peut se construire sans un débat préalable et approfondi.
L'UMP doit être le lieu des grands débats de la société française.
Pendant que les socialistes s'invectivent, règlent leurs comptes, se livrent à des exclusions et des anathèmes, je vous demande de vous passionner et de vous engager dans le débat d'idées. Chaque mois nous organisons des conventions, je souhaite que les fédérations se saisissent des sujets traités en apportant leur contribution à la réflexion initiale.
C'est ensemble que nous dessinerons la France que nous voulons. À l'UMP, il ne doit y avoir aucun sujet tabou. À l'UMP, on doit pouvoir parler de tout. Le droit à l'expression et à la parole doit être reconnu à chaque militant, à chaque élu et à chaque cadre. Je dénie à quiconque la possibilité de cadenasser un débat, de le réduire ou pire de l'interdire.
À l'UMP, la parole est libre.
S'il y a si peu d'adhérents dans les formations politiques françaises, c'est parce que, trop souvent, les Français ont le sentiment que dans les partis politiques la parole est confisquée.
Vous êtes libre et, d'abord, vis-à-vis de la direction du mouvement et notamment de son président. Je n'ai pas à vous imposer mon point de vue et, à l'inverse, je ne renoncerai pas à mes convictions, même si elles sont minoritaires. Il ne s'agit pas de construire un club de partisans, tout entier dévoué à ma cause ou pire un clan ou une secte. Il s'agit de bâtir une formation diverse où chacun d'entre vous pourra trouver sa place.
En tant que président du mouvement, je dois convaincre de la pertinence de la ligne stratégique que je propose, mais vous devez être libre de l'amender, de la contester ou de la soutenir. En clair, on n'est pas obligé de penser systématiquement comme moi, uniquement parce que j'ai été élu président de l'UMP, ça c'est de la vieille politique.
L'UMP est libre et je le dis à nos présidents de groupes, vis-à-vis du gouvernement que nous soutenons. Je suis reconnaissant à Dominique de Villepin d'avoir retenu nombre de nos propositions et, en même temps, d'avoir compris et accepté que notre formation politique puisse aller plus loin et dire davantage que ce que fait et dit le gouvernement.
L'UMP n'est pas derrière le gouvernement, elle est devant le gouvernement, pour fixer une perspective, pour gagner la bataille de la communication, pour porter des thèmes novateurs et pour convaincre notre électorat.
C'est ainsi que, gouvernement et parti majoritaire, nous couvrirons le spectre le plus large. L'UMP doit être la voix de nos électeurs. L'UMP doit être l'expression des souhaits politiques des Français, y compris lorsque ces derniers manifestent des impatiences. L'UMP n'est pas une caserne ou régnerait une discipline de fer, c'est un lieu de liberté où l'on peut débattre de tout sans être accusé de manquer à la solidarité ou même à la loyauté.
Dans le passé, on aurait été bien inspiré d'écouter ceux de nos amis qui criaient " casse-cou ", parce qu'ils avaient raison et les autres avaient tort. Voilà ce que je souhaite pour l'UMP.
C'est dans cet esprit que, faisant campagne pour le oui au référendum, j'ai cependant tout fait pour que les partisans du non, bien que minoritaires chez nous, soient respectés et bénéficient de moyens d'expression. À l'arrivée, cela nous a permis de préserver notre unité sans la moindre difficulté. Là aussi, comparez avec l'état des socialistes et vous verrez que notre choix fut le bon. On a toujours raison de respecter la minorité dans un parti politique, si l'on ne veut pas se réveiller avec la gueule de bois le lendemain des défaites.
Je n'évacue aucun sujet difficile.
C'est dans cet esprit que je vous ai proposé de prendre sur la Turquie et sur l'Europe une position qui n'était pas celle du président de la République, mais qui correspondait à nos convictions et à celles de nos électeurs. Nous l'avons fait sans drame et sans que cela nous empêche par ailleurs de soutenir l'action de Jacques Chirac pour que son quinquennat soit une réussite pour la France et pour les idées que nous défendons.
Il faut dédramatiser les débats politiques. On peut être en désaccord sur l'intégration de la Turquie et, en même temps, soutenir l'action d'un président de la République.
On peut être en désaccord sur tel ou tel point et lui souhaiter, du fond du cur, de façon unanime, une bonne santé et lui dire : nous avons besoin de vous en pleine forme monsieur le Président. C'est ça la nouvelle politique, on dit ce que l'on pense, on fait ce que l'on dit et l'on dédramatise là où les drames n'amènent rien.
C'est dans cet esprit que je proposerai, dans quelques jours, que l'UMP soit plus ambitieuse que le gouvernement dans ses choix économiques et fiscaux, en proposant, par exemple, que nul contribuable en France ne puisse se voir prélever plus de 50 % de ce qu'il a gagné par son travail.
Franchement, si vous travaillez du 1er janvier au 1er juillet pour l'Etat, c'est déjà pas mal. Les six mois restant, vous travaillerez pour votre famille. Voilà la vision que nous avons de la société française.
Si cette règle a valeur constitutionnelle en Allemagne, pourquoi n'en serait-il pas de même en France ?
C'est dans cet esprit que je souhaite que l'UMP affirme son engagement de mettre en place un service minimum dans les services publics les jours de grève. Il est des moments où il convient d'arrêter de tourner autour des problèmes. Je souhaite que l'UMP soit du côté des usagers, pas du côté de ceux qui prennent en otage nos services publics.
C'est dans cet esprit que je soutiens ceux qui dénoncent les effets pervers de l'actuel ISF. Je crois les Français beaucoup plus lucides qu'on ne l'imagine. Que les plus riches payent davantage d'impôts : c'est juste et c'est normal. De ce point de vue, l'ISF est un bon impôt. Mais que ce même impôt pénalise l'emploi, entraîne la délocalisation d'entreprises, empêche les capitaux dont l'économie a besoin de prospérer en France, cela nous ne pouvons l'admettre.
Il ne faut pas avoir peur d'expliquer à l'opinion publique la réalité des enjeux. Cela s'appelle être courageux et le courage, cela paye toujours ! Chacun imagine que l'ISF est un très mauvais impôt et tous se mettent d'accord pour ne pas le dire aux Français. Qui croyez-vous que cela abuse ? Si c'est un mauvais impôt, alors réformez-le ! Si c'est un bon impôt, alors dites-le ! Mais pas de solution de compromis qui nous fera perdre de tous les côtés du spectre politique.
C'est dans cet esprit que je souhaite que, dès l'automne, afin de lancer le mouvement, une expérimentation soit engagée dans nos universités pour leur donner enfin l'autonomie dont elles ont besoin.
Nos universités sont les seules en Europe à ne pouvoir accéder à des financements innovants. Elles sont les seules à ne pouvoir adapter librement leurs enseignements. Elles sont les seules à ne pas pouvoir prendre les initiatives auxquelles elles aspirent.
Résultat, les universités françaises régressent. Cette situation ne peut pas durer, nous voulons de l'autonomie pour nos universités.
C'est dans cet esprit que je souhaite que nous proposions une " refonte " de la PAC. Je crois au pouvoir vert. Je crois en l'avenir de l'agriculture française, mais je n'accepte pas l'évolution de ces dernières années, qui a conduit à la fonctionnarisation de nos paysans. Jamais ils n'ont voulu cette culture de l'assistanat. Les agriculteurs sont des producteurs, ils veulent vivre du prix de leurs productions. Voilà le message de l'agriculture française.
Ces prix doivent être décents et c'est possible si l'Europe veut renouer avec la préférence communautaire, qui n'est pas un gros mot, mais une ardente obligation.
C'est dans cet esprit que le moment venu nous réfléchirons à nos institutions et à notre pratique du pouvoir. Elle doit être plus simple, plus démocratique et plus efficace. Il y a beaucoup à faire pour moderniser notre République. Je vous l'ai dit, il n'y aura pas de sujets tabous et j'entends vous le prouver.
L'unité enfin. On l'invoque toujours et, en général quand on en parle c'est qu'il est déjà trop tard et que la division a fait des ravages.
L'unité d'un parti politique, alors que j'appartiens à un parti politique depuis 30 ans, ne s'impose pas et ne se décrète pas. L'unité n'est que la conséquence d'un état d'esprit, d'une volonté de vivre ensemble, de la certitude qu'auront tous les membres de notre famille qu'ils seront considérés, dans leur personne comme dans leurs convictions, avec loyauté.
L'UMP sera unie parce que ses grands choix stratégiques seront déterminés par des votes démocratiques, auxquels seront associés tous les militants.
Je ne veux plus d'une période qu'a connue notre famille notre famille politique, et à laquelle j'ai participé, où les arbitrages étaient rendus entre trop bons amis, sans tenir compte de l'opinion de l'ensemble des adhérents. Je le dis calmement, sereinement, tranquillement, mais fermement : cette époque appartient à un passé définitivement révolu.
Dans l'UMP d'aujourd'hui, il n'y a pas de conseillers occultes, de cénacle privilégié, il n'y aura ni combines ni arrangements. Nos grands choix stratégiques, comme nos choix de personnes, seront tranchés par des votes libres, transparents et démocratiques.
Je souhaite que soient appelés à participer à ces votes, le plus souvent possible, la totalité de nos adhérents. Ainsi, chacun comprendra qu'être adhérent de l'UMP, c'est être respecté, c'est avoir le droit de donner son opinion, c'est participer, en y étant associé, à toutes nos grandes décisions. C'est comme cela et pas autrement que nous deviendrons le grand parti démocratique de masse dont la France a besoin.
Nous l'avons montré à Paris, en organisant des primaires qui ont apaisé des tensions récurrentes depuis des années. Je le montrerai pour les présidentielles de 2007, où il n'y a pas de candidat auto désigné ou obligé, je veux parler de moi. Il y aura une concurrence saine, loyale et, je l'espère, de qualité. Et au final, c'est vous, les adhérents de l'UMP, qui aurez la responsabilité de choisir le meilleur, c'est-à-dire celui qui saura le mieux nous rassembler et nous faire gagner.
Je souhaite vous dire que nous n'avons rien à craindre de la concurrence. Elle seule permet d'étalonner les valeurs. Elle est incontournable pour celui qui veut prétendre à l'honneur de vous représenter dans la compétition ultime qu'est l'élection présidentielle. Une famille politique doit se réjouir de compter de nombreux talents en son sein. Songez avec tristesse à toutes celles qui n'en ont aucun.
J'ajoute que nos adhérents ont acquis des pouvoirs que personne ne pourra remettre en cause. Nous sommes en 2005 et, en 2005, on ne dirige pas une formation politique comme on pouvait le faire, il y a 30 ans. J'ai été élu par la volonté de nos militants, je n'ai pas l'intention de trahir leur confiance en les privant d'un pouvoir qu'ils m'ont au contraire demandé de conforter. Ce point ne supportera aucune discussion tant que nos adhérents le demanderont.
Nous organiserons en janvier 2007 un congrès ouvert à tous, où chacun pourra exprimer sa préférence quant au choix de notre candidat à l'élection présidentielle. Cela sera un événement de la vie politique nationale et cela donnera une légitimité et une force sans précédent à celui ou celle que vous aurez choisi pour être notre candidat.
Et c'est parce que notre mouvement sera authentiquement démocratique que la solidité de notre union ne sera remise en cause par personne. Notre unité sera d'autant plus solide qu'elle sera le résultat d'une attitude de respect, de loyauté et de responsabilité.
En tant que président de l'UMP, je suis le garant de son unité. Il va de soi qu'il me faut montrer l'exemple et m'astreindre au respect scrupuleux des règles que je viens de décrire.
Je voudrais terminer par quelques brèves remarques plus personnelles.
Il y a bien des années, j'ai fait le choix de consacrer ma vie à la politique. Jamais je n'ai eu à regretter ce choix. La politique m'a beaucoup donné. Elle m'a donné des émotions collectives, qui sont encore bien présentes dans mon cur et des amis fidèles et solides. Elle m'a fait connaître des inimitiés certaines, elle m'a autorisé des rencontres multiples, m'a ouvert à des sujets de passion et surtout elle m'a fait rencontrer une expérience humaine inégalée. Jeunes de l'UMP, qui aujourd'hui souhaitez vous engager pour assurer notre relève, votre choix est le bon. À votre tour, vous ne serez pas déçus.
Aujourd'hui, sans doute comme jamais, je suis conscient de mes responsabilités, je mesure chaque jour le poids qu'elles font peser sur mes épaules. C'est sans doute pour cela que j'assume mes fonctions avec davantage de gravité qu'auparavant.
J'ai pu, en outre, mesurer la dureté de certaines attaques et l'impudeur de certaines attitudes. Mais j'en fais le serment devant vous :
Rien, vraiment rien ; personne, vraiment personne ne m'empêchera d'aller jusqu'au bout de la mission que vous m'avez fixée.
Rien ni personne ne m'empêchera de mériter la confiance que me témoignent chaque jour tant de Français.
Rien et personne ne m'empêchera de tenter d'être à la hauteur des rendez-vous de 2007 pour notre famille politique.
Mes chers amis, je vous demande votre confiance, votre amitié, votre enthousiasme, votre engagement et, en retour, je vous donnerai le meilleur de moi-même.
Vive la France,
Vive la République.
(Source http://www.u-m-p.org, le 8 septembre 2005)
Voici donc que s'achèvent mes premières universités d'été en tant que président de l'UMP. L'an passé, à la même époque, je n'étais que candidat. J'avais des projets. Aujourd'hui je suis votre président, je dois en assumer les responsabilités, justifier d'une action, fixer des perspectives. C'est une tâche exaltante. J'y ai consacré, depuis 9 mois, le meilleur de moi-même.
Les 19 mois qui viennent vont nous conduire aux échéances présidentielles et législatives de 2007. Mon ambition est claire : que nous gagnions. Mon rôle est simple, vous conduire à la victoire. Mon travail doit tout entier être tourné vers cet objectif unique, celui de notre succès collectif.
Que personne n'en doute, je sais d'expérience que nous gagnerons tous ensemble ou que nous perdrons tous ensemble. Je veux mettre mon énergie au service de notre famille, de toute notre famille. Il ne s'agit pas pour moi d'une aventure individuelle, mais bien d'une responsabilité que vous m'avez confiée, que j'assume au nom de tous et pour tous : la victoire de l'UMP aux législatives et présidentielles de 2007.
Pour cela, je voudrais vous proposer une première orientation, celle qui consiste pour chacun de nous, délibérément, à choisir " de faire de la politique ". Je ne m'inscris pas dans cette mode qui fait dire à tant d'observateurs que la politique ne sert à rien, que les politiques ne peuvent plus rien, que la gauche et la droite, c'est pareil - comprenez qu'elles seraient devenues également impuissantes - que les difficultés de la France et du monde sont si grandes, qu'il n'y aurait rien à faire.
Eh bien, je conteste frontalement ce fatalisme qui n'est rien d'autre qu'une forme de démission. Dans mon esprit la politique, c'est justement l'art de trouver et de créer des marges de manuvre, là où tous les techniciens restent interdits et incapables d'imaginer la voie étroite qui permettra de surmonter les difficultés.
Il ne faut pas s'excuser de faire de la politique, il faut revendiquer ce choix car faire de la politique, c'est le choix de la démocratie et de l'efficacité. La politique, c'est noble, c'est utile, c'est exigeant et difficile.
Ce n'est pas de trop de débats politiques que souffre la France, c'est au contraire le fait qu'il n'y en ait plus assez et même parfois plus du tout qui cause les problèmes et les fractures de notre démocratie française.
J'affirme qu'en France on ne débat pas assez, les techniciens ont trop la parole et les politiques ont renoncé à porter les choix fondateurs pour notre pays.
La politique, cela consiste à dire la vérité, à être lucide et, par-dessus tout, à donner une cohérence aux aspirations souvent contradictoires de nos compatriotes. Parler au nom du peuple, comprendre ses attentes, interpréter ses besoins, réaliser ses aspirations : c'est bien ce qu'il y a de plus difficile à faire. Mais c'est justement le premier devoir des responsables politiques que nous sommes. Et les Français, contrairement à ce qu'on peut souvent entendre, restent " passionnés " par cette façon de faire de la politique.
Sans doute, y a-t-il aussi peu de pays comme la France, où l'on est autant intéressé par la vraie politique, la grande politique, la politique la plus noble.
Qu'ont voulu dire les Français en portant Jean-Marie Le Pen au 2e tour de la présidentielle en 2002 ? Qu'ont-ils voulu dire ces mêmes Français, le 29 mai, en répondant massivement non au référendum sur l'Europe ? Quel était le sens profond de leur message lorsqu'ils nous ont sanctionnés dans 20 régions sur 22, au printemps 2004 ?
Que personne ne compte sur moi pour minimiser la gravité de la crise politique, que connaît notre pays depuis trois ans. Quand les Français s'expriment, je ne serai pas à la hauteur de mes responsabilités si je ne tentais pas de regarder leur message tel qu'il est et non pas tel que j'aurais souhaité qu'il fut.
Ces questions ne sont pas anecdotiques. J'ai le sentiment qu'on n'y a pas répondu, ou alors imparfaitement, ou en tout cas insuffisamment. Les problèmes restent posés, et il faudra bien s'y atteler. Cela sera même l'enjeu majeur de la présidentielle de 2007.
Vous le savez, je suis intimement convaincu que les Français attendent de nous que nous préparions, non une alternance classique à laquelle ils ne croient plus, mais la rupture avec les habitudes, les conformismes et les insuffisances de la vie politique traditionnelle. Je vous le demande, je souhaite que l'UMP incarne le changement le plus profond et le plus rapide. Nous devons tirer les conséquences de ces trois crises majeures en proposant une stratégie de rupture avec les trente dernières années de la vie politique classique, dans notre pays.
SI nous faisons de la politique comme les autres, nous serons balayés comme les autres et nous serons battus à notre tour. On n'attend pas de nous de faire de la politique comme les autres.
À mes yeux, la grande question que se posent les Français, commune à toutes ces crises que nous avons connues, est celle de savoir si l'avenir peut être source d'espérance, alors qu'il est perçu dans tant de familles comme une menace. C'est bien là que se trouve le changement le plus considérable depuis des décennies. Les générations qui nous ont précédées voyaient l'avenir comme une formidable opportunité de progrès. Qui ici se risquerait à dire aujourd'hui qu'il voit l'avenir comme une opportunité de progrès dans les familles de France ?
Il nous faut inventer un nouveau modèle français, dont l'ambition première sera de rendre la réussite accessible pour chaque Français, d'où qu'il vienne, pour peu qu'il s'en donne les moyens et qu'il la mérite.
Attention ! Il ne s'agit pas pour moi de promettre, tels les démagogues, la réussite à tout le monde. Il s'agit de la garantir à tous ceux qui, par leur travail, leurs efforts, leurs mérites, l'auront gagnée en récompense.
La réussite et la promotion sociale ne sont pas un dû, que chacun peut réclamer en faisant la queue au guichet, c'est mieux que cela : c'est un droit, un droit que l'on mérite à la sueur de son front. Voilà le message républicain.
Elle est là, la clef du nouveau modèle français que j'appelle de mes vux. Un modèle, ce nouveau modèle français, où le nivellement, l'égalitarisme, le saupoudrage n'auront plus leur place. Un modèle où le travail sera la base de tout, en étant récompensé, encouragé, favorisé. Un modèle où l'on n'éprouvera plus aucun complexe à rémunérer davantage celui qui travaille le plus et, en même temps, à aider davantage celui qui cumule le plus de handicaps. Un modèle où la promotion sociale sera redevenue un objectif accessible à tous. Un modèle enfin où chaque famille de France se dira que ses enfants peuvent regarder l'avenir avec confiance car ils auront l'opportunité de s'y faire une place.
Au final, il ne s'agit rien de moins que de rendre l'espérance aux Français et à la France.
Oui, la France ! Voici un mot que l'on ne prononce pas assez souvent. La France, ce n'est pas qu'une histoire, un passé, un souvenir, ou même une nostalgie. La France, c'est une nation, qui a souvent montré le chemin au monde mais qui donne le sentiment parfois de se reposer sur des lauriers glanés, il y a bien des années.
La France ne peut pas compter sur le seul prestige de sa glorieuse histoire pour demeurer dans le peloton des grandes nations du monde. La France ne doit pas considérer que les efforts pour mériter son statut ne sont que pour les autres pays et qu'elle peut s'en abstraire.
Chaque pays dans le monde a le statut qu'il mérite, par son travail et par ses efforts. Rien n'est gravé dans le marbre.
La France ne peut plus affirmer avoir le meilleur modèle social alors que nous comptons encore tant de chômeurs, tant de pauvres et tant d'exclus. La France doit redevenir accueillante à ceux qui veulent réussir, innover, proposer, inventer, créer.
La France peut pas être accueillante que pour ceux dont personne ne veut dans le monde. Nous voulons les meilleurs en France.
La France doit se doter d'une nouvelle ambition européenne, car l'Europe, à ce point de son histoire, a besoin d'un nouveau leadership, pour construire un espace qui protège et non pas qui inquiète, pour bâtir un ensemble où les chefs d'Etat et de gouvernement, c'est-à-dire les responsables politiques reprendront le pouvoir qu'ils ont laissé aux eurocrates pour répondre aux défis de la mondialisation, de la désindustrialisation et des délocalisations. C'est cela le nouveau leadership européen.
La France doit rester cette nation aux composantes multiples, où chacun pourra se voir reconnaître les mêmes droits mais aussi les mêmes devoirs, pas les uns sans les autres. On entend beaucoup parler des droits, sans doute est-ce notre mission de dire que dans la France républicaine que nous aimons, il n'y a pas de droit sans la contrepartie de devoir.
La France dont je parle a un visage, celui de la tolérance.
Elle a une âme : celle de la liberté qu'elle a chevillée au corps.
Elle a une ambition : celle de montrer au monde un chemin original.
C'est cette France pour laquelle nous avons tous un jour vibré, espéré et parfois pleuré.
Oui, mes chers amis, les Français doivent être fiers de leur pays, mais un pays pour lequel nous voulons la première place, pour lequel nous nourrissons de grandes ambitions, qui ne doit pas être écrasé par son histoire et qui doit se projeter vers son avenir.
Tout au long de ces 19 prochains mois, je souhaite qu'ensemble nous construisions la formation politique la plus moderne, la plus démocratique, et, la plus nombreuse de France. C'est un enjeu considérable. Il s'agit, ni plus ni moins, que de réconcilier les Français avec la politique.
Je ne veux plus que se reproduisent les conditions qui ont permis au leader de l'extrême droite d'être présent au 2e tour de la présidentielle. Je ne veux pas davantage que de tous les pays européens, la France compte l'extrême gauche la plus forte d'Europe.
Le débat démocratique français vaut mieux que le tête-à-tête stérile entre Arlette Laguiller et Le Pen, et je dirais la même chose s'il s'agissait de Bové ou de Besancenot.
Je ne peux me satisfaire que les grands partis démocratiques et républicains stagnent depuis des années autour de 20 % des suffrages. Notre objectif doit être de porter l'UMP au niveau de 30 %.
Nous devons devenir une formation politique de masse, dans laquelle les Français de tous âges, de toutes origines, de toutes conditions pourront se rassembler, débattre, proposer, compter, décider. Nous ne devons à aucun prix nous laisser enfermer dans la représentation d'une catégorie socioprofessionnelle. Que les chefs d'entreprise, les professions libérales, les commerçants croient en nous c'est bien, mais c'est insuffisant.
Je vous demande de vous ouvrir à la France du travail dans toute sa diversité. Je vous demande de faire une place aux salariés, aux classes moyennes, aux fonctionnaires, aux Français d'origines plus récentes, aux jeunes- qu'ils soient étudiants ou qu'ils soient engagés dans la vie active- aux artistes, que nous avons trop négligés dans le passé, aux femmes à qui il nous faut donner un rôle sans précédent. En bref, je vous demande de faire de l'UMP le parti de la France et de tous les Français, sans exception.
Pour relever ce défi immense, il y a 3 mots dont je vous propose qu'ils servent de cadre à toutes nos actions, qu'ils soient la référence systématique de toutes nos démarches, qu'ils rythment tous nos rendez-vous.
Je veux que nous soyons les plus créatifs, les plus libres et les plus unis.
La créativité d'abord.
Il s'agit sans doute du déficit le plus criant de la vie politique française. Que de formules creuses, que d'idées convenues, que de consensus hypocrites, dont le seul but est d'éviter à toute force la résolution de problèmes qui pourtant ne peuvent plus attendre ! Je le dis parce que je le pense au plus profond de moi-même. Je n'ai pas la vision d'une France qui serait soudainement devenue immobile, rétive à tout changement et frileuse face à toutes les réformes.
Les Français ne sont pas des conservateurs et la France n'est pas réactionnaire. Voilà la vérité que je pense au plus profond de moi-même.
Nos compatriotes ont parfaitement compris qu'on ne résoudra pas les problèmes de demain avec les recettes d'avant-hier. Ils n'ont pas peur du changement, ils l'espèrent, l'attendent et l'exigent.
Quand les vieux chemins ne mènent plus nulle part, alors il faut avoir le courage d'en emprunter de nouveaux. Il faut imaginer de nouvelles voies, être innovant, créatif, imaginatif. Il ne faut pas avoir peur de changer nos habitudes.
Je souhaite que l'UMP tourne le dos à toutes formes de conservatisme, que nous fassions de l'immobilisme notre premier adversaire et que nous relevions le flambeau du changement pour nous l'approprier. Jamais une formation politique n'a gagné une présidentielle ou une campagne législative en incarnant le conservatisme, l'immobilisme et la peur du changement.
Alors je vous propose de dire aux Français que les choix sont clairs et qu'ils seront notre ligne politique tout au long de ces 19 mois.
D'un côté, il y aura ces nouveaux conservateurs immobiles, que sont devenus les socialistes, qui veulent que rien ne bouge, qui ne sont porteurs d'aucun changement et qui isoleront la France dans un repliement caricatural et hautain. La France socialiste, c'est la France de la glaciation et nous n'en voulons à aucun prix.
De l'autre côté, l'UMP doit être la formation qui regarde tout ce qui réussit dans le vaste monde et qu'il n'hésite pas à s'en inspirer. Il ne s'agit pas de copier un modèle, quel qu'il soit. Il ne s'agit nullement de tourner le dos à nos valeurs et à nos traditions. Mais enfin, si nos traditions, c'est de garder le chômage le plus élevé, je suis prêt à tourner le dos à cette tradition.
Il s'agit de refuser une vision exclusivement hexagonale de l'avenir et de l'évolution de notre pays.
Pourquoi interdire aux Français d'essayer ce qui a réussi ailleurs. Le nouveau modèle français, que j'appelle de mes vux, ne peut faire abstraction de tout ce qui se passe dans le monde, sauf à se couper des réalités et de toute chance d'être efficace.
Ainsi, lorsque j'affirme que le modèle social français n'est plus le meilleur, je ne cherche pas à provoquer, je ne veux pas blesser, mais je n'accepte pas que mon pays reste avec deux fois plus de chômeurs que les autres grandes nations démocratiques et que tant de Français restent condamnés à l'exclusion, au nivellement et à l'assistanat. Voilà le défi engagé.
On le sait bien, les recettes traditionnelles servent à gérer le chômage, nous, nous voulons le combattre le chômage. Voilà la différence entre l'UMP et les socialistes.
J'observe, partout dans le monde, que la contrepartie de la solidarité nationale, c'est l'obligation d'exercer une activité en échange d'un minimum social, c'est l'obligation d'accepter un emploi après un certain nombre de refus.
La France qui se lève tôt le matin ne peut accepter que le produit de ses impôts ne soit pas utilisé avec une efficacité maximale.
Je vais le dire comme je le pense : ne pas imposer une activité minimale et ne pas limiter le nombre de refus de propositions d'emploi, ce n'est pas un acquis social, c'est une erreur doublée d'une lâcheté. Il faut y mettre un terme et le plus tôt sera le mieux.
Ne pas le faire, c'est prendre le risque de révolter les classes moyennes, de désespérer ceux qui travaillent, de tourner le dos aux valeurs républicaines les plus sacrées, qui veulent qu'il n'y ait pas de droit sans la contrepartie d'un devoir.
Plutôt que de considérer notre droit du travail comme une vache sacrée, intouchable, devant lequel publiquement chacun s'incline et devant lequel, en secret, chacun considère qu'il est sans doute responsable d'une partie du chômage.
On serait bien inspiré de se demander pourquoi, la question mérite d'être posée, jamais les salariés français ne se sont sentis dans un tel état de précarité, alors que les entrepreneurs ne se sont jamais autant sentis soumis à un carcan aussi rigide. C'est le système magique où tout le monde est perdant. Voilà ce dont nous devons sortir.
N'attendons pas des organisations syndicales qu'elles proposent les changements que nous souhaitons, elles ne le feront pas. Ce n'est d'ailleurs pas leur rôle. C'est à nous qu'il revient d'être innovant, d'entraîner et d'expliquer. Défendons une nouvelle méthode de gouvernement qui accepte l'expérimentation et qui organise l'évaluation.
Sur les sujets qui suscitent l'hésitation, au lieu de réformes prétendument définitives et totales, choisissons de faire des expériences, dont nous présenterons les résultats évalués, en toute transparence, à l'opinion publique.
Oui, il faut en finir avec la division artificielle entre CDI et CDD. Il faut innover avec le contrat unique, c'est une urgente priorité. Ainsi, nous pourrons changer la France, progressivement, en nous donnant tous les moyens de réussir.
La question du pouvoir d'achat est centrale les Français. Nous devons trouver les moyens d'augmenter celui des Français pour soutenir la consommation. Pour cela, je ne connais qu'un seul moyen, compatible avec nos déficits, celui qui consiste à permettre aux Français de travailler davantage pour gagner davantage. Il n'y a pas d'autres solutions.
L'exemple des 5 millions de fonctionnaires est particulièrement caricatural. Il y a beaucoup de petits salaires dans la fonction publique, pourquoi empêcher les fonctionnaires qui le souhaitent de s'affranchir des 35 heures, en cumulant des heures supplémentaires qui augmenteraient d'autant leur pouvoir d'achat ? Il n'y a aucune raison de refuser à la fonction publique ce que l'on a autorisé au secteur privé, sauf à expliquer aux Français que les mêmes règles ne sont pas les mêmes pour tout le monde, ce serait le contraire de la République !
Dans le même esprit, la France ne peut faire l'économie d'un important mouvement de réduction de ses dépenses publiques. Elle passe, j'ose le mot et je l'assume, par le non remplacement de tous les départs à la retraite des fonctionnaires. Il faut cesser de le dire, il faut le faire.
J'ai la conviction que nous devons proposer aux fonctionnaires de France un système gagnant-gagnant, en leur rendant, sous la forme d'augmentation des rémunérations, la moitié des économies réalisées par le biais des réductions d'effectifs. Moins de fonctionnaires mieux payés, voilà le système gagnant-gagnant.
Nous devons permettre à tous les Français de réaliser ce rêve naturel d'être propriétaire de leur logement. Qui n'a jamais pensé, surtout parmi les jeunes, à accéder à la propriété ? Or, force est de reconnaître que ce rêve n'est accessible qu'aux plus fortunés ou à ceux qui sont cautionnés par quelqu'un de fortuné.
Je souhaite que l'on bouleverse ce système, qui fait trop de place aux relations et aux privilèges et qui pousse les banques à prêter surtout à ceux qui n'en ont pas besoin. La mise en place du crédit hypothécaire permettra de donner la chance de la propriété à tous, en garantissant l'emprunt par le bien immobilier que l'on acquiert.
Je veux que l'on innove dans le dialogue social. Nos syndicats sont, en France, trop petits, trop émiettés et ne sont pas assez représentatifs du monde des salariés. Je souhaiterais qu'ils le soient davantage. Je le dis comme je le pense et tant pis si cela choque : je ne comprends pas le maintien de la règle archaïque qui donne le monopole de la présentation des candidats au premier tour des élections aux 5 grandes centrales syndicales issues de la guerre.
Si l'on veut revivifier la démocratie sociale, il faut alors rendre à chacun le droit imprescriptible de se présenter librement à une élection. À qui viendrait-il l'idée d'obliger aux élections législatives les Français à voter pour la démocratie chrétienne ou la SFIO ?
Je veux que l'UMP innove dans la recherche d'une plus grande justice ou d'une meilleure équité. Je ne vous cache pas mon exaspération devant ces discours interminables qui évoquent invariablement les mots justice sociale, progrès social, politique sociale. Ces mots, à force d'être scandés, sont devenus vides de sens aux yeux des Français qui voient que, dans la réalité, notre système d'intégration est totalement en panne, que notre ascenseur social est totalement grippé, notre modèle éducatif est chancelant et que les inégalités, loin de régresser, progressent. Voilà la réalité que nous devons regarder en face.
Comment renverser la vapeur ? Je ne vois qu'un moyen : avoir le courage de faire, ce que l'on déteste le plus en France, des choix. Il faut arrêter de promettre à tout le monde, car la France n'en a ni les moyens financiers, ni la latitude politique. Le résultat de notre absence de courage est qu'en donnant à tout le monde, on saupoudre des moyens par définition limités. À l'arrivée, tout le monde est perdant.
Je vous propose une autre logique, celle que je n'hésite pas à appeler discrimination positive à la française. Le principe est simple : ceux qui cumulent le plus de handicaps, on va les aider massivement, pour leur donner le maximum de chances de s'en sortir.
La République, ce n'est pas donner à chacun la même chose, c'est, pour l'Etat, donner à chacun selon ses handicaps et selon ses mérites. C'est par l'équité que l'on arrive à l'égalité.
L'UMP doit devenir la formation qui incarne la volonté de réduire les injustices dans notre pays. De les réduire dans les faits, concrètement et pas dans les discours ou les slogans. Et s'il m'arrive de plaider pour cette discrimination positive à la française, ce n'est pas par fascination pour le système américain, c'est encore moins pour promouvoir un communautarisme que je combats, mais je veux mettre chacun d'entre vous devant ses responsabilités.
Je suis convaincu que l'on ne peut pas continuer à commenter les inégalités, il faut les réduire si l'on ne veut pas créer les conditions d'un drame pour la France dans les 20 ou 30 années qui viennent. Voilà ma conviction la plus profonde.
Cette égalité des chances que nous voulons pour chaque Français, nous l'aurons en donnant plus aux territoires qui en ont moins, en aidant davantage les Français qui ont le plus de handicaps, en tournant le dos au saupoudrage, au nivellement et à l'assistanat. Voilà le nouveau modèle social français que j'appelle de mes vux.
La liberté ensuite. La liberté, ce ne doit pas seulement être le mot magique pour lequel tant d'hommes, à travers le monde, ont payé le prix le plus cher. La liberté, à l'UMP, ce ne doit pas être un slogan, ce doit devenir une réalité. Au plus profond de moi-même, je crois que rien d'utile ne peut se construire sans un débat préalable et approfondi.
L'UMP doit être le lieu des grands débats de la société française.
Pendant que les socialistes s'invectivent, règlent leurs comptes, se livrent à des exclusions et des anathèmes, je vous demande de vous passionner et de vous engager dans le débat d'idées. Chaque mois nous organisons des conventions, je souhaite que les fédérations se saisissent des sujets traités en apportant leur contribution à la réflexion initiale.
C'est ensemble que nous dessinerons la France que nous voulons. À l'UMP, il ne doit y avoir aucun sujet tabou. À l'UMP, on doit pouvoir parler de tout. Le droit à l'expression et à la parole doit être reconnu à chaque militant, à chaque élu et à chaque cadre. Je dénie à quiconque la possibilité de cadenasser un débat, de le réduire ou pire de l'interdire.
À l'UMP, la parole est libre.
S'il y a si peu d'adhérents dans les formations politiques françaises, c'est parce que, trop souvent, les Français ont le sentiment que dans les partis politiques la parole est confisquée.
Vous êtes libre et, d'abord, vis-à-vis de la direction du mouvement et notamment de son président. Je n'ai pas à vous imposer mon point de vue et, à l'inverse, je ne renoncerai pas à mes convictions, même si elles sont minoritaires. Il ne s'agit pas de construire un club de partisans, tout entier dévoué à ma cause ou pire un clan ou une secte. Il s'agit de bâtir une formation diverse où chacun d'entre vous pourra trouver sa place.
En tant que président du mouvement, je dois convaincre de la pertinence de la ligne stratégique que je propose, mais vous devez être libre de l'amender, de la contester ou de la soutenir. En clair, on n'est pas obligé de penser systématiquement comme moi, uniquement parce que j'ai été élu président de l'UMP, ça c'est de la vieille politique.
L'UMP est libre et je le dis à nos présidents de groupes, vis-à-vis du gouvernement que nous soutenons. Je suis reconnaissant à Dominique de Villepin d'avoir retenu nombre de nos propositions et, en même temps, d'avoir compris et accepté que notre formation politique puisse aller plus loin et dire davantage que ce que fait et dit le gouvernement.
L'UMP n'est pas derrière le gouvernement, elle est devant le gouvernement, pour fixer une perspective, pour gagner la bataille de la communication, pour porter des thèmes novateurs et pour convaincre notre électorat.
C'est ainsi que, gouvernement et parti majoritaire, nous couvrirons le spectre le plus large. L'UMP doit être la voix de nos électeurs. L'UMP doit être l'expression des souhaits politiques des Français, y compris lorsque ces derniers manifestent des impatiences. L'UMP n'est pas une caserne ou régnerait une discipline de fer, c'est un lieu de liberté où l'on peut débattre de tout sans être accusé de manquer à la solidarité ou même à la loyauté.
Dans le passé, on aurait été bien inspiré d'écouter ceux de nos amis qui criaient " casse-cou ", parce qu'ils avaient raison et les autres avaient tort. Voilà ce que je souhaite pour l'UMP.
C'est dans cet esprit que, faisant campagne pour le oui au référendum, j'ai cependant tout fait pour que les partisans du non, bien que minoritaires chez nous, soient respectés et bénéficient de moyens d'expression. À l'arrivée, cela nous a permis de préserver notre unité sans la moindre difficulté. Là aussi, comparez avec l'état des socialistes et vous verrez que notre choix fut le bon. On a toujours raison de respecter la minorité dans un parti politique, si l'on ne veut pas se réveiller avec la gueule de bois le lendemain des défaites.
Je n'évacue aucun sujet difficile.
C'est dans cet esprit que je vous ai proposé de prendre sur la Turquie et sur l'Europe une position qui n'était pas celle du président de la République, mais qui correspondait à nos convictions et à celles de nos électeurs. Nous l'avons fait sans drame et sans que cela nous empêche par ailleurs de soutenir l'action de Jacques Chirac pour que son quinquennat soit une réussite pour la France et pour les idées que nous défendons.
Il faut dédramatiser les débats politiques. On peut être en désaccord sur l'intégration de la Turquie et, en même temps, soutenir l'action d'un président de la République.
On peut être en désaccord sur tel ou tel point et lui souhaiter, du fond du cur, de façon unanime, une bonne santé et lui dire : nous avons besoin de vous en pleine forme monsieur le Président. C'est ça la nouvelle politique, on dit ce que l'on pense, on fait ce que l'on dit et l'on dédramatise là où les drames n'amènent rien.
C'est dans cet esprit que je proposerai, dans quelques jours, que l'UMP soit plus ambitieuse que le gouvernement dans ses choix économiques et fiscaux, en proposant, par exemple, que nul contribuable en France ne puisse se voir prélever plus de 50 % de ce qu'il a gagné par son travail.
Franchement, si vous travaillez du 1er janvier au 1er juillet pour l'Etat, c'est déjà pas mal. Les six mois restant, vous travaillerez pour votre famille. Voilà la vision que nous avons de la société française.
Si cette règle a valeur constitutionnelle en Allemagne, pourquoi n'en serait-il pas de même en France ?
C'est dans cet esprit que je souhaite que l'UMP affirme son engagement de mettre en place un service minimum dans les services publics les jours de grève. Il est des moments où il convient d'arrêter de tourner autour des problèmes. Je souhaite que l'UMP soit du côté des usagers, pas du côté de ceux qui prennent en otage nos services publics.
C'est dans cet esprit que je soutiens ceux qui dénoncent les effets pervers de l'actuel ISF. Je crois les Français beaucoup plus lucides qu'on ne l'imagine. Que les plus riches payent davantage d'impôts : c'est juste et c'est normal. De ce point de vue, l'ISF est un bon impôt. Mais que ce même impôt pénalise l'emploi, entraîne la délocalisation d'entreprises, empêche les capitaux dont l'économie a besoin de prospérer en France, cela nous ne pouvons l'admettre.
Il ne faut pas avoir peur d'expliquer à l'opinion publique la réalité des enjeux. Cela s'appelle être courageux et le courage, cela paye toujours ! Chacun imagine que l'ISF est un très mauvais impôt et tous se mettent d'accord pour ne pas le dire aux Français. Qui croyez-vous que cela abuse ? Si c'est un mauvais impôt, alors réformez-le ! Si c'est un bon impôt, alors dites-le ! Mais pas de solution de compromis qui nous fera perdre de tous les côtés du spectre politique.
C'est dans cet esprit que je souhaite que, dès l'automne, afin de lancer le mouvement, une expérimentation soit engagée dans nos universités pour leur donner enfin l'autonomie dont elles ont besoin.
Nos universités sont les seules en Europe à ne pouvoir accéder à des financements innovants. Elles sont les seules à ne pouvoir adapter librement leurs enseignements. Elles sont les seules à ne pas pouvoir prendre les initiatives auxquelles elles aspirent.
Résultat, les universités françaises régressent. Cette situation ne peut pas durer, nous voulons de l'autonomie pour nos universités.
C'est dans cet esprit que je souhaite que nous proposions une " refonte " de la PAC. Je crois au pouvoir vert. Je crois en l'avenir de l'agriculture française, mais je n'accepte pas l'évolution de ces dernières années, qui a conduit à la fonctionnarisation de nos paysans. Jamais ils n'ont voulu cette culture de l'assistanat. Les agriculteurs sont des producteurs, ils veulent vivre du prix de leurs productions. Voilà le message de l'agriculture française.
Ces prix doivent être décents et c'est possible si l'Europe veut renouer avec la préférence communautaire, qui n'est pas un gros mot, mais une ardente obligation.
C'est dans cet esprit que le moment venu nous réfléchirons à nos institutions et à notre pratique du pouvoir. Elle doit être plus simple, plus démocratique et plus efficace. Il y a beaucoup à faire pour moderniser notre République. Je vous l'ai dit, il n'y aura pas de sujets tabous et j'entends vous le prouver.
L'unité enfin. On l'invoque toujours et, en général quand on en parle c'est qu'il est déjà trop tard et que la division a fait des ravages.
L'unité d'un parti politique, alors que j'appartiens à un parti politique depuis 30 ans, ne s'impose pas et ne se décrète pas. L'unité n'est que la conséquence d'un état d'esprit, d'une volonté de vivre ensemble, de la certitude qu'auront tous les membres de notre famille qu'ils seront considérés, dans leur personne comme dans leurs convictions, avec loyauté.
L'UMP sera unie parce que ses grands choix stratégiques seront déterminés par des votes démocratiques, auxquels seront associés tous les militants.
Je ne veux plus d'une période qu'a connue notre famille notre famille politique, et à laquelle j'ai participé, où les arbitrages étaient rendus entre trop bons amis, sans tenir compte de l'opinion de l'ensemble des adhérents. Je le dis calmement, sereinement, tranquillement, mais fermement : cette époque appartient à un passé définitivement révolu.
Dans l'UMP d'aujourd'hui, il n'y a pas de conseillers occultes, de cénacle privilégié, il n'y aura ni combines ni arrangements. Nos grands choix stratégiques, comme nos choix de personnes, seront tranchés par des votes libres, transparents et démocratiques.
Je souhaite que soient appelés à participer à ces votes, le plus souvent possible, la totalité de nos adhérents. Ainsi, chacun comprendra qu'être adhérent de l'UMP, c'est être respecté, c'est avoir le droit de donner son opinion, c'est participer, en y étant associé, à toutes nos grandes décisions. C'est comme cela et pas autrement que nous deviendrons le grand parti démocratique de masse dont la France a besoin.
Nous l'avons montré à Paris, en organisant des primaires qui ont apaisé des tensions récurrentes depuis des années. Je le montrerai pour les présidentielles de 2007, où il n'y a pas de candidat auto désigné ou obligé, je veux parler de moi. Il y aura une concurrence saine, loyale et, je l'espère, de qualité. Et au final, c'est vous, les adhérents de l'UMP, qui aurez la responsabilité de choisir le meilleur, c'est-à-dire celui qui saura le mieux nous rassembler et nous faire gagner.
Je souhaite vous dire que nous n'avons rien à craindre de la concurrence. Elle seule permet d'étalonner les valeurs. Elle est incontournable pour celui qui veut prétendre à l'honneur de vous représenter dans la compétition ultime qu'est l'élection présidentielle. Une famille politique doit se réjouir de compter de nombreux talents en son sein. Songez avec tristesse à toutes celles qui n'en ont aucun.
J'ajoute que nos adhérents ont acquis des pouvoirs que personne ne pourra remettre en cause. Nous sommes en 2005 et, en 2005, on ne dirige pas une formation politique comme on pouvait le faire, il y a 30 ans. J'ai été élu par la volonté de nos militants, je n'ai pas l'intention de trahir leur confiance en les privant d'un pouvoir qu'ils m'ont au contraire demandé de conforter. Ce point ne supportera aucune discussion tant que nos adhérents le demanderont.
Nous organiserons en janvier 2007 un congrès ouvert à tous, où chacun pourra exprimer sa préférence quant au choix de notre candidat à l'élection présidentielle. Cela sera un événement de la vie politique nationale et cela donnera une légitimité et une force sans précédent à celui ou celle que vous aurez choisi pour être notre candidat.
Et c'est parce que notre mouvement sera authentiquement démocratique que la solidité de notre union ne sera remise en cause par personne. Notre unité sera d'autant plus solide qu'elle sera le résultat d'une attitude de respect, de loyauté et de responsabilité.
En tant que président de l'UMP, je suis le garant de son unité. Il va de soi qu'il me faut montrer l'exemple et m'astreindre au respect scrupuleux des règles que je viens de décrire.
Je voudrais terminer par quelques brèves remarques plus personnelles.
Il y a bien des années, j'ai fait le choix de consacrer ma vie à la politique. Jamais je n'ai eu à regretter ce choix. La politique m'a beaucoup donné. Elle m'a donné des émotions collectives, qui sont encore bien présentes dans mon cur et des amis fidèles et solides. Elle m'a fait connaître des inimitiés certaines, elle m'a autorisé des rencontres multiples, m'a ouvert à des sujets de passion et surtout elle m'a fait rencontrer une expérience humaine inégalée. Jeunes de l'UMP, qui aujourd'hui souhaitez vous engager pour assurer notre relève, votre choix est le bon. À votre tour, vous ne serez pas déçus.
Aujourd'hui, sans doute comme jamais, je suis conscient de mes responsabilités, je mesure chaque jour le poids qu'elles font peser sur mes épaules. C'est sans doute pour cela que j'assume mes fonctions avec davantage de gravité qu'auparavant.
J'ai pu, en outre, mesurer la dureté de certaines attaques et l'impudeur de certaines attitudes. Mais j'en fais le serment devant vous :
Rien, vraiment rien ; personne, vraiment personne ne m'empêchera d'aller jusqu'au bout de la mission que vous m'avez fixée.
Rien ni personne ne m'empêchera de mériter la confiance que me témoignent chaque jour tant de Français.
Rien et personne ne m'empêchera de tenter d'être à la hauteur des rendez-vous de 2007 pour notre famille politique.
Mes chers amis, je vous demande votre confiance, votre amitié, votre enthousiasme, votre engagement et, en retour, je vous donnerai le meilleur de moi-même.
Vive la France,
Vive la République.
(Source http://www.u-m-p.org, le 8 septembre 2005)